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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1027/2023

JTAPI/838/2024 du 27.08.2024 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : DROIT D'ÊTRE ENTENDU;PERSONNE AUTORISÉE À SIGNER;SIGNATURE
Normes : Cst.29.al2; RCI.11.al4; LAT.19.al1; LAT.22.al2.letb; LCI.14.al1; LForêts.11.al4; RCI.3.al3; LCI.15; LAC.30.al1.letm
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1027/2023 et A/256/2024 LCI

JTAPI/838/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 27 août 2024

 

dans la cause

Mesdames et Messieurs A______, B______, C______, D______, E______, F______, G______ et H______, I______, J______ et K______, représentés par Me Zena GOOSSENS-BADRAN, avocate, avec élection de domicile

contre

L______ SA

M______, représentée par Me Julien PACOT, avocat, avec élection de domicile

N______ SA, représentée par Me Romain CANONICA, avocat, avec élection de domicile

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC


EN FAIT

1.             La commune de M______ (ci-après : la commune) est propriétaire des parcelles nos 1______ et 2______ sises sur son territoire.

La parcelle n° 1______ est située tant en cinquième zone à bâtir (1’178 m2) qu’en zone de bois et forêts (1’279 m2). Elle est libre de toute construction.

La parcelle n° 2______ est située pour partie en zone sportive (15’130 m2) et pour partie en zone de bois et forêts (5’271 m2). Elle accueille le O______ (ci-après : O______).

2.             L______ SA est propriétaire de la parcelle n° 3______ de la commune, qui est située en cinquième zone à bâtir (7’457 m2) et en zone de bois et forêts (721 m2). N______ SA est au bénéfice d’un droit d’emption sur cette parcelle, dûment annoté au registre foncier.

L’accès à cette parcelle, actuellement vierge de toute construction, s’effectue par le chemin P______.

3.             La parcelle n° 4______ de la commune, qui constitue une partie du chemin P______, est une dépendance des trente-quatre parcelles alentour.

La parcelle n° 5______ de la commune, qui constitue l’autre partie dudit chemin, est une dépendance des huit parcelles alentour. Elle est grevée, en faveur de la parcelle n° 3______, de la servitude de passage n° 6______, inscrite au registre foncier le ______ 1961 ; selon cette servitude, l’exercice du passage est le « passage le plus étendu ».

Ce chemin fait partie du réseau du quartier et est classé dans le réseau communal secondaire ; il est bidirectionnel, comprend une voie avec deux réserves de passage, d’une largeur de 4,20 m au maximum et est qualifié d’axe principal. La circulation y est limitée à 30 km/h. Il est bordé de chênes séculaires et aucun trottoir ne le longe.

4.             Les parcelles précitées sont sises principalement dans une zone classée en degré de sensibilité au bruit 2 (DS II), les zone de bois et forêts étant en degré de sensibilité au bruit 3 (DS III), et dans le secteur V, respectivement VI, au sens du règlement relatif aux places de stationnement sur fonds privés (RPSFP - L 5 05.10) du 17 mai 2023, respectivement du 16 décembre 2015.

5.             Le ______ 2022, par le biais de son architecte, N______ SA a déposé une demande en autorisation de construire auprès du département du territoire
(ci-après : le département) afin d’édifier trois bâtiments, soit vingt-deux logements en habitat groupé (30% THPE) avec sondes géothermiques, capteurs solaires et parking souterrain.

Ce projet, qui concernait les parcelles nos 3______, 4______, 1______ et 2______, prévoyait aussi l’abattage d’arbres ainsi que la construction d’un parking souterrain supplémentaire pour le O______, lequel serait mutualisé en deux structures : trente-quatre places de stationnement pour voiture dans un espace privé destiné aux futurs habitants et quarante-deux places dans un autre espace réservé aux usagers du O______. L’accès audit parking s’effectuerait par une rampe partiellement couverte débouchant approximativement au niveau de l’intersection entre les chemins Q______ et P______, sur la parcelle n° 2______. À cet effet, une promesse de constitution de servitudes de passage à pieds et à véhicules (hors-sol ainsi que rampe et sous-sol) grevant la parcelle n° 2______ au profit de celle n° 3______ avait été signée le 16 juin 2022 entre N______ SA et la commune. L’accès extérieur via le chemin P______, moyennant usage de la servitude de passage n° 6______, était uniquement prévu pour la mobilité douce, les livraisons légères par camionnette et les services de secours.

6.             Lors de l’instruction de cette demande, enregistrée sous la référence DD 7______, les préavis usuels ont été requis et émis :

-       le 2 février 2022, la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC) a requis la fourniture de pièces complémentaires. Elle a notamment exigé le remise d’un acte notarial ou projet d’acte de cession de droit à bâtir de 353 m2 de la parcelle n° 1______ à celle n° 3______. À cet égard, par engagement du 9 ______ 2023, la commune a accepté que pour le calcul de rapport de surfaces afférentes à l’autorisation de construire en cause, la surface de sa parcelle n° 1______ soit réduite de 353 m2 au profit de la parcelle n° 3______ ;

-       le 4 février 2022, la direction de l’information du territoire (ci-après : DIT), l’office cantonal de l’énergie (ci-après : OCEN) et la police du feu ont préavisé favorablement, sous conditions. En particulier, la police du feu a requis que les mesures définies dans le concept sécurité incendie élaboré par R______ Sàrl soient respectées et les prescriptions de l’Association des établissements cantonaux d’assurance incendie ainsi que les règlements d’application de la loi sur la prévention des sinistres, l’organisation et l’intervention des sapeurs-pompiers du 25 juillet 1990 (RPSSP - F 4 05.01) et de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI - L 5 05.01) suivies ;

-       le même jour, la commission consultative de la diversité biologique (ci-après : CCDB) a préavisé favorablement, avec dérogations et sous conditions. Elle était favorable à une dérogation au sens de l’art. 11 al. 2 let. a de la loi sur les forêts du 20 mai 1999 (LForêts - M 5 10) pour la canalisation et le cheminement piétons, mais celui-ci devait être grevé d’une servitude de passage public ;

-       le 7 février 2022, le service de l’environnement et des risques majeurs (ci-après : SERMA) a préavisé favorablement, sans observation ;

-       le 4 mars 2022, le service de la protection civile et des affaires militaires
(ci-après : OCPPAM) a requis la modification du projet ;

-       le 7 mars 2022, la commission d’architecture (ci-après : CA) et le service de l’air, du bruit et des rayonnements non ionisants (ci-après : SABRA) ont requis la fourniture de pièces complémentaires et la modification du projet ;

-       le même jour, le service de géologie, sols et déchets (ci-après : GESDEC) a préavisé favorablement, sous conditions. Ainsi, dans le cas de remontées de gaz, de venues d’eau ou d’eau artésienne, il devait en être automatiquement informé et les observations devaient être reportées sur le relevé de forage associé. En fonction des résultats, le requérant devait être conscient que la profondeur des installations pouvait être revue à la baisse ou que les forages devaient être rebouchés et décalés selon les problèmes rencontrés, voire même que le projet devait être abandonné si des risques trop importants étaient présents (condition n° 2). Dans le cas d’imprégnation des formations géologiques par hydrocarbures géogènes, des analyses devaient être effectuées sur les déblais d’excavation et boues du forage pour pouvoir définir la filière d’évacuation (condition n° 3). Le secteur du projet ne se situait pas dans le périmètre connu d’une nappe d’eau souterraine, mais les mesures constructives devaient être adaptées aux conditions géologiques et hydrogéologiques locales. Le projet ne devait en aucun cas causer d’impact sur les éventuelles circulations d’eaux souterraines, ni sur le voisinage (condition n° 4). Le préavis requérait encore qu’au plus tard un mois après la fin des travaux de forage, le requérant transmette les relevés géologiques de forage établis par un géologue décrivant les terrains traversés. Enfin, il était remarqué que lorsque l’implantation d’une sonde géothermique était envisagée, le risque lié au site était assumé par le maître d’ouvrage, de sorte que si un problème se posait en cours de forage, notamment en lien avec la présence d’une nappe artésienne ou de gaz naturel, il incomberait au maître d’ouvrage d’y remédier ;

-       le 10 mars 2022, la commune a préavisé favorablement, avec souhaits ;

-       le 14 mars 2022, la commission des monuments, de la nature et des sites
(ci-après : CMNS) a émis un préavis favorable, avec dérogations et sous conditions. Elle était favorable à une dérogation au sens de l’art. 11 al. 2 let. a LForêts ;

-       le 17 mars 2022, l’office cantonal de l’agriculture et de la nature (ci-après : OCAN) a requis la fourniture de pièces complémentaires et la modification du projet ;

-       le 21 mars 2022, l’office cantonal de l’eau (ci-après : OCEau) a requis la fourniture de pièces complémentaires ;

-       le 4 avril 2022, l’office cantonal des transports (ci-après : OCT) a préavisé favorablement, avec souhaits ;

-       les 14 et 15 juin 2022, l’office de l’urbanisme (ci-après : OU) a préavisé favorablement, sous conditions.

7.             Le 27 juillet 2022, informés le 15 juin 2022 que le projet devait être modifié pour se conformer à certains des préavis précités, et après avoir obtenu une prolongation du délai pour se déterminer, la requérante a soumis une nouvelle version du projet au département. De nouveaux préavis ont alors été rendus sur cette seconde version du projet :

-       le 5 août 2022, la DAC a requis la fourniture de pièces complémentaires ainsi que la modification du projet. La surface totale maximum des constructions de peu d’importance (ci-après : CDPI) ne pouvait dépasser les 100 m2.

-       le même jour, l’OCT a préavisé favorablement, avec souhaits ;

-       le 30 août 2022, la CCDB a repris son précédent préavis ;

-       le 31 août 2022, l’OCEau a requis la fourniture de pièces complémentaires ;

-       le 5 septembre 2022, le SABRA a préavisé favorablement, sous conditions. Il a notamment examiné le système de ventilation et l’a conditionné au respect des exigences des art. 11 de la loi fédérale sur la protection de l’environnement du 7 octobre 1983 (LPE - RS 814.01) et 7 de l’ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986 (OPB - RS 814.41) « au moyen du choix des appareils, de leurs emplacements, du dimensionnement, de l’isolation acoustique, etc. » ;

-       le 9 septembre 2022, la CA et l’OCPPAM ont requis la modification du projet ;

-       le 29 septembre 2022, l’OCAN a préavisé favorablement, avec dérogations et sous conditions. Il était favorable à une dérogation au sens de l’art. 11 al. 2 let. a LForêts pour les canalisations et le chemin piétons, sous condition que celui-ci soit réalisé en matière perméable et grevé d’une servitude de passage public. En outre, s’agissant des arbres hors forêt, il a notamment requis le respect des conditions mises au préavis liant concernant le dossier d’abattage n° 8______, a exigé que toutes les précautions nécessaires (barrières type MÜBA à poser à l’aplomb des couronnes, plus 1 m) afin de protéger valablement les arbres maintenus à proximité des travaux soient prises et qu’une garantie bancaire de CHF 135’000.- lui soit fournie trente jours avant l’ouverture du chantier et l’abattage des arbres ;

-       le même jour, l’OCAN a émis un préavis liant selon le dossier d’abattage n° 8______ favorable quant à l’abattage d’arbres prévu, sous conditions.

8.             En octobre 2022, après avoir été informée le 18 octobre 2022 que le projet devait être modifié pour se conformer à certains des préavis précités, la requérante a soumis une troisième version au département et de nouveaux préavis ont ainsi été rendus :

-       le 3 novembre 2022, la DAC a préavisé favorablement, sans observation ;

-       le 15 novembre 2022, la CA a préavisé favorablement, sous conditions. Elle a requis que les teintes et les matériaux lui soient soumis pour approbation avant la commande ;

-       le même jour, l’OCEau a préavisé favorablement, avec dérogations et sous conditions ;

-       le 21 novembre 2022, l’OCT a préavisé favorablement, avec souhaits. Il a relevé que le projet était conforme à la réglementation actuelle et a considéré qu’un abaissement du stationnement à une place par logement était, si nécessaire, réalisable ;

-       le 21 janvier 2023, l’OCPPAM a préavisé favorablement, sous conditions.

9.             Il sied encore de relever que les services de l’OCAN consultés à titre individuel ont émis des préavis consultatifs favorables. Tel a été en particulier le cas du service de la biodiversité (faune) (ci-après : SBIO) qui a formulé, le 14 mars 2022, diverses conditions sur les éclairages, en particulier les bornes de cheminements piétons qui devaient avoir des couleurs chaudes inférieures à 2’400, optique strictement dirigé vers le bas, éclairage à 180° orienté vers le chemin et dix lux moyen pour cet usage. La localisation et descriptifs des autres éclairages (entrées, terrasses et balcons, court de tennis) avec informations techniques sur les modèles et puissance devait lui être communiqués. Le site étant proche de milieux boisés et cours d’eau, une vigilance sur la temporalité des éclairages extérieurs selon les usages avérés était importante.

10.         Lors de cette instruction, divers résidents et propriétaires du chemin P______ avaient, le 24 juin 2022, manifesté leur opposition avec le projet auprès du département, relevant des problèmes d’accès, de trafic et de parking sauvage et dénonçant le choix d’allouer des fonds publics à des places de parking privées. Par ailleurs, trois cents communiers avaient, le 22 septembre 2022, adressé une pétition contre le projet aux autorités politiques communales, laquelle avait été transmise au département par courrier du 26 septembre 2022.

11.         Par décision globale du ______ 2023, publiée dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du même jour, le département a délivré l’autorisation de construire DD 7______.

En son point 8, cette décision stipulait que les conditions figurant dans les préavis de l’OCCPPAM du 23 janvier 2023, de l’OCEau du 24 novembre 2022, de l’OCAN du 29 septembre 2022, de la CCDB du 30 août 2022, du GESDEC du 7 mars 2022, du SABRA du 5 septembre 2022, de l’OCEN du 4 février 2022, du SMS du 13 mars 2022, de la CMNS du 14 mars 2022, de l’OU du 15 juin 2022, de la DIT du 4 février 2022, de la police du feu du 4 février 2022 et de la CA du 15 novembre 2022 ainsi que le préavis liant du 29 septembre 2022 devaient être respectées et faisaient partie intégrante de l’autorisation.

En son chiffre 13, la décision stipulait que le plan et l’acte de constitution de servitude de restriction de droits à bâtir à charge de la parcelle n° 1______ au profit de la n° 3______ devraient parvenir au département avant l’ouverture du chantier.

12.         Par acte du 16 mars 2023, par le biais de leur conseil, Mesdames et Messieurs A______, B______, C______, D______, E______, F______, G______ et H______, I______, J______ et K______ ont interjeté recours à l’encontre de cette décision par devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant à son annulation, avec suite de frais et dépens. Préalablement, ils ont requis que soit ordonné une audience de comparution personnelle des parties, d’un représentant de l’OCT, de la CA, de la CCDB et de la commune, qu’un transport sur place ait lieu et qu’une expertise concernant les risques liés aux venues d’eau artésiennes soit effectuée.

Ils étaient propriétaires de parcelles sises à proximité directe de celles litigieuses et y occupaient les villas qui y étaient érigées. Ils étaient par ailleurs copropriétaires des parcelles nos 4______, sur laquelle était prévu le seul accès piéton du projet litigieux, et 5______.

Au vu de l’envergure et de la complexité de l’autorisation litigieuse qui procédait de plusieurs dérogations à proximité directe de zones protégées et d’un accord aussi complexe qu’inabouti avec la commune, il convenait d’effectuer un transport sur place et ordonner l’audition de témoins. De plus, une expertise devait être ordonnée compte tenu des risques identifiés par le GESDEC s’agissant du forage des sondes géothermiques en matière de remontées de gaz et de venues d’eau ou d’eau artésienne.

L’accès à la parcelle n° 3______ était insuffisant - tant pour les piétons, les pompiers que les véhicules - et ne satisfaisait donc pas aux exigences d’équipement des art. 19 et 22 de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700). Entièrement enclavée par la zone forêt et le O______, cette parcelle n’était pas reliée au réseau routier alors que son éloignement du réseau de transports publics faisait apparaître que ses occupants se déplaceraient essentiellement en voiture. Elle n’était raccordée pour les piétons que par une étroite servitude de passage, constituée en 1961 - plus de vingt ans avant l’adoption d’objectifs et de stratégies de densification de la zone 5 - et traversant la parcelle n° 5______. Cette servitude avait pour objet un passage piéton raisonnable destiné aux loisirs des propriétaires et des passants vers la forêt et n’avait en aucun cas été convenue pour permettre le passage des habitants de vingt-deux logements et celui des pompiers. La construction de logements en lieu et place d’une parcelle inhabitée couverte de verdure provoquerait une utilisation plus intensive de cette servitude, correspondant à une aggravation notable. Le chemin P______ était supposé assurer le passage des véhicules incendie et permettre tant l’intervention des pompiers que des véhicules de livraison qui n’auraient pas accès au parking souterrain. Faute d’accès en voiture, l’intimée avait cherché à trouver un accord avec la commune pour proposer un accès par un parking souterrain, en l’état inexistant et dont la construction, particulièrement coûteuse puisqu’estimée à CHF 2’750’000.-, dont plus de 56% à la charge de la commune, ne répondait à aucun intérêt public dans la mesure où l’actuel parking du O______ était vide la quasi-totalité de l’année. La construction du parking, et partant l’aménagement des places de stationnement privées et visiteurs obligatoires, n’était en rien garanti. L’accès via le O______ n’était, dans ces circonstances, pas garanti et soulevait de nombreuses questions juridiques (absence de demande d’autorisation de démolition des installations existantes, abstraction des règles sur les marchés publics) et factuelles (faisabilité, sécurité, etc.). En outre, cas échéant, durant les éventuels travaux, l’inaccessibilité de la parcelle engendrerait des nuisances inacceptables, en particulier le passage et le parking sauvage de véhicules de chantier.

Les conditions de sécurité et salubrité n’étant pas respectées, le projet litigieux violait l’art. 14 al. 1 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05). Le chemin P______ étant une route à une voie avec deux réserves de passage et n’étant pas bordée de trottoirs, la sécurité des futurs habitants du projet, dont il serait le seul accès piéton, n’était pas assurée. L’accès d’un véhicule incendie et des pompiers sur l’étroite servitude de passage grevant la dépendance des recourant était également hautement compromis.

La décision entreprise contrevenait à l’art. 11 al. 1 let. a de la loi LForêts en raison à la fois du tracé du chemin piétons, des canalisations et de l’emplacement des sondes géothermiques. Le projet prévoyait la construction d’un chemin piétonnier empiétant sur la zone protégée à plusieurs endroits et sur une longue distance, à la lisière de la forêt, et s’y enfonçait ensuite. Ce chemin ne répondait à aucun intérêt public et ses principes, emplacement et tracé n’étaient nullement imposés par sa destination. Le projet prévoyait aussi le forage de dix sondes géothermiques sur 2’000 m, à 200 m de profondeur, à l’extrême limite de distance à la lisière de la forêt, étant noté que les plans du géomètre démontraient que les rayons des sondes radieraient sur le périmètre protégé. Le GESDEC avait indiqué dans son préavis du 7 mars 2022 que les forages risquaient de devoir être décalés et que les risques de la zone pourraient être si importants que le projet devrait être abandonné.

La surface des CDPI était excessive puisqu’elle dépassait le maximum autorisé par l’art. 3 al. 3 RCI. La surface totale des CDPI s’élevait à 164,20 m2 dans le premier plan CDPI du 4 février 2022, à 196,10 m2 dans le second plan du 27 juillet 2022 et à 100 m2 dans le troisième plan du 26 octobre 2022. La comparaison des seconds et troisièmes plans ainsi qu’une étude des plans visés ne varietur faisait apparaître que la requérante n’avait simplement pas pris en compte certaines CDPI dans le calcul ; ainsi, les toitures du second plan mises en évidence en rouge étaient conservées dans le troisième plan, mais leur surface n’était plus comptabilisée alors que l’élément figurait pourtant sur d’autres plans visé ne varietur. Elle en avait aplani d’autres, réduisant drastiquement les dimensions indiquées : l’emprise du local vélos avait été réduite à 23,10 m2 alors même que sur le plan de toiture visé ne varietur, c’était sa version et sa dimension initiales de 49,40 m2 qui avaient été approuvées.

Le projet litigieux violait l’art. 15 al. 1 LCI. Les différents plans, en particulier ceux visés ne varietur, étaient trop sommaires : ils consistaient en de limitées illustrations résumant essentiellement la structure des constructions prévues, ne permettaient aucune visualisation en 3D et ne fournissaient aucune information sur les matériaux et couleurs utilisés. Malgré la demande de la CA du 7 mars 2022, selon laquelle « la rampe [était] disproportionnée et ne [s’intégrait] pas dans le site qui, au vu de sa qualité, [était] à préserver », la rampe du parking et celle piétonne étaient restées en tout point inchangées. Dans son préavis du 15 novembre 2022, la CA avait requis que les teintes et les matériaux pour approbation lui soient soumis avant la commande. Dans son préavis du 14 mars 2022, le SBIO avait donné des instructions quant à l’aspect du chemin piétonnier. Le caractère sommaire des plans, l’invitation de la CA à ce que les matériaux et teintes lui soit soumis après l’échéance du délai de recours et l’impossibilité de s’assurer du respect des instructions du SBIO violaient leur droit d’être entendus et l’art. 15 LCI. Ils étaient privés de toute voie de droit à ce sujet, ne pouvant apprécier l’esthétique du projet litigieux et son intégration au sein du site et formuler un grief circonstancié. En tout état, les topographies peu claires et l’absence de modification de la rampe qualifiée initialement de disproportionnée par la CA permettaient de contester la qualité esthétique du projet.

La cession de droits à bâtir de la part de la commune était invalide. L’engagement du 9 février 2023 de cette dernière n’était signé que de la seule main de Monsieur S______, conseiller administratif, sans qu’un acte de délégation interne n’ait été joint, alors qu’il aurait dû faire l’objet d’une signature du maire et d’un conseiller administratif délégué. Cet engagement n’était ainsi pas valable et la cession des 353 m2 de droits à bâtir n’était ni effective ni garantie.

Ce recours, accompagné d’un chargé de septante-quatre pièces, a été ouvert sous le numéro de cause A/1027/2023.

13.         Le 24 avril 2023, N______ SA a confirmé au tribunal son souhait de prendre part à la procédure A/1027/2023. Elle a ainsi produit la promesse de vente et d’achat du 19 avril 2021 et un extrait du registre foncier relatif à la parcelle n° 3______ attestant de l’annotation d’un droit d’emption en sa faveur, valable jusqu’au 31 mai 2025.

14.         Dans ses observations du 22 mai 2022, sous la plume de son conseil, la commune a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision entreprise, sous suite de frais et dépens.

Les recourants sollicitaient la tenue d’un transport sur place. Les données et mesures librement disponibles sur le système d’information du territoire genevois (ci-après : SITG) ainsi que les plans et autres documents techniques figurant au dossier suffisaient toutefois à l’appréciation des griefs soulevés. Il n’existait en outre aucune violation de la réglementation invoquée par les recourants, si bien que la mesure d’instruction requise était superflue. Ceci était aussi valable s’agissant de l’audition des instances mentionnées par les recourants. En particulier, l’audition du GESDEC n’était pas nécessaire car on comprenait aisément de son préavis que les conditions imposées étaient des exigences générales afférentes à des hypothèses non établies dans le cas d’espèce. Le fait qu’une dérogation au sens de l’art. 11 al. 1 let. a LForêts ait été octroyée relevant du droit, aucune mesure d’instruction n’était utile sous cet angle. Quant à l’accord signé entre la requérante et la commune en lien avec la cession des droits à bâtir, il s’agissait de considérations d’ordre civil exorbitantes à la présente cause.

Le projet de construction litigieux disposait d’un accès suffisamment équipé pour les véhicules puisque l’accès du parking souterrain mutualisé avec le O______ s’effectuerait par une rampe partiellement couverte et qu’une promesse de constitution de servitudes de passage à pieds et à véhicules avait été conclue à cet effet entre N______ SA et la commune. L’accès à la parcelle n° 3______ était donc juridiquement garanti ; les termes et conditions prévus par l’acte notarié du 16 juin 2022 étaient dépourvus de pertinence sous cet angle ; ils relevaient du droit civil. Il était erroné d’affirmer que la construction du parking souterrain sur la parcelle n° 2______ n’avait pas fait l’objet d’une demande d’autorisation de construire : la décision entreprise englobait clairement la composante du parking souterrain et la parcelle n° 2______ était expressément mentionnée dans l’autorisation de construire. S’agissant de l’accès des piétons, la servitude de passage n° 6______ était de type « le plus étendu », de sorte qu’il fallait admettre que même lors de sa constitution en 1961, il avait été entendu que celle-ci soit propre à assumer une charge importante de passages. Son aggravation en raison d’un usage accru par les piétons n’était pas crédible ; on ne pouvait pas raisonnablement arguer que le passage extérieur subirait une utilisation plus intensive, constitutive d’une aggravation intolérable de ladite servitude, en raison du nombre de piétons concernés, étant rappelé qu’il n’était question que de vingt-deux logements. S’agissant du passage des pompiers, l’accès s’effectuerait par le chemin P______, comme pour accéder aux parcelles des recourants. Comment ce chemin pouvait être adapté en ce qui concernait leurs parcelles, mais pas pour le projet litigieux. Les recourants se contentaient d’affirmer qu’il serait manifestement insuffisant, mais sans alléguer ni démontrer en quoi il ne serait pas techniquement propre à garantir le passage des véhicules des services de secours. En tout état, ce grief ne se vérifiait pas dans les faits. Selon le plan de simulation du 17 mai 2022 de T______, le passage du plus long et large des véhicules SIS, à savoir le camion pompier avec grande échelle, était assuré en tous points du chemin P______, y compris dans le virage, étant relevé que ce bureau d’ingénieurs avait pris en compte les angles de braquage et délais de contre-braquage. Par ailleurs, l’OCT avait tout de suite délivré un préavis favorable, lequel avait été réitéré par deux fois, sans faire état d’une quelconque préoccupation concernant la conformité de la voie d’accès pour les engins de secours. La police du feu n’avait soulevé aucune remarque quant à la largeur du chemin P______ et à celle de la courbe du virage, rendant au contraire immédiatement un préavis favorable sous conditions le 4 février 2022. Par ailleurs, le concept de sécurité incendie du 12 janvier 2022, qui abordait spécifiquement, au titre du plan de réduction des risques incendie et d’évacuation retenu, les aspects relatifs à l’accès pompiers (chapitre 32), avait été établi après un entretien en date du 16 décembre 2021 avec un collaborateur de la police du feu, ce qui tendait à attester de l’examen rigoureux de la situation par cette instance. Rien ne permettait donc de considérer que la police du feu aurait rendu son préavis en s’abstenant de vérifier la conformité du projet sur les deux points mis en exergue par les recourants. Ceux-ci ne démontraient pas que l’accès à la parcelle en cause ne répondait pas aux besoins des bâtiments projetés, étant relevé qu’en vertu de la pesée des intérêts à effectuer au titre de l’examen d’un grief portant sur la violation des art. 19 et 22 LAT, l’édification de vingt-deux nouveaux logements dans un canton où sévissait une pénurie notable revêtait un caractère prépondérant.

En relation avec l’art. 14 LCI, les recourants n’avaient pas d’intérêt digne de protection à invoquer la sécurité des tiers et on peinait peine à comprendre comment leur propre sécurité serait mise en péril puisque le passage extérieur via le chemin P______ n’était prévu que pour la mobilité douce, les livraisons légères par camionnette et les services de secours. L’accès principal des véhicules étant le parking souterrain, le nombre de situations potentiellement accidentogènes s’en retrouvait largement réduit. Il n’était pas proportionné d’exiger la présence d’un trottoir sur l’intégralité d’une voie lorsque les circonstances ne le justifiaient pas, comme en l’espèce puisque la configuration du chemin n’était pas dangereuse. En tout état, l’OCT n’avait mis en exergue aucune problématique d’ordre sécuritaire au sujet dudit chemin.

Il était douteux que les recourants disposent d’un intérêt digne de protection à se plaindre d’une prétendue violation de l’art. 11 al. 2 lit. a LForêts dans la mesure où l’objectif de la loi n’était pas de préserver les intérêts des voisins, que l’emplacement du chemin piétonnier n’avait aucun impact sur leur situation personnelle, que rienn’indiquait qu’il mettrait en péril le milieu forestier, étant précisé que l’art. 17 de la loi fédérale sur les forêts du 4 octobre 1991 (LFo - RS 921.0), qui était applicable en l’espèce, visait précisément à garantir une telle protection. Il ne ressortait aucunement des préavis des instances spécialisées que la distance entre la lisière forestière et le chemin piétonnier compromettrait la conservation, le traitement ou l’exploitation de la forêt voisine, ni que l’occupation du terrain aurait un impact respectivement entraînerait une pression excessive sur l’aire forestière. Il n’y avait donc rien d’arbitraire à suivre les préavis favorables des instances spécialisées. Il en allait de même pour les canalisations. Quant aux sondes géothermiques, les recourants se méprenaient au sujet du préavis du GESDEC du 7 mars 2022 ; les conditions imposées étaient des exigences générales afférentes à des hypothèses théoriques non établies in casu. S’agissant spécifiquement de l’hypothèse de remontées de gaz, le GESDEC exigeait d’être automatiquement informé et que les observations soient reportées sur le relevé de forage ; il était ajouté qu’« en fonction des résultats, le requérant doit être conscient que la profondeur des installations [peut] être revue à la baisse ou que les forages doivent être rebouchés et décalés selon les problèmes rencontrés, voire même que le projet doive être abandonné si des risques trop importants sont présents ». Ainsi, ce n’était pas l’intégralité du projet qui devrait être abandonné dans un tel cas de figure, mais uniquement l’installation de sondes géothermiques. C’était d’ailleurs pour appréhender ce genre de situation que le préavis du GESDEC requérait qu’au plus tard un mois après la fin des travaux de forage, le requérant transmette les relevés géologiques de forage, établis par un géologue, décrivant les terrains traversés. C’était toujours dans cette perspective que le préavis du GESDEC énonçait certaines remarques d’ordre général, dont celle selon laquelle lorsque l’implantation d’une sonde géothermique était envisagée, le risque lié au site était assumé par le maître d’ouvrage, de sorte que celui-ci devrait y remédier si un problème devait se poser.

La cession des droits à bâtir avait été correctement effectuée, aucun acte de délégation n’étant nécessaire et la délibération du Conseil municipal du ______ 2022 ayant été approuvée par décision du 3 septembre 2022 du département de la cohésion sociale. Dans ces circonstances, la décision de céder des droits à bâtir ne requérait pas la signature du maire et d’un conseiller administratif délégué, étant noté que la commune ne connaissait plus de maire depuis 1999. Enfin, le registre foncier avait validé la réquisition de mention d’inscription d’une restriction du droit de propriété de la parcelle n° 1______ le ______ 2023. Partant, l’engagement du 9 février 2022 était valable et la cession des droits à bâtir serait effective dès la réalisation des conditions suspensives énoncées dans l’acte notarié du 16 juin 2022.

Un chargé de vingt-six pièces a été produit.

15.         Dans ses observations du 23 mai 2022, par le biais de son conseil, N______ SA s’est déterminée sur le recours. Elle a conclu à son rejet et a requis, préalablement, le rejet des mesures d’instruction sollicités, le tout sous suite de frais et dépens.

Le 16 juin 2022, elle avait signé avec la commune une promesse de constitution de servitudes de passage à pieds et à véhicules (hors-sol ainsi que rampe et sous-sol) grevant la parcelle n° 2______ au profit de sa parcelle n° 3______. Par acte du même jour, elles avaient signé une promesse de constitution d’une servitude de passage public à pied en faveur de la commune, ainsi que d’une servitude de passage privé à pied en faveur des parcelles nos 1______ et 2______. L’accès au projet litigieux par le chemin P______ serait ainsi limité à la mobilité douce ainsi qu’aux services d’urgence et de livraisons.

Les mesures d’instruction sollicitées devaient être rejetées. Les recourants n’avaient pas motivé leur requête de transport sur place, qui apparaissait d’emblée inutile dès lors que les griefs soulevés concernaient des questions auxquelles les plans fournis à l’appui de la demande d’autorisation de construire, les préavis des services consultés et les plans et informations disponibles sur le SITG apportaient toutes les réponses nécessaires. La réalisation d’une expertise géologique ne saurait être ordonnée dès lors que le GESDEC n’avait identifié aucun risque concret ; les conditions formulées dans son préavis n’étaient que de simples prescriptions d’usage.

L’accès à la parcelle était suffisant. S’agissant des piétons, le projet prévoyait la réalisation d’un nouveau cheminement à travers les parcelles nos 3______, 1______ et 2______, lequel avait fait l’objet de deux promesses de constitution de servitudes par actes du 16 juin 2022, de manière à assurer le maintien d’un passage privé et public en surface. L’accès piétons au projet par le chemin P______, et partant par la servitude de passage « le plus étendu » constituée en 1961, serait plus que limité, à plus forte raison que l’accès des véhicules s’effectuerait par une rampe située plus en amont. S’agissant des véhicules, la rampe avait fait l’objet d’une promesse de constitution d’une servitude de passage à pied et en voiture par la parcelle n° 2______ au bénéfice de celle n° 3______. L’OCT n’avait d’ailleurs pas émis la moindre réserve quant à un tel accès, son préavis favorable initial ayant ensuite été confirmé par deux fois. Quant aux véhicules de secours, le chemin P______ était assez large pour assurer leur passage. La conclusion du bureau T______ avait été partagée par la police du feu, qui n’avait pas émis la moindre réserve en lien avec la largeur de l’accès alors même qu’elle disposait de toutes les données nécessaires pour se déterminer. L’OCT n’avait pas davantage émis de réserves à cet égard. Au demeurant, les recourants ne disposaient d’aucun intérêt digne de protection à se plaindre de cet élément qui ne les concernaient en rien et leurs logements étaient desservis par ce même accès en cas d’urgence, de sorte que la question du passage d’un camion de pompiers sur le chemin P______ avait d’ores et déjà été examinée par les autorités et admis.

Le grief tiré de l’art. 14 LCI devait être rejeté. Le projet litigieux ayant recueilli des préavis favorables de l’ensemble des services consultés, il était ainsi conforme aux normes ordinaires applicables au régime de la zone et ne pouvait pas être source d’inconvénients graves. En outre, l’accessibilité du chemin P______ pour un camion de pompiers était donnée.

Alors qu’ils ne disposaient d’aucun intérêt digne de protection à s’en plaindre, les recourants contestaient le chemine piétons et le forage du réseau de sondes géothermiques. L’OCAN s’était montré d’emblée favorable à la réalisation du chemin piétonnier pour autant qu’il soit réalisé en matière perméable et qu’il soit grevé d’une servitude de passage public. Il avait veillé à ce que celui-ci soit réalisé dans une matière semi-perméable en surépaisseur - environ 30 cm - avec écroutage, sans décaissement ni intervention sur le système racinaire, de manière à préserver au mieux le domaine vital des arbres qu’il traversait. En tout état, les recourants ne sauraient substituer leur jugement personnel aux conclusions des spécialistes composant les instances consultées. Quant aux conséquences alléguées du forage des sondes géothermiques, le GESDEC n’avait identifié aucun risque concret et n’avait qu’émis de simples prescriptions d’usage. L’art. 11 al. 2 let. a LForêts n’était nullement violé.

La comptabilisation des CDPI était correcte. Les architectes avaient retravaillé le couvert à vélos et divers éléments de toiture de manière à intégrer des pergolas à lamelles, ainsi que cela ressortait du plan CDPI du 25 octobre 2022, afin que les surfaces recouvertes puissent être retranchées du calcul des CDPI, conformément à la directive relative aux CDPI du 3 février 2014, modifiée d’abord le 10 mars 2017 sous le numéro 024-v5, puis le 9 mars 2021 sous le numéro 024-v7 (ci-après : directive CDPI).

Aucune violation de la clause d’esthétique prévue à l’art. 15 LCI n’était réalisée. S’il était exact que des compléments avaient dû être fournis et le projet retravaillé, il avait recueilli un préavis favorable de la CA, de la CMNS, de l’OU et du SMS ainsi que de la commune. Dans cette mesure, les recourants ne sauraient substituer leur jugement à celui des professionnels consultés et il n’y avait pas lieu de remettre en question les préavis émis. L’ensemble des plans au dossier, notamment ceux de coupe, permettaient d’ores et déjà de se faire une idée relativement précise de l’esthétique des constructions projetées, sous réserve des teintes et matériaux, seule et usuelle réserve formulée par la CA. Par ailleurs, le grief tiré de la violation de la clause d’esthétique n’était pas motivé, a fortiori pas de manière « circonstanciée », et devait également être rejeté pour ce motif.

Un chargé de neuf pièces a été produit.

16.         Par observations du 23 juin 2022, déposées dans le délai prolongé accordé par le tribunal, le département a conclu au rejet du recours et à la confirmation de sa décision, s’en rapportant à justice s’agissant de sa recevabilité. Il a produit son dossier.

Le dossier contenait les éléments nécessaires, tels qu’ils ressortaient des écritures des parties et des pièces produites, à l’établissement des faits pertinents pour traiter les griefs soulevés et statuer sur le litige. Il n’y avait dès lors pas lieu de procéder à un transport sur place et aux auditions requises, actes d’instruction apparaissant superflus et contraires aux principes de célérité et d’économie de procédure. S’agissant de l’expertise demandée, le préavis du GESDEC démontrait que cette problématique avait été analysée et qu’aucun risque concret en lien avec des remontées de gaz ou encore la venue d’eau artésienne n’avait été décelé ; il n’avait exposé que la tenue à adopter et les éventuelles conséquences si une telle situation, devait par hypothèse, se présenter. Les recourants ne démontraient pas l’existence d’un risque concret à ce sujet qui nécessiterait l’avis d’un expert.

Alors que l’ensemble des instances compétentes quant à l’examen de l’adéquation de l’accès s’était montrés favorables au projet, les recourants prétendaient que l’accès prévu à la parcelle serait insuffisant. En se fondant sur une jurisprudence récente, ils soutenaient que le passage des futurs habitants représenterait une aggravation notable de la servitude. La situation d’espèce était toutefois tout autre que celle ayant mené le Tribunal fédéral à annuler l’autorisation de construire dans l’arrêt invoqué, lequel ne saurait trouver application. S’agissant de l’accès pompier, non destiné à être utilisé de manière quotidienne, les recourants n’avaient aucun intérêt digne de protection à contester son adéquation qui avait subi divers examens pour déterminer sa conformité. L’accès des véhicules aux places de stationnement s’effectuerait en passant par le parking souterrain, lequel était prévu dans la même autorisation de construire. Partant, les craintes que ce parking ne soit pas réalisé n’avaient pas lieu d’être.

Le projet ne contrevenait pas à l’art. 14 LCI. Outre le fait que la recevabilité de ce grief était douteuse puisque les recourants ne disposaient pas, en tant que voisins, d’intérêts propres à invoquer l’inadéquation de l’accès pour les services de secours et les futurs habitants, le chemin en question présentait une largeur suffisante pour le passage concomitant du peu de voitures du voisinage et des quelques piétons futurs habitants du projet. Les recourants ne démontraient pas le contraire.

La LForêts n’était pas violée. Le cheminement piétons était certes prévu à l’intérieur de la zone de protection de la forêt, mais la dérogation prévue avait été accordée suite aux préavis favorables des instances compétentes ayant jugé que la dérogation à la distance légale à la forêt n’entraînait aucune atteinte à la valeur biologique de la lisière, ni aux intérêts de la conservation de la forêt ; les recourants ne démontraient pas le contraire. De par l’enclavement de la parcelle, la création d’un accès pour les piétons et les services du feu était indispensable et ne pouvait être implanté différemment au vu du réseau existant et de la configuration des lieux. Un tel aménagement entrait dans le champ de la dérogation appliquée et était imposé à cet emplacement pour pouvoir accéder aux logements créés et servir au passage des tiers au vu de la servitude de passage public devant être créée. De surcroît, ledit cheminement, de par son emprise, sa future matérialité et son utilisation, n’aurait qu’un impact minime sur la forêt. Par ailleurs, il existait un intérêt public important à la création de logements, vu la pénurie sévissant dans le canton de Genève. Les forages géothermiques interviendraient en dehors de la distance à la forêt. Il était incorrect de soutenir que le GESDEC avait relevé un risque en lien avec les sondes géothermiques. Par ailleurs, si celles-ci devaient être déplacées, rien n’indiquait qu’elles devraient l’être dans le périmètre de protection des arbres.

La surface totale des CDPI avait été minutieusement examinée par la DAC qui s’était assurée du respect de l’art. 3 al. 3 RCI. Le projet avait été retravaillé sur ce point, notamment quant au couvert à vélos dont la couverture avait été partiellement modifiée afin d’y intégrer une pergola non couverte, raison pour laquelle la surface des CDPI avait diminué. Quant aux surfaces en toiture, il ne s’agissait pas d’une couverture, mais de lamelles ouvertes. Certaines surfaces considérées comme des CDPI dans le calcul du dossier auraient pu ne pas l’être, car situées à plus de 4,50 m de hauteur (celles du R+2) ou se superposaient avec d’autres CDPI déjà prises en compte. Le total de 100 m2 de CDPI était donc respecté.

Les plans produits s’avéraient parfaitement clairs pour traiter la demande ; aucune requête de compléments relative aux plans communiqués n’avait d’ailleurs été exprimée concernant la version autorisée. Si la CA avait demandé des précisions et modifications dans un premier temps, son dernier préavis était favorable au projet. Les autres instances ayant également rendus des préavis favorables sans relever d’élément qui nuirait à l’esthétique du quartier, il n’avait pas erré en délivrant l’autorisation de construire litigieuse. S’agissant des teintes et matériaux, il était usuel que ces éléments soient demandés uniquement à l’ouverture de chantier. S’il était compréhensible que des tiers devaient pouvoir se représenter la construction sous l’angle de son gabarit ou encore de son architecture au regard de l’impact que cela pouvait avoir pour eux, on ne percevait pas en quoi des voisins pourraient se déterminer sur la teinte ou encore les matériaux choisis pour une construction.

La recevabilité du grief relative à la cession de droits à bâtir était douteuse, seule la commune ayant réellement un intérêt à s’opposer à l’engagement en question. Or, non seulement elle avait préavisé favorablement le projet, mais elle n’avait pas recouru contre l’autorisation de construire.

17.         Par réplique du 1er septembre 2023, les recourants ont entièrement persisté dans leurs conclusions, ajoutant conclure également à ce que la décision entreprise soit déclarée nulle.

La commune était requérante à l’autorisation querellée en sa qualité de propriétaire des parcelles nos 1______ et 2______ - la signature de M. S______ figurait d’ailleurs au registre des signatures - même si le département semblait avoir instruit le dossier sans considérer que tel était le cas. Au vu du formulaire d’autorisation de construire du ______ 2022, la requérante voire l’architecte avait vraisemblablement agi au nom et pour le compte de la commune dans ce cadre. Cela était toutefois impossible vu qu’il n’existait aucune délibération communale traitant de ces questions lui permettant d’être valablement représentée. Seules les questions de la cession des droits et de la création des servitudes avaient fait l’objet d’une délibération, ce que la commune ne contestait pas. La requête n’émanait pas et n’avait pas l’assentiment préalable et sans équivoque du propriétaire de la parcelle n° 2______.

Les mesures d’instruction requises étaient nécessaires. Il convenait d’entendre l’OCT sur la question des places situées dans le parking souterrain ; ses trois préavis ne permettaient pas de savoir si son examen avait porté sur le parking public ou uniquement sur le parking privé. Selon les plans, le parking public accueillerait les places visiteurs des logements, ce qui était inusuel, et ne prévoyait pas de places pour les véhicules à mobilité réduite. Aucun ascenseur n’était prévu. Quant à la CA, elle devrait se prononcer sur la rampe qui n’avait aucunement été modifiée alors que cela avait été demandé dans le préavis du 7 mars 2022.

L’accès à la parcelle n’était pas garanti au jour de la délivrance de l’autorisation de construire puisque la servitude de passage dépendait de la construction d’un parking public. Les promesses de constitution de servitude étaient soumises à des conditions exposées dans l’acte notarié et l’accès ne serait garanti qu’en cas de construction du parking. Or, la condition pour construire un tel parking ne serait remplie qu’une fois que le Conseil municipal aurait délibéré, voire si les communiers y consentaient. Cela était impossible à garantir puisque la commune n’avait pas voté le parking ni son budget et puisque les habitants n’avaient pas pris part au vote communal qui serait manifestement sollicité, le projet étant contesté par de nombreux communiers.

Un chargé de quatre pièces complémentaires accompagnait ces écritures.

18.         Par duplique du 4 octobre 2023, la commune a persisté dans ses développements et conclusions.

Conformément à l’art. 30 al. 1 let. m de la loi sur l’administration des communes du 13 avril 1984 (LAC - B 6 05), le projet de construction en cause devait être soumis à délibération du Conseil municipal. C’était toutefois la réalisation dudit projet qui était visée par cette disposition, et non pas le dépôt de la demande d’autorisation de construire. Il n’y aurait aucun intérêt pour le Conseil municipal d’approuver un projet de construction susceptible de subir des changements lors de l’instruction menée par le département. Dans sa pratique, le Conseil municipal ne validait un crédit de construction et ne votait un projet de construction y relatif que lorsqu’il était précédé d’une autorisation de construire en force que le requérant était certain de pouvoir exécuter. La délibération du ______ 2022 confirmait cette pratique, stipulant « que si un tel parking souterrain devait être concrétisé, un projet de délibération devrait être soumis en temps utile au Conseil municipal ». Un représentant de la commune pourrait être auditionné pour attester de cette approche. E


n toute hypothèse, la délibération du ______ 2022 faisait expressément référence au dépôt de la demande d’autorisation de construire DD 7______, de sorte que le conseil municipal avait consenti au principe du dépôt d’une demande d’autorisation de construire concernant le parking souterrain et à l’image directrice du projet dans sa globalité.

L’assertion selon laquelle une demande pour démolir les courts de tennis situés au-dessus du parking public aurait dû être requise au motif que cette surface serait utilisée pour le chantier était erronée. L’emprise du parking ne s’étendait pas aux courts de tennis et la construction interviendrait en sous-sol. Même si cette surface servirait de zone de stockage lors du chantier, les courts de tennis ne seraient pas supprimés. L’argumentation formulée au sujet de la prétendue violation de l’exigence d’équipement était vaine car les recourants confondaient la problématique de la construction du parking souterrain avec celle de la voie d’accès à la parcelle n° 3______. Or, s’agissant de cette dernière, le fondement juridique existait puisqu’une promesse de constitution de servitude de passage avait été signée le 16 juin 2022 et qu’elle était indépendante de la réalisation ou non de la partie publique du parking souterrain. Si la construction de la partie publique du parking devait être impossible, une demande complémentaire d’autorisation de construire portant sur le même projet, mais en supprimant la partie publique du parking souterrain, devrait être déposée. L’accès au projet de construction litigieux était donc juridiquement garanti.

19.         Par duplique du 4 octobre 2023, le département a persisté dans ses développements et conclusions.

La requête d’autorisation de construire avait été signée par M. S______, l’un des représentants de la commune à teneur de l’art. 50 LAC. Il n’avait pas à remettre en question cette signature et avait donc, à raison, instruit la demande. Une éventuelle violation des règles relatives à l’engagement de la commune n’était, en tout état, ni de la compétence du département, ni du ressort du tribunal.

Les instances de préavis se déterminaient sur l’ensemble du projet. Dès lors, au vu des plans et de l’objet de la requête qui mentionnait clairement les deux types de parking, l’OCT s’était montré favorable au projet dans sa globalité ; les recourants ne démontraient pas le contraire.

S’il devait, par impossible, être jugé que la construction du parking ne pourrait être réalisée sans délibération municipale, cela ne s’opposait pas à la délivrance d’une autorisation de construire, mais pourrait tout au plus bloquer sa mise en œuvre, ce qui ne représentait pas d’inconvénient pour les recourants.

20.         Par décision du ______ 2023, qui annulait et remplaçait la décision litigieuse du ______ 2023, publiée dans la FAO du même jour, le département a délivré l’autorisation de construire DD 7______.

Cette décision est en tout point identique à celle du ______ 2023, à part le fait qu’elle mentionne le projet de mutation parcellaire provisoire n° 9______ et qu’elle exige qu’une mention de restriction du droit de propriété, en lien avec le projet précité, soit inscrit au registre foncier.

21.         Le 7 décembre 2023, il en a informé le tribunal et les parties à la procédure.

22.         Le 11 décembre 2023, le tribunal a imparti aux parties un délai au 10 janvier 2024 pour qu’elles lui indiquent la suite qu’elles entendaient donner à la procédure.

23.         Le 8 janvier 2024, les recourants ont sollicité que le délai pour se prononcer soit prolongé jusqu’au 30 janvier 2024.

24.         Par acte du 19 janvier 2024, les recourants ont interjeté recours contre la décision du ______ 2023 auprès du tribunal. Leurs conclusions sont identiques à celles formulées dans leurs écritures des 16 mars et 1er septembre 2023. Ce recours a été ouvert sous le numéro de cause A/256/2024.

Dans la lettre accompagnant cet acte, les recourants ont indiqué au tribunal que ce recours étant tout point identique à celui du 14 mars 2023 (avec les ajouts de la réplique du 1er septembre 2023), ils n’avaient pas produit de nouveaux chargés, les pièces étant identiques à l’ensemble des pièces d’ores et déjà produites. Ils ont requis la jonction des deux causes.

25.         Le 30 janvier 2024, après avoir obtenu un délai supplémentaire pour se prononcer suite au courrier du 11 décembre 2023, les recourants ont informé le tribunal qu’ils n’entendaient pas retirer leur recours du 16 mars 2023 puisqu’il était nécessaire que le tribunal, formellement saisi, annule la décision prise en ______ 2023 en mettant les éventuels frais et dépens à la charge des intimés. Ils requéraient subsidiairement que les deux causes soient jointes pour une instruction parallèle.

26.         Le 15 février 2024, N______ a fait valoir que le recours du 19 janvier 2024 était irrecevable à la lumière de l’art. 67 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10) ; il appartenait aux recourants de continuer à invoquer leurs griefs contre l’autorisation de construire du ______ 2023 dans le cadre de la procédure A/1027/2023.

27.         Dans ses observations du 22 février 2024, par le biais de son conseil, N______ SA s’est déterminée sur le recours du 19 janvier 2024, concluant principalement à son irrecevabilité, subsidiairement à son rejet, le tout sous suite de frais et dépens. Préalablement, elle a requis le rejet des mesures d’instruction sollicités.

Le ______ 2023, le département avait procédé à une reconsidération d’office de sa décision du ______ 2023 et précisé que la nouvelle décision annulait et remplaçait la précédente. Dès lors que le projet litigieux était maintenu dans sa totalité, cette nouvelle décision, rendue par substitution, ne faisait pas entièrement droit aux conclusions des recourants en nullité, respectivement en annulation de l’autorisation de construire DD 7______. Cette décision n’était ainsi pas de nature à répondre à l’ensemble des griefs soulevés par les recourants dans le cadre de la procédure A/1027/2023. Le recours initial n’étant pas devenu sans objet, le tribunal devait continuer à le traiter, comme il en avait manifestement l’intention. À cela s’ajoutait que la division parcellaire projetée, intégrée à la nouvelle autorisation de construire et seule modification opérée entre la décision initiale et la nouvelle, n’était pas de nature à aggraver la situation des recourants, s’agissant d’une modification mineure sans conséquences sur leurs droits. Il leur appartenait donc de continuer à invoquer leurs griefs contre l’autorisation de construire du ______ 2023 dans le cadre de la procédure A/1027/2023, la voie du recours n’étant pas ouverte. Le nouveau recours formé le 19 janvier 2024 devait, partant, être déclaré irrecevable, sous suite de frais et dépens.

N______ SA a ensuite reproduit une réponse en tout point identique à celle déjà déposée dans le cadre de la procédure A/1027/2023 dans l’hypothèse où le tribunal jugerait, par impossible, que le recours du 19 janvier 2024 était recevable,

28.         Dans ses observations du 2 avril 2022, sous la plume de son conseil, la commune a indiqué avoir pris bonne note du fait que le recours du 16 mars 2024 était « en tout point identique au recours formé le 14 mars 2023 contre la DD 7______ » faisant l’objet de la cause A/1027/2023. Présumant que la présente cause et celle précitée seraient jointes, elle renvoyait le tribunal, par souci d’économie de procédure, à ses observations du 22 mai 2023 dans la cause A/1027/2023 qui valaient également comme observations dans la cause A/256/2024.

29.         Par observations du 3 avril 2024, le département a conclu au rejet du recours du 16 janvier 2024 et à la confirmation de sa décision, s’en rapportant à justice s’agissant de sa recevabilité.

Dans la mesure où les recourants se limitaient à reprendre les griefs tels qu’exposés dans le cadre de leur premier recours déposé à l’encontre de la décision du ______ 2023, il reprenait aussi les observations qu’il avait faites valoir dans le cadre de la procédure A/1027/2023.

30.         Le 31 mai 2024, faisant suite à une demande du tribunal, N______ SA a produit un calcul des surfaces CDPI concernant les parcelles, avec les plans schématiques desdites parcelles et par étages, précisant à cet égard que les surfaces couvertes aux niveaux R-1 et rez-de-chaussée avaient été comptabilisées comme CDPI dans le seul but de faciliter la lecture alors qu’il s’agissait de surfaces qui ne desservaient que des surfaces non rentables. Elle a aussi produit un photomontage du local à vélo.

Il résulte notamment de ces pièces que le local à vélo est constitué par des poteaux espacés les uns des autres, dont certains soutiennent un toit qui est constitué en partie par une surface couverte et l’autre par des lamelles. Sa représentation graphique est la suivante :

 

 

 

 

 

 


31.         Le même jour, faisant suite à la même demande du tribunal, le département a remis à ce dernier le calcul détaillé des CDPI du projet, étage par étage pour chaque future parcelle, et a relevé qu’il ne réalisait pas de photomontage ou d’illustration 3D des projets. S’agissant du local à vélo, conformément aux plans visés, seule une surface de 23,10 m2 était couverte et constituait une CDPI, le reste de l’emplacement vélos, constitué d’une pergola ajourée, n’étant pas couvert. Quant aux balcons, une déduction de 1,50 m avait été opérée et ceux situés à plus de 4,50 m de hauteur n’avaient pas été comptabilisés comme CDPI.

Pour la parcelle A, les CDPI du rez-de-chaussée étaient de 23,12 m2 pour le couvert à vélo et de 33,90 m2 pour le passage, et ceux des quatre balcons du R+1 totalisaient 14,86 m2, soit une surface totale de CDPI de 71,88 m2. Pour la parcelle B, les CDPI du R-1 étaient de 48,73 m2 pour le passage, ceux du rez-de-chaussée de 32,58 m2 pour le passage et de 11,61 m2 pour les trois balcons, et les CDPI du R+1 étaient de 3,87 m2, soit une surface totale de CDPI de 97,69 m2. Pour la parcelle C, les CDPI du R-1 étaient de 48,86 m2 pour le passage et de 13,26 m » pour les cinq balcons, soit une surface totale de CDPI de 62,12 m2. Il apparaissait ainsi que le total de CDPI pour chaque future parcelle respectait le maximum imposé par l’art. 3 al. 3 RCI.

 

 

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Selon l’art. 67 LPA, dès le dépôt du recours, le pouvoir de traiter l’affaire qui en est l’objet passe à l’autorité de recours (al. 1). Toutefois, l’autorité de première instance peut, en cours de procédure, reconsidérer ou retirer sa décision. En pareil cas, elle notifie, sans délai, sa nouvelle décision aux parties et en donne connaissance à l’autorité de recours (al. 2). L’autorité de recours continue à traiter le recours dans la mesure où la nouvelle décision ne l’a pas rendu sans objet (al. 3).

L’autorité de recours admettra que le recours est devenu sans objet lorsque la nouvelle décision crée un état de droit tel que l’intérêt juridique du recourant à ce qu’il soit statué sur le recours a disparu, ce qui arrive lorsque la nouvelle décision fait entièrement droit aux conclusions du recourant. Lors de cet examen, l’autorité de recours est ainsi liée par la nouvelle décision dans la mesure où elle correspond aux conclusions du recourant. Lorsque la nouvelle décision ne donne que partiellement gain de cause au recourant, le recours n’est privé de son objet que dans la même mesure. L’instruction se poursuit pour les points encore litigieux. Si la nouvelle décision aggrave la situation du recourant, elle ne remplace pas la première, mais est considérée comme constituant le chef de conclusions de l’autorité intimée (arrêt du Tribunal fédéral 1C_97/2022 du 23 janvier 2023 consid. 2.1.1 ; ATA/1369/2023 du 19 décembre 2023 consid. 3.1).

3.             À teneur de l’art. 70 al. 1 LPA, l’autorité peut, d’office ou sur requête, joindre en une même procédure des affaires qui se rapportent à une situation identique ou à une cause juridique commune.

4.             En l’espèce, la décision du ______ 2023 annulant et remplaçant la décision du ______ 2023 n’a pas fait entièrement droit aux conclusions des recourants. En effet, elle est identique à celle du ______ 2023, hormis le fait qu’elle mentionne en plus le projet de mutation parcellaire provisoire n° 9______ et exige qu’une mention de restriction du droit de propriété, en lien avec le projet précité, soit inscrit au registre foncier.

Partant, cette nouvelle décision du ______ 2023 n’a pas mis fin à la procédure A/1027/2023. L’instruction de cette procédure se poursuit, avec pour effet que les nouvelles écritures en lien avec la nouvelle décision en font organiquement partie. Les écritures du 19 janvier 2024 ne peuvent par conséquent pas être considérées, en soi, comme un recours à part entière dans la mesure où elles s’inscrivent dans ladite procédure. Il ne s’agit ainsi que d’un simple échange d’écritures dans la procédure A/1027/2023.

Cela étant, dans la mesure où une nouvelle procédure a été ouverte au tribunal suite à l’acte du 19 janvier 2024, sous la référence A/256/2024, il y a juridiquement lieu de joindre ces deux causes, étant noté que l’objet litigieux est identique dans les deux causes.

5.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours du 16 mars 2023 est recevable au sens des art. 62 à 65 LPA.

6.             Pour qu’un recours soit recevable, encore faut-il que son auteur ait la qualité pour recourir.

7.             La qualité pour recourir est reconnue à toute personne atteinte par la décision attaquée et qui dispose d’un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (art. 60 al. 1 let. b LPA).

Le recourant doit se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d’être prise en considération avec l’objet de la contestation et retirer un avantage pratique de l’annulation ou de la modification de la décision en cause, qui permette d’admettre qu’il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l’intérêt général, de manière à exclure l’action populaire. Cet intérêt digne de protection ne doit pas nécessairement être de nature juridique, un intérêt de fait étant suffisant (ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; 143 II 506 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_130/2023 du 1er mai 2023 consid. 3.2).

En matière de droit des constructions, le voisin direct de la construction ou de l’installation litigieuse a en principe la qualité pour recourir (ATF 139 II 499 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_164/2019 du 20 janvier 2021 consid. 1).

La distance entre bâtiments constitue ainsi un critère essentiel, la jurisprudence reconnaissant généralement la qualité pour agir lorsque l’opposant est situé, au maximum, à une centaine de mètres, du projet litigieux (ATF 140 II 214 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_130/2023 du 1er mai 2023 consid. 3.2). La proximité avec l’objet du litige ne suffit cependant pas à elle seule à conférer au voisin la qualité pour recourir contre la délivrance d’une autorisation de construire. Les tiers doivent en outre retirer un avantage pratique de l’annulation ou de la modification de la décision contestée, qui permette d’admettre qu’ils sont touchés dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l’intérêt général des autres habitants de la collectivité concernée (ATF 139 II 499 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_130/2023 du 1er mai 2023 consid. 3.2 ; ATA/17/2023 du 10 janvier 2023 consid. 11b).

8.             En l’espèce, les recourants sont domiciliés sur des parcelles proches de celle devant accueillir le projet litigieux, dans un rayon de moins de 50 m de celui-ci, à savoir à une distance pour laquelle la qualité pour recourir a été admise par la jurisprudence. Ils se prévalent de dispositions de droit public des constructions susceptibles d’avoir une incidence concrète sur leur situation de fait. La qualité pour recourir doit dès lors leur être reconnue.

9.             L’admission de la qualité pour recourir ne signifie pas encore que toutes les conclusions, respectivement griefs, formulés par un recourant sont recevables.

En effet, un recourant ne peut pas présenter n’importe quel grief ; il ne se prévaut d’un intérêt digne de protection, lorsqu’il invoque des dispositions édictées dans l’intérêt général ou dans l’intérêt de tiers, que si ces normes peuvent avoir une influence sur sa situation de fait ou de droit. Tel est souvent le cas lorsqu’il est certain ou très vraisemblable que l’installation ou la construction litigieuse sera à l’origine d’immissions - bruit, poussières, vibrations, lumière, fumée - atteignant spécialement les voisins. À défaut, il n’y a pas lieu d’entrer en matière sur le grief soulevé (ATA/85/2022 du 1er février 2022 consid. 5b). Ils doivent en outre se trouver dans le champ de protection des dispositions dont ils allèguent la violation et être touchés par les effets prétendument illicites de la construction ou de l’installation litigieuse (ATF 121 I 267 consid. 2 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 1P.282/2005 du 7 juillet 2005 consid. 1 ; 1P.292/2004 du 29 juillet 2004 consid. 1.3 ; ATA/801/2014 du 14 octobre 2014 consid. 6d).

L’application du droit d’office par les juridictions administratives ne saurait avoir un quelconque effet sur la question d’un refus d’examiner un grief. En effet, si la juridiction administrative arrive à la conclusion que l’administré ne dispose pas d’un avantage pratique par rapport au grief soulevé, les règles de procédure imposent à celle-ci de ne pas entrer en matière et de déclarer irrecevable le grief invoqué (ATA/17/2023 du 10 janvier 2023 consid. 11d ; ATA/881/2022 du 30 août 2022 consid. 3d).

Selon les principes généraux du droit, il n’appartient pas à l’administration de s’immiscer dans les conflits de droit privé pouvant s’élever entre un requérant et un opposant. La législation genevoise en matière de police des constructions ayant pour seul but d’assurer la conformité du projet présenté aux prescriptions en matière de constructions et non pour objet de veiller au respect des droits réels, un éventuel opposant à un projet autorisé doit défendre ses droits résultant de sa servitude destinée à limiter l’utilisation d’un bien-fonds servant dans le cadre d’une procédure civile (art. 3 al. 6 LCI ; arrêt du Tribunal fédéral 1C 471/2020 du 19 mai 2021 consid. 3.1.4 ; ATA/439/2021 du 20 avril 2021 consid. 8a ; ATA/307/2021 du 9 mars 2021 consid. 4a).

Les normes imposant au constructeur la création d’un nombre déterminé de places de stationnement n’ont pas vocation à protéger les propriétaires voisins, mais poursuivent uniquement un but d’intérêt public visant à assurer la libre circulation sur les voies publiques, la sécurité du trafic et la tranquillité des lieux (ATF 112 Ia 90 ; 107 Ia 72 consid. 2b ; arrêts du Tribunal fédéral 1P.282/2005 du 7 juillet 2005 consid. 1 ; 1P.292/2004 du 29 juillet 2004 consid. 1.3 ; ATA/801/2014 du 14 octobre 2014 consid. 6d). Il en va de même, a fortiori, des dispositions relatives à la répartition des places de stationnement à l’intérieur du périmètre faisant l’objet de l’autorisation de construire (arrêt du Tribunal fédéral 1P.292/2004 du 29 juillet 2004 consid. 1.3 ; ATA/801/2014 du 14 octobre 2014 consid. 6d). En matière de suppression de places de stationnement, le Tribunal fédéral a par ailleurs précisé qu’elle ne conférait la qualité pour recourir que lorsqu’elle rendait impossible ou entravait considérablement l’utilisation d’un bien-fonds (arrêt du Tribunal fédéral 2A.115/2007 du 14 août 2007).

La question de la recevabilité de certains des griefs soulevés sera examinée par la suite.

10.         Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire, l’égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_712/2020 du 21 juillet 2021 consid. 4.3 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

11.         Les arguments formulés par les parties à l’appui de leurs conclusions respectives seront repris et discutés dans la mesure utile (ATF 145 IV 99 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 1C_136/2021 du 13 janvier 2022 consid. 2.1 et les références citées), étant rappelé que, saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office et que s’il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, il n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/84/2022 du 1er février 2022 consid. 3).

12.         Préalablement, les recourants sollicitent un transport sur place, une expertise et leur audition ainsi que celle de diverses instances de préavis.

13.         Le droit d’être entendu garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend, classiquement, le droit, pour l’intéressé, de s’exprimer sur les éléments pertinents avant qu’une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d’avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 149 I 91 consid. 3.2 ; 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3).

Ce droit ne s’étend toutefois qu’aux éléments pertinents pour décider de l’issue du litige et le droit de faire administrer des preuves n’empêche pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_159/2020 du 5 octobre 2020 consid. 2.2.1).

En revanche, le droit d’être entendu ne confère pas celui de l’être oralement, ni celui d’obtenir l’audition de témoins (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_392/2022 du 26 octobre 2022 consid. 4.2 ; cf. aussi art. 41 in fine LPA). Dans la règle, l’audition d’un membre d’une instance spécialisée ne se justifie pas lorsque cette instance a émis un préavis versé à la procédure (ATA/1279/2023 du 28 novembre 2023 consid. 2.1 ; ATA/934/2019 du 21 mai 2019 consid. 2, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 1C_355/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.1 et 3.2).

Enfin, ce droit ne confère pas le droit à la tenue d’une inspection locale, en l’absence d’une disposition cantonale qui imposerait une telle mesure d’instruction, ce qui n’est pas le cas à Genève (ATF 120 Ib 224 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_243/2013 du 27 septembre 2013 consid. 3.2.1 ; ATA/285/2021 du 2 mars 2021 consid. 2b).

14.         En l’espèce, les plans et les documents versés au dossier ainsi que la consultation des données librement accessibles sur le SITG permettent de visualiser le projet litigieux, ses dimensions, le périmètre dans lequel il s’insère, les données relatives aux parcelles voisines, de celles destinées à accueillir le projet querellé et au chemin P______. Un transport sur place ayant pour objet les mêmes éléments, cette mesure d’instruction ne fournirait pas d’informations pertinentes supplémentaires.

S’agissant des demandes de comparution personnelle et d’audition de membres de diverses instances de préavis, le tribunal relève que les recourants ont eu l’occasion de s’exprimer par écrit, d’exposer leur point de vue et de produire toutes les pièces qu’ils estimaient utiles à l’appui de leurs allégués par le biais des écritures usuelles. Les préavis des instances dont l’audition est requise sont par ailleurs suffisamment explicites pour qu’il ne soit pas utiles d’entendre des membres de ces dernières. L’OCT s’est certes déterminé sur le parking sans préciser s’il visait toutes les places de stationnement ou uniquement une partie d’entre elles, soit celles « privées » ou celles « publiques ». Il apparaît évident que l’OCT, en se prononçant de manière générale, s’est déterminé sur l’ensemble du projet ; aucun élément ne laisse penser qu’il ait limité son examen à une seule partie du projet qui lui était soumis. Le tribunal ne conçoit d’ailleurs pas que l’OCT puisse s’imposer une telle limitation sans le mentionner spécifiquement dans son préavis. Enfin, la commune est partie au litige et les recourants ont dûment pu se déterminer sur les observations de cette dernière. Partant, il n’y a pas lieu de procéder à la comparution personnelle des parties ni à l’audition de membres des instances de préavis requises, de tels actes d’instruction n’étant au demeurant pas obligatoires. Par ailleurs, le fait qu’une dérogation au sens de l’art. 11 al. 1 let. a LForêts ait été octroyée relève du droit et aucune mesure d’instruction n’est dès lors utile sous cet angle.

Le fait que les teintes et matériaux ne doivent être exposés qu’à l’ouverture de chantier, outre d’être une requête usuelle, ne constitue pas une violation du droit d’être entendus des recourants, ce droit ne leur permettant en effet pas de s’exprimer sur tous les aspects d’un projet de construction, certains d’entre eux ne les impactant en rien. Tel est en particulier les cas des teintes ou encore des matériaux choisis pour une construction. De plus, il ne peut être considéré qu’ils sont privés de toute voie de droit à ce sujet, ainsi qu’ils le font valoir. En effet, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a jugé que le fait que le dossier ne comporte aucune précision sur le choix des matériaux ne constituait nullement une lacune d’instruction. Les aspects concrets de mise en œuvre des plans appartiennent en effet aux détails techniques qui sont réglés ultérieurement ; ils n’ont pas à figurer dans le dossier d’autorisation. Leur mise en œuvre est, cas échéant, soumise ultérieurement à l’approbation de certains services spécialisés, condition préalable à l’ouverture du chantier (ATA/37/2020 du 14 janvier 2020). Or, tel est précisément le cas en l’espèce, comme cela résulte du préavis précité de la CA.

Enfin, quant à l’expertise requise, force est de constater que la lecture du préavis du GESDEC du 7 mars 2022 laisse clairement comprendre que les conditions imposées ne sont pas spécifiques au présent cas et qu’il n’existe pas en l’espèce des risques identifiés s’agissant du forage des sondes géothermiques. Étant uniquement en présence d’exigences générales afférentes à des hypothèses théoriques non établies, il n’y a ainsi pas lieu d’ordonner une expertise.

Le dossier comporte ainsi tous les éléments pertinents et nécessaires à l’examen des griefs et arguments mis en avant par les parties, permettant au tribunal de se forger une opinion et de trancher le litige. Partant, dans la mesure où il n’existe pas un droit à leur accomplissement, il ne sera pas donné suite aux mesures d’instruction sollicitées qui ne peuvent apporter des éléments pertinents pour décider de l’issue du litige.

15.         Dans un premier grief, les recourants sont d’avis que la requête de l’autorisation de construire n’a pas été correctement signée par tous les propriétaires des parcelles en cause, la signature de la commune étant insuffisante pour considérer que celle-ci était valablement représentée.

16.         Conformément à l’art. 2 LCI, les demandes d’autorisation sont adressées au département (al. 1). Le règlement d’application détermine les pièces qui doivent être déposées par le demandeur et les indications que celui-ci doit fournir concernant les objets destinés à occuper le sous-sol de façon permanente (al. 2).

En application de l’art. 2 al. 2 LCI, le Conseil d’État a prévu, à l’art. 11 al. 4 RCI, que toutes les demandes d’autorisations de construire devaient être datées et signées par le propriétaire de l’immeuble intéressé, ainsi que par le requérant ou l’éventuel mandataire professionnellement qualifié.

Les demandes ne sont valablement déposées et, partant, l’autorité saisie, que si les prescriptions concernant les documents et pièces à joindre ont été respectées et si l’émolument d’enregistrement a été acquitté. Les dossiers incomplets sont retournés pour complément. Ils ne sont pas enregistrés (art. 13 al. 1 RCI).

17.         Selon la jurisprudence, une requête déposée en vue de la délivrance d’une autorisation de construire doit émaner, ou du moins avoir l’assentiment préalable et sans équivoque, du propriétaire de la parcelle concernée. Il ne s’agit pas d’une simple prescription de forme, car elle permet de s’assurer que les travaux prévus ne sont pas d’emblée exclus et que le propriétaire qui n’entend pas réaliser lui-même l’ouvrage y donne à tout le moins son assentiment de principe (arrêt du Tribunal fédéral 1C_7/2009 du 20 août 2009 consid. 5.2 ; ATA/1459/2019 du 1er octobre 2019 consid. 2 ; ATA/1157/2018 du 30 octobre 2018 consid. 5g ; ATA/321/2018 du 10 avril 2018 consid. 3b et l’arrêt cité). Ainsi, la signature du propriétaire du fonds a aussi comme but d’obtenir l’assurance que celui qui a la maîtrise juridique du fonds consent aux travaux et à tous les effets de droit public qui en découlent (arrêt du Tribunal fédéral 1C_846/2013 du 24 juin 2014 consid. 7.2 ; ATA/85/2022 du 1er février 2022 consid. 11 b).

Le Tribunal fédéral, qui a eu l’occasion d’examiner une exigence similaire du droit neuchâtelois, a retenu qu’une autorité tomberait dans le formalisme excessif si elle refusait de prendre en considération une autre pièce du dossier, qui révélerait sans ambiguïté, le cas échéant, l’accord de la seconde copropriétaire d’une parcelle, laquelle n’avait pas signé la demande d’autorisation (arrêt 1P.620/2002 du 27 mai 2003 consid. 5, cité in ATA/1529/2019 du 15 octobre 2019 consid. 3b). En outre, la procédure d’autorisation de construire a en principe pour seul but de déterminer si le projet de construction est conforme aux prescriptions de droit public. En revanche, la personne du demandeur de permis de construire, notamment son droit civil de construire, n’est pas au premier plan. Les autorités de la construction ne sont donc pas habilitées à suspendre le traitement des demandes de permis de construire simplement parce qu’elles ont des doutes sur le droit de construire du requérant. Elles peuvent toutefois refuser d’examiner des demandes de permis de construire lorsque le droit civil de construire du requérant fait manifestement défaut ou que le projet de construction viole manifestement les droits de propriété de tiers (arrêts du Tribunal fédéral 1C_455/2022 du 5 juin 2023 consid. 5.3 ; 1C_393/2021 du 20 mai 2022 consid. 2.5 ; 1C_13/2020 du 13 octobre 2020 consid. 3.1).

18.         L’on est en présence d’un formalisme excessif, prohibé par l’art. 29 al. 1 Cst., lorsque la stricte application des règles de procédure ne se justifie par aucun intérêt digne de protection, devient une fin en soi et complique de manière insoutenable l’application du droit matériel ou entraîne une sanction sévère et disproportionnée (ATF 149 IV 9 consid. 7.2 ; 149 III 12 consid. 3.3.1 ; ATA/561/2003 du 23 juillet 2003).

19.         Selon l’art. 50 al. 1 LAC, le conseil administratif ou le maire représente la commune envers les tiers.

20.         En l’espèce, la commune, propriétaire des parcelles nos 1______ et 2______, a donné son accord au projet litigieux en apposant une signature sur le registre des signatures, lequel comporte en effet la signature de M. S______, conseiller administratif, et le tampon humide officielle de la commune.

Les recourants font valoir que la seule signature de M. S______ n’était pas suffisante pour attester que l’autorisation de construire requise émanait ou avait du moins l’assentiment préalable et sans équivoque de la commune, ce que les parties intimées contestent, l’une relevant que M. S______ représentait la commune en vertu de l’art. 50 al. 1 LCA. À cet égard, le tribunal ne peut suivre le département lorsqu’il soutient que la problématique de la signature relève du droit privé et n’est ainsi pas de sa compétence. Une telle position, qui semble correspondre à celle existant dans certains cantons (p. ex. Berne, cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_172/2007 du 17 mars 2008 consid. 4), ne peut être suivie à Genève, eu égard à la jurisprudence susmentionnée.

En tout état, il n’est pas nécessaire de déterminer si M. S______ représentait valablement la commune lors du dépôt de la demande d’autorisation de construire. En effet, s’il fallait retenir qu’il ne pouvait pas valablement signer seul la requête, le fait d’annuler la décision querellée pour ce motif serait faire preuve d’un formalisme injustifiable dans la mesure où un tel vice n’aurait aucune incidence pratique puisqu’il ne fait pas le moindre doute que le projet en cause était approuvé par la commune, preuve en est le soutien de celle-ci à l’intimée. En outre, à supposer qu’il soit avéré, un tel vice a été réparé par la suite - opération qui est possible (cf. JTAPI/1043/2015 du 2 septembre 2015 qui se réfère à l’arrêt de la Cour de droit administratif et public du Tribunal du canton de Vaud AC.2007.0244 du 15 janvier 2009) - par le biais d’une acceptation ou ratification a posteriori du dépôt de la DD 7______. Cette acceptation résulte du soutien formel de la commune au projet contesté, preuve en est qu’elle est partie à la présente procédure en tant qu’intimée et qu’elle conclut au rejet du recours.

Mal fondé, ce grief doit être écarté.

21.         En second lieu, les recourants font valoir que la parcelle n° 3______ ne serait pas équipée, au sens des art. 19 al. 1 et 22 al. 2 let. b LAT, pour permettre la réalisation du projet litigieux. À leur sens, l’accès à cette parcelle est insuffisant tant pour les piétons, vu l’aggravation notable de la servitude de passage, les pompiers, vu la configuration du chemin P______, et les véhicules, vu l’incertitude de pouvoir effectivement construire le parking souterrain destiné à permettre leur accès.

22.         Selon l’art. 22 LAT, une autorisation de construire est délivrée notamment si le terrain est équipé (al. 2 let. b). Le droit fédéral et le droit cantonal peuvent poser d’autres conditions (al. 3).

L’art. 22 al. 2 let. b LAT vise un but de police (santé, transport, feu), raison pour laquelle ni l’autorisation ordinaire ni l’autorisation exceptionnelle ne peuvent dispenser de l’obligation d’équiper. Les installations d’équipement doivent en outre être dans chaque cas dimensionnées en fonction de l’usage auquel le bien-fonds est destiné (arrêt du Tribunal fédéral 1C_548/2021 du 24 février 2023 consid. 10.1.1 et les références citées).

23.         L’art. 19 al. 1 LAT précise qu’un terrain est réputé équipé lorsqu’il est desservi d’une manière adaptée à l’utilisation prévue notamment par des voies d’accès.

Très exceptionnellement, le respect du principe de proportionnalité peut exiger d’autoriser une construction dont l’équipement ne répond pas complètement aux exigences habituelles de l’art. 19 al. 1 LAT. Il s’agit en fait de déterminer si l’intérêt public à l’inexistence ou à l’impossibilité d’assurer un équipement « normal » justifie véritablement d’empêcher la construction d’une parcelle, ce qui peut constituer une atteinte significative à la garantie de la propriété (arrêt du Tribunal fédéral 1C_548/2021 du 24 février 2023 consid. 10.1.1 et les références citées). Par ailleurs, l’art. 19 LAT comporte des notions indéterminées devant s’interpréter en tenant compte du principe de la proportionnalité. Ainsi, même si les conditions des art. 19 et 22 LAT n’apparaissent pas réunies, le juge conserve un certain pouvoir d’appréciation et doit procéder à une pesée des intérêts en présence (arrêt du Tribunal fédéral 1C_548/2021 du 24 février 2023 consid. 10.1.2 et les références citées).

24.         Au sens de ces deux dispositions, une voie d’accès est adaptée à l’utilisation prévue lorsqu’elle est suffisante d’un point de vue technique et juridique pour accueillir tout le trafic de la zone qu’elle dessert. Il faut aussi que la sécurité des usagers soit garantie sur toute sa longueur, que le revêtement soit adéquat en fonction du type de véhicules qui vont l’emprunter, que la visibilité et les possibilités de croisement soient suffisantes et que l’accès des services de secours (ambulances, service du feu) et de voirie soit assuré (ATF 121 I 65 consid. 3a et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_471/2020 du 19 mai 2021 consid. 3.1 ; 1C_597/2020 du 9 octobre 2020 consid. 6.1 ; 1C_481/2018 du 20 mai 2020 consid. 7.1). Autrement dit, l’accès est de ce point de vue suffisant lorsqu’il présente des conditions de commodité et de sécurité tenant compte des besoins des constructions projetées.

25.         La loi n’impose toutefois pas des voies d’accès idéales ; celles-ci doivent être suffisantes ou adaptées. Pour les zones à bâtir, il s’agit en règle générale de routes et chemins desservant la zone à équiper, compte tenu des circonstances locales ; il faut et il suffit que, par sa construction et son aménagement, une voie de desserte soit praticable pour le trafic lié à l’utilisation du bien-fonds et n’expose pas ses usagers ni ceux des voies publiques auxquelles elle se raccorderait à des dangers excessifs (arrêts du Tribunal fédéral 1C_304/2022 du 10 août 2023 consid. 4.1 ; 1C_471/2020 du 19 mai 2021 consid. 3.1 ; 1C_597/2020 du 9 octobre 2020 consid. 6.1 ; cf. aussi ATA/1102/2020 du 3 novembre 2020 consid. 3a).

En particulier, l’aptitude d’une voie d’accès à assurer la desserte d’une parcelle n’exige pas que soient garanties des possibilités de croisement sur toute sa longueur ; il suffit que ces possibilités soient suffisantes pour assurer la sécurité des usagers (arrêts du Tribunal fédéral1C_304/2022 du 10 août 2023 consid. 6.1 ; 1C_225/2017 du 16 janvier 2018 consid. 4.2 ; ATA/1102/2020 du 3 novembre 2020 consid. 3c). L’accès est en principe considéré comme suffisant lorsqu’il présente des conditions de commodité et de sécurité (pente, visibilité, trafic) tenant compte des besoins des constructions projetées et cela même si, en raison de l’accroissement prévisible du trafic, la circulation devient moins aisée et exige des usagers une prudence accrue (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_243/2013 du 27 septembre 2013 consid. 5.1).

Le 9 octobre 2020, le Tribunal fédéral a confirmé un arrêt du Tribunal cantonal vaudois considérant un chemin d’une largeur de 3 m à 3,50 m, avec des murets de part et d’autre, comme suffisant. En l’occurrence, le projet de construction portait sur un immeuble de vingt-trois appartements, comprenant notamment la création d’un parking souterrain de dix-sept places pour voitures auxquelles s’ajoutaient cinq autres places. Sur le trajet jusqu’à l’accès au parking souterrain, soit une distance de 100 m, il existait, grâce aux surlargeurs prévues par le projet, trois possibilités de croisement pour deux voitures de tourisme, soit tous les 30 m environ (arrêt 1C_597/2019 du 9 octobre 2020, consid. 6 ; ATA/155/2019 du 9 octobre 2019).

Dans certaines circonstances, un long chemin étroit (moins de 3 m) présentant à certains endroits une largeur de 2,2 m est suffisant, notamment s’il ne sert qu’aux riverains (voie sans issue) et s’il existe, aux endroits présentant peu de visibilité, des possibilités d’évitement, au besoin sur des parcelles de riverains qui y consentent. L’aptitude d’une voie d’accès à assurer la desserte d’une parcelle n’exige cependant pas que soient garanties des possibilités de croisement sur toute sa longueur, notamment lorsque la visibilité permet à un conducteur attentif et respectueux des règles usuelles de circulation de constater la présence d’un autre véhicule suffisamment tôt pour s’arrêter à l’entrée du tronçon et le laisser passer, ce même s’il devait s’avérer finalement nécessaire de procéder à des marches arrière malcommodes compte tenu de la longueur du chemin (Eloi JEANNERAT, Commentaire pratique LAT: Planifier l’affectation, 2016, no 28 ad art. 19 LAT et les références citées).

26.         Les autorités communales et cantonales disposent en ce domaine d’un important pouvoir d’appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 1C_471/2020 du 19 mai 2021 consid. 3.1 ; 1C_242/2019 du 7 avril 2020 consid. 3.1 ; ATA/1102/2020 du 3 novembre 2020 consid. 3a et les arrêts cités).

27.         La réalisation de la voie d’accès est juridiquement garantie lorsque le terrain peut être raccordé à une route du domaine public ou à une route privée que les utilisateurs du bâtiment ont le droit d’emprunter (arrêt du Tribunal fédéral 1C_387/2014 du 20 juin 2016 consid. 7.1 et les références). Selon la jurisprudence, l’autorité compétente peut autoriser une construction sur un bien-fonds qui, sans être directement accessible depuis la voie publique l’est par le biais d’une servitude foncière au sens des art. 730 ss du Code civil suisse du 10 décembre 1907
(CC - RS 210), dans la mesure où cet accès est suffisant au regard de l’utilisation prévue. En cas de doute sur la capacité de l’accès prévu à répondre aux besoins de la future construction, l’autorisation de construire doit en principe être refusée, la condition de l’art. 22 al. 2 let. b LAT n’étant alors pas réalisée. S’il apparaît toutefois vraisemblable que la parcelle en cause dispose d’un accès suffisant en vertu du droit privé, il appartient aux recourants s’opposant au projet de démontrer que tel ne serait pas le cas (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_471/ 2020 du 19 mai 2021 consid. 3.1.3).

28.         Par ailleurs, la législation cantonale en matière de police des constructions a pour but d’assurer la conformité des projets présentés aux prescriptions en matière de constructions et d’aménagements, intérieurs et extérieurs, des bâtiments et des installations. Elle réserve expressément le droit des tiers. Selon les principes généraux du droit, il n’appartient donc pas à l’administration de s’immiscer dans les conflits de droit privé pouvant s’élever entre le requérant d’une autorisation de construire et un opposant, celle-ci n’ayant pas pour objet de veiller au respect des droits réels et notamment des servitudes (art. 3 al. 6 LCI ; cf. consid. 9 ci-dessus).

Cela étant, comme déjà susmentionné, à teneur de la jurisprudence concernant le lien entre le droit public des constructions et les servitudes de droit privé, un accès adapté au sens de l’art. 19 al. 1 LAT n’est pas garanti juridiquement lorsqu’une servitude de droit privé y fait obstacle. Ainsi, lorsque l’accès d’une parcelle non directement accessible depuis la voie publique est impossible en raison de l’absence d’une servitude de passage sur la parcelle voisine la séparant de ladite voie, l’accès au sens de l’art. 19 al. 1 LAT fait défaut (arrêt du Tribunal fédéral 1C_287/2021 du 25 juin 2022 consid. 4.3 ; 1C_341/2020 du 18 février 2022).

La procédure de recours prévue par l’art. 145 LCI n’a donc pas pour vocation de veiller au respect de droits réels, le contrôle du respect de ceux-ci - de même que l’examen de tout autre litige ressortissant au droit privé - restant dévolu aux tribunaux civils (cf. ATA/439/2021 du 20 avril 2021 consid. 8c ; ATA/307/2021 du 9 mars 2021 consid. 4).

29.         En février 2022, le Tribunal fédéral a considéré, dans une affaire où une servitude stipulait qu’elle ne profiterait qu’à la villa actuellement construite sur la parcelle et non à des constructions ultérieures, sauf si celle-ci était destinée à remplacer la villa actuelle, qu’il existait de sérieux doutes quant au fait que le projet d’habitats groupés de seize logements, caractérisés par deux immeubles de chacun trois niveaux et d’un parking souterrain de vingt-trois places de stationnement, puisse bénéficier de la servitude de passage concernée. Le droit de passage en question était expressément restreint à une utilisation en rapport avec la villa existante ou une construction destinée à remplacer la villa actuelle. Il apparaissait douteux que la construction de deux immeubles d’habitation puisse être considérée comme « remplacement » de la villa existante au sens de la clause précitée. La précision en question permettait d’inférer que la servitude était limitée au passage d’un certain nombre de véhicules et qu’elle serait insuffisante pour l’accès aux constructions projetées. Le projet entrepris paraissait provoquer une aggravation notable de la charge pour les fonds servants et il ne pouvait dès lors être retenu qu’un accès juridiquement garanti existait (arrêt 1C_341/2020 du 18 février 2022 consid. 3.2.2).

30.         Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n’ont qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l’autorité reste ainsi libre de s’en écarter pour des motifs pertinents et en raison d’un intérêt public supérieur. Toutefois, lorsqu’un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/448/2021 du 27 avril 2021 consid. 6a et les références citées).

Selon une jurisprudence bien établie, la juridiction de recours observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis, pour autant que l’autorité inférieure suive l’avis de celles-ci. Elle se limite à examiner si le département ne s’est pas écarté sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (arrêt du Tribunal fédéral 1C_891/2013 du 29 mars 2015 consid. 8.2 ; ATA/888/2023 du 22 août 2023 consid. 2.8).

31.         En l’espèce, il ne peut être retenu que l’usage accru par les piétons du chemin P______, soit la parcelle n° 5______, suite à la réalisation des vingt-deux logements litigieux serait tel qu’il constituerait une aggravation intolérable de la servitude de passage n° 6______, laquelle n’est pas de droit public puisque son acte constitutif ne prévoit nullement la création de servitudes au profit de l’État, contrairement aux principes posés par l’art. 12 RCI (cf. ATA/928/2021 du 7 septembre 2021 consid. 9). Le fait que le nombre de piétons augmentera en raison des futurs occupants des logements projetés n’implique en effet pas, compte tenu de la formulation de la servitude précitée qui octroie les droits de passage les plus étendus, une aggravation intolérable de cette servitude ni un notable accroissement de la charge pour le fonds servant. Il faut aussi noter que cette augmentation ne devrait pas être considérable, faute d’un arrêt de bus à proximité et donc de la probable utilisation de véhicules motorisés par les futurs habitants pour se déplacer. Le présent cas n’est de ce fait pas comparable avec la situation exposée à l’arrêt du Tribunal fédéral 1C_341/2020 où le droit de passage en question était expressément restreint à une utilisation en rapport avec la villa existante ou une construction destinée à la remplacer.

S’agissant des véhicules, ceux-ci accéderont à la parcelle par le biais du garage souterrain, lui-même accessible par une rampe partiellement couverte débouchant approximativement au niveau de l’intersection entre les chemins Q______ et P______, sur la parcelle n° 2______ propriété de la commune. Une promesse de constitution de servitudes de passage à pieds et à véhicules (hors-sol ainsi que rampe et sous-sol) grevant la parcelle n° 2______ au profit de celle n° 3______ a été signée à cet effet le 16 juin 2022 entre la requérante et la commune. Il sied de noter que les termes et conditions prévus par l’acte notarié du 16 juin 2022 relèvent du droit civil et ne sont pas pertinents en l’espèce. De plus, la construction dudit parking souterrain sur la parcelle n° 2______ est englobée dans la décision entreprise. Partant, l’accès des véhicules à la parcelle n° 3______ est garanti d’un point de vue juridique.

S’agissant du passage des pompiers, l’accès s’effectuera par le chemin P______, le même menant aux parcelles des recourants qui ont obtenu les autorisations de construire leur immeuble en été 2007. Ainsi, une décision entrée en force a retenu que ce chemin est apte au passage des pompiers et aucun élément ne permet de retenir que le chemin a subi depuis lors des modifications de son tracé ou que les pompiers emploient des engins plus imposants. Dans ces circonstances, il n’y a pas lieu de considérer qu’une solution contraire devrait être adoptée aujourd’hui. En tout état, les autorités compétentes et spécialisées pour se prononcer sur la question de l’accès à la parcelle par les pompiers, tant l’OCT que la police du feu, n’ont relevé aucun élément permettant de douter qu’il y aurait un problème à cet égard. Au contraire, ils ont délivré un préavis favorable dès le début de l’instruction, l’OCT le réitérant encore à deux reprises. A noter que le concept de sécurité incendie du 12 janvier 2022, qui aborde, au titre du plan de réduction des risques incendie et d’évacuation retenu, les aspects relatifs à l’accès pompiers, a été établi suite à un entretien du 16 décembre 2021 avec un membre de la police du feu, ce qui laisse déduire un examen rigoureux de la situation par cette instance. De plus, le plan de simulation du 17 mai 2022 de T______ soutient que le passage du plus long et large des véhicules pompiers, le camion avec grande échelle, est assuré tout le long du chemin P______. Face à ces éléments, les recourants ne démontrent pas en quoi le chemin P______ ne serait pas techniquement propre à garantir le passage des véhicules des services de secours.

Dans ces circonstances, en présence de préavis favorables, il ne peut pas être reproché au département d’avoir délivré l’autorisation de construire querellée. Le fait qu’il ait, en tenant compte de tous les intérêts en présence, procédé à une appréciation différente de celle des recourants - qui entendent avant tout opposer leur propre appréciation à celle du département - ne permet pas de retenir que celui-ci se serait fondé sur des critères et considérations dénués de pertinence et étrangers au but visé par la règlementation en vigueur ; il a également dû tenir compte que l’édification de vingt-deux nouveaux appartements dans un canton où sévit une pénurie de logements revêt un caractère prépondérant. À ce sujet, le tribunal doit faire preuve de retenue et respecter la latitude de jugement conférée à l’autorité de décision, en particulier dans les domaines faisant appel à des connaissances techniques, et ne saurait en corriger le résultat en fonction d’une autre conception, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdit de faire.

En conclusion, force est donc de constater que du point de vue du droit public de la construction, le terrain sur lequel est envisagée la construction litigieuse est équipé au sens des art. 19 al. 1 et 22 al. 2 let. b LAT. Mal fondé, ce grief sera rejeté.

32.         En lien avec le précédent grief, les recourants reprochent aussi au projet de violer l’art. 14 al. 1 LCI au regard des conditions de sécurité et salubrité. Selon eux, la sécurité des futurs habitants du projet n’est pas assurée et l’accès d’un véhicule incendie et des pompiers est hautement compromis.

Ils font également valoir que l’inaccessibilité de la parcelle en cause lors des travaux engendrerait des nuisances inacceptables, en particulier le passage et le parking sauvage de véhicules de chantier.

33.         L’art. 14 LCI stipule que le département peut refuser une autorisation lorsqu’une construction ou une installation peut être la cause d’inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public (let. a), ne remplit pas les conditions de sécurité et de salubrité qu’exige son exploitation ou son utilisation (let. b), ne remplit pas des conditions de sécurité et de salubrité suffisantes à l’égard des voisins ou du public (let. c), offre des dangers particuliers (notamment incendie, émanations nocives ou explosions), si la surface de la parcelle sur laquelle elle est établie est insuffisante pour constituer une zone de protection (let. d) ou peut créer, par sa nature, sa situation ou le trafic que provoque sa destination ou son exploitation, un danger ou une gêne durable pour la circulation (let. e).

34.         Cette disposition appartient aux normes de protection qui sont destinées à sauvegarder les particularités de chaque zone, en prohibant les inconvénients incompatibles avec le caractère d’une zone déterminée (ATA/92/2003 du 25 février 2003 consid. 4b et les références citées). Elle n’a toutefois pas pour but d’empêcher toute construction dans une zone à bâtir, qui aurait des effets sur la situation ou le bien-être des voisins (ATA/448/2021 du 27 avril 2021 consid. 8a ; ATA/259/2020 du 3 mars 2020 consid. 7a). Ainsi, la construction d’un bâtiment conforme aux normes ordinaires applicables au régime de la zone ne peut en principe pas être source d’inconvénients graves, notamment s’il n’y a pas d’abus de la part du constructeur. Le problème doit être examiné par rapport aux caractéristiques du quartier ou des rues en cause (ATA/448/2021 du 27 avril 2021 consid. 8a ; ATA/285/2021 du 2 mars 2021 consid. 8b ; ATA/259/2020 du 3 mars 2020 consid. 7a ; ATA/758/2016 du 6 septembre 2016 ; ATA/699/2015 du 30 juin 2015 ; ATA/86/2015 du 20 janvier 2015 ; ATA/801/2014 du 14 octobre 2014).

L’art. 14 LCI traite aussi des inconvénients afférents à la circulation, notamment en ce qui concerne le stationnement des véhicules ou la mise en danger des piétons, voire du public (ATF 118 Ia 112), étant relevé que l’accroissement du trafic routier ne crée pas une gêne durable au sens de cette disposition, s’il est raisonnable eu égard à la zone considérée (ATA/285/2021 du 2 mars 2021 consid. 8c ; ATA/259/2020 du 3 mars 2020 consid. 7a).

La notion d’inconvénients graves est une norme juridique indéterminée, qui doit s’examiner en fonction de la nature de l’activité en cause et qui laisse à l’autorité une liberté d’appréciation. Celle-ci n’est limitée que par l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation. Le pouvoir d’examen du tribunal s’exerce dans les limites précitées, sous réserve du respect du principe de proportionnalité en cas de refus malgré un préavis favorable et de l’intérêt public en cas d’octroi d’une autorisation (cf. not. ATA/811/2021 du 10 août 2021 consid. 6 ; ATA/448/2021 du 27 avril 2021 consid. 8a ; ATA/165/2018 du 20 février 2018 consid. 4b).

Enfin, l’art. 14 LCI vise les nuisances issues ou induites par la construction ou l’installation projetée elle-même et non celles provoquées par les modalités de sa réalisation. Ainsi, le Tribunal fédéral a jugé qu’il n’était pas arbitraire de considérer que les inconvénients causés par un chantier de construction, notamment la circulation temporairement accrue qui en résultait, ne constituaient pas des inconvénients graves au sens de cette disposition, même si, suivant les circonstances, ils pouvaient être plus ou moins sensibles pour les voisins (arrêt 1P.530/2002 du 3 février 2002 confirmant l’ATA/447/2002 du 27 août 2002 ; cf. aussi ATA/1220/2020 du 1er décembre 2020 consid. 7a et les arrêts cités ; ATA/399/2020 du 23 avril 2020 consid. 7d ; ATA/505/2014 du 1er juillet 2014 consid. 6a ; ATA/521/2010 du 3 août 2010 consid. 5d ; ATA/448/2010 du 29 juin 2010 consid. 6d).

35.         Dans une affaire qui concernait la construction de cinq bâtiments de quatre étages sur rez, et de cent quatre-vingt-sept places de parking en sous-sol le long d’une rue déjà congestionnée par le trafic existant, l’ancien Tribunal administratif s’est fondé sur les préavis favorables de l’OCT et du SABRA, pour admettre que l’augmenta-tion du trafic due aux futures constructions ne pouvait faire obstacle à ces dernières (ATA/200/2008 du 29 avril 2008 ; voir aussi ATA/619/2007 du 4 décembre 2007).

36.         En l’espèce, l’accès en véhicules motorisés aux bâtiments projetés se fera pour l’essentiel par le biais du parking souterrain, dont la rampe d’accès se situera au tout début du chemin P______. Aucun élément concret ne permet dès lors de retenir que la circulation sur ledit chemin connaîtrait une augmentation importante d’engins motorisés et que le projet créerait une surcharge du trafic automobile motorisé et/ou un danger pour les usagers du chemin en cause ; l’allégation contraire n’étant pas étayée et ne reposant que sur des conjectures. La présence de quelques véhicules automobiles supplémentaires sur le chemin ne peut créer une situation à ce point plus dangereuse que celle actuelle qu’il faille admettre une forte dégradation en terme de sécurité routière justifiant l’annulation de l’autorisation querellée.

Il en va évidemment de même en ce qui concerne une augmentation du nombre de cyclistes, de motocyclistes ou de piétons. D’une part, un nombre plus important de piétons n’aura pas d’effet sur la sécurité des recourants en tant qu’usagers du chemin P______ ni s’ils l’empruntent à pied, ni a fortiori s’ils y circulent en voiture. D’autre part, le projet autorisé étant conforme aux normes ordinaires applicables au régime de la zone dans laquelle il s’inscrit, le trafic supplémentaire engendré par la présence de nouveaux habitants dans le quartier ne peut en principe être considéré comme un « inconvénient grave », étant à nouveau rappelé que l’accès à la parcelle par véhicules interviendrait en amont. Certes, il faut admettre que la construction des logements projetés aura forcément quelques effets sur la circulation motorisées sur le chemin P______, puisque tous les véhicules ne transiteront pas par le parking souterrain, mais rien n’indique concrètement que les véhicules de livraison et des habitants, voire ceux des pompiers, constitueraient une source d’importantes nuisances et induirait un trafic additionnel incompatible avec les caractéristiques du chemin, ce d’autant que l’OCT, instance spécialisée en matière de mobilité et de sécurité routière, qui a examiné le projet à trois reprises, n’a émis aucune observation à ce sujet, ne mettant en exergue aucune problématique d’ordre sécuritaire au sujet dudit chemin. Le tribunal observe par ailleurs que le chemin P______ fait déjà l’objet de mesures (limitation de vitesse, rétrécissements) visant à garantir la sécurité des usagers et la fluidité du trafic. En tout état, les recourants ne démontrent pas, de façon convaincante, que le projet querellé provoquerait un accroissement déraisonnable du trafic sur le chemin en cause.

Concernant les inconvénients causés par le futur chantier et le trafic qu’il induira, il ne peut être retenu, conformément à la jurisprudence précitée, qu’ils constitueront des inconvénients graves propres à refuser l’autorisation de construire en question. Aucun élément au dossier ne laisse d’ailleurs penser que tel sera le cas. En effet, le projet a été examiné en détail et de façon minutieuse par les instances de prévis compétentes, lesquelles s’y sont déclarés favorables sans émettre de remarques au sujet de potentielles nuisances. Au demeurant, les éventuels dommages causés aux propriétés des recourants par les engins de chantier, hormis le fait qu’il ne s’agisse que d’une simple hypothèse à ce stade, ne ressortent pas d’une problématique liée au droit des constructions mais au droit privé.

Enfin, il ne peut pas être retenu, à moins de leur faire un procès d’intention, que les ouvriers du chantier s’adonneraient au « parking sauvage ». En tout état, cette question excède le cadre du présent litige, étant souligné que les véhicules parqués sur la voie publique en un lieu interdit ou gênant la circulation de même que les véhicules parqués sans droit sur terrain privé - suite à une plainte pénale - peuvent être enlevés, saisis ou mis en fourrière (cf. art. 11 let. c et f de la loi d’application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05), le prononcé de telles mesures échappant naturellement à la compétence tant du département que du tribunal.

Partant, il faut retenir que la réalisation du projet ne générera pas d’inconvénients graves, au sens de l’art. 14 LCI, liés à la sécurité. Ce grief doit donc être écarté.

37.         En quatrième lieu, les recourants arguent que la décision entreprise contrevient à l’art. 11 al. 1 let. a LForêts en raison du tracé du chemin piétons, des canalisations et de l’emplacement des sondes géothermiques. Les intimés le contestent, notant au préalable que ce grief est irrecevable.

38.         À teneur de l’art. 11 LForêts, l’implantation de constructions à moins de 20 m de la lisière de la forêt, telle que constatée au sens de l’art. 4 de la présente loi, est interdite (al. 1). Le département peut accorder des dérogations pour des constructions ou installations d’intérêt général dont l’emplacement est imposé par leur destination (al. 2 let. a). Les demandes d’autorisation de construire sont soumises, pour préavis, à la commune concernée ainsi qu’à l’OCAN (al. 3). L’octroi de dérogations est subordonné aux intérêts de la conservation de la forêt et de sa gestion, au bien-être des habitants, ainsi qu’à la sécurité de ces derniers et des installations; ces dérogations peuvent être assorties de conditions relatives à l’entretien de la lisière et faire l’objet de compensations en faveur de la protection de la nature et du paysage (al. 4).

39.         En l’espèce, le projet prévoit que la canalisation et le cheminement piétons soient implantés à moins de 20 m de la lisière de la forêt et les sondes géothermiques à la limite de distance à cette lisière, même s’il semble résulter des plans du géomètre que les rayons desdites sondes radieraient sur le périmètre protégé. Une dérogation a toutefois été accordée par le département à cet égard dans la mesure où toutes les instances de préavis compétentes ont préavisé favorablement celle-ci.

Le grief formulé par les recourants au sujet de ladite dérogation est irrecevable dans la mesure où ils ne peuvent se prévaloir d’un quelconque intérêt digne de protection à son admission dans les circonstances particulières du cas d’espèce. En effet, ils n’expliquent ni ne démontrent en quoi l’admission de leur grief serait susceptible d’exercer une quelconque influence sur leur situation de fait ou de droit. L’objectif de la LForêts n’est pas de préserver leurs intérêts et l’emplacement du chemin piétonnier ou de la canalisation n’a aucun impact sur leur situation personnelle. Il en va de même pour les sondes géothermiques, étant souligné que les recourants se méprennent au sujet du préavis du GESDEC du 7 mars 2022 puisque cette instance de préavis n’a identifié aucun risque concret et n’a qu’émis de simples prescriptions d’usage. Les conditions imposées sont des exigences générales afférentes à des hypothèses théoriques qui ne sont toutefois non établies en l’espèce.

40.         Dans un cinquième grief, les recourants prétendent que la surface des CDPI serait excessive, dépassant la limite légale.

41.         La LCI ne donne aucune définition des CDPI. Ces dernières y sont toutefois mentionnées dans diverses dispositions, notamment à l’art. 3 al. 7 let. c LCI qui prévoit qu’elles peuvent être soumises à la procédure accélérée d’autorisation de construire ; à l’art. 43 LCI pour indiquer qu’elles peuvent être édifiée en limite de propriété ou à une distance inférieure à celle prévue pour les distances aux limites de propriétés, dans les conditions fixées par le règlement d’application (même principe à l’art. 68 pour la zone 5 et à l’art. 81 al. 2 LCI pour les zones industrielles, artisanales ou ferroviaires) ; dans la définition de constructions en ordre contigu : est réputée en ordre contigu, l’édification de deux maisons au moins, réunies par un mur mitoyen ou par une CDPI et disposant chacune de son propre accès de plain-pied (art. 58 al. 2 LCI) ; en zone 5, dans la disposition qui fixe les différents rapports de surfaces des constructions hors sol, la LCI prévoit que les CDPI ne sont pas prises en considération pour ce calcul (art. 59 al. 7 LCI) mais en principe dans celui du calcul du rapport des surfaces de sous-sol (art. 59 al. 8 LCI), le département pouvant toutefois admettre une surface de sous-sol non comprise dans le calcul du rapport des surfaces, si la construction de garages au sous-sol permet de renoncer à l’édification de CDPI à destination de garages en surface (art. 59 al. 9 LCI).

42.         La définition des CDPI se trouve dans le RCI. Aux termes de l’art. 3 al. 3 1ère phrase RCI, sont réputées CDPI, à la condition qu’elles ne servent ni à l’habitation, ni à l’exercice d’une activité commerciale, industrielle ou artisanale, les constructions dont la surface n’excède pas 50 m2 et qui s’inscrivent dans un gabarit limité par une ligne verticale dont la hauteur n’excède pas 2,50 m (let. a), une ligne oblique faisant avec l’horizontale partant du sommet de la ligne verticale un angle de 30° (let. b) et une ligne horizontale de faîtage située à 4,50 m du sol au maximum (let. c).

Dans tous les cas, la surface totale des CDPI ne doit pas excéder 8% de la surface de la parcelle et au maximum 100 m2 (3ème phrase) ; ces seuils constituent des conditions cumulatives (arrêt du Tribunal fédéral 1C_641/ 2012 du 30 avril 2013 consid. 3.3).

43.         D’après la jurisprudence, afin d’assurer l’application uniforme de certaines dispositions légales, l’administration peut expliciter l’interprétation qu’elle leur donne dans des directives. Celles-ci n’ont pas force de loi et ne lient ni les administrés, ni les tribunaux, ni même l’administration. Elles ne dispensent pas cette dernière de se prononcer à la lumière des circonstances du cas d’espèce (ATF 145 II 2 consid. 4.3). Par ailleurs, elles ne peuvent sortir du cadre fixé par la norme supérieure qu’elles sont censées concrétiser. En d’autres termes, à défaut de lacune, elles ne peuvent prévoir autre chose que ce qui découle de la législation ou de la jurisprudence (ATF 141 II 338 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_522/2012 du 28 décembre 2012 consid. 2.3 ; ATA/639/2020 du 30 juin 2020 consid. 8d).

44.         Les CDPI font l’objet de la directive CDPI, dont la dernière version comporte quelques ajouts issus de la jurisprudence mais ne change pas le contenu de la version antérieure, en particulier s’agissant de la prise en compte des avant-toits et des éléments en saillie du bâtiment principal (ATA/569/2024 du 7 mai 2024 consid. 5.3 ; ATA/791/2022 du 9 août 2022 consid. 4b). De jurisprudence constante, la chambre administrative se fonde sur cette directive pour déterminer les surfaces à prendre en compte à ce titre (ATA/569/2024 du 7 mai 2024 consid. 5.3).

La directive CDPI a pour but de préciser le type de construction considéré comme telles et la manière de calculer les surfaces et la hauteur ainsi que de prendre en compte les avant-toits ainsi que les éléments en saillies du bâtiment principal tels que les couvert, balcon, terrasse, surplomb d’étage. Sont réputées CDPI, selon cette directive, « les garages, ateliers non professionnels, couverts à voitures, couverts de plaisance, couverts à bois, abris ou cabanes de jardin, pool-house » (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_159/2020 du 5 octobre 2020 consid. 4.2).

Cette directive précise également que les constructions de très peu d’importance au sens de l’art. 1 al. 4 LCI ne sont pas à prendre en compte au titre de CDPI, ainsi que les jardins d’hiver au sens de l’art. 59 al. 3 LCI et les pergolas (p. 1). S’agissant de ce dernier objet, une note de bas de page précise (p. 5) qu’une pergola est « une construction légère dans un jardin, servant de support à des plantes grimpantes ». Cette mention est accompagnée de deux photographies d’installations comprenant des lamelles orientables, avec la précision que ce type de constructions est considéré comme une pergola et non comme un couvert.

La directive CDPI mentionne de plus que la hauteur maximum d’une CDPI ne peut en aucun point excéder 4,50 m et 2,50 m en limite de propriété. La hauteur se mesure entre le point le plus haut de la construction pris à l’aplomb du terrain naturel. Le niveau moyen du terrain naturel n’est donc pas le point de référence au sol. La hauteur se calcule construction finie (par exemple à la tuile faîtière).

45.         Dans sa teneur actuelle, en cas de projet de plusieurs villas sur une seule parcelle, la directive CDPI indique que la jurisprudence récente (ATA/805/2020 du 25 août 2020) précise clairement que, quel que soit le projet et la grandeur de la parcelle actuelle (celle formellement inscrite au registre foncier) la surface totale maximum des CDPI ne peut pas dépasser 100 m2. Il peut être tenu compte d’un projet de division parcellaire fourni dans le cadre de la requête, qui devra être suivi d’une condition à l’autorisation de formaliser la division avant l’ouverture de chantier et donc de garantir réellement d’avoir plusieurs parcelles au début des travaux. Par ailleurs, le respect du maximum de 8% de CDPI sur l’ensemble de la parcelle (cas échéant sur chaque future parcelle selon le projet de division) est lui aussi impératif.

Ces dernières précisions concernent les projets impliquant une future mutation parcellaire, laquelle fait l’objet d’un traitement distinct selon qu’elle est incorporée dans l’autorisation de construire (cas échéant en tant que condition suspensive ou résolutoire), ou qu’elle est simplement mentionnée dans le dossier d’autorisation, voire qu’elle apparaît durant la procédure contentieuse. Dans le premier cas, la future mutation parcellaire et ses conséquences peuvent être inclus dans l’examen judiciaire (ATA/805/2020 du 25 août 2020 consid. 13 a contrario), tandis que si elle ne fait pas formellement partie de l’autorisation de construire – et a fortiori si elle constitue une modification du projet opérée durant la procédure judiciaire -, elle est exorbitante à l’objet du litige et n’est alors pas prise en considération par l’autorité judiciaire (ATA/1104/2020 du 3 novembre 2020 consid. 4a; ATA/805/2020 du 25 août 2020 consid. 13; JTAPI/105/2021 du 3 février 2021 consid. 50).

46.         En outre, la directive n° 034-v1« mutation parcellaire en zone 5 : gestion des droits à bâtir » (ci-après: directive n° 034-v1) reprend ces éléments en indiquant que si une mutation/division parcellaire implique un report de droit à bâtir d’une parcelle sur laquelle plusieurs bâtiments (villas) sont projetées et autorisées, voire construits, dans ce cas, l’analyse de la conformité du projet par l’autorité doit être réalisée sur l’ensemble des constructions sises sur la parcelle au moment de l’autorisation.

47.         Dans le cadre de l’application de l’art. 3 al. 3 RCI, la jurisprudence a déjà été amenée à préciser que les surfaces déterminantes étaient celles de l’emprise au sol d’une construction (ATA/927/2021 du 7 septembre 2021 consid. 3b et les références citées). Un aménagement extérieur au sol, non couvert et sans émergence, ne constitue pas, à l’instar d’une pergola ou de surfaces aménagées au sol destinées au stationnement des véhicules, une CDPI (JTAPI/1383/2022 du 14 décembre 2022 consid. 33, repris par l’ATA/129/2023 du 7 février 2023 consid. 4f).

S’agissant des balcons/terrasses, elle a jugé que les surfaces des balcons/terrasses du premier étage - et du deuxième étage -, qui sont superposés à ceux du rez-de-chaussée, n’ont pas à être prises en compte dans la surface totale des CDPI, puisque leur emprise au sol recouvre celle des terrasses du rez-de-chaussée. Elle a en revanche pris en compte la surface des terrasses du rez-de-chaussée, dans la surface à prendre en compte à titre de CDPI (cf. ATA/791/2022 du 9 août 2022 consid. 4c ; ATA/927/2021 du 7 septembre 2021 consid. 3b ; ATA/1300/2019 du 27 août 2019 consid. 4e ; ATA/1304/2018 du 4 décembre 2018 consid. 9g).

48.         En l’espèce, les recourants estiment que des surfaces n’ont pas été prises en compte dans les calculs des CDPI, à savoir une partie des toitures et du local vélos.

Ainsi qu’il résulte tant de l’art. 3 al. 3 RCI que de la directive CDPI, ne sont pas réputées CDPI les constructions qui se situe à plus de 4,50 m du sol. Cela explique pourquoi le département n’a, à juste titre, pas pris en considération certains balcons dans le calcul des CDPI. A fortiori, les éléments de la toiture mis en cause par les recourants, qui se situent plus haut que les balcons précités et donc à plus de 4,50 m du sol, ne doivent pas être pris en considération dans le calcul des CDPI.

Autre est en revanche la question du local vélo, dont une partie est qualifiée de pergola ajourée par le département. Il ressort en effet du photomontage produit par N______ SA que cette construction ne s’aurait s’apparenter, même pour la partie couverte par des lamelles, au descriptif de la notion de « pergola » qui figure dans la directive CDPI, soit, pour rappel, une construction légère dans un jardin servant de support à des plantes grimpantes. Partant, c’est l’entier de la surface de ce local vélo qui doit être pris en compte en tant que CDPI, donc une surface de 49,40 m2 et non de 23,12 m2. Cela n’entraîne toutefois pas une violation des limites imposées par l’art. 3 al. 3 RCI, puisque la surface des CDPI de la parcelle A demeure inférieure à la limite des 100 m2, s’établissant à 98,16 m2.

Le grief sera ainsi écarté.

49.         Les recourants soutiennent également que la clause d’esthétique prévue à l’art. 15 LCI était violée.

50.         Selon l’art. 15 LCI, intitulé « Esthétique des constructions », le département peut interdire ou n’autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur nuirait au caractère ou à l’intérêt d’un quartier, d’une rue ou d’un chemin, d’un site naturel ou de points de vue accessibles au public (al. 1). La décision du département se fonde notamment sur le préavis de la CA ou, pour les objets qui sont de son ressort, sur celui de la CMNS. Elle tient compte également, le cas échéant, de ceux émis par la commune ou les services compétents du département (al. 2).

51.         En l’espèce, le tribunal considère que les différents plans figurant au dossier ne sont nullement trop sommaires, mais qu’ils permettent de comprendre et saisir les points nécessaires pour déterminer si le projet en cause répond aux exigences légales ; seul la question du local à vélo était problématique, mais elle a été résolue suite à la demande du tribunal auquel N______ SA a donné suite le 31 mai 2024. Les diverses instances de préavis consultées se dont d’ailleurs déterminées sans faire valoir que les plans produits les empêchaient, du fait de leur mauvaise qualité, d’effectuer leurs tâches correctement.

La CA, la CMNS, l’OU et le SMS, qui se sont prononcés en faveur de la dernière version du projet, se sont notamment penchés sur ses caractéristiques esthétiques et son insertion dans le quartier. À ce sujet, les recourants ne font pour leur part que de substituer leur propre appréciation de la situation à celle du département, elle-même fondée sur les préavis positifs des instances spécialisées, et ne démontrent pas en quoi leurs préavis seraient insoutenables ou encore fondés sur des considérations étrangères aux buts de protection de la loi.

S’agissant des teintes et matériaux, il est usuel que ces éléments ne soient demandés qu’à l’ouverture de chantier. S’il est compréhensible que des tiers doivent pouvoir se représenter la construction sous l’angle de son gabarit ou de son architecture au regard de l’impact que cela pourrait avoir pour eux, le tribunal ne perçoit pas en quoi des voisins pourraient se déterminer sur la teinte ou encore les matériaux choisis pour une construction. En tout état, les griefs relatifs au choix des teintes et des matériaux sont manifestement prématurés

Partant, ce grief sera également rejeté.

52.         Les recourants prétendent enfin que la cession de droits à bâtir de la part de la commune est invalide, faute d’avoir été effectuée conformément à l’art. 30 al. 1 let. k LAC.

53.         À teneur de la disposition susmentionnée, intitulée « Fonctions délibératives », le conseil municipal délibère sur les achats ou ventes d’immeubles, les échanges ou partages de biens communaux, l’exercice d’un droit de préemption, la constitution de servitudes ou d’autres droits réels ; toutefois, le conseil municipal peut, par délégation révocable en tout temps, charger le conseil administratif ou le maire de passer tous les actes authentiques concernant :

1      les cessions au domaine public des terrains et hors-ligne provenant des propriétés voisines,

2      les échanges et aliénations de parcelles nécessités par des corrections d’alignement,

3      les constitutions de servitudes et autres droits réels au profit de la commune ainsi que les radiations de charges grevant les immeubles de celle-ci,

4      les constitutions de servitudes et autres droits réels à la charge de la commune et au profit de l’État de Genève, d’une autre commune et des régies publiques cantonales,

5      les changements d’assiettes de voies publiques communales,

à condition que les opérations visées sous chiffres 1, 2, 3, 4 et 5 résultent de plans adoptés par les autorités compétentes et n’impliquent comme prestations, à la charge de la commune, que des dépenses prélevées sur les crédits budgétaires ou d’engagement.

Le conseil municipal délibère sur les projets de construction, de transformation ou de démolition d’immeubles communaux, d’ouverture ou de suppression de voies publiques communales, de travaux publics, à l’exception des changements d’assiettes visés à la let. k ch. 4 ci-dessus (art. 30 al. 1 let. m LAC).

54.         En l’espèce, le tribunal partage et fait donc sienne l’analyse de la commune, à savoir que l’art. 30 al. 1 let. m LAC vise la réalisation du projet de construction et non pas le dépôt de la demande d’autorisation de construire. Il n’y a aucun intérêt pour un Conseil municipal d’approuver un projet de construction susceptible de subir des changements lors de l’instruction menée par le département, de sorte qu’il est logique que ce dernier ne valide un crédit de construction et ne vote un projet de construction y relatif que lorsque ce dernier est précédé d’une autorisation de construire en force que le requérant est certain de pouvoir exécuter. La commune a d’ailleurs agi conformément à cette pratique, la délibération du ______ 2022, qui faisait expressément référence au dépôt de la demande d’autorisation de construire DD 7______, stipulant « que si un tel parking souterrain devait être concrétisé, un projet de délibération devrait être soumis en temps utile au Conseil municipal ». Dans ces circonstances, la procédure au sein de la commune a été respectée et les recourants ne peuvent se prévaloir d’un vice à cet égard.

Cela étant, le grief relatif à la cession de droits à bâtir n’est pas recevable, seule la commune ayant un intérêt à s’opposer à l’engagement en question, les recourants n’étant pas personnellement touchés par un tel engagement.

55.         Entièrement mal fondé, le recours du 16 mars 2023 sera rejeté.

56.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, pris conjointement et solidairement, qui succombent, sont condamnés au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 3’600.- ; lequel est partiellement couvert par les avances de frais versées dans le cadre des procédures A/1027/2023 et A/256/2024.

57.         Vu l’issue du litige, une indemnité de procédure de CHF 5’400.-, à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, sera allouée à la commune, pour moitié, et à N______ SA, pour moitié (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA)


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             ordonne la jonction des procédures A/1027/2023 et A/256/2024 sous le numéro de cause A/1027/2023 ;

2.             déclare recevable le recours interjeté le 16 mars 2023 par Mesdames et Messieurs A______, B______, C______, D______, E______, F______, G______ et H______, I______, J______ et K______ contre la décision du département du territoire du ______ 2023 ;

3.             le rejette ;

4.             met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 3’600.-, lequel est partiellement couvert par les avances de frais versées d’un montant total de CHF 1’800.- ;

5.             condamne les recourants, pris conjointement et solidairement, à verser une indemnité de procédure de CHF 5’400.- à la commune de M______ et à N______ SA, chacun pour moitié ;

6.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Gwénaëlle GATTONI, présidente, Loïc ANTONIOLI et Damien BLANC, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

Le greffier