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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2000/2011

ATA/449/2011 du 20.07.2011 sur JTAPI/728/2011 ( MC ) , REJETE

Recours TF déposé le 19.08.2011, rendu le 05.09.2011, REJETE, 2C_625/2011
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2000/2011-MC ATA/449/2011

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 20 juillet 2011

En section

 

dans la cause

 

Monsieur G______
représenté par Me Magali Buser, avocate

contre

OFFICIER DE POLICE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 30 juin 2011 (JTAPI/728/2011)


EN FAIT

1. Monsieur G______, né le ______ 1982, ressortissant moldave, alias X______, né le ______ 1979, roumain, est venu à Genève pour la première fois en 2006. Depuis lors, il a été condamné à six reprises par les autorités pénales :

- 18 septembre 2007 : 30 jours-amende avec sursis pendant 3 ans, pour vol, dommages à la propriété et faux dans les certificats (ordonnance de condamnation du juge d'instruction de Genève) ;

- 24 septembre 2008 : 110 jours de peine privative de liberté pour vol, recel et infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121), peine d'ensemble avec la précédente (ordonnance de condamnation du juge d'instruction de Lausanne) ;

- 12 novembre 2008 : 7 mois de peine privative de liberté pour vol, vol en bande, faux dans les certificats étrangers et infraction à la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RS 142.20) (ordonnance de condamnation du juge d'instruction de Genève) ;

- 13 mars 2009 : 5 mois de peine privative de liberté pour vol et infraction à la LEtr (ordonnance de condamnation du procureur général de Genève) ;

- 27 juillet 2010 : 40 jours-amende avec sursis pendant 2 ans pour infraction à la LEtr (ordonnance pénale du juge d'instruction de Saint-Gall) ;

- 7 mars 2011 : 11 mois de peine privative de liberté pour actes préparatoires délictueux de brigandage, vol, et infraction à la LEtr (arrêt de la chambre pénale de la Cour de justice de Genève).

2. Au plan administratif, M. G______ a fait l'objet des décisions et mesures suivantes, toutes dûment notifiées :

- 6 novembre 2008 : interdiction d'entrée en Suisse valable jusqu'au 2 septembre 2013, prononcée par l'office fédéral des migrations (ci-après: ODM) ;

- 6 novembre 2008 : renvoi de Suisse, prononcé par l'office cantonal de la population (ci-après : OCP), qui a chargé la police de l'exécuter dès la remise en liberté de l'intéressé, alors détenu ;

- 3 mars 2009 : renvoi exécuté en France, dans le cadre d'une procédure de réadmission ;

- 4 mars 2010 : renvoi exécuté en Moldavie ;

- 4 août 2010 : renvoi de Suisse, prononcé par l'office cantonal de la population (ci-après : OCP), qui a chargé la police de l'exécuter dès la remise en liberté de l'intéressé, alors détenu.

3. Le 27 juin 2011, M. G______ a été libéré à l'issue de l'exécution de sa dernière peine privative de liberté et remis à la police en vue de l'exécution de son renvoi en Moldavie.

4. Le 28 juin 2011, l'intéressé a refusé de monter dans l'avion à destination de Chisinau. Il a alors été acheminé à l'hôtel de police, où, l'officier de police a ordonné sa mise en détention administrative pour une durée de 3 mois, en raison du risque de soustraction au refoulement, ainsi que du fait que l'intéressé avait été condamné pour des crimes et qu'il n'avait en outre pas respecté une interdiction d'entrée en Suisse. A cette occasion, M. G______ a déclaré ne pas vouloir retourner en Moldavie.

5. Peu après son audition, il a demandé à voir un médecin. Une fois celui-ci parti après lui avoir administré du Temesta et du Dafalgan, M. G______ a rouvert une plaie suturée à la gorge au moyen d'une lame de rasoir. Il a donc été emmené à l'hôpital, où l'entaille a été recousue, puis a été ramené à l'hôtel de police. Entendu au sujet de ces faits, il a déclaré avoir été en possession de cette lame de rasoir depuis plusieurs jours et l'avoir suffisamment bien cachée dans son pantalon pour qu'elle ne soit pas trouvée lors de plusieurs fouilles. Il s'était blessé volontairement pour être conduit à l'hôpital afin de pouvoir obtenir du Tramal. A ce moment là, il était en effet en manque et le médecin qui l'avait examiné ne lui avait pas donné ce dernier médicament, malgré sa demande.

6. Le 30 juin 2011, M. G______ a été présenté au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) pour le contrôle de sa détention.

Lors de l’audience il a maintenu qu’il refusait de retourner en Moldavie. Il souffrait d'hépatite C et souhaitait pouvoir continuer le traitement qu'il recevait pour soigner cette maladie, diagnostiquée en 2008. Il avait été toxicomane mais n'était plus dépendant de la drogue. Il était d'accord d'être refoulé en France, pays dans lequel il avait eu l'occasion de séjourner. Il concluait à sa mise en liberté, car son renvoi en Moldavie présentait un danger pour sa vie et il était malade.

Le représentant de la police a déclaré qu'à sa connaissance, M. G______ ne bénéficiait d'aucun titre de séjour en France et n'avait effectué aucune démarche pour en obtenir. Une procédure de réadmission n'était plus possible. Selon les indications de l'ODM, un vol pour la Moldavie pourrait être organisé durant l'été, vraisemblablement à fin août. Un nouveau laissez-passer serait demandé aux autorités moldaves, l'actuel venant à échéance le 16 juillet 2011.

7. Par jugement du 30 juin 2011 notifié le jour-même, le TAPI a confirmé l’ordre de mise en détention administrative de l’intéressé pour une durée de 3 mois, soit jusqu’au 27 septembre 2011. Celui-ci avait fait l’objet d’une décision de renvoi de Suisse, définitive et exécutoire. Il avait été condamné à plusieurs reprises notamment pour vol et actes préparatoires délictueux, soit des infractions qualifiées de crimes par l'art. 10 al. 2 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0). Il était revenu en Suisse malgré deux refoulements au cours des années précédentes et n’avait absolument pas collaboré avec les autorités pour donner suite à l'exécution de son renvoi, la tentative faite le jour de remise en liberté ayant échoué en raison de son opposition. Dès lors, les autorités n’avaient pas d’autre possibilité pour assurer le renvoi de l’intéressé que d’organiser un vol de niveau supérieur, ce qui impliquait le maintien en détention en raison du risque de fuite. Les conditions de l’art. 76 al. 1 let. b ch. 1 et 3 LEtr étaient réalisées. Les autorités agissaient avec célérité. Le renvoi se n'avérait pas impossible en raison de son état de santé, l'hépatite C ne représentant pas un cas de rigueur médicale. Au demeurant, cette maladie, diagnostiqué en 2008, n'avait pas été un obstacle à deux refoulements antérieurs. Enfin les déclarations relatives à la mise en danger ne reposaient sur aucun élément concret.

8. Par acte posté le 11 juillet 2011, M. G______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la section administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité.

Il ne contestait pas sa situation au regard de l’art. 76 al. 1 let. b ch. 1 et 3 LEtr, mais considérait que son renvoi était inexigible en vertu des art. 80 al. 6 et 83 al. 2 à 4 LEtr. Il était terrorisé par un retour en Moldavie, pays qu'il avait fui parce qu'il avait été menacé et agressé physiquement par la police locale. Ainsi, cette dernière l'avait battu en 2004 et suite à cela, il avait souffert de migraines, de vertiges et de vomissements. En 2010, lors de son précédent renvoi, il avait été arrêté à l'aéroport de Chisinau et à nouveau battu, au point que son bras droit avait été fracturé. Suite à cela, il avait souffert de vertiges, de maux de tête et d'états de faiblesse. Son argent avait été volé par les policiers. Il n'avait eu d'autre choix que de fuir son domicile et se cacher. Quant à son état de santé, il souffrait non seulement d'une hépatite C mais aussi de graves symptômes anxiodépressifs et d'idées suicidaires provoquées par la crainte de retourner dans son pays, où les soins médicaux n'étaient que partiellement assurés.

A l'appui de son argumentation, il a produit notamment les documents suivants :

- copie, avec sa traduction, d'un rapport médico-légal établi en avril 2004 par le Dr Scutaru du centre de médecine légale de Chisinau, à la demande du commissariat de police, M. G______ se plaignant d'avoir été battu par les policiers "avec les mains, les pieds, la tête, les chaises, contre la tête, le corps , les membres". L'état de l'intéressé est décrit de la manière suivante : "Sur la partie pileuse de la région frontale au centre et sur le nez, des excoriations linéaire, les bords réguliers, refaits avec du vert brillant, dimensions des punctiformes de 2,3 x 0,2 cm. Dans la région frontale au centre ecchymose cyanotique rouge de forme ovale avec le dimensions de 2,5 x 2 cm. Dans la région de la plaque nasolabiale droite, une plaie linéaire d'une longueur de 1 cm avec suture. Sur la surface antérieure des articulations des épaules, l'ecchymose cyanotique violette avec des dimensions de 3 x 2 et 3,5 cm". Les excoriations et la plaie sur le visage auraient pu être produites par des débris de verre et le ecchymoses sur le front et les épaules par un objet contendant. Cela était compatible aves les éléments indiqués par l'intéressé.

- copie, avec sa traduction, d'un rapport médico-légal établi en mars 2010 par le Dr Tarasova du centre de médecine légale de Chisinau, à la demande du commissariat de police, M. G______ se plaignant d'avoir reçu des policiers des coups de poing sur la tête, les jambes, le corps et le membres et d'avoir été électrocuté et soumis à d'autres types de tortures. L'état de l'intéressé est décrit de la manière suivante : " Sur la surface antérieure des articulations des épaules, ecchymoses cyanotico-violacées, ayant comme dimensions de 3 x 5 et 2 x 4 cm. Le membre droit a été fracturé avec déplacement de l'os. Dans la région du pli naso-labial droit, il y a une plaie linéaire d'une longueur de 2 cm avec suture. Sur la partie pileuse de la région frontale, au niveau central et sur le nez, il y a des excoriations linéaires, marginales, légèrement gommées, traitées au vert acide brillant, ayant une dimensions entre un point 2,3 x 0,2 cm. Dans la région frontale, au niveau central, ecchymose cyanotique rouge de forme ovale d'une dimension de 2,5 x3". Les excoriations et la plaie sur le visage auraient pu être faites par des débris de verre et les ecchymoses sur le front et les articulations des épaules par un objet contondant. Le membre avait été fracturé suite au coup appliqué avec un objet solide.

- copie du résultat positif de la recherche d'anticorps du virus de l'hépatite C effectuée chez M. G______ auprès du centre hospitalier de Chambéry en septembre 2008 ;

- copie d'un certificat médical établi en avril 2009 par le Dr De Goer, du centre hospitalier de Chambéry, attestant que M. G______ présente une hépatite virale chronique C ;

- copie d'un courrier du 15 février 2011 du Dr Favrod-Coune, de la division de médecine pénitentiaire des hôpitaux universitaires de Genève, à l'avocat de M. G______, précisant que le début du traitement de l'hépatite dépendrait de l'indication médicale au dit traitement, des contre-indications éventuelles et de la durée du séjour ;

- copie d'un rapport d'évaluation médico-psychologique de M. G______, du 11 juillet 2011, établi par le Dr Liengme, indiquant que l'intéressé est suivi depuis le début du mois de juin au centre de détention administrative de Frambois et présente de graves symptômes anxiodépressifs, avec propos suicidaires à prendre en considération. Les renseignements anamnestiques font état d'une situation familiale très perturbée et d'épisodes traumatisants comme le meurtre de son meilleur ami par des policiers alors que tous deux étaient détenus et une fuite de Moldavie en raison de menaces de personnes haut placées dans la police. "La peur d'un renvoi possible dans son pays d'origine ainsi que la représentation macabre qu'il garde en permanence de sa vie passée en Moldavie sont les principaux facteurs qui ont une influence directe sur l'état psychologique actuel du patient". Il serait nécessaire de continuer l'accompagnement et l'encadrement psychologique de l'intéressé.

9. Le 13 juillet 2011, le TAPI a transmis son dossier, sans observations. Les éléments y figurant seront repris en détail en tant que de besoin ci-après, eu égard au nombre de pièces.

10. Le 18 juillet 2011, l'officier de police a conclu au rejet du recours. M. G______ ne contestait pas les motifs de sa mise en détention administrative. Il soutenait à tort que son renvoi était impossible. Le fait que le niveau de soins disponibles en Moldavie ne soit pas équivalent à celui de la Suisse ne conférait pas un droit à demeurer dans ce pays pour y bénéficier d'une prise en charge. Si le rapport du Dr Liengme faisait état de graves symptômes anxiodépressifs avec une tendance suicidaire, il ne mentionnait aucun traitement médicamenteux. De même, il n'apparaissait pas que l'intéressé suivrait un traitement pour son hépatite C. Son état de santé n'interdisait pas un retour en Moldavie, qui serait finalement exécuté par un vol spécial, sur lequel il bénéficierait d'un encadrement médical pour pallier tout risque d'automutilation.

EN DROIT

1. Interjeté le lundi 11 juillet 2011 contre le jugement du TAPI, prononcé et notifié le 30 juin 2011, le recours a été interjeté auprès de la juridiction compétente, dans le délai légal (art. 132 al. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 10 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10 ; art. 17 al. l. ch. 3 et 62 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Selon l’art. 10 al. 2 LaLEtr, la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. En statuant ce jour, elle respecte ce délai.

3. La chambre administrative est compétente pour apprécier l’opportunité des décisions portées devant elle (art. 10 al. 2 LaLEtr). Elle peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée ; cas échéant, elle ordonne la mise en liberté de l’étranger (art. 10 al. 3 LaLEtr).

4. a. L’étranger qui a fait l’objet d’une décision de renvoi peut être mis en détention administrative si des éléments concrets font craindre qu’il entend se soustraire à son expulsion, en particulier parce qu’il ne se soumet pas à son obligation de collaborer au sens de l’art. 90 LEtr ou de l’art. 8 al. 1 let. a ou al. 4 de la loi sur l’asile du 26 juin 1998 - LAsi - RS 142.31 (art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEtr). Il en va de même si son comportement permet de conclure qu’il se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (art. 76 al. 1 let. b ch. 4 LEtr). L’art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEtr décrivent tous deux des comportements permettant de conclure à l’existence d’un risque de fuite ou de disparition. Ces deux éléments doivent donc être envisagés ensemble (Arrêt du Tribunal fédéral du 30 mars 2009 2C.128/2009, consid. 3.1).

En outre, un étranger faisant l'objet d'une décision de renvoi peut être placé en détention administrative en vue de l’exécution de celle-ci s'il a été condamné pour crime (art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEtr renvoyant à l’art. 75 al. 1 let. h LEtr).

b. Un risque de fuite existe lorsque l’étranger a déjà disparu une première fois dans la clandestinité, qu’il tente d’entraver les démarches en vue de l’exécution du renvoi en donnant des indications manifestement inexactes ou contradictoires, ou encore lorsqu’il laisse clairement apparaître qu’il n’est pas disposé à retourner dans son pays d’origine (ATF 130 II 56 consid. 3.1, et jurisprudence citée). Lorsqu’il existe un risque de fuite, le juge de la détention doit établir un pronostic en déterminant s’il existe des garanties que l’étranger prête son concours à l’exécution du renvoi, soit qu’il se conformera aux instructions de l’autorité et regagnera ainsi son pays d’origine le moment venu, c’est-à-dire lorsque les conditions seront réunies. Dans ce cas, le juge de la détention dispose d’une certaine marge d’appréciation (Arrêt du Tribunal fédéral du 16 juillet 2009 2C.400/2009, consid. 3.1).

En l’occurrence, le recourant, condamné à réitérées reprises pour vol ainsi que pour actes préparatoires délictueux de brigandage, soit des crimes au sens de l'art. 10 al. 2 CP, fait l’objet d’une décision de renvoi qui est exécutoire. Il a réitéré devant l’OCP, l’officier de police et le TAPI qu’il n’entendait pas se soumettre à la décision de renvoi exécutoire qui lui avait été signifiée. Il avait concrétisé cette opposition en refusant de prendre place dans l’avion qui devait le ramener dans son pays. Les conditions des art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEtr qui fondent son maintien en détention sont donc remplies, ce qu'il ne conteste d'ailleurs pas.

5. La détention doit être levée lorsque son motif n’existe plus ou si, selon l'art. 80 al. 6 let. a LEtr, l’exécution du renvoi ou de l’expulsion s’avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles ou qu’il ne peut être raisonnablement exigé, cette dernière disposition légale renvoyant aux conditions de l'art. 83 al. 1 à 4 LEtr.

En particulier, le renvoi ne peut être raisonnablement exigé si l’expulsion de l’étranger dans son pays le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile ou de violence généralisée ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEtr). Cette disposition légale procède de préoccupations humanitaires du législateur suisse. Elle vise non seulement les personnes qui, sans être individuellement victimes de persécutions, tentent d’échapper aux conséquences de guerres civiles, de tensions, de répressions à l’autre l’atteinte grave généralisée aux droits de l’homme, mais également les personnes pour lesquelles un retour reviendrait à les mettre concrètement en danger, notamment parce qu’elles ne pouvaient plus recevoir les soins dont elles ont besoin, soit le soin de médecine générale d’urgence absolument nécessaire à la garantie de la dignité humaine. Si les soins essentiels nécessaires peuvent être assurés dans le pays d’origine ou de provenance de l’étranger concerné, l’exécution du renvoi dans l’un ou l’autre de ces pays sera raisonnablement exigible (Arrêt du Tribunal administratif fédéral, Cour III C-6011/2009 du 8 avril 2011 et doctrine citée).

Une décision d’exécution du renvoi ne devient pas inexigible au simple motif que l’infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical prévalant en Suisse correspondent à un standard élevé non accessible dans le pays d’origine ou le pays tiers de résidence de la personne concernée (JICRA 1993 n° 38 p. 274 ss ; ATAF E-6427/2006 du 3 avril 2008). Enfin, l’examen de l’exigibilité de l’exécution du renvoi dépend avant tout de la situation concrète de la personne concernée dans son pays d’origine ou de provenance, et en particulier, des possibilités d’accès aux soins médicaux (JAAC 68 [2004] n° 116, décision de la commission suisse de recours en matière d’asile du 13 janvier 2004  ; JAAC 68 [2004] n° 115, décision de la commission suisse de recours en matière d’asile du 24 octobre 2003 ; ATA/694/2009 du 22 décembre 2009).

En l’espèce, le recourant se prévaut de problèmes de santé, soit une hépatite C et des troubles anxiodépressifs. Toutefois, il ne ressort pas du dossier qu'il ait jamais suivi de traitement pour l'hépatite C, bien que cette affection ait été diagnostiquée depuis 2008. Tout au plus un tel traitement a-t-il été envisagé lors de son dernier séjour en prison, ainsi que cela ressort du courrier du 15 février 2011 du Dr Favrod-Coune, mais il n'y a pas eu de suite. Les documents médicaux ne révèlent aucune inquiétude des médecins par rapport à cette absence de prise en charge. Enfin, c'est la première fois que le recourant met en avant cette maladie pour justifier son opposition à son renvoi, alors qu'il a déjà été refoulé en France et une première fois en Moldavie. Pour le surplus, son état de santé ne l'a pas entravé dans les multiples déplacements en Europe - Russie, Roumanie, Hongrie, Autriche, France et Italie - ces dernières années dont il a fait état au cours de ses différentes auditions par la police.

Quant aux troubles de santé psychiques attestés par un certificat médical, il faut retenir que leur niveau de gravité décrit est en relation directe avec la situation de détention actuelle de l’intéressé, provoquée par son refus de se soumettre à l’ordre qui lui est donné de quitter la Suisse. Les autres éléments d'anamnèse correspondant à une situation personnelle et familiale marquée par de nombreux épisodes traumatiques, mis en avant dans le rapport du Dr Liengme, doivent en effet être considérés avec beaucoup de précautions dans la mesure où ils ne correspondent pas du tout aux éléments biographiques donnés par l'intéressé au cours de ses nombreuses auditions par la police et dont il ressort une situation familiale sans particularité, une scolarisation obligatoire normale suivie d'une formation professionnelle de tapissier, avant qu'il ne commence son activité criminelle. On retrouve ces contradictions dans les explications de sa tendance aux actes d'automutilation, celui du 28 juin 2011 dans locaux de la police ne trouvant pas sa cause dans l'angoisse de retourner en Moldavie mais dans la seule volonté d'être emmené à l'hôpital pour y obtenir du Tramal, que le médecin avait refusé de lui administrer.

Si la réalité des pathologies dont il est atteint ne peut être mise en doute et si le système de santé en Moldavie comporte notoirement des lacunes importantes, l'impossibilité du renvoi pour ces motifs n'est ainsi pas patente, et ne peut être prise en compte par la chambre administrative, en sa qualité de juge de la détention.

Le recourant fait enfin état de risques pour sa sécurité en cas de retour en Moldavie, craignant d'être maltraité par la police de son pays. Il produit, pour la première fois devant la juridiction de céans, des rapports médicaux datant l'un de 2004 et l'autre de 2010, à l'appui de ses allégations. Outre que l'on peut se demander pourquoi il a attendu si longtemps pour le faire, la force probante de ces documents est singulièrement amoindrie par la ressemblance frappante de leur contenu, jusqu'à la localisation et la taille de certaines ecchymoses comme des plaintes formulées par l'intéressé, et par le fait que le sceau et la signature du médecin qu'ils portent sont similaires alors qu'ils sont censés avoir été établis par deux praticiens différents. L'authenticité à tout le moins du second - qui apparaît en partie une copie du premier - est ainsi sujette à caution et seule la production des originaux permettrait de savoir de quoi il retourne, ce d'autant plus que le recourant a expliqué, lors de l'une de ses dernières auditions par la police genevoise, qu'après son refoulement en Moldavie au printemps 2010, il avait quitté ce pays le 5 juin 2010 pour la Roumanie car il avait des problèmes avec la police moldave suite à une bagarre : il devait de l'argent et il n'avait pas voulu payer. Il n'est ainsi pas établi que l'intéressé soit exposé à un risque concret pour sa sécurité en cas de retour dans son pays.

6. Par sa durée, la détention administrative doit respecter le principe de la proportionnalité, garanti par l’art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101). En outre, les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder (art. 76 al. 4 LEtr).

A cet égard, la chambre administrative relève qu’aucun reproche ne peut être fait ni à l’OCP ni à l’ODM qui ont manifestement agi avec célérité et continuent de le faire, ainsi que cela ressort de la partie « en fait » du présent arrêt.

La durée pour laquelle la détention du recourant a été confirmée par le TAPI, soit de trois mois, apparaît proportionnée et nécessaire au vu de l’organisation du vol spécial qui doit permettre le rapatriement du recourant, ainsi que du fait qu’il ait refusé, le 28 juin 2011, d’embarquer sur le vol à destination de Chisinau alors qu’une place lui était réservée.

7. En tous points mal fondé, le recours sera rejeté.

Vu la nature du litige aucun émolument ne sera perçu (art. 12 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03) et, vu son issue, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 juillet 2011 par Monsieur G______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 30 juin 2011 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Magali Buser, avocate du recourant, l'officier de police, au Tribunal administratif de première instance, à l'office fédéral des migrations, à l’office cantonal de la population, ainsi qu’au centre de détention administrative de Frambois LMC, pour information.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, Mme Junod et M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste:

 

 

 

C. Derpich

 

la présidente siégeant :

 

 

 

L. Bovy

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :