Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/874/2024 du 04.09.2024 ( MC ) , ADMIS
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 4 septembre 2024
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dans la cause
Monsieur A______, représenté par Me Pascal STEINER, avocat
contre
OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS
1. Monsieur A______, né le ______ 1987, est originaire du Maroc. Il est démuni de tout document d'identité.
2. Le 7 août 2022, il a été arrêté pour la première fois par les services de police genevois, après s'être introduit dans une maison privée, sis B______, pour, notamment, y prendre un bain. Il a alors été prévenu d'infractions à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et de violation de domicile au sens de l'art. 186 du code pénal suisse (CP - RS 311.0).
3. Le 1er septembre 2022, l'intéressé a derechef été arrêté par les services de police genevois, après avoir été vu agressant, sur le pont du Mont-Blanc, un homme, afin de lui voler une chaîne en or et avoir pris la fuite à leur vue.
4. M. A______ a été conduit au poste de police où il s'est refusé à toute déclaration, hormis la suivante : « Vous êtes devenus des ignorants et d'ici 30 à 50 ans, vous n'utiliserez plus de voiture mais des ânes. Je refuse de répondre à toutes vos questions, je viens d'une autre planète ».
5. Prévenu de brigandage (art. 140 CP) et d'infractions à la LEI, M. A______ a été mis à disposition du Ministère public sur ordre du commissaire de police, puis maintenu en détention provisoire dans l'attente de son jugement.
6. Par jugement du 21 novembre 2022, le Tribunal de police de la République et canton de Genève a déclaré M. A______ coupable de brigandage (art. 140 ch. 1 al. 2 CP), de violation de domicile (art. 186 CP), d'entrée illégale (art. 115 al. let. a LEI) et de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI) et l’a condamné à une peine privative de liberté de 11 mois, sous déduction de 84 jours de détention avant jugement (art. 40 CP). Il a également ordonné son expulsion de Suisse de l’intéressé pour une durée de cinq ans, avec signalement dans le système d'information Schengen (SIS ; art. 20 de l'ordonnance N-SIS ; RS 362.0).
7. Par jugement du 29 mars 2023, le Tribunal d'application des peines et des mesures a refusé la libération conditionnelle de M. A______, après avoir constaté que l'établissement pénitentiaire, le service de l'application des peines et des mesures et le Ministère public s'y étaient tous les trois opposés et que le pronostic de l’intéressé - lequel n'entreprenait aucune démarche aux fins de se procurer des pièces de légitimation et refusait de collaborer avec les autorités chargées de l'exécution de son expulsion - se présentait sur un jour fort défavorable.
8. Le 25 juillet 2023, M. A______ s'est vu notifier, par l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), la décision du 24 juillet 2023 de non-report de son expulsion judiciaire, après que la possibilité de s'exprimer à cet égard lui a été donnée. Un délai arrivant à échéance le lendemain de sa fin de peine, soit le 30 juillet 2023, à 23h59, lui était imparti pour quitter le territoire helvétique afin de rejoindre un pays dont il possédait la nationalité ou tout autre pays où il serait légalement admissible.
9. Le 3 août 2023, l'intéressé, demeuré en Suisse, a été arrêté par les services de police genevois, à la rue de Berne, après avoir menacé de mort une personne, agressé deux individus et voulu blesser les intervenants.
10. Prévenu de rupture de ban (art. 291 CP), de lésions corporelles simples (art. 123 CP), de menaces (art. 180 CP), d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 al. 1 CP) et d'infractions à la LEI, M. A______ a été détenu provisoirement à la prison de Champ-Dollon avant d'être remis en liberté le 10 octobre 2023.
11. Le 8 décembre 2023, M. A______ a derechef été arrêté par les services de police genevois, après avoir été observé remettre un caillou de crack de 0.1 gramme à une toxicomane.
12. M. A______, toujours démuni de document d'identité, mais en possession de divers médicaments soumis à ordonnance (dont il n'était pas au bénéfice), d'un téléphone de provenance douteuse et de la somme de CHF 254.50, a été détenu provisoirement à la prison de Champ-Dollon, après avoir été prévenu de rupture de ban (art. 291 CP), d'infractions à la LEI, d'infractions loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes (loi sur les stupéfiants, LStup ; RS 812.121) et de contraventions à la LStup.
13. Par communication du 30 avril 2024, le secrétariat d'État aux migrations (ci-après : le SEM) a informé les autorités genevoises de l'identification, par les autorités marocaines, de M. A______ comme étant leur citoyen. Il leur précisait : « Si vous n’avez pas connaissance de procédures en cours pour la personne concernée, nous vous prions de bien vouloir lui réserver un vol. Nous aurons besoin d’au moins trois semaines pour obtenir les documents de voyage, ou au moins six semaines pour les rapatriements sous escorte policière (DEPA) ».
14. M. A______ a été libéré le 11 juin 2024 par le Ministère public, lequel a envoyé son dossier devant le Tribunal pénal de jugement par un acte d’accusation.
15. Le 11 juin 2024 toujours, à 17h55, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de trois mois.
Lors de son audition, l’intéressé a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi au Maroc. Il n’était pas en bonne santé du fait de problèmes psychiatriques pour lesquels il suivait actuellement un traitement médicamenteux.
16. Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) le même jour.
17. Par courriel du 12 juin 2024, le commissaire de police a transmis au tribunal copie de sa demande de rapport médical et d’autorisation de consultation du dossier médical concernant M. A______.
18. Entendu par le tribunal le 13 juin 2024, M. A______ a confirmé qu’il n’était pas d’accord d’être renvoyé au Maroc. Il était d’accord de quitter la Suisse mais pour l’Allemagne où vivait son enfant. En 2022, il avait tenté de quitter la Suisse, mais sans succès. Il avait ensuite été arrêté à la suite d’une bagarre. Lors de sa détention, sa jambe avait été doublement fracturée suite à une bagarre en prison. Il était convoqué prochainement à une audience du Ministère public pour être confronté à son agresseur. Il n’avait pas d’autorisation de séjour lui permettant de séjourner en Allemagne. Il faudrait d’abord qu’il renoue avec son ex, C______, née en 1996, et qu’il initie une procédure en reconnaissance de paternité.
Sur question de son conseil, avant son arrestation, il logeait dans un foyer de l’Armée du Salut à Genève, à proximité d'D______. Il ne lisait pas le français et n’arrivait pas à lire ce qui était écrit sur la pièce 6 du dossier du commissaire de police que lui soumettait son conseil. Il n’avait pas compris la teneur de ce document et en particulier le fait qu’il devait quitter la Suisse dans les 24 heures. Il confirmait être resté en Suisse afin de se rendre à des rendez-vous médicaux. C’était dans ce cadre qu’il avait été agressé à la tête. La police lui avait alors indiqué qu’il fallait qu’il reste à Genève en vue de la confrontation avec son agresseur. S’il devait être libéré ce jour, il s’engageait à se présenter régulièrement auprès d’un poste de police ou de l’OCPM et à dormir tous les soirs à l’Armée du Salut.
Le conseil de M. A______ a versé à la procédure un chargé de pièces dont un récapitulatif des problématiques médicales de son client des HUG du 28 mars 2024.
La représentante du commissaire de police a expliqué que pour le renvoi de M. A______, il leur fallait d’abord attendre une réponse à leur demande d’évaluation médicale qui permettrait d’attester si l’intéressé était apte ou non au vol. Au besoin, un vol avec assistance médicale devrait être organisé. A réception du rapport d’évaluation médicale, il fallait compter entre trois et six semaines, selon le type de vol organisé, pour obtenir les documents de voyage. Dans le cas de M. A______, c’était d’abord un vol DEPU qui était envisagé. Toutefois, lorsqu’un accompagnement médical était nécessaire, le renvoi se ferait obligatoirement par vol DEPA. Sur question du conseil de M. A______, les démarches en vue de l’obtention du laissez-passer étaient en cours. Ils devraient l’obtenir dans les délais de trois à six semaines annoncés, une fois l’évaluation médicale reçue. Si M. A______ était d’accord de lever les médecins de leur secret médical, il fallait compter au maximum une semaine pour obtenir l’évaluation médicale. Sinon cela prendrait plus de temps, puisqu’il leur faudrait insister jusqu’à l’obtention de l’accord de l’intéressé. Elle ne pouvait pas dire combien de laissez-passer avaient été obtenu jusqu’ici pour des ressortissants marocains. Elle a plaidé et conclu à la confirmation de l'ordre de mise en détention administrative tant sur le principe que sur la durée.
M. A______ a indiqué être d’accord de lever ses médecins de leur secret médical.
Son conseil a plaidé et conclu à sa mise en liberté immédiate, soit subsidiairement à son assignation à résidence dans un foyer de l’Armée du Salut avec obligation de se présenter régulièrement devant la police ou l’OCPM.
19. Par jugement du 14 juin 2024 (JTAPI/581/2024), le tribunal a confirmé l’ordre de détention administrative pour une durée de trois mois, jusqu’au 10 septembre 2024 inclus.
20. Par courrier du 26 juillet 2024, M. A______, a formulé une première demande de mise en liberté, reçue le 30 juillet 2024 par le Tribunal de première instance civil, laquelle lui a été renvoyée par défaut de compétence.
L’intéressé a renvoyé cette même demande le 7 août 2024, selon le tampon humide de la poste, au Tribunal de première instance civil qui l’a reçue le 8 août 2024. Elle a cette fois été transmise au Tribunal administratif de première instance qui l’a reçue le 9 août 2024.
En substance, il n’était pas bien moralement, et souhaitait être suivi par son psychiatre, ainsi qu’assumer ses graves problèmes familiaux, dès lors que la Suisse était une démocratie qui aidait les personnes dans le besoin.
21. Lors de sa comparution du 14 août 2024, devant le tribunal, M. A______ a confirmé être entendu ce jour dans le cadre de sa demande de mise en liberté du 8 août 2024. Il avait des problèmes de santé en particulier, il entendait des voix. Il se prenait souvent pour une autre personne. Il n’avait aucune attache avec la Suisse mais de la famille au Maroc, laquelle constituait son problème. De formation, il était menuisier en aluminium. Outre cette formation, il avait un baccalauréat italien. Outre son enfant, il avait son oncle maternel qui se trouvait en Allemagne. Sur précision de son conseil, il avait un enfant en Allemagne. Sur question de son conseil, il se sentait comme d’habitude, et il prenait du valium et du Diazepam à 10 mg, ainsi que du Zyprexa avec des antidépresseurs, de même que du Stilnox. Il avait des idées noires à cause de son fils. Depuis son arrivée en détention, il avait fait l’objet d’une expertise psychiatrique avec des visites régulières. L’infirmière était toujours là, lorsqu’il se sentait agité, il allait la voir. Un retour dans son pays ne permettrait pas d’assurer un meilleur état le concernant dès lors qu’il n’avait pas de moyens en particulier pour se faire soigner, ni de maison ni où aller à cause de ses problèmes familiaux. Il s’engageait à se présenter tous les jours auprès de la police en cas de libération ainsi qu’à dormir tous les jours au foyer E______. Il a tenu à s’excuser du geste malencontreux qu’il avait eu lors de l’audience en se levant. Son conseil a versé à la procédure un courrier de la Dresse F______, psychiatre-psychothérapeute de l’établissement de Frambois du 12 août 2024 indiquant que M. A______ était suivi régulièrement pour des troubles psychiques et bénéficiait d’un suivi psychiatrique régulier ainsi que des traitements médicamenteux depuis son arrivée à Frambois le 11 juin 2024. Il présentait notamment une grande anxiété avec un état psychique et son traitement était régulièrement adapté. Il se présentait à tous les entretiens. En sus, diverses notes de suite médicales étaient également versées indiquant divers troubles émotionnels et psychotiques avec notamment des automutilations, des idées suicidaires, des hallucinations, notamment traitées par voies médicamenteuses. Il se plaignait à plusieurs reprises du manque de contact avec son avocat, Me STEINER. A teneur du certificat médical des HUG du 18 décembre 2023, l’intéressé faisait l’objet d’une demande d’hospitalisation, en particulier au vu de ses penchants suicidaires.
La représentante de l'OCPM a déclaré qu’elle versait au dossier le formulaire d’information médicale du 17 juin 2024 du Département fédéral de la justice et police, secrétariat d’Etat aux migrations, signé par le Dr F______ qui indiquait en particulier une absence de contradictions pour vol de départ, sous réserve d’un accompagnement infirmier, ainsi que la prescription de médicaments pour une durée de trente jours. Ce rapport indiquait qu’il n’y avait pas de volonté suicidaire mise en évidence ni d’assistance spéciale prévue à l’arrivée, ni plus que de prise en charge par un médecin à convenir. Selon la communication du SEM du 18 juin 2024, le vol prévu pour l’intéressé le 4 juillet 2024 avait été annulé du fait que les autorités marocaines refusaient la délivrance du laissez-passer pour les ressortissants marocains qualifiés de cas médicaux. Selon le courriel du 13 août 2024 du SEM, la réunion prévue en septembre 2024 visant l’obtention du laissez-passer de l’intéressé a dû être reportée au mois d’octobre 2024, vraisemblablement dû à la crainte des autorités marocaines quant aux maladies contagieuses s’agissant en particulier de la variole du singe qui sévissait sur le continent, et au traumatisme dû au coronavirus. Ce nonobstant, les discussions avec les autorités marocaines aboutiront selon toute vraisemblance à l’obtention d’un laissez-passer du fait que M. A______ n’était apparemment pas contagieux. Sur question du conseil de l’intéressé, elle ne pouvait pas répondre à la question de savoir combien de laissez-passer ont été délivrés par les autorités marocaines au cours des six derniers mois. Elle pouvait en revanche affirmer que depuis cet été, aucun laissez-passer n’avait été délivré à sa connaissance pour des cas médicaux. Le report des discussions au mois d’octobre 2024 relevait vraisemblablement du choix des autorités marocaines. Il n’y avait pas d’autres avancements au dossier pertinents dans l’intervalle. Elle a plaidé et conclu au rejet de la demande de mise en liberté déposée par M. A______ et à la confirmation de sa détention. Il n’y avait pas d’éléments nouveaux au dossier qui permettraient sa mise en liberté. Nul doute que si l’intéressé était relâché, il disparaitrait dans la clandestinité et ne se présenterait pas au pointage quotidien auprès des autorités.
Le conseil de M. A______ a conclu à la levée immédiate de la détention de son client, assortie de mesures de substitution, en particulier sa présentation quotidienne auprès des autorités, subsidiairement son placement dans un établissement psychiatrique adéquat. Son client n’était pas apte à un vol à destination de son pays au vu de son état psychologique lequel ne pourrait être suivi adéquatement à son retour d’autant qu’il n’y avait pas de mesure d’accompagnement prévue à destination, bien que la présence d’une infirmière était requise durant le vol. Son renvoi s’avérait également impossible du fait qu’aucun laissez-passer ne lui avait été délivré à ce stade et que rien n’indiquait que les autorités marocaines le délivreront en octobre 2024. Il serait plus à même de se prendre en charge et d’effectuer les démarches nécessaires pour rejoindre son fils en Allemagne s’il se trouvait en liberté à Genève
22. Par jugement du 14 août 2024 (JTAPI/776/2024), le tribunal a rejeté la demande de mise en liberté formée le 8 août 2024 par l'intéressé et a confirmé en tant que de besoin la détention administrative jusqu'au 10 septembre 2024.
23. Par requête motivée du 26 août 2024, l'OCPM a sollicité la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 10 décembre 2024, indiquant qu'à ce jour, ils étaient dans l'attente de la rencontre entre les autorités suisses et marocaines prévue au mois d'octobre 2024.
24. Devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), lors de l'audience de ce jour, M. A______ ne s'est pas présenté pour raisons de maladie.
La représentant de l'OCPM a produit l'arrêt de la chambre administrative de la Cour de justice ATA/1060/2024 du 4 septembre 2024.
Le conseil de M. A______ a indiqué avoir reçu cet arrêt mais n'avoir pas encore eu l'opportunité de le lire.
La représentante de l'OCPM a indiqué que la Cour de justice avait rejeté le recours interjeté le 26 août 2024 par M. A______ contre le jugement du tribunal administratif de première instance du 14 août 2024. Sur question du conseil de M. A______, une réunion était prévue au mois d'octobre 2024 entre les autorités suisses et marocaines, afin de discuter notamment du cas de celui-ci, en particulier sur le plan médical. Le SEM l'avait tenue au courant à la fin du mois d'août et elle attendait encore les nouvelles du SEM pour cette réunion du mois d'octobre 2024. Elle requérait un délai de trois mois compte tenu également qu'il fallait planifier un vol six semaines à l'avance. La question du laissez-passer serait discutée au mois d'octobre 2024 et dès qu'un vol pouvait être planifié suite à cette discussion, les autorités marocaines émettraient formellement un laissez-passer, quelques jours avant le vol. Sur question du conseil de M. A______, elle exposait qu'un laissez-passer avait déjà été délivré pour un cas médical au mois de juin 2024. Il s'agissait d'un cas vaudois. Le vol ne s'était pas concrétisé pour des raisons d'organisation. Le laissez-passer délivré par les autorités marocaines était valable deux mois. Elle concluait à ce que la demande de prolongation soit admise pour une durée de trois mois.
Le conseil de M. A______ a conclu à la mise en liberté immédiate de son client et à la mise en place d'une mesure moins incisive, à savoir une assignation à résidence et l'obligation de se présenter à l'OCPM ou au Vieil hôtel de police quotidiennement, et à prendre toute autre mesure à dire de justice.
1. Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour prolonger la détention administrative en vue de renvoi ou d'expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. e de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).
2. S'il entend demander la prolongation de la détention en vue du renvoi, l'OCPM doit saisir le tribunal d'une requête écrite et motivée dans ce sens au plus tard huit jours ouvrables avant l’expiration de la détention (art. 7 al. 1 let. d et 8 al. 4 LaLEtr).
3. En l'occurrence, le 26 août 2024, le tribunal a été valablement saisi, dans le délai légal précité, d'une requête de l'OCPM tendant à la prolongation de la détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois.
4. Statuant ce jour, le tribunal respecte le délai fixé par l'art. 9 al. 4 LaLEtr, qui stipule qu'il lui incombe de statuer dans les huit jours ouvrables qui suivent sa saisine, étant précisé que, le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l’étranger.
5. La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l’art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; 135 II 105 consid. 2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_237/2013 du 27 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_413/2012 du 22 mai 2012 consid. 3.1) et de l’art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu’elle repose sur une base légale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_584/2012 du 29 juin 2012 consid. 5.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1). Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne peut être prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 du 10 avril 2013 consid. 4.1 ; 2C_237/2013 du 27 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1).
6. Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 36 Cst., se compose des règles d'aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de la personne concernée et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/752/2012 du 1er novembre 2012 consid. 7).
7. Il convient dès lors d'examiner, en fonction des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi au sens de l'art. 5 par. 1 let. f CEDH est adaptée et nécessaire (ATF 135 II 105 consid. 2.2.1 ; 134 I 92 consid. 2.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_26/2013 du 29 janvier 2013 consid. 3.1 ; 2C_420/2011 du 9 juin 2011 consid. 4.1 ; 2C_974/2010 du 11 janvier 2011 consid. 3.1 ; 2C_756/2009 du 15 décembre 2009 consid. 2.1).
8. La détention administrative de l’intéressé a été examinée par le Tribunal administratif de première instance (ci-après : « le tribunal ») par jugement du 14 juin 2024 (JTAPI/581/2024).
9. En outre, M. A______ ayant été condamné notamment pour brigandage (art. 140 CP) par jugement du Tribunal de police du 21 novembre 2022, il constitue un danger pour l’ordre et la sécurité publics. Ainsi, l’intérêt public à son maintien en détention l’emporte sur sa libération, si même l’on devait considérer un dépassement du délai de l’art. 80 al. 5 LEI de l’ordre de deux jours.
10. L'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, renvoyant à l'art. 75 al. 1 let. h de cette même loi, dispose qu’après notification d’une décision de première instance de renvoi ou d’expulsion au sens de la présente loi ou d’une décision de première instance d’expulsion obligatoire au sens des art. 66a ou 66abis CP195 ou 49a ou 49abis CPM, l'autorité compétente peut, afin d’en assurer l’exécution, mettre en détention la personne concernée qui a été condamnée pour crime, par quoi il faut entendre une infraction passible d'une peine privative de liberté de plus de trois ans (cf. art. 10 al. 2 CP ; ATA/220/2018 du 8 mars 2018 consid. 4a ; ATA/997/2016 du 23 novembre 2016 consid. 4a ; ATA/295/2011 du 12 mai 2011 consid. 4).
11. L'art. 76 al. 1 let. b LEI stipule que lorsqu'une décision de renvoi a été notifiée, l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée si des éléments concrets font craindre qu'elle entende se soustraire au renvoi, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer (ch. 3) ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (ch. 4).
12. Ces deux dispositions décrivent toutes deux des comportements permettant de conclure à l’existence d’un risque de fuite ou de disparition, de sorte que les deux éléments doivent être envisagés ensemble (arrêt du Tribunal fédéral 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1).
13. Selon la jurisprudence, un risque de fuite existe notamment lorsque l'étranger a déjà disparu une première fois dans la clandestinité (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 du 10 avril 2013 consid. 4.2 ; 2C_806/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 2C_743/2009 du 7 décembre 2009 consid. 4), qu'il tente d'entraver les démarches en vue de l'exécution du renvoi en donnant des indications manifestement inexactes ou contradictoires ou encore s'il laisse clairement apparaître, par ses déclarations ou son comportement, qu'il n'est pas disposé à retourner dans son pays d'origine (cf. ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; 130 II 56 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1139/2012 du 21 décembre 2012 consid. 3.2 ; ATA/315/2014 du 2 mai 2014).
14. Lorsqu’il existe un risque de fuite, le juge de la détention administrative doit établir un pronostic en déterminant s’il existe des garanties que l’étranger prêtera son concours à l’exécution du renvoi, soit qu’il se conformera aux instructions de l’autorité et regagnera ainsi son pays d’origine le moment venu, c’est-à-dire lorsque les conditions seront réunies. Dans ce cas, le juge de la détention dispose d’une certaine marge d’appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 2C.400/2009 du 16 juillet 2009 consid. 3.1).
15. Comme le prévoit expressément l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI, il faut qu'il existe des éléments concrets en ce sens (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 du 10 avril 2013 consid. 4.2 ; 2C_142/2013 du 1er mars 2013 consid. 4.2 ; 2C_1017/2012 du 30 octobre 2012 consid. 4.1.1 ; ATA/315/2014 du 2 mai 2014). Ne constituent pas des éléments suffisants le seul fait que l'étranger soit entré en Suisse de façon illégale ou le fait qu'il soit démuni de papiers d'identité (cf. ATF 129 I 139 consid. 4.2.1). De même, le fait de ne pas quitter le pays dans le délai imparti à cet effet n'est pas à lui seul suffisant pour admettre un motif de détention au sens de l'art. 76 al. 1 ch. 3 ou 4 LEI, mais peut tout au plus constituer un indice parmi d'autres en vue d'établir un risque de fuite (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_142/2013 du 1er mars consid. 4.2 in fine ; ATA/315/2014 du 2 mai 2014). En effet, si tel était le cas, il aurait appartenu au législateur d'indiquer expressément à l'art. 76 al. 1 LEI que le non-respect du délai de départ constitue à lui seul un motif justifiant la mise en détention de l'étranger (arrêt du Tribunal fédéral 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.2 et les références citées). Dans la même ligne, le fait de travailler au noir ne constitue pas non plus un indice d'un risque de fuite (ATF 140 II 1 consid. 5.4.2 p. 5). A l'inverse, la circonstance que la personne concernée s'est tenue, assez longtemps et de manière ininterrompue, en un endroit stable à la disposition des autorités plaide en défaveur du risque de fuite (arrêt du Tribunal fédéral 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.2 et les références citées).
16. Selon l'art. 80 al. 6 let. a LEI, la détention administrative d'une personne étrangère devant quitter le territoire suisse doit être levée si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles. Dans ce cas, la détention dans l'attente de l'expulsion ne peut en effet plus être justifiée par une procédure d'éloignement en cours; elle est, de plus, contraire à l'art. 5 par. 1 let. f CEDH (cf. ATF 130 II 56 consid. 4.1.1; arrêt 2C_216/2023 du 22 juin 2023 consid. 6.1 et les arrêts cités). Il s'agit d'évaluer la possibilité d'exécuter la décision de renvoi en fonction des circonstances de chaque cas d'espèce. Le facteur décisif est de savoir si l'exécution de la mesure d'éloignement semble possible dans un délai prévisible, respectivement raisonnable avec une probabilité suffisante (arrêts 2C_468/2022 du 7 juillet 2022 consid. 4.1; 2C_233/2022 du 12 avril 2022 consid. 4.3.1; 2C_984/2020 du 7 janvier 2021 consid. 4.1; 2C_955/2020 du 10 décembre 2020 consid. 5.1; 2C_634/2020 du 3 septembre 2020 consid. 6.1). Sous l'angle de l'art. 80 al. 6 let. a LEI, la détention ne doit être levée que si la possibilité de procéder à l'expulsion est inexistante ou hautement improbable et purement théorique, mais pas s'il y a une chance sérieuse, bien que mince, d'y procéder (cf. ATF 130 II 56 consid. 4.1; arrêt 2C_468/2022 du 7 juillet 2022 consid. 4.1 et les arrêts cités).
17. Si l'étranger a la possibilité de se rendre légalement dans plusieurs États, l'autorité compétente peut le renvoyer ou l'expulser dans le pays de son choix (art. 69 al. 2 LEI). La possibilité de choisir le pays de destination présuppose toutefois que l'étranger a la possibilité de se rendre de manière effective et admissible dans chacun des pays concernés par son choix. Cela implique qu'il se trouve en possession des titres de voyage nécessaires et que le transport soit garanti.
18. Le renvoi ou l'expulsion dans un pays tiers du choix de l'étranger constitue par ailleurs seulement une faculté (« peut ») de l'autorité compétente (arrêt du Tribunal fédéral 2C_285/2013 du 23 avril 2013 consid. 7 ; cf. également arrêts 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 6 ; 2C_393/2009 du 6 juillet 2009 consid. 3.4).
19. En l’espèce, la légalité de la détention de l’intéressé a déjà été confirmée par le tribunal notamment dans son jugement du 14 juin 2024 (JTAPI/581/2024).
20. Pour rappel, l’intéressé a fait l’objet d’une décision d’expulsion de Suisse d’une durée de 5 ans prononcée par le Tribunal de police le 21 novembre 2022 définitive et exécutoire.
21. Il a par ailleurs été condamné pénalement à plusieurs reprises, en particulier pour brigandage, soit un crime au sens de l’art. 10 al. 2 CP. Sa détention administrative reste justifiée sur la base des art. 76 al. 1 let. b ch. 1 et 75 al. 1 let. h LEI, sans qu’il soit nécessaire d’analyser si sa détention peut également se fonder sur un autre motif.
22. L’intéressé ne dispose d'aucun titre de séjour qui lui permettrait de se rendre dans toute autre État que son pays d'origine (cf. ATA/364/2015 du 20 avril 2015 consid 5). La première condition posée par l'art. 76 al. 1 LEI est ainsi toujours réalisée.
23. Aussi, l'intérêt public à son départ n'a pas disparu et aucune mesure moins incisive que la détention administrative n'est susceptible d'assurer son expulsion dans son pays d'origine au vu de sa situation et de son comportement laissant présager le risque qu’il disparaisse dans la clandestinité s’il devait être libéré.
24. Il pourrait donc décider de lui-même qu'il soit mis un terme à sa détention en acceptant de retourner au Maroc.
25. Le grief de l’intéressé sera partant écarté.
26. Quant à l’art. 83 al. 4 LEI, relatif à l’inexigibilité du renvoi, il s’applique en premier lieu aux « réfugiés de la violence », soit aux étrangers qui ne remplissent pas les conditions de la qualité de réfugié parce qu’ils ne sont pas personnellement persécutés, mais qui fuient des situations de guerre, de guerre civile ou de violence généralisée. Elle s’applique ensuite aux personnes pour qui un retour reviendrait à les mettre concrètement en danger, notamment parce qu’objectivement, au regard des circonstances d’espèce, elles seraient, selon toute probabilité, conduites irrémédiablement à un dénuement complet, exposées à la famine, et ainsi à une dégradation grave de leur état de santé, à l’invalidité, voire à la mort. L’autorité à qui incombe la décision doit donc dans chaque cas confronter les aspects humanitaires liés à la situation dans laquelle se trouverait l’étranger concerné dans son pays après l’exécution du renvoi à l’intérêt public militant en faveur de son éloignement de Suisse (ATAF 2010/54 consid. 5.1 ; 2010/41 consid 8.3.6 ; 2009/52 consid. 10.1 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral E-5092/2013 du 29 octobre 2013 consid 6.1 ; D-5085/2010 du 14 février 2013 consid. 4.1 ; D-5434/2009 du 4 février 2013 consid. 15.1 ; ATA/731/2015 du 14 juillet 2015 consid. 11a).
27. Les motifs résultant de difficultés consécutives à une crise socio-économique (pauvreté, conditions d'existence précaires, difficultés à trouver un travail et un logement, revenus insuffisants, absence de toute perspective d'avenir), ou encore, la désorganisation, la destruction des infrastructures ou des problèmes analogues auxquels chacun peut être confronté, dans le pays concerné, ne suffisent pas en soi à réaliser une mise en danger concrète selon l'art. 83 al. 4 LEI (ATAF D-3039/2014 du 13 mai 2015). Si, dans un cas d'espèce, le mauvais état de santé ne constitue pas en soi un motif d'inexigibilité sur la base des critères qui précèdent, il peut demeurer un élément d'appréciation dont il convient alors de tenir compte dans le cadre de la pondération de l'ensemble des éléments ayant trait à l'examen de l'exécution du renvoi (JICRA 2003 n° 24 consid. 5b p. 157).
28. L'exécution du renvoi demeure raisonnablement exigible si les troubles physiologiques ou psychiques ne peuvent être qualifiés de graves, à savoir s'ils ne sont pas tels qu'en l'absence de possibilités de traitement adéquat, l'état de santé de l'intéressé se dégraderait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (ATAF E-6672/2013 du 22 mai 2015).
29. Cela étant, il ne faut pas perdre de vue que le juge de la détention, dans le contrôle de celle-ci, doit en principe seulement s'assurer qu'une décision de renvoi existe, sans avoir à vérifier la légalité de cette dernière (ATF 129 I 139 consid. 4.3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_47/2017 du 9 février 2017 consid. 5.2 ; 2C_1178/2016 du 3 janvier 2017 consid. 4.2 ; ATA/184/2017 du 15 février 2017 consid. 6). Les objections concernant ces questions doivent être invoquées et examinées par les autorités compétentes lors des procédures ad hoc et ce n'est que si une décision de renvoi apparaît manifestement inadmissible, soit arbitraire ou nulle, qu'il est justifié de lever la détention en application de l'art. 80 al. 6 LEtr, car l'exécution d'un tel ordre illicite ne doit pas être assurée par les mesures de contrainte (ATF 129 I 139 consid. 4.3.2 ; 125 II 217 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_47/2017 du 9 février 2017 consid. 5.2 ; 2C_1178/2016 du 3 janvier 2017 consid. 4.2 ; 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 7).
30. En l'espèce, l'impossibilité du renvoi tiré de l’état de santé de l’intéressé n'apparait pas durablement incapacitante, d’autant que le médecin en charge de son évaluation au vol départ, l’a estimé apte sans même préconiser un suivi médical par un médecin dans le pays de destination. La présente procédure ne saurait donc revenir sur la question de la validité de la décision de renvoi d’autant que le dossier médical, versé par l’intéressé à la procédure, date pour l’essentiel d’avant le jugement du tribunal du 14 juin 2024 (JTAPI/581/2024).
31. A teneur du dossier, la prise en charge médicale de son traitement psychiatrique pourra être assurée au Maroc et ses troubles n’apparaissent pas comme suffisamment graves à constituer un empêchement à la procédure de renvoi (cf. not. arrêts du Tribunal fédéral 2D_66/2011 du 13 décembre 2011 consid. 6.2 ; 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 7.1 ; ATA/88/2012 du 15 février 2012 consid. 6 ; ATA/449/2011 du 20 juillet 2011 consid. 5).
32. La demande de mise en liberté a été rejetée par le tribunal le 14 août 2024 (JTAPI/776/2024). La détention administrative a été confirmée jusqu'au 10 septembre 2024, date jusqu'à laquelle elle a été prolongée selon jugement du tribunal le 14 août 2024 (JTAPI/776/2024).
33. Le 4 septembre 2024, la chambre administrative de la Cour de justice a rejeté le recours interjeté par M. A______ le 26 août 2024 (ATA/1060/2024). Selon cet arrêt, la détention ne doit pas être levée en application de l'art. 80 al. 6 let. a LEI. A cet égard, il est précisé que la détention doit être levée notamment si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion d'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles (art. 80 al. 6 let. a LEI). La détention dans l'attente de l'expulsion ne peut en effet plus être justifiée par une procédure d'éloignement en cours; elle est, de plus, contraire à l'art. 5 § 1 let. f CEDH. Les raisons juridiques ou matérielles empêchant l'exécution du renvoi ou l'expulsion doivent être importantes ("triftige Gründe"). L'exécution du renvoi doit être qualifiée d'impossible lorsque le rapartiement est pratiquement exclu, même si l'identité et la nationalité de l'étranger sont connus et que les papiers requis peuvent être obtenus avec la collaboration de ce dernier (arrêt du Tribunal fédéral 2C_984/2020 du 7 janvier 2021 consid. 4.1 et les références). Tel est par exemple le cas lorsqu'un Etat refuse explicitement, ou du moins de manière clairement reconnaissable et cohérente, de reprendre certains de ses ressortissants (ATF 130 II 56 consid. 4.1.3; 125 II 217 consid. 2; arrêt du Tribunal fédéral 2C_768/2020 du 21 octobre 2020 consid 5.1). Le facteur décisif est de savoir si l'exécution de la mesure d'éloignement semble possible dans un délai prévisible ou du moins raisonnable avec une probabilité suffisante (arrêt du Tribunal fédéral 2C_955/2020 consid. 5.1; 2C_597/2020 du 3 août 2020 consid 4.1). […] Par définition, les mesures de contrainte en vue du renvoi sont destinées à s'appliquer aux personnes qui s'opposent par tous les moyens (arrêt du Tribunal fédéral 2C_270/2023 précité consid 4.2.2).
La Cour de justice a retenu qu'il résulte du dossier que l'identité et la nationalité du recourant ont été dûment établi. Un laissez-passer, d'ores et déjà requis des autorités de son Etat d'origine, n'a pu à ce jour être délivré en raison, apparemment, du caractère médicalisé du renvoi. Des discussions, prévues dans un premier temps en septembre 2024 mais repoussées par la suite au mois d'octobre 2024, doivent avoir lieu entre le SEM et les autorités marocaines en vue de la délivrance dudit laissez-passer.
Selon la Cour de justice, rien ne permet de considérer aujourd'hui que ces discussions seraient d'emblée vouées à l'échec, et donc que la perspective d'obtention d'un laissez-passer d'ici à la fin du mois d'octobre ou dans le courant du mois de novembre serait illusoire. Dans la mesure où le premier laissez-passer sollicité a semble-t-il été refusé pour des raisons médicales, vraisemblablement par crainte d'une maladie potentiellement contagieuse, on peut au contraire penser que les autorités marocaines, rassurées sur l'absence de risque de contagion lié au rapatriement du recourant, entreront en matière sur la demande du SEM.
Il ne peut par ailleurs être retenu que l'État d'origine du recourant refuserait explicitement, ou du moins de manière clairement reconnaissable et cohérente, de reprendre ses ressortissants, et ce même si les démarches peuvent s'avérer – surtout, comme en l'espèce, en l'absence de collaboration de l'intéressé – longues et compliquées […].
Selon la Cour de justice, il convient enfin de souligner que les difficultés de la procédure de renvoi sont en grande partie dues à l'absence de collaboration du recourant, qui refuse de rentrer dans son pays d'origine et, comme l'a relevé le Tribunal d'application des peines et des mesures dans sa décision du 29 mars 2023, il n'a entrepris aucune démarche pendant sa détention avant jugement pour se procurer des documents de légitimation.
L'argumentation a été écartée par la Cour de justice (ATA/1060/2024, p. 7 et 8).
En ce qui concerne l'argumentation de l'inexigibilité du renvoi, la Cour de justice a retenu ce qui suit:
S'agissant plus spécifiquement de l'exécution du renvoi des personnes en traitement médical en Suisse, celle-ci ne devient inexigible que dans la mesure où ces dernières ne pourraient plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine. L'art. 83 al. 4 LEI, disposition exceptionnelle, ne saurait en revanche être interprété comme impliquant un droit général d'accès en Suisse à des mesures médicales visant à recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que l'infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical dans le pays d'origine ou de destination de l'intéressé n'atteignent pas le standard élevé qu'on trouve en Suisse (ATAF 2011/50 consid. 8.3). La gravité de l'état de santé, d'une part, et l'accès à des soins essentiels, d'autre part, sont déterminants. Ainsi, l'exécution du renvoi demeure raisonnablement exigible si les troubles physiologiques ou psychiques ne peuvent être qualifiés de graves, à savoir s'ils ne sont pas tels qu'en l'absence de possibilités de traitement adéquat, l'état de santé de l'intéressé se dégraderait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (arrêt du TAF F-1602/2020 du 14 février 2022 consid. 5.3.4).
Comme le précise la Cour de justice (ATA/1060/2024, p.9), selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (ci‑après : CourEDH), l'exécution du renvoi ou de l'expulsion d'un malade physique ou mental est exceptionnellement susceptible de soulever une question sous l'angle de l'art. 3 CEDH si la maladie atteint un certain degré de gravité et qu'il est suffisamment établi que, en cas de renvoi vers l'État d'origine, la personne malade court un risque sérieux et concret d'être soumise à un traitement interdit par cette disposition (ACEDH N. c. Royaume-Uni du 27 mai 2008, req. n° 26565/05, § 29 ss ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_3/2021 du 14 avril 2021 consid. 4.2). C'est notamment le cas si sa vie est en danger et que l'État vers lequel elle doit être expulsée n'offre pas de soins médicaux suffisants et qu'aucun membre de sa famille ne peut subvenir à ses besoins vitaux les plus élémentaires (ACEDH N. c. Royaume-Uni précité § 42; ATF 137 II 305 consid. 4.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_14/2018 du 13 août 2018 consid. 4.1; 2C_1130/2013 du 23 janvier 2015 consid. 3).
Le renvoi d'un étranger malade vers un pays où les moyens de traiter sa maladie sont inférieurs à ceux disponibles dans l'État contractant reste compatible avec l'art. 3 CEDH, sauf dans des cas très exceptionnels, en présence de considérations humanitaires impérieuses (ACEDH N. c. Royaume-Uni précité § 42 ; Emre c. Suisse du 22 mai 2008, req. n° 42034/04, § 89). Dans un arrêt du 13 décembre 2016 (ACEDH Paposhvili c. Belgique, req. n° 41738/10, § 173 ss, not. 183), la Grande Chambre de la CourEDH a clarifié son approche en rapport avec l'éloignement de personnes gravement malades et a précisé qu'à côté des situations de décès imminent, il fallait entendre par « autres cas très exceptionnels » pouvant soulever un problème au regard de l'art. 3 CEDH les cas d'éloignement d'une personne gravement malade dans lesquels il y a des motifs sérieux de croire que cette personne, bien que ne courant pas de risque imminent de mourir, ferait face, en raison de l'absence de traitements adéquats dans le pays de destination ou de défaut d'accès à ceux-ci, à un risque réel d'être exposée à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses ou à une réduction significative de son espérance de vie ; ces cas correspondent à un seuil élevé pour l'application de l'art. 3 CEDH dans les affaires relatives à l'éloignement des étrangers gravement malades. La CourEDH a aussi fixé diverses obligations procédurales dans ce cadre (ACEDH Savran c. Danemark du 7 décembre 2021, req. n° 57467/15, § 130).
Selon la Cour de justice, il résulte en l'espèce du dossier, en particulier des pièces qu'il a produites et de ses déclarations, que le recourant, dont la personnalité a été qualifiée d' « émotionnellement labile de type impulsif » par les médecins l'ayant traité lors de sa détention avant jugement, souffre d'un trouble psychotique non organique. Il entend des « voix » et ressent parfois des « idées noires ». À une occasion, il a mentionné un projet de suicide par pendaison. Durant les périodes d'incarcération qu'il a subies en Suisse, il a bénéficié d'un suivi psychiatrique régulier ainsi que d'un traitement médicamenteux.
Selon la Cour de justice, à juste titre, M. A______ ne soutient pas que la poursuite d'un tel suivi psychiatrique serait impossible dans son pays d'origine, ni que les médicaments qui lui ont été prescrits ne pourraient y être obtenus. Il est certes possible que les infrastructures sanitaires marocaines ne correspondent pas à la qualité élevée de soins dont le recourant a pu bénéficier en Suisse mais, comme explicité ci-dessus, ce point n'est pas déterminant. Aucun élément ne permet pour le surplus de retenir que son renvoi de Suisse entraînerait pour lui un risque d'aggravation rapide et irréversible de son était de santé au point de l'exposer à des souffrances intenses ou à une réduction significative de son espérance de vie. Le simple fait d'être sujet à des « idées noires » et d'avoir verbalisé à une reprise des idées suicidaires, sans passage à l'acte, ne saurait en effet justifier concrètement de telles craintes.
À cela s'ajoute que l'aptitude médicale au renvoi du recourant a fait l'objet d'un examen spécifique par un médecin mandaté à cet effet par le SEM, lequel a abouti à la conclusion qu'il pouvait être renvoyé dans son pays à la double condition qu'une assistance infirmière soit mise à disposition pendant le vol et que des médicaments pour une période de 30 jours lui soient remis à son arrivée. En l'absence de toute autre opinion médicale sur la possibilité de procéder au renvoi, il convient de s'en tenir à cet avis.
L'argumentation a également été rejetée par la Cour de justice (ATA/1060/2024, p. 11).
La Cour de justice a finalement relevé que M. A______ avait fait valoir que le but recherché par la mise en détention administrative, soit s'assurer de sa présence au moment de l'exécution du renvoi, pourrait être atteint par des mesures moins incisives telles que sa remise en liberté avec obligation de s'annoncer tous les jours auprès de l'autorité.
La Cour de justice a relevé qu'il n'en était rien : dans la mesure où le recourant avait plusieurs fois exprimé son refus de rentrer dans son pays d'origine et avait démontré, par les infractions qu'il a commises, son manque de respect pour la loi et les autorités, il existait un risque important et concret qu'il ne défère pas volontairement, le moment venu, à une convocation en vue de l'exécution de son renvoi. Son maintien en détention administrative constituait donc bien la seule mesure susceptible d'assurer sa disponibilité effective au moment de l'exécution du renvoi (ATA/1060/2024, p.11).
34. Au vu de ce qui précède et de la position de la Cour de justice, la demande de prolongation de la détention administrative de M. A______ sera de nouveau admise pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 10 décembre 2024 inclus. Le risque de suicide soulevé par le conseil de M. A______ a été traité par la Cour de justice. A ce stade, le tribunal ne saurait s'écarter des motifs invoqués par la Cour de justice. Les démarches en cours de l'OCPM avec les autorités marocaines sont convainquantes. Un rendez-vous aura lieu au mois d'octobre 2024. La planification d'un vol peut prendre six semaines d'ici la délivrance d'un laissez-passer par les autorités marocaines, quelques jours avant la date du vol.
35. Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et à l’OCPM. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au SEM.
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable la demande de prolongation de la détention administrative de Monsieur A______ formée le 26 août 2024 par l’office cantonal de la population et des migrations ;
2. prolonge la détention administrative de Monsieur A______ pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 10 décembre 2024 inclus ;
3. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Au nom du Tribunal :
Le président suppléant
André MALEK-ASGHAR
Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, à l’office cantonal de la population et des migrations et au secrétariat d'État aux migrations.
Genève, le |
| La greffière |