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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2113/2007

ATA/22/2009 du 13.01.2009 ( DCTI ) , REJETE

Descripteurs : ; QUALITÉ POUR RECOURIR ; VOISIN ; ASSOCIATION ; CIRCULATION ROUTIÈRE(TRAFIC ROUTIER) ; IMPACT SUR L'ENVIRONNEMENT ; PLACE DE PARC ; PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT ; RAPPORT D'IMPACT SUR L'ENVIRONNEMENT ; POUVOIR D'APPRÉCIATION
Normes : LPE.9 ; LPE.10A ; LPE.55 ; OEIE.2 ; LPA.60.letb ; LPA.61
Parties : ASSOCIATION TRANSPORTS ET ENVIRONNEMENT,SECTION GENEVE & AUTRES, ASSOCIATION TRANSPORTS ET ENVIRONNEMENT, ASSOCIATION DES HABITANTS DE LA PRAILLE / COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIERE DE CONSTRUCTIONS, DEPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION, SOCIETE COOPERATIVE MIGROS-GENEVE
Résumé : Qualité pour recourir reconnue à une association d'habitants du quartier concerné, la majorité de ses membres étant touchée, s'agissant des inconvénients liés à l'exploitation d'un parking qui est susceptible d'affecter tout un quartier. Il n'était pas nécessaire de faire une nouvelle étude d'impact sur l'environnement pour autoriser le maintien d'un parking provisoire de 106 places car il n'existait pas de lien fonctionnel étroit avec les autres parkings du site, le cercle des utilisateurs étant différent. Autorisation confirmée avec l'adjonction de conditions précises visant notamment à assurer la séparation des deux installations ainsi que l'utilisation provisoire du parking jusqu'à la mise en service du CEVA mais au maximum jusqu'en 2012.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2113/2007-DCTI ATA/22/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 13 janvier 2009

 

dans la cause

ASSOCIATION TRANSPORTS ET ENVIRONNEMENT SUISSE
et
ASSOCIATION TRANSPORTS ET ENVIRONNEMENT SECTION DE GENÈVE
et
ASSOCIATION DES HABITANTS DE LA PRAILLE
représentées par Me David Metzger, avocat

contre

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIÈRE ADMINISTRATIVE
et
DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION
et
SOCIÉTÉ COOPÉRATIVE MIGROS-GENÈVE
représentée par Me Jean-Marc Siegrist, avocat


EN FAIT

1. La société coopérative Migros-Genève (ci-après : Migros ou l'entreprise) exploite la parcelle 1965, feuilles 52 et 54 de la commune de Carouge (ci-après : la commune) dans la zone industrielle de La Praille, à l'adresse 34, avenue Vibert. Elle se trouve dans un périmètre entouré par l'avenue Vibert et les rues Jacques Grosselin et Alexandre Gavard, notamment. Cette parcelle est la propriété de la Fondation pour les terrains industriels (ci-après : FTI).

2. La parcelle en cause abrite un immeuble destiné au service après-vente (ci-après : SAV) et au centre multimédia romand (ci-après : CMR) de Migros ainsi que des places de parc pour les employés de l'entreprise.

Sur les parcelles voisines se trouvent d'autres immeubles exploités par Migros, dont notamment le M-Parc.

3. Par requête enregistrée le 24 juin 2003, sous DD 98'600, Migros a requis la délivrance d'une autorisation de construire ayant pour objet une demande en autorisation définitive d'utilisation d'un parking provisoire en surface de 106 places sur la parcelle susmentionnée.

Le parking projeté était en fait un parking déjà existant de 114 places, autorisé à titre provisoire par décision APA 15'435 du 1er mars 1999, dont la capacité effective avait été ramenée à 106 par le biais de mesures internes de réduction des places de parc prises par Migros. Dans le courrier explicatif, daté du 20 juin qui accompagnait la requête, il était précisé que 84 places seraient destinées aux collaborateurs, 9 aux véhicules d'entreprise et 13 aux clients de M-Service.

4. Au cours de la procédure d'instruction de la requête en cause, les préavis nécessaires ont été requis auprès des instances compétentes, dont notamment la commune, l'office cantonal des transports (désormais office cantonal de la mobilité, ci-après : OCM), la FTI et la direction de l'aménagement du territoire (ci-après : DAT).

- Le 22 juillet 2003, la commune a préavisé favorablement le projet sous réserve notamment que la sortie située entre la desserte Vibert et l'îlot soit supprimée et que les croisements de circulation intérieure (sortie du parking principal) soient revus.

- Le 25 août 2003, l'OCM a constaté des divergences entre le dossier examiné et les données contenues dans le rapport d'impact sur l'environnement concernant le M-Parc (ci-après : RIE), du 13 août 1997 :

a. Le RIE mentionnait un total de 830 places dont 530 places pour la clientèle et 300 places pour les 820 collaborateurs,

b. Le plan général du site figurant au dossier mentionnait 1235 places, dont 530 places pour la clientèle et 705 places pour les collaborateurs.

Selon l'OCM, la requête avait pour objet l'agrandissement du parking M-Parc de 530 places destiné à la clientèle. Un tel agrandissement nécessitait la production d'un complément au RIE du 13 août 1997. En effet, dans cette hypothèse, le trafic généré serait bien différent de ce qui avait été envisagé, ce qui justifiait largement le complément évoqué.

Dans ce même préavis, l'OCM a estimé opportun que la procédure d'instruction de la requête soit suspendue, compte tenu de ce que l'ensemble du secteur de La Praille faisait l'objet d'une étude d'accessibilité et de stationnement.

- Le 27 août 2003, la commune a, à nouveau, préavisé favorablement le projet.

- Le 26 septembre 2003, la FTI a préavisé favorablement le projet à condition que des mesures soient prises sur la parcelle 1965 pour absorber les files d'attente aux heures de pointe.

- Dans son préavis du 24 novembre 2003, la DAT a relevé qu'il lui manquait des informations sur les conséquences, pour le secteur de La Praille, du maintien du parking actuellement provisoire, de sorte qu'elle a sollicité la suspension de l'instruction de la procédure dans l'attente des résultats de l'étude d'accessibilité et de stationnement conduite par l'OCM.

5. Dans le cadre de l'instruction de la requête en autorisation de construire, le département des constructions et des technologies de l'information (ci-après : DCTI) a également recueilli diverses observations.

- Par courrier du 5 août 2003, la Coordination transport et déplacement a fait valoir la nécessité d'un suivi de l'étude d'impact de 1997 de M-Parc. En outre, elle a estimé que la requête en cause était incomplète eu égard à l'absence d'information au sujet de l'utilisation du parking projeté et des besoins de l'entreprise. Enfin, elle a requis la production d'un plan de mobilité de l'entreprise permettant de limiter les besoins en places de parc.

- Par courrier du même jour, l'Association des habitants de La Praille a manifesté au département la satisfaction de voir que l'aménagement du parking de 106 places faisait l'objet d'une demande définitive. Si la requête était acceptée, la Migros disposerait de 530 places pour les clients de M-Parc et de 528 places pour les employés. L'acceptation de la demande définitive entraînerait la suppression des 177 places de parking se trouvant autour de l'ancien brico-loisirs. Elle souhaitait que dès que l'autorisation était accordée et que le parking autour de l'ancien brico-loisirs ne soit plus utilisé. Cette autorisation devait clarifier définitivement la situation et les places devaient être utilisées exclusivement selon l'affectation prévue par les différentes autorisations.

6. Le 29 septembre 2005, le DCTI a invité le département du territoire (ci-après : DT) à se déterminer sur la demande d'autorisation en précisant qu'en avril 2005 l'OCM avait indiqué que l'étude d'accessibilité et de stationnement du secteur serait disponible rapidement.

7. Par courrier du 24 octobre 2005, adressé au DCTI, le DT a invoqué un manque d'information relatif au parking projeté. S'il s'agissait d'un accroissement de la capacité de parcage destiné à la clientèle ceci impliquait sans aucun doute un complément à l'étude d'impact sur l'environnement (ci-après : EIE) qui avait accompagné la réalisation du complexe M-Parc. S'il s'agissait d'un parking destiné aux employés de la Migros, le préavis serait négatif puisque ceux-ci disposaient déjà d'une surabondance notoire de places de stationnement. Ce courrier se basait sur une note interne de l'OCM du 23 octobre 2005.

8. Dans son courrier du 13 décembre 2005 au DCTI, Migros a indiqué que la destination du parking était connue depuis le dépôt de la requête en autorisation. Il était erroné d'affirmer que ces 106 places s'ajouteraient aux 220 places existantes autour de l'ancien Brico-Loisirs, étant précisé que Migros s'était séparée de la parcelle de Brico-Loisirs. Sur l'ensemble du site (centrale de distribution, M-Parc, MM Vibert, M Service et CMR) l'entreprise disposait de 561 places pour 1123 collaborateurs. Une étude de mobilité avait été entreprise auprès des collaborateurs afin de disposer de faits objectifs pour élaborer des propositions mais compte tenu des offres actuelles en transports publics, proposer des alternatives valables au transport individuel n'était pas aisé.

9. Diverses concertations réunissant notamment le DT, la FTI, la commune et l'OCM ont eu lieu.

10. Par courrier du 26 juin 2006, faisant suite à la séance du 15 juin 2006, Migros a présenté la situation générale des places de stationnement sur la parcelle en cause, soit :

- Le parking existant, à raison de 84 places collaborateurs, 9 places pour les véhicules d'entreprise et 13 places pour les clients du M-service, correspondait à un réel besoin et était utilisé essentiellement par ses collaborateurs,

- Elle sollicitait l'utilisation des 84 places collaborateurs pour ses clients du M-Parc à titre exceptionnel, lorsque le giratoire de l'avenue Vibert était saturé ou lors d'événements commerciaux particuliers (environ 6 fois/an) organisés au M-Parc.

Migros a également exposé les raisons pour lesquelles elle disposait sur le site de La Praille de 561 places de stationnement pour 1095 collaborateurs, soit, davantage que ce qui était prévu pour la zone par la norme Circulation 2000, à savoir une place pour 6 emplois. L'entreprise a ainsi informé le DCTI qu'une grande partie de ses employés résidaient hors du canton et que les possibilités offertes actuellement par les transports publics ne répondaient pas à leurs besoins (durée du trajet en transports publics doublée par rapport au transport individuel, système parc et rail inadapté).

Migros a en outre présenté son programme de mobilité incitatif axé sur un soutien financier, une campagne de sensibilisation, des mesures d'orientation, une coordination des mesures et un partenariat avec les instances compétentes en matière de mobilité. Elle précisait en outre les éléments suivants :

- depuis l'été 2005, elle offrait à l'ensemble de ses collaborateurs un abonnement aux transports publics genevois à des tarifs préférentiels,

- elle avait offert un rabais promotionnel supplémentaire lors du dernier trimestre 2005, 10% de son personnel ayant déjà souscrit à cette offre,

- en 2005, elle avait organisé des campagnes de sensibilisation de son personnel à travers sa participation au concours "BIKE TO WORK" organisé par Pro vélo,

- en 2006, elle rééditait l'expérience sous la forme d'une action interne similaire,

- elle avait rendu les places de stationnement payantes depuis le 1er janvier 2006,

- elle participait au groupe de travail réunissant des représentants de l'OCM et de la FTI et ayant pour but de proposer des solutions aux problèmes de circulation des poids lourds dans la zone industrielle de La Praille et sur la commune de Carouge ainsi qu'au problème de mobilité de ses collaborateurs,

- elle avait décidé du principe d'un plan de mobilité, tenant en compte la mise en service du CEVA et les conséquences de sa mise en place sur la configuration actuelle de la zone de La Praille.

Pour le surplus, Migros demandait le maintien des 84 places collaborateurs au plus tard jusqu'à la mise en service du CEVA prévue en 2012.

11. Par pli du 10 juillet 2006 adressé au DCTI, le DT s'est rallié à l'avis de Migros, au vu du plan de mobilité présenté par cette dernière et a préconisé la délivrance d'une autorisation, valable jusqu'à la mise en service du CEVA.

12. Le 25 juillet 2006, l'OCM a émis un préavis complémentaire favorable fondé sur le plan de mobilité de Migros du 26 juin 2006, et des engagements qu'il contenait.

Le plan de mobilité, articulé autour de l'évolution de la desserte en transports publics du secteur, était pertinent. Il paraissait justifié de coordonner les objectifs de réduction des parts modales d'automobiles avec la mise en service du CEVA, infrastructure qui offrirait une alternative réelle pour la Haute-Savoie.

13. Par courrier du 14 août 2006, faisant suite aux explications et au plan de mobilité de l'entreprise, le DT a informé le DCTI de ce que la proposition de Migros semblait adéquate dans la mesure où elle se fondait sur un tel plan.

14. Par décision, datée du 22 septembre 2006, le DCTI a délivré l'autorisation de construire sollicitée.

La condition n°5 de ladite autorisation de construire prévoyait expressément le caractère provisoire de celle-ci, en indiquant qu'elle était délivrée en référence au plan de mobilité d'entreprise exposé par Migros et assortie de la condition selon laquelle le parking en question ne pourrait pas être maintenu au-delà de la mise en service du CEVA sans réexamen par l'Etat de la situation qui prévaudrait alors.

Les plans visés "ne varietur" faisaient état d'un total de 1058 places sur le site, dont 530 destinées aux clients devant le M-Parc et 528 pour les employés, répartis sur l'ensemble du site. Sur la parcelle 1965, outre les 106 places de stationnement qui faisaient l'objet de la présente procédure, figuraient 105 places déjà existantes destinées aux collaborateurs de Migros.

15. Par acte daté du 26 octobre 2006, l'Association transports et environnement (ci-après : l'ATE)-Genève, l'ATE-Suisse et l'Association des habitants de La Praille ont interjeté un recours auprès de la commission cantonale de recours en matière de constructions (ci-après : la commission) remplacée depuis le 1er janvier 2009 par la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : CCRA) contre la décision précitée, faisant valoir l'établissement incomplet des faits, la violation des dispositions de la loi fédérale sur la protection de l’environnement du 7 octobre 1983 (LPE - RS 814.01) et l'abus du pouvoir d'appréciation.

16. Dans sa réponse du 1er décembre 2006, Migros a conclu au rejet du recours.

Depuis 1999, année de l'octroi de l'autorisation provisoire, le nombre de places de stationnement sur le site avait diminué de 293 unités. La tendance était donc à une diminution des possibilités de stationnement. Les 106 places ne seraient ouvertes à la clientèle que de manière très limitée, en fonction des difficultés de circulation dans les environs. L'autorisation, qui demeurait provisoire, avait été accordée sur la base d'un préavis positif de l'OCM, tous les services compétents s'étant par ailleurs concertés.

17. Lors de l'audience de comparution personnelle des parties du 25 janvier 2007, celles-ci ont persisté dans leur position respective.

18. Dans sa détermination du 15 mars 2007, le DCTI a confirmé la teneur de l'autorisation délivrée sur la base du préavis favorable de l'OCM.

19. Par décision du 16 avril 2007, notifiée le 30 avril 2007, la CCRA a rejeté ledit recours. S'agissant d'un parking de moins de 300 places, la loi n'imposait pas d'étude d'impact. En conséquence, les dispositions de la LPE n'avaient pas été violées. Le DCTI ayant recueilli les préavis nécessaires des instances concernées, le dossier était complet. Enfin, le DCTI avait fait une saine application de la loi en octroyant une autorisation limitée dans le temps au vu des circonstances et notamment, à terme, l'amélioration des transports en commun dans le secteur, grâce à la mise en service du CEVA.

20. Par acte daté du 31 mai 2007, l'ATE-Genève, agissant tant en son nom propre qu'au nom de l'ATE-Suisse, et l'Association des habitants de La Praille (ci-après : les recourantes), ont interjeté recours contre la décision précitée auprès du tribunal de céans.

L'état de fait était lacunaire et ne permettait pas de comprendre notamment le changement d'appréciation du DT entre son courrier du 24 octobre 2005 et celui du 14 août 2006.

Le parking de 106 places constituait un agrandissement considérable de l'installation prévue sur le site. Dans l'autorisation provisoire de 1997, il était prévu que ce parking devait être abandonné impérativement au moment de la fin des travaux de M-Parc, ce qui n'avait pas été le cas. Il fallait examiner la pérennisation du parking de 106 places dans la globalité des places de stationnement que proposait Migros dans le secteur de La Praille. De ce fait, lors du dépôt de la demande d'autorisation en 2003, les instances compétentes, notamment l'OCM, avaient estimé qu'un complément au rapport d'impact sur l'environnement de M-Parc était justifié. Les préavis positifs délivrés par la suite, sans qu'il soit procédé à une telle étude, ne fournissaient aucun argument valable permettant de s'écarter de cette position moins de huit mois plus tard. En conséquence, en autorisant le maintien de ce parking sans procéder préalablement à une EIE, le DCTI avait violé tant la LPE que l'ordonnance sur la protection de l’air du 16 décembre 1985 (OPair - RS 814.318.142) et l'ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986 (OPB - RS 814.41).

Les normes retenues par le concept Circulation 2000, prévoyant une place de parc pour six emplois n'étaient pas respectées dans le secteur. En octroyant l'autorisation dans ces conditions, le DCTI avait commis un excès de son pouvoir d'appréciation et violé le principe de l'égalité de traitement.

Enfin, le DCTI avait abusé de son pouvoir d'appréciation en accordant l'autorisation sans procéder à une EIE et en se basant uniquement sur un courrier explicatif de Migros qui ne prenait aucun engagement contraignant en matière de mobilité d'entreprise.

21. Dans sa réponse du 10 juillet 2007, la Migros a conclu au rejet du recours. Elle s'en est rapportée à justice pour ce qui avait trait à la recevabilité du recours interjeté par l'ATE-Genève. En revanche, elle a contesté la qualité pour recourir de l'Association des habitants de La Praille. Les faits pertinents avaient été établis de manière complète. En particulier le changement de position de l'OCM était justifié par les informations qui lui avaient été communiquées par l'entreprise.

Le parking litigieux existant déjà, il était douteux que l'article 9 de la LPE soit applicable. La norme Circulation 2000 n'était pas violée. En effet, elle n'était contraignante que pour les autorités dans le cadre de la délivrance de l'autorisation de construire. Elle n'était pas un moyen de droit permettant aux autorités compétentes de corriger une situation préexistante non-conforme. A cet égard, Migros n'avait pas fait l'objet d'une décision d'une des autorités précitées l'enjoignant de prendre toutes les mesures utiles pour respecter les quotas prévus dans Circulation 2000.

L'OPAIR et l'OPB n'avaient pas été violées. Enfin, le DCTI n'avait pas abusé de son pouvoir d'appréciation.

22. Par acte du 31 juillet 2007, le DCTI a conclu au rejet du recours.

En 2006, les autorités compétentes avaient reçu des informations supplémentaires sur la nature exacte de la requête et ses conséquences, en particulier la présentation d'un plan de mobilité et d'un plan de réduction de la capacité de parcage. Ces éléments avaient motivé l'évolution de la position du DT sur la nécessité d'un complément à l'étude d'impact et étaient à l'origine du préavis favorable du 25 juillet 2006.

Un complément d'EIE n'était pas nécessaire puisque le parking litigieux était un parking distinct de celui de M-Parc et donc inférieur à 300 places.

En ce qui concernait la norme Circulation 2000, la situation générale de Migros évoluait vers un état conforme à ce que prévoyait celle-ci, soit un véhicule pour six emplois. La décision du DCTI d'autoriser de manière provisoire l'utilisation du parking litigieux reposait sur des préavis favorables rendus par les autorités techniques compétentes, elle était également fondée sur des engagements contraignants.

En conséquence, il n'avait pas abusé de son pouvoir d'appréciation.

23. Le 27 septembre 2007, le juge délégué a entendu les parties en comparution personnelle.

L'ensemble des places de parc sur le site de La Praille était réparti en 528 places pour les employés et 530 pour les clients. Ces dernières se trouvaient exclusivement devant le M-Parc. Les places qui faisaient l'objet de l'autorisation querellée étaient destinées aux collaborateurs, sous réserve de quelques-unes. Migros souhaitait pouvoir mettre ce parking à disposition de la clientèle en cas d'évènements spéciaux comme les journées de rabais qui avaient lieu la semaine ou les opérations commerciales de fin d'année qui se tenaient en fin de semaine. Les soldes n'étaient pas considérés comme des opérations exceptionnelles et n'étaient pas concernés par l'ouverture du parking en appoint.

Le périmètre pris en compte dans l'étude d'impact de 1997 ne comprenait pas certaines zones dans lesquelles les collaborateurs pouvaient se parquer.

Il n'existait pas pour l'instant de plan de mobilité d'entreprise sous forme de document. Celui-ci se composait d'un certain nombre de mesures énumérées dans les écritures de Migros et était évolutif. L'entreprise projetait de constituer un groupe de travail auquel serait associé un consultant de mobilité en vue d'établir un document permettant de gérer la situation jusqu'en 2012, date d'entrée en fonction du CEVA qui permettrait d'offrir une alternative intéressante aux collaborateurs résidant en France et ne disposant pas de transports publics performants.

Les nouveaux collaborateurs étaient informés qu'ils n'avaient pas le droit à une place de parc. Ces places étaient désormais payantes. Les tarifs variaient entre CHF 25.- et 80.- par mois. Le premier tarif concernait les places qui n'étaient pas attribuées, le second celles qui l'étaient.

24. Suite à l'audience précitée, l'OCM a indiqué au tribunal de céans par pli du 5 novembre 2007 que les études de trafic dans le secteur de La Praille avaient été interrompues par le processus engagé par l'Etat de Genève à propos de la densification du secteur Praille-Acacias-Vernets. Les quotas de stationnement y seraient limités avec une grande rigueur. Le plan directeur de Carouge, en cours d'élaboration, serait caractérisé par une dissuasion très rigoureuse du transit à travers cette commune tant sur l'axe Nord-Sud que sur celui Est-Ouest. Il avait toujours été clair pour l'OCM que le Conseil d'Etat avait conclu à une stratégie progressive de déploiement d'un plan de mobilité de la Migros avec, au dernier stade la mise en service du CEVA, prévue pour 2012. Celui-ci ne constituait pas la seule amélioration des transports collectifs, de nombreuses lignes TPG étant améliorées chaque année, accompagnées de réalisation de parkings relais.

25. Par courrier du 10 décembre 2007, les recourantes ont transmis au tribunal de céans une lettre du service cantonal de protection de l'air auquel étaient annexés la carte des immissions du dioxyde d'azote à Carouge en 2006, les détails des mesures de 6 analyseurs/capteurs passifs concernant les immissions de dioxyde d'azote pour les années 2002-2006 ainsi que les valeurs des émissions selon les sources polluantes calculées sur le territoire de la commune en 2006.

26. Le 3 avril 2008 le juge délégué a procédé à l'audition de M. P.-A. Gesseney, urbaniste, collaborateur à l'OCM.

L'OCM avait délivré un préavis négatif au mois d'août 2003 parce qu'il ne disposait pas d'un bilan complet des places de stationnement de l'exploitation. Il était important également de savoir si les places de parking faisant l'objet de la demande d'autorisation devaient être affectées aux clients ou aux employés. Enfin, l'entreprise était au bénéfice d'une situation acquise pour le quota des places de parc qui était élevé par rapport au nombre d'employés.

Il avait revu sa position suite au courrier de Migros du 26 juin 2006 prévoyant un plan de mobilité de l'entreprise dans la perspective du CEVA. Il avait paru intéressant et il n'y avait pas de raison de douter de la volonté de Migros-Genève de tenir ses engagements.

A son avis la desserte en transports publics était déjà bonne actuellement puisque l'arrêt du bus D se situait à un peu plus de 300 mètres de l'entrée des employés du M-Parc, l'OCM considérant qu'un endroit était bien desservi lorsque les arrêts des transports publics étaient au plus à 300 mètres. En revanche, l'arrêt de Bachet de Pesay était à peu près à un kilomètre. L'impact de l'utilisation du parking en cause pour la clientèle lors d'occasions exceptionnelles, ne serait pas perceptible s'agissant de la circulation. L'encombrement se situait au niveau du carrefour Grosselin-Vibert et se répercutait sur le carrefour M- Parc.

A l'heure actuelle, il n'y avait pas de réglementation formelle en matière de stationnement pour les entreprises, les préavis étaient émis sur la base de "circulation 2000". En l'état, l'entente avec les entreprises concernées était privilégiée. Mettre une exigence relative à un plan de mobilité dans une autorisation de construire n'avait pas beaucoup de sens puisque l'autorisation se rapportait à des éléments de construction alors que le plan de mobilité était établi en fonction de l'exploitation de l'entreprise, et plus particulièrement des caractéristiques de son personnel. Un plan de mobilité était une démarche préconisée par l'OCM qui était entreprise par les sociétés concernées. Il contenait les engagements de la société y compris ceux qui avaient été négociés avec le personnel, cas échéant les accords passés avec l'OCM par rapport à des prestations qui devaient être fournies via les TPG.

Se référant à la note du 13 octobre 2005 dont il était l'auteur, il précisait que l'étude d'impact était de la compétence du DCTI et qu'à l'époque il était convaincu qu'il y aurait un petit complément à l'EIE dont il ne doutait pas que le résultat soit positif. S'agissant de l'étude d'accessibilité et de stationnement pour l'ensemble du secteur de La Praille, à laquelle il était fait référence dans le préavis du 25 août 2003, elle avait été engagée pour un projet Migros mais elle avait été ensuite intégrée dans le projet Praille-Acacias-Vernets. Elle ne serait pas terminée pour elle-même mais toutes les données seraient utilisées.

Le représentant de Migros a indiqué qu'un urbaniste avait été mandaté avec la mission d'étudier les solutions permettant un accès au site en minimisant les nuisances. Pour le surplus, le parking en cause était réservé au personnel et n’était plus ouvert à la clientèle. Un portail le séparait d'ailleurs du reste du M-Parc. Les vigiles avaient pour instruction d'interdire l'accès à ce parking. Ils étaient en train d'installer un système de reconnaissance de plaques minéralogiques qui permette une ouverture automatique des portes exclusivement aux véhicules des collaborateurs de la Migros, dûment enregistrés. Cependant, selon le représentant de l'association des habitants de La Praille, ce portail était toujours ouvert.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ce point de vue (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. L'article 55 LPE régissant la qualité pour recourir des associations de protection de l'environnement a été modifié par une novelle du 20 décembre 2006, entrée en vigueur le 1er juillet 2007 (RO 2007 2701). ATE-Suisse bénéficiait du droit de recours spécial prévu par l'article 55 aLPE (chiffre 20 de l'annexe de l'ordonnance relative à la désignation des organisations habilitées à recourir dans les domaines de la protection de l'environnement ainsi que de la protection de la nature et du paysage - ODO - RS 814.076). Elle figure toujours au chiffre 20 de l'annexe ODO, depuis l'entrée en vigueur de la novelle.

Par ailleurs, les organisations nationales peuvent être représentées par leurs sections cantonales dans l'exercice des oppositions et des recours cantonaux. Cette représentation s'entend très largement ; il n'est même pas nécessaire que la section locale agisse expressément au nom de l'association nationale. Il suffit qu'il existe un lien étroit reconnaissable entre elle et l'association nationale (ATA/733/2003 du 7 octobre 2003 ; I. ROMY, Les droits de recours administratif des particuliers et des organisations en matière de protection de l'environnement, in DEP 2001, p. 248 ss, p. 263). Partant la qualité pour recourir doit être reconnue tant à ATE-Suisse qu'à ATE-Genève.

3. Migros conteste la qualité pour recourir de l’association des habitants de La Praille. Cette dernière fonde sa qualité pour recourir sur le fait qu'elle a pour but la défense de ses membres et que ceux-ci disposent de cette qualité à titre individuel.

a. Le recours corporatif suppose que l’entité en cause dispose de la personnalité juridique, que ses statuts la chargent d’assurer la défense des intérêts de ses membres, que la majorité, ou tout au moins un grand nombre de ces derniers, soit touchée et qu’enfin chacun des membres possède, à titre individuel, la qualité pour recourir (ATF 130 II 519 ; 130 I 85 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1A.83/2006 du 1er juin 2007, consid. 2.6 ; B. BOVAY, Procédure administrative, Berne 2000, p. 363 ; A. FLUECKIGER/C.-A. MORAND/T. TANQUEREL, Evaluation du droit de recours des organisations de protection de l’environnement, Cahier de l’environnement no 314, Berne 2000, pp. 62 et 67 et les autres références citées).

En l’espèce, la recourante est constituée en association. Même si ses statuts ne sont pas particulièrement explicites sur la question de la représentation en justice des intérêts de ses membres, on peut considérer que cette faculté découle des buts statutaires qui l’habilitent à soutenir les démarches en justice en vue de protéger le périmètre formé par le boulevard des Promenades, les rues de Montfalcon et des Epinettes, les routes des Acacias et du Grand-Lancy, l'avenue Eugène -Lance et la route de Saint-Julien. Il reste à déterminer si les membres qui la composent sont touchés en majorité ou en grand nombre par l'autorisation attaquée et s’ils disposent, à titre individuel, de la qualité pour agir.

b. A teneur de l’article 60 lettre b LPA, toute personne qui est touchée directement par une décision et possède un intérêt personnel digne de protection à ce que celle-ci soit annulée ou modifiée est titulaire de la qualité pour recourir (ATA/438/2006 du 31 août 2006, consid. 3).

Cette notion de l’intérêt digne de protection est identique à celle qui a été développée par le Tribunal fédéral sur la base de l’article 103 lettre a de la loi fédérale d’organisation judiciaire du 16 décembre et qui était, jusqu’à son abrogation le 1er janvier 2007, applicable aux juridictions administratives des cantons, conformément à l’article 98a de la même loi (Arrêt du Tribunal fédéral 1A.83/2006 du 1er juin 2007, consid. 2.1 ; ATA/567/2006 du 31 octobre 2006, consid. 3a et les références citées ; ATA/434/2005 du 21 juin 2005, consid. 2). Elle correspond aux critères exposés à l’article 89 alinéa 1, lettre c de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005, en vigueur depuis le 1er janvier 2007 (LTF - RS 173.110 ; FF 2001 4127) et que les cantons sont tenus de respecter, en application de la règle d’unité de la procédure qui figure à l’article 111 alinéa 1 LTF (FF 2001 4146).

c. En ce qui concerne les voisins, il résulte de la jurisprudence que seuls ceux dont les intérêts sont lésés de façon directe et spéciale possèdent l’intérêt particulier requis. Cette lésion directe et spéciale suppose l’existence d’une communauté de fait entre les intérêts du destinataire de l’acte attaqué et ceux des tiers (ATF 110 Ib 398 consid. 1b p. 400 ; ATA/101/2006 précité ; ATA/653/2002 du 5 novembre 2002 ; ATA/35/2002 du 15 janvier 2002 et les références citées).

d. Le recours peut être formé par le propriétaire d’un immeuble directement voisin, ou relativement proche de la construction ou de l’installation litigieuse. S’il est certain ou très vraisemblable que l’installation litigieuse sera à l’origine d’immissions - bruit, poussières, vibrations, lumière, fumée - atteignant spécialement les voisins, même situés à une certaine distance, ces derniers peuvent avoir qualité pour recourir (Arrêt du Tribunal fédéral 1A.83/2006 du 1er juin 2007, consid. 2.1 et les références citées).

Ces conditions sont en principe considérées comme remplies lorsque le recours émane du propriétaire d’un terrain directement voisin de la construction ou de l’installation litigieuse (ATF 121 II 171 consid. 2b p. 174 ; Arrêts du Tribunal fédéral 1A.222/2006 et 1P.774/2006 du 8 mai 2007, consid. 5). Elles peuvent aussi être réalisées même en l’absence de voisinage direct, quand une distance relativement faible sépare l’immeuble des recourants de l’installation litigieuse (ATF 121 II 171 consid. 2b p. 174 et la jurisprudence citée ; ATA/101/2006 précité).

La jurisprudence traite notamment de cas où cette distance est de 25 mètres (ATF 123 II 74 consid. 1b non publié), de 45 mètres (Arrêt du Tribunal fédéral non publié M. du 4 octobre 1990, consid. 3b), de 70 mètres (Arrêt du Tribunal fédéral non publié C. du 12 juillet 1989, consid. 2), de 120 mètres (ATF 116 Ib 323 consid. 2) ou de 150 mètres (ATF 121 II 171 consid. 2c/bb p. 175). La qualité pour agir a en revanche été déniée dans des cas où cette distance était de 800 mètres (ATF 111 Ib 159 consid. 1b), respectivement de 600 mètres (Arrêt B. du 8 avril 1997 publié in PRA 1998 5, p. 27), de 220 mètres (Arrêt non publié B. du 9 novembre 1998, consid. 3c), de 200 mètres (Arrêt du Tribunal fédéral du 2 novembre 1983 publié in ZBl. 85/1984, p. 378), voire de 150 mètres (ATF 112 Ia 119 consid. 4b). S’agissant de la qualité pour recourir contre un PLQ, le Tribunal administratif a jugé qu’une distance de l’ordre de 80 à 225 mètres par rapport au projet litigieux permettait encore de confirmer la présence d’un intérêt digne de protection au regard de la loi et de la jurisprudence (ATA/438/2006 du 31 août 2006, consid. 3c). Il a en revanche dénié cette qualité à des personnes domiciliées à une distance de plus de 450 mètres d’un projet de stade de football (ATA/492/2000 du 14 août 2000, consid. 3 et les autres références citées).

En l’espèce, la majorité des membres de l’association est touchée, s'agissant des inconvénients liés à l'exploitation d'un parking qui est susceptible d'affecter tout un quartier. En effet, la majorité de ceux-ci est domiciliée avenue Vibert, rue Grosselin et rue Gavard, soit à proximité immédiate de la parcelle concernée ou dans son périmètre.

En conséquence, le tribunal de céans admettra la qualité pour recourir de l'association.

4. Les recourantes se plaignent d'une constatation incomplète des faits pertinents (article 61 alinéa 1 let. b LPA). En particulier, elles reprochent au DCTI d'avoir instruit le dossier de manière incomplète en omettant de demander les raisons du revirement de l'OCM ainsi que du DT.

Le préavis réservé que l'OCM avait émis en 2003 était basé sur trois éléments :

- La demande d'autorisation déposée par Migros en 2003 visait l'autorisation définitive d'utilisation du parking de 106 places ;

- l'OCM partait du principe que Migros souhaitait que le parking de 106 places soit exploité par la clientèle, ce qui posait un problème au vu de l'EIE réalisée en 1997 ;

- l'ensemble du secteur de La Praille faisait l'objet d'une étude d'accessibilité et de stationnement qui ne serait pas sans influence sur la situation de Migros, raison pour laquelle le dossier devait être laissé en suspens.

Interpellé en 2005, le DT s'est rangé à l'avis de l'OCM, estimant que s'il s'agissait de l'accroissement du parking destiné à la clientèle, cela impliquait un complément d'EIE alors que s'il était destiné aux employés, le préavis serait négatif puisque ceux-ci disposaient d'une surabondance notoire de places de parc.

Le revirement de l'OCM et du DT a eu lieu après plusieurs concertations réunissant les intéressés et a fait suite au courrier de Migros du 26 juin 2006 dans lequel celle-ci présentait un plan de mobilité de l'entreprise évolutif en fonction de l'accroissement de l'offre des transports publics. Elle ne demandait plus l'autorisation définitive d'exploiter les 106 places de parc mais une autorisation provisoire conditionnée à la mise en service du CEVA en 2012.

Au vu de ce qui précède, on ne peut faire grief au DCTI d'avoir constaté de manière incomplète les faits pertinents puisque les préavis positifs de l'OCM (25 juillet 2006) et du DT (14 août 2006) faisaient expressément référence au courrier de Migros du 26 juin 2006. Le revirement du DT et de l'OCM était lié directement aux éclaircissements apportés par l'entreprise et au fait que l'autorisation sollicitée n'était plus que provisoire. Cet argument doit ainsi être écarté.

5. Les recourantes invoquent encore l'abus du pouvoir d'appréciation du DCTI.

a. A teneur de l'article 61 alinéa 1 lettre a LPA, le recours peut être formé pour violation de droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation.

b. Le pouvoir d'appréciation de l'administration n'est limité que par son excès ou son abus (ATA/235/2008 du 20 mai 2008 consid. 17 et références citées ; P. MOOR, Droit administratif, Vol. 1, Berne 1994, 2ème éd., p. 376, n. 4.3.2.3). Chaque fois que l’autorité administrative suit les préavis des commissions consultatives, l’autorité de recours doit s’imposer une certaine retenue, fonction de son aptitude à trancher le litige (ATA/306/2008 du 10 juin 2008 consid. 7d et Arrêts cités ; T. TANQUEREL, La pesée des intérêts vue par le juge administratif in C.-A. MORAND, La pesée globale des intérêts, Droit de l’environnement et aménagement du territoire, Bâle et Francfort-sur-le-Main, 1996, p. 201 ; P. MOOR, op. cit., p. 246, n. 2.2.5.4). Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s’écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes (ATA/423/2008 du 26 août 2008).

En l'espèce, le DCTI a suivi les préavis positifs rendus par les instances techniques compétentes.

Les recourantes se sont plaintes que certains de ceux-ci étaient tout d'abord négatifs et ne sont devenus positifs que dans un second temps. Il n'est cependant pas rare qu'une autorité de préavis change d'opinion en cours de procédure en fonction des précisions qui peuvent lui être fournies ou de l'évolution des circonstances. Ce seul élément n'est donc pas déterminant.

Il résulte également du dossier que l'étude d'accessibilité et de stationnement de La Praille qui, en 2003, paraissait devoir être rendue assez rapidement, a été interrompue pour être intégrée dans un processus plus vaste destiné à réglementer tout le secteur Praille-Acacias-Vernets qui n'est pas encore terminé. Cet élément a également influencé les instances de préavis et n'est pas étranger à la décision du DCTI d'adopter une solution temporaire d'une durée limitée.

Au vu des circonstances du cas d'espèce, le département a fait une saine utilisation de son pouvoir d'appréciation en accordant l'autorisation à titre provisoire jusqu'à la mise en service d'un important réseau de transports en commun. Partant, ce grief doit également être rejeté.

6. Les recourantes invoquent la violation des articles 9 LPE et 2 alinéa 1 lettre a OEIE. Le DCTI, en autorisant la pérennisation du parking de 106 places sans procéder préalablement à une étude d'impact sur l'environnement avait violé le droit fédéral.

a. La réglementation de l'étude d'impact dans la LPE a également été modifiée par la novelle du 20 décembre 2006, entrée en vigueur le 1er juillet 2007 (RO 2007 2701). Jusqu'à cette date, l'étude de l'impact sur l'environnement était définie à l'article 9 LPE. Depuis lors, cette procédure est réglée au chapitre 3 de la loi (art. 10a à 10d LPE), l'article 9 LPE ayant en conséquence été abrogé […]. La novelle du 20 décembre 2006 ne contient pas de disposition transitoire à propos de l'application du nouveau droit dans les procédures en cours. Comme les règles du droit fédéral en matière d'étude d'impact sont des règles de procédure, complémentaires aux règles formelles ordinaires concernant les plans d'affectation et les autorisations de construire (cf. ATF 116 Ib 260 consid. 1a p. 262), le nouveau droit est en principe directement applicable dès son entrée en vigueur (Arrêt du Tribunal fédéral 1C_86/2008 du 10 juillet 2008 consid. 4.2.1 ; cf. notamment, à propos des régimes de droit transitoire en droit administratif, U. MEYER/P. ARNOLD, Intertemporales Recht - Eine Bestandesaufnahme anhand der Rechtsprechung der beiden öffentlich-rechtlichen Abteilungen des Bundesgerichts und des Eidgenössischen Versicherungsgericht, RDS 2005 I p. 135).

b. En cas de changement de législation en cours de procédure, et à défaut de dispositions expresses, l’autorité de recours peut hésiter entre le droit en force à la date de la décision attaquée et celui qui fait règle au jour où elle tranche elle-même (A. GRISEL, Traité de droit administratif, p. 154).

En droit public de la construction, la loi applicable est celle en vigueur au moment où statue la dernière instance saisie du litige. Si l’affaire est traitée par plusieurs autorités, sont déterminantes en principe les prescriptions en force lorsque la dernière juridiction statue. La jurisprudence admet ainsi d’une façon générale qu’une demande d’autorisation de bâtir déposée sous l’empire du droit ancien est examinée en fonction des dispositions en vigueur au moment où l’autorité statue sur cette demande, même si aucune disposition légale ou réglementaire ne le prévoit : les particuliers doivent en effet toujours s’attendre à un changement de réglementation (ATF 101 1b 299). En statuant sur une demande d’autorisation suivant des prescriptions devenues obligatoires après son dépôt, le juge ne tombe pas dans l’arbitraire ni ne viole une disposition impérative pas plus que la garantie de la propriété (ATF 107 1b 138 ; ATA/792/2004 du 19 octobre 2004 ; ATA/541/2002 du 10 septembre 2002 ; A. GRISEL, l’application du droit public dans le temps ZBl 1974, pp. 251-252 ; A. KOELZ, Intertemporalesverwaltungsrecht, RDS 1983, p. 191 ; M. BORGHI, Il diritto amministrativo intertemporale, RDS 1983, p. 485).

Tant l'autorisation de construire que la décision de la CCRMC ont été rendues sous l'empire de l'ancien droit (aLPE). Toutefois, en vertu des principes rappelés ci-dessus, le tribunal de céans statuera en appliquant la LPE dans sa teneur actuelle.

7. Selon les recourantes, il se justifiait de procéder à un complément de l'EIE réalisée en 1997 parce qu'en additionnant les places existantes sur le site et les 106 places de stationnement faisant l'objet de l'autorisation querellée, le seuil de 830 places prévu dans l'EIE de 1997 était largement dépassé.

a. Aux termes de l'article 10 a alinéa 1 LPE, avant de prendre une décision sur la planification et la construction ou la modification d'installations, l'autorité examine le plus tôt possible leur compatibilité avec les dispositions en matière d'environnement. L'alinéa 3 de cette même disposition précise que le Conseil fédéral désigne les types d'installations qui doivent faire l'objet d'une étude d'impact ; il peut fixer des valeurs seuil. Il vérifie périodiquement les types d'installation et les valeurs seuil, et les adapte le cas échéant.

b. Le point 11.4 de l'annexe à l'OEIE relative aux installations soumises à l'EIE et aux procédures décisives prévoit que les parcs de stationnement pour plus de 300 voitures sont soumis à l'étude d'impact.

Compte tenu du renvoi à l'OEIE contenu dans l'article 10 a alinéa 3 LPE ainsi qu'au fait que l'OEIE n'a pas subi de modification sur ce point depuis l'entrée en vigueur de la novelle, la jurisprudence développée sous l'empire de l'article 9 aLPE et de l'OEIE reste applicable (Arrêt du Tribunal fédéral 1C_17/2008 du 13 août 2008 consid. 3.1) .

En l'occurrence, l'autorisation porte sur 106 places de stationnement, chiffre qui est bien en deçà de celui du chiffre de 300 places mentionné au point 11.4 de l'annexe à l'OEIE. La construction d'une telle installation à elle seule ne nécessiterait pas une EIE.

c. Selon le Tribunal fédéral, des ouvrages distincts doivent être considérés comme des éléments d'une installation unique, et donc assujettis à l'étude d'impact sur l'environnement s'ils atteignent ensemble le seuil déterminant, lorsqu'il existe entre eux un lien fonctionnel et spatial étroit (RDAF I 1998 p. 98, consid. 3).

Dans le cas d'un parking d'hôtel qui jouxtait une place de stationnement publique, le Tribunal fédéral a nié l'existence d'un rapport fonctionnel parce que les deux installations n'étaient pas exploitées en commun et que le cercle des utilisateurs demeurait également séparé (DEP 2004 p. 351).

En l'espèce, il est indéniable que la centrale Migros de La Praille est formée d'un certain nombre de parcelles qui se jouxtent, toutes exploitées par Migros. Le lien spatial existant entre elles est ainsi avéré. Toutefois, les places de stationnement prévues à l'usage de la clientèle sont rassemblées devant le M-parc. En revanche, les 106 places litigieuses, destinées en majorité aux employés, se trouvent sur une parcelle adjacente qui comporte déjà 105 places de stationnement vouées à l'usage exclusif des employés de Migros. Il s'ensuit que les cercles des utilisateurs du parking querellé et du M-Parc ne sont pas les mêmes, les flux de circulation générés ne suivant pas les mêmes habitudes et horaires. Les 13 places réservées à la clientèle dans le parking querellé constituent un accroissement tout à fait marginal par rapport aux 530 places destinées à la clientèle entourant le M-Parc. Les parkings existants sur la parcelle 1965 sont séparés du reste du site par des barrières. Certes, si celles-ci sont ouvertes en permanence et que le parking est librement accessible à la clientèle, cette séparation est illusoire.

Il s'ensuit que le parking litigieux ne peut être considéré comme dépourvu de lien fonctionnel avec l'ensemble du site que pour autant que les 106 places de parc soient affectées exclusivement à l'usage des employés de Migros. Dans ce cas, il est autorisable sans qu'un complément à l'EIE soit nécessaire, une ouverture à la clientèle lors d'évènements commerciaux particuliers bien spécifiques mais au maximum six fois par an apparaissant comme marginale.

A cet égard, Migros s'est engagée, lors de la comparution personnelle des parties, à ce que les barrières entourant ce parking soient fermées en permanence et qu'un système de reconnaissance permettant une ouverture automatique des portes exclusivement aux véhicules de ses collaborateurs soit installé. Afin de respecter le caractère exceptionnel d'une ouverture du parking à la clientèle, il conviendra encore que Migros annonce à l'OCM les six évènements commerciaux annuels concernés, préalablement à leur déroulement. Le tribunal de céans considérera ces éléments comme étant des conditions dont doit être assortie l’autorisation de construire et à ce titre, ils seront intégrés au dispositif du présent arrêt pour acquérir force obligatoire.

8. La violation des normes OPB et OPair a également été invoquée.

Ce faisant les recourantes n'ont pas indiqué pour quelle raison et dans quelle mesure elles considéraient que la situation actuelle - le parking litigieux étant déjà exploité - était contraire aux dites dispositions. Elles ont également été dans l'impossibilité d'indiquer quelle norme spécifique aurait été violée.

Pour le surplus, les préavis recueillis auprès des organismes concernés ont tous été positifs.

9. Enfin, les recourantes invoquent la violation des normes "circulation 2000".

La décision du DCTI d'autoriser de manière provisoire l'utilisation du parking litigieux repose sur le préavis favorable de l'OCM qui est l'autorité technique compétente. Celui-ci est fondé sur les mesures exposées par la Migros qui tendent, à terme, à une suppression des places de stationnement qui excèdent le ratio posé par la norme circulation 2000, soit 1 place pour 6 emplois dans le secteur de La Praille. La mise en service du CEVA constituant une étape importante dans cette direction, il se justifiait, dans cette perspective, de délivrer une autorisation provisoire conditionnée à la mise en service du CEVA.

Sous cet angle la décision querellée ne prête pas le flanc à la critique et ce grief doit également être rejeté. Cependant, afin d'assurer le respect du caractère provisoire de l'autorisation, il convient de la limiter dans le temps de manière précise, soit jusqu'au 31 décembre 2012 selon les assurances reçues des autorités quant à la mise en service du CEVA. La condition n° 5 de l'autorisation DD 98600-3 sera modifiée en ce sens que le parking en question ne pourra être maintenu au-delà de la mise en service du CEVA mais au plus tard au 31 décembre 2012 sans un réexamen par l'Etat de la situation qui prévaudra alors. Cette condition sera également intégrée au dispositif du présent arrêt.

10. Le recours est rejeté. L'autorisation DD 98600-3 est confirmée et complétée comme énoncé ci-avant. Un émolument de CHF 3'000.- sera mis à la charge des recourantes qui succombent prises conjointement et solidairement (art. 87 LPA). Une indemnité de CHF 2'000.- à la charge des recourantes, prises conjointement et solidairement sera allouée à Migros.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 31 mai 2007 par l'Association transports et environnement Suisse, l'Association transports et environnement section de Genève et par l'Association des habitants de La Praille contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 16 avril 2007 ;

au fond :

le rejette ;

confirme l'autorisation DD 98600-3 du 22 septembre 2006 ;

dit que l'autorisation de construire DD 98600 du 22 septembre 2006 est complétée par les conditions suivantes :

- les barrières entourant le parking concerné seront fermées en permanence et un système de reconnaissance permettant une ouverture automatique des portes exclusivement aux véhicules des collaborateurs de Migros sera installé ;

- Migros annoncera à l'OCM les six évènements commerciaux annuels concernés, préalablement à leur déroulement ;

- la condition n° 5 sera modifiée en ce sens que le parking en question ne pourra être maintenu au-delà de la mise en service du CEVA, mais au plus tard au 31 décembre 2012, sans un réexamen par l'Etat de la situation qui prévaudra alors ;

met à la charge des recourantes, prises conjointement et solidairement, un émolument de CHF 3'000.- ;

alloue à la Société coopérative Migros-Genève une indemnité de procédure de CHF 2'000.- à charge des recourantes prises conjointement et solidairement ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me David Metzger, avocat des recourantes, à Me Jean-Marc Siegrist, avocat de la société coopérative Migros-Genève, ainsi qu'à la commission cantonale de recours en matière administrative et au département des constructions et des technologies de l'information.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, M. Thélin, Mmes Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

M. Tonossi

 

la présidente :

 

 

L. Bovy

 

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :