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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3928/2017

ATA/1529/2019 du 15.10.2019 sur JTAPI/535/2018 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : CONSTRUCTION ET INSTALLATION;5E ZONE;PERMIS DE CONSTRUIRE;AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ET DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS;VILLA;POUVOIR D'APPRÉCIATION;EXCÈS ET ABUS DU POUVOIR D'APPRÉCIATION;VOISIN
Normes : LCI.14; LCI.59.al4
Parties : BERNARD Christian et autres, KOUZMINE Aleksandra, RADULESCU Adriana, BOLLER Marc, CARREL Carmen, BETTINI Jacqueline, BERSIER BEYELER Anne, BORCARD Guy, BORCARD Rosina / MIVELAZ Françoise et Promo T. & I. SA, PROMO T. & I. SA, DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC, BERNEY Karin et autres, VUITTON Pascal, GUILLET Aline
Résumé : Rejet d’un recours contre une autorisation de construire d'un bâtiment sous forme d’habitat groupé. Examen des griefs liés à la compatibilité de la dérogation à l’IUS du projet avec le caractère, l’harmonie et l’aménagement du quartier ainsi que celui lié à l’augmentation du trafic généré par la construction projetée.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3928/2017-LCI ATA/1529/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 15 octobre 2019

3ème section

 

dans la cause

Monsieur Christian BERNARD
Madame Aleksandra KOUZMINA
Madame Adriana RADULESCU
Monsieur Marc BOLLER
Madame Carmen CARREL
Madame Jacqueline BETTINI
Madame Anne BERSIER BEYELER
Madame Rosina et Monsieur Guy BORCARD
représentés par Me Luca Beffa, avocat

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC
et
Madame Françoise MIVELAZ
Promo T. & I. SA
représentées par Me Nicolas Wisard, avocat

____________

Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 juin 2018 (JTAPI/535/2018)


EN FAIT

1) Madame Françoise MIVELAZ est propriétaire de la parcelle no 3'366, feuille 22 de la commune de Chêne-Bourg, d'une surface de 1'312 m2, à l'adresse 29, chemin du Petit-Bel-Air ainsi que, pour 1/6ème, de la parcelle no 3'371, dépendance de quinze parcelles, constituant un chemin d'une surface de 457 m2. Ces parcelles sont sises en 5ème zone à bâtir.

2) Par requête du 21 février 2017 (DD 110'080) adressée au département devenu depuis lors celui du territoire (ci-après : le département), Promo T. & I. SA (ci-après : Promo) a sollicité l'autorisation définitive de construire un habitat groupé de cinq logements, comprenant trois niveaux hors-sol avec parking souterrain sur la parcelle no 3'366.

Le projet prévoyait une surface brute de plancher (ci-après : SBP) de 614,5 m2, soit une densité de 43,9 %, compte tenu de la surface de la parcelle n3'366 et du 1/6ème de la parcelle no 3'371.

3) Lors de l'instruction de la requête, tous les préavis recueillis étaient favorables au projet, avec ou sans observations et avec ou sans conditions.

Notamment, le préavis de la commune du 6 avril 2017 était sans observations mais précisait que l'architecte devait prendre contact avec le service technique pour coordonner les raccordements des canalisations.

La direction générale des transports (ci-après : DGT) a préavisé favorablement le projet le 8 juin 2017, sans observations, après avoir demandé préalablement le 3 avril 2017 que l'espace de croisement entre les véhicules entrant et sortant de la rampe de parking soit positionné différemment.

Le 13 juin 2017, la commission d'architecture (ci-après : CA) a rendu un préavis favorable à l'octroi d'une dérogation à la densité du projet de haute performance énergétique (ci-après : HPE), selon l'art. 59 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), après avoir demandé le 4 avril 2017 une réduction du nombre de places de parking et la suppression d'un « sas d'entrée ».

La direction générale de l'eau (ci-après : DGEau) a rendu le 20 juin 2017 un préavis sous conditions d'un raccordement à l'équipement approprié du système public d'assainissement des eaux de l'avenue de Bel-Air, par l'intermédiaire d'un futur équipement collectif privé en cours d'étude par les autorités de la commune. La requérante s'était engagée à participer financièrement à ces futures canalisations collectives privées et à verser une quote-part à définir ultérieurement mais d'un maximum de CHF 12'500.-. Une dérogation était accordée pour le branchement des eaux usées provenant de la future construction directement sur la canalisation appropriée du système public d'assainissement des eaux de l'avenue du
Petit-Bel-Air.

4) Par décision du 22 août 2017, le département a délivré à Promo l'autorisation de construire sollicitée. Dite autorisation a été publiée dans la feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève du même jour. L'autorisation mentionnait Mme MIVELAZ comme propriétaire de la parcelle concernée.

5) Par un seul acte du 21 septembre 2017, Monsieur Christian BERNARD, propriétaire de la parcelle no 3'497, sise 27, chemin du Petit-Bel-Air ; Madame Anne BERSIER BEYELER, propriétaire de la parcelle no 3'474, sise 23, chemin du Petit-Bel-Air ; Monsieur Marc BOLLER, propriétaire de la parcelle no 3'768, sise 31, chemin du Petit-Bel-Air ; Madame Rosina et Monsieur Guy BORCARD, propriétaires de la parcelle no 3'769, sise 35, chemin du Petit-Bel-Air ; Madame Adriana RADULESCU, propriétaire de la parcelle no 4'595, sise 11D, chemin du Petit-Bel-Air ; Madame Jacqueline BETTINI, propriétaire de la parcelle no 4'596, sise 11C, chemin du Petit-Bel-Air ; Madame Carmen CARREL, propriétaire de la parcelle no 4'597, sise 11B, chemin du Petit-Bel-Air ; Madame Aleksandra KUZMINA, propriétaire de la parcelle no 4'599, sise 11, chemin du Petit-Bel-Air (ci-après : M. BERNARD et consorts), ainsi que d'autres personnes, sous la plume de leur conseil commun, ont interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) en concluant principalement à l'annulation de l'autorisation de construire du 22 août 2017, à la production par Mme MIVELAZ de toute documentation contractuelle la liant à Promo ainsi qu'à l'architecte du projet, à la comparution personnelle des parties, à ce qu'un transport sur place soit ordonné ainsi qu'à l'audition de représentants de la CA, sous suite de frais et dépens.

Les parcelles nos 3'497, 3'768 et 3'769 étaient directement voisines et les parcelles nos 3'474, 4'594 et 4'599 étaient situées à moins de 100 m de la parcelle litigieuse, les dernières étant séparées uniquement par le chemin privé.

Ils faisaient valoir que la propriétaire de la parcelle litigieuse n'avait pas signé la requête en autorisation de construire, laquelle était signée par Monsieur David SMADJA, représentant de Promo et mentionné comme propriétaire.

Les autres copropriétaires du chemin n'avaient pas accepté le transfert des droits à bâtir au profit de la parcelle concernée ni donné leur accord quant à l'inscription d'une servitude. La parcelle no 3'371 (chemin) n'était mentionnée ni dans la requête, ni dans les préavis, ni dans la décision d'autorisation ou la publication.

L'art. 59 al. 4 LCI était violé pour plusieurs motifs et l'art. 14 al. 1 LCI également, en raison de l'augmentation du trafic et la création de vues plongeantes sur leurs parcelles qui portaient atteinte à leur droit de la personnalité.

Le projet de construction était conditionné à une obligation qui ne saurait être garantie à courte ou moyenne échéance et les recourants n'entendaient pas participer financièrement à des travaux pour le seul profit de la propriétaire.

6) Le 26 octobre 2017, Promo et Mme MIVELAZ ont sollicité le retrait de l'effet suspensif au recours, le rejet de celui-ci et la confirmation de l'autorisation de construire.

Une promesse de vente et d'achat avait été conclue le 24 novembre 2016 entre Mme MIVELAZ et Promo à teneur de laquelle la première vendrait à la seconde les parcelles concernées par le projet de construction. La promesse était subordonnée à l'obtention, d'ici au 24 novembre 2019, des autorisations de construire avec une densité de 44 %. Il était précisé que Mme MIVELAZ autorisait Promo à entreprendre toutes formalités en vue de la délivrance des autorisations définitives de démolir et de construire nécessaires au projet de construction.

7) Par décision du 16 novembre 2017, le TAPI a rejeté la requête de retrait de l'effet suspensif.

8) Par jugement du 6 juin 2018, rendu après un double échange d'écritures, le TAPI a refusé d'exécuter les mesures d'instruction sollicitées et a rejeté le recours.

Le but visé par l'exigence de signature du propriétaire de la requête en autorisation de construire était atteint dès lors que la demande bénéficiait du plein assentiment de Mme MIVELAZ et que le transfert des droits à bâtir du chemin avait été effectué en conformité avec les dispositions légales applicables.

Les autorités spécialisées avaient retenu que le projet était compatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier et la commune ne s'étaient pas opposées au projet, aucune violation de l'art. 59 al. 4 LCI ou 14 LCI ne pouvait être constatée.

L'accord de tous les propriétaires visés par le futur équipement collectif privé ne saurait être considéré comme nécessaire dans le cadre de la procédure litigieuse et l'autorisation de construire ne saurait être conditionnée par la réalisation d'un équipement actuellement à l'étude.

9) Par acte du 9 juillet 2018, M. BERNARD et consorts, sous la plume de leur mandataire, ont interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement du TAPI du 6 juin 2018, concluant principalement à son annulation ainsi qu'à celle de l'autorisation de construire du 22 août 2017. Préalablement, ils concluaient à la comparution des parties, à un transport sur place ainsi qu'à l'audition des représentants de la CA.

À l'appui de leur recours, ils invoquaient les mêmes griefs que ceux invoqués devant le TAPI, soit l'absence de validité de la demande d'autorisation en raison de l'absence de signature du propriétaire ; l'absence de validité du transfert des droits à bâtir ; le non-respect des conditions posées à l'art. 59 al. 4
let. a LCI ainsi qu'une violation de l'art. 14 LCI et l'absence de solution claire concernant l'obligation de rénovation des équipements collectifs privés.

10) Le 13 juillet 2018, le TAPI a transmis son dossier, renonçant à formuler des observations.

11) Le 9 août 2018, le département a répondu au recours, concluant à son rejet, répondant point par point aux griefs des recourants.

12) Le 13 août 2018, Mme MIVELAZ et Promo ont répondu au recours, concluant à son rejet. Préalablement, ils demandaient le retrait de l'effet suspensif.

Le recours reprenait les griefs déjà examinés par le TAPI et ne visait qu'à prolonger la procédure dans l'espoir de faire perdre le bénéfice de la promesse de vente et d'achat conclue.

Ils renvoyaient au développement faits par le TAPI et répondaient point par point aux griefs invoqués par les recourants.

13) Les 11 septembre 2018, le département s'en est rapporté à justice s'agissant de la demande de retrait de l'effet suspensif et le 13 septembre 2018, les recourants ont conclu au rejet de cette demande.

14) Par décision du 3 octobre 2018, la chambre administrative a rejeté la demande de retrait de l'effet suspensif.

15) Le 23 novembre 2018, les recourants ont répliqué, persistant dans les conclusions prises dans leur recours et dans l'argumentation déjà développée.

16) Le 11 décembre 2018, Mme MIVELAZ et Promo ont dupliqué, persistant dans leurs conclusions en rejet du recours.

Dans le cadre du projet de construction, l'office romand de certification Minergie avait délivré le 7 novembre 2018 un certificat Minergie provisoire, soit une pré-certification aux architectes mandatés. Ce certificat serait complété, selon la procédure Minergie, par un contrôle a posteriori de la mise en oeuvre dans le bâtiment.

17) Le 21 janvier 2019, les recourants ont déposé des observations.

Les documents déposés, concernant le standard Minergie, prouvaient que le département n'avait pas pu vérifier la conformité de la construction litigieuse à un standard de haute performance énergétique avant de délivrer l'autorisation de construire.

18) Le 23 janvier 2019, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Les recourants demandent plusieurs mesures d'instruction.

Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 135 I 279 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_585/2014 du 13 février 2015 consid. 4.1).

Le droit de faire administrer des preuves découlant du droit d'être entendu n'empêche pas l'autorité de mettre un terme à l'instruction, lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_635/2016 du 3 août 2017 consid. 4.2).

En l'espèce, le dossier comprend de nombreux plans des constructions envisagées, notamment ceux versés au dossier de l'autorisation de construire. Le TAPI et la chambre de céans ont procédé à un double échange d'écriture et les parties ont produit différents extraits cadastraux, photographies et photomontages. En outre, les éléments de faits que les recourants souhaitent établir par les mesures d'instruction demandées, tels que le gabarit, la densité et le style des constructions du quartier ainsi que l'impact de la construction sur leurs parcelles peuvent être établis à l'aide des pièces figurant au dossier ainsi qu'à l'aide du système d'information du territoire genevois (ci-après : SITG) qui permet d'avoir accès à toutes les informations nécessaires, y compris des photos aériennes du périmètre concerné.

Il ne sera dès lors pas donné suite aux demandes de complément d'instruction des recourants, la chambre administrative étant en possession d'un dossier complet, en état d'être jugé.

3) Les recourants requièrent l'annulation de l'autorisation litigieuse au motif que la demande d'autorisation n'était pas signée par la propriétaire de la parcelle concernée. La signature manuscrite ne saurait être substituée par un consentement donné sous une autre forme.

a. Selon l'art. 11 al. 4 du règlement d'application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI - L 5 05.01), toutes les demandes d'autorisation doivent être datées et signées par le propriétaire de l'immeuble intéressé, ainsi que par le requérant ou l'éventuel mandataire professionnellement qualifié, conformément à l'art. 2 al. 3 LCI (exigeant cette dernière signature pour les projets de construction ou d'installation qui ne sont pas d'importance secondaire).

b. Le Tribunal fédéral qui a eu l'occasion d'examiner une exigence similaire du droit neuchâtelois, a retenu qu'une autorité tomberait dans le formalisme excessif, incompatible avec l'art. 29 al. 1 Cst. si elle refusait de prendre en considération une autre pièce du dossier qui révélerait sans ambiguïté, le cas échéant, l'accord de la seconde copropriétaire d'une parcelle, laquelle n'avait pas signé la demande d'autorisation (arrêt du Tribunal fédéral 1P.620/2002 du 27 mai 2003 consid. 5).

En l'espèce, il n'est pas contesté par les recourants que la propriétaire de la parcelle, qui est d'ailleurs partie à la procédure, a donné son consentement au projet de construction. Cela ressort des pièces figurant au dossier ainsi que des écritures de la propriétaire.

En conséquence, le grief d'absence de signature sur la demande d'autorisation relève in casu du formalisme excessif et sera écarté.

4) Les recourants estiment que le transfert des droits à bâtir n'est pas autorisé sans l'accord de tous les copropriétaires du chemin.

a. En droit suisse, même sans disposition expresse, les droits à bâtir d'une parcelle peuvent être transférés à une autre parcelle en main du propriétaire, l'essentiel étant que la surface voisine mise à contribution pour le calcul de la surface constructible ne puisse plus servir ultérieurement à un tel calcul, ce qui implique pratiquement qu'elle soit grevée d'une servitude de non bâtir au profit de la collectivité (ATF 101 Ia 289).

b. Il est ainsi admis dans le cadre de l'application de l'art. 59 LCI que la surface d'un terrain dont le constructeur est copropriétaire et qui sert principalement de voie d'accès privée à ses propres biens-fonds puisse être prise en compte dans le calcul de l'indice d'utilisation d'un projet érigé sur une autre parcelle, selon la jurisprudence constante de la chambre de céans, confirmée par le Tribunal fédéral (arrêt du Tribunal fédéral 1P.72/2006 du 14 juillet 2006
consid. 3.3 ; ATA/1335/2019 du 3 septembre 2019 ; ATA/849/2005 du
13 décembre 2005).

En l'espèce, les recourants n'invoquent aucun argument permettant de remettre en cause cette jurisprudence, se contentant d'affirmer qu'il fallait l'accord de tous les copropriétaires pour le transfert de droits à bâtir. Or, dans le cadre du projet litigieux, seul le pourcentage afférent à la part de copropriété des recourants sur la parcelle servant de chemin d'accès a été pris en compte dans le calcul. Comme la jurisprudence le précise, ce transfert est autorisé, sans que l'accord des autres copropriétaires soit nécessaire, les droits à bâtir transférés en l'espèce étant ceux de l'intimée uniquement. Dès lors, l'argument des recourants tombe à faux.

En conséquence, le grief sera écarté, le report du pourcentage des droits à bâtir appartenant à l'intimée sur la parcelle en main de copropriétaires servant de chemin d'accès et celle sur laquelle est prévu le projet de construction ne prête par le flanc à critique du point de vue du droit public.

S'agissant d'une violation éventuelle des droits des copropriétaires pour laquelle la chambre de céans n'est pas compétente, s'agissant d'une question de droit privé, il sera relevé que le Tribunal fédéral a déjà jugé que l'opposition d'un copropriétaire ne saurait empêcher l'application faite de l'art. 59 LCI, selon l'interprétation donnée ci-dessus (arrêts du Tribunal fédéral 1P.72/2006 du
14 juillet 2006 consid. 3.3 ; 1A.105/2005 du 29 novembre 2005 consid. 5.3).

5) Les recourants invoquent une violation de l'art. 59 al. 4 let. a LCI dont les conditions ne seraient pas remplies pour deux raisons. Il n'était pas prouvé que le projet respectait le standard de HPE et le projet était incompatible avec le caractère du quartier, se distinguant nettement des constructions existantes.

a. En 5ème zone, la surface de la construction, exprimée en m2 de plancher, ne doit pas excéder 25 % de la surface de la parcelle. Cette surface peut être portée à 27,5 % lorsque la construction est conforme à un standard HPE, respectivement à 30 % si elle respecte le standard de très haute performance énergétique (ci-après : THPE ; art. 59 al. 1 LCI).

Lorsque les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, le département peut autoriser, après consultation de la commune et de la CA, un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d'habitat groupé dont la surface de plancher habitable n'excède pas 40 % de la surface du terrain, 44 % respectivement 48 % lorsque la construction est conforme à un standard de HPE ou de THPE (art. 59  al. 4 let. a LCI).

b. Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l'autorité reste ainsi libre de s'en écarter pour des motifs pertinents et en raison d'un intérêt public supérieur (ATA/1157/2018 du 30 octobre 2018 et les références citées). Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/873/2018 du 28 août 2018 et les références citées). Dans le système prévu par l'art. 59 al. 4 let. a LCI, tant le préavis de la commune que celui de la CA ont cette caractéristique (ATA/873/2018 précité).

Il n'en demeure pas moins que la délivrance de telles autorisations de construire demeure de la compétence exclusive du département, à qui il appartient de statuer en tenant compte de tous les intérêts en présence (ATA/1273/2017 du 12 septembre 2017 consid. 11c et les références citées).

c. Selon une jurisprudence bien établie, la chambre de céans observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis pour autant que l'autorité inférieure suive l'avis de
celles-ci. Les autorités de recours se limitent à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi. De même, s'agissant des jugements rendus par le TAPI, la chambre administrative exerce son pouvoir d'examen avec retenue car celui-ci se compose pour partie de personnes possédant des compétences techniques spécifiques (ATA/166/2018 consid. 7b du 20 février 2018 et les références citées).

d. Lorsque la loi autorise l'autorité administrative à déroger à l'une de ses dispositions, notamment en ce qui concerne les constructions admises dans une zone, elle confère à cette autorité un pouvoir d'appréciation qui n'est limité que par l'excès ou l'abus, la chambre de céans n'ayant pas compétence pour apprécier l'opportunité des décisions prises (art. 61 al. 2 LPA ; ATA/1426/2019 du
24 septembre 2019).

e. Comme le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de le préciser, la première condition imposée par l'art. 59 al. 4 let. a LCI, soit le caractère justifié des circonstances, relève de l'opportunité, que la chambre de céans ne peut pas contrôler, alors que la seconde relative à la compatibilité du projet pose des critères relatifs à l'esthétique et à l'aménagement du territoire conférant un large pouvoir d'appréciation à l'autorité qui doit s'exercer dans le cadre légal. Cette deuxième condition relève non pas de l'opportunité, mais de l'exercice d'un pouvoir d'appréciation, dont la chambre administrative est habilitée, selon l'art.  61 al. 1 let. a LPA, à sanctionner l'excès ou l'abus (ATA/1485/2017 du 14 novembre 2017 consid. 8a et les références citées).

f. L'autorité administrative jouit d'un large pouvoir d'appréciation dans l'octroi de dérogations. Cependant, celles-ci ne peuvent être accordées ni refusées d'une manière arbitraire. Tel est le cas lorsque la décision repose sur une appréciation insoutenable des circonstances et inconciliable avec les règles du droit et de l'équité et se fonde sur des éléments dépourvus de pertinence ou néglige des facteurs décisifs. Quant aux autorités de recours, elles doivent examiner avec retenue les décisions par lesquelles l'administration accorde ou refuse une dérogation. L'intervention des autorités de recours n'est admissible que dans les cas où le département s'est laissé guider par des considérations non fondées objectivement, étrangères au but prévu par la loi ou en contradiction avec elle. Les autorités de recours sont toutefois tenues de contrôler si une situation exceptionnelle justifie l'octroi de ladite dérogation, notamment si celle-ci répond aux buts généraux poursuivis par la loi, qu'elle est commandée par l'intérêt public ou d'autres intérêts privés prépondérants ou encore lorsqu'elle est exigée par le principe de l'égalité de traitement, sans être contraire à un intérêt public (ATA/514/2018 du 29 mai 2018 consid. 4b ; ATA/281/2016 du 5 avril 2016 consid. 7a ; ATA/451/2014 du 17 juin 2014 consid. 5c et les références citées).

6) S'agissant du standard HPE du projet, le grief des recourants tombe à faux. L'art. 33 al. 4 RCI prévoit qu'au moins trente jours avant l'ouverture d'un chantier ayant pour objet une nouvelle construction, un dossier énergétique complet, incluant le formulaire relatif à la performance énergétique et ses annexes, doit être remis au département pour validation.

Le respect du standard énergétique relève donc de l'examen de la conformité de la construction à l'autorisation de construire, soit à l'exécution de celle-ci dont la conformité échappe à la chambre de céans et appartient au département (ATA/636/2015 du 16 juin 2015 consid. 5).

7) S'agissant de la compatibilité de la dérogation de l'art. 59 al. 4 let. a avec « le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier », les recourants estiment, contrairement à la commune et à la CA qui ont préavisé favorablement le projet, que ce dernier se distinguerait des constructions existantes.

Ce faisant, les recourants n'apportent aucun élément de nature à remettre en cause ce qui précède, substituant uniquement leur appréciation à celle des instances de préavis et également à celle du TAPI.

Il sera cependant relevé que sur les parcelles nos 4'594 à 4'599, séparées de la parcelle litigieuse par le chemin d'accès privé, dont certaines sont propriété des recourants, est érigée une rangée de six constructions contiguës, à toits plats, autorisées en 2015, dont la densité est similaire à celle du projet litigieux (43,98 % selon le préavis de la CA à la DD 107'678/1 du 9 juillet 2015). Le grief tombe donc à faux comme celui concernant l'architecture du projet, aucune unité des constructions du quartier n'étant à juste titre invoquée par les recourants.

En conséquence, le grief sera écarté.

8) Les recourants invoquent également une violation de l'art. 14 al. 1 LCI, le trafic généré par les nouveaux habitants créant une gêne durable pour la circulation.

Le département peut refuser une autorisation de construire lorsqu'une construction ou une installation peut être la cause d'inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public (art. 14 al. 1 let. a LCI).

Cette disposition appartient aux normes de protection qui sont destinées à sauvegarder les particularités de chaque zone, en prohibant les inconvénients incompatibles avec le caractère d'une zone déterminée. Elle n'a toutefois pas pour but d'empêcher toute construction dans une zone à bâtir qui aurait des effets sur la situation ou le bien-être des voisins (ATA/1345/2015 du 15 décembre 2015 et les références citées).

La chambre de céans accorde crédit, en l'absence d'éléments permettant de les mettre en doute comme en l'espèce où les recourants n'émettent qu'une critique générale liée à l'existence de neuf places de stationnement, aux avis des services spécialisés de l'administration pour les questions qui les concernent particulièrement (ATA/6/2011 du 11 janvier 2011), comme en l'occurrence la DGT.

Concernant l'augmentation du trafic routier, la chambre de céans a déjà jugé que l'accroissement du trafic engendré par de nouvelles constructions conformes à la destination de la zone, ne constituait pas un inconvénient grave au sens de l'art. 14 LCI (ATA/253/2016 du 22 mars 2016 ; ATA/396/2010 du 8 juin 2010 et les arrêts cités).

En l'espèce, l'entrée/sortie du garage souterrain se situe au tout début du chemin privé, ce qui permet d'exclure les problèmes de croisement invoqués par les recourants. En outre, le projet a été examiné par la DGT qui l'a préavisé favorablement après avoir fait modifier l'emplacement de l'espace de croisement entre les véhicules entrant et sortant de la rampe du parking souterrain, mais qui n'a formulé aucune remarque au sujet des nuisances évoquées par les recourants, ni en matière de sécurité ni en matière d'augmentation du trafic. Cette analyse a également été confirmée par le TAPI, juridiction spécialisée, et les recourants n'apportent aucun élément nouveau dans leur recours.

Par conséquent, rien ne permet de retenir que le projet serait source d'inconvénients graves au sens de l'art. 14 LCI.

Quant aux griefs des recourants concernant les vues plongeantes des futurs habitants, elles concernent le droit privé, ce que les recourants admettent dans leur recours, et il n'appartient dès lors pas à la chambre de céans de statuer en la matière. En effet, le Tribunal fédéral a déjà précisé que le droit des constructions constitue en règle général un ensemble complet qui ne laisse aucune place à l'application des articles 679-684 du Code civil suisse du 10 décembre l907
(CCS - RS 210) relatifs aux immissions excessives d'un terrain sur un bien-fonds voisin (ATF 138 III 49 consid. 4.4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral du 18 mai 2000 in SJ 2001 I 13).

Partant, les griefs seront écartés.

9) Finalement, les recourants, reprenant l'argumentation déjà développée devant le TAPI, estiment que l'autorisation de construire ne pouvait être délivrée sans que les travaux de rénovation des équipements collectifs privés d'assainissement ne fassent, au préalable, l'objet d'un accord entre tous les propriétaires concernés.

Ce même grief a été écarté par le TAPI, dans un considérant exhaustif de son jugement du 6 juin 2018 (consid. 42) auquel la chambre de céans adhère. En effet, il ressort clairement du préavis de la DGEau du 20 juin 2017, que dans l'attente de la réalisation des futures canalisations, le branchement peut s'effectuer sur le système existant.

10) Il appert ainsi que le projet a été examiné avec toute l'attention voulue par le département dans la mesure exigée par la loi et il faut conclure à la conformité du projet autorisé aux normes applicables, conformément à ce qu'a retenu le TAPI dans son jugement.

Infondé, le recours sera rejeté.

11) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge conjointe et solidaire des recourants (art. 87 al. 1 LPA) et une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée à Madame Françoise MIVELAZ et à Promo T. & I. SA, à la charge, conjointe et solidaire des recourants (art. 87
al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 9 juillet 2018 par Monsieur Christian BERNARD, Madame Aleksandra KOUZMINA, Madame Adriana RADULESCU, Monsieur Marc BOLLER, Madame Carmen CARREL, Madame Jacqueline BETTINI, Madame Anne BERSIER BEYELER et Madame Rosina et Monsieur Guy BORCARD contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 6 juin 2018 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 2'000.- à la charge conjointe et solidaire de Monsieur Christian BERNARD, Madame Aleksandra KOUZMINA, Madame Adriana RADULESCU, Monsieur Marc BOLLER, Madame Carmen CARREL, Madame Jacqueline BETTINI, Madame Anne BERSIER BEYELER et Madame Rosina et Monsieur Guy BORCARD ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à Madame Françoise MIVELAZ ainsi qu'une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à Promo T. & I. SA, à la charge conjointe et solidaire de Monsieur Christian BERNARD, Madame Aleksandra KOUZMINA, Madame Adriana RADULESCU, Monsieur Marc BOLLER, Madame Carmen CARREL, Madame Jacqueline BETTINI, Madame Anne BERSIER BEYELER et Madame Rosina et Monsieur Guy BORCARD ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. La présente décision et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Luca Beffa, avocat des recourants, à Me Nicolas Wisard, avocat des intimées, au département du territoire - OAC, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Pagan, Mme Cuendet, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :