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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2979/2023

JTAPI/809/2024 du 22.08.2024 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : PERMIS DE CONSTRUIRE;REJET DE LA DEMANDE;REMISE EN L'ÉTAT;PROPORTIONNALITÉ;QUALITÉ POUR AGIR ET RECOURIR
Normes : LAT.24; LAT.24d.al2; Cst; LCI.129.lete; LPA.60.al1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2979/2023 et A/3136/2023 LCI

JTAPI/809/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 22 août 2024

 

dans la cause

 

Madame A______, Monsieur B______ et Monsieur C______, représentés par Me François BELLANGER, avocat, avec élection de domicile

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

 


EN FAIT

1.             La parcelle n° 1______ (ci-après : la parcelle) de la commune de D______ (ci-après : la commune), sise ______[GE], est située en zone agricole. À teneur du système d’information du territoire genevois (ci-après : SITG), elle ne comprend aucune surface d’assolement (ci-après : SDA).

2.             Selon le registre foncier, elle appartient à Madame E______ et à Monsieur F______ et abrite une habitation un logement de 292 m2 – soit le château de D______ (bâtiment n° 2______) -, un autre bâtiment (n° 3______) de 20 m2 et plus, ainsi que deux autres bâtiments (nos 4______ et 5______) de moins de 20 m2.

3.             Ses anciens propriétaires étaient Madame A______ et Messieurs B______ et C______ (ci-après : Mme A______ et consorts), feue Madame G______ en étant alors l’usufruitière.

4.             Par arrêté du ______ 1986 (n° 6______), le département des travaux publics, devenu depuis lors le département du territoire (ci-après : DT), a approuvé l’inscription du bâtiment n° 2______ à l’inventaire des immeubles dignes d’être protégés.

5.             Le ______ 2021, Mme G______ a déposé auprès de la Commission foncière agricole (ci-après : CFA) une requête en non-assujettissement de la parcelle à la loi fédérale sur le droit foncier rural du 4 octobre 1991 (LDFR - RS 211.412.11).

6.             Dans le cadre de cette procédure de désassujettissement, le DT a relevé la présence, sur la parcelle, de plusieurs constructions, installations et aménagements réalisés sans autorisation, ce qui a conduit à l’ouverture de la procédure d’infraction I-7______.

7.             Cette procédure d’infraction a notamment mené au prononcé par le DT, le 14 janvier 2022, d’une « proposition de décision » puis, le ______ 2022, d’une décision confirmant que la réalisation de cinq ouvrages présents sur la parcelle, parmi lesquels les objets K (portail) et N (clôture périphérique) étaient soumis à autorisation et ordonnant à Mme A______ et consorts de requérir une autorisation de construire pour ces objets.

8.             Par décision du ______ 2022, la CFA a prononcé le désassujettissement à la LDFR de la parcelle, retenant notamment qu’aucune activité agricole n’avait été effectuée sur celle-ci depuis son acquisition, dans les années 1950, par feu l’époux de Mme G______.

9.             Saisis de recours interjetés par Mme A______ et consorts contre la « proposition de décision » et la décision précitées, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), par jugement du ______ 2023 (JTAPI/8______), a notamment confirmé la décision du ______ 2022 s’agissant des objets K (portail) et N (clôture périphérique), qu’il a qualifiés de peu d’importance.

À teneur de l’état de fait de ce jugement, il ressortait notamment du rapport d’enquête établi le 14 décembre 2021 par le DT que, parmi les quinze constructions et installations dont la présence avait été constatée le 12 novembre 2021 sur la parcelle concernée :

-          des transformations ainsi que la construction d’une fosse digestive avaient été réalisés en 1958 sur le bâtiment n° 2______, conformément à l’autorisation DD 9______ du ______ 1958 ;

-          le bâtiment n° 3______ (couvert à outils) avait été autorisé par la DD 10______ du ______ 1970 ;

-          le bâtiment n° 5______ (agrandissement du dépôt à outils) avait été autorisé par la DD 11______ du ______ 1978 ;

-          les dossiers relatifs aux autorisations de construire DD 12______ du ______ 1942 portant sur un mur de clôture et DD 13______ du ______ 1959 concernant un mur avaient été détruits.

10.         Suite à ce jugement, entré en force en l’absence de recours, le conseil de Mme A______ et consorts a déposé, pour le compte de ces derniers, par le biais de leur architecte, Monsieur H______, une demande d’autorisation de construire - enregistrée par le DT le ______ 2023 sous le n° DD 14_____/1 - en vue de régulariser la clôture N et le portail K.

Était notamment joint un formulaire de requête, à teneur duquel les constructions concernées étaient situées à moins de 20 m de la lisière forestière, n’impliquaient pas de travaux dans le domaine vital de la végétation conservée et ne constituaient pas des ouvrages non-agricoles situés en zone agricole.

11.         Dans le cadre de l’instruction de cette demande :

-          la commune et la direction de l’information du territoire se sont prononcées favorablement sans observations les 28 avril et 30 mars 2023 ;

-          par préavis du 24 avril 2023, l’office de l’urbanisme (ci-après : OU) s’est prononcé défavorablement ; représentant des pièces essentielles du paysage rural caractérisé par les continuités de l’espace ouvert et les vues, les zones agricoles devaient en principe rester libres de clôtures et de tout obstacle visuel tel des haies continues. Ainsi, les portails et clôtures n’étaient conformes à l’affectation de la zone agricole que lorsqu’ils étaient strictement nécessaires dans le cadre d’une exploitation agricole, ici absente. La rubrique « remarques » précisait que l’OU s’en remettait au service compétent pour apprécier si ces installations contribuaient à la valeur patrimoniale du bâtiment principal, lui-même au bénéfice d’une mesure de protection patrimoniale. Le cas échéant, ces installations pourraient être légalisées en application de l’art. 27D de la loi d'application de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 4 juin 1987 (LaLAT - L 1 30), qui permettait des changements complets d’affectation. La pose d’un portail et d’une clôture pourrait être assimilée à un tel changement d’affectation ;

-          la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après : CMNS) a rendu, le 2 mai 2023, un préavis favorable. Au titre de conditions, il était précisé que le projet se trouvait sur une parcelle incluant le château de D______, inscrit à l’inventaire. S’il s’était agi d’un nouveau projet, elle aurait émis un préavis défavorable pour la clôture, qui altérait les qualités paysagères du site protégé, situé en zone agricole de surcroît. L’enceinte en grillage avec portail était installée depuis 60 ans. En sus de charmilles, étaient présentes des végétations de type laurèle, d’implantation visiblement récente, lesquelles avaient un impact négatif sur la valeur biologique et paysagère des haies vives, en supplantant la végétation indigène et empêchant le rajeunissement de la forêt. Quant au portail à ventaux opaques, son aspect s’écartait des pratiques courantes admises pour des sites de cette qualité architecturale et en rapport avec l’historicité du château. Ainsi, elle n’avait aucune objection à ce que les installations demeurent à titre précaire, sous conditions que tous travaux d’entretien sur cette clôture et ce portail et tous ajouts ou modifications de plantations soient soumis à l’approbation du service de monuments et des sites (ci-après : SMS). Était également souhaitée l’amélioration du besoin de privacité et la qualité paysagère ainsi que l’éradication des plantations d’espèces invasives. La clôture pourrait peu à peu être remplacée par la plantation de haies vives à haute valeur biologique. Il conviendrait également de proposer un portail à barreaudage traditionnel ajouré ;

-          le SMS s’est prononcé favorablement sous conditions et avec souhaits le 2 mai 2023, tout en se référant au préavis de la CMNS précité ;

-          par préavis du 12 avril 2023, l’office cantonal de l’eau (ci-après : OCEau) a requis la modification du projet. Aucune dérogation ne pouvait être accordée pour les installations sises dans la surface inconstructible ; l’espace du cours d’eau devait être respecté (art. 15 de la loi sur les eaux du 5 juillet 1961 (LEaux-GE - L 2 05)). Le projet - en partie situé dans la surface inconstructible au sens de l’art. 15 al. 1 LEaux-GE et dans l’espace réservé aux eaux au sens de l’art. 36a de la loi fédérale sur la protection des eaux du 24 janvier 1991 (LEaux - RS 814.20) - devait être adapté en conséquence ;

-          le 17 avril 2023, la commission consultative de la diversité biologique (ci-après : CCDB) s’est prononcée défavorablement. Il n’y avait pas matière à déroger à l’art. 11 loi sur les forêts du 20 mai 1999 (LForêts - M 5 10) ; toutefois, les installations, existantes depuis 60 ans, n’étaient pas préjudiciables à la lisière forestière ;

-          l’office cantonal de l’agriculture et de la nature (ci-après : OCAN) a rendu un préavis défavorable le 1er mai 2023. Les aménagements concernés n’étaient pas conformes à la zone, eu égard aux art. 16a de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700), 34 de l’ordonnance sur l’aménagement du territoire du 28 juin 2000 (OAT - RS 700.1) et 20 LaLAT. Il n’y avait pas matière à déroger à l’art. 11 LForêts pour le portail et la clôture, sis à moins de 20 m du cadastre forestier. Dans l’hypothèse où le DT écarterait son préavis défavorable ou autoriserait une partie des aménagements, toutes les précautions utiles devraient être prises afin de séparer l’espace vital des arbres avoisinant le chantier ;

-          par préavis du 30 mars 2023, la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC) s’est prononcée favorablement avec dérogation basée sur l’art. 27 LaLAT, sous réserve des instances spécialisées.

12.         Faisant suite aux préavis précités, M. H______ a demandé au DT, par courrier du 19 mai 2023, d’autoriser les deux ouvrages concernés.

Le château de D______ et sa propriété étaient reconnus au patrimoine et les deux ouvrages concernés, qui étaient parties à l’ensemble, devaient être évalués sous cet angle. Ces derniers, installés depuis au moins 1960, étaient intégrés dans la lecture du paysage, avec sa végétation qui délimitait le domaine. Ces constructions avaient été qualifiées de peu d’importance par le tribunal. La clôture N était insérée dans des haies principalement constituées de charmilles et n’était pas visible dans le paysage. Elle ne constituait en outre pas un obstacle pour la petite faune et ne comportait, dans la section près du ruisseau, pas de base en béton. Quant au petit portail K, bien visible, il faisait partie du lieu, terminant l’allée centrale et marquant l’accès à la campagne. Il n’était pas concevable qu’un tel domaine isolé n’ait pas été clos, afin notamment de créer une première ligne de protection contre les intrus et le vagabondage des animaux domestiques.

Était notamment joint un courrier de réponse adressé par Monsieur Antonio HODGERS, Conseiller d’État en charge du DT, au conseil de Mme A______ et consorts le 29 septembre 2022, rappelant qu’aucune remise en état n’avait été ordonnée à ce stade et que le dépôt d’une requête d’autorisation, tel qu’exigé par la décision du DT du ______ 2022, visait à tenter de légaliser la situation existante. Bien que ses services ne pouvaient le garantir à ce stade, une telle requête avait de fortes chances d’aboutir si l’on tenait compte de la protection patrimoniale dont bénéficiait le bien ainsi que des art. 27D LaLAT et 24 LAT.

13.         Par décision du ______ 2023, le DT, faisant siens les préavis de l’OU, de l’OCAN et de la CMNS, a refusé de délivrer l’autorisation DD 14_____/1, le projet n’étant pas conforme aux art. 16a, 24, 24c et 24d LAT.

L’OU s’était opposé au projet, relevant, à juste titre, que le portail et la clôture n’étaient pas strictement nécessaires à une exploitation agricole, de sorte qu’ils n’étaient pas conformes à la zone agricole. Il en avait été de même pour l’OCAN, étant rappelé que les propriétaires n’étaient pas agriculteurs. Les ouvrages précités n’ayant pas été érigés légalement, ils ne pouvaient bénéficier de la garantie de la situation acquise. Compte tenu du fait que le projet ne portait pas sur un bâtiment d’habitation, il n’entrait pas dans le champ d’application de l’art. 24d LAT. La CMNS avait en outre relevé que si elle avait dû se prononcer avant l’aménagement des installations, elle s’y serait opposée dès lors qu’elles altéraient la qualité du site.

14.         Par décision du ______ 2023 adressée à Mme A______ et consorts, le DT, faisant suite à la décision de refus d’autorisation du ______ 2023 et au jugement du tribunal du ______ 2023, a ordonné, en application des art. 129 ss LCI, le rétablissement d’une situation conforme au droit d’ici au 31 octobre 2023 en procédant à la suppression et à l’évacuation du portail K et de la clôture périphérique N, réalisés sans droit et qui ne pouvaient être maintenus en l’état.

15.         Par acte du 14 septembre 2023 enregistré sous le n° A/2979/2023, Mme A______ et consorts ont interjeté recours, sous la plume de leur conseil, devant le tribunal, à l’encontre de la décision de refus d’autorisation de construire du ______ 2023, concluant à son annulation et la délivrance de l’autorisation requise, sous suite de frais et dépens.

Bien qu’ils ne soient plus propriétaires de la parcelle, leur intérêt à recourir était actuel et digne de protection. Ils étaient parties à la procédure ayant abouti à la décision attaquée, dès lors qu’ils étaient requérants de l’autorisation litigieuse. Vu cette qualité, ils étaient directement touchés par la décision de refus. En outre, l’acte de vente conclu avec les nouveaux propriétaires comprenait une clause selon laquelle ils engageraient eux-mêmes les procédures d’autorisations de construire et de recours si nécessaire.

Le DT avait erré en se basant sur la législation actuelle et sur des préavis défavorables s’appuyant sur celle-ci pour refuser la régularisation des constructions. En 1960, époque de la réalisation du portail et de la clôture, la LEaux-Ge, les législations genevoises et fédérales sur les forêts ainsi que la LAT n’étaient pas encore en vigueur. L’entrée en vigueur de la loi fédérale sur la protection des eaux contre la pollution du 8 octobre 1971 (LPEP), qui marquait la séparation entre le territoire bâti et non bâti, était également postérieure à 1960. Seule la LCI du 27 avril 1940 était alors applicable. Or, cette dernière et son règlement d’application du 3 novembre 1942 ne prévoyaient pas de dispositions particulières quant à l’installation de portails ou clôtures mais, tout au plus, une clause d’esthétisme (art. 1 al. 1 let. a et 3 al. 1 LCI de 1940). Les deux dispositions précitées étant les seules applicables au moment de l’installation des objets K et N, elles constituaient le cadre juridique dans lequel l’autorisation litigieuse devait être examinée. Or une clôture composée de simples poteaux avec des fils de fer et un portail de 2 m fermant l’accès historique à la route constituaient les éléments les plus basiques d’une propriété d’une telle envergure en zone rurale. Il paraîtrait en outre invraisemblable, vu l’absence de nuisance au caractère ou à l’intérêt du site, que ces deux ouvrages de peu d’importance puissent faire l’objet d’un refus sous l’angle de la clause d’esthétisme de la LCI de 1940. Tant lors des importants travaux de rénovation de la propriété dans les années 60 que lors de sa mise à l’inventaire en 1986, aucune autorité n’avait contesté la présence de ces deux objets. Cette absence de réaction durant plus de 60 ans, notamment concernant le portail qui donnait sur le domaine public, confirmait le caractère indispensable de ces deux objets et leur admissibilité à l’époque.

Pour le surplus, la décision de refus violait l’art. 24 LAT, sur la base duquel une dérogation aurait dû lui être accordée. Le château, monument historique remarquable bâti au 18ème siècle, formait une unité avec le domaine qu’il surplombait, comme démontré par le chemin de graviers reliant le bâtiment principal aux routes agricoles goudronnées. Ainsi, la présence de la clôture N et du portail K était imposée par leur destination depuis plusieurs siècles. Il était indiscutable qu’un tel domaine avait été clôturé, ne serait-ce que par des planches de bois avant la clôture métallique de 1960, et son accès principal était au moins fermé par un portail. L’existence de ces éléments, bien que contraires à la zone agricole, se justifiait ainsi par des conditions particulières historiques. Les installations querellées étaient indéniablement liées à la valeur culturelle du château protégé, comme le laissait d’ailleurs entendre l’OU à mi-mots dans son préavis. Dans le même sens, la CMNS avait admis le maintien du grillage et du portail au vu de leur lien avec ce domaine historique et avait même émis des recommandations en cas de remplacement du portail. Enfin, aucun intérêt prépondérant ne s’opposait à l’admission d’une dérogation en application de l’art. 24 LAT. Les installations querellées n’étaient pas préjudiciables à la lisière forestière, comme rappelé par la CCDB ; leur emprise au sol était anecdotique et leur existence sans remise en question pendant plus de 60 ans démontraient leur impact inexistant sur l’environnement. Enfin, vu le lien intrinsèque entre le château mis à l’inventaire et les deux objets litigieux, les conditions de délivrance d’une autorisation sur la base de l’art. 24d al. 2 LAT étaient également remplies.

Une violation du principe de la bonne foi était également à déplorer. Le tribunal avait constaté, dans son JTAPI/8______, que les bâtiments nos 5______ et 3______ avaient été autorisés, respectivement en 1978 et en 1970. Ainsi, à deux reprises, le DT avait autorisé des constructions sur le site sans soulever la moindre objection quant au portail K et à la clôture N, laissant s’écouler plus de 60 ans avant d’attirer leur attention sur les objets querellés. Ils pouvaient donc se fier de bonne foi à la conformité au droit desdites installations. De plus, dès lors que le dossier relatif à la DD 13______ du ______ 1959 - soit une date très proche de 1960 - avait été détruit, le DT faisait preuve de mauvaise foi en leur reprochant de ne pas pouvoir prouver que les constructions litigieuses avaient, à l’époque, été autorisées. Partant, les exigences du département et son refus de régulariser ces constructions de peu d’importance pour procéder à une application stricte et disproportionnée de la loi violaient le principe de la bonne foi. Pour le surplus, le DT avait été contraint de déformer le préavis de la CMNS, pourtant favorable, et de passer sous silence l’absence d’impact négatif sur la lisière forestière relevée par la CCDB. L’appréciation du DT de ces préavis, sélective et contraire à leur contenu, démontrait le malaise de ce dernier face à son inaction depuis 63 ans. En conclusion et au regard notamment de la jurisprudence fédérale (arrêt 1C-197/2021 du 12 novembre 2021 consid. 2.1.4) et cantonale (ATA/77/2023 du 24 janvier 2023), ils pouvaient se prévaloir de leur bonne foi en relation avec l’écoulement du temps et la tolérance active, voire la passivité, des autorités depuis 1960.

Enfin, la décision entreprise violait le principe de proportionnalité. L’ordre de démolition du portail et de la clôture ne permettrait pas d’atteindre le but d’intérêt public visé, soit la préservation de la zone agricole, dès lors que la parcelle concernée ne contenait aucune SDA et n’était plus affectée à l’agriculture depuis près d’un siècle. En outre, ces objets n’étaient pas préjudiciables à la lisière forestière, comme rappelé par la CCDB. Sous l’angle de la nécessité, le DT aurait pu envisager une mesure moins incisive que la démolition du portail, en ordonnant notamment sa modification afin de prendre en compte le souhait de la CMNS et de préserver l’unité d’intérêt patrimonial entre le domaine et son bâtiment principal. Les deux ouvrages concernés n’étaient pas d’importance suffisante pour justifier un ordre de démolition : la clôture périphérique N en métal de 460 mètres linéaires (ci-après : ml) était constituée de poteaux et de fils de fer entremêlés aux éléments naturels qui la côtoyaient depuis plus de 60 ans et sa démolition aurait l’effet inverse au but visé puisque les travaux d’enlèvement porteraient une atteinte regrettable et disproportionnée au milieu naturel au lieu de le préserver. Le portail K, de 3.50 ml, fermait, depuis 1960, l’accès à la propriété entre la route communale goudronnée et le chemin en graviers bordé d’arbres, constituant un accès historique du domaine. Il n’empiétait pas sur la nature et était nécessaire pour assurer la protection d’un bâtiment mis à l’inventaire et empêcher les intrusions de cambrioleurs, de curieux indélicats ou d’animaux. Il était démesuré de priver des propriétaires des prérogatives élémentaires de garantie de la propriété, soit la privacité et la sécurité. Enfin, la suppression du portail impliquerait un trou béant, qui devrait être comblé par de la végétation alors que l’accès par le chemin, fermé par le portail K, était indispensable aux paysagistes qui entretenaient le parc du château.

Étaient notamment joints :

-          un courrier rédigé le 13 septembre 2023 par I______ SA, confirmant avoir besoin du portail au fond du jardin pour amener les camions et broyeurs nécessaires pour enlever la grande quantité de végétation mortes et d’arbres coupés, susceptibles de tomber et de causer des dégâts. Dans ce parc comprenant plus de 80 arbres, il était inconcevable d’effectuer les travaux d’entretien nécessaires à pied depuis l’entrée principale de la propriété et elle avait besoin de cet accès ;

-          l’acte notarié de vente à terme de la parcelle conclu le 1er mars 2023 entre Mme A______ et consorts et Mme E______ et M. F______ - prévoyant que la signature de l’acte opérant le transfert de propriété aurait lieu au plus tard le 4 avril 2023 -, à teneur duquel (art. 14 « État ») Mme A______ et consorts allaient engager à leurs frais les procédures nécessaires à leur choix, notamment la dépose d’une demande d’autorisation pour valider les objets K et N. Les acquéreurs étaient informés de ces procédures et de l’absence de garantie de leur résultat et autorisaient les vendeurs notamment à déposer, à leurs frais, une demande d’autorisation de construire pour le maintien des objets K et N, que ce soit au nom des vendeurs ou au nom et pour le compte des acquéreurs. Ils libéraient les vendeurs de toute responsabilité notamment si l’autorisation ne devait pas être délivrée pour ces objets. Même s’ils acceptaient que ceux-ci puissent ne pas être autorisés, les acheteurs avaient un intérêt à ce qu’ils le soient pour éviter leur démolition. Ils souhaitaient donc que la procédure d’autorisation soit menée à son terme par les vendeurs à leurs frais.

16.         Par acte du 27 septembre 2023 enregistré sous le n° A/3136/2023, Mme A______ et consorts ont également interjeté recours, sous la plume de leur conseil, à l’encontre de l’ordre de remise en état du ______ 2023, concluant, préalablement, à la suspension de la procédure jusqu’à droit connu sur leur recours dans la cause A/2979/2023 et à ce qu’ils soient autorisés à compléter leur recours une fois droit connu sur leur recours dans la cause A/2979/2023 et, principalement, à l’admission de leur recours et à l’annulation de la décision attaquée, sous suite de frais et dépens.

La qualité pour recourir devait leur être reconnue, pour les motifs exposés dans leur recours dans la cause A/2979/2023, ce d’autant que la décision de remise en état litigieuse aurait pour effet, une fois exécutée, de rendre sans objet le recours déposé par leurs soins contre le refus d’autorisation.

La suspension de la présente cause devait être prononcée jusqu’à droit connu sur leur recours dans la cause A/2979/2023 et si ce dernier devait être rejeté, un nouveau délai d’exécution devrait leur être imparti. Si le recours formé contre la décision de refus de la DD 14_____/1 était admis, la décision de remise en état contestée deviendrait caduque, puisqu’elle porterait alors sur des éléments érigés légalement. À l’inverse, procéder à la remise en état rendrait sans objet le recours contre le refus d’autorisation et provoquerait la destruction irréversible des objets litigieux.

La décision querellée était disproportionnée. Pour les motifs exposés dans le recours interjeté dans la cause A/2979/2023, l’ordre de démolition du portail et de la clôture ne permettait pas d’atteindre le but d’intérêt public visé. Une mesure moins incisive que la démolition du portail aurait pu être ordonnée. Les ouvrages querellés n’étaient pas d’une importance suffisante pour justifier qu’une démolition soit ordonnée plus de 60 ans plus tard. La remise en état de la clôture aurait l’effet inverse du but visé et le portail K n’empiétait pas sur la nature et était nécessaire pour empêcher les intrusions et assurer la protection du bâtiment inscrit à l’inventaire. Les conséquences du refus d’autorisation et de la remise en état en découlant constituaient une charge insupportable pour eux en comparaison de ses effets supposément positifs, portait atteinte à leur garantie de la propriété, aurait une influence négative sur les lieux et aboutirait à un résultat contraire à celui visé.

17.         Dans ses observations du 20 novembre 2023 dans la cause A/2979/2023, le DT s’en est rapporté à justice quant à la recevabilité du recours et a conclu, sur le fond, à son rejet, sous suite de frais.

C’était à juste titre que la décision de refus querellée avait examiné la situation sous l’angle du droit actuel et non de celui applicable lors de l’édification des constructions concernées. De plus, tous les domaines historiques n’étaient pas fermés par des clôtures et portails. En outre, dès lors que la LEaux était en vigueur depuis 1961 et que la date exacte de réalisation des deux ouvrages concernés n’avait pas pu être déterminée, il ne pouvait être exclu que cette loi ait effectivement été applicable lors de l’édification des installations. En tout état, la loi genevoise sur les forêts publiques et privées du 2 juillet 1954 et la loi fédérale sur la police des forêts, étaient applicables. En outre, les recourants n’avaient pas démontré que leur projet respectait la loi générale sur les routes, la voirie et les cours d’eau du 15 juin 1895, la loi d’application du 5 octobre 1918 de la loi fédérale sur les forces hydrauliques, la loi décrétant du domaine public les cours d’eau souterrains et nappes d’eau souterraines du 13 septembre 1939 ou encore la loi pour l’entretien des cours d’eau du 26 novembre 1949. Son absence de réaction ne constituait pas un indice d’admissibilité des installations litigieuses, sur lesquelles il n’avait jamais eu à se déterminer, vu l’absence de demande d’autorisation de construire y relative.

Les conditions de l’art. 24 LAT n’étaient pas remplies. Rien n’imposait, ni en pratique ni historiquement, que le domaine soit clos par une clôture et un portail, comme le démontrait la précision de la CMNS selon laquelle elle aurait émis un préavis défavorable s’il s’était agi d’un nouveau projet. Comme relevé par l’OCAN et l’OCEau, les installations n’étaient pas admissibles au regard de la forêt et du cours d’eau sis à proximité.

Le principe de la bonne foi était respecté. Les autorisations DD 10______ et DD 11______ ne portaient pas sur le portail ni sur la clôture et ceux-ci ne figuraient pas sur les plans de ces autorisations, comme démontré par lesdits plans, joints. Il n’avait donc raisonnablement pas à examiner, dans le cadre de ces requêtes, lesdits ouvrages, ce d’autant que son attention n’avait pas été attirée sur ceux-ci. Aucune promesse concrète que les installations pouvaient être réalisées et conservées n’avait été émise et les recourants ne démontraient pas s’être fondés sur de prétendues assurances pour prendre des dispositions. L’écoulement du temps était sans pertinence, la prescription trentenaire ne s’appliquant pas hors zone à bâtir. L’ATA/77/2023, très spécifique, différait de la présente cause et la tolérance de l’État qui avait été retenue ne s’appliquait pas au présent cas, qui concernait un portail et une clôture sans lien avec les installations autorisées par les DD 10______ et DD 11______.

Enfin, le grief de violation du principe de proportionnalité n’entrait pas en ligne de compte s’agissant de l’octroi d’une autorisation de construire.

18.         Dans ses observations du 20 novembre 2023 dans la cause A/3136/2023, le DT s’en est rapporté à justice quant à la recevabilité du recours et a conclu, sur le fond, à son rejet, sous suite de frais. Il s’est en outre opposé à la suspension de la cause – tout en proposant sa jonction avec la cause A/2979/2023 – ainsi qu’à l’octroi aux recourants d’un délai supplémentaire pour compléter leur recours.

Le principe de proportionnalité était respecté. La loi avait également pour but de préserver le paysage, notamment en évitant la prolifération, hors zone à bâtir, d’installations qui n’y avaient pas leur place, indépendamment de la présence de SDA. La transformation du portail existant en un portail à barreaudage traditionnel ajouré ne constituerait pas une mesure moins incisive et ce n’était pas la solution proposée dans le cadre de la DD 14_____/1. C’était uniquement car le portail et la clôture existaient depuis plusieurs années que la CMNS avait indiqué les tolérer de manière précaire, étant relevé qu’il n’incombait pas à celle-ci de se prononcer sur le sujet. Ni l’OCAN ni la CCDB n’avaient relevé d’atteinte sur le milieu naturel en raison de l’enlèvement de la clôture. Aucun motif ne justifiait que les intérêts privés des recourants prévalent sur l’intérêt public à la préservation de la zone agricole. Le château de D______ et son périmètre n’avaient jamais été conçus avec des murs d’enceinte ou des clôtures et le portail et la clôture concernés n’avaient pas vocation à préserver la sécurité, la végétation pouvant remplir ce rôle. L’entreprise de paysagisme pourrait accéder à la parcelle par d’autres entrées.

19.         Par réplique du 22 janvier 2024 dans la cause A/2979/2023, les recourants ont persisté dans leurs conclusions, tout en sollicitant la suspension de la procédure jusqu’à droit connu sur le nouveau régime légal des constructions illicites en zone agricole, pour des motifs d’opportunité et d’économie de procédure.

La révision de la LAT prévoyant la réintroduction de la prescription trentenaire en zone agricole (art. 25 al. 5 nouvelle LAT), adoptée par le parlement le 29 septembre 2023, entrerait en vigueur à l’issue du délai référendaire au 15 février 2024 et autoriserait le maintien des constructions litigieuses, qui dataient de plus de 30 ans. En effet, la présence du portail K ressortait de la photo aérienne de 1954 – jointe – issue du site internet de cartographie de la Confédération et une comparaison avec la photographie actuelle démontrait que ce portail n’avait pas changé de place. Quant à la clôture N, l’on devinait sa présence sur une vue aérienne de 1967 – également jointe – tirée du site internet précité. Même s’il était impossible d’identifier une clôture périphérique sur une photographie aérienne datant de près de 60 ans, il était concevable, par faisceau d’indices, que cette clôture avait été installée simultanément aux haies bordant la propriété. En suivant le tracé de la délimitation actuelle de la parcelle, les haies qui apparaissaient pour la première fois sur la photographie aérienne de 1967 correspondaient exactement à cette délimitation. Compte tenu de l’enchevêtrement de la clôture auxdites haies, il convenait d’admettre, avec une vraisemblance confinant à la certitude, que toutes deux avaient été installées à la même époque. Ainsi, les objets K et N ayant été installés depuis plus de 30 ans, dès l’entrée en vigueur de la nouvelle LAT, l’action du DT visant à exiger leur remise en état serait prescrite.

20.         Par réplique du 22 janvier 2024 dans la cause A/3136/2023, les recourants, reprenant les éléments formulés dans le cadre de leur réplique dans la cause A/2979/2023, ont persisté dans leurs conclusions, tout en sollicitant la suspension de la procédure jusqu’à droit connu dans la procédure A/2979/2023 et jusqu’à l’entrée en vigueur de la nouvelle LAT, pour les motifs exposés dans sa réplique dans la cause A/2979/2023. Ils s’opposaient à la jonction des deux procédures.

Ils avaient sollicité un délai supplémentaire pour compléter leur recours, en application de l’art. 65 al. 4 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), afin de pouvoir contester l’ordre de démolition à l’aune des éléments nouveaux et du raisonnement du tribunal quant au refus de délivrer l’autorisation de construire. Leur but n’était donc pas de prolonger indûment le délai de recours, qu’ils avaient d’ailleurs respecté par le biais d’une contestation motivée sur la base des éléments à leur disposition.

21.         Par duplique du 14 février 2024 dans la cause A/2979/2023, le DT a persisté dans ses conclusions.

Il peinait à apercevoir la clôture périphérique sur la photographie de 1967, les recourants reconnaissant d’ailleurs l’impossibilité d’identifier une clôture sur une orthophotographie datant de près de 60 ans. Le fait qu’une haie avait été plantée ne plaidait pas en faveur de la mise en place d’une clôture et il en allait de même de l’enchevêtrement de ces dernières. En tout état, la procédure portait sur un refus d’autorisation de construire et non sur un ordre de remise en état, étant rappelé que la prescription trentenaire n’avait pas pour conséquence de légaliser une situation, mais s’opposait tout au plus à une remise en état des lieux. Quoi qu’il en soit, une telle prescription n’était actuellement pas applicable en zone agricole. L’adoption de la révision de la LAT et l’absence de référendum ne modifiaient pas la situation, puisque l’entrée en vigueur de la nouvelle LAT n’était pas prévue avant juillet 2025. Dans l’intervalle, rien ne justifiait une application anticipée de cette loi ni une suspension de la procédure jusqu’à son entrée en vigueur.

22.         Par duplique du 14 février 2024 dans la cause A/3136/2023, le DT a persisté dans ses conclusions.

Pour les motifs exposés dans sa duplique dans la cause A/2979/2023, la suspension de la procédure dans l’attente de l’adoption de la nouvelle LAT et/ou jusqu’à droit connu dans la cause A/2979/2023 ne se justifiait pas.

23.         Par écriture spontanée du 23 février 2024 dans la cause A/3136/2023, les recourants ont confirmé que le portail K était visible sur la photo aérienne produite. De plus, une propriété historique avec un chemin débouchant sur un accès donnant sur une route bordée par deux piliers en pierre possédait généralement un accès fermé par un portail. Si nécessaire, M. B______ était disposé à confirmer oralement que le portail et la clôture existaient il y a plus de 30 ans lorsque son père habitait le domaine, en compagnie de plusieurs chiens, qui nécessitaient la présence de ces installations. Son père étant né en 1906, il eut été aberrant qu’il ait commencé à faire construire ces éléments à un âge déjà avancé.

Aucun référendum n’avait été déposé contre la nouvelle version de la LAT. En outre, son art. 25 al. 5 relatif au rétablissement de la prescription trentenaire en zone agricole serait d’application immédiate, dès lors qu’il ne nécessitait aucune disposition d’exécution. Ainsi, même si la modification de la LaLAT n’entrait pas immédiatement en vigueur, ce délai ne concernerait pas le futur art. 25 al. 5 LAT. Partant, il était disproportionné d’ordonner la démolition de constructions dont le législateur fédéral avait admis la régularisation du fait de la prescription trentenaire. Aller à l’encontre de cette nouvelle loi serait arbitraire et empêcherait l’application d’une protection votée par le Parlement juste avant son entrée en vigueur.

EN DROIT

1.             Le tribunal connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la LCI (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Conformément à l'art. 70 al. 1 LPA, l'autorité peut, d'office ou sur requête, joindre en une même procédure des affaires qui se rapportent à une situation identique ou à une cause juridique commune.

3.             En l’espèce, les causes A/2979/2023 et A/3136/2023 se rapportent au même complexe de faits, soit la présence, sur la parcelle n° 1______, du portail K et de la clôture périphérique N. En outre, ces deux causes visent deux décisions qui sont en lien. En effet, l’ordre de remise en état rendu par le DT le ______ 2023 - objet du recours n° A/3136/2023 - est directement lié à la décision de refus d’autorisation de construire du ______ 2023 - attaquée dans le cadre de la procédure A/2979/2023 -, à laquelle il se réfère d’ailleurs explicitement. Dès lors, compte tenu du fait qu’elles soulèvent des questions connexes, il se justifie de joindre les causes A/2979/2023 et A/3136/2023 sous le n° de cause A/2979/2023, afin qu'il soit statué au moyen d'un seul et même jugement.

4.             Eu égard au fait que les conditions d’une jonction sont, comme vu supra, remplies, la conclusion des recourants tendant à la suspension de la cause A/3136/2023 jusqu’à droit connu dans la cause A/2979/2023 devient sans objet.

5.             S’agissant de la conclusion des recourants tendant à ce qu’ils soient autorisés à compléter leur recours une fois droit connu sur leur recours dans la cause A/2979/2023, elle est également devenue sans objet, vu la jonction des deux procédures ordonnée supra.

6.             Les recourants ont en outre sollicité, dans leurs répliques, la suspension des deux causes pendantes dans l’attente de l’entrée en vigueur du nouveau régime légal applicable aux constructions illicites en zone agricole, soit notamment le futur art. 25 al. 5 LAT prévoyant la réintroduction de la prescription trentenaire en zone agricole.

7.             À ce propos, le tribunal retiendra que la suspension de la présente procédure requise par les recourants jusqu’à l’entrée en vigueur de la modification législative précitée, à laquelle l’autorité intimée s’est au demeurant opposée, ne se justifie nullement, sauf à retarder inutilement le prononcé d’un jugement dans la présente cause, qui peut être tranchée en l’état, conformément au développement qui sera exposé ci-après dans le cadre de l’examen du bien-fondé de l’ordre de remise en état au regard de la modification législative précitée. Par conséquent, la demande de suspension dans l’attente de l’entrée en vigueur de la LAT dans sa nouvelle version est rejetée.

8.             Interjetés devant la juridiction compétente dans le délai fixé par la loi, les recours initialement enregistrés sous les nos de causes A/2979/2023 et A/3136/2023, qui contiennent la désignation de l’acte attaqué et les conclusions des recourants, sont recevables de ce point de vue, en application des art. 62 à 65 LPA.

S’agissant du recours contre l’ordre de remise en état, dans le cadre duquel les recourants avaient sollicité l’octroi d’un délai pour compléter cet acte, il sera constaté que ce dernier remplit en l’état les conditions de recevabilité posées par les art. 62 à 65 LPA, même en l’absence du complément requis.

9.             Se pose toutefois la question de savoir si les recourants, qui, lors du dépôt des recours précités, n’étaient plus propriétaires de la parcelle accueillant les installations litigieuses, possèdent la qualité pour recourir sous l’angle de l’art. 60 LPA.

10.         La qualité pour recourir est notamment reconnue à toute personne atteinte par la décision attaquée et qui dispose d'un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (art. 60 al. 1 let. b LPA).

Cette notion d'intérêt digne de protection s'interprète à la lumière de la jurisprudence fédérale rendue en application de l'art. 89 al. 1 LTF (arrêts du Tribunal fédéral 1C_382/2020 du 16 novembre 2020 consid. 4.1 ; 1C_246/2016 du 10 octobre 2016 consid. 3.1 ; 1C_38/2015 du 13 mai 2015 consid. 3.2 ; ATA/1050/2016 du 13 décembre 2016 ; ATA/289/2014 du 29 avril 2014 consid. 3).

11.         L'intérêt digne de protection, qui ne doit pas nécessairement être de nature juridique, un intérêt de fait étant suffisant (cf. ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; 143 II 506 consid. 5.1 ; 142 V 395 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_206/2019 du 6 août 2019 consid. 3.1), réside dans le fait d'éviter de subir directement un préjudice de nature économique, idéale, matérielle ou autre, qui serait causé par la décision entreprise. Il implique que le recourant, qui doit pouvoir retirer un avantage réel et pratique de l'annulation ou de la modification de la décision, doit se trouver dans une relation spécialement étroite et digne d'être prise en considération avec l'objet de la contestation et doit être touché de manière directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grandes que la généralité des administrés, de façon à exclure l'action populaire (cf. ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; 139 II 499 consid. 2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_442/2020 du 4 mars 2021 consid. 1.2.1 ; 1C_382/2020 du 16 novembre 2020 consid. 4.1 ; 1C_554/2019 du 5 mai 2020 consid. 3.1 ; 1C_206/2019 du 6 août 2019 consid. 3.1 ; 1C_27/2018 du 6 avril 2018 consid. 1.1). Tel n'est notamment pas le cas de celui qui n'est atteint que de manière indirecte ou médiate (ATF 138 V 292 consid. 4 ; 130 V 202 consid. 3 ; 133 V 188 consid. 4.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1054/2016, 2C_1059/2016 du 15 décembre 2017 consid. 2.2 ; ATA/988/2016 du 22 novembre 2016 consid. 2d).

12.         L'intérêt digne de protection du recourant à ce que la décision attaquée soit annulée ou modifiée, respectivement à faire examiner les griefs soulevés, suppose aussi qu'il soit actuel (cf. ATF 144 IV 81 consid. 2.3.1 ; 142 I 135 consid. 1.3.1 ; 139 I 206 consid. 1.1 ; 138 II 42 consid. 1 ; 135 I 79 consid. 1 ; ATA/1094/2020 du 3 novembre 2020 consid. 2 ; ATA/201/2017 du 16 février 2017 consid. 2). De cette manière, les tribunaux sont assurés de trancher uniquement des questions concrètes et non de prendre des décisions à caractère théorique, ce qui répond à un souci d'économie de procédure (cf. ATF 144 IV 81 consid. 2.3.1 ; 140 IV 74 consid. 1.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_412/2020 du 5 mai 2020 consid. 3.1 ; 1B_438/2016 du 14 mars 2017 consid. 2.1).

L'existence d'un intérêt actuel s'apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours. Celui-ci est irrecevable lorsque l'intérêt actuel fait défaut au moment du dépôt du recours ; en revanche, si cet intérêt disparaît en cours de procédure - parce qu'un fait nouveau affecte l'objet du litige et lui enlève tout intérêt -, le recours devient sans objet et doit être rayé du rôle (cf. ATF 142 I 135 consid. 1.3.1 ; 139 I 206 consid. 1.1 ; 137 I 23 consid. 1.3.1 et les références ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_611/2020 du 3 août 2020 consid. 4.1 ; 8D_6/2019 du 4 février 2020 consid. 1.3).

13.         Il incombe à la personne concernée d'alléguer, sous peine d'irrecevabilité de son recours, les faits propres à fonder sa qualité pour agir, lorsqu'ils ne ressortent pas à l'évidence de la décision attaquée ou du dossier en cause (cf. not. ATF 139 II 499 consid. 2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_554/2019 du 5 mai 2020 consid. 3.1 ; 1C_96/2017 du 21 septembre 2017 consid. 2.1 ; 1C_243/2015 du 2 septembre 2015 consid. 4.1 ; ATA/1021/2016 du 6 décembre 2016 consid. 3c).

14.         En l’espèce, s’agissant tout d’abord du recours contre la décision de refus d’autorisation de construire, le tribunal constate que les recourants étaient requérants de ladite autorisation. Il sera rappelé que la qualité de requérant, qui peut être différente de celle de propriétaire de la parcelle concernée à condition que ce dernier ait donné son accord, a pour conséquence que la décision qui sera rendue sera adressée audit requérant, qu’il soit propriétaire de la parcelle ou non. Partant, force est de constater que les recourants, destinataires de la décision de refus d’autorisation prononcée suite à leur requête, sont directement atteints par cette dernière. Dès lors, le fait qu’ils ne soient à ce jour plus propriétaires de la parcelle ne saurait faire obstacle à leur intérêt digne de protection à pouvoir être partie à la procédure de recours concernant le refus d’autorisation dont ils ont eux-mêmes requis la délivrance. Pour ces mêmes motifs, cet intérêt demeure actuel.

Pour le surplus, il ressort de leurs explications et de l’acte de vente produit qu’ils se sont engagés auprès des propriétaires actuels, à déposer une demande d’autorisation pour valider la présence des objets K et N. Dans le même sens, les propriétaires actuels ont donné leur accord à la mise en œuvre d’une telle procédure. Enfin, dès lors que, selon l’accord contractuel précité, la procédure de recours est engagée aux frais des recourants, ceux-ci peuvent se prévaloir d’un intérêt pratique à l’admission de leur recours, qui leur permettrait d’éviter de subir un préjudice financier en lien avec les frais et émoluments de la procédure qui, comme vu supra, sont à leur entière charge et non à celle de propriétaires. Partant, les recourants peuvent se prévaloir d’un intérêt actuel digne de protection à recourir contre le refus d’autorisation attaqué.

Quant à l’ordre de suppression et d’évacuation du portail et de la clôture, le tribunal constate que cette décision est adressée nommément aux recourants. Dès lors, en tant que destinataire de cette décision qui leur impose une obligation de prendre des mesures dans un délai fixé sauf à s’exposer à de nouvelles sanctions, force est de constater que les recourants peuvent se prévaloir d’un intérêt digne de protection à son annulation. Cette dernière se réfère en outre explicitement au refus d’autorisation, contre lequel les recourants peuvent se prévaloir, comme vu supra, d’un intérêt à recourir. Le fait qu’ils n’ont pas la maîtrise juridique de la parcelle accueillant les ouvrages dont la remise en état est requise n’apparaît in casu pas problématique. En effet, comme vu supra, les propriétaires actuels ont accepté, par acte contractuel notarié, que les recourants effectuent toutes démarches utiles en vue de la régularisation des objets K et N. Dès lors qu’en sus de cet accord, ces propriétaires ont également précisé, dans ce même acte, accepter la possibilité que ces ouvrages ne soient, malgré lesdites démarches, pas autorisés, force est de constater que ces derniers ont implicitement accepté l’éventualité que l’ordre de remise en état leur devienne opposable et le fait de devoir supprimer les objets K et N. Ainsi, les recourants peuvent se prévaloir d’un intérêt actuel digne de protection s’agissant de l’ordre de remise en état également.

Par conséquent, les recourants possédant la qualité pour recourir, leurs recours seront déclarés recevables sous l’angle de l’art. 60 LPA également.

15.         Au titre de mesure d’instruction, les recourants, dans leur écriture spontanée du 23 février 2024, sollicitent l’audition de M. B______, afin de confirmer que le portail et la clôture existent depuis plus de 30 ans.

16.         Tel que garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre. Toutefois, le juge peut renoncer à l’administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l’authenticité n’est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsqu’il parvient à la conclusion qu’elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu’elles ne pourraient l’amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_576/2021 du 1er avril 2021 consid. 3.1 ; 2C_946/2020 du 18 février 2021 consid. 3.1 ; 1C_355/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.1).

Ce droit ne confère pas le droit d’être entendu oralement, ni celui d’obtenir l’audition de témoins (ATF 140 I 68 consid. 9.6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_381/2021 du 17 décembre 2021 consid. 3.2 ; cf. aussi art. 41 in fine LPA).

17.         En l’occurrence, M. B______, recourant dans le cadre des deux causes désormais jointes, a eu l’occasion de s’exprimer par écrit, d’exposer son point de vue et de produire toutes les pièces que tant lui-même que les deux autres recourants estimaient utiles à l’appui de leurs allégués, par le biais des écritures usuelles puis d’une écriture spontanée. M. B______ a notamment expliqué, par courrier du 23 février 2024, que le portail et la clôture existaient depuis plus de 30 ans, dès lors que son père occupait alors le domaine en compagnie de chiens, dont la présence nécessitait que celui-ci soit clos. Il a en outre précisé que son père, qui était né en 1906, n’aurait pas commencé à faire construire les ouvrages précités à un âge avancé, ce qui démontrait que leur installation avait eu lieu au moins 30 ans plus tôt.

Cela étant, les recourants ne prétendent pas que l’audition de M. B______ permettrait d'apporter davantage d'indices de la plausibilité de ses explications écrites. Par conséquent, le tribunal constate que le dossier comporte tous les éléments pertinents et nécessaires à l’examen des griefs et arguments mis en avant par les parties, permettant ainsi au tribunal de se forger une opinion et de trancher le litige. Il n’y a donc pas lieu de procéder à la mesure d’instruction requise, celle-ci n'étant au demeurant pas obligatoire.

18.         Sur le fond, les recourants contestent, d’une part, la décision de refus de régulariser le portail K et la clôture périphérique N et, d’autre part, la décision de remise en état. Dès lors que la seconde décision dépend du bienfondé de la première, ce sont les griefs dirigés contre le refus d’autorisation qui seront examinés en premier lieu.

19.         Les recourants se prévalent tout d’abord du fait que le refus d’autorisation de construire aurait dû se fonder sur le droit applicable lors de la réalisation des installations et non sur celui actuellement en vigueur.

20.         Selon la doctrine et la jurisprudence, en droit de la construction, la loi applicable est celle en vigueur au moment où statue la dernière instance saisie du litige. Si l'affaire est traitée par plusieurs autorités, sont déterminantes en principe les prescriptions en force lorsque la dernière juridiction statue. La jurisprudence admet ainsi d'une façon générale qu'une demande d'autorisation de bâtir déposée sous l'empire du droit ancien est examinée en fonction des dispositions en vigueur au moment où l'autorité statue sur cette demande, même si aucune disposition légale ou réglementaire ne le prévoit : les particuliers doivent en effet toujours s'attendre à un changement de réglementation (ATF 101 1b 299). En statuant sur une demande d'autorisation suivant des prescriptions devenues obligatoires après son dépôt, le juge ne tombe pas dans l'arbitraire ni ne viole une disposition impérative pas plus que la garantie de la propriété (ATF 107 1b 138 ; ATA/22/2009 du 13 janvier 2009 ; ATA/792/2004 du 19 octobre 2004 ; ATA/541/2002 du 10 septembre 2002 ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. I, Les fondements, 3ème éd., 2012, pp. 194-195).

21.         Conformément aux principes généraux du droit intertemporel, lorsqu'un changement de droit intervient au cours d'une procédure administrative contentieuse ou non contentieuse, la question de savoir si le cas doit être tranché sous l'angle du nouveau ou de l'ancien droit se pose. En l'absence de dispositions transitoires, s'il s'agit de tirer les conséquences juridiques d'un événement passé constituant le fondement de la naissance d'un droit ou d'une obligation, le droit applicable est celui en vigueur au moment dudit événement (ATA/1277/2023 du 28 novembre 2023 consid. 2.1.1 et l'arrêt cité ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, n. 403 ss).

22.         Selon la jurisprudence relative au droit applicable en matière d'ordre de remise en état ou de procédure de régularisation, la légalité de la construction s'examine en principe au moment où les travaux ont été effectués. On applique toutefois le droit en vigueur au moment où l'autorité statue si celui-ci est plus favorable au recourant (cf. art. 52 al. 2 OAT; ATF 127 II 209 consid. 2b ; 123 II 248 consid. 3a/bb ; 102 Ib 64 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_486/2015 du 24 mai 2016 consid. 3.2).

Pour les autorisations faisant suite à une requête, le droit applicable est en principe celui qui est en vigueur au moment où la décision est prise (ATF 139 II 243 consid. 11 ; 139 II 263 consid. 6 ; ATA/1200/2023 du 7 novembre 2023 consid. 4.1 et l'arrêt cité). Dès lors que cette décision vise à régler un comportement futur, il n’y a pas de raison, en tout cas sous l’angle de l’intérêt public, de ne pas appliquer le droit en vigueur au moment où la légalité de ce comportement se pose (ATF 139 II 243, consid. 11 ; 139 II 263 consid. 6 ; ATA/1232/2022 du 6 décembre 2022 consid. 9 ; Thierry TANQUEREL, op. cit., n. 410).

Partant, la légalité d'un acte administratif, y compris une autorisation de construire, doit en principe être examinée en fonction de l'état de droit prévalant au moment de son prononcé, sous réserve de l'existence de dispositions transitoires ; en conséquence, l'autorité de recours applique en principe le droit en vigueur au jour où l'autorité administrative a statué (ATF 144 II 326 consid. 2.1.1 ; ATA/739/2024 du 18 juin 2024 consid. 3.7).

23.         En l’espèce, à la lumière des jurisprudences précitées, il convient de distinguer le cas dans lequel les instances judiciaires compétentes sont amenées à connaître d'un objet lié à une demande d'autorisation de construire, de celui dans lequel il s'agit de se demander si l'objet litigieux était ou non soumis à autorisation de construire au moment de sa réalisation. Ainsi, dans ce second cas, il est admis que, de manière générale et en l’absence de dispositions transitoires, le droit applicable est alors celui en vigueur au moment où l'objet litigieux a été érigé, sauf si le droit en vigueur au moment où l’autorité statue est plus favorable au recourant. Les jurisprudences citées par les recourants dans le cadre de leur recours à l’appui de leur grief relatif au droit applicable, soit notamment les ATF 123 II 248 et 102 Ib 64 et 1C_486/2015, vont d’ailleurs dans le même sens, dès lors qu’elles prévoient, en substance, que, selon la jurisprudence relative au droit applicable en matière d'ordre de remise en état ou de procédure de régularisation, la légalité de la construction s'examine en principe au moment où les travaux ont été effectués, sauf si le droit en vigueur au moment où l'autorité statue est plus favorable au recourant.

Il en va toutefois différemment lorsque l’objet du litige fait suite à une demande d’autorisation. Dans ce cas, conformément à la jurisprudence et à la doctrine précitées, le bien-fondé d’une telle demande doit être examiné en fonction des dispositions en vigueur lorsque l’autorité compétente statue sur cette dernière. Cette façon de procéder s’explique notamment, selon la Haute Cour fédérale, par le fait que la décision concernée vise à régler un comportement futur, de sorte que l’application du droit en vigueur se justifie notamment à ce titre. En outre, ce raisonnement apparaît également cohérent afin de ne pas vider de leur substance d’éventuelles dispositions transitoires présentes dans les lois applicables, qui pourraient, en contrariété avec ledit droit transitoire, s’appliquer dans différentes versions à deux demandes d’autorisations de construire déposées en même temps mais portant sur des faits qui se seraient déroulés à des périodes différentes, au risque de provoquer une inégalité de traitement entre les requérants, ainsi qu’une violation du principe de la sécurité du droit.

In casu, il apparaît que la question de la légalité des objets K et N - qui tendait à déterminer si, au moment de leur réalisation, ceux-ci étaient soumis à autorisation – a bien été examinée selon le droit applicable à cette époque, comme le prévoit la jurisprudence fédérale invoquée par les recourants. En effet, dans son jugement du ______ 2023, le tribunal a considéré que la LCI en vigueur en 1960 soumettait à autorisation le portail et la clôture. Ainsi, le droit examiné pour connaître du bien-fondé de l’ordre de dépôt d’une demande d’autorisation de construire, en l’absence de toute requête, était bien celui applicable au moment où les travaux avaient été effectués. Toutefois, conformément aux principes retenus par la jurisprudence et la doctrine tels qu’exposés supra, une fois la question de la légalité de l’édification examinée, c’est le droit en vigueur au moment du dépôt de la demande d’autorisation de construire qui trouve application pour décider de la délivrance ou non d’une telle autorisation. Partant, c’est à juste titre que le refus d’autorisation litigieux se fonde sur les dispositions légales actuellement en vigueur.

Infondé, le grief qui se rapport à cette question sera écarté.

24.         Les recourants allèguent également que la décision de refus d’autorisation de construire violerait l’art. 24 LAT, ainsi que l’art. 24d al. 2 LAT.

25.         Aucune construction ou installation ne peut être créée ou transformée sans autorisation de l'autorité compétente (art. 22 al. 1 de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin 1979 - LAT - RS 700). L'autorisation est délivrée si la construction ou l'installation est conforme à l'affectation de la zone (art. 22 al. 2 let. a LAT) et si le terrain est équipé (art. 22 al. 2 let. b LAT). Le droit fédéral et le droit cantonal peuvent poser d'autres conditions (art. 22 al. 3 LAT).

Au sens de l'art. 22 al. 1 LAT, il y a transformation lorsque, même sans modifier l'aspect extérieur, on procède à un changement d'affectation d'une construction ou d'une installation, soit la modification du but de son utilisation. En l'absence de travaux, un changement d'affectation peut être dispensé d'autorisation uniquement si la nouvelle affectation correspond à celle de la zone en question ou si son effet sur l'environnement et la planification est manifestement mineur (ATF 113 Ib 219 consid. 4d ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 6.1 ; 1C_150/2016 du 20 septembre 2016 consid. 9.1 et les références ; 1C_395/2015 du 7 décembre 2015 consid. 3.1.1 ; cf. également ATF 139 II 134 consid. 5.2 ; ATA/1346/2015 du 15 décembre 2015 consid. 6b et les références).

26.         Les conditions de dérogation pour des constructions hors de la zone à bâtir sont prévues par le droit fédéral (art. 24 à 24d LAT). Ces dispositions sont complétées ou reprises par les art. 26, 26A et 27 LaLAT.

27.         En vertu de l'art. 24 LAT, des autorisations peuvent être délivrées pour des nouvelles constructions ou installations ou pour tout changement d'affectation si l'implantation de ces constructions ou installations hors de la zone à bâtir est imposée par leur destination et si aucun intérêt prépondérant ne s'y oppose. Ces conditions cumulatives sont reprises par l'art. 27 LaLAT.

Selon la jurisprudence, l'implantation d'une construction est imposée par sa destination si elle est justifiée par des motifs objectifs, comme des raisons d'ordre technique, liées à l'économie d'une entreprise ou découlant de la configuration du sol (arrêt du Tribunal fédéral 1C_383/2010 du 11 avril 2011 consid. 4.1)

28.         L'art. 24d LAT (repris à l'art. 27D LaLAT) traite des habitations sans rapport avec l’agriculture, constructions et installations dignes de protection.

Cette disposition précise, à son al. 2, que le changement complet d’affectation de constructions et d’installations jugées dignes d’être protégées peut être autorisé à condition que: a) celles-ci aient été placées sous protection par l’autorité compétente; b) leur conservation à long terme ne puisse être assurée d’une autre manière.

29.         Les préavis recueillis au cours de la procédure d'autorisation ne lient ni l'autorité exécutive cantonale, ni les autorités judiciaires. Ils sont en principe sans caractère contraignant pour l'autorité administrative, étant précisé que cette dernière ne saurait faire abstraction des préavis exprimés dans des conditions prévues par la loi (Stéphane GRODECKI, La jurisprudence en matière d'aménagement du territoire et de droit public des constructions rendue par le Tribunal administratif genevois en 2008, in RDAF 2009, n° 2, p. 130).

Selon une jurisprudence bien établie, chaque fois que l'autorité inférieure suit les préavis requis, la juridiction de recours doit s'imposer une certaine retenue, qui est fonction de son aptitude à trancher le litige (Thierry TANQUEREL, op. cit., p. 168 n. 508 et la jurisprudence citée). Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/51/2013 du 29 janvier 2013 ; ATA/199/2013 du 26 mars 2012).

30.         En l’espèce, il ressort des éléments au dossier que les conditions d’une dérogation au sens des art. 24 et 24d LAT ne sont manifestement pas remplies. En effet, l'implantation d'un portail et d’une clôture périphérique ne constitue à l'évidence pas une construction ou une installation imposée par leur destination hors de la zone à bâtir. L’implantation des ouvrages précités en zone agricole n'est en outre dictée par aucune nécessité technique, économique ou inhérente à la nature du sol propre à justifier une dérogation générale au sens de l'art. 24 LAT.

Quant à l’allégation des recourants selon laquelle la clôture et le portail seraient imposés par leur destination, au vu de l’unité qu’ils formeraient avec le bâtiment protégé et le domaine auquel ils appartiennent, notamment sur le plan historique, il sera tout d’abord constaté que seul le château de D______ a été inscrit à l’inventaire et non l’ensemble du domaine comprenant notamment le portail et la clôture. À ce titre, il sera relevé que la CMNS a au contraire précisé, dans son préavis favorable du 2 mai 2023, qu’elle se serait prononcée défavorablement s’il s’était agi d’un nouveau projet, dans la mesure où la clôture litigieuse altérait les qualités paysagères du site protégé et que le portail s’écartait, de par son aspect, des pratiques courantes admises pour un site de cette qualité et au regard de l’historicité du château. Dès lors que l’interprétation de la commission précitée, composée de spécialistes, va à l’encontre des allégations des recourants s’agissant du lien entre le château protégé et les ouvrages litigieux, notamment sur le plan historique, force est de constater que les recourants se contentent d’opposer leur propre appréciation à celle de l’instance spécialisée.

Dans le même sens, nonobstant les explications des recourants, il apparaît que rien n’exige objectivement que la parcelle soit close par cette clôture et ce portail. En effet, il ressort des plans et photographies au dossier que cette parcelle est entourée d’une haie relativement fournie, susceptible d’atteindre l’objectif préventif en matière de sécurité contre d’éventuelles intrusions souhaité par les recourants, indépendamment de la clôture périphérique existante.

Il apparaît que les conditions de l’art. 24d LAT ne sont pas davantage remplies. En effet, l’argument des recourants selon lequel l’art. 24d LAT trouverait application, au vu du lien intrinsèque entre le portail et la clôture, d'une part, et l’habitation protégée sis sur la même parcelle, d'autre part, ne saurait convaincre. L’intitulé claire de cette disposition précise qu’elle concerne les habitations, ce que les ouvrages litigieux ne sont sans conteste pas, et un éventuel lien intrinsèque entre ceux-ci et le château de D______, non démontré au demeurant, n’aurait en tout état pas pour conséquence de modifier leur destination en habitations.

Pour le surplus, il sera rappelé que l’OU a préavisé défavorablement le projet, relevant notamment que les portails et clôtures n’étaient conformes à l’affectation de la zone agricole que lorsqu’ils étaient strictement nécessaires dans le cadre d’une exploitation agricole, absente in casu. Le fait que cette instance a indiqué, au titre de remarques, s’en remettre au service compétent pour apprécier si ces éléments contribuaient à la valeur patrimoniale du bâtiment principal et a précisé que ces installations pourraient éventuellement être légalisées, n’a pas d’incidence sur le caractère défavorable dudit préavis. Ainsi, il ne peut pas être reproché à l'autorité intimée d'avoir procédé à une interprétation sélective de ce préavis comme allégué par les recourants, étant en tout état rappelé que, conformément à la jurisprudence citée supra, ce dernier n’est pas lié par les préavis récoltés, en principe sans caractère contraignant sauf s’ils sont requis par la loi.

Dans le même sens, l’OCEau, l’OCAN et la CCDB, instances spécialisées en matière de protection des eaux, de la nature et de la diversité biologiques, ont respectivement requis la modification du projet, s’agissant de l’OCEau, au motif que le projet était en partie situé dans la surface inconstructible au sens de l’art. 15 LEaux-GE et dans l’espace réservé aux eaux au sens de l’art. 36a LEaux et se sont prononcées défavorablement, s’agissant des deux autres instances, les objets concernés n’étant pas conformes à la zone agricole et situés à moins de 20 m du cadastre forestier, eu égard aux art. 11 LForêts, 16a LAT, 34 OAT et 20 LaLAT. En conclusion, il ne peut être reproché à l'autorité intimée, confrontée aux préavis défavorables des instances spécialisées précitées et à ceux, favorables de la commune, du DIT, du SMS, de la CMNS et de la DAC, d'avoir choisi de suivre l’OU, l’OCEau, l’OCAN et la CCDB, pour les motifs qu'il a exposés dans la décision de refus d’autorisation litigieuse puis dans ses écritures, dans la mesure où cette décision découle simplement du respect du principe de la légalité et fait prévaloir des préavis relevant les irrégularités d'un projet.

Enfin, quant à l’argument des recourants relatif à l’adoption, le 29 septembre 2023, d’une révision de la LAT prévoyant la réintroduction de la prescription trentenaire en zone agricole, celui-ci est sans pertinence dans le cadre du refus d’autorisation de construire. En effet, l’application éventuelle d’une telle prescription trentenaire au présent cas n’aurait, en tout état, pas pour conséquence de légaliser les ouvrages concernés mais tout au plus d’empêcher leur remise en état, comme cela ressort de la jurisprudence qui sera mentionnée ci-après dans le cadre de l’examen du bien-fondé dudit ordre de remise en état.

Partant, mal fondés, les griefs de violation des art. 24 et 24d LAT seront écartés.

31.         Selon les recourants, la décision de refus d’autorisation de construire violerait le principe de la bonne foi.

32.         Le principe de la légalité, consacré à l’art. 5 al. 1 Cst., exige que les autorités n’agissent que dans le cadre fixé par la loi.

33.         Valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst., exige que l'administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale. En particulier, l'administration doit s'abstenir de toute attitude propre à tromper l'administré et elle ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_341/2019 du 24 août 2020 consid. 7.1).

Selon la jurisprudence, les assurances ou les renseignements erronés donnés par les autorités confèrent des droits aux justiciables lorsque les cinq conditions cumulatives suivantes sont remplies. Tout d’abord, une promesse concrète doit avoir été émise à l’égard d’une personne déterminée. Il faut ensuite que l’autorité ait agi dans le cadre et dans les limites de sa compétence, que la personne concernée n’ait pas été en mesure de se rendre compte immédiatement de l’inexactitude du renseignement fourni, qu’elle se soit fondée sur ce renseignement pour prendre des dispositions qu’elle ne peut ensuite modifier sans subir de préjudice et, enfin, que la loi n’ait pas subi de changement depuis le moment où la promesse a été faite (ATF 141 V 530 consid. 6.2 ; ATA/437/2020 du 30 avril 2020 ; ATA/1262/2018 du 27 novembre 2018 consid. 4b; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. 1, 2012, p. 922 ss).

Ainsi, à certaines conditions, le principe de la bonne foi protège le citoyen dans la confiance légitime qu'il met dans les assurances reçues des autorités lorsqu'il a réglé sa conduite d'après des décisions, des déclarations ou un comportement déterminé de l'administration (ATF 141 V 530 consid. 6.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_626/2019 du 8 octobre 2020 consid. 3.1 ; 2C_136/2018 du 24 septembre 2018 consid. 3.2). Conformément au principe de la confiance, qui s'applique aux procédures administratives, les décisions, les déclarations et comportements de l'administration doivent recevoir le sens que l'administré pouvait raisonnablement leur attribuer en fonction des circonstances qu'il connaissait ou aurait dû connaître (ATF 126 II 377 consid. 3a ; 126 III 119 consid. 2a ; 122 II 113 consid. 3b/cc ; 121 II 473 consid. 2c ; 118 Ia 245 consid. 4b et les réf. citées).

34.         L'administré doit avoir eu des raisons sérieuses d'interpréter comme il l'a fait le comportement de l'administration et d'en tirer les conséquences qu'il en a tirées. Tel n'est notamment pas le cas s'il apparaît, au vu des circonstances, qu'il devait raisonnablement avoir des doutes sur la signification du comportement en cause et se renseigner à ce sujet auprès de l'autorité (ATF 134 I 199 consid. 1.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_138/2015 du 6 août 2015 consid. 5.1).

35.         En l’espèce, le tribunal constate que deux des conditions cumulatives pour se prévaloir d’une violation du principe de la bonne foi ne sont pas remplies.

En effet, les recourants, qui supportent le fardeau de la preuve dès lors qu’ils se prévalent d’une violation de leurs droits en vue d’en tirer un bénéfice, n’ont pas démontré avoir reçu une quelconque assurance concrète de la part des autorités quant à la légalité de la clôture et du portail. S’agissant de la délivrance, en 1970 et 1978, des autorisations de construire DD 10______ et 11______ permettant la réalisation d’un couvert à outils (bâtiment no 3______), respectivement l’agrandissement d’un dépôt à outils (bâtiment no 5______) sur la parcelle n° 1______, force est de constater que ces objets ne sont pas en lien avec le portail et la clôture querellés. Le fait que le portail K et la clôture N étaient présents sur la parcelle lors de la délivrance des autorisations précitées ne saurait conduire à une autre conclusion. En effet, les ouvrages K et N ne faisaient pas l’objet des demandes d’autorisation alors examinées par l'autorité intimée. Partant, lesdites autorisations, dont les plans visés ne varietur ne mentionnent d’ailleurs pas la clôture et le portail en question, n’ont nullement eu pour conséquence de légaliser ces objets, ni même encore de les tolérer. À ce titre, il sera rappelé qu’il ne peut être attendu de l'autorité intimée qu'elle examine, pour chaque requête d’autorisation de construire dont elle est saisie, si l’ensemble des installations présentes sur la parcelle concernée ont été érigée illégalement, sauf à conduire à une situation irréalisable en pratique, faute de temps et de moyens.

De plus, il n’a pas davantage été prouvé que les recourants se seraient fondés sur un éventuel renseignement de l'autorité intimée pour prendre des dispositions non modifiables sans préjudice s’agissant de ces deux objets, tels que notamment des travaux ou des transformations importantes et coûteuses les concernant. Au contraire, les recourants allèguent que ces deux ouvrages sont demeurés inchangés depuis 1960.

Quant à la jurisprudence ATA/77/2023 - invoqué par les recourants pour en déduire que leur bonne foi devrait in casu être protégée eu égard à l’écoulement du temps et à la tolérance active, voire la passivité des autorités depuis 1960 - , force est de constater, comme relevé à juste titre par l’autorité intimée, qu’elle diffère de la présente cause. En effet, celle-ci concernait un paddock et un marcheur liés à l’activité d’un manège et étaient visibles de tous. De plus, les demandes d’autorisation de construire examinées postérieurement visaient au développement dudit manège, raison pour laquelle l'autorité intimée ne pouvait, selon la chambre administrative, avoir ignoré la présence des paddock et marcheur dans le cadre de l’instruction de ladite demande. Ainsi, la tolérance de la part de l’État retenue dans cette affaire ne saurait s’appliquer par analogie au présent cas, qui concerne un portail et une clôture dont le caractère modeste, voire complètement fondu dans la végétation, pouvait aisément passer inaperçu, et qui étaient de surcroît sans lien avec les installations autorisées par les DD 10______ et DD 11______.

Eu égard au développement qui précède, le grief de violation du principe de la bonne foi tombe à faux.

36.         Enfin, s’agissant du grief des recourants selon lequel le refus d’autorisation de construire violerait le principe de proportionnalité, force est de constater que, comme relevé à juste titre par l’autorité intimée, la prise en compte du principe précité trouve application dans le cadre de l’examen du bien-fondé d’un ordre de remise en état et non dans le cadre de celui d’un refus d’autorisation de construire. Dans leur recours déposé à l’encontre du refus d’autorisation, les recourants se réfèrent d’ailleurs expressément, s’agissant de ce grief, à l’ordre de démolition et de remise en état et non au refus d’autorisation de construire.

Partant, ce grief sera traité ci-après dans le cadre de l’examen de l’ordre de remise en état également litigieux.

37.         Il résulte de ce qui précède que la décision de refus d’octroi de l’autorisation de construire DD 14_____/1 est conforme au droit et que le département n'a ainsi ni excédé ni abusé de son pouvoir d'appréciation en refusant de délivrer l'autorisation de construire sollicitée.

38.         Le recours dirigé contre cette décision devra ainsi être rejeté.

39.         Les recourants contestent également l’ordre de remise en état rendu par l'autorité intimée le ______ 2023, invoquant une violation du principe de proportionnalité.

40.         Conformément à l'art. 129 let. e LCI, le département peut ordonner, à l'égard des constructions, des installations ou d'autres choses, la remise en état, la réparation, la modification, la suppression ou la démolition. Ces mesures peuvent être ordonnées lorsque l'état d'une construction, d'une installation ou d'une autre chose n'est pas conforme aux prescriptions de la LCI, des règlements qu'elle prévoit ou des autorisations délivrées en application de ces dispositions légales ou réglementaires (art. 130 LCI).

41.         De jurisprudence constante (ATA/1134/2022 du 8 novembre 2022 consid. 11b; ATA/463/2021 du 27 avril 2021 consid. 5b ; ATA/349/2021 du 23 mars 2021 consid. 7), pour être valable, un ordre de mise en conformité doit respecter cinq conditions. Premièrement, l'ordre doit être dirigé contre le perturbateur, par comportement ou par situation. Les installations en cause ne doivent ensuite pas avoir été autorisées en vertu du droit en vigueur au moment de leur réalisation. Un délai de plus de trente ans ne doit pas s'être écoulé depuis l'exécution des travaux litigieux pour la zone à bâtir. L'autorité ne doit en outre pas avoir créé chez l'administré concerné, par des promesses, des informations, des assurances ou un comportement, des conditions telles qu'elle serait liée par la bonne foi. Finalement, l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit doit l'emporter sur l'intérêt privé, purement financier, de l'intéressé, voire de ses clients, au maintien des installations litigieuses.

42.         L'art. 129 let. e LCI reconnaît une certaine marge d'appréciation à l'autorité dans le choix de la mesure adéquate pour rétablir une situation conforme au droit, dont elle doit faire usage dans le respect des principes de la proportionnalité, de l'égalité de traitement et de la bonne foi, et en tenant compte des divers intérêts publics et privés en présence (ATA/1399/2019 du 17 septembre 2019 consid. 3c et l'arrêt cité ; ATA/336/2011 du 24 mai 2011 consid. 3b et la référence citées).

43.         Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 5 al. 2 Cst., exige qu'une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés et que ceux-ci ne puissent pas être atteints par une mesure moins incisive. En outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 126 I 219 consid. 2c et les références citées ; ATA/738/2017 du 3 octobre 2017 consid. 8).

44.         Traditionnellement, le principe de la proportionnalité se compose des règles d'aptitude - qui exigent que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 p. 482 ; arrêt du Tribunal fédéral 1P. 269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/569/2015 du 2 juin 2015 consid. 24c ; ATA/700/2014 du 2 septembre 2014 consid. 5a ; ATA/735/2013 du 5 novembre 2013 consid. 11).

45.         Un ordre de démolir une construction ou un ouvrage édifié sans permis de construire et pour lequel une autorisation ne pouvait être accordée, n'est pas contraire au principe de la proportionnalité. Celui qui place l'autorité devant un fait accompli doit s'attendre à ce qu'elle se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit, que des inconvénients qui en découlent pour le constructeur (ATA/213/2018 précité consid. 11 ; ATA/738/2017 précité consid. 8 ; ATA/829/2016 du 4 octobre 2016).

Même si la bonne foi du constructeur peut être reconnue, elle ne saurait le prémunir contre l'intervention de l'autorité de surveillance destinée à rétablir une situation conforme au droit, lorsque cette intervention respecte le principe de la proportionnalité (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_162/2014 du 20 juin 2014 consid. 6.2 ; 1C_250/2009 du 13 juillet 2009 consid. 4.2 ; 1C_197/2021 du 12 novembre 2021 consid. 2.1.3).

46.         L'autorité renonce à un ordre de démolition si les dérogations à la règle sont mineures, si l'intérêt public lésé n'est pas de nature à justifier le dommage que la démolition causerait au maître de l'ouvrage ou encore s'il y a des chances sérieuses de faire reconnaître la construction comme conforme au droit qui aurait changé dans l'intervalle.

47.         Lorsque des constructions ou des installations illicites sont réalisées en dehors de la zone à bâtir, le droit fédéral exige en principe que soit rétabli un état conforme au droit. Le principe de la séparation de l'espace bâti et non bâti, qui préserve différents intérêts publics, est de rang constitutionnel ; il fait partie intégrante de la notion d'utilisation mesurée du sol de l'art. 75 al. 1 Cst. (ATF 147 II 309 consid. 5.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_197/2021 du 12 novembre 2021 consid. 2.1.1). Cette séparation doit par conséquent, en dehors des exceptions prévues par la loi, demeurer d'application stricte. Si des constructions illégales, contraires au droit de l'aménagement du territoire, sont indéfiniment tolérées en dehors de la zone constructible, le principe de la séparation du bâti et du non-bâti est remis en question et un comportement contraire au droit s'en trouve récompensé. S'ajoute à cela que la remise en état poursuit encore d'autres intérêts publics, à savoir la limitation du nombre et des dimensions des constructions en zone agricole, ainsi que le respect du principe de l'égalité devant la loi (arrêts du Tribunal fédéral 1C_197/2021 du 12 novembre 2021 consid. 2.1.1 et les arrêts cités ; 1C_76/2019 du 28 février 2020 consid. 7.1 et les références citées). A cet égard, l'absence de vocation agricole et la proximité d'habitations ne sont pas déterminantes (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_164/2007 du 13 septembre 2007 consid. 4.3 ; ATA/290/2016 du 5 avril 2016 consid. 7a ; ATA/1190/2015 du 3 novembre 2015 consid. 4b).

48.         Dans son arrêt 1C_469/2019 du 28 avril 2021, désormais publié (ATF 147 II 309), le Tribunal fédéral a précisé qu'à l'inverse de ce qui prévaut pour les zones à bâtir, l'obligation de rétablir un état conforme au droit ne s'éteint pas après trente ans, s'agissant de bâtiments et installations érigés illégalement en dehors de la zone à bâtir (cf. consid. 4 et 5 ; cf. aussi not. arrêt 1C_197/2021 du 12 novembre 2021 consid. 2.1.4). En particulier, s'il peut certes être tenu compte de situations exceptionnelles par le biais de solutions spécifiques, notamment par la fixation d'un délai de remise en état plus long, une utilisation illégale, qui contrevient au principe fondamental en matière d'aménagement du territoire de la séparation du territoire bâti et non bâti, ne doit pas se poursuivre indéfiniment sur la base du simple écoulement du temps (cf. consid. 5.5 et 5.6 ; cf. aussi not. arrêt 1C_197/2021 du 12 novembre 2021 consid. 2.1.4), étant rappelé qu'en principe, une nouvelle jurisprudence doit s'appliquer immédiatement et à toutes les affaires pendantes au moment où elle est adoptée ou futures (ATF 142 V 551 consid. 4.1 ; 135 II 78 consid. 3.2 ; 132 II 153 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_197/2021 du 12 novembre 2021 consid. 2.1.5 ; 2C_199/2017 du 12 juin 2018 consid. 3.5).

49.         Le Tribunal fédéral est particulièrement strict en zone agricole et a ainsi confirmé les ordres de démolition ou d'enlèvement des constructions ou installations suivantes érigées sans autorisation : une palissade en bois, un mobil home, un chalet, un sous-sol, des containers utilisés pour loger des employés d'une exploitation agricole, un appentis de 12,54 m2 et un cabanon de jardin de 10,29 m2 (ATF 1C_482/2017 précité), un paddock et un abri pour chevaux (arrêt du Tribunal fédéral 1C_589/2017 du 16 novembre 2018). De manière générale dans l'examen de la proportionnalité, les intérêts des propriétaires sont, à juste titre, mis en retrait par rapport à l'importance de préserver la zone agricole d'installations qui n'y ont pas leur place. Le Tribunal fédéral a déjà énoncé concernant le canton de Genève, que « s'agissant de constructions édifiées dans la zone agricole dans un canton déjà fortement urbanisé où les problèmes relatifs à l'aménagement du territoire revêtent une importance particulière, l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit l'emporte sur celui, privé, du recourant à l'exploitation de son entreprise sur le site litigieux » (arrêt du Tribunal fédéral 1C_446/2010 du 18 avril 2011, consid. 5.1.1 et les références citées ; ATA/68/2013 du 6 février 2013).

La chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a, pour sa part, confirmé l'ordre de remise en état d'une clôture en zone agricole au motif que l'intérêt public à la préservation des terres agricoles, comprenant de plus des surfaces d'assolement, ainsi que l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit doivent l'emporter sur l'intérêt privé du recourant à mettre en place diverses installations non autorisées et non autorisables sur la parcelle (ATA/1370/2018 du 18 décembre 2018 consid. 10). Dans un autre arrêt, elle a également confirmé un ordre de démolition, en zone à bâtir, s'agissant de travaux dans une villa qui ne figuraient pas dans l'autorisation de construire délivrée par l'autorité et relevant que le fait qu'une remise en état entraînerait aujourd'hui des contraintes, notamment en termes financiers, n'était pas déterminant, cette situation étant uniquement due à l'attitude de la recourante, qui s'était affranchie de l'obligation de solliciter au préalable une autorisation de construire pour les installations litigieuses (ATA/213/2018 précité consid. 12).

50.         S’il peut certes être tenu compte de situations exceptionnelles par le biais de solutions spécifiques, notamment par la fixation d’un délai de remise en état plus long, une utilisation illégale ne doit pas se poursuivre indéfiniment sur la base du simple écoulement du temps (ATF 147 II 309 consid. 5.5 et 5.6 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_60/2021 du 27 juillet 2021 consid. 3.2.1).

51.         Sous l'angle de la proportionnalité, on peut notamment prendre en compte le fait que la démolition et la remise en état des lieux engendreraient des frais excessifs que l'intéressé ne serait pas en mesure de prendre en charge (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_370/2015 du 16 février 2016 consid. 4.4 ; 1C_537/2011 du 26 avril 2012 ; 1C_101/2011 du 26 octobre 2011 consid. 2.4 ; 1C_248/2010 du 7 avril 2011 consid. 4.2 ; 1C_273/2008 du 7 octobre 2008 consid. 3.2 ; 1C_164/2007 du 13 septembre 2007 consid. 4.3). Néanmoins, un intérêt purement économique ne saurait avoir le pas sur l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_544/2014 du 1er avril 2015 consid. 4.2).

52.         En l’espèce, s'agissant de savoir si la décision de remise en état était dirigée contre les perturbateurs par situation (les destinataires de cette décision n'étant alors plus propriétaires de la parcelle litigieuse), la question souffrira de rester ouverte, vu l'issue du litige.

Quant à la deuxième condition à laquelle doit obéir un ordre de remise en état, les objets litigieux n’ont pas été autorisés en vertu du droit en vigueur au moment de leur réalisation et n’ont pas été régularisés par la suite, au regard du droit actuellement applicable, comme vu supra.

La question de la prescription trentenaire ne se pose pas en l’espèce. En effet, une telle prescription ne s’applique actuellement pas, à teneur de la jurisprudence du Tribunal fédéral, hors de la zone à bâtir. Or, la parcelle en cause se situe en zone agricole, ce qui n’est pas contesté. Le fait que cette parcelle a été désassujettie à la LDFR n’implique pas qu’il faille appliquer, par analogie, la prescription trentenaire concernant la zone à bâtir, dès lors qu’une telle opération de désassujettissement ne change rien au fait que celle-ci demeure affectée à la zone agricole et ainsi soumise aux règles qui la concerne.

À cet égard, l’existence de la motion parlementaire n° 21.4332 « prescription de l’obligation de rétablir la situation conforme au droit hors de la zone à bâtir », désormais validée par les deux chambres de l’Assemblée fédérale et contre laquelle aucun référendum n’a été déposé, visant à introduire dans la législation la prescription trentenaire appliquée par les autorités judiciaires puis remise en cause, pour la zone agricole par la jurisprudence fédérale du 28 avril 2021 citée ci-dessus, n’y change rien du strict point de vue de la légalité. Il en va cependant différemment, comme on le verra ci-dessous, sous l'angle de la proportionnalité.

Par ailleurs, le recourant ne peut se prévaloir du principe de la bonne foi pour s’opposer à l’ordre de remise en état. En effet, comme vu supra, aucun élément du dossier ne permet de retenir que l’autorité intimée aurait créé chez le recourant, par des promesses, des informations, des assurances ou un comportement, des conditions telles qu’elle serait liée par la bonne foi s’agissant des éléments non autorisés identifiés dans la décision querellée.

Reste à examiner la cinquième condition à laquelle est soumis un ordre de remise en état, à savoir le fait que ce dernier vise des intérêts publics qui l'emportent sur les intérêts opposés au maintien de la situation. En l'occurrence, le tribunal considère que l'on ne saurait faire abstraction du fait que les objets litigieux, qui sont aujourd'hui soumis à la possibilité d'un ordre de remise en état, y échapperont dès l'entrée en vigueur relativement proche du futur art. 25 al. 5 LAT. La pesée des intérêts en présence, et notamment des intérêts publics que l'autorité doit veiller à préserver, est ainsi influencée dans le cas d'espèce par le fait que le législateur a récemment décidé que l'intérêt public à préserver les périmètres situés hors zone à bâtir (dont en particulier la zone agricole) contre les constructions illégales, doit céder le pas à l'intérêt privé des propriétaires à pouvoir préserver ces constructions lorsque ces dernières ont été érigées au moins 30 ans auparavant. Même si la loi qui introduit le délai de prescription de 30 ans hors de la zone à bâtir n'est pas encore en vigueur, il s'agit, du point de vue des intérêts publics et privés qui régissent les zones non constructibles, d'un changement de paradigme dans la manière dont il faut envisager ces questions. Il apparaîtrait ainsi incompréhensible, dans le présent litige, de vouloir encore préserver un intérêt public auquel le législateur fédéral a d'ores et déjà décidé qu'il convenait de renoncer dans les circonstances spécifiques de constructions datant de plus de 30 ans.

53.         In casu, on soulignera en outre que les objets en cause existent depuis de très nombreuses années – soit depuis environ 1960 –, et qu'il ne s'agit en tout état que d'éléments en soit très modestes, du point de vue de leur impact tant volumétrique que paysager. À ce titre, il faut rappeler que la clôture, en particulier, est noyée à l'intérieur d'une haie et qu'elle est ainsi, vraisemblablement, quasiment invisible. À ceci s'ajoute que les deux objets de litigieux apparaissent comme des éléments pouvant logiquement être rattachés à un domaine historique tel que celui dont il est question. En d'autres termes, ils n'apparaissent aucunement comme des éléments étrangers à l'ensemble auquel ils appartiennent, éléments qu'il conviendrait de faire disparaître pour des raisons patrimoniales, esthétiques ou autres. Ainsi, comme le tribunal l'avait d'ailleurs déjà laissé entendre dans son jugement JTAPI/8______ du ______ 2023 (consid. 34, 3ème paragr.), l'ordre de remise en état concernant les objets K et N apparaît disproportionné et devra donc être annulé. Il importe cependant d'attirer l'attention des recourants, et à travers eux celle des propriétaires actuels, sur le fait que cette issue laisse les deux objets susmentionnés dans l'illégalité et qu'ils ne sont donc pas susceptibles d'être remplacés ni transformés, de sorte que leur existence est limitée par leur durée de vie.

54.         Il en résulte que le recours interjeté contre la décision de remise en état du ______ 2023 sera admis.

55.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, qui obtiennent partiellement gain de cause, sont condamnés, pris solidairement, au paiement d’un émolument réduit s'élevant à CHF 1'000.- ; il est couvert par les avances de frais totalisant CHF 1'800.- versées à la suite du dépôt des recours.

56.         Vu l’issue du litige, une indemnité de procédure réduite, fixée à CHF 1'000.-, sera allouée aux recourant à la charge de l'Etat de Genève, soit pour lui l'autorité intimée (art. 87 al. 2 LPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             ordonne la jonction des causes nos A/2979/2023 et A/3136/2023 sous le n° de cause A/2979/2023 ;

2.             déclare recevable les recours interjetés par Madame A______, Monsieur B______ et Monsieur C______ le 14 septembre 2023 contre la décision de refus d’autorisation de construire DD 14_____/1 du département du territoire du ______ 2023 et le 27 septembre 2023 contre l’ordre de remise en état du département du territoire du ______ 2023 ;

3.             rejette le recours interjeté contre la décision de refus d’autorisation de construire DD 14_____/1 du département du territoire du ______ 2023 ;

4.             admet le recours interjeté contre l’ordre de remise en état du département du territoire du ______ 2023 ;

5.             annule cette dernière décision ;

6.             met à la charge des recourants, pris solidairement, un émolument de CHF 1'000.-, lequel est couvert par les avances de frais ;

7.             ordonne la restitution aux recourants du solde de leurs avances de frais, soit CHF 800.- ;

8.             alloue aux recourants, à la charge de l'Etat de Genève, soit pour lui le département du territoire, une indemnité de procédure de CHF 1'000.- ;

9.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Olivier BINDSCHEDLER TORNARE, président, Patrick BLASER et Saskia RICHARDET-VOLPI, juges assesseurs

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu'à l'office fédéral de l'agriculture.

Genève, le

 

La greffière