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Décisions | Tribunal pénal

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P/16180/2018

JTDP/949/2023 du 18.07.2023 ( PENAL ) , JUGE

Normes : CP.157; LEI.116; LEI.116; LAVS.87; LEI.117

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL DE POLICE

Chambre 3


18 juillet 2023

 

MINISTÈRE PUBLIC

Monsieur A______, partie plaignante, assisté de Me E______

Madame B______, partie plaignante, assistée de Me F______

Madame C______, partie plaignante, assistée de Me F______

Madame D______, partie plaignante, assistée de Me G______

contre

Monsieur X______, né le ______ 1954, domicilié H______, République Démocratique du Congo, prévenu, assisté de Me I______

Madame Y______, née le ______ 1953, domiciliée H______, République Démocratique du Congo, prévenue, assistée de Me I______


CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :

Le Ministère public conclut :

-          à un verdict de culpabilité de X______ et de Y______ de tous les chefs d'infractions figurant dans l'acte d'accusation ainsi que d'infraction à l'art. 112 LAA;

-          à la condamnation de X______ à une peine privative de liberté de 20 mois, sous déduction de la détention provisoire subie, et à une peine pécuniaire de 120 jours-amende à CHF 2'000.- le jour, peines assorties du sursis pendant 3 ans, ainsi qu'à une amende à titre de sanction immédiate de CHF 10'000.-, peine privative de liberté de substitution de 50 jours;

-          à la condamnation de Y______ à une peine privative de liberté de 20 mois, sous déduction de la détention provisoire subie, et à une peine pécuniaire de 100 jours-amende à CHF 2'000.- le jour, peines assorties du sursis pendant 3 ans, ainsi qu'à une amende à titre de sanction immédiate de CHF 10'000.-, peine privative de liberté de substitution de 50 jours;

-          à ce que les prévenus soient condamnés conjointement et solidairement aux frais de la procédure et à verser aux parties plaignantes leurs prétentions civiles;

-          à ce qu'une créance compensatrice en faveur de l'Etat soit prononcée pour un montant équivalent aux prétentions civiles ainsi qu'aux peines et amendes auxquelles les prévenus seraient condamnés, d'ordonner en garantie de la créance compensatrice le maintien du séquestre, des valeurs figurant sous chiffre 10 de l'inventaire n°20789320190410 du 10 avril 2019 et sous chiffre 6 de l'inventaire n°20784020190410 du 10 avril 2019, du montant des sûretés en CHF 150'000.- déposés lors des mesures de substitutions ordonnées ainsi que sur les bijoux et montres figurant sous chiffres 1 à 202 de l'inventaire du 12 avril 2019, en vue de leur réalisation;

-          à l'allocation aux parties plaignantes de la créance compensatrice prononcée à concurrence de leurs montants respectifs;

-          à ce que les autres mesures de substitutions soient levées et à la confirmation du sort des biens et valeurs saisis figurant dans l'acte d'accusation.

A______, par la voix de son conseil, conclut à un verdict de culpabilité des deux prévenus des chefs d'usure, d'emploi d'étrangers sans autorisation, d'infraction à l'art. 87 LAVS, 71 al. 1 let. b et al. 2 LPP et 112 LAA en lien avec ce qui le concerne et persiste dans les conclusions civiles déposées. Il conclut également à ce que l'état de frais de son conseil soit majoré de 30 %, pour tenir compte des téléphones effectués pour son compte.

B______, par la voix de son conseil, conclut à un verdict de culpabilité des deux prévenus des chefs d'infractions qui la concerne et persiste dans les conclusions civiles déposées.

C______, par la voix de son conseil, conclut à un verdict de culpabilité des deux prévenus des chefs d'infractions qui la concerne et persiste dans les conclusions civiles déposées.

D______, par la voix de son conseil, conclut à un verdict de culpabilité des deux prévenus du chef d'usure et persiste dans les conclusions civiles déposées ainsi que dans les conclusions en confiscation et allocation de la créance compensatrice.

X______ et Y______, par la voix de leur conseil, concluent à leur acquittement de tous les chefs d'infractions de l'acte d'accusation, s'oppose à toutes confiscations et au maintien du séquestre. Ils concluent à ce que les parties plaignantes soient déboutées de leurs conclusions civiles et sollicitent la levée des mesures de substitutions.

ETAT DE FAIT

A. a) Par acte d'accusation du 7 février 2023, il est reproché à X______ d'avoir, à Genève :

- du 1er avril 2003 au 31 juillet 2008, à son domicile, sis J______, à Cologny, de concert avec son épouse Y______, exploité la situation personnelle, la gêne, la dépendance et l'inexpérience de D______, ressortissante équatorienne, dépourvue d'autorisation de travail et de séjour, en l'employant à son service, la logeant à son domicile genevois d'où elle ne sortait presque pas, la rémunérant largement en dessous des salaires minimums applicables en Suisse, la faisant travailler tous les jours à raison de 16 heures par jour environ, sept jours sur sept, sans lui octroyer les vacances légales ni le paiement de ses heures supplémentaires, et sans s'acquitter des charges sociales ni de l'assurance accident, profitant de la sorte d'un avantage économique disproportionné évident, à savoir CHF 140'299.30 selon le calcul effectué par le Tribunal des prud'hommes et confirmé par l'arrêt de la Cour de justice du 6 janvier 2017 (ch. 1.1.1. let. a de l'acte d'accusation);

- du mois d'août 2014 au 10 avril 2019, date de son interpellation, à son domicile sis K______, à Jussy, de concert avec son épouse Y______, exploité la situation personnelle, la gêne et l'inexpérience de C______, ressortissante du Nicaragua, dépourvue d'autorisation de travail et de séjour, notamment par des pressions psychologiques, en l'employant à son service, la rémunérant environ CHF 5.80/heure, soit largement en dessous des salaires minimums applicables en Suisse, en la faisant travailler 4 jours par semaine, soit du dimanche au mercredi, de 8h30 à 23h00, sans pause, sans lui octroyer les vacances légales ni le paiement de ses heures supplémentaires, sans s'acquitter des charges sociales ni de l'assurance accident, profitant de la sorte d'un avantage économique disproportionné évident (ch. 1.1.1. let. b de l'acte d'accusation);

- du 12 mars 2016 au 10 avril 2019, date de son interpellation, à son domicile sis K______, à Jussy, de concert avec son épouse Y______, exploité la situation personnelle, la gêne et l'inexpérience de B______, ressortissante du Nicaragua, dépourvue d'autorisation de travail et de séjour, notamment par des pressions psychologiques, en l'employant à son service, la rémunérant largement en dessous des salaires minimums applicables en Suisse, en la faisant travailler 6 jours par semaine, de 8h00 à 23h00 voire minuit, pour environ CHF 6.40/heure, sans lui octroyer les vacances légales ni le paiement de ses heures supplémentaires, sans s'acquitter des charges sociales ni de l'assurance accident, profitant de la sorte d'un avantage économique disproportionné évident (ch. 1.1.1. let. c de l'acte d'accusation);

- du mois d'avril 2009 au 10 avril 2019, date de son interpellation, à son domicile sis J______, à Cologny, puis K______, à Jussy, de concert avec son épouse Y______, exploité la situation personnelle, la gêne et l'inexpérience de A______, ressortissant bolivien dépourvu d'autorisation de travail et de séjour, en l'employant en qualité de jardinier et d'homme à tout faire, en le rémunérant, d'avril 2009 à 2013, CHF 2'000.- par mois, de 2013 à 2015, CHF 2'200.- par mois, de 2015 à 2018, CHF 2'500.- par mois, à raison de 08h00 par jour, 5 jours par semaine, puis de 2018 au 10 avril 2019 à nouveau CHF 2'000.- par mois, à raison de 08h00 par jour, 4 jours par semaine, sans s'acquitter des charges sociales ni de l'assurance accident, profitant de la sorte d'un avantage économique disproportionné évident (ch. 1.1.1. let. d de l'acte d'accusation);

faits qualifiés d'usure (art. 157 ch. 1 CP);

-          dans les circonstances décrites sous chiffre 1.1.1 ci-dessus, de concert avec son épouse Y______, intentionnellement facilité le séjour en Suisse de deux ressortissantes du Nicaragua dépourvues d'autorisation de séjour et de travail, soit C______, du mois d'août 2014 au 10 avril 2019 et B______, du mois de mars 2016 au 10 avril 2019, en leur permettant de loger dans leur résidence, sise J______, à Cologny, respectivement K______, à Jussy, et en leur procurant une activité lucrative, alors que celles-ci n'étaient pas titulaires des autorisations requises (ch. 1.1.2. let. a de l'acte d'accusation),

-          en mars 2016, de concert avec son épouse Y______, intentionnellement incité B______, ressortissante du Nicaragua dépourvue d'autorisation de séjour et de travail, à venir en Suisse pour qu'elle y séjourne et y travaille pour son compte (ch. 1.1.2. let. b de l'acte d'accusation),

faits qualifiés d'infraction à l'art. 116 al. 1 let. a et b de la Loi fédérale sur les étrangers et l'immigration (LEI);

-          dans les circonstances décrites sous chiffre 1.1.1 ci-dessus, à tout le moins depuis avril 2009 jusqu'au 10 avril 2019, de concert avec son épouse Y______, intentionnellement employé à son service des ressortissants étrangers dépourvus d'autorisation de séjour et de travail (ch. 1.1.3. de l'acte d'accusation) soit :

-          C______, ressortissante du Nicaragua, du mois d'août 2014 au 10 avril 2019,

-          B______, ressortissante du Nicaragua, du mois de mars 2016 au 10 avril 2019,

-          A______, ressortissant bolivien, du mois d'avril 2009 au 10 avril 2019,

faits qualifiés d'emploi d'étrangers sans autorisation (art. 117 al. 1 LEI);

-          dans les circonstances décrites sous chiffre 1.1.1 ci-dessus, à tout le moins depuis le mois d'avril 2009 jusqu'au 10 avril 2019, de concert avec son épouse Y______, intentionnellement omis d'affilier à une caisse de compensation et de décompter les cotisations sociales de ses employés de maison, C______, B______ et A______ (ch. 1.1.4. de l'acte d'accusation), faits qualifiés d'infraction à l'art. 87 ch. 3 de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants (LAVS);

-          dans les circonstances décrites sous chiffre 1.1.1 ci-dessus, depuis le mois d'avril 2009 jusqu'au 10 avril 2019, de concert avec son épouse Y______, intentionnellement omis de retenir et rétrocéder les cotisations LPP relatives à l'activité de ses employés de maison, C______, B______ et A______, comme il y était tenu en sa qualité d'employeur (ch. 1.1.5. de l'acte d'accusation), faits qualifiés d'infraction à l'article 76 al. 2 LPP;

-          le 10 avril 2019, lors de son interpellation à son domicile, sis K______, à Jussy, empêché les inspecteurs de police chargés de l'escorter et de l'emmener, en se débattant, ce qui les a forcés à l'amener au sol et à essayer de le menotter, en continuant à se débattre une fois au sol, à gesticuler dans tous les sens, déplaçant des objets avec des mouvement de tête, afin d'empêcher les policiers de le menotter, en tentant également de donner des coups de pieds à l'Inspecteur L______ et plaçant son bras sous son torse, en continuant de résister après avoir été menotté, en refusant de suivre les inspecteurs jusqu'à la voiture, obligeant l'un d'eux à lui faire une clé d'escorte, avant de refuser de s'installer dans le véhicule, coinçant notamment ses pieds dans la portière (ch. 1.1.6. de l'acte d'accusation)

faits qualifiés d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 CP).

b) Par le même acte d'accusation, il est reproché à Y______ d'avoir, à Genève :

- du 1er avril 2003 au 31 juillet 2008, à son domicile, sis J______, à Cologny, de concert avec son époux X______, exploité la situation personnelle, la gêne, la dépendance et l'inexpérience de D______, ressortissante équatorienne, dépourvue d'autorisation de travail et de séjour, en l'employant à son service, la logeant à son domicile genevois d'où elle ne sortait presque pas, la rémunérant largement en dessous des salaires minimums applicables en Suisse, la faisant travailler tous les jours à raison de 16h00 par jour environ, sept jours sur sept, sans lui octroyer les vacances légales ni le paiement de ses heures supplémentaires, et sans s'acquitter des charges sociales ni de l'assurance accident, profitant de la sorte d'un avantage économique disproportionné évident, à savoir CHF 140'299.30 selon le calcul effectué par le Tribunal des prud'hommes et confirmé par l'arrêt de la Cour de justice du 6 janvier 2017 (ch. 1.2.1. let. a de l'acte d'accusation);

- du mois d'août 2014 au 10 avril 2019, date de son interpellation, à son domicile sis K______, à Jussy, de concert avec son époux X______, exploité la situation personnelle, la gêne et l'inexpérience de C______, ressortissante du Nicaragua, dépourvue d'autorisation de travail et de séjour, notamment par des pressions psychologiques, en l'employant à son service, la rémunérant environ CHF 5.80/heure, soit largement en dessous des salaires minimums applicables en Suisse, en la faisant travailler 4 jours par semaine, soit du dimanche au mercredi, de 08h30 à 23h00, sans pause, sans lui octroyer les vacances légales ni le paiement de ses heures supplémentaires, sans s'acquitter des charges sociales ni de l'assurance accident, profitant de la sorte d'un avantage économique disproportionné évident (ch. 1.2.1. let. b de l'acte d'accusation);

- du 12 mars 2016 au 10 avril 2019, date de son interpellation, à son domicile sis K______, à Jussy, de concert avec son époux X______, exploité la situation personnelle, la gêne et l'inexpérience de B______, ressortissante du Nicaragua, dépourvue d'autorisation de travail et de séjour, notamment par des pressions psychologiques, en l'employant à son service, la rémunérant largement en dessous des salaires minimums applicables en Suisse, en la faisant travailler 6 jours par semaine, de 08h00 à 23h00 voire minuit, pour environ CHF 6.40/heure, sans lui octroyer les vacances légales ni le paiement de ses heures supplémentaires, sans s'acquitter des charges sociales ni de l'assurance accident, profitant de la sorte d'un avantage économique disproportionné évident (ch. 1.2.1. let. c de l'acte d'accusation);

- du mois d'avril 2009 au 10 avril 2019, date de son interpellation, à son domicile sis J______, à Cologny, puis K______, à Jussy, de concert avec son époux X______, exploité la situation personnelle, la gêne et l'inexpérience de A______, ressortissant bolivien dépourvu d'autorisation de travail et de séjour, en l'employant en qualité de jardinier et d'homme à tout faire, en le rémunérant, d'avril 2009 à 2013, CHF 2'000.- par mois, de 2013 à 2015, CHF 2'200.- par mois, de 2015 à 2018, CHF 2'500.- par mois, à raison de 08h00 par jour, 5 jours par semaine, puis de 2018 au 10 avril 2019 à nouveau CHF 2'000.- par mois, à raison de 08h00 par jour, 4 jours par semaine, sans s'acquitter des charges sociales ni de l'assurance accident, profitant de la sorte d'un avantage économique disproportionné évident (ch. 1.2.1. let. d de l'acte d'accusation);

faits qualifiés d'usure (art. 157 ch. 1 CP);

-          dans les circonstances décrites sous chiffre 1.2.1 ci-dessus, de concert avec son époux X______, intentionnellement facilité le séjour en Suisse de deux ressortissantes du Nicaragua dépourvues d'autorisation de séjour et de travail, soit C______, du mois d'août 2014 au 10 avril 2019 et B______, du mois de mars 2016 au 10 avril 2019, en leur permettant de loger dans leur résidence, sise J______, à Cologny, respectivement K______, à Jussy, et en leur procurant une activité lucrative, alors que celles-ci n'étaient pas titulaires des autorisations requises (ch. 1.2.2. let. a de l'acte d'accusation),

-          en mars 2016, de concert avec son épouse Y______, intentionnellement incité B______, ressortissante du Nicaragua dépourvue d'autorisation de séjour et de travail, à venir en Suisse pour qu'elle y séjourne et y travaille pour son compte (ch. 1.2.2. let. b de l'acte d'accusation),

faits qualifiés d'infraction à l'art. 116 al. 1 let. a et b de la Loi fédérale sur les étrangers et l'immigration (LEI);

-          dans les circonstances décrites sous chiffre 1.2.1 ci-dessus, à tout le moins depuis avril 2009 jusqu'au 10 avril 2019, de concert avec son époux X______, intentionnellement employé à son service des ressortissants étrangers dépourvus d'autorisation de séjour et de travail (ch. 1.2.3. de l'acte d'accusation) soit :

-          C______, ressortissante du Nicaragua, du mois d'août 2014 au 10 avril 2019,

-          B______, ressortissante du Nicaragua, du mois de mars 2016 au 10 avril 2019,

-          A______, ressortissant bolivien, du mois d'avril 2009 au 10 avril 2019,

faits qualifiés d'emploi d'étrangers sans autorisation (art. 117 al. 1 LEI);

-          dans les circonstances décrites sous chiffre 1.2.1 ci-dessus, à tout le moins depuis une date en 2015, début de la période pénale non atteinte par la prescription, jusqu'au 10 avril 2019, de concert avec son époux X______, intentionnellement omis d'affilier à une caisse de compensation et de décompter les cotisations sociales de ses employés de maison, C______, B______ et A______ (ch. 1.2.4. de l'acte d'accusation),

faits qualifiés d'infraction à l'art. 87 ch. 3 de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants (LAVS);

-          dans les circonstances décrites sous chiffre 1.2.1 ci-dessus, depuis le mois d'avril 2009 jusqu'au 10 avril 2019, de concert avec son époux X______, intentionnellement omis de retenir et rétrocéder les cotisations LPP relatives à l'activité de ses employés de maison, C______, B______ et A______, comme il y était tenu en sa qualité d'employeur (ch. 1.2.5. de l'acte d'accusation),

faits qualifiés d'infraction à l'article 76 al. 2 LPP.

 

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

Plainte de D______

a.a. Par courrier du 23 août 2018, D______ a déposé plainte contre X______ et Y______ du chef d'usure et de toute autre infraction pénale pertinente. Elle était née le ______ 1963 en Equateur et résidait en Suisse, sans autorisation, depuis 2002. Elle ne parlait pas français, n'avait pas de famille en Suisse et ignorait les lois suisses. Du 1er avril 2003 au 31 juillet 2008, elle avait été engagée en qualité d'employée de maison à plein temps, pour travailler au service de la famille X______/Y______, qui habitait une maison de quatre étages, comprenant environ douze pièces et six salles de bains à Cologny. Elle logeait sur place et son salaire avait régulièrement évolué. Il avait d'abord été fixé à CHF 1'600.- par mois jusqu'en décembre 2004, puis à CHF 1'800.- en 2005, à CHF 2'000.- en 2006, à CHF 2'500.- en 2007 et enfin, à CHF 2'600.- de janvier 2008 à juillet 2008. Elle ne recevait pas de fiche de salaire. Les époux X______/Y______ étaient absents de la maison environ la moitié du temps, en plus des vacances scolaires, lors desquelles les filles étaient également en déplacement. Lorsqu'ils étaient présents, elle travaillait de 06h30 jusqu'à 22h30, voire 23h30 ou minuit les week-ends. Elle n'avait jamais pris de vacances et ses heures supplémentaires n'avaient été ni compensées ni payées. En 2008, X______ avait régularisé sa situation vis-à-vis de l'AVS/AI/APG/AC et des impôts, payant notamment les arriérés d'impôt à la source. Ces démarches coïncidaient avec un traitement médical qu'elle devait subir. Les époux X______/Y______ l'avait licenciée avec effet immédiat en juillet 2018, en raison de la perspective de son opération et du risque que son statut illégal soit découvert. Elle avait été mise à la porte et logée dans un hôtel, aux frais des époux X______/Y______. Le 31 juillet 2008, X______ lui avait soumis une convention par laquelle elle acceptait de mettre un terme à leur contrat d'un commun accord au 31 août 2008, et admettait avoir reçu la somme forfaitaire de CHF 20'400.-, comprenant les salaires de juillet et août ainsi que le solde de toutes ses potentielles prétentions salariales. Après que X______ avait haussé le ton, elle avait signé le document et accepté l'argent. Le 17 novembre 2008, elle avait ouvert action aux Prud'hommes. Après une longue procédure, l'affaire s'était conclue par un jugement de la Cour de justice du 6 janvier 2017, qui avait condamné les époux X______/Y______ à lui payer CHF 144'229.30, qui, compte tenu des intérêts fixés, représentait un montant avoisinant les CHF 245'000.- au jour de la plainte.

a.b. Le 19 octobre 2018 devant la police, D______ a expliqué que sa nièce avait travaillé pendant deux ans pour Y______ comme gouvernante, avant elle. Elle avait ainsi appris que Y______ cherchait à engager une employée de maison, étant précisé que sa nièce l'avait informée du fait que celle-ci avait un caractère difficile et demandait aux employés de travailler "comme des esclaves". Comme elle vivait des moments difficiles sur le plan personnel et qu'elle devait assumer la charge de ses deux enfants, elle avait malgré tout accepté. Les conditions de son engagement n'avaient pas été discutées, si ce n'est qu'elle serait payée CHF 1'500.- mensuel, nourrie et logée. Elle avait commencé son activité le 10 septembre 2002. La maitresse de maison parlait très mal aux autres employées, criait et les espionnait. Elles avaient peur d'elle. A cette période, Y______ respectait D______ et lui parlait correctement. Lors d'un départ en vacances, en décembre 2002, toutes les autres employées avaient été licenciées et, dès janvier 2003, la précitée était restée seule pour s'occuper de la maison, des enfants et du reste. Lorsque le couple X______/Y______ était absent, elle se levait à 06h00, s'occupait du chien et rangeait la maison de fond en comble, jusqu'à 19h00, parfois 22h00. Y______ la harcelait sans arrêt par téléphone, pour lui dire ce qu'elle devait faire. Lorsque le couple était présent, elle se levait à 05h00, pour préparer les filles avant qu'elles aillent à l'école et s'occupait ensuite de tout l'entretien de la maison, jusqu'à minuit. Elle travaillait tous les jours et n'avait jamais eu un jour de congé. Elle n'avait jamais rien demandé, car elle avait peur de perdre son emploi. A la fin de l'année 2003 ou au début 2004, Y______ avait commencé à crier sur elle également, s'en excusant ensuite. Même si elle avait les clés de la maison, elle n'en était jamais sortie. Après six ans sans contrôle médical, elle avait demandé au chauffeur du couple de l'emmener voir un médecin. Une semaine plus tard, elle avait appris qu'elle souffrait d'un cancer de l'utérus. Quinze jours plus tard, soit le 31 juillet 2008, elle l'avait annoncé à ses employeurs, qui lui avait reproché d'avoir dit qu'elle travaillait pour leur compte et lui avait proposé de rentrer dans son pays afin de se faire soigner. X______ l'avait ensuite accompagnée auprès d'une compagnie d'assurance pour couvrir le risque médical. Une fois rentré, celui-ci avait mis fin à son engagement et lui avait donné CHF 20'000.-. Comme elle refusait de signer le document qu'il lui présentait, le ton était monté. Elle avait fini par accepter et elle avait rapidement dû faire ses valises pour se rendre dans l'hôtel que X______ avait réservé pour elle, pendant quinze jours. Les deux semaines ne lui avaient pas permis de trouver un nouvel emploi et elle avait recontacté son ancien employeur, qui lui avait trouvé un autre hôtel, pour vingt jours supplémentaires. Elle avait été invitée à contacter la police par une carte laissée dans sa chambre d'hôtel.

Enquête

b.a. Le 9 avril 2019, le Ministère public a émis deux ordonnances de perquisition et de séquestre, portant respectivement sur le domicile des époux X______/Y______, sis K______, à Jussy, et sur les locaux utilisés par X______, auprès de M______, société dans laquelle il était actif, sise ______, 1227 Les Accacias.

b.b. Selon le rapport d'arrestation du 11 avril 2019, en application du mandat qu'ils avaient reçu, le 10 avril 2019, à 06h00, des inspecteurs de la Brigade de lutte contre la traite des êtres humains et la prostitution illégale s'étaient rendus au domicile de la famille X______/Y______. Après avoir sonné en vain durant plusieurs minutes à l'interphone du portail, les agents l'avaient escaladé, avaient sonné et frappé aux portes et aux fenêtres à plusieurs reprises avant que X______ ne vienne ouvrir. Son épouse Y______, leur fille S______ et deux employés du nom de C______ et B______, se trouvaient également dans la maison. Deux véhicules de marque BENTLEY étaient garés dans le garage attenant à la maison, et des véhicules de marque JAGUAR, MERCEDES et LANCIA se trouvaient également dans la propriété. Après vérification, il était apparu que les trois premiers véhicules étaient enregistrés au nom de la société M______, la voiture de marque LANCIA, au nom de N______ et celle de marque MERCEDES au nom de T______, fille de Y______. La demeure étant très vaste, deux perquisitions simultanées avaient été effectuées, chacune en présence d'un des deux époux X______/Y______. Dans la salle de bain de la chambre du couple, un coffre-fort avait été trouvé derrière un miroir. X______ ayant refusé d'en donner le code, un serrurier avait été appelé pour le forcer. Une fois sur place, celui-ci avait tout d'abord ouvert une porte du rez-de-chaussée, que l'interpelé avait également refusé de déverrouiller. Il s'agissait d'une pièce utilisée comme bureau et dressing, dont le sol était jonché de papiers, d'habits et d'objets divers. Vu le long temps annoncé pour l'ouverture du coffre, il avait été décidé de suspendre la perquisition de la maison pour effectuer celle des locaux de la société M______. Les agents avaient demandé à X______, qui était assis dans un fauteuil du bureau, de les suivre pour qu'ils se rendent ensemble sur place. Celui-ci leur avait demandé de poursuivre la perquisition de la maison et, malgré plusieurs demandes, avait refusé de les accompagner. Il avait fait preuve de résistance passive et n'avait pas voulu collaborer. Il lui avait été expliqué à plusieurs reprises que, s'il s'obstinait, les agents devraient faire usage de la force et le menotter, en application du mandat reçu. X______ n'avait rien voulu savoir et était malgré tout resté assis. L'Inspecteur L______ l'avait alors saisi par le bras gauche, pour le faire lever et l'avait accompagné avec une "clé d'escorte". L'intéressé avait commencé à se débattre et n'avait pas écouté les ordres de se calmer. Aidé par l'Inspecteur W______, l'Inspecteur L______ avait effectué une clé de bras pour l'amener au sol et le menotter. Une fois couché sur le ventre, l'interpelé avait continué à se débattre pendant deux à trois minutes, empêchant la manœuvre en gardant devant lui sa main droite, dans laquelle il tenait ses lunettes. L'Inspecteur Z______ était alors intervenu pour aider ses collègues. L'Inspecteur W______ avait tenté de faire lâcher prise à X______, en saisissant sa main droite et en écartant ses doigts. Celui-ci avait continué à se débattre et un de ses doigts avait été cassé. Il avait finalement lâché ses lunettes mais avait continué à résister en cachant son bras droit sous lui. Les agents avaient finalement réussi à la menotter et à le relever, constatant un léger saignement au niveau de son front. L'interpelé avait malgré tout continué à résister, refusant de suivre les inspecteurs jusqu'à la voiture. Une fois arrivé au véhicule, il n'avait pas voulu prendre place sur le siège et deux agents avaient dû l'y contraindre. Dans l'intervalle, la seconde fille du couple, R______, était arrivée sur place. Elle était restée à la maison pour être présente pour la suite de la perquisition. Finalement, Y______ avait accepté de fournir le code pour ouvrir le coffre-fort et tous les objets saisis avaient été portés en inventaire et scellés. Le lendemain, à 10h00, les agents s'étaient rendus dans les locaux de M______, où divers documents en lien avec la famille X______/Y______ avaient été saisis et scellés. Toutes les personnes présentes dans la maison de Jussy ainsi que A______, jardinier de la propriété, avaient été entendues. Les trois employés avaient déposé plainte contre les époux X______/Y______.

Plaintes déposées par les employés

C______

c.a. Le 10 avril 2019, C______, née le ______ 1966, a déposé plainte pénale devant la police. Elle a expliqué être arrivée seule, à Genève, le 25 décembre 2012, depuis le Nicaragua, pays qu'elle avait quitté en raison de la crise économique. Elle devait trouver un emploi pour pouvoir entretenir ses quatre enfants qui étudiaient. Elle avait été présentée à Y______ par l'intermédiaire d'une employée de cette dernière. Elle avait commencé son activité le jour-même, en août 2014. Ses tâches consistaient à faire le ménage et le repassage, pour CHF 1'500.- mensuel, logement compris. Elle devait payer sa nourriture et rien n'avait été convenu concernant des vacances. Son planning s'étendait du dimanche au mercredi, de 08h00 à 23h00 ou minuit. Y______ ne payait ni les cotisations sociales, ni l'assurance-maladie. C______ n'avait jamais eu de jour de congé. Elle n'avait jamais demandé à ce que ses conditions changent, mais elle avait voulu quitter ce travail, car elle se sentait comme une esclave. Elle ne savait pas où aller et son pays était en guerre. En parallèle, elle faisait quelques heures de ménage en plus, dans une autre famille, pour CHF 25.- par heure, à raison de quatre heures tous les quinze jours. Les jeudis, vendredis et samedis elle logeait chez ______, contre quatre heures de ménage. Sa sœur avait les clés de la maison.

Une employée, prénommée AA______, qui travaillait également pour le couple X______/Y______ en même temps qu'elle, avait décidé de rentrer au Nicaragua, suite aux maltraitances que Y______ lui faisait subir. Cette dernière lui avait demandé si elle connaissait quelqu'un qui serait d'accord de venir travailler à sa place. Elle avait proposé sa sœur, B______, et avait payé le billet d'avion pour lui permettre de venir à Genève. Celle-ci était arrivée le 16 mars 2016, en qualité de touriste, et avait tout de suite commencé à travailler pour le couple X______/Y______, du lundi au samedi, pour un salaire de CHF 2'000.- mensuel. Comme elle affrontait Y______, en ayant une posture assez forte, cette dernière ne maltraitait pas sa sœur qui avait "aussi" demandé des papiers, mais Y______ n'était pas entrée en matière. A______, employé en qualité de jardinier par le couple X______/Y______, travaillait de 08h00 à 17h00, avec une heure de pause à midi, pour un salaire de CHF 2'000.- par mois et avait droit à des vacances et à des jours fériés.

B______

c.b. Le 10 avril 2019, B______, née le ______ 1983, a déposé plainte pénale devant la police. Elle a expliqué être arrivée en Suisse le 10 mars 2019, depuis le Nicaragua. Son billet d'avion avait été payé par sa sœur. Celle-ci l'avait informée que la dame chez qui elle travaillait cherchait une femme de ménage. Elle avait juste su qu'elle devrait faire le ménage et s'occuper des chiens. Le salaire et les conditions de travail n'avaient pas été évoqués. Dès le lendemain de son arrivée à Genève, elle s'était rendue avec sa sœur chez Y______. Celle-ci lui avait dit que ses tâches consisteraient à nettoyer et garder la maison, y compris pendant ses nombreux voyages, pour un salaire de CHF 2'000.- par mois, sans que la nourriture ne soit comprise. Elle ne lui avait pas parlé de vacances ou de jours fériés. Les charges sociales ou les primes d'assurance maladie n'avaient jamais été discutées. Son horaire s'étendait du lundi au samedi, de 08h00 à 21h30, précisant que, depuis deux ans, elle finissait entre 22h30 et 23h00. Lorsqu'il y avait des fêtes, elle pouvait terminer vers 01h00 ou 02h00, et même 02h30 ou 03h00 à Noël, sans que cela ne change ses horaires du lendemain. Depuis deux ans, la famille venait beaucoup plus souvent à la maison et mangeait à 21h00. Elle devait ensuite tout ranger et nettoyer. Elle mangeait son repas de midi vers 16h30, après avoir nettoyé la vaisselle utilisée par la famille X______/Y______ pour leur repas, pris entre 14h00 et 16h00. Y______ lui disait de prendre du temps pour elle, mais rapidement celle-ci revenait lui demander pourquoi elle ne travaillait pas, si bien que sa pause ne durait que trente minutes. Elle faisait le ménage, nettoyait les vitres, rangeait toutes les chambres et repassait quand elle était seule. Depuis trois mois, elle préparait les repas de la famille trois fois par jour et pouvait manger les restes. X______ la payait de main à main. L'année précédente, il l'avait payée tous les trois mois. Elle avait toujours été payée, même s'il y avait parfois du retard. Au début de son engagement, Y______ voyageait beaucoup, notamment en Hollande, où la famille avait une maison. Elle venait quinze jours à Genève et repartait, ayant même pu être absente pendant deux mois. Quand tout le monde était absent, elle faisait son travail quotidien et terminait sa journée à 17h00. Sa patronne ne lui disait pas ce qu'elle devait faire, car elle connaissait ses tâches. Celle-ci appelait une fois par jour, pour savoir si tout allait bien. Si elle sortait de la maison, elle devait l'appeler pour l'avertir. Une fois par semaine, Y______ lui disait qu'elle pouvait prendre son après-midi mais elle ne voulait pas car elle n'aimait pas sortir. Sa sœur devait rester au domicile les jours où elle travaillait car la maitresse de maison disait qu'elle allait lui "voler des heures" comme elle travaillait moins de jours. La maison devait toujours être gardée, si bien qu'elles ne pouvaient pas sortir ensemble. Depuis le mois de décembre 2018, la famille X______/Y______ avait déménagé de la Hollande à Genève et était toujours présente, ce qui avait encore augmenté la pression sur elle. Lorsque la famille partait en vacances, elle devait préparer les bagages, les habits devant être rangés sans un pli. Elle s'occupait des quatre chihuahuas, rejoins par deux nouveaux l'année dernière. A la demande de Y______, ceux-ci dormaient dans sa chambre, ce qui ne la dérangeait pas. A leur retour, si c'était tard dans la nuit, elle devait mettre son uniforme, sortir les valises de la voiture et ranger leur contenu. Elle dormait dans une chambre individuelle, tout comme sa sœur, avec qui elle partageait une salle de bain et une cuisine équipée. Elle y cuisinait quand la propriété était vide, mais mangeait froid le reste du temps, car l'odeur de la cuisine dérangeait les habitants de la maison. Elle envoyait de l'argent au Nicaragua, soit CHF 1'000.- tous les mois, pour ses enfants, et CHF 200.- tous les deux à trois mois, pour ses neveux. Y______ était tranquille avec elle et X______ était gentil. Les horaires et la multitude de tâches à effectuer étaient en revanche difficiles. Elle n'avait pas d'assurance-maladie. En mars 2019, elle avait eu une rage de dent et Y______ l'avait emmenée chez le dentiste et payé les premiers médicaments. Elle avait en revanche réglé les soins elle-même. Elle n'avait pas peur d'aller faire ses courses en France et pouvait prendre son passeport pour s'y rendre. A une occasion, elle avait été contrôlée et les douaniers lui avaient dit qu'il fallait qu'elle demande à son employeur de la déclarer. Elle avait rapporté la situation à Y______, qui lui avait répondu qu'elle ne pouvait pas la régulariser, car elle-même n'avait pas de papiers en Suisse. A______, le jardinier de la maison, travaillait de 08h00 à 17h00 et bénéficiait d'une pause à midi. Il avait des vacances et ne travaillait pas les jours fériés. Il était payé CHF 2'000.- par mois.

A______

c.c. Le 10 avril 2019, A______, né le ______ 1975, a déposé plainte pénale devant la police. Il a expliqué qu'il était arrivé en Suisse le 8 août 2008, depuis la Bolivie, avec sa compagne et son fils. La situation avait été difficile à cause de la langue et de l'argent, n'étant engagé que ponctuellement pour des travaux de peinture. Il avait fait la connaissance du jardinier de la famille X______/Y______, qui était également en situation irrégulière en Suisse et devait rentrer en Bolivie. Cela lui avait permis d'obtenir un rendez-vous avec la famille X______/Y______, le 21 avril 2009, dans la maison qui était située près de Cologny. Y______, qui savait qu'il n'avait pas de papier, lui avait demandé de commencer à travailler le jour-même et qu'ils discuteraient du salaire par la suite. Dès le premier jour, elle lui avait dit qu'elle était contente et lui avait proposé de travailler cinq jours par semaine, à raison de neuf heures par jour, avec une heure de pause à midi, pour un salaire mensuel de CHF 2'000.-. Il lui avait dit qu'il espérait être mieux rémunéré. Elle avait répondu qu'elle verrait en fonction de la qualité de son travail. Le premier mois, elle lui avait offert la nourriture, puis plus par la suite. Il n'y avait pas eu de contrat écrit et aucune cotisation d'assurances sociales ou accident n'avait été payée. Il bénéficiait de vingt jours de vacances. Comme son fils avait congé les mercredis, il travaillait le samedi pour pouvoir s'occuper de lui ce jour-là. Ses tâches étaient parfois différentes, le samedi et il faisait du jardinage, de la peinture ou nettoyait les véhicules. Y______ le payait de main à main, au début du mois suivant son activité. Depuis l'année 2012 ou 2013, X______ s'en était occupé. Au départ, il avait pensé travailler seulement quelques années. Ses problèmes de couple et sa séparation l'avaient forcé à rester. Il avait accepté beaucoup de choses, notamment de travailler pour ce salaire et sans contrat, car il avait peur en raison de son statut illégal en Suisse. En septembre 2010, la famille X______/Y______ avait déménagé à Jussy, où vivait le couple et leurs deux filles. Il n'avait jamais été menacé par Y______, mais celle-ci avait l'habitude de crier et d'insulter les employés. Il était stressant de travailler pour elle. Lui-même avait été insulté deux fois, ce qui l'avait amené à envisager de changer d'emploi en 2012. Il s'était adressé à un syndicat qui lui avait dit que ses conditions salariales n'étaient pas bonnes mais qu'ils ne pouvaient rien faire pour lui.

Y______ mettait la pression sur les employés, en disant qu'ils gagnaient beaucoup par rapport à d'autres et trouvait toujours des défauts dans le travail effectué. A partir de janvier 2013, sur demande de sa part, son salaire avait été augmenté à CHF 2'200.- par mois. A partir du début de l'année 2014, il avait gagné CHF 2'500.- jusqu'en 2017. Avant ses vacances de janvier/février 2018, X______ lui avait dit qu'il ne pourrait plus le payer CHF 2'500.- et lui avait proposé CHF 2'000.- pour quatre jours de travail. Il lui avait répondu qu'il partirait s'il trouvait un autre emploi, sinon qu'il accepterait. X______ avait voulu qu'il continue à travailler les samedis mais il avait refusé. Il n'avait jamais demandé de permis de travail car Y______ disait toujours qu'elle ne faisait de papiers à personne. Trente-cinq personnes avaient travaillé pour la famille X______/Y______. Les conditions étaient difficiles et le travail peu payé, mais ces personnes acceptaient vu leur situation personnelle, ce qui avait été identique pour lui. Il savait qu'il était une victime mais n'avait pas eu d'autre choix que d'accepter, en raison de sa situation personnelle. Le salaire moyen en Bolivie était de USD 300.- mensuel. Grâce à son salaire gagné à Genève, il parvenait à envoyer de l'argent dans son pays, soit chaque mois CHF 300.- pour l'entretien de son fils et CHF 200.- pour ses parents. X______ passait la moitié de son temps à Genève et Y______, 40% du temps. En 2010 ou 2012, cette dernière avait quasiment vécu tout le temps à Genève, hormis pour des vacances. En revanche, de 2012 à 2018, elle n'avait que rarement occupé la maison, notamment pendant les deux ans ou une dénommée AA______ y avait travaillé, revenant toutefois régulièrement pour changer de vêtements. En 2019, elle n'avait passé que très peu de jours à Genève, suivant ses filles qui participaient à des concours internationaux d'équitation. Celles-ci avaient effectué des études universitaires en Hollande, qu'elles avaient désormais terminées, si bien qu'elles étaient revenues s'installer en Suisse. Depuis février 2019, Y______ avait dit qu'elle allait rester plus régulièrement à Genève. En novembre 2018, il avait entrepris des démarches de régularisation dans le cadre du programme PAPYRUS, par l'intermédiaire d'un syndicat. Pendant ces dix années passées au service de la famille X______/Y______, il s'était senti exploité. Il avait effectué un travail qui aurait dû occuper trois personnes.

Déclarations des enfants X______/Y______

d. Les enfants du couple X______/Y______ ont été entendus par la police le 10 avril 2019 :

d.a. R______, née le ______ 1992, a expliqué qu'elle avait suivi des études en Business international et Management (IBMS), à Eindhoven, où elle avait vécu pendant près de 10 ans. Ses moyens de subsistance provenaient de ses gains lors de concours hippiques internationaux. Depuis janvier 2019, elle vivait dans la maison de Jussy, en compagnie de sa petite sœur. Ses parents vivaient à Kinshasa, dans un appartement dont elle ne se rappelait pas l'adresse et dans lequel elle ne s'était jamais rendue. Elle connaissait D______, qui avait travaillé pour la famille quand celle-ci vivait à Cologny, mais n'a pas été en mesure de fournir plus de détails. C______ surnommée "C1______", et B______, "B1______", s'occupaient du ménage dans la maison de Jussy. Celles-ci nettoyaient également les habits, ce qui ne faisait pas beaucoup de travail, pour elle et sa sœur. Elles n'étaient pas chargées de faire à manger, mais il avait pu arriver qu'elles cuisinent un plat. Elle ne savait pas si elles le faisaient pour les autres membres de la famille. Elle ne les côtoyait pas.

d.b. S______, née le ______ 1995, a expliqué qu'elle vivait à Jussy avec sa sœur. Ses parents vivaient au Congo et faisaient des passages à Genève. Elle connaissait D______, qui avait travaillé à la maison du chemin V______, à Cologny. Elle devait avoir environ six ans à cette époque, si bien qu'elle n'était pas en mesure d'en dire plus. Les employées interpelées le matin même, soit "C1______" et "B1______", étaient sœurs. Elles logeaient et travaillaient depuis trois ans environ, "C1______" étant arrivée en premier. Elles étaient chargées du ménage et de la lessive. Elles ne faisaient pas la cuisine, sauf exception quand elle leur demandait ce service. Elles logeaient dans la dépendance, étant précisé que "C1______" n'était présente que du dimanche au mercredi, travaillant chez une personne de nationalité italienne le reste du temps. Elles étaient très gentilles. Elle avait amené B1______ chez le dentiste à plusieurs reprises et la famille avait pris les frais en charge.

d.c.a. T______, née le ______ 1972, a expliqué que, depuis 2003, elle vivait à ______, à Thonex, avec son mari et ses enfants. Sa mère et son beau-père vivaient en République démocratique du Congo et ne passaient pas plus de deux mois par année à Genève. Depuis janvier 2019, sa sœur R______ vivait dans la maison de Jussy et cela devait également être le cas d'S______. T______ avait acheté cette maison au moyen d'une avance d'héritage de sa mère. A terme, ses sœurs auraient dû devenir propriétaires avec elle, mais le projet ne s'était pas concrétisé et elle cherchait à vendre la maison. Elle n'avait pas vécu à Cologny pendant que D______ y avait travaillé si bien qu'elle n'était pas en mesure de fournir des renseignements à son sujet. Elle connaissait "C1______" et "B1______". Une vivait à la maison, alors que l'autre n'y passait que deux ou trois nuits par semaine. Elles devaient travailler depuis deux ans environ. Il pouvait arriver qu'il n'y ait personne au domicile pendant trois mois et le rôle de celles-ci s'apparentait alors plus à du gardiennage. Elle ne connaissait rien de leurs conditions de travail. Elle n'échangeait que des banalités avec "B1______" et un peu plus avec "C1______". Leurs contacts avec elles étaient cordiaux et elle n'avait jamais senti qu'elles n'étaient pas contentes. Son beau-père s'occupait de payer les employées, sa mère ne traitant jamais d'affaires administrative et n'ayant aucune idée de ce domaine. Elle pensait que sa mère avait une bonne relation avec ses employées et ne criait pas ou ne les insultait pas quand elle leur demandait quelque chose. Elle leur offrait des petits cadeaux à Noël. Pour elle, les employées vivaient dans des conditions adéquates. Elle ne les avait jamais vu pleurer ou en situation de détresse. La maison avait coûté CHF 5'900'000.- environ et était grevée d'une hypothèque de CHF 4'500'000.-, sur laquelle elle payait les intérêts, à hauteur de CHF 7'100.- ou 7'500.- par mois. Sa mère devait parfois l'aider à assumer cette charge. Son beau-père payait les frais d'entretien liés au jardinage, alors qu'elle assumait ceux liés à d'éventuelles réparations. Elle était employée en qualité de commerciale de M______ à 50%, pour un salaire mensuel de CHF 7'000.- environ. Elle était l'intermédiaire entre les marques, généralement de montres, et les détaillants. Elle exerçait la même activité, à 50%, pour le compte de la société ______ , pour un salaire de CHF 6'900.-.

d.c.b. Le 28 septembre 2021, devant la police, T______ a confirmé être propriétaire de la maison de U______ depuis 2005. Celle-ci n'avait été habitée que depuis cette date. Ses sœurs y avaient vécu depuis 2019. Elle-même n'y avait jamais habité. La femme de ménage et sa sœur avaient un trousseau de clés. Les affaires qui se trouvaient dans la maison appartenaient à ses sœurs, sa mère ou son beau-père.

Déclarations de X______ à la police le 10 avril 2019

e. X______ a expliqué qu'il connaissait D______, qui s'était occupée de leur maison et du ménage. Il ne se souvenait plus des détails de son engagement, car cela remontait à quinze ou dix-huit ans en arrière. Lui et son épouse avaient dû être présents à cette occasion. L'intéressée avait entamé une longue procédure prud'homale à leur encontre, qui était désormais terminée. Il était tombé des nues lorsqu'ils avaient été condamnés. Elle vivait dans leur maison du chemin V______, à Cologny, et bénéficiait d'un jour et demi de congé par semaine et de quatre semaines de vacances. A cette période, leurs filles étaient scolarisées à ______ et leur employée vivait au rythme des enfants, s'occupant d'elles avant qu'elles ne partent pour l'école puis les couchant le soir. Son épouse et lui avaient confiance en D______, raison pour laquelle ils lui confiaient de temps en temps leurs filles, quand ils étaient absents, ainsi que leur maison. Il ne se souvenait plus s'il y avait eu un contrat écrit, mais ils avaient payé les assurances sociales. Il n'avait pas fait de demande de titre de séjour, ne sachant pas qu'il fallait le faire. A cette période, le couple et leurs filles, voyageaient énormément. Lorsqu'ils étaient absents, D______ devait s'occuper de la maison et profitait ainsi d'un logement gratuit, y compris lors des jours de congé. Il partait du principe que, si ces personnes étaient en Suisse, elles devaient avoir des papiers. Il a contesté les déclarations de la partie plaignante en lien avec ses horaires, son accès à la nourriture de la famille et les circonstances de la fin des rapports de travail. A cette occasion, il lui avait donné CHF 20'000.- pour l'aider et c'est elle qui avait décidé de partir. A sa connaissance, D______ avait un problème de santé et son épouse l'avait aidée à trouver un médecin. Il n'avait pas payé les sommes ressortant du jugement de la Cour des Prud'hommes car il n'avait pas un tel montant.

S'agissant de son interpellation, il a indiqué qu'il avait eu un doigt cassé suite à l'intervention de deux inspecteurs. Alors qu'il était assis dans un fauteuil, il avait demandé pourquoi la perquisition de son bureau était suspendue et il lui avait été répondu que, s'il n'obtempérait pas immédiatement, ils allaient le menotter. Comme il ne s'était pas levé, ils l'avaient brutalement plaqué au sol et lui avaient passé les menottes.

Les employées qui se trouvaient au domicile lors de la perquisition, soit "B1______" et "C1______", travaillaient à l'entretien de la maison et vivaient sur place. Son épouse et lui les avaient engagées ensemble, à des moments différents, sans établir de contrat écrit, ni payer de cotisations sociales et sans faire de demande d'autorisation de travail. Les employées détenaient les clés de la maison et le code de l'alarme et organisaient leurs tâches librement. "C1______" travaillait depuis quatre ans environ et logeait dans la maison trois jours par semaine, du dimanche matin au mercredi après-midi, ayant un autre employeur le reste du temps. Elle s'occupait du logement et du linge et était payée CHF 1'500.- par mois. Ses horaires étaient variables. Elle commençait vers 09h00, jusqu'à 13h00 ou 14h00, prenait une pause de deux heures et reprenait vers 16h00. Le soir, elle travaillait deux ou trois heures quand il y avait quelqu'un. En 2018, la maison avait dû être habitée une trentaine de jours et ses filles n'y logeaient pas en permanence. "B1______" était la sœur de "C1______" et était employée chez eux depuis deux ans. Elle travaillait toute la semaine mais avait congé le dimanche et un autre jour de la semaine. Elle commençait à 08h00 et avait les mêmes horaires que sa sœur. Elle percevait CHF 2'500.- par mois.

A______ était leur jardinier depuis dix ans. Il l'avait engagé avec son épouse. Il n'avait pas établi de contrat écrit, n'avait pas déclaré son employé et aucune autorisation de séjour n'avait été demandée. Celui-ci travaillait quatre jours par semaine, de 08h00 à 16h00 ou 17h00, avec une pause de midi, pour un salaire mensuel de CHF 2'000.-. Il organisait ses tâches comme il le voulait. Les trois employés précités ne lui avaient jamais parus en situation de faiblesse ou de dépendance. Ceux-ci n'avaient jamais demandé expressément à être déclarés aux assurance sociales mais le prévenu savait qu'ils étaient en contact avec des assistants sociaux. Son épouse et lui leur offraient des cadeaux en fin d'année et prenaient en charge leurs frais médicaux.

Déclarations de Y______ à la police le 10 avril 2019

f. Y______ a expliqué que, lors de sa première rencontre avec D______, aux alentours de l'année 2003, celle-ci lui avait parlé de sa détresse et du fait qu'elle cherchait du travail pour s'en sortir. Elle lui avait dit être originaire de Bolivie ou du Pérou et être venue avec un Visa. Une personne de sa famille devait lui obtenir des papiers espagnols. Elle l'avait engagée comme femme de ménage et lui avait également confié la tâche de s'occuper des enfants. Elle a décrit les conditions de travail et les horaires, le principe étant qu'elle organisait ses tâches comme elle le voulait pour que la maison soit propre en tout temps. Sa journée de travail se terminait après avoir couché les enfants, vers 20h00. Il pouvait arriver qu'elle lui demande de prolonger son horaire s'il y avait des invités. D______ avait le choix d'accepter et savait que les heures supplémentaires seraient payées. Elle avait le droit à deux heures de pause – pendant lesquelles elle n'avait pas besoin de rester à disposition - deux jours de congé par semaine et quatre semaines de vacances par année. Pendant les vacances scolaires, la maison était vide. En leur absence, elle ne savait pas quels étaient les horaires de son employée. En 2008, D______ avait demandé à prendre congé définitivement d'eux pour des raisons personnelles, ce qu'ils avaient accepté. Elle avait été très étonnée de la procédure engagée contre elle et son époux après la fin des rapports de travail. D______ lui avait dit qu'elle était désolée, mais que cela lui permettait de rester en Suisse.

S'agissant de la maison de Jussy, sa fille T______ l'avait acquise avec son aide financière. La fille du couple, R_____, qui avait vécu en Hollande auparavant, y logeait depuis janvier 2019. Depuis lors, la prévenue était plus souvent à Genève que les huit années précédentes. "C1______" et sa sœur "B1______" venaient du Nicaragua. Elle avait engagé "C1______" quatre ans auparavant, pour travailler dans la maison de U______. Après une période d'essai de trois jours, la précitée avait manifesté son intérêt à rester à son service, vu le calme qui régnait dans la maison. Elle s'occupait de l'entretien des textiles de la famille les lundis, mardis et mercredis et dormait sur place. Elle ne savait pas combien d'heures elle travaillait mais ses horaires devaient être normaux, soit environ huit heures par jour. Aucun contrat de travail n'avait été signé car C______ ne le souhaitait pas et, de manière générale, ne souhaitait rien payer en Suisse. "C1______" avait fait venir sa sœur "B1______" en Suisse car elle craignait pour sa sécurité au Nicaragua. A la demande de la première nommée, le couple avait engagé "B1______" pour nettoyer la maison. Elle habitait sur place et était libre de ses mouvements. Son horaire commençait à 08h30 ou 09h00 et se terminait vers 20h30, du lundi au vendredi. Elle prenait ses pauses quand elle voulait, tant que la maison était propre. Etant fréquemment absente, elle n'avait pas les moyens de contrôler les horaires effectués par ses employées. Elle ne savait pas si "B1______" avait des autorisations de travail, mais celle-ci était également employée par des policiers, chez qui elle logeait, et dans des bureaux. Elle était très contente du travail des deux sœurs, qui étaient très gentilles et honnêtes et n'avaient jamais formulé la moindre plainte. Elle et son mari avaient toujours essayé d'être justes avec elles, prenant soin d'elles, payant notamment des factures de dentiste et des médicaments. Elles étaient logées gratuitement, sans que cela ne soit déduit de leur salaire.

A______, de nationalité bolivienne, était leur jardinier depuis plus de huit ans, ayant pour tâche de faire en sorte que le parc de la propriété soit toujours bien entretenu. Il nettoyait parfois la voiture également. Son souvenir n'était pas précis, mais elle avait vraisemblablement procédé à son engagement. Il était présent les lundis, mardis et jeudis ou vendredis, en fonction des saisons. Il pouvait gérer son horaire, tant que le travail était fait. Son époux et elle s'entendaient bien avec lui et étaient satisfaits de son travail. Elle ne connaissait pas ses conditions salariales et ne savait pas s'il avait un statut légal en Suisse.

Déclarations devant le Ministère public

D______

g.a. Le 18 avril 2019 devant le Ministère public, D______ a confirmé sa plainte. Elle avait dû venir en Suisse, car Y______ l'attendait pour travailler, comme discuté avec sa nièce. Elle avait été abandonnée par son époux dans son pays et avait deux filles à charge, l'une née en 1982, l'autre en 1985. Elle a précisé que son intention n'était pas de profiter de la situation, mais espérait que ce qui lui était dû lui soit payé et que les époux X______/Y______ comprennent qu'ils lui avaient fait du mal. Par deux occasions notamment, au début de l'année 2008, X______ avait voulu lui donner des coups. Y______ lui avait continuellement promis qu'elle solliciterait un permis, mais elle ne l'avait jamais fait. En juillet 2008, elle était tombée malade et un cancer avait été diagnostiqué. Elle avait demandé à Y______ si elle pouvait donner son adresse pour l'assurance, ce que celle-ci avait refusé. Par la suite, X______ avait payé CHF 2'600.- à une assurance, mais elle n'en savait pas plus, celui-ci ayant tout arrangé. En même temps, les époux X______/Y______ l'avaient licenciée. Comme elle ne savait pas où aller, ils l'avaient emmenée dans un hôtel pour quinze jours. Après cette période, X______ lui avait trouvé un autre hôtel, où une carte de la police lui avait été remise. Elle avait été arrêtée, mise en prison et avait dû payer CHF 10'000.-, car elle n'avait pas de papiers. Elle serait traumatisée toute sa vie par cette expérience.

C______

g.b Le 10 mars 2020 devant le Ministère public, C______ a confirmé avoir travaillé pour la famille X______/Y______ d'août 2014 au 10 avril 2019, de 08h30 à 23h00. Sa sœur avait commencé le 16 mars 2016. Elle a décrit Y______ comme étant exigeante, presque agressive. Elle avait eu le sentiment d'être une esclave. Le nettoyage n'était jamais terminé. A 23h00, il y avait encore des choses à faire, suite aux instructions de Y______. Elle avait malgré tout demandé à sa sœur de la rejoindre parce que celle-ci avait besoin d'argent. Vu la pauvreté régnant dans leur pays, celle-ci gagnerait plus avec cet emploi en Suisse. Elle n'avait pas le droit de sortir de la maison, sans quoi ce temps aurait été déduit de ses heures de travail. Elle avait payé les soins de dentiste de sa sœur. Elles devaient travailler même lorsqu'elles étaient malades. Elle n'aurait pas osé demander un jour de congé pour maladie, par peur d'être renvoyée. En l'absence des époux X______/Y______, elles sortaient toutes les affaires des armoires, pour trier et nettoyer. Les instructions étaient très strictes sur la façon de gérer les vêtements. Les époux étaient régulièrement présents à la propriété et recevaient fréquemment des invités. Elle a décrit ses conditions de logement et indiqué qu'elle n'avait pas d'autre emploi pendant cette période avant qu'il ne lui soit rappelé qu'elle avait indiqué le contraire à la police. Elle a alors confirmé avoir été engagée par un autre employeur, à raison de quatre heures tous les quinze jours. Elle travaillait plus que ce qu'avait indiqué X______, soit de dimanche à mercredi, indépendamment du fait que les époux X______/Y______ soient présents ou non. Y______ lui avait demandé de travailler le dimanche. C______ a produit deux quittances, en lien avec le paiement de la facture de CHF 383.60, établie par le Dr ______, à son nom, pour des soins dentaires du 14 au 18 février 2019.

B______

g.c. Le 10 mars 2020 devant le Ministère public, B______ a expliqué avoir été engagée au service des époux X______/Y______ entre le lundi 12 mars 2016 et le mois d'avril 2019. En discutant avec sa sœur avant son engagement, elle avait compris que le nombre d'heures à effectuer allait être pénible mais elle avait accepté car elle voulait une vie meilleure. Au Nicaragua, elle ne travaillait pas et vivait dans la pauvreté. Elle n'avait jamais exercé comme femme de ménage auparavant. Son horaire dans la maison s'étendait de 08h00 à 23h00, voire minuit, sans pause. Elle et sa sœur devaient préparer le repas de midi de Y______ puis continuer à nettoyer jusqu'à la fin de la journée. La maîtresse de maison pouvait être gentille ou très exigeante, voulant que tout se fasse vite et s'énervant si le linge était mal repassé, par exemple. Au début, elle avait eu un peu peur d'elle mais ce sentiment s'était estompé, car elle s'était renforcée. Elle se rendait en France pour faire ses courses trois fois par semaine. Après l'épisode de la douane, dont elle avait parlé à la police, Y______ lui avait dit qu'elle ne pouvait pas la déclarer, certaines personnes obtenant le permis mais n'étant pas reconnaissantes par la suite. Elle pouvait sortir avec l'autorisation de Y______, ce qui n'était pas le cas de sa sœur. Y______ appelait trois fois par jour, sur le téléphone fixe, pour prendre des nouvelles. Les époux X______/Y______ n'avaient pas payé ses frais de dentiste. Le dimanche était un jour de congé pour elle, mais Y______ lui demandait quand-même de travailler de temps en temps, en cas de fêtes ou d'anniversaires, sans salaire supplémentaire. Sa sœur travaillait tous les dimanches à partir de 08h00. Elle a confirmé les déclarations de celle-ci sur leurs tâches en l'absence des époux X______/Y______ et sur la grande fréquence des invités à la maison lorsqu'ils étaient présents. Elle a toutefois indiqué par la suite que ces dîners avaient lieu peu fréquemment. En revanche, le couple X______/Y______, leurs filles et leur compagnons respectifs mangeaient à la maison tous les soirs et elle cuisinait pour la famille. Lorsque les époux étaient absents, sa sœur lui disait quelles tâches elle devait accomplir. Elle prenait également les instructions de Y______ par téléphone.

A______

g.d. Le 18 avril 2019 devant le Ministère public, A______ a confirmé sa plainte et ses précédentes déclarations. Il a précisé qu'il avait commencé à travailler le samedi à la place du mercredi en 2012. Les époux X______/Y______ vivaient dans cette maison, mais voyageaient très fréquemment, à savoir la moitié du temps en général et, en 2018, 60% du temps environ. Il n'y avait pas de variation dans son horaire de travail avec les saisons. Il avait effectivement droit à quatre semaines de vacances. Il avait refusé la baisse de salaire proposée, car elle aurait entrainé des difficultés pour entretenir sa famille. A la question de savoir qui lui donnait des instructions, il a indiqué qu'il connaissait les tâches à accomplir et, pour certaines d'entre elles, il se mettait d'accord avec Y______. Lorsque celle-ci n'était pas là, elle lui téléphonait. Elle le faisait souvent, à savoir trois fois par semaine. Il était triste pour ce qui arrivait dans cette procédure, non seulement pour lui, mais également pour ses patrons, qui devaient passer des moments difficiles. Il avait travaillé pour d'autres employeur, avec un tarif de CHF 25.- par heure. Sa compagne était rentrée au pays avec leur enfant en 2014. Ils avaient été ensemble pendant quinze ans. Il vivait seul, partageant un appartement avec un ami, payant sa part mensuelle entre CHF 720.- à 750.-. Il envoyait chaque mois CHF 300.- pour son enfant et CHF 200.- pour ses parents dans son pays.

X______

h.a. Le 11 avril 2019 devant le Ministère public, X______ a déclaré être abasourdi par les charges retenues contre lui. Il a expliqué que, quelques temps après le départ de D______, il avait été contacté par un dénommé "______", du syndicat sans frontières, qui lui avait fait une sorte de chantage, en lui disant qu'il allait lui faire payer le fait d'employer des sud-américain sans papiers. Après le jugement civil concernant D______, il n'avait pas pu imaginer qu'employer des personnes sans papier pouvait entrainer les charges ressortant de sa mise en prévention. Il comprenait que lui et son épouse avaient pu commettre des erreurs, comme ne pas avoir déclaré des salaires, ne pas avoir payé les charges sociales, ne pas avoir vérifié si les futurs employés avaient des autorisations de travail, mais en aucun cas ils n'avaient fait venir des personnes en Suisse. Il n'avait pas le sentiment d'avoir imposé les horaires décrits par les parties plaignantes. La maison de Jussy avait dû être habitée trente à quarante jours en 2018. Il ne voyait pas comment ils auraient pu faire subir des pressions psychologiques, alors qu'il n'y avait personne à la maison. Il pensait avoir eu des rapports cordiaux avec tous ses employés, qui auraient pu partir s'ils l'avaient voulu. D'autres personnes étaient venues, n'avaient pas accepté les conditions et étaient reparties. L'engagement des employés se faisait grâce au bouche à oreille. Le fait que plusieurs personnes d'origine sud-américaine se soient présentées chez eux au cours des dernières années n'était certainement pas dû au hasard. Elles devaient se sentir considérées et estimer vivre dans une bonne maison avec du confort.

Il a confirmé ses déclarations en lien avec D______ et A______. "C1______" et "B1______" travaillaient seules et s'organisaient en leur absence. Il n'y avait pas assez de travail pour qu'elles soient occupées de 08h00 à 24h00. "C1______" dormait à la maison trois nuits par semaine. Elle commençait à 09h00 alors que sa sœur commençait à 08h00. En général, vers 13h00 ou 14h00, elles mangeaient et faisaient une pause jusqu'au soir. Lorsque la famille était présente à Genève, ce qui était rare, elles servaient le souper qu'elles ne préparaient pas.

S'agissant de son interpellation, X______ a indiqué que les policiers lui avaient expliqué à de nombreuses reprises qu'il devait être présent lors de cette opération qui avait lieu dans sa villa. A un moment donné, ils avaient souhaité suspendre la perquisition, pour en entamer une autre dans sa société. Il leur avait dit de terminer celle-ci d'abord. Ils lui avaient répondu que ce n'était pas à lui de diriger la procédure et que, s'il ne les suivait pas, ils le menotteraient. Il avait à nouveau demandé des explications et des agents lui avaient sauté dessus et plaqué au sol. Il avait été paniqué et tétanisé. Il avait juste voulu bien comprendre ce qui se passait. Il n'avait jamais frappé personne et avait tenté de se dégager. Les policiers avaient été très brutaux, comme si c'était lui qui les avait attaqués, alors que cela avait été le contraire. De manière générale, il a précisé que les employés ne se trouvaient pas dans une situation de faiblesse lorsqu'ils avaient été engagés. Aucun salaire horaire n'avait été discuté, le salaire convenu étant prévu par mois. Les employées travaillant dans la maison bénéficiaient d'un logement et de jours de congé. Elles devaient travailler entre six et dix heures par jour.

h.b. Le 18 avril 2019 devant le Ministère public, X______ a précisé que les 116 heures supplémentaires retenues pour D______ lui semblaient fantasques, compte tenu du fait que la maison était vide durant six mois de l'année. Il a cependant reconnu devoir payer les montants résultant de l'arrêt de la Cour d'appel, tout en n'étant pas d'accord avec les calculs opérés. Il s'est engagé envers D______ à les verser. Il a confirmé ses précédentes déclarations en lien avec C______, précisant qu'elle était payée CHF 1'500.- par mois pour trois jours d'occupation, et B______ payée CHF 2'200.- pour cinq jours d'occupation. A______ recevait CHF 2'000.- pour quatre jours de travail. Il commençait à 08h00 et devait effectuer entre six et huit heures par jour, en fonction des saisons. Son salaire restait toutefois constant. Il travaillait les lundis, mardis, jeudis et vendredis. Son épouse et lui avaient été satisfaits du travail des quatre employés. Ils étaient honnêtes, bons travailleurs et ne s'étaient jamais plaints de quoique ce soit. Les époux se sont engagés à régler les montants des salaires, à fixer en application des normes topiques, et à régler les charges sociales.

h.c. Le 10 mars 2020 devant le Ministère public, X______ a confirmé ses précédentes déclarations, notamment en lien avec les horaires des employés. Les différents membres de la famille n'étaient pas souvent présents dans la maison et il n'y avait pas de dîner avec six personnes tous les soirs. Ses filles n'étaient rentrées vivre à Genève que le 1er janvier 2019. Il avait toujours entendu sa femme dire aux employés qu'elle leur donnerait des jours de congé supplémentaires lorsqu'elle leur demandait de travailler le dimanche, ce qui n'arrivait pas fréquemment.

Y______

i.a. Le 11 avril 2019 devant le Ministère public, Y______ a donné des indications sur les conditions de travail de D______. Elle n'avait pas su que son employée avait un cancer. Comme elle n'était pas souvent présente à Genève, celle-ci pouvait s'organiser comme elle voulait. D______ lui avait demandé de travailler pour elle car elle parlait également espagnol et qu'elle était "perdue" à Genève, ne parlant pas français. Elle était "un peu en détresse", ce qui l'avait touchée. A la fin, D______ avait commencé à fréquenter un homme et elle avait changé d'attitude, étant plus ouverte et souriante. Elle a contesté avoir été derrière elle pour la surveiller. Elle lui avait simplement appris comment faire les choses correctement. Elle pensait que ses employés avaient été influencés par le syndicat.

Elle a admis avoir employé C______ et B______, alors qu'elles étaient en situation irrégulière en Suisse et ne pas avoir payé les cotisations sociales. Confrontée au fait qu'elle avait agi ainsi alors qu'elle et son époux avaient été condamnés à payer des montants importants à D______, elle a admis que cela n'était pas normal et le regrettait. Elle n'avait pas eu de mauvaise intention et avait engagé ces personnes "par pitié". Elle leur offrait un logement très confortable. Comme elle était régulièrement absente de la maison pour de longues périodes, elle ne voyait pas comment elle aurait pu les exploiter. C______ avait une fille malade. Elle pleurait toute la journée et avait besoin d'argent pour la faire soigner. B______ travaillait de 08h00 à 17h00 ou 18h00, avec une pause déjeuner, cinq jours par semaine. Il était possible que l'horaire de cette dernière était plus chargé durant les périodes où elle-même logeait dans la maison, mais elle lui disait toujours de récupérer ses heures. A______ travaillait quatre heures, parfois six ou huit et s'organisait comme il voulait.

i.b. Le 18 avril 2019 devant le Ministère public, Y______ s'est déterminée comme son mari. D______ avait été une travailleuse honnête et était une personne qu'elle appréciait et respectait énormément.

i.c. Le 10 mars 2020 devant le Ministère public, après avoir entendu les déclarations de C______ et B______, Y______ a précisé qu'elle ne recevait que rarement du monde à la maison. Elle n'aimait pas cuisiner et mangeait à l'extérieur à midi. Lorsqu'elle restait à la maison le soir, elle mangeait de façon frugale. Il pouvait y avoir quatre à cinq événements par année dans la maison et elle engageait alors un cuisinier et des serveurs, leurs employés étant sollicités pour le service. Elle a reconnu être exigeante. Comme elle n'était pas souvent présente, il fallait entretenir les affaires. Lorsqu'elle n'était pas là, elle laissait ses employées s'organiser et gérer leur temps.

j. Il ressort encore de la procédure les éléments suivants :

j.a. Le 19 septembre 2008, un contrat de travail a été conclu entre M______ et P______. Cette dernière avait été engagée comme "gouvernante polyvalente de l'employeur", à partir du 1er novembre 2008, pour un salaire de CHF 58'500 par année, payable en treize mensualités. Il était précisé que les assurances sociales prévues par la loi étaient prises en charge par l'employeur et l'employé, en conformité avec les dispositions légales, et que l'employeur assurait l'employé contre les accidents et la perte de gain en cas de maladie.

j.b. Selon le certificat des HUG du 11 avril 2019, X______ avait subi "le matin-même", au cours de la perquisition de la maison de sa fille, un saignement superficiel au niveau de l'arcade droite, deux dermabrasion au niveau de la tempe et front droit, différents hématomes et une fracture intra-articulaire d'un doigt.

j.c. Selon le Jugement du Tribunal administratif de première instance du 29 octobre 2018 sur assujettissement à l'impôt, en mars 2009, l'administration fiscale cantonale genevoise a informé X______ qu'elle avait ouvert des procédures de rappel et de soustraction des impôts fédéral direct, cantonal et communal, dus pour les années 2001 à 2007. Dans le cadre de cette procédure, l'intéressé avait notamment déclaré être actionnaire unique de M______, dont le siège est à Genève et qui avait une activité de centrale d'achat, principalement de parfums et de bijoux en Afrique, même s'il avait par la suite contesté être actionnaire. Il ressort également de cette procédure que X______ avait des liens avec les sociétés ______, appartenant à sa famille, active dans le domaine minier, ainsi qu'avec N______ et ______, actives dans le commerce de montres de luxe. Son épouse était active dans le domaine minier en Afrique.

En lien avec D______

j.d.a. Le 17 novembre 2008, D______ a ouvert action aux Prud'hommes. Après une longue procédure, l'affaire s'est conclue par un jugement de la Cour de justice du 6 janvier 2017. Il ressort de cet arrêt, définitif et exécutoire, que D______ a travaillé comme employée de maison, à plein temps, dans la villa de quatre étages, occupée par la famille X______/Y______, à Cologny, comprenant environ douze pièces et six salles de bains. X______ et Y______ étaient absents environ la moitié de l'année, en plus des vacances scolaires, lors desquelles les deux filles du couple étaient également en déplacement. Les filles s'absentaient également un week-end sur deux. Au printemps 2018, le couple X______/Y______ avait souhaité légaliser la situation de leur employée au regard des cotisations sociales et des impôts. Ainsi, le 22 mai 2008, ils avaient versé CHF 24'046.35 de rattrapage cotisations AVS/AI/APG/AC. Le 19 juin 2008, ils avaient payé des arriérés d'impôts. L'autorité d'appel a établi la comparaison suivante entre les salaires prescrits par le Contrat-type de travail pour les travailleurs de l'économie domestique à temps complet et à temps partiel (ci-après : CTT-TED) et les salaires effectivement perçus par D______, auxquels ont été ajouté, la valeur des prétentions en nature prévue dans le CTT-TED, la moitié des cotisations sociales et l'impôt à la source payées :

-          du 1er avril au 31 décembre 2003, le salaire brut selon le CTT-TED était de CHF 29'700.- (3'300.- x 9), alors que l'employée avait reçu CHF 24'375.60 (2'708.40 x 9), soit une différence de CHF 5'324.40;

-          de janvier à juin 2004, le salaire brut selon le CTT-TED était de CHF 19'800.- (3'300.- x 6), alors que l'employée avait reçu CHF 16'512.30 x 6), soit une différence de CHF 3'287.70;

-          de juillet à décembre 2004, le salaire brut selon le CTT-TED était de CHF 20'400.- (3'400.- x 6), alors que l'employée avait reçu CHF 16'512.30 (2'752.60 x 6), soit une différence de CHF 3'887.70;

-          pour 2005, le salaire brut selon le CTT-TED était de CHF 40'800.- (3'400.- x 6), alors que l'employée avait reçu CHF 35'796.60 (2'983.05 x 12), soit une différence de CHF 5'003.40;

-          pour janvier 2006, le salaire brut selon le CTT-TED était de CHF 3'400.-, alors que l'employée avait reçu CHF 3'172.45, soit une différence de CHF 227.55;

-          pour février à décembre 2006, le salaire brut selon le CTT-TED était de CHF 37'730.- (3'430.- x 11), alors que l'employée avait reçu CHF 34'896.95 (3'172.45 x 11), soit une différence de CHF 2'833.05;

-          pour janvier à mars 2007, le salaire brut selon le CTT-TED était de CHF 10'290.- (3'400.- x 3), alors que l'employée avait reçu CHF 11'214.60 (3'738.20 x 3), soit un salaire plus élevé de CHF 924.60;

-          pour avril à décembre 2007, le salaire brut selon le CTT-TED était de CHF 32'760.- (3'640.- x 9), alors que l'employée avait reçu CHF 33'643.80 (3'738.20 x 9), soit un salaire plus élevé de CHF 924.60;

-          pour 2008, le salaire brut selon le CTT-TED était de CHF 26'320.- (3'760.- x 7), alors que l'employée avait reçu CHF 27'304.55 (3'900 x 7), soit un salaire plus élevé de CHF 984.55, étant précisé qu'aucun salaire n'a été versé pour le mois d'août 2008.

Un montant de CHF 24'233.80 brut était dû à D______ au titre des salaires impayés. Le salaire supérieur à la CTT-TED, versé en 2007 et 2008 ne pouvait pas compenser les manques antérieurs, faute de déclarations dans ce sens.

La Cour a ensuite examiné la question des heures supplémentaires. Selon le CTT-TED, la durée hebdomadaire de travail était de 48 heures de 2002 à 2005 et de 46 heures de 2006 à 2008. Selon le droit en vigueur durant les rapports de travail, les heures supplémentaires qui n'étaient pas compensées par un jour de congé étaient payées avec une majoration de 25% au moins du salaire global. Les heures supplémentaires effectuées les dimanches et les jours fériés étaient majorées de 50%. La Cour a ainsi retenu que l'employée avait effectué au plus 1'716 heures supplémentaires par année, duquel il fallait retrancher 273 heures au titre des pauses quotidiennes de 1h30 par jour, soit un maximum de 1'443 heures supplémentaires. Elle a ensuite considéré que l'employée pouvait compenser une partie des heures supplémentaires effectuées, en travaillant moins pendant les périodes lors desquelles ses employeurs ne se trouvaient pas à Genève, et repris le chiffre fixé par la première instance de 429 heures supplémentaires compensées. Il restait ainsi 1'014 heures supplémentaires, représentant mensuellement 84,5 heures, à rémunérer, avec une majoration de 25%, de la manière suivante :

-          pour avril 2003 à juin 2004, 1'267, 5 heures, représentant CHF 25'159.45;

-          pour juillet 2004 à décembre 2005, 1'521 heures, représentant CHF 31'104.45;

-          pour janvier 2006 à décembre 2007, 2'028 heures, représentant CHF 43'602.-;

-          pour janvier à juillet 2008, 591 heures, représentant CHF 14'491.75.

Les employeurs étaient ainsi redevables de CHF 114'358.10 envers D______, au titre des heures supplémentaires non payées. Il a enfin été admis que l'employée n'avait pas pris de vacances et qu'une indemnité de CHF 22'107,40 lui était dès lors due.

j.d.b. Par arrêt du 29 mars 2023, le Tribunal fédéral s'est prononcé sur la mainlevée définitive de l'opposition formée par X______ au commandement de payer portant sur les montants retenus dans le dispositif de l'arrêt de la Cour du 6 janvier 2017. La haute Cour a jugé que D______ était la créancière du salaire brut, en application de l'arrêt cantonal rendu en la matière. En revanche, l'employeur était en droit de faire valoir, à titre d'exception au sens de l'art. 81 al. 1 LP, son obligation de verser les cotisations sociales aux institutions concernées, dont il était le seul débiteur. Il suffisait de prouver par titre la seule étendue de l'obligation de s'acquitter des cotisations sociales, et non le paiement effectif des cotisations avant celui du salaire net. L'affaire a été renvoyée à l'autorité cantonale pour que celle-ci détermine si X______ avait démontré l'étendue de son obligation de payer les cotisations sociales et légales et, le cas échéant, les montants déductibles.

En lien avec A______

j.e.a. Dans le cadre de l'opération Papyrus, A______ a déposé une demande d'autorisation de séjour le 2 novembre 2018 et a obtenu une autorisation temporaire de travailler le 27 mai 2019.

j.e.b. Par courrier du 17 mai 2019, A______ a fait valoir ses prétentions auprès du Conseil des époux X______/Y______. Il a notamment exposé que, d'avril 2009 à 2013, il avait travaillé 8 heures par jour, et bénéficiait d'une heure de pause à midi. Il avait été engagé à raison de 5 jours par semaine et avait ainsi effectué 40 heures par semaine. A partir de 2012, il avait eu congé le mercredi et avait travaillé le samedi. Du 21 avril 2009 au 31 décembre 2012, il avait été payé CHF 2'000.- par mois. Dès janvier 2013, il avait eu une augmentation de salaire et avait gagné CHF 2'200.-. Dès janvier 2015, il avait bénéficié d'une nouvelle augmentation, son salaire mensuel passant à CHF 2'500.-. En 2018, son employeur avait abruptement réduit son engagement, lui demandant de ne venir travailler que quatre jours par semaine, pour un salaire de CHF 2'000.-. Comparant ces salaires au salaire minimum prévu dans le contrat type de travail, il a chiffré son dommage à hauteur de CHF 247'375.50 (51,56% de ce qu'il aurait dû toucher). A______ a également fait valoir les prétentions contractuelles ou postérieures à la période pénale et conclut à ce que X______ et Y______ soient condamnés à lui payer CHF 5'000.- à titre de tort moral.

j.e.c. Par courrier du 4 mai 2022, A______ a chiffré les prétentions civiles qu'il entendait faire valoir dans le cadre de la procédure pénale, en se référant à son courrier du 17 mai 2019. Il a demandé à ce que les prévenus soient condamnés à lui verser les sommes de CHF 535'220.50, sous déduction de CHF 263'000.- perçus, à titre de réparation du dommage matériel subi et CHF 5'000.- à titre de réparation de son tort moral, avec intérêts à 5% l'an, calculé dès la date moyenne du 30 juillet 2014, ainsi qu'à une indemnité pour ses frais de défense.

j.e.d. Par demande en paiement du 15 février 2022, A______ a ouvert une procédure devant le Tribunal des Prud'hommes, concluant notamment au versement d'un montant de CHF 271'820.-, au titre de la différence entre le salaire perçu et le salaire minimal fixé par le contrat type. Le 14 juin 2022, cette demande a été amplifiée à CHF 294'129.-. A______ a produit une attestation, non datée, établie par ______, selon laquelle il avait travaillé dans la propriété de celle-ci, à Onex, de septembre 2008 à juin 2015, et avait effectué un excellent travail.

Procédure

Détention et mesures de substitution

k.a.a X______ et Y______ ont été arrêtés le 10 avril 2019 et placés en détention provisoire le 11 avril 2019.

k.a.b. Par ordonnance du 18 avril 2019, le Ministère public a ordonné la mise en liberté des époux X______/Y______ assortie des mesures de substitution suivantes :

- déférer à toute convocation du pouvoir judiciaire;

- fournir de suretés de CHF 150'000.-, à verser, conjointement et solidairement, par les deux époux, en main du pouvoir judiciaire;

- dépôt en mains du procureur de leurs passeports et documents d'identité;

- interdiction de contacts avec un certain nombre de personnes liée à la procédure.

k.a.c. Par ordonnance du 23 avril 2019, le Tribunal des mesures de contrainte (ci-après: TMC) a confirmé les mesures précitées et les a régulièrement prolongées par la suite, hormis l'obligation de dépôt des passeports et papiers d'identité, qui a été levée le 8 juin 2021.

k.a.d. Par courrier du 29 avril 2019, le Conseil des prévenus a confirmé que son étude, ______, avait procédé au virement d'un montant de CHF 150'000.- en main du pouvoir judiciaire, à titre de caution. Les Services financier du Pouvoir judiciaire ont confirmé la réception de ce montant le 30 avril 2019.

k.a.e. Le 18 juin 2019, l'Office des poursuites a avisé les services financiers qu'il procédait à un séquestre civil en leurs mains, à concurrence de CHF 165'749.30, plus intérêts et frais, sur les suretés de CHF 150'000.-, versées par les époux X______/Y______, et sur les montres et bijoux portés à l'inventaire du 11 avril 2019.

Séquestres et scellés

l.a. La perquisition de la maison de Jussy, effectuée le 10 avril 2019, dès 06h30, a donné lieu à l'établissement de sept inventaires, contenant de nombreux documents et du matériel informatique, tels des ordinateurs, des téléphones portables, des tablettes et des clés USB.

l.b. Les 10 et 11 avril 2019, les époux X______/Y______ ont demandé la mise sous scellés des objets et documents saisis au domicile de Jussy, vu l'absence de pertinence pour la procédure desdits documents et du respect de leur sphère privée s'agissant des pièces saisies à Jussy et au motif supplémentaire du secret des affaires pour ce qui est des pièces saisies dans les locaux des Accacias.

l.c. Selon le rapport de renseignement du 17 avril 2019, 202 bijoux et montres ont également été saisis dans un coffre-fort de la villa des époux X______/Y______. Selon le rapport du 18 novembre 2019, la valeur de ces 202 pièces a été estimée à CHF 7'942'311.- par le Service des bijoux de la police. Les prix catalogues avaient été pris en considération pour les bijoux et les montres de marques. Pour le surplus, l'estimation se basait sur les poinçons de maître qui déterminaient la provenance, les cours de l'or et des diamants selon le "RAPAPORT Diamond Report", document international dédié aux professionnels, rendant compte des fluctuations du cours du diamant. Le rapport du 26 juin 2020 confirmaient que les bijoux étaient la propriété du couple X______/Y______ et mentionnaient le prix catalogue d'un certain nombre de montres et de bijoux.

S'agissant du matériel informatique et des documents séquestrés

l.d.a Le 29 avril 2019, le Ministère public a saisi le TMC d'une demande de levée de scellés s'agissant des appareils informatiques et des documents saisis lors de la perquisition de la maison de Jussy.

l.d.b. En date des 27 juin 2019, 29 novembre 2019 et 23 décembre 2020, les procureurs qui ont successivement été en charge de la procédure ont demandé la suspension de l'examen de la procédure de scellés, en raison de pourparlers évoqués par les parties. Le 3 juin 2021, le Ministère public a demandé la reprise de la procédure, compte tenu de la prescription et du fait que les négociations n'avaient toujours pas abouti.

l.d.c. Après un premier ciblage visant la documentation papier, deux ordonnances de levée partielle des scellés concernant cette documentation ont été rendues le 19 octobre 2022 par le TMC.

l.d.d. Par courrier du 1er décembre 2022 adressé au TMC, le Ministère public a réitéré la demande de levée de scellé, à tout le moins en lien avec les téléphones fonctionnels saisis.

l.d.e. Le tri effectué par le TMC dans les téléphones portables a notamment permis d'identifier divers éléments de contact entre l'un ou l'autre des époux X______/Y______ et trente-sept personnes qui semblaient avoir travaillé dans le contexte de l'économie domestique. Onze d'entre elles étaient inscrites dans le répertoire des téléphones avec leur prénom, suivi du terme "bonne" et seize avec leur prénom, suivi du terme "groom". Ces éléments avaient été enregistrés sur une clé USB et mis à disposition du conseil des prévenus le 31 janvier 2023. Le 2 février 2023, une nouvelle clé USB avait été transmise, contenant des échanges entre les époux X______/Y______. Les prévenus se sont opposés à la levée des scellés sur ces éléments.

l.d.f. Par ordonnance de levée partielle de scellés du 6 avril 2023, les scellés demandés par les prévenus ont été levés sur 5'857 éléments, lesquels ont été enregistrés sur une clé USB. Ils ont été maintenus sur le solde des éléments contenus dans les appareils.

l.d.g. Après avoir sollicité les parties concernées sur l'existence d'un recours contre l'ordonnance précitée, le 7 juin 2023, la Direction de la procédure du Tribunal de police a versé la clé USB, contenant les éléments sur lesquels les scellés avaient été levés par le TMC, au dossier.

S'agissant des montres et bijoux séquestrés

l.e.a. Suite à l'avis de prochaine clôture du Ministère public du 13 avril 2022, les prévenus ont sollicité par pli du 16 mai 2022, une expertise pour déterminer la valeur vénale réelle des montres et bijoux séquestrés.

l.e.b. Le 24 janvier 2023, les prévenus ont sollicité du Ministère public la levée partielle du séquestre portant sur les montres et les bijoux, à concurrence d'au moins CHF 7'500'000.-, la mesure de contrainte n'étant pas justifiée dans son ampleur.

l.e.c. Le 27 janvier 2023, le Ministère public a refusé la requête en affirmant qu'il appartiendrait au Tribunal de statuer sur le sort des objets séquestrés et les prévenus ont déposé un recours contre cette ordonnance le 9 février 2023.

l.e.d. Le Ministère public a renvoyé les prévenus en jugement par acte d'accusation du 7 février 2023. Par ordonnance séparée du même jour, envoyée ultérieurement aux prévenus, la demande d'expertise a été refusée.

l.e.e. Par arrêt du 24 avril 2023, la Chambre pénale de recours (ci-après: CPR) a partiellement admis le recours. Elle a constaté qu'à teneur de l'acte d'accusation, ni les frais de la procédure ni les prétentions civiles des parties plaignantes à ce stade n'apparaissaient atteindre la contrevaleur des bijoux et montres saisis, telle qu'estimée en l'état du dossier. Faute d'explications du Ministère public, il n'était pas possible d'apprécier si la contrevaleur des objets saisis était proportionnée ou non. Cela étant, par économie de procédure compte tenu de la proximité de l'audience de jugement, la CPR a renoncé à annuler la décision et à renvoyer la cause au Ministère public précisant qu'il appartiendrait au juge du fond de statuer sur les réquisitions du Ministère public visant au maintien du séquestre sur les bijoux et à leur confiscation.

C. Procédure devant le Tribunal

a.a Le 15 mars 2023, le Tribunal a envoyé aux parties les mandats de comparution et avis en vue de l'audience de jugement fixée les 11 et 12 mai 2023.

a.b. Le 10 mai 2023, le Conseil de X______ a sollicité un report d'audience, indiquant que son mandant avait dû être hospitalisé en République du Congo. Celui-ci n'avait pas pu effectuer le déplacement pour l'audience du lendemain et son épouse était restée auprès de lui. A ce courrier était joint un certificat médical établi le 9 mai 2023 par le Médecin-Colonel ______, de l'Hôpital Général ______, selon lequel X______ présentait des douleurs lombosciatiques gauches très intenses, invalidantes, empêchant tout mouvement du membre inférieur gauche, irradiant au niveau de l'hallux. Un repos médical avec arrêt de travail de sept jours s'avérait nécessaire, sauf complication.

a.c. Dans sa réponse du même jour, la Direction de la procédure a indiqué au Conseil des prévenus que les débats étaient maintenus.

a.d. Par courriel du même jour adressé à la greffière de la Chambre, le Conseil des prévenus a annoncé qu'il ne serait pas présent à l'audience vu l'indisponibilité de ses mandants.

a.e. Y______, X______ et leur Conseil n'ont pas comparu à l'audience du 11 mai 2023. Une nouvelle audience a été appointée les 27 et 28 juin suivant, le procès-verbal faisant référence à l'art. 366 al. 1 CPP (procédure par défaut).

a.f. Par courrier du 11 mai 2023, la Direction de la procédure a transmis au Conseil des prévenus une copie du procès-verbal de l'audience et l'a informé de la tenue de nouveaux débats les 27 et 28 juin 2023. Le même jour, de nouveaux mandats de comparution et avis ont été délivrés en vue de ces dates, les mandats de comparution notifiés au prévenu faisant expressément mention de la procédure par défaut.

a.g.a. Par courrier du 26 mai 2023, les prévenus ont sollicité la levée partielle du séquestre frappant leurs 202 bijoux et montres, à concurrence d'une contrevaleur de CHF 7'218'803.-. Les prétentions civiles des parties plaignantes envisageables, mais qu'ils contestaient, représentaient une somme maximale de CHF 723'509.-, alors que l'ensemble de leurs objets de valeur avaient été évalués à CHF 7'942'312.-.

a.g.b. Par ordonnance du 20 juin 2023, après un échange d'écritures entre les parties, la Direction de la procédure a rejeté la demande de levée partielle du séquestre, estimant que celle-ci apparaissait prématurée compte tenu de la proximité de l'audience de jugement.

a.h.a. Par courrier du 26 juin 2023, le Conseil des prévenus a sollicité le report de l'audience du lendemain, motif pris que sa mandante s'était fracturée le pied la semaine précédente, avait dû subir en urgence une opération à Paris et était dans l'incapacité de se déplacer à Genève. Une attestation datée du 23 juin 2023 établie par le Dr O______, certifiant que l'état de santé de Y______ avait nécessité une prise en charge en urgence pour une fracture du pied gauche, en milieu spécialisé, qui contre-indiquait tous déplacements pour une durée de sept jours, sauf complication ultérieure.

a.h.b. Par courrier du 26 juin 2023, la Direction de la procédure a indiqué au Conseil des prévenus que les débats étaient maintenus, la présence de ses mandants étant requise à l'audience et que les conséquences procédurales de leur absence éventuelle seraient examinées, cas échéant, aux débats.

a.i.a. Y______ n'a pas comparu à l'audience des 26 et 27 juin 2023. Son Conseil et X______ étaient en revanche présents.

a.i.b. Le Conseil de la prévenue a produit un compte rendu opératoire établi le 23 juin 2023 par le Dr O______, ancien Chef de Clinique et Assistant des Hôpitaux de Paris. Une réduction et ostéosythèse par vis novastep avait été pratiquée ce jour-là, entre 17h59 et 19h24, pour traiter une fracture déplacée de l'os naviculaire du pied gauche. Les soins post-opératoires consistaient en une botte plâtrée sans appuis, avec béquillage, une prévention thrombo-embolique et un contrôle des plaquettes pendant six semaines.

a.j. Après délibération, en application de l'art. 366 al. 2 et 4 CPP, le Tribunal a engagé la procédure par défaut s'agissant de Y______, les débats étant conduits en son absence. Une motivation plus compète figure en tête de la partie "EN DROIT" du présent jugement.

b. A l'audience de jugement, le Tribunal a informé les parties que les faits reprochés à X______ et Y______, visés sous chiffres 1.1.5 et 1.2.5, seraient également examinés sous l'angle de l'art. 76 al. 1 let. b de la Loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (LPP).

c. Après délibérations, le Ministère public a été autorisé à compléter son acte d'accusation du 7 février 2023 en application de l'art. 333 al. 1 CPP, dont les conditions étaient remplies dans la mesure où les faits pouvant être constitutifs de l'infraction à l'art. 112 al. 1 let. a LAA étaient déjà décrits dans l'acte d'accusation et que, au surplus, les prévenus avaient été entendus sur cette qualification qui figurait déjà dans les charges qui leurs avaient été notifiées en cours de procédure. Le Ministère public a ainsi complété son acte d'accusation de la manière suivante :

Dans les circonstances décrites sous chiffres 1.1.1 et 1.2.1, X______ et Y______ , de concert, ont intentionnellement omis de respecter leurs obligations relatives à l'assurance accident en n'effectuant pas les démarches requises pour que leurs employés soient assurés contre le risque d'accident et se sont rendus coupables d'infraction à l'art. 112 al. 1 let. a LAA.

d. X______ a soulevé une question préjudicielle, visant à constater d'une part la prescription de l'action pénale s'agissant du chiffre 1.1.1.a et 1.2.1.a de l'acte d'accusation, et, d'autre part, l'absence de qualité de partie de D______. Après délibération, le Tribunal a rejeté la question préjudicielle, tout en invitant les parties à s'exprimer à nouveau sur la prescription dans leurs plaidoiries finales, la résolution de cette problématique devant être appréciée dans le cadre de l'examen de la culpabilité des prévenus, dans la mesure où elle était liée à la réalisation ou non de certains éléments constitutifs de l'infraction.

e. Le Tribunal a entendu les parties présentes et un témoin :

e.a.a. S'agissant des faits en lien avec D______, X______ a reconnu avoir employé D______, alors que celle-ci n'était pas en situation régulière en Suisse. Il a contesté l'avoir sous-payée ainsi que le nombre d'heures supplémentaires alléguées. Il a confirmé et détaillé ses déclarations figurant à la procédure. D______ avait signé à plusieurs reprises des documents attestant qu'elle n'avait pas effectué d'heures supplémentaires. Le chiffre de cent-seize heures supplémentaires était absurde, compte tenu du fait que la maison était inhabitée plus de six mois par année. Il ne procédait pas à l'engagement des employés, mais avait pu donner des instructions à D______, si son épouse n'était pas présente. Lorsque la maison n'était pas occupée, leur employée devait faire le travail nécessaire mais il n'y avait pas de contrôle et aucune pression exercée. Au printemps 2008, un tiers lui avait indiqué qu'il était possible de régulariser les cotisations sociales qui étaient restées impayées. Cela avait toutefois pris du temps pour convaincre D______ de le faire. Il connaissait la situation familiale difficile de celle-ci et son épouse et lui l'avaient aidée, en lui offrant des vêtements pour sa fille notamment. A plusieurs reprises, ils lui avaient proposé de lui payer un billet d'avion pour retourner dans son pays, mais elle refusait, par peur de ne pas pouvoir revenir en Suisse. Elle avait pris des vacances, notamment chez une amie à Lausanne, mais elle préférait généralement rester à la maison, vu le confort dont elle y bénéficiait. Elle sortait lors de ses jours de congé. A la fin des rapports de travail, comme ils fermaient leur maison pour les vacances, il n'avait pas été possible de lui proposer de rester au domicile, raison pour laquelle il avait payé l'hôtel pour elle. A ce jour, il n'avait pas encore versé les montants dus à D______. De manière générale, l'absence de contrat écrit avec les employés s'expliquait par le fait que ceux-ci, en situation irrégulière en Suisse, ne souhaitaient pas officialiser leurs relations. A la question du Tribunal de savoir pourquoi P______ avait, quant à elle, bénéficié d'un contrat écrit, X______ a répondu que celle-ci avait accepté d'en avoir un.

Son épouse et lui avaient employé C______, alors que celle-ci était dépourvue d'autorisation de travailler, mais pas dans les conditions décrites dans l'acte d'accusation. L'intéressée travaillait depuis le lundi et partait dans l'après-midi du mercredi car elle avait deux autres emplois. Comme tous leurs autres employés, elle avait bénéficié de vacances. Au moment de son engagement, C______ ne leur avait pas parlé de sa situation personnelle, mais l'avait fait par la suite, lorsque la confiance avait été établie. Il lui payait son salaire mensuel de CHF 1'500.- de main à main, se trouvant quasiment tous les mois à Genève pour le faire. Elle n'avait pas voulu être régularisée au niveau des assurances sociales, ne souhaitant pas apparaître officiellement. Lorsque le couple était à l'étranger, il avait pu entendre son épouse donner des instructions aux employés par téléphone, notamment en lien avec ses habits. Son épouse et lui mangeaient très rarement à la maison. Quand cela arrivait, il cuisinait et C______ pouvait être amenée à faire le service et à débarrasser la table. Il ne s'agissait pas pour autant d'heures supplémentaires, dans la mesure où il ne voyait pas les deux sœurs entre 13h00 et 16h00 et qu'elles pouvaient récupérer leurs heures quand ils étaient absents. Aucun montant supplémentaire n'avait été versé à C______, malgré leurs tentatives de négociations avec le conseil de celle-ci.

La situation vis-à-vis de B______ était sensiblement la même que celle de sa sœur. Il ne l'avait pas engagée, mais son épouse l'avait fait alors qu'elle était dépourvue d'autorisation de travailler. Il la payait de main à main. L'absence de contrat écrit et d'annonce auprès des assurances sociales découlaient du refus de l'employée. Celle-ci était particulièrement terrorisée d'être renvoyée dans son pays. La situation personnelle de B______ lui avait semblé plus simple que celle de sa sœur, dans la mesure où elle n'avait pas de mari ou d'enfant. Elle s'était plainte du fait que sa sœur la faisait trop travailler, se trouvant sous sa domination. Il lui semblait que le salaire de B______ avait été de CHF 2'200.- mensuel et non de CHF 2'000.-. Il s'est référé à ses déclarations précédentes quant aux heures de travail et aux consignes laissées en l'absence du couple. Il était logique que les sœurs ne sortent pas en même temps les jours où elles travaillaient toutes les deux. B______ pouvait toutefois s'absenter durant les trois jours de congé, ce qu'elle ne faisait pas souvent, même si son épouse lui disait de le faire. Il était possible qu'elle ait dormi avec les chiens lorsque son épouse les avait laissés, mais cela n'avait dû arriver que très rarement car celle-ci les prenait avec elle lorsqu'elle voyageait. Il n'avait procédé à aucun paiement en plus des salaires versés à l'époque des faits.

Il a admis avoir employé et logé C______ et B______, précisant que la première logeait seulement durant la moitié de la semaine. Ses autres logeurs n'avaient d'ailleurs pas été inquiétés par la police, ce qui lui faisait penser que la procédure avait été instruite à charge contre lui et son épouse. Il n'avait en revanche pas incité B______ à venir en Suisse.

Il a admis avoir employé A______, qui avait travaillé cinq jours par semaine, puis quatre, à raison de six ou huit heures par jour, alors que celui-ci était dépourvu d'autorisation de travailler. Il n'y avait pas de contrôle des présences, l'important étant que le jardin soit entretenu. Les salaires avancés par l'intéressé lui paraissaient plus ou moins justes. Il les payait de main à main. A______ était uniquement employé en qualité de jardinier mais avait pu laver les voitures à une ou deux reprises, faire de la peinture à l'extérieur et nettoyer les vitres de la véranda. A l'époque des faits, celui-ci ne souhaitait pas de contrat écrit, ni être régularisé. Il avait pu arriver que des précisions soient données sur les tâches à effectuer, mais celui-ci les connaissait. Il n'avait procédé à aucun paiement en plus des salaires versés à l'époque des faits. Il contestait avoir agi en coactivité avec son épouse dans la mesure où celle-ci n'était pas au fait des questions administratives.

S'agissant de son interpellation, il a contesté la totalité des faits qui lui sont reprochés. Le rapport de police avait été établi après coup, pour justifier le fait qu'il avait eu un doigt cassé. Il avait assisté calmement à la perquisition, assis dans son fauteuil, et s'était retrouvé face à des "cow-boys agressifs", qui le surveillaient depuis neuf mois. Il possédait un permis de chasse en France. Une partie des armes qu'il détenait lui avait été transmises par son grand-père et son père et il avait acheté l'autre partie plus de trente ans auparavant, soit à une période où il n'y avait pas d'obligation de permis d'acquisition pour les armes de chasse. Le montant de la caution de CHF 150'000.- avait été réunie grâce à sa sœur et à un ami qu'il avait partiellement remboursés.

e.a.b. Il a déposé un bordereau de pièces contenant notamment :

- une attestation du 27 juin 2023, établie par Q______, jardinier actuel de la propriété à raison de huit heures par jours, deux jours par semaine, selon laquelle il effectuait seul l'entretien de l'ensemble du jardin, soit notamment la tonte du gazon, le désherbage, l'entretien des massifs et la taille (haies, massifs et arbustes) de même que le ramassage des feuilles en hiver.

- un procès-verbal de constat établi par Me ______ le 12 avril 2023, contenant des photographies du logement de fonction situé dans un bâtiment mitoyen à la villa principale;

- un rapport du B,S,S. Volkswirtschaftliche Beratung sur la situation des sans-papiers en Suisse en 2015;

- des articles de presse sur l'opération PAPYRUS, sur les employés de maison en période COVID et sur les "bavures" policières.

e.b.a. D______ a confirmé sa plainte pénale du 27 août 2018, et ses déclarations à la police et devant le Ministère public. Elle était venue travailler à Genève à la demande de Y______. Elle avait expliqué ses difficultés de couple à Y______, qui lui avait promis un permis, mais ne lui avait pas parlé de son besoin d'argent. Elle n'avait aucune formation. Une fois installée à Genève, elle avait demandé à pouvoir prendre des cours de français, mais ses employeurs lui avaient dit que c'était impossible. Elle envoyait de l'argent dans son pays pour ses filles qui suivaient des études. Elle devait s'occuper de toute la maison et ses tâches étaient les mêmes que la maison soit occupée par la famille X______/Y______ ou non, les époux téléphonant en permanence pour donner des instructions. Il y avait tant à faire qu'elle se sentait comme une esclave et, parfois, n'avait pas le temps le temps de manger ou de prendre un café. Elle ne connaissait pas les droits des travailleurs en Suisse et n'avait rien demandé. Lorsqu'elle avait appris qu'elle souffrait d'un cancer, elle avait voulu continuer à travailler, car ses enfants étudiaient encore. Y______ lui avait répondu qu'elle devait rentrer chez elle car elle ne pouvait pas se faire opérer à Genève. Les époux X______/Y______ lui faisaient peur. Elle n'avait pas les moyens de suivre une thérapie, mais il était très difficile d'attendre quinze ans pour recevoir de l'argent auquel elle avait droit. Elle avait subi des choses qu'elle n'oublierait jamais. Elle travaillait actuellement auprès de personnes âgées. Elle participait à cette procédure, parce qu'elle avait été enfermée comme une criminelle. Les époux X______/Y______ l'avaient accusée d'être retournée à leur domicile après avoir quitté leur maison. Elle voulait que justice soit faite. Après 2008, elle avait continué à travailler en Suisse jusqu'à ce jour. Depuis 2002, elle avait, en vain, d'entreprendre des démarches pour régulariser sa situation. Son salaire avait été insuffisant pour profiter du programme PAPYRUS.

e.b.b. D______ a déposé des conclusions civiles écrites, visant à ce que les époux X______/Y______ soient condamnés à lui verser CHF 8'000.-, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er janvier 2006, à titre de réparation du tort moral. Les bijoux séquestrés devaient être confisqués et réalisés, subsidiairement, une créance compensatrice devait être prononcée. Les éventuelles peines pécuniaires ou amendes prononcées ainsi que la créance compensatrice devaient lui être alloués à hauteur des créances fixées par arrêt de la Cour de Justice du 6 janvier 2017, elle-même cédant à l'Etat sa créance contre les prévenus.

e.c.a. C______ a confirmé sa plainte pénale du 10 avril 2019 et ses déclarations devant la police et le Ministère public. Elle était venue en Suisse pour améliorer ses revenus en vue de l'entrée de ses filles à l'université. Elle était arrivée le 25 décembre 2012 et avait commencé à travailler chez la famille X______/Y______ au mois d'août 2014. Dans l'intervalle, elle avait uniquement travaillé sur appel. Elle n'avait parlé ni de sa situation personnelle et familiale, ni de son besoin d'argent aux époux X______/Y______. Au Nicaragua, elle avait une formation de couturière et avait suivi des études de design à l'université, ayant obtenu un diplôme. Elle a confirmé ses déclarations quant à ses horaires de travail. Elle avait eu l'impression que le travail ne se terminait jamais. Les époux X______/Y______ ne lui avaient jamais parlé d'une éventuelle régularisation et elle n'en avait elle-même jamais parlé. S'agissant des fêtes de famille, elles réunissaient entre cinq et sept personnes. Lorsque la maison n'était pas occupée, elle recevait des consignes avant le départ du couple et ensuite par téléphone. Elle n'avait pas le droit de compenser ses heures supplémentaires pendant ces périodes, ni de s'absenter. Elle avait payé elle-même ses frais médicaux. Elle a confirmé ses déclarations s'agissant de ses autres activités lucratives et de son autre logement à Genève. Elle avait fait venir sa sœur chez les époux X______/Y______ à cause de la situation précaire dans leur pays, ce dont elle avait parlé à ceux-ci. Elle a admis avoir reçu des cadeaux à Noël. A l'heure actuelle, elle travaillait à 40% dans une famille, en étant déclarée et en bénéficiant d'un permis de travail et ce, depuis 2019.

e.c.b. C______ a déposé des conclusions civiles visant à ce que les époux X______/Y______ soient condamnés à lui verser CHF 296'887.35 brut, avec intérêts à 5% l'an dès le 1er janvier 2017, à titre de salaire pour la période pénale, sous déduction des charges sociales et de la somme de CHF 84'873.- déjà versée, et de CHF 8'000.-, plus intérêts moyens à 5% l'an dès le 1er janvier 2017, à titre de réparation du tort moral. Une créance compensatrice devait être prononcée à hauteur de ses prétentions civiles et lui être allouée, de même que les éventuelles peines pécuniaires ou amendes prononcées, cédant à l'Etat sa créance contre les prévenus et les valeurs séquestrées devant être confisquées.

e.d.a. B______ a confirmé sa plainte du 10 avril 2019 et ses déclarations devant la police et le Ministère public. Elle n'avait pas parlé de sa situation personnelle et familiale aux époux X______/Y______, à savoir notamment qu'il n'y avait pas de travail au Nicaragua et qu'elle n'avait personne pour l'aider. Sa sœur lui avait dit que le travail était pénible et que la maitresse de maison avait un fort caractère mais elle avait accepté cet emploi car elle avait besoin d'argent. Sa sœur pouvait être sévère avec elle, tout en précisant qu'elle ne lui mettait pas la pression professionnellement. Elle ne s'était jamais plainte d'elle auprès de Y______. Elle n'avait pas de formation. Ses horaires étaient ceux qu'elle a décrit au cours de la procédure, soit du lundi au samedi, de 08h00 à 23h00 voir minuit, sans pause quand il y avait beaucoup de tâches à accomplir. Lorsque le couple était absent, ce qui arrivait la moitié du temps, ses horaires étaient différents, soit entre 08h00 et 17h00, avec une pause d'une heure. Elle n'avait pas de congés et travaillait aussi le dimanche lorsqu'il y avait des fêtes, soit les anniversaires des membres de la famille. Elle envoyait son salaire, qu'elle recevait de main à main de X______, au Nicaragua pour sa famille. Elle pouvait sortir, notamment pour procéder aux virements, mais devait avertir avant de le faire, car les époux X______/Y______ ne voulait pas que la maison soit laissée vide. A l'heure actuelle, elle se sentait mieux que lorsqu'elle était employée du couple, sans la pression du travail ni les appels continuels. Elle détenait le permis B depuis 2019, avait fait des formations en pâtisserie, mais ne travaillait pas.

e.d.b. B______ a déposé des conclusions civiles, visant à ce que les époux X______/Y______ soient condamnés à lui verser CHF 250'315.70 bruts, plus intérêts moyens à 5% dès le 1er janvier 2018, à titre de salaire pour la période pénale, sous déduction des charges sociales usuelles et de la somme de CHF 74'364.90 déjà versée, et à CHF 7'000.-, plus intérêts moyens à 5% dès le 1er janvier 2018, à titre de tort moral. Une créance compensatrice devait être prononcée à hauteur de ses prétentions civiles et lui être allouée, de même que les éventuelles peines pécuniaires ou amendes prononcées, cédant à l'Etat sa créance contre les prévenus et les valeurs séquestrées devant être confisquées.

e.e.a. A______ a confirmé sa plainte du 10 avril 2019 et ses déclarations devant la police et le Ministère public. Il était venu en Suisse en 2008, à cause de la crise qui existait dans son pays et de ses dettes, liées à la maladie de son fils. Il avait effectué une formation de comptable. A Genève, avant d'être engagé par les époux X______/Y______, il avait travaillé, sur appel, comme jardinier chez un particulier, dans le déménagement et la peinture. En 2014, au moment où son fils avait quitté la Suisse, il avait parlé de sa situation aux époux X______/Y______. Les employés parlaient de leurs conditions de travail entre eux, mais pas avec leurs employeurs, car ils n'avaient pas le droit d'avoir un avis et devait juste travailler. Y______ lui avait dit à une occasion qu'elle ne régularisait personne. Il a confirmé avoir travaillé comme jardinier pour un autre particulier pendant son activité à Jussy, à raison de quatre à six heures par semaine. Les premières années, il était payé par Y______ et ensuite par X______, toujours de main à main. Les époux X______/Y______ étaient présents 50 % de l'année et il devait alors travailler normalement. De temps en temps, il y avait des tâches particulières comme nettoyer ou réparer quelque chose. Dans la propriété, il était électricien, peintre, charpentier et plombier. Il travaillait toute l'année, précisant qu'en hiver, il y avait d'autres tâches à effectuer que de s'occuper du jardin. Il recevait des cadeaux à Noël et pouvait prendre ses congés et ses vacances, mais n'avait pas d'assurance-maladie. Les époux X______/Y______ téléphonaient souvent, ce qui était leur façon de contrôler le personnel. Pendant toute cette période, il avait eu peur de perdre son emploi, qui était sa seule source de revenu, et d'être expulsé de Suisse. Il sous-louait un appartement dans le quartier de la Servette, pour un loyer mensuel de CHF 1'400.- qu'il avait quitté au départ de son épouse. A l'heure actuelle, il bénéficiait d'un permis B depuis 2021, travaillait à 40 % dans une entreprise de nettoyage et s'occupait des jardins de deux particuliers. Comme cela ressortait d'un message qu'il avait adressé à Y______ le 1er novembre 2016, il devait avertir lorsqu'il quittait son travail plus tôt. Rétrospectivement, cela le rendait nerveux de penser à tout ce qui c'était passé dans la propriété des X______/Y______. Il n'avait jamais eu l'occasion de bénéficier d'un suivi psychologique, mais souhaitait entamer une telle démarche.

e.e.b. A______ a déposé des conclusions civiles écrites, visant à ce que les époux X______/Y______ soient condamnés à lui verser CHF 254'423.-, à titre de réparation du dommage matériel et CHF 5'000.-, à titre de tort moral, avec intérêts à 5% l'an dès le 31 juillet 2014. Il a principalement conclu à la confiscation des valeurs séquestrées, subsidiairement au prononcé d'une créance compensatrice en faveur de l'Etat de Genève à hauteur de CHF 372'853.-, à ce que celle-ci, de même que les éventuelles peines pécuniaires ou amendes prononcées, lui soient allouées à concurrence de son dommage, cédant à l'Etat sa créance contre les prévenus, et que les séquestres soient maintenus en garantie de cette créance.

Il a également déposé un chargé de pièces contenant les contrats-type de travail applicables pendant la période pénale ainsi qu'un message WhatsApp du 1er novembre 2016, adressé à Y______, dans lequel il écrit en espagnol qu'il doit partir trente minutes plus tôt.

e.f. L'Inspecteur L______, entendu comme témoin, a précisé qu'il avait participé à l'interpellation du prévenu mais que le rapport avait été rédigé par sa collègue qui avait dirigé l'opération. Une équipe, composée d'environ huit personnes, s'était déplacée au domicile du prévenu pour exécuter le mandat d'amener qui avait été délivré par la Procureure en charge du dossier. Tout au long de leur présence dans la maison, X______ avait fait de l'opposition passive, en n'ouvrant la porte qu'après de longues minutes, en refusant de s'habiller ou en refusant d'ouvrir le coffre-fort et la pièce fermée à clé. Il a décrit l'interpellation du prévenu tel que cela ressort du rapport de police, au cours de laquelle, le prévenu était passé "de la résistance passive à de la résistance active".

D. a. X______ est né le ______ 1954 en France, pays dont il est originaire. Il est venu en Suisse pour la première fois en 1979. Il a étudié les sciences politiques et le droit en France. Il indique vivre à Kinshasa avec son épouse, Y______, et être père de deux filles majeures et indépendantes. Il exerce l'activité d'administrateur de société, ce qui lui procure des revenus annuels de CHF 250'000.- environ. Son loyer à Kinshasa s'élève à USD 2'200.- environ et ses primes d'assurance maladie à EUR 4'000.- par an. Il annonce des dettes à hauteur de CHF 500'000.- environ et ne pas être propriétaire de biens immobiliers.

Selon l'extrait de son casier judiciaire français, X______ a été condamné le 9 février 2000, par la Chambre des appels correctionnels de Paris, à une peine d'emprisonnement d'un an, avec sursis, et à une amende de F 250'000.-, pour "soustraction à l'établissement ou au paiement de l'impôt : omission de déclaration – fraude fiscale".

Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, X______ a été condamné le 23 mars 2015 par le Ministère public du canton de Genève, à une peine pécuniaire de 90 jours-amende, à CHF 200.- le jour, avec sursis pendant 3 ans, et à une amende de CHF 4'500.- pour violation grave des règles de la LCR.

b. Y______ est née le ______ 1953 en Espagne, pays dont elle est originaire. Elle est mariée à X______ et mère de trois filles majeures. Elle a été active dans le commerce de bijoux notamment, en Afrique. Elle n'exerce plus d'activité lucrative depuis 2009 environ et indique vivre principalement à Kinshasa avec son époux, X______. Depuis janvier 2019, elle revenait plus fréquemment qu'auparavant à Genève. Elle n'était pas propriétaire de biens immobiliers à Genève, mais avait "des choses importantes" en Afrique, notamment de l'argent.

Selon l'extrait de son casier judiciaire, Y______ n'a jamais été condamnée en Suisse.

 

EN DROIT

Procédure par défaut

1.1. Selon l'art. 366 al. 1 CPP, si le prévenu, dûment cité, ne comparaît pas aux débats de première instance, le tribunal fixe de nouveaux débats et cite à nouveau le prévenu ou le fait amener. Il recueille les preuves dont l'administration ne souffre aucun délai. Si le prévenu ne se présente pas aux nouveaux débats ou ne peut y être amené, ils peuvent être conduits en son absence. Le tribunal peut aussi suspendre la procédure (al. 2). La procédure par défaut ne peut être engagée qu'aux conditions suivantes: a. le prévenu a eu suffisamment l'occasion de s'exprimer auparavant sur les faits qui lui sont reprochés; b. les preuves réunies permettent de rendre un jugement en son absence (al. 4).

L'art. 366 al. 1 et 2 CPP n'attache aucune importance à la raison de l'absence du prévenu à ce stade de la procédure. Ce n'est que lors de la demande d'un nouveau jugement, en application de l'art. 368 CPP, que le Tribunal examine si l'absence était excusable (arrêt du Tribunal fédéral 6B_44/2020 consid. 1.1.1. du 16 septembre 2020).

1.2. La prévenue Y______ ne s'étant pas présentée aux audiences du Tribunal de police des 11 mai 2023 et 27 juin 2023, la procédure par défaut a été engagée conformément aux art. 366 et ss CPP. En effet, il a été retenu que les deux conditions cumulatives de l'art. 366 al. 4 CPP étaient réalisées. En premier lieu, la prévenue Y______ a eu suffisamment l'occasion de s'exprimer au préalable, sur les faits qui lui sont reprochés, ayant en particulier pu présenter sa version des faits et ses arguments à l'occasion de plusieurs audiences tenues par la police et le Ministère public. En second lieu, le Tribunal a constaté que les preuves réunies permettaient de rendre un jugement en l'absence de la prévenue, considérant notamment les investigations menées par la police, les pièces obtenues, les auditions des prévenus, des personnes appelées à fournir des renseignements et les auditions des parties plaignantes, auxquelles elle a été confrontée. Conformément à l'art. 367 al. 1 CPP, les parties et le défenseur ont été autorisés à plaider.

Culpabilité

2.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 CEDH et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 Cst. et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves. Ainsi, en tant que principe présidant à l'appréciation des preuves, la présomption d'innocence est violée si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes (ATF 127 I 38 consid. 2a; arrêt du Tribunal fédéral 6B_784/2011 du 12 mars 2012 consid. 1.1).

Les déclarations de la victime constituent un élément de preuve. Le juge doit, dans l'évaluation globale de l'ensemble des éléments probatoires rassemblés au dossier, les apprécier librement (arrêts 6B_892/2020 du 16 février 2021 consid. 6.1; 6B_238/2020 du 14 décembre 2020 consid. 1.3 et les références citées), sous réserve des cas particuliers où une expertise de la crédibilité des déclarations de la victime s'impose (ATF 129 IV 179 consid. 2.4; arrêt 6B_976/2020 du 3 décembre 2020 consid. 1.2). Les cas de "déclarations contre déclarations", dans lesquelles les déclarations de la victime en tant que principal élément à charge et les déclarations contradictoires de la personne accusée s'opposent, ne doivent pas nécessairement, sur la base du principe in dubio pro reo, conduire à un acquittement. L'appréciation définitive des déclarations des participants incombe au tribunal du fond (ATF 137 IV 122 consid. 3.3; arrêt 6B_892/2020 précité consid. 6.1).

En présence de versions contradictoires, il appartient au Tribunal de se forger son intime conviction sur la base des éléments pertinents du dossier et de la crédibilité des protagonistes aussi, ce qu'il apprécie librement (cf. art. 10 al. 2 et 139 al. 1 CPP; arrêt du Tribunal fédéral 6B_842/2011 du 9 janvier 2012). L'appréciation des preuves doit se faire dans son ensemble et le juge peut être convaincu de la réalité d'un fait en se fondant sur le rapprochement de plusieurs éléments ou indices (preuve par indices: arrêts du Tribunal fédéral 6B_642/2012 du 22 janvier 2013 consid. 1.1 et 6B_269/2012 du 17 juillet 2012). Un ou plusieurs arguments corroboratifs peuvent demeurer fragiles si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_324/2017 du 8 mars 2018 consid. 1.1). L'expérience générale de la vie peut aussi servir à la conviction du juge et les faits enseignés par cette expérience n'ont pas à être établis par des preuves figurant au dossier (arrêt du Tribunal fédéral 6B_860/2010 du 6 décembre 2010 consid. 1.2). Dans le cadre du principe de libre appréciation des preuves, rien ne s'oppose non plus à ne retenir qu'une partie des déclarations d'un témoin ou d'une victime globalement crédible (arrêts du Tribunal fédéral 6B_614/2012 du 15 février 2013 consid. 3.2.5 et 6B_637/2012 du 21 janvier 2013 consid. 5.4).

2.2. Selon l'art. 2 al. 1 CP, la loi pénale ne s'applique qu'aux faits commis après son entrée en vigueur (principe de la non-rétroactivité de la loi pénale). Cependant, en vertu de l'art. 2 al. 2 CP, une loi nouvelle s'applique aux faits qui lui sont antérieurs si, d'une part, l'auteur est mis en jugement après son entrée en vigueur et si, d'autre part, elle est plus favorable à l'auteur que l'ancienne (exception de la lex mitior). Il en découle que l'on applique en principe la loi en vigueur au moment où l'acte a été commis, à moins que la nouvelle loi ne soit plus favorable à l'auteur.

Usure

3.1.1. Se rend coupable d'usure au sens de l'art. 157 ch. 1 CP, celui qui aura exploité la gêne, la dépendance, l'inexpérience ou la faiblesse de la capacité de jugement d'une personne en se faisant accorder ou promettre par elle, pour lui-même ou pour un tiers, en échange d'une prestation, des avantages pécuniaires en disproportion évidente avec celle-ci sur le plan économique.

L'infraction réprimée à l'art. 157 ch. 1 CP suppose la réalisation des éléments constitutifs objectifs suivants: une situation de faiblesse de la victime, l'exploitation de cette situation de faiblesse, l'échange d'une contre-prestation, une disproportion évidente entre l'avantage pécuniaire et la contre-prestation ainsi que l'existence d'un rapport de causalité entre la situation de faiblesse et la disproportion des prestations. Du point de vue subjectif, l'infraction est intentionnelle. Le dol éventuel suffit. L'intention doit porter sur la disproportion évidente entre la prestation et la contre-prestation ainsi que sur la situation de faiblesse de la victime.

L'infraction d'usure suppose d'abord que la victime se soit trouvée dans l'une des situations de faiblesse, énumérées de manière exhaustive à l'art. 157 CP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_395/2007 du 14 novembre 2007 consid. 4.1). L'état de gêne, qui n'est pas forcément financière, s'entend de tout état de contrainte qui influe si fort sur la liberté de décision de la personne lésée qu'elle est prête à fournir une prestation disproportionnée. Il faut procéder à une analyse objective, en ce sens qu'on doit admettre qu'une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances aurait été entravée dans sa liberté de décision. Le consentement de la victime n'exclut pas l'application de l'art. 157 CP. Il en est au contraire un élément (arrêt du Tribunal fédéral 6S.6/2007 du 19 février 2007 consid. 3.2.1). Se trouve par exemple dans une situation de gêne une personne en situation irrégulière qui paie le prix fort pour la location d'un appartement car elle n'ose pas se plaindre de peur d'être renvoyée dans son pays (arrêt du Tribunal fédéral 6S_6/2007 du 19 février 2007).

En ce qui concerne l'inexpérience, il doit s'agir d'une inexpérience générale se rapportant au monde des affaires et non pas d'une inexpérience relative au contrat en cause. L'inexpérience a été retenue dans le cas d'une jeune fille de 22 ans au moment d'arriver en Suisse, qui n'avait auparavant jamais quitté son pays natal, le Ghana, qui avait auparavant travaillé deux ans chez son oncle dans son pays sans être payée, et qui n'était pas en mesure de réaliser que son travail méritait un salaire (ATF 130 IV 106 consid. 7.3).

Quant à la dépendance, le Tribunal fédéral a admis une situation de dépendance dans le cas d'une nièce ne parlant pas la langue du pays, ne connaissant personne dans la ville de domicile de son oncle et obéissant sans broncher à ce dernier, comme le veut la culture de son pays d'origine (arrêt du Tribunal fédéral 6B_973/2009 du 26 janvier 2010 consid. 2.1). Il peut par exemple exister une dépendance économique entre le travailleur et son employeur dans un contexte où le chômage menace (CR-CP II, 1ére éd. 2017, n° 15 ad art. 157 CP). La dépendance a également été retenue dans la situation d'une employée de maison ayant un statut irrégulier, ne connaissant pas la langue, étant dans la crainte d'une expulsion, et s'étant vue confisquer son passeport par la maîtresse de maison, dès lors qu'elle était corvéable à merci (Jugement du Tribunal du IIe arrondissement pour les districts d'Hérens et Conthey du 26 août 1996, Ministère public et dame Y. c/ dame X., in RVJ 1997, p. 313).

La personne peut se trouver dans une situation de faiblesse pour plusieurs raisons, ce qui aggrave en principe le cas et sera pris en considération au stade de la fixation de la peine (Corboz, Les infractions en droit suisse, vol. I, 3ème éd., Berne 2010, n. 10 ad art. 157).

L'auteur doit ensuite exploiter la situation de faiblesse dans laquelle se trouve la victime, soit qu'il ait utilisé consciemment cette situation, en vue de l'obtention d'un avantage pécuniaire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_395/2007 du 14 novembre 2007 consid. 4.1). Cet avantage patrimonial doit en outre avoir été fourni ou promis en échange d'une prestation. L'usure ne peut ainsi intervenir que dans le cadre d'un contrat onéreux (ATF 130 IV 106 consid. 7.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_395/2007 du 14 novembre 2007 consid. 4.1).

Il est encore nécessaire d'avoir une disproportion évidente entre l'avantage et la prestation échangée. Pour déterminer s'il y a une telle disproportion, il y a lieu de procéder à une évaluation objective, en recherchant la valeur patrimoniale effective de la prestation, calculée en tenant compte de toutes les circonstances (arrêt du Tribunal fédéral 6B_395/2007 du 14 novembre 2007 consid. 4.1). Le rapport entre la prestation et la contreprestation se mesure dans le cas normal selon le prix ou la rémunération usuels pour des choses ou des services de même espèce (arrêt du Tribunal fédéral 6B_387/2008 du 15 août 2008 consid. 2.2). Selon la jurisprudence, la disproportion doit excéder sensiblement les limites de ce qui apparaît usuel et normal en regard de toutes les circonstances. La doctrine s'accorde généralement à dire qu'en présence d'une disproportion de 35 %, la limite permettant de retenir l'usure est clairement franchie. Selon Trechsel et Crameri, une disproportion deviendrait usurière à partir de 20 % dans les domaines réglementés et de 35 % dans les domaines non réglementés. Le grand nombre de critères à prendre en considération ne permet toutefois pas de fixer un seuil numéraire (CR-CP II, n° 48 ad art. 156 CP). Un écart de 25% est en général considéré comme constitutif d'une disproportion (ATF 92 IV 132 consid. 1). Enfin, pour arrêter un salaire "net", le Tribunal fédéral a jugé raisonnable de procéder en diminuant le montant du salaire brut de 15% (arrêt du Tribunal fédéral 6B_875/2020, 6B_1006/2020 du 15 avril 2021, c. 4.4). Elle doit paraître frappante et s'imposer comme telle (arrêt du Tribunal fédéral 6S.6/2007 du 19 février 2007 consid. 3.1.1). Enfin, cette disproportion doit être en lien de causalité avec la situation de faiblesse de la victime.

Dans le cadre de l'économie domestique notamment, le "travail au noir" était mal documenté par nature, sans que cela ne doive encore constituer un obstacle systématique à la répression des abus (arrêt du Tribunal fédéral 6B_875/2020 du 15 avril 2021 consid. 4.3.). Pour comparer les salaires, il convient de réduire de 15% environ le salaire brut pour obtenir le salaire net (ibid. consid. 4.4.).

Sur le plan subjectif, l'infraction est intentionnelle, mais le dol éventuel suffit. Il faut donc que l'auteur connaisse, au moins sous cette forme, la situation de faiblesse dans laquelle se trouve l'autre partie ainsi que la disproportion entre les prestations, de même qu'il doit avoir conscience que la situation de faiblesse motive l'autre partie à accepter la disproportion évidente entre les prestations (ATF 106 IV 106 consid. 7.2).

3.1.2. Selon les conventions collectives applicables (CTT-TED/CTT-EDOM), le salaire réglementé dans l'économie domestique pour les travailleurs sans qualifications particulières (mais prenant en compte les années d'expérience) s'élevait à :

- CHF 3'550.- du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009 (y compris CHF 345.- pour le logement et CHF 645.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 46 heures. Le tarif horaire était de CHF 18.45, pour les travailleurs à temps partiel;

- CHF 3'575.- du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011 (y compris CHF 345.- pour le logement et CHF 645.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 45 heures. Le tarif horaire était de CHF 18.75, pour les travailleurs à temps partiel;

- CHF 3'625.- du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012 (y compris CHF 345.- pour le logement et CHF 645.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 45 heures;

- CHF 3'900.- du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013 pour un travailleur avec quatre an d'expérience et CHF 3'625.- pour un travailleur sans qualification particulière (y compris CHF 345.- pour le logement et CHF 645.- pour la nourriture), pour une durée de travail hebdomadaire de 45 heures;

- CHF 4'760.- du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015 pour un jardinier avec cinq ans d'expérience, CHF 3'969.- pour un travailleur sans qualification avec 4 ans d'expérience et CHF 3'700.- pour un employé non qualifié (y compris CHF 345.- pour le logement et CHF 645.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 45 heures;

- CHF 4'831.- du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017 pour un jardinier avec cinq ans d'expérience et CHF 3'756.- pour un employé non qualifié (y compris CHF 345.- pour le logement et CHF 645.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 45 heures;

- CHF 4'899.- du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2020 pour un jardinier avec cinq ans d'expérience, CHF 4'077.- pour un employé non qualifié avec quatre ans d'expérience utile au poste et CHF 3'801.- pour un employé non qualifié (y compris CHF 345.- pour le logement et CHF 645.- pour la nourriture) pour une durée de travail hebdomadaire de 45 heures.

3.1.3. Par définition, le service de piquet implique une disponibilité. Il correspond au temps pendant lequel le travailleur se tient, en sus du travail habituel, prêt à intervenir, le cas échéant, pour remédier à des perturbations, porter secours en cas de situation d’urgence, effectuer des visites de contrôle ou faire face à d’autres situations particulières analogues (cf. art. 14 al. 1 de l’ordonnance 1 relative à la loi sur le travail [OLT 1; RS 822.111]). Lorsqu’il est assuré dans l’entreprise, le service de piquet (ou de garde) est une prestation de travail et donne lieu à rémunération; peu importe que le travailleur ait eu ou non à intervenir concrètement, ni qu’il ait disposé de temps de repos pendant sa permanence (Arrêt du Tribunal fédéral 4A_96/2017 du 14 décembre 2017, consid. 2.1).

3.1.4. Selon l'art. 97 al. 1 CP, l'action pénale se prescrit par 30 ans si la peine maximale encourue est une peine privative de liberté à vie (let. a) ; par quinze ans si la peine maximale encourue est une peine privative de liberté de plus de trois ans (let. b) ; par dix ans si la peine maximale encourue est une peine privative de liberté de trois ans (let. c) ; par sept ans si la peine maximale encourue est une autre peine (let. d). L'art. 97 aCP disposait que l'action pénale se prescrit par 30 ans si l'infraction est passible d'une peine privative de liberté à vie (let. a) ; par quinze ans si l'infraction est passible d'une peine privative de liberté de plus de trois ans (let. b) ; par sept ans si l'infraction est passible d'une autre peine (let. c).

S'agissant de la lettre b, le Tribunal fédéral a abandonné la figure de l'unité de la prescription et applique cette disposition en cas d'unité juridique ou naturelle d'action entre les différents actes commis (Arrêt du Tribunal fédéral 6S.397/2005 du 13 novembre 2005 consid. 2.2) :

-          il y a unité juridique lorsque le comportement défini par la norme présuppose, par définition, de fait ou typiquement, la commission d'actes séparés, tel que le brigandage, ou lorsque la norme définit un comportement durable se composant de plusieurs actes, comme la gestion fautive. La commission d'actes séparés ou le comportement durable doivent, expressément ou implicitement, ressortir de la définition légale de l'infraction.

-          il y a unité naturelle lorsque des actes séparés procèdent d'une décision unique et apparaissent objectivement comme des événements formant un ensemble en raison de leur relation étroite dans le temps et dans l'espace. Il s'agit de la commission répétée d'infractions ou la commission d'une infraction par étapes successives, qui n'existe pas en cas de laps de temps assez long. Cette notion est interprétée restrictivement, si les faits procèdent d'une décision unique et s'ils se traduisent, dans le temps et dans l'espace, par des actes suffisamment rapprochés pour former un tout (arrêt du Tribunal fédéral 6B_310/2014 et 6B_311/2014 du 23 novembre 2105 consid. 4.2, SJ 2016 I 414).

S'agissant de la lettre c, le délit continu se caractérise par le fait que la situation illicite créée par un état de fait ou un comportement contraire au droit se poursuit (ATF 132 IV 49 consid. 3.1.2.3 pour la violation d'une obligation d'entretien). Il faut que les actes qui créent la situation illégale forment une unité avec les actes qui la perpétuent ou avec l'omission de la faire cesser, pour autant que le comportement visant au maintien de l'état de faits délictueux soit expressément ou implicitement contenu dans les éléments constitutifs de l'infraction (arrêt du Tribunal fédéral 6B_310/2014 et 6B_311/2014 du 23 novembre 2105 consid. 4.2.2, SJ 2016 I 414). L'infraction est consommée dès que tous les éléments constitutifs sont réalisés, mais n'est achevée qu'avec la cessation de l'état de fait ou du comportement contraire au droit. Les exemples cités sont la violation d'une obligation d'entretien (CP 217), l'enlèvement de mineur (CP 220), la violation de domicile (CP 186), la rupture de ban (CP 291), l'occupation de personnes non autorisées à travailler ou la conduite en état d'ébriété (LCR 91).

Le Tribunal fédéral n'a pas retenu la qualification de délit continu pour un cas d'usure en lien avec un contrat de vente immobilière, par lequel un homme en situation de faiblesse avait acheté un bungalow à un prix exorbitant, qu'il devait payer en plusieurs fois. Le moment déterminant était la conclusion du contrat et non les paiements successifs qui étaient intervenus par la suite en exécution du contrat (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1210/2018 consid. 2.4).

3.2.1. De manière générale, il est reproché aux deux prévenus d'avoir engagé du personnel de maison à leur service entre le 1er avril 2003 et le 10 avril 2019, en les rémunérant bien au-dessous des salaires minimums prévus par les CTT-TED successifs, puis par le CTT-EDOM, applicable aux employés de l'économie domestique.

S'agissant de la situation de la plaignante D______, un jugement des Prud'hommes entré en force a d'ores et déjà établi les éléments principaux de l'activité déployée par la plaignante ainsi que ses créances contre ses anciens employeurs, en raison de conditions salariales qui ne respectaient pas le contrat-type de travail. Le Tribunal reprendra notamment ces éléments pour examiner la question de l'usure qui lui est soumise, en relation avec la plaignante D______.

S'agissant des trois autres parties plaignantes, les déclarations des parties sont contradictoires quant au volume de travail qui était demandé aux employés et aux heures que ceux-ci devaient consacrer à leurs occupations. Les plaignantes C______ et B______ ont décrit des horaires quasi continus, qui se terminaient tard, une impossibilité de récupérer les heures supplémentaires et sans aucun jour de vacances. Le plaignant A______ a quant à lui indiqué que les tâches qu'il devait accomplir, à savoir le jardinage, mais également des travaux de peinture ou de nettoyage de vitres ou de voitures, l'occupaient toute l'année à raison de huit heures, cinq jours par semaines. Les trois parties plaignantes ont toutefois admis que la famille X______/Y______ voyageait beaucoup et que la maison était vide la moitié de l'année. De leur côté, les prévenus ont admis qu'ils avaient engagé du personnel qui se trouvait en situation irrégulière en Suisse, mais ont contesté que la tenue de leur ménage ait pu nécessiter le nombre d'heures de travail allégué, principalement en raison de leurs très nombreuses absences à l'étranger, que les employés avaient eu droit à des vacances et pouvaient, cas échéant, récupérer les heures supplémentaires qu'ils avaient pu faire, lorsque le couple n'était pas présent.

Les prévenus n'ont jamais établi de contrat écrit aux plaignants, ni de fiches de salaire ou de décompte des heures de travail effectuées. Ainsi, en l'absence d'éléments matériels au dossier, il y a lieu d'examiner la crédibilité des déclarations des parties.

En premier lieu, les récits des parties plaignantes et leurs situations sont semblables sur de nombreux points qui se sont avérés conformes à la réalité, ce qui plaide en faveur de leur crédibilité. Il s'agit de personnes issues d'un milieu défavorisé d'Amérique du Sud, venues en Suisse sans autorisation de séjour, qui ne connaissaient ni le droit suisse, ni les standards liés aux salaires de la branche dans notre pays. Aucun contrat de travail n'a été établi, les employés étaient payés en argent liquide, de main à main, sans quittance et sans que les prestations sociales ou d'assurances ne soient réglées. Ils ne bénéficiaient pas d'une assurance-maladie, ne parlaient pas français, étaient isolées à Genève et ne connaissaient personne dans la région. Ils ont tous affirmé que la prévenue Y______ était exigeante, pouvait rabaisser les employés et appelait régulièrement sur le téléphone de la maison, pour contrôler les présences, même si certains ont également affirmé qu'elle et son époux étaient gentils. Les employés avaient peur de perdre leur travail et d'être renvoyés de Suisse. Le jardinier devait aviser son employeur quand il partait plus tôt et les femmes de ménage devaient le faire quand elles sortaient de la maison. Celles-ci n'avaient pas de congés, pas de vacances et pas d'heures supplémentaires payées. Tous trois ont décrit les exigences de qualité et les attentes importantes du couple X______/Y______ en matière de tenue de leur propriété. Les similitudes entre le récit des trois parties plaignantes et celui de la plaignante D______ sont frappantes. Si cette dernière a travaillé dans une autre maison et à une période différente, elle s'est toutefois trouvée au service des mêmes employeurs et la réalité de ses déclarations a été admise par un jugement civil entré en force. Or, le dossier ne permet pas de distinguer une évolution dans les standards de qualité du couple X______/Y______, quant à la tenue de leur foyer, et ne permet pas non plus de penser que les trois parties plaignantes auraient connu les plaintes de leur prédécesseur.

Les circonstances du dévoilement attestent encore de la crédibilité des déclarations des trois parties plaignantes, puisque celles-ci ont été entendues pour la première fois, par la police au moment de l'interpellation des prévenus, sans qu'elles n'aient eu la possibilité de se concerter auparavant. Or, leurs récits se recoupent sur les points significatifs de leur vécu et elles ont dès le début fourni des détails, comme l'absence de contrat, de fiche de salaire ou de cotisations sociales, qui se sont avérés vrais. Les deux sœurs ont également confirmé l'horaire de travail du plaignant A______, sans avoir pu se concerter.

A cela s'ajoute le fait que les parties plaignantes n'ont pas chargé inutilement les prévenus et qu'elles n'ont pas exagéré la situation, à tout le moins lors de leurs premières auditions - que le Tribunal considère comme les plus crédibles - qui comprenaient les éléments essentiels de leur taux d'occupation. Par exemple, la partie plaignante B______ a admis sortir pour faire ses courses, se rendre en France et a indiqué ne pas être dérangée par les chiens. Le plaignant A______ a admis quant à lui qu'il avait bénéficié d'augmentations de salaire et qu'il a toujours pu prendre ses vacances et jours fériés. Toutes ont indiqué avoir été payées, même si parfois avec retard, et que la famille était absente de la propriété environ 50% du temps. Leurs déclarations ont été constantes sur les points essentiels, même si elles contiennent quelques contradictions ou incohérences minimes, qui n'entachent pas leur crédibilité.

Les parties plaignantes n'avaient pas non plus de bénéfice secondaire à espérer, ni d'intérêt à mentir. L'hypothèse des prévenus selon laquelle les plaintes auraient été motivées par la perspective d'obtenir une régularisation n'est pas compatible avec le déroulement des faits. Les intéressés avaient quitté leur pays, en espérant une vie meilleure. S'ils avaient véritablement des conditions de travail correspondant à leurs attentes, ils n'auraient pas risqué de tout perdre en inventant des reproches inexistants contre leur employeur. En outre, si le souci des plaignants avait été de soutirer aux prévenus de l'argent, ils auraient pu prétendre ne pas avoir été payés à certaines occasion, puisque les intéressés n'auraient pas été en mesure de fournir des quittances de leurs versements.

S'agissant des déclarations des prévenus, il n'y a certes pas de grandes contradictions à relever et leurs déclarations sont cohérentes dans l'ensemble. Toutefois, leurs dépositions ont été effectuées alors qu'ils avaient déjà traversé une procédure prud'homale pendant près de dix ans. Ils connaissaient ce qui leur était reproché par leur ancienne employée, laquelle avait obtenu gain de cause sur le plan civil, mais n'avait toutefois pas encore obtenu les montants auxquels ils avaient été condamnés. Dans ces circonstances, la crédibilité de leurs déclarations est moindre puisque celles-ci ont pu être orientées du fait de leur connaissance du contexte.

En tout état, l'ensemble de ces éléments forgent la conviction du Tribunal que les déclarations des parties plaignantes sont plus crédibles que celles des prévenus. Ainsi, les conditions de travail telles que décrites par les parties plaignantes (horaires, salaires, heures supplémentaires, vacances) seront retenues ainsi que l'absence de leurs employeurs la moitié du temps, telle qu'admise par toutes les parties. Même si l'expérience générale de la vie tend à démontrer qu'un employé dont les patrons sont absents ne travaille pas autant que si ceux-ci se trouvaient sur place, cela ne change rien quant à la réalité des horaires effectués. Les employés ont peut-être parfois mis moins d'empressement à accomplir leurs tâches, mais leur présence, vérifiée régulièrement par téléphone, était de toute manière sollicitée dans la maison de leurs employeurs, respectivement dans le parc, et non dans leur dépendance ou à leur propre domicile. Or, toute personne qui est de piquet dans une activité doit être rémunérée, puisqu'elle se tient à disposition. En revanche, le Tribunal considère peu crédible que les employées ne se soient pas accordé de pause pour leurs repas pendant la journée, particulièrement en l'absence des employeurs. Le Tribunal suivra le raisonnement appliqué par la Chambre des Prud'hommes de la Cour de Justice et retiendra que les plaignantes ont pu bénéficier d'une heure et demie de pause pendant leurs journées. Pour le plaignant A______, celui-ci a toujours indiqué avoir bénéficié d'une heure de pause à midi, laquelle a été également été évoquée par les plaignantes C______ et B______. Une telle pause sera ainsi retenue.

D______

3.2.2.1. S'agissant tout d'abord de l'examen de la disproportion, dans son arrêt du 6 janvier 2017, la Chambre des prud'hommes de la Cour de Justice, a fixé les créances de la plaignante D______ à l'encontre de ses employeurs. Les autorités des Prud'hommes ont déterminé les heures pendant lesquelles celle-ci a travaillé. Elles ont calculé le salaire minimum auquel l'employée pouvait prétendre sur la base du contrat-type de travail et l'ont comparé aux salaires que celle-ci avait perçus. Elles ont ensuite procédé au calcul des heures supplémentaires et du droit au salaire qui en découle et ont fait de même pour les vacances. Des ajustements ont dû être réalisés en deuxième instance s'agissant de la prise en compte des cotisations sociales et des impôts anticipés.

Il en ressort les rémunérations suivantes, considérées de manière globales, heures supplémentaires comprises :

Période

Salaire perçu

Salaire dû

Différence

Avril 2003

à juin 2004

(24'375.60 + 16'512.30)

40'887.90

(29'700.- + 19'800.- + 25'159.90)

74'659.90

33'772.-

Déduction de 15%

pour salaire net

63'460.90

22'573.-

(35%)

Juillet 2004

à décembre 2005

(16'512.30 + 35'796.60)

52'308.90

(20'400.- + 40'800.- + 31'104.45)

92'304.45

39'995.55

Déduction de 15%

pour salaire net

78'458.80

26'149.90

(33%)

Janvier 2006

à décembre 2007

(3'172.45 + 34'896.95 + 11'214.60 + 33'643.80)

82'927.80

(3'400.- + 37'730.- + 10'290.- +32'760.- + 43'602.-)[1]

127'782.-

44'854.20

Déduction de 15%

pour salaire net

108'614.70

25'686.90

(23%)

Janvier à juillet 2018

27'304.55

(26'320.- + 14'491.75)

40'811.75[2]

13'507.20

Déduction de 15%

pour salaire net

34'690.-

7'385.45

(21%)

Différence totale brut

 

 

132'128.85

Différence totale

net

 

 

81'795.25

Il apparait ainsi que, pendant toute la période de son engagement, le salaire perçu par la partie plaignante était en disproportion supérieure à 20%, dans un domaine réglementé, par rapport au salaire prévu par le contrat-type de travail, et ce sans tenir compte du droit aux vacances non prises par l'employée, lequel représente un montant supplémentaire de CHF 22'107.40 selon l'arrêt de la Chambre des Prud'hommes.

Le Tribunal considère ainsi comme établi qu'une disproportion manifeste entre les prestations échangées a existé dès le début de la relation de travail et ce jusqu'à la fin de celle-ci.

S'agissant de la situation de faiblesse de la partie plaignante, il est établi que celle-ci n'avait pas de permis de séjour, ne connaissait pas la Suisse, ne parlait pas le français et était isolée socialement. La prévenue Y______ a par ailleurs admis en cours de procédure que, dès leur premier entretien, la plaignante lui avait parlé de sa situation de détresse et du fait qu'elle cherchait du travail pour s'en sortir. Cette dernière était totalement dépendante des prévenus, chez qui elle habitait, n'ayant pas d'autre endroit où loger et dont elle dépendait financièrement. La partie plaignante se trouvait dans une situation de gêne et de dépendance évidente vis-à-vis des prévenus.

S'agissant de l'intention, selon les premières déclarations du prévenu X______, lui et son épouse ont engagé ensemble la partie plaignante. De manière générale, la prévenue Y______ connaissait la situation de la plaignante D______ et le prévenu X______ a indiqué à l'audience de jugement qu'il n'y avait pas eu de contrat écrit et que les employés n'avaient pas été déclarés car ceux-ci ne le voulaient pas, en raison de leur statut irrégulier en Suisse. De plus, il est établi par le dossier qu'une employée, qui avait été engagée juste avant la plaignante D______ comme gouvernante, avait bénéficié d'un contrat écrit en règle, avec toutes les cotisations sociales prises en charge par M______. Le prévenu X______ a précisé en audience de jugement que tel avait été le cas, car l'intéressée l'avait accepté. Les époux X______/Y______ connaissaient ainsi parfaitement la situation de la plaignante et étaient conscients de lui accorder un revenu bien au-dessous des salaires minimums.

Les deux prévenus ont ainsi agi en coactivité, profitant de la gêne de la plaignante et du fait que celle-ci venait d'un pays où les salaires étaient très bas et serait encline à accepter un tel salaire qui lui semblait généreux, en faisant confiance à ses employeurs, alors que ledit salaire était en totale disproportion avec le nombre d'heures travaillées, à teneur du droit suisse.

3.2.2.2. S'agissant de la période pénale, les prévenus affirment que l'usure est une infraction qui se consomme dès la conclusion du contrat et que la prescription de l'action pénale a commencé à courir à ce moment-là déjà. Dans le cas d'espèce, le contrat de travail aurait été conclu le 1er avril 2003 et l'action pénale serait ainsi prescrite depuis le 1er avril 2018.

La doctrine et la jurisprudence ne classent pas l'usure dans les cas typiques de délit continu. Pour qu'il s'agisse d'un délit continu, il faut que les actes qui créent la situation illégale forment une unité avec les actes qui la perpétuent ou avec l'omission de la faire cesser, pour autant que le comportement visant au maintien de l'état de fait délictueux soit expressément ou implicitement prévu dans les éléments constitutifs de l'infraction. L'infraction d'usure vise le fait de se faire accorder ou promettre, par une personne en situation de faiblesse, un avantage économique disproportionné par rapport à la contre-prestation fournie, en exploitant cette situation de faiblesse. Le comportement visant au maintien de l'état de fait délictueux n'est pas expressément mentionné dans la disposition légale, mais il ressort de manière implicite de celle-ci, lorsqu'elle est appliquée à un contrat de durée, comme le contrat de travail. Si l'infraction est certes consommée dès l'obtention de l'accord, les obligations du cocontractant sont ensuite continues, au contraire de celles d'un contrat de vente par exemple. En effet, l'employeur a constamment des obligations et notamment celle de respecter la personnalité de son employé et de le payer. A l'inverse, d'un contrat de vente, il dépend de l'employeur de mettre fin ou non à la situation usurière, qui perdure aussi longtemps que l'employeur obtient des prestations disproportionnées en exploitant la situation personnelle de son employé.

Ainsi, en leur qualité d'employeur, les prévenus ont violé leurs obligations et les droits de leur employée, en profitant de sa situation de faiblesse pour obtenir des prestations de service effectuées en beaucoup plus grand nombre que celles prévues dans le CTT, pour un salaire (globalement) bien inférieur, concluant de fait un contrat de travail avec elle. La situation illégale ainsi créée était maintenue par l'omission de la faire cesser. En effet, en continuant de profiter de la situation de faiblesse de leur employée pour la payer moins que ce qu'ils devaient, les prévenus ont maintenu l'état de fait délictueux – implicitement contenu dans les éléments constitutifs de l'usure, lorsque celle-ci est examinée en lien avec un contrat privé de durée – en augmentant le dommage, respectivement leur enrichissement, par un cumul de salaires épargnés. Aussi, dans la configuration d'espèce, le Tribunal considère que l'infraction en cause résulte d'une activité coupable continue au sens de l'art. 98 let. c CP, le délai de prescription ayant ainsi commencé à courir au moment où l'activité coupable a cessé, soit à la fin des rapports de travail, le 31 juillet 2008.

Compte tenu de ce qui précède, les faits reprochés au prévenus X______ et Y______ ne sont pas prescrits et ces derniers seront reconnus coupables, en coactivité, d'usure (art. 157 ch. 1 CP) en lien avec les chiffres 1.1.1.a) et 1.2.1.a) de l'acte d'accusation.

C______

3.2.3. S'agissant de l'examen d'une éventuelle disproportion, il est établi que la plaignante C______ a travaillé au service des époux X______/Y______ d'août 2014 au 10 avril 2019. L'employée a allégué que ses jours de service s'étendaient du dimanche au mercredi, soit quatre jours par semaine. Ces jours d'occupation ont été confirmés par la plaignante B______. Le prévenu a quant à lui indiqué, lors de sa première audition à la police, que la plaignante travaillait à partir du dimanche matin puis, par la suite, de de manière constante, du lundi au mercredi. S______ a, pour sa part, indiqué que "C1______" était présente "du dimanche au mercredi". Au surplus, il ressort également du dossier que le couple X______/Y______ avait le souci que la maison ne soit pas laissée sans surveillance. Or, la plaignante B______ avait congé le dimanche, si bien que la plaignante C______ devait prendre le relais ce jour-là, pour que la maison reste occupée. S'agissant des horaires d'activité, comme mentionné précédemment, le Tribunal retient la version de la plaignante, en tenant compte toutefois de pauses pour les repas. Ainsi, la moitié de l'année – lorsque la famille X______/Y______ était présente – l'horaire de travail de la plaignante débutait à 08h00 pour se terminer à 23h00, avec une heure et demie de pause, non comprise dans les heures de travail, soit 13,5 heures par jour. L'autre moitié de l'année, sa journée commençait à 08h00, pour se terminer à 17h00, avec une heure de pause par jour, soit huit heures travaillées par jour. Pendant toute l'année, elle travaillait du dimanche au lundi. Pour simplifier les calculs, il sera considéré théoriquement que chaque semaine suivait cette répartition. Son salaire mensuel était de CHF 1'500.-.

Il ressort des déclarations des parties plaignantes que celles-ci n'étaient pas nourries, mais elles ont précisé qu'elles pouvaient manger quand il y avait des restes. Les prévenus et leur famille ont indiqué quant à eux qu'elles pouvaient se servir. Il sera retenu que les deux sœurs étaient partiellement nourries quand les époux étaient présents et qu'elles achetaient leur nourriture le reste du temps. Un salaire mensuel de CHF 400.- sera ajouté pour la nourriture, étant rappelé que le montant mensuel prévu pour la nourriture est de CHF 645.-. Elles étaient en revanche logées dans des conditions confortables, si bien que cette partie du salaire a été fournie en nature.

Il y a usure dès une différence de 20% dans les domaines réglementés. En retenant que la plaignante C______ a reçu un salaire mensuel de CHF 1'500.- sur toute la période, auquel on ajoute CHF 400.- comme salaire en nature en lien avec la nourriture dont elle n'a pas bénéficié, et ce sans compter les majorations pour heures supplémentaires – qui pourraient représenter un montant important – jours fériés, travail de nuit et indemnités vacances, on obtient un salaire horaire perçu de CHF 10.20 / heure, selon les calculs suivants :

-            13,5 heures/ jour x 2 jours x 52 semaines = 1'404 heures par année;

-            8 heures / jour x 2 x 52 = 832 heures par année;

-            1'404 + 832 = 2'236 heures par année.

-            CHF 1'500.- + CHF 400 = CHF 1'900.- x 12 = CHF 22'800.- / année;

-            CHF 22'800.- / 2'236 heures = CHF 10.20 / heure.

Les salaires réglementés s'élevaient entre CHF 16.89 / heure et CHF 18.53 / heure entre 2014 et 2019, après réduction de 15% des salaires bruts conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, selon les calculs suivants :

Pour 2014 et 2015 :

-            45 heures / semaine x 52 semaines = 2'340 heures / année;

-            Salaire en espèce de CHF 2'710.- (CHF 3'700.- - CHF 645.- [nourriture] - CHF 345.- [logement]) diminué de 15% = CHF 2'303.50;

-            Calcul du salaire annuel : CHF 3'293.50 (soit CHF 2'303.50 [salaire en espèce diminué de 15%] + CHF 645.- [nourriture] + CHF 345.- [logement]) x 12 = 39'522.- / année;

-            CHF 39'522.- / 2'340 heures = CHF 16.89 / heure;

Pour 2016 et 2017 :

-            2'340 heures / années

-            Salaire en espèce de 2'766.- diminué de 15% = CHF 2'351.10;

-            Calcul du salaire annuel : CHF 3'341.10 (soit CHF 2'351.10 [salaire en espèce diminué de 15%] + CHF 645.- [nourriture] + CHF 345.- [logement]) x 12 = 40'093.20;

-            CHF 40'093.20 / 2'340 heures = CHF 17.13

Pour 2018 comme employée non qualifié :

-            45 heures / semaine x 52 semaines = 2'340 heures / année

-            Salaire en espèce de CHF 2'811.- diminué de 15% = CHF 2'389.35

-            CHF 3'379.35 (soit CHF 2'389.35 [salaire en espèce diminué de 15%] + CHF 645.- [nourriture] + CHF 345.- [logement]) x 12 = 40'552.20 / année

-            CHF 40'552.20 / 2'340 heures = CHF 17.33 / heure.

Pour 2018 et 2019 comme employée avec 4 ans d'expérience :

-            45 heures / semaine x 52 semaines = 2'340 heures / année

-            Salaire en espèce de CHF 3'087.- diminué de 15% = CHF 2'624.-

-            CHF 3'614.- (soit CHF 2'624.- [salaire en espèce diminué de 15%] + CHF 645.- [nourriture] + CHF 345.- [logement]) x 12 = 43'368.- / année

-            CHF 43'368.- / 2'340 heures = CHF 18.53 / heure.

On obtient ainsi une différence avec le salaire perçu s'élevant entre 40,52% et 49,91% entre les années 2014 et 2018, selon les calculs suivants :

Pour 2014 :

-            CHF 16.89 / heure - CHF 10.20 / heure = CHF 6.69, soit une différence de 39,60%

 

Pour 2018 :

-            CHF 18.53 / heure - CHF 10.20 / heure = CHF 9.25, soit une différence de 49,91%.

La différence dépassant 20%, le Tribunal considère comme établi qu'une disproportion manifeste entre les prestations échangées a existé depuis le début jusqu'à la fin de la relation de travail.

S'agissant de l'examen de la situation de faiblesse de la plaignante C______, il est établi que celle-ci n'avait pas de permis de séjour, ne connaissait pas la Suisse, ne parlait pas le français et était isolée socialement, à l'exception de sa sœur qu'elle a fait venir à Genève deux ans après son arrivée. Même si elle avait un accord avec une personne de nationalité italienne pour pouvoir loger dans un appartement les jours où elle ne travaillait pas dans la demeure de Jussy, elle restait dépendante des prévenus et de son emploi chez eux, qui constituait sa principale source de revenus, lui permettant d'envoyer de l'argent à ses enfants restés dans son pays d'origine. Il est ainsi établi qu'elle se trouvait en situation de gêne et de dépendance.

S'agissant de leur intention, les prévenus ont sciemment profité du fait que la plaignante venait d'un pays où les salaires étaient très bas et qu'elle ne connaissait pas les standards suisses en matière d'économie domestique. Dès le départ, elle a accepté un salaire qui lui semblait généreux, alors que ledit salaire était en totale disproportion à teneur du droit suisse avec le nombre d'heures travaillées. Elle a continué à accepter ces conditions par la suite, par peur de perdre son emploi et d'être expulsée de Suisse, ce que les prévenus savaient. Certes, la plaignante bénéficiait de conditions de logement confortables, vivant dans un appartement indépendant, avec trois chambres et une cuisine équipée et recevant des cadeaux à Noël. Cela ne changent rien au fait que les prévenus ont profité d'une employée à domicile, payée à bas prix, et qu'ils l'ont exploitée.

Compte tenu de ce qui précède les prévenus X______ et Y______ seront reconnus coupables d'usure (art. 157 ch. 1 CP) en lien avec les chiffres 1.1.1.b) et 1.2.1.b) de l'acte d'accusation.

B______

3.2.4. S'agissant de l'examen d'une éventuelle disproportion, le même raisonnement que celui appliqué en lien avec la plaignante C______ s'applique pour l'établissement des horaires et de la rémunération de la plaignante B______. Celle-ci a indiqué avoir été engagée à raison de six jours par semaine, pour un salaire mensuel de CHF 2'000.-. Les horaires étaient les mêmes que pour sa sœur, si bien que, la moitié du temps, elle travaillait 13,5 heures par jour et l'autre moitié 8 heures par jour.

Sur la base d'un salaire mensuel de CHF 2'000.- sur toute la période, auquel il est ajouté CHF 400.- comme salaire en nature en lien avec la nourriture et ce sans compter les majorations pour heures supplémentaires, jours fériés, travail de nuit et indemnités vacances, on obtient un salaire horaire perçu de CHF 8.59 / heure, selon les calculs suivants :

-            13,5 heures/ jour x 3 jours x 52 semaines = 2'106 heures par année;

-            8 heures / jour x 3 x 52 = 1'248 heures par année;

-            2'106 + 1'248 = 3'354 heures par année.

-            CHF 2'000.- + CHF 400 = CHF 2'400.- x 12 = CHF 28'800.- / année;

-            CHF 28'800.- / 3'354 heures = CHF 8.59 par heure.

Les salaires réglementés s'élevaient entre CHF 17.13 / heure et CHF 17.33 / heure entre 2016 et 2019, après réduction de 15% des salaires bruts conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, selon les calculs suivants :

Pour 2016 et 2017 :

-            45 heures / semaine x 52 semaines = 2'340 heures / année;

-            Salaire en espèce de CHF 2'766.- diminué de 15% = CHF 2'351.10;

-            CHF 3'341.10 (soit CHF 2'351.10 [salaire en espèce diminué de 15%] + CHF 645.- [nourriture] + CHF 345.- [logement]) x 12 = CHF 40'093.20 / année;

-            CHF 40'093.20 / 2'340 heures = CHF 17.13 / heure.

Pour 2018 et 2019 :

-            45 heures / semaine x 52 semaines = 2'340 heures / année;

-            Salaire en espèce de CHF 2'811.- diminué de 15% = CHF 2'389.35;

-            CHF 3'379.35 (soit CHF 2'389.35 [salaire en espèce diminué de 15%] + CHF 645.- [nourriture] + CHF 345.- [logement]) x 12 = 40'552.20 / année;

-            CHF 40'552.20 / 2'340 heures = CHF 17.33 / heure.

On obtient ainsi une différence avec le salaire perçu s'élevant entre 40,52% et 49,91% entre les années 2016 et 2018, selon les calculs suivants :

Pour 2016 :

-            CHF 17.13 / heure - CHF 8.59 / heure = CHF 8.54, soit une différence de 49,85%

Pour 2018 :

-            CHF 17.33 / heure - CHF 8.59 / heure = CHF 8.74, soit une différence de 50,43%.

La différence dépassant 20%, le Tribunal considère comme établi qu'une disproportion manifeste entre les prestations échangées a existé depuis le début jusqu'à la fin de la relation de travail.

Sous l'angle de l'élément subjectif, pour les mêmes motifs que ceux exposé en lien avec la plaignante C______, les prévenus ont sciemment exploité la gêne et la dépendance de la plaignante B______, pour obtenir d'elle qu'elle travaille à leur service pour un salaire bien en dessous des normes légales, ce que les prévenus savaient. Même si elle pouvait sortir pour aller faire ses courses et si elle logeait dans des conditions confortables, la plaignante était dépendante des prévenus et de son emploi chez eux, qui constituait sa seule source de revenu.

Compte tenu de ce qui précède les prévenus X______ et Y______, ayant agi intentionnellement, seront reconnus coupables d'usure (art. 157 ch. 1 CP), en lien avec les chiffres 1.1.1.c) et 1.2.1.c) de l'acte d'accusation.

A______

3.2.5. S'agissant de l'examen d'une éventuelle disproportion, il est établi, notamment sur la base des déclarations des plaignantes C______ et B______, que le plaignant A______ travaillait comme jardinier, cinq jours par semaine, à raison de huit heures par jour (de 08h00 à 17h00, avec une pause d'une heure à midi). A cet égard, le témoignage écrit de Q______, produit par les prévenus à l'audience de jugement, qui fonctionne actuellement comme jardinier dans la propriété des époux X______/Y______, n'est pas pertinent quant à l'appréciation du nombre d'heures travaillées par le plaignant A______, puisque les deux employés n'ont pas travaillé à la même époque et qu'ils n'ont pas eu le même cahier des charges. Il est relevé que l'attestation ne parle que de l'entretien du jardin alors que le plaignant effectuait également d'autres tâches, comme de la peinture, du nettoyage et fonctionnait de manière générale comme "homme à tout faire". Ces autres attributions expliquent que son horaire ait été constant toute l'année, sans baisse d'activité en hiver. En outre, le plaignant A______ était engagé par journée de travail. Même si, par hypothèse, un autre employé était capable d'effectuer les mêmes tâches que lui en moins de temps, il ne serait pas possible pour autant d'en tirer des conclusions quant à la réalité des heures de travail que le plaignant a accompli. Comme déjà expliqué, les déclarations du plaignant sont crédibles, confirmées par les plaignantes C______ et B______, et l'horaire qu'il a allégué sera retenu comme base de calcul.

Son salaire a connu quelques variations au cours des dix années passées au service des époux X______/Y______, étant précisé qu'à partir de janvier 2018, il n'a travaillé que quatre jours, au lieu de cinq précédemment :

- de 2009 à 2012, son salaire était de CHF 2'000.-;

- de janvier 2013 à décembre 2014, son salaire était de CHF 2'200.-;

- de janvier 2015 à décembre 2017, son salaire était de CHF 2'500.-;

- de janvier 2018 au 10 avril 2019, son salaire était de CHF 2'000.-.

Il y a usure dès une différence de 20% dans le domaine réglementé. Le plaignant A______ était employé à temps partiel. Si ses employeurs devaient lui accorder une pause pour manger selon le CTT, ils n'avaient pas d'obligation quant à la nourriture ou au logement. Sans compter les majorations pour heures supplémentaires, jours fériés et indemnités vacances, on obtient un salaire horaire perçu de CHF 11.54 / heure de 2009 à 2012, de CHF 12.69 / heure de 2012 à 2014 et de CHF 14.42 / heure de 2015 à 2019, selon les calculs suivants[3]:

De 2009 à 2012 :

- 8 heures/ jour x 5 jours x 52 semaines = 2'080 heures par année;

- CHF 2'000.- x 12 = CHF 24'000.- / année;

-            CHF 24'000.- / 2'080 heures = CHF 11.54 par heure.

 

De 2013 à 2014 :

-            2080 heures par année;

-            CHF 2'200.- x 12 = CHF 26'400.-;

-            CHF 26'400.- / 2080 heures = CHF 12.69 / heure.

De 2015 à 2017 :

-            2080 heures par année;

-            CHF 2'500.- x 12 = CHF 30'000.-;

-            CHF 30'000.- / 2080 heures = CHF 14.42 / heure.

De 2018 à 2019 :

-            8 heures / jour x 4 jours x 52 semaines = 1'664 heures / année;

-            CHF 2'000.- x 12 = CHF 24'000.-;

-            CHF 24'000.- / 1'664 heures = CHF 14.42 / heure.

Les salaires réglementés s'élevaient entre CHF 15.68 / heure et CHF 18.53 / heure entre 2009 et 2019, après réduction de 15% des salaires bruts conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral, selon les calculs suivants :

Pour 2009 :

- CHF 18.45 selon art. 18 al. 2 let. c CTT-TED, diminué de 15% = CHF 15.68 / heure;

Pour 2010 - 2011:

- CHF 18.75 selon art. 18 al. 2 let. c CTT-TED, diminué de 15% = CHF 15.94 / heure;

Pour 2012 :

- CHF 3'625.- de salaire minimum diminué de 15% = CHF 3'081.25;

- CHF 3'081.25 / 195 heures (45 heures x 52 semaines / 12 mois) = CHF 15.80[4] / heure;

Pour 2013 :

Pour un employé non qualifié :

- CHF 3'625.- / mois diminué de 15% = CHF 3'081.25

- CHF 3'081.25 / 195 heures = CHF 15.80 / heure.

Pour un employé sans qualification avec 4 ans d'expérience

- CHF 3'900.- / mois diminué de 15% = CHF 3'315.-

- CHF 3'315 / 195 heures = CHF 17.- / heure.

Pour 2014 et 2015 :

Pour un employé sans qualification avec 4 ans d'expérience :

- CHF 3'969.- / mois diminué de 15% = CHF 3'373.65;

- CHF 3'373.65 / 195 heures = CHF 17.30

Pour un jardinier qualifié avec CFC ou porteur d'un titre ou d'une expérience équivalente :

- CHF 4'760.- / mois diminué de 15% = CHF 4'046.-

- CHF 4'046.- / 195 heures = CHF 20.75 / heure.

Pour 2016 et 2017 :

- CHF 4'831.- / mois diminué de 15% = CHF 4'106.35

- CHF 4'106.35 / 195 = CHF 21.05 / heure.

Pour 2018 et 2019 :

- CHF 4'899.- / mois diminué de 15% = CHF 4'164.15

- CHF 4'164.15 / 195 = CHF 21.35 / heure.

On obtient ainsi une différence avec le salaire perçu s'élevant entre 19,68% et 38,84% entre les années 2009 et 2019, selon les calculs suivants :

Pour 2009 :

-            CHF 15.68 / heure - CHF 11.54 / heure = CHF 4.14, soit une différence de 26,40%.

Pour 2010 – 2011 :

-            CHF 15.94 / heure - CHF 11.54 / heure = CHF 4.40 soit une différence de 27,60%.

De janvier 2012 à décembre 2012 :

-            CHF 15.80 / heure - CHF 11.54 / heure = CHF 4.26 soit une différence de 26,96%.

De janvier 2013 à mars 2013 :

-            CHF 15.80 / heure - CHF 12.69 = CHF 3.11, soit une différence de 19,68 %.

D'avril 2013 à décembre 2013 :

-            CHF 17.- / heure - CHF 12.69 = CHF 4.31, soit une différence de 25,35%.

De janvier 2014 à mars 2014 :

-            CHF 17.30 / heure - CHF 12.69 / heure = CHF 4.61, soit une différence de 26,64%.

D'avril 2014 à décembre 2014 :

-            CHF 20.75 / heure - CHF 12.69 / heure = CHF 8.06, soit une différence de 38,84%.

De janvier 2015 à décembre 2015 :

-            CHF 20.75 / heure - CHF 14.42 / heure = CHF 6.33, soit une différence de 30,50%.

De janvier 2016 à décembre 2017 :

-            CHF 21.05 / heure - CHF 14.42 / heure = CHF 6,63, soit une différence de 31,49%.

De janvier 2018 au 10 avril 2019 :

-            CHF 21.35 / heure - CHF 14.42 / heure = CHF 6,93, soit une différence de 32,45%.

La différence dépassant 20%, respectivement atteignant 20% entre janvier et mars 2013, le Tribunal considère comme établi qu'une disproportion manifeste entre les prestations échangées a existé depuis le début jusqu'à la fin de la relation de travail.

S'agissant de l'examen de la situation de faiblesse du plaignant, celui n'avait pas de permis de séjour, connaissait mal la Suisse et ne parlait pas le français. La précarité de sa situation en Suisse et sa peur d'être expulsé du pays l'ont forcé à accepter des conditions de travail et salariales qu'il n'aurait pas accepté dans d'autres circonstances. Même s'il ne vivait pas dans la propriété des prévenus et qu'il avait un autre emploi accessoire, le plaignant était dépendant de ses employeurs, dans la mesure où il avait absolument besoin de ce salaire pour vivre et entretenir sa famille. Une situation de gêne et une situation de dépendance est ainsi établie.

Pour les motifs déjà exposés, les prévenus ont tous les deux eu la conscience et la volonté d'exploiter la gêne et la dépendance du plaignant pour bénéficier des services d'un jardinier en le payant moins que les minimums prévus dans la branche.

Compte tenu de ce qui précède, les prévenus X______ et Y______ seront reconnus coupable d'usure (art. 157 ch. 1 CP) en lien avec les chiffres 1.1.1.d) et 1.2.1.d) de l'acte d'accusation.

Infractions à la LEI

4.1.1. Aux termes de l'art. 5 LEI, tout étranger doit, pour entrer en Suisse, remplir les conditions suivantes : avoir une pièce de légitimation reconnue pour le passage de la frontière et être muni d'un visa si ce dernier est requis (let. a), disposer des moyens financiers nécessaires à son séjour (let. b), ne représenter aucune menace pour la sécurité et l'ordre public ni pour les relations internationales de la Suisse (let. c) et ne pas faire l'objet d'une mesure d'éloignement ou d'une expulsion au sens des art. 66a ou 66abis CP ou 49a ou 49abis CPM (let. d).

4.1.2. En vertu de l'art. 116 al. 1 LEI, est puni d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire quiconque, en Suisse ou à l'étranger, facilite l'entrée, la sortie ou le séjour illégal d'un étranger ou participe à des préparatifs dans ce but (let. a) et celui qui procure à un étranger une activité lucrative en Suisse alors qu'il n'est pas titulaire de l'autorisation requise (let. b). Dans les cas de peu de gravité, la peine peut consister en une simple amende (al. 2).

L'art. 116 LEI s'inscrit à la suite de l'art. 115 LEI, qui réprime l'entrée et le séjour illégal. Les comportements qu'il réprime se caractérisent comme des actes de complicité à ceux réprimés par l'art. 115 LEI. Sont visés les comportements de facilitation des actes principaux sanctionnés par l'art. 115 LEI, pour autant que ces comportements poursuivent effectivement ce but (ATF 137 IV 153 consid. 1.7).

L'infraction en cause, soit le fait de faciliter le séjour illégal d'une personne en Suisse, est difficile à circonscrire. En effet, l'étranger qui séjourne illégalement dans notre pays noue de nombreuses relations avec d'autres personnes. Il prend par exemple un moyen de transport, achète de la nourriture ou va au restaurant. Tout contact avec cet étranger, qui rend plus agréable le séjour de celui-ci en Suisse, ne saurait être punissable au sens de l'art. 23 al. 1 § 5 LSEE (art. 116 al. 1 let. a nLEI). Sinon, le champ d'application de cette disposition serait illimité. Aussi, le Tribunal fédéral exige que le comportement de l'auteur rende plus difficile le prononcé ou l'exécution d'une décision à l'encontre de l'étranger en situation irrégulière ou restreigne, pour les autorités, les possibilités de l'arrêter. En règle générale, il est admis que celui qui héberge une personne séjournant illégalement en Suisse facilite le séjour illégal de celle-ci, qu'il agisse en tant qu'hôtelier, de bailleur ou d'employeur qui loue une chambre. Le logement est alors susceptible de devenir une cachette pour l'étranger en situation irrégulière, lui permettant ainsi de se soustraire à l'intervention des autorités administratives (ATF 130 IV 77, consid. 2.3.2). L'art. 116 al. 1 LEI vise ainsi tous les actes qui sont de nature à compliquer le prononcé ou l'exécution par les autorités de décisions en matière de droit des étrangers. Il en va ainsi de celui qui héberge un étranger sans autorisation pendant une certaine durée. A défaut de mention expresse de la négligence, l'incitation au séjour illégal, qui constitue un délit, ne peut être commise qu'intentionnellement ; le dol éventuel suffit. Dans les cas de peu de gravité, la peine peut consister en une simple amende (art. 116 al. 2 LEI). La notion de "peu de gravité" est juridiquement indéterminée. Une telle qualification doit néanmoins reposer sur un examen de l'ensemble des circonstances objectives et subjectives. Le juge dispose en la matière d'un large pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 6B_430/2020 du 26 août 2020 consid. 3.1).

4.1.3. Selon l'art. 117 al. 1 LEI, quiconque, intentionnellement, emploie un étranger qui n'est pas autorisé à exercer une activité lucrative en Suisse ou a recours, en Suisse, à une prestation de services transfrontaliers d'une personne qui n'a pas l'autorisation requise est puni d'une peine privative de liberté d'un an au plus ou d'une peine pécuniaire.

L'employeur est soumis à un devoir de diligence arrêté à l'art. 91 LEI (Nguyen / Amarelle [éds], Code annoté de droit des migrations: Loi sur les étrangers (LEtr), n. 11 ad art. 117). Selon cet article, avant d'engager un étranger, l'employeur doit s'assurer qu'il est autorisé à exercer une activité lucrative en Suisse en examinant son titre de séjour ou en se renseignant auprès des autorités compétentes.

L'employeur ne peut s'exonérer de cette obligation de diligence en se réfugiant derrière une éventuelle tromperie de tiers. Il appartient à chaque employeur de procéder au contrôle. La simple omission de procéder à l'examen du titre de séjour ou de se renseigner auprès des autorités compétentes constitue déjà une violation du devoir de diligence (arrêt du Tribunal fédéral 2C_357/2009 du 16 novembre 2009 consid. 5.1 et 5.3).

La notion d'employeur au sens de l'art. 117 al.1 LEI est autonome. Elle est plus large que celle du Code des obligations et englobe l'employeur de fait (ATF 128 IV 170, consid. 4.1 = JdT 2004 IV 89; arrêt du Tribunal fédéral 6B_815/2009 du 18 février 2010, consid. 2.3). L'infraction n'est réalisée que si l'employeur a agi intentionnellement, ce qui comprend le dol éventuel (arrêt du Tribunal fédéral 6B_184/2009 du 20 mai 2009 consid. 1.2.2).

4.2.1. En l'espèce, il est établi par le dossier et il n'est pas contesté que les prévenus ont hébergé et employé les plaignantes C______ et B______ dans la maison qu'ils occupaient à Jussy. Il ressort notamment des déclarations du prévenu X______ que lui et son épouse savaient que les intéressées étaient ressortissantes du Nicaragua et qu'elles ne bénéficiaient ni d'une autorisation de séjour ni d'une autorisation de travail en Suisse. Même si les membres de la famille X______/Y______ ont indiqué que la prévenue Y______ ne s'occupait pas des aspects administratifs, il n'en demeure pas moins que celle-ci était parfaitement consciente du statut de ses employés et des aspects liés aux autorisations de séjour et de travail. En effet, les parties plaignantes ont expliqué que l'intéressée avait affirmé à plusieurs reprises qu'elle ne voulait pas régulariser les personnes qui travaillaient à son service, afin d'éviter que celles-ci ne soient engagées ailleurs. Il apparait ainsi que les deux époux connaissaient la situation de leurs employés. En outre, ils avaient tous deux été parties à la procédure prud'homale ouverte par la plaignante D______. Ainsi, dès 2009, au plus tard, ils ont été confronté aux questions liées au statut d'un employé ainsi qu'à celles liées aux obligations d'un employeur, notamment par rapport aux cotisations sociales, qui seront évoquées ci-dessous. Il apparait dès lors que les deux prévenus connaissaient leurs obligations vis-à-vis de leurs employés.

En hébergeant et en procurant une activité lucrative aux plaignantes, les prévenus se sont donc rendus coupable d'incitation au séjour illégal au sens de l'art. 116 al. 1 let. a et b LEI en lien avec les chiffres 1.1.2.a) et 1.2.2.a) de l'acte d'accusation.

4.2.2. S'agissant du fait d'avoir incité la plaignante B______ à venir s'installer en Suisse, le Tribunal relève que l'action pénale se prescrit par sept ans (art. 97 al. 1 let. d CP). Le comportement reproché est un fait ponctuel qui ne s'inscrit pas dans la durée. Les faits à examiner s'étant déroulés en mars 2016, l'action pénale les concernant s'est prescrite en mars 2023.

Partant, il sera procédé au classement des faits visés sous chiffre 1.1.2.b) et 1.2.2.b) de l'acte d'accusation.

4.2.3. Il est enfin établi par les éléments du dossier et admis par les prévenus que ceux-ci ont employé à leur service la plaignante C______ du mois d'août 2014 au 10 avril 2019, la plaignante B______ du 12 mars 2016 au 10 avril 2019 et le plaignant A______ du mois d'avril 2009 au 10 avril 2019, alors que ceux-ci étaient dépourvus d'autorisation de séjour en Suisse. La coactivité des deux prévenus est donnée par identité de motifs avec ce qui vient d'être exposé sous chiffre 4.2.1.

L'emploi d'étrangers sans autorisation est un délit continu au sens de l'art. 98 al. 1 let. d CP, si bien que la prescription de l'action pénale a commencé à courir le 10 avril 2019 et n'est pas atteinte au jour du jugement.

Partant, les prévenus seront reconnus coupables d'emploi d'étrangers sans autorisation (art. 117 al. 1 LEI) en lien avec les chiffres 1.1.3. et 1.2.3. de l'acte d'accusation pour les périodes susmentionnées.

Infractions à la LAVS, à la LPP et à la LAA

5.1.1. L'art. 87 al. 2 LAVS prévoit que celui qui, par des indications fausses ou incomplètes, ou de toute autre manière, aura éludé, en tout ou en partie, l'obligation de payer des cotisations, sera puni d'une peine pécuniaire de 180 jours-amende au plus, à moins qu'il ne s'agisse d'un crime ou d'un délit frappé d'une peine plus lourde.

Depuis le 1er janvier 2018, un alinéa 3 a été ajouté à l'art. 87 LAVS, selon lequel celui qui, en sa qualité d'employeur, omet de s'affilier à une caisse de compensation et de décompter les salaires soumis à cotisation de ses salariés dans le délai fixé par le Conseil fédéral en vertu de l'art. 14, sera puni d'une peine pécuniaire de 180 jours-amende au plus, à moins qu'il ne s'agisse d'un crime ou d'un délit frappé d'une peine plus lourde

Selon l'art. 14 al. 1 LAVS, les cotisations perçues sur le revenu provenant de l'exercice d'une activité dépendante sont retenues lors de chaque paie. Elles doivent être versées périodiquement par l'employeur en même temps que la cotisation d'employeur.

Selon le message du Conseil fédéral relatif à la modification de la loi fédérale contre le travail au noir du 18 décembre 2015 (FF 2016 141), l'art. 87 LAVS fait état d'infractions qui sont sanctionnées comme des délits. Selon l'art. 87 LAVS, deuxième paragraphe, actuellement en vigueur, le fait d'éluder l'obligation de payer des cotisations est sanctionné comme un délit. Aux termes de cette disposition, est punissable toute personne qui, par des indications fausses ou incomplètes, ou de toute autre manière, élude, en tout ou en partie, l'obligation de payer des cotisations. Cette infraction suppose une manœuvre frauduleuse active, qui ne saurait être constituée par une simple omission (ATF 89 IV 167 consid. 1). Ainsi, un employeur qui est affilié à une caisse de compensation AVS et qui effectue des décomptes pour un travailleur, mais n'en déclare pas un deuxième ou fournit à son sujet des indications fausses ou incomplètes, se rend passible d'une peine aux termes de cette disposition. Par contre, celui qui d'emblée ne s'affilie pas à une caisse de compensation se rend coupable non pas d'une manœuvre frauduleuse active, mais d'une simple omission, et ne peut donc être puni sur la base du seul deuxième paragraphe. Les éléments constitutifs de cette nouvelle infraction seront réputés réunis si l'employeur a par deux fois violé ses obligations au moment où expire le délai de décompte. Il faut ainsi, d'une part, qu'il ne se soit pas affilié à temps à la caisse de compensation compétente, comme le prescrit l'art. 64 al. 5, LAVS, et d'autre part, qu'il n'ait pas fourni le décompte des salaires dans les 30 jours qui suivent le terme de la période de décompte. Il aura par-là manifesté sa volonté d'éluder l'obligation de payer des cotisations (FF 2016 161).

5.1.2. L'art. 76 al. 2 LPP prévoit que celui qui, par des indications fausses ou incomplètes, ou de toute autre manière, aura éludé l'obligation de payer des cotisations ou des contributions à une institution de prévoyance ou au fonds de garantie, sera puni, à moins qu'il ne s'agisse d'un délit ou d'un crime frappé d'une peine plus lourde par le code pénal, de l'emprisonnement pour six mois au plus ou d'une amende de 30 000 francs au plus.

Depuis le 1er janvier 2023, la disposition a connu une modification formelle, l'alinéa 2 étant devenu l'art. 76 al. 1 let. b LPP et sanctionné d'une peine pécuniaire de 180 jours-amende au plus, à moins qu'il ne s'agisse d'un délit ou d'un crime frappé d'une peine plus lourde par le code pénal.

Cette disposition s'articule de la même manière que l'art. 87 al. 2 LAVS. Même sous l'aspect de la soustraction "de toute autre manière", l'élément constitutif de l'infraction n'est pas réalisé par la simple omission du paiement des cotisations. La personne tenue de cotiser doit plutôt, par un comportement actif, amener l'office compétent à penser qu'il n'est pas soumis à l'obligation de cotiser ou qu'il n'y est pas soumis à hauteur du véritable montant (Jean-Richard, Uttinger, Tremp, LPP et LFLP, in CASS - Commentaire des assurances sociales suisses 2ème édition, 2020, n° 27 ad art. 76 LPP).

5.1.3. Selon l'art. 112 al. 1 let. a LAA, est puni d'une peine pécuniaire de 180 jours-amende au plus, à moins qu'une infraction plus grave selon une autre loi n'ait été commise, quiconque, intentionnellement, par des indications fausses ou incomplètes ou d'une autre manière, se dérobe, partiellement ou totalement, à ses obligations en matière d'assurance ou de primes. La négligence est punissable en application de l'al. 4 de la disposition.

5.2.1. En l'occurrence, l'art. 87 al. 3 LAVS n'est entré en vigueur que le 1er janvier 2018. Auparavant, la simple omission de s'affilier à une caisse de compensation et de s'acquitter des cotisations n'était pas punissable, en l'absence d'une manœuvre frauduleuse active, soit faute d'avoir donné des indications fausses ou incomplètes. Ainsi, les prévenus ne sont pas punissables pour toute la période antérieure au 1er janvier 2018. A partir de cette date en revanche, le fait de ne pas s'être affilié à une Caisse AVS et de ne pas avoir décompté les heures soumises à cotisation, est constitutif d'infraction à l'art. 87 al. 3 LAVS. Comme cela a été évoqué sous chiffre 4.2.1., les prévenus connaissaient leurs obligations en lien avec les cotisations AVS.

Partant, les prévenus X______ et Y______ seront reconnus coupables d'infraction à l'art. 87 al. 3 LAVS, pour la période du 1er janvier 2018 au 10 avril 2019, en lien avec les chiffres 1.1.4 et 1.2.4 de l'acte d'accusation.

5.2.2. Les art. 76 al. 2 LPP et 112 al. 1 let. a LAA sont les pendants de l'art. 87 al. 2 LAVS en matière de prévoyance professionnelle et d'assurance-accident. Dans ces domaines, le législateur n'a, pour l'heure, pas adapté la législation, qui ne récrimine pas l'omission d'affilier ses employés. En l'absence de comportement actif, les prévenus seront dès lors acquittés des chefs d'infraction à l'art. 76 al. 2 LPP et 112 al. 1 let. a LAA (chiffres 1.1.5., 1.2.5 et complément de l'acte d'accusation).

Empêchement d'accomplir un acte officiel

6.1. L'art. 286 al. 1 CP prévoit que celui qui aura empêché une autorité, un membre d'une autorité ou un fonctionnaire d'accomplir un acte entrant dans ses fonctions sera puni d'une peine pécuniaire de 30 jours-amende au plus.

Il n'est pas nécessaire que l'auteur parvienne à éviter effectivement l'accomplissement de l'acte officiel. Il suffit qu'il le rende plus difficile, l'entrave ou le diffère. En outre, le dol éventuel suffit (ATF 133 IV 97 consid. 4.2; 127 IV 115 consid. 2; 124 IV 127 consid. 3a).

Le comportement incriminé à l'art. 286 CP suppose une résistance qui implique une certaine activité (ATF 133 IV 97 consid. 4.2 p. 100; 127 IV 115 consid. 2 p. 117 s. et les références citées) qui est réalisée, par exemple, par le fait de prendre la fuite (ATF 120 IV 136 consid. 2a p. 140 et les références citées). Il peut s'agir d'une obstruction physique : l'auteur, par sa personne ou un objet qu'il dispose à cette fin, empêche ou gêne le passage du fonctionnaire pour lui rendre plus difficile l'accès à une chose. On peut aussi penser à celui qui, en restant fermement à sa place, ne se laisse pas ou difficilement emmener (Corboz, Les infractions en droit suisse, Vol. II, 3ème éd., n. 13 ad art. 286 CP).

6.2. En l'espèce, le prévenu X______ a contesté les faits, affirmant qu'au moment d'être mis au sol et menotté, il était tranquillement assis dans un fauteuil. Il avait seulement demandé de poursuivre la perquisition en cours. Les policiers s'étaient comportés comme des "cow-boys" et le rapport de police avait été rédigé de manière à couvrir le fait qu'un de ses doigts avait été cassé au moment de son interpellation.

Il ressort toutefois du rapport de police, confirmé en audience de jugement par l'Inspecteur L______, lequel a participé à l'interpellation du prévenu, que tout au long de la perquisition, celui-ci a adopté un comportement de résistance passive, qu'il n'a pas respecté l'ordre de suivre les inspecteurs pour se rendre dans les locaux de M______, qu'il a activement résisté lorsque les inspecteurs ont cherché à le menotter et qu'il a refusé d'entrer dans le véhicule de police. Les conditions de l'art. 286 CP sont ainsi réalisées.

Le Tribunal a acquis la conviction que le prévenu n'a pas obéi à l'ordre qui lui était donné de se lever de son fauteuil pour suivre la police et que la contrainte a dû être utilisée en raison de son attitude, rendant ainsi plus difficile la conduite de la perquisition. Par la suite, le prévenu en résistant à son interpellation, a rendu celle-ci encore plus difficile.

Le prévenu X______ s'est ainsi rendu coupable d'empêchement d'accomplir un acte officiel au sens de l'art. 286 CP.

Peine

7.1.1.1. Selon l'art. 2 al. 1 CP, la loi pénale ne s'applique qu'aux faits commis après son entrée en vigueur (principe de la non-rétroactivité de la loi pénale). Cependant, en vertu de l'art. 2 al. 2 CP, une loi nouvelle s'applique aux faits qui lui sont antérieurs si, d'une part, l'auteur est mis en jugement après son entrée en vigueur et si, d'autre part, elle est plus favorable à l'auteur que l'ancienne (exception de la lex mitior). Il en découle que l'on applique en principe la loi en vigueur au moment où l'acte a été commis, à moins que la nouvelle loi ne soit plus favorable à l'auteur.

7.1.1.2. En l'espèce, le nouveau droit des sanctions en vigueur depuis le 1er janvier 2018 n'étant pas plus favorable au prévenu in concreto, il sera fait application de l'ancien droit des sanctions.

7.1.2. Selon l'art. 47 al. 1 aCP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur, en tenant compte des antécédents et de la situation personnelle de ce dernier ainsi que de l'effet de la peine sur son avenir.

La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47 al. 2 CP).

7.1.3. Aux termes de l'art. 40 aCP, la durée de la peine privative de liberté est en règle générale de six mois au moins et de 20 ans au plus. Lorsque la loi le prévoit expressément, la peine privative de liberté est prononcée à vie.

7.1.4. Conformément à l'art. 34 aCP, la peine pécuniaire ne peut excéder 360 jours-amende et le juge en fixe le nombre en fonction de la culpabilité de l'auteur (al. 1). Un jour-amende est de CHF 3'000.- au plus. Le juge en arrête le montant selon la situation personnelle et économique de l'auteur au moment du jugement, notamment en tenant compte de son revenu et de sa fortune, de son mode de vie, de ses obligations d'assistance, en particulier familiales, et du minimum vital (al. 2).

7.1.5.1. Selon l'art. 42 aCP, le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire, d'un travail d'intérêt général ou d'une peine privative de liberté de six mois au moins et de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (al. 1). Le juge peut prononcer, en plus du sursis, une peine pécuniaire sans sursis ou une amende (al. 4).

7.1.5.2 Si, durant le délai d’épreuve, le condamné commet un crime ou un délit et qu’il y a dès lors lieu de prévoir qu’il commettra de nouvelles infractions, le juge révoque le sursis ou le sursis partiel. Si la peine révoquée et la nouvelle peine sont du même genre, il fixe une peine d’ensemble en appliquant par analogie l’art. 49 (art. 46 al. 1 aCP).

S’il n’y a pas lieu de prévoir que le condamné commettra de nouvelles infractions, le juge renonce à ordonner la révocation. Il peut adresser au condamné un avertissement et prolonger le délai d’épreuve de la moitié au plus de la durée fixée dans le jugement. Il peut ordonner une assistance de probation et imposer des règles de conduite pour le délai d’épreuve ainsi prolongé. Si la prolongation intervient après l’expiration du délai d’épreuve, elle court dès le jour où elle est ordonnée (art. 46 al. 2 aCP).

7.1.5.3. Selon l'art. 106 al. 1 aCP, sauf disposition contraire de la loi, le montant maximum de l'amende est de CHF 10'000.-. L'al. 2 précise que le juge prononce une peine privative de liberté de substitution d'un jour au moins et de trois mois au plus, pour le cas où le condamné ne paie pas l'amende de manière fautive.

Selon la jurisprudence, la combinaison de peines prévue par l'art. 42 al. 4 aCP se justifie lorsque le sursis peut être octroyé mais que, pour des motifs de prévention spéciale, une sanction ferme accompagnant la sanction avec sursis paraît mieux à même d'amener l'auteur à s'amender. Elle doit contribuer, dans l'optique de la prévention tant générale que spéciale, à renforcer le potentiel coercitif de la peine avec sursis. Cette forme d'admonestation adressée au condamné doit attirer son attention (et celle de tous) sur le sérieux de la situation en le sensibilisant à ce qui l'attend s'il ne s'amende pas (ATF 134 IV 60 consid. 7.3.1).

Pour tenir compte du caractère accessoire des peines cumulées, il se justifie en principe d'en fixer la limite supérieure à un cinquième, soit 20% de la peine principale (ATF 135 IV 188 consid.3.4.4 in JdT 2011 IV 57).

7.1.6. Le juge impute sur la peine la détention avant jugement subie par l'auteur dans le cadre de l'affaire qui vient d'être jugée ou d'une autre procédure. Un jour de détention correspond à un jour-amende (art. 51 aCP).

Selon la jurisprudence, les mesures de substitution doivent être imputées sur la peine à l'instar de la détention avant jugement subie. Afin de déterminer la durée à imputer, le juge prendra en considération l'ampleur de la limitation de la liberté personnelle découlant pour l'intéressé des mesures de substitution, en comparaison avec la privation de liberté subie lors d'une détention avant jugement. Le juge dispose à cet égard d'un pouvoir d'appréciation important (ATF 140 IV 74 consid. 2.4 p. 79).

7.1.7. D'après l'art. 49 al. 1 aCP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Si le juge doit prononcer une condamnation pour une infraction que l'auteur a commise avant d'avoir été condamné pour une autre infraction, il fixe la peine complémentaire de sorte que l'auteur ne soit pas puni plus sévèrement que si les diverses infractions avaient fait l'objet d'un seul jugement (art. 49 al. 2 aCP).

7.1.8. Les art. 5 CPP et 29 al. 1 Cst. garantissent notamment à toute personne le droit à ce que sa cause soit traitée dans un délai raisonnable. Ces dispositions consacrent le principe de la célérité et prohibent le retard injustifié à statuer.

Le caractère raisonnable du délai s'apprécie selon les circonstances particulières de la cause, eu égard notamment à la complexité de l'affaire, à l'enjeu du litige pour l'intéressé, à son comportement ainsi qu'à celui des autorités compétentes. La violation du principe de célérité peut avoir pour conséquence la diminution de la peine, parfois l'exemption de toute peine ou encore une ordonnance de classement en tant qu'ultima ratio dans les cas les plus extrêmes. D'une manière générale, on ne saurait reprocher à l'autorité quelques temps morts, qui sont inévitables dans toute procédure. Une diminution de la peine ne peut entrer en ligne de compte qu'en cas de lacune crasse et avérée dans le déroulement de la procédure et le fait que certains actes ont pu être effectués plus rapidement ne suffit pas pour que soit admise une telle violation. Selon la jurisprudence, apparaissent comme des carences choquantes une inactivité de treize ou quatorze mois au stade de l'instruction, un délai de quatre ans pour qu'il soit statué sur un recours contre l'acte d'accusation ou encore un délai de dix ou onze mois pour que le dossier soit transmis à l'autorité de recours (6B_189/2017 du 7 décembre 2017 consid. 5.3.1 et les références citées).

7.2. L'infraction d'usure retenue protège un bien juridique élevé puisqu'il s'agit d'un crime, la peine menace objective de l'infraction à l'art. 157 ch. 1 CP est une peine privative de liberté de 5 ans au plus.

La faute des prévenus est lourde. Ils ont volontairement exploité, pendant de très longues années, la situation de faiblesse de quatre employés pour s'enrichir de façon indue, en privilégiant leurs intérêts, payant des salaires largement en dessous et en épargnant ainsi ceux qu'ils auraient dû assumer. Ils ont également contrevenu aux dispositions en vigueur en matière d'établissement des étrangers et en matière d'assurance-vieillesse et survivants depuis 2018. Le prévenu X______ s'en est de plus pris à l'autorité publique.

La période pénale est longue, les agissements sont continus et seule l'intervention de la police a finalement mis un terme à l'activité coupable des deux prévenus, ce qui dénote une intense volonté délictuelle.

Les prévenus ont agi pour des mobiles égoïstes, par appât du gain facile, en profitant de la vulnérabilité de leurs employés malgré le fait qu'ils avaient les moyens de les rémunérer.

Leur collaboration à l'enquête a été mauvaise. Ils ont persisté à nier les faits en lien avec l'usure et n'ont pas donné suite aux convocations à l'audience de jugement.

Leur prise de conscience est inexistante. A aucun moment, ils ne se sont remis en question et n'ont présenté des regrets ou des excuses à leurs employés de maison. Malgré le fait qu'ils avaient été condamnés par les autorités civiles à verser des montants importants à la plaignante D______ et qu'ils aient régulièrement affirmé qu'ils se conformeraient à leurs obligations, ils ne lui ont rien versé. Ils n'ont pas non plus procédé à des versements aux autres parties plaignantes.

Le prévenu X______ a des antécédents en France et en Suisse, non spécifiques. La prévenue Y______ n'a pas d'antécédent, ce qui a un effet neutre sur la peine.

Il y a concours d'infractions, facteur aggravant.

La situation personnelle des prévenus n'explique en aucun cas leurs agissements. Leur situation financière confortable leur permettait largement de payer leurs employés selon les tarifs usuels de la branche et de les déclarer aux assurances sociales.

Leur responsabilité est pleine et entière et aucune circonstance atténuante n'est réalisée.

Compte tenu de ce qui précède et de l'importance de leur faute, seule une peine privative de liberté entre en ligne de compte pour sanctionner l'usure et les infractions à la LEI. Les infractions à la LAVS et à l'art. 286 CP seront quant à elles sanctionnées par une peine pécuniaire.

Il sera toutefois tenu compte d'une violation du principe de célérité compte tenu de la durée globale de la procédure et de certaines périodes d'inactivités des autorités de poursuite néanmoins dans une moindre mesure. La longueur de la procédure s'explique en partie également par l'apparition de la pandémie de COVID, qui, si elle n'est pas de la faute du prévenu, n'est pas non plus de celle du Ministère public. Il y a donc lieu de relativiser quelque peu la violation du principe de célérité.

Au vu de l'ensemble des circonstances et en tenant compte du concours d'infractions, la quotité de la peine privative de liberté sera arrêtée à 18 mois, ramenée à 15 mois, pour les deux prévenus, pour tenir compte de la violation du principe de célérité.

Neuf jours de détentions avant jugement seront imputés de la peine et il sera également tenu compte des 1'552 jours pendant lesquels les prévenus ont été soumis à des mesures de substitution et ce à raison de 10%, soit 155 jours.

S'agissant du prévenu X______, il sera également condamné à une peine pécuniaire de 80 jours-amende pour les infractions à la LAVS et à l'art. 286 CP, cette peine étant partiellement complémentaire à celle prononcée le 23 mai 2015 par le Ministère public du canton de Genève.

La prévenue Y______ sera quant à elle condamnée à une peine pécuniaire de 60 jours-amende pour l'infraction à la LAVS.

Le montant du jour-amende sera fixé à CHF 2'000.- pour les deux prévenus, vu leur situation financière aisée, telle qu'elle ressort de leur rythme de vie constitué de voyages, des propriétés luxueuses dans lesquelles ils résident et des biens de grande valeur qu'ils possèdent.

Compte tenu des circonstances et de l'absence d'antécédents spécifiques, les deux prévenus remplissent les conditions de l'octroi du sursis. Les peines seront ainsi assorties du sursis et d'un délai d'épreuve de 3 ans.

Il sera en revanche renoncé à révoquer le sursis à la peine pécuniaire de 90 jours-amende octroyé le 23 mai 2015 par le Ministère public du canton de Genève, à laquelle le prévenu X______ a été condamné, celle-ci se rapportant à des faits non spécifiques.

Vu la faible prise de conscience des deux prévenus et pour attirer leur attention sur le caractère sérieux de la situation et les amener à s'amender, il se justifie de prononcer une amende à titre de sanction immédiate. Celle-ci sera fixée à CHF 10'000.-, au regard de la situation économique des prévenus, et reste proportionnelle avec les peines prononcées.

Une peine privative de liberté de substitution de 50 jours sera prononcée pour le cas où l'amende ne serait pas payée.

Conclusions civiles

8.1.1. L'art. 122 al. 1 CPP prévoit que, en qualité de partie plaignante, le lésé peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure pénale.

En vertu de l'art. 126 CPP, le tribunal statue sur les prétentions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu (al. 1 let. a). Dans le cas où le jugement complet des conclusions civiles exigerait un travail disproportionné, le tribunal peut traiter celles-ci seulement dans leur principe et, pour le surplus, renvoyer la partie plaignante à agir par la voie civile. Les prétentions de faible valeur sont, dans la mesure du possible, jugées par le tribunal lui-même (al. 3).

Lorsque les preuves recueillies dans le cadre de la procédure sont suffisantes pour permettre de statuer sur les conclusions civiles, le juge pénal est tenu de se prononcer sur le sort de celles-ci, en examinant, pour chacune d'elles, si elles sont justifiées en fait et en droit (arrêts du Tribunal fédéral 6B_434/2018 du 12 septembre 2018 consid. 1.1, 6B_443/2017 du 5 avril 2018 consid. 3.1). En revanche, le juge renvoie la partie plaignante à agir par la voie civile lorsqu'elle n'a pas chiffré ses conclusions de manière suffisamment précise ou ne les a pas suffisamment motivées (art. 126 al. 2 let. b CPP). Par ailleurs, dans le cas où le jugement complet des conclusions civiles exigerait un travail disproportionné, le tribunal peut traiter celles-ci seulement dans leur principe et, pour le surplus, renvoyer la partie plaignante à agir par la voie civile (art. 126 al. 3 CPP). N'importe quel supplément de travail exigé par le jugement des prétentions civiles ne suffit pas pour que le juge pénal se limite à statuer sur l'action civile dans son principe. L'exigence d'un travail disproportionné n'est réalisée que lorsque de longues et difficiles investigations doivent être menées, qui ne concernent pas le volet pénal de l'affaire, mais servent uniquement à établir le préjudice subi par la victime. Tel est le cas lorsque la quotité du dommage est difficile à établir et supposerait des mesures probatoires spécifiques qui auraient pour effet de différer longuement le prononcé du jugement (ATF 122 IV 37 consid. 2c p. 42). Le travail disproportionné doit être occasionné par l′administration des preuves et non par la qualification juridique (arrêt du Tribunal fédéral 6B_434/2018 consid. 1.1).

8.1.2. Chacun est tenu de réparer le dommage qu'il cause à autrui d'une manière illicite, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence (art. 41 al. 1 CO).

8.1.3. La preuve du dommage incombe au demandeur (art. 42 al. 1 CO).

Selon la jurisprudence, la notion de conclusions civiles déduites de l'infraction ne vise pas toutes les prétentions de droit privé, mais uniquement celles qui peuvent se déduire d'une infraction pénale. Il s'agit des prétentions civiles du lésé qui découlent d'une ou de plusieurs infractions, lesquelles, dans un premier temps, sont l'objet des investigations menées dans la procédure préliminaire, puis, dans un second temps, dans la procédure pénale de première instance, figurent dans l'acte d'accusation élaboré par le ministère public (art. 325 CPP). La plupart du temps, le fondement juridique de ces prétentions réside dans les règles relatives à la responsabilité civile des art. 41 ss CO (arrêt 6B_1310/2021 du 15 août 2022 consid. 3.1.2). Il peut également s'agir d'autres prétentions de droit privé, comme les actions tendant à la protection de la personnalité (art. 28 ss CC), en revendication (art. 641 CC) ou possessoires (art. 927, 928 et 934 CC). En revanche, les prétentions contractuelles ne se fondent pas sur une infraction pénale et sont donc exclues du champ d'application de l'art. 122 al. 1 CPP; elles ne peuvent donc pas faire l'objet d'une action civile par adhésion à la procédure pénale (arrêt du Tribunal fédéral 4A_417/2021 du 1er septembre 2022 consid. 3.2.1).

8.1.4. L'art. 49 CO prévoit que celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité a droit à une somme d'argent à titre de réparation morale, pour autant que la gravité de l'atteinte le justifie et que l'auteur ne lui ait pas donné satisfaction autrement.

Le principe d'une indemnisation du tort moral et l'ampleur de la réparation dépendent d'une manière décisive de la gravité de l'atteinte et de la possibilité d'adoucir de façon sensible, par le versement d'une somme d'argent, la douleur physique ou morale (ATF 132 II 117 consid. 2.2.2).

En raison de sa nature, l'indemnité pour tort moral, destinée à réparer un dommage ne pouvant que difficilement être réduit à une simple somme d'argent, échappe à toute fixation selon des critères mathématiques, de sorte que son évaluation en chiffres ne saurait excéder certaines limites; l'indemnité allouée doit toutefois être équitable (arrêt du Tribunal fédéral 6S.470/2002 du 5 mai 2003 consid. 2.1). Le juge en proportionnera le montant à la gravité de l'atteinte subie et évitera que la somme accordée n'apparaisse dérisoire à la victime (ATF 125 III 269 consid. 2a; 118 II 410 consid. 2). L'indemnité allouée doit toutefois être équitable. Statuant selon les règles du droit et de l'équité (art. 4 CC), le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 6B_123/2020 du 26 novembre 2020 consid. 10.1 et 10.2).

Toute comparaison avec d'autres affaires doit intervenir avec prudence, dès lors que le tort moral touche aux sentiments d'une personne déterminée dans une situation donnée et que chacun réagit différemment face au malheur qui le frappe. Une comparaison avec d'autres cas similaires peut cependant, suivant les circonstances, constituer un élément d'orientation utile (ATF 138 III 337 consid. 6.3.3 p. 345 et l'arrêt cité). A défaut d'études comparatives fouillées sur l'octroi d'indemnités satisfactoires en cas d'atteintes aux droits de la personnalité, il sied de se pencher sur des décisions (rendues après 2000) se rapportant au tort moral lors de décès ou de lésions corporelles au sens de l'art. 47 CO, norme qui n'est qu'un cas particulier d'application de la règle générale de l'art. 49 CO (ATF 123 III 204 consid. 2e p. 210 et l'arrêt cité).

Ainsi ont été accordées des indemnités de :

-       CHF 3'000.- pour un cas d'usure en lien avec une employée de maison à qui il a été uniquement versé CHF 300.- par mois, alors qu'un salaire mensuel de CHF 1'527.50 pour 50 heures hebdomadaires avait été convenu, étant relevé que la période litigieuse était de deux ans et 6 mois (ATF 130 IV 106 en référence à l'arrêt de la Chambre pénale de la Cour de justice genevoise du 14 juin 2004) ;

-       CHF 3'000.- pour un cas d'usure en lien avec une employée de maison, sans permis de travail, à qui il était convenu qu'elle soit payée USD 300.- par mois, en plus du logement, la période litigieuse ayant été de cinq ans (arrêt du Tribunal fédéral 6B_86/2011 du 28 juin 2011 en référence à l'arrêt de la Chambre pénale de la Cour de justice genevoise du 23 décembre 2010);

-       CHF 15'000.- pour un cas d'usure, de lésions corporelles et d'infractions à la LEI relatif à une employée de maison durant une période de deux ans et un mois (AARP/225/2015 du 6 mai 2015);

-          CHF 3'000.- pour un cas d'usure dans lequel l'employée avait subi une atteinte illicite à la personnalité du fait des agissements illicites de la condamnée, qui l'avaient placée dans un état d'anxiété durant une longue période. Il a toutefois été tenu compte du fait que l'intensité des maltraitances endurées n'a pas pu être totalement établie, faute de pouvoir établir la récurrence de tous les actes de violences reprochés. Il a également été tenu compte du fait que les circonstances de vie de l'employée tendaient à s'améliorer et qu'elle pouvait envisager un avenir professionnel et avait obtenu un permis de séjour (AARP/69/2020 du 4 février 2020).

-          aucune indemnité n'a été accordée pour un cas d'usure et d'infractions à la LEI impliquant l'employé d'un magasin, en situation irrégulière, sous-payé et dont les cotisations sociales n'avaient pas été acquittées en sa faveur, ayant travaillé à tout le moins entre quatre et cinq jours par semaine, entre 8h et 8h30 par jour, pendant un an et six mois, pour un salaire horaire d'environ CHF 8.10 (AARP/404/2018 du 12 décembre 2018).

8.1.5. A teneur de l'art. 50 al. 1 CO, lorsque plusieurs personnes ont causé ensemble un dommage, elles sont tenues solidairement de le réparer, sans qu'il n'y ait lieu de distinguer entre l'instigateur, l'auteur principal et le complice.

8.1.6. Lorsque l'indemnisation se fait sous la forme d'un capital, le demandeur a droit aux intérêts de celui-ci. Ces intérêts, dont le taux s'élève à 5 % (art. 73 CO), courent en principe à partir du jour de l'évènement dommageable et ce, jusqu'au moment de la capitalisation

D______

8.2.1. Le dommage de la plaignante D______, lié à l'infraction commise, correspond aux salaires dont elle a été privée et qui ont déjà fait l'objet d'une décision de justice entrée en force. Il n'y a dès lors pas de dommage matériel supplémentaire à établir.

La plaignante a en revanche conclu à ce que les prévenus soient condamnés à lui payer CHF 8'000.- à titre de tort moral, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2006.

En l'espèce, le Tribunal estime que les faits vécus par la partie plaignante constituent une atteinte importante à sa personnalité. Dans cette mesure, le principe de l'indemnisation de son tort moral lui est acquis. La partie plaignante n'a toutefois pas produit de certificat médical attestant de ses souffrances. Elle a paru affectée tant au cours de la procédure qu'à l'audience de jugement.

Le Tribunal fixera ainsi l'indemnité en équité, en tenant compte de l'infraction retenue en définitive et de l'atteinte subie par la plaignante du fait de l'exploitation de sa faiblesse et de la durée de la période pénale particulièrement longue, à un montant de CHF 3'000.-, qui apparait proportionné et adéquat au vu de l'ensemble des circonstances.

Les prévenus seront condamnés à lui verser, conjointement et solidairement, la somme de CHF 3'000.-, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2006, à titre de réparation du tort moral.

C______

8.2.2. La plaignante C______ a conclu au paiement de CHF 296'887.35, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2017, sous déduction des charges sociales usuelles et du montant de CHF 84'873.- déjà versé, à titre de dommage matériel, montant qui tient compte des majorations de salaire pour les heures supplémentaires, le travail du dimanche et les jours fériés ainsi qu'au paiement de CHF 8'000.- à titre de tort moral avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2017.

Sur la base des calculs déjà réalisés en lien avec la détermination d'une disproportion manifeste entre le salaire minimum auquel elle aurait eu droit et ce qu'elle a touché, le Tribunal peut déterminer le montant minimal dont la plaignante a été privée en raison de l'usure subie, ce qui correspond au dommage matériel minimum.

Il est ainsi établi que, pour toute la période pénale, la plaignante C______ a perçu un salaire de CHF 1'500.- par mois, soit CHF 18'000.- par année. Son dommage s'établi de la manière suivante :

- Pour août 2014 à décembre 2015, le salaire horaire selon le CTT était de CHF 16.89 / heure. Elle effectuait 2'236 heures de travail année, ce qui représente un salaire annuel de CHF 37'766.-. Rapporté au mois, ce salaire représente CHF 3'147.15. Pour cette période, elle aurait dû gagner CHF 53'501.- (CHF 3'147.15 x 17 mois) alors qu'elle a reçu CHF 25'500.-, si bien que son dommage a représenté CHF 28'001.-.

- Pour 2016 et 2017, le salaire horaire selon le CTT était de CHF 17.13 / heure. Elle effectuait 2'236 heures de travail par année, ce qui représente un salaire annuel de CHF 38'302.-, alors qu'elle a reçu CHF 18'000.-. La différence annuelle était de CHF  20'302.-, si bien que son dommage a représenté CHF 40'302.- pour ces deux ans;

- Pour janvier à août 2018, le salaire horaire selon le CTT était de CHF 17.33. Elle effectuait 186,33 heures par mois (2'236 heures / 12), ce qui représente un salaire de CHF 25'833.- pour huit mois, pendant lesquels elle a touché CHF 12'000.-. Pour cette période son dommage a représenté CHF 13'833.-;

- Pour septembre 2018 au 10 avril 2019 (1/3 de mois), le salaire horaire le CTT était de CHF 18.53 puisqu'elle avait alors quatre ans d'expérience utile au poste. Pendant cette période, elle a effectué 1'365,8 heures de travail (186,33 heures x 7.33 mois), ce qui représente un salaire de CHF 25'308.-, alors qu'elle a touché en réalité CHF 10'500.- (CHF 1'500.- x 7 mois [les parties ayant indiqué que le salaire était payé au début du mois suivant, celui d'avril n'a pas pu être payé]). Pour cette période, son dommage a représenté CHF 14'808.-.

Au total, pour l'ensemble de la période, le salaire minimum net dont a été privée la plaignante C______ a représenté CHF 96'944.-.

Comme l'a constaté le Tribunal fédéral dans son arrêt du 29 mars 2023 en lien avec la procédure de mainlevée, la créance de l'employée correspond au salaire brut, et ce n'est qu'au moment du paiement que l'employeur peut, cas échéant, faire valoir l'exception de son affiliation aux différentes caisses. En conséquence, le dommage de la plaignante représente le salaire brut dont elle a été privée, si bien qu'il faut ajouter 15% au montant calculé pour établir l'usure. Le dommage matériel minimum de la plaignante C______ représente donc un montant total de CHF 111'485.60. La plaignante sera renvoyée à agir au civil pour le surplus, notamment en lien avec ses prétentions contractuelles.

Par identité de motif avec ce qui a été exposé sous chiffre 8.2.1. et en l'absence de pièces, le Tribunal fixera l'indemnité pour tort moral en équité, en tenant compte de l'infraction retenue en définitive et de l'atteinte subie par la plaignante du fait de son exploitation, à un montant de CHF 2'000.-, qui apparait proportionné et adéquat au vu de l'ensemble des circonstances, la période pendant laquelle elle a été victime d'usure ayant été plus courte que pour la plaignante D______.

Les prévenus X______ et Y______ seront dès lors condamnés à payer à la plaignante C______, conjointement et solidairement, la somme de CHF 111'485.60, avec un intérêt à 5%, dès le 1er janvier 2017, à titre de réparation de son dommage et la somme de CHF 2'000.-, avec intérêts à 5%, dès le 1er janvier 2017, à titre de réparation de son tort moral.

B______

8.2.3. La plaignante B______ a conclu au paiement d'un montant de CHF 250'315.70, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2018 à titre de salaire pour la période pénale, sous déduction des charges sociales usuelles et du montant de CHF 74'364,90 déjà versé. Ce montant tient compte des majorations de salaire pour les heures supplémentaires, le travail du dimanche, de nuit et des vacances. Elle a également conclu à ce que les époux X______/Y______ soient condamnés à lui payer CHF 7'000.- à titre de réparation du tort moral avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2018.

Pour les motifs déjà évoqués précédemment en lien avec la plaignante C______, le Tribunal procédera au calcul du dommage minimal subi, en tant qu'il ressort du calcul lié à l'usure. Ce dommage s'articule de la manière suivante :

-            Du 12 mars 2016 au 31 décembre 2017, le salaire horaire selon le CTT était de CHF 17.13 / heure. Elle effectuait 3'354 heures par année, ce qui représente un salaire annuel de CHF 57'454.-. Rapporté au mois, ce salaire représente CHF 4'787.85. Pour cette période, elle aurait dû gagner CHF 102'938.- (CHF 4'787.85 x 21,5 mois), alors qu'elle a reçu CHF 43'000.- (CHF 2'000.- x 21,5 mois). Son dommage représente la différence entre les deux, à savoir CHF 59'938.-.

-            du 1er janvier 2018 au 10 avril 2019, le salaire horaire selon le CTT était de CHF  17.33 / heure. Elle effectuait 3'354 heures par année, ce qui représente un salaire annuel de CHF 58'124.80. Rapporté au mois, ce salaire représente CHF 4'843.75. Pour cette période, elle aurait dû gagner CHF 74'254.- (CHF 4'843.75 x 15.33), alors qu'elle a reçu CHF 30'000.- (1'500.- x 15 mois [les parties ayant indiqué que le salaire était payé au début du mois suivant, celui d'avril n'a pas pu être payé]). Son dommage représente la différence entre les deux, à savoir CHF 44'254.-.

Au total, pour l'ensemble de la période pénale, les salaires nets non versés ont représenté CHF 104'192.-. Comme exposé sous chiffre 8.2.2., le dommage de la plaignante B______ est son salaire brut, qui représente ce montant, majoré de 15%, soit CHF 119'820.80. La plaignante sera renvoyée à agir au civil pour le surplus.

Par identité de motif avec ce qui a été exposé sous chiffre 8.2.1., le Tribunal fixera l'indemnité pour tort moral en équité. En tenant compte de l'infraction retenue et de l'atteinte subie par la plaignante du fait de l'exploitation de sa faiblesse, il en fixera le montant à CHF 2'000.-, qui apparait proportionné et adéquat au vu de l'ensemble des circonstances, la période pendant laquelle elle a été exploitée ayant été plus courte que pour la plaignante C______, mais celle-ci a passé la quasi-totalité de son temps dans la propriété, au service des prévenus.

Les prévenus X______ et Y______ seront dès lors condamnés, conjointement et solidairement, à lui payer le montant de CHF 119'820.80, avec intérêt à 5% dès le 1er janvier 2018, à titre de réparation de son dommage matériel et de CHF 2'000.- avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2018, à titre de réparation du tort moral.

A______

8.2.4. Le plaignant A______ a conclu à ce que les prévenus soient condamnés à lui payer CHF 254'423.- à titre de réparation de son dommage matériel et CHF 5'000.- à titre de réparation du tort moral, avec intérêts à 5% l'an dès le 31 juillet 2014.

Comme pour les deux parties plaignantes précédentes, le dommage du plaignant A______ est calculé sur la base du salaire horaire précédemment établi en lien avec l'usure. Son dommage est le suivant :

Pour 2009, le salaire horaire était de CHF 15.68 et il effectuait 2080 heures par année, ce qui représente un salaire annuel de CHF 32'614.40, alors qu'il a touché CHF 24'000.-. Son dommage représente la différence, soit CHF 8'614.-.

Pour 2010 – 2011, le salaire horaire était de CHF 15.94 et il effectuait 2080 heures par année, ce qui représente un salaire annuel de CHF 33'155.20, alors qu'il a touché CHF 24'000.-. Son dommage représente CHF 9'155.-.

De janvier 2012 à décembre 2012, le salaire horaire était de CHF 15.80 et il effectuait 2080 heures par année, ce qui représente un salaire annuel de CHF 32'864.-, alors qu'il a perçu CHF 24'000.-. Son dommage représente CHF 8'864.-.

De janvier 2013 à mars 2013, le salaire horaire était de CHF 15.80 et il effectuait 173,33 heures / mois, ce qui représente un salaire de CHF 8'216.- pour trois mois, alors qu'il a perçu CHF 6'600.-. Son dommage représente CHF 1'616.-.

D'avril 2013 à décembre 2013, le salaire horaire était de CHF 17.-, alors qu'il effectuait 173,33 heures / mois, ce qui représente un salaire de CHF 26'519.- pour 9 mois, alors qu'il a perçu CHF 19'800. Son dommage représente CHF 6'719.-.

De janvier 2014 à mars 2014, le salaire horaire était de CHF 17.30. Il a effectué 173,33 heures / mois, ce qui représente un salaire de CHF 8'995.- pour trois mois, alors qu'il a perçu CHF 6'600.-. Son dommage représente CHF 2'395.-.

D'avril 2014 à décembre 2014, le salaire horaire était de CHF 20.75. Il a effectué 173.33 heures / mois, ce qui représente un salaire de CHF 32'370.-, alors qu'il a perçu CHF 19'800.- pour cette période. Son dommage représente CHF 12'570.-.

De janvier 2015 à décembre 2015, le salaire horaire était de CHF 20.75. Il a effectué 2080 heures / année, ce qui représente un salaire de CHF 43'160.-, alors qu'il a perçu CHF 30'000.- (CHF 2'500 x 12 mois) pendant cette période. Son dommage représente CHF 13'160.-.

De janvier 2016 à décembre 2017, le salaire horaire était de CHF 21.05. Il a effectué 2080 heures / année, ce qui représente un salaire de CHF 87'568.- pour deux ans, alors qu'il a perçu CHF 60'000.- sur cette période. Son dommage représente CHF 27'568.-.

De janvier 2018 au 10 avril 2019, le salaire horaire était de CHF 21.35. Il a effectué 138,66 heures / mois, ce qui représente un salaire de CHF 45'394.- pour 15,33 mois, alors qu'il a touché CHF 30'000.- (CHF 2'000.- x 15) pour cette période, étant précisé que le salaire d'avril 2019 n'a pas pu être payé. Son dommage représente CHF 15'394.-.

Au total, l'ensemble des salaires net dont a été privé le plaignant pendant la période pénale s'élève à CHF 106'055.-. Son dommage minimum est constitué de son droit au salaire brut, soit son salaire net majoré de 15%, et atteint ainsi CHF 121'963.25. Il sera renvoyé à agir au civil pour le surplus.

S'agissant du tort moral, par identité de motifs avec ce qui a été exposé sous chiffre 8.2.1., le Tribunal fixera l'indemnité en équité, en tenant compte de l'infraction retenue et de l'atteinte subie par le plaignant du fait de son exploitation, à montant de CHF 2'000.-, qui apparait proportionné et adéquat au vu de l'ensemble des circonstances, la période pendant laquelle il a été exploité ayant été plus longue mais moins intense que pour la plaignante B______, son horaire n'ayant pas dépassé les huit heures quotidiennes.

Les prévenus seront dès lors condamnés, conjointement et solidairement, à lui verser la somme de CHF 121'963.25 à titre de réparation du dommage matériel et CHF 2'000.-, à titre de réparation du tort moral, avec intérêts à 5% dès le 31 juillet 2014.

Créance compensatrice et sort des objets et valeurs patrimoniales séquestrés

9.1.1. A teneur de l'art. 69 CP, alors même qu'aucune personne déterminée n'est punissable, le juge prononce la confiscation des objets qui ont servi ou devaient servir à commettre une infraction ou qui sont le produit d'une infraction, si ces objets compromettent la sécurité des personnes, la morale ou l'ordre public (al. 1). Le juge peut ordonner que les objets confisqués soient mis hors d'usage ou détruits (al. 2).

9.1.2. Selon l'art. 70 CP, le juge prononce la confiscation des valeurs patrimoniales qui sont le résultat d'une infraction ou qui étaient destinées à décider ou à récompenser l'auteur d'une infraction, si elles ne doivent pas être restituées au lésé en rétablissement de ses droits.

9.1.3. Selon l'art. 267 al. 1 CPP, si le motif du séquestre disparaît, le Ministère public ou le Tribunal lève la mesure et restitue les objets et valeurs patrimoniales à l'ayant droit. La restitution à l'ayant droit des objets et des valeurs patrimoniales séquestrés qui n'ont pas été libérés auparavant, leur utilisation pour couvrir les frais ou leur confiscation sont statuées dans la décision finale (art. 267 al. 3 CPP).

9.1.4. Selon l'art. 71 al. 1 CP, lorsque les valeurs patrimoniales à confisquer ne sont plus disponibles, le juge ordonne leur remplacement par une créance compensatrice de l'État d'un montant équivalent; elle ne peut être prononcée contre un tiers que dans la mesure où les conditions prévues à l'art. 70 al. 2 CP, ne sont pas réalisées.

Lorsque l'avantage illicite doit être confisqué, mais que les valeurs patrimoniales en résultant ne sont plus disponibles – parce qu'elles ont été consommées, dissimulées ou aliénées –, le juge ordonne le remplacement par une créance compensatrice de l'Etat d'un montant équivalent; celle-ci ne peut être prononcée contre un tiers que dans la mesure où les conditions prévues à l'art. 70 al. 2 CP ne sont pas réalisées. Le but de cette mesure est d'éviter que celui qui a disposé des objets ou valeurs à confisquer soit privilégié par rapport à celui qui les a conservés (Commentaire Romand du Code Pénal I, 2ème éd., 2021 n° 1 ad art. 71 CP).

En principe, le montant de la créance compensatrice est de la même valeur que le produit de l'activité délictueuse (CR- CP I, op. cit., 2021 n° 6a ad art. 71 CP). L'étendue et l'importance des actifs qui peuvent être confisqués sont déterminées à partir du résultat économique de l'infraction perpétrée. On entend par résultat de l'infraction tant le produit immédiat de celle-ci que tout avantage économique obtenu grâce à l'infraction, ainsi que les revenus et gains générés par le produit de l'infraction. En revanche, il n'y a pas lieu de tenir compte d'éventuels intérêts moratoires, compensatoires ou autres (arrêt du Tribunal fédéral 6B_430/2012 du 8 juillet 2013 consid. 5.3.; CR-CP I, op. cit., n° 7a ad art. 71 CP)

Si seule une créance compensatrice au sens de l'art. 71 al. 1 CP entre en considération, l'autorité d'instruction pourra, selon l'art. 71 al. 3 CP, placer sous séquestre en vue de l'exécution de la créance compensatrice, des éléments du patrimoine de l'auteur ou du bénéficiaire (CR- CP I, op. cit., 2021 n° 28 ad art. 71 CP).

9.1.5. En vertu de l'art. 73 al. 1 CP, si un crime ou un délit a causé à une personne un dommage qui n'est couvert par aucune assurance et s'il y a lieu de craindre que l'auteur ne réparera pas le dommage ou le tort moral, le juge alloue au lésé, à sa demande, jusqu'à concurrence des dommages-intérêts ou de la réparation morale fixés par un jugement ou par une transaction: le montant de la peine pécuniaire ou de l'amende payées par le condamné (let. a); les objets et les valeurs patrimoniales confisqués ou le produit de leur réalisation, sous déduction des frais (let. b); les créances compensatrices (let. c); le montant du cautionnement préventif (let. d).

Le juge ne peut ordonner cette mesure que si le lésé cède à l'Etat une part correspondante de sa créance (art. 73 al. 2 CP).

La prétention en allocation est issue du droit public matériel ; elle appartient au lésé et elle est dirigée contre l'Etat (ACAS/42/07 du 6 juillet 2007, consid. d). Lorsque les conditions de l'art. 73 al. 1 CP sont remplies, le juge n'a pas le choix et il doit procéder à l'allocation demandée : l'Etat doit ainsi impérativement renoncer aux valeurs confisquées au profit du lésé (arrêt du Tribunal fédéral 1P.189/2000 du21 juin 2000, consid. 4b).

Toute procédure d'allocation présuppose une requête du lésé. Elle ne s'opère jamais d'office.

Pour prétendre bénéficier de l'allocation, le lésé doit avoir subi un dommage direct, lequel se détermine en application des principes de droit civil issus des art. 41 et suivants CO. Ce dommage doit être fixé judiciairement ou en accord avec le délinquant (arrêt du Tribunal fédéral 6S.203/2004 du 15 juin 2006 consid. 4.1). Une fois son dommage établi, le lésé est confronté à un double fardeau : il doit non seulement établir un lien de causalité entre le dommage subi et la commission d'actes criminels ou délictueux, mais encore démontrer que ces actes criminels ou délictueux sont les mêmes que ceux à raison desquels les avoirs dont il demande l'allocation ont été confisqués (ACAS/42/07 du 6 juillet 2007 consid. e). L'art. 73 al. 2 CP soumet en outre l'allocation à la condition que le lésé cède à l'Etat une part correspondante de sa créance, de façon à éviter que le lésé ne se retrouve en fin de compte enrichi (arrêt du Tribunal fédéral 6S.203/2004 du 15 juin 2006 consid. 4.1).

9.1.6. Selon l'art. 238 al. 1 CPP, s'il y a danger de fuite, le tribunal peut astreindre le prévenu au versement d'une somme d'argent afin de garantir qu'il se présentera aux actes de procédure et qu'il se soumettra à l'exécution d'une sanction privative de liberté.

En application de l'art. 239 al. 1 CPP, les suretés sont libérées dès que le motif de détention a disparu (let. a). L'alinéa 2 de cette disposition prévoit que les suretés fournies par le prévenu qui ont été libérées peuvent être utilisées pour payer les peines pécuniaires, les amendes, les frais et les indemnités mis à sa charge.

A teneur de l'art. 240 CPP, si le prévenu se soustrait à la procédure ou à l'exécution d'une sanction privative de liberté, les sûretés sont dévolues à la Confédération ou au canton dont relève le Tribunal qui en a ordonné la fourniture (al. 1). Lorsqu'un tiers a fourni les sûretés, l'autorité peut renoncer à leur dévolution s'il a donné aux autorités en temps utile les informations qui auraient pu permettre d'appréhender le prévenu (al. 2). L'autorité saisie de la cause ou qui en a été saisie en dernier statue sur la dévolution des sûretés (al. 3). Par analogie avec l'art. 73 CP, les sûretés dévolues servent à couvrir les prétentions du lésé et, s'il reste un solde, les peines pécuniaires, les amendes et les frais de procédure. Le reliquat éventuel est acquis à la Confédération ou au canton (al. 4).

L'autorité peut prononcer la dévolution lorsque le prévenu se soustrait à la procédure, c'est-à-dire lorsqu'il prend la fuite, qu'il ne donne pas suite aux convocations du juge ou qu'il ne se présente pas aux débats (SCHMOCKER, CR-CPP, 2ème éd. 2019, n° 3 ad art. 240 CPP).

Contrairement à l'art. 239 al. 2 CPP, la dévolution des sûretés n'est pas limitée à celles fournies par le prévenu, et comprend de la sorte également l'argent versé par un tiers (HÄRRI, BS-Komm StPO/JStPO, 2014, n° 6 ad art. 240 CPP).

L'art. 240 al. 4 CPP dresse la liste des bénéficiaires des sûretés par ordre de priorité en cas de dévolution.

9.2.1. Aucune valeur patrimoniale pouvant être confisquée n'étant disponible, une créance compensatrice doit être prononcée à hauteur de la valeur de l'enrichissement dont les prévenus ont profité du fait des infractions constatées. La réduction du montant de la créance compensatrice ne se justifie pas, la situation financière des prévenus étant confortable et une telle mesure n'entrave aucunement les prévenus dans leur réinsertion.

La quotité de la créance doit être arrêtée selon le principe des recettes brutes, qui se composent des salaires qu'ils auraient dû payer à leurs employés s'ils avaient respecté les règles en vigueur dans l'économie domestique, soit :

- CHF 140'299.-[5] (52'640.10 + 22'107.40 + 85'951.80 – 20'400.-) selon l'arrêt de la Cour de Justice du 6 janvier 2017, en lien avec la plaignante D______;

- CHF 111'485.- en lien avec la plaignante C______;

- CHF 119'820.- en lien avec plaignante B______;

- CHF 121'963.- en lien avec le plaignant A______;

ce qui représente un montant total de CHF 493'567.-.

Ainsi, le Tribunal prononcera une créance compensatrice de ce montant.

9.2.2. Les parties plaignantes ont présenté à l'audience de jugement une requête en allocation des amendes prononcées et de la créance compensatrice, à concurrence de leurs dommages respectifs, tout en cédant à l'Etat leur propre créance à l'encontre des époux X______/Y______.

Les conditions pour le faire étant réalisées, les amendes prononcées et la créance compensatrice seront allouées à chacune des parties plaignantes, au pro rata de leur dommage matériel et de leur tort moral (art. 73 al. 1 let. a et c CP) :

- D______ : à concurrence de CHF 52'640.10 avec intérêts à 5% dès le 1er février 2006, CHF 22'107.40 avec intérêts à 5% dès le 1er septembre 2008, CHF 85'951.80 avec intérêts à 5% dès le 31 août 2008, sous déduction de CHF 20'400.-, et CHF 3'000.- avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2006;

- C______ : à concurrence de CHF 113'485.60 (CHF 111'485.60 + CHF 2'000.-), avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2017;

- B______ : à concurrence de CHF 121'820.80 (CHF 119'820.80 + CHF 2'000.-) avec intérêts à 5%, dès le 1er janvier 2018;

- A______ : à concurrence de CHF 123'963. 25 (CHF 121'963.25 + CHF 2'000.-) avec intérêts à 5% dès le 31 juillet 2014.

9.2.3. Les prévenus ont été libérés sous caution, charge à eux de se présenter à tous les actes de la procédure, comme précisé dans l'ordonnance du 23 avril 2019 du TMC. Ainsi, le 30 avril 2019, un montant de CHF 150'000.- a été versé en espèces par les prévenus, conjointement et solidairement, via leur Conseil de l'époque, à titre de sûretés.

La prévenue Y______ ne s'étant pas présentée aux débats, la moitié des sûretés seront dévolues à l'Etat, la prévenue ayant ainsi manifesté son intention de se soustraire à la procédure ou à l'exécution, cas échéant, d'une sanction privative de liberté.

La question de l'ayant droit économique de ces valeurs peut rester sans réponse dès lors que, comme susmentionné, la dévolution des sûretés n'est pas limitée à celles fournies par le prévenu. Au demeurant, les conditions énoncées à l'art. 240 al. 2 CPP ne sont pas réalisées.

Il résulte de ce qui précède qu'un montant de CHF 75'000.- sera dévolu à l'Etat et affecté en priorité au paiement des prétentions des lésés au pro rata de l'ensemble de leurs dommages respectifs, ceux-ci ayant cédé à l'Etat de Genève la part correspondante de leur créance (art. 240 al. 4 CPP et 73 CP).

9.2.4. L'autre moitié des suretés, à hauteur de CHF 75'000.-, fournie par le prévenu X______, sera libérée et alloué à due concurrence au paiement de l'amende prononcée à son encontre et de sa part des frais de procédure tandis que le solde lui sera restitué (art 239 al. 1 et 2 CPP).

9.2.5. Pour garantir l'exécution de la créance compensatrice (CHF 493'567.-), le paiement des amendes prononcées (CHF 20'000.-) et les frais de procédure (CHF 13'406.-), il se justifie de maintenir le séquestre sur une partie des biens des prévenus. Une telle mesure n'ayant aucun impact sur leur minimum vital, vu leur situation financière aisée et la nature des biens séquestrés, soit des montres et bijoux qui se trouvaient dans un coffre-fort. En l'absence d'expertise sur la valeur des biens, le Tribunal se basera sur l'estimation établie par le Service bijoux de la police qui figure au dossier. Dans la mesure où l'état des bijoux et des montres n'est néanmoins pas connu, que leur valeur marchande peut différer de la valeur catalogue retenue et afin de respecter le principe de proportionnalité, seul le séquestre portant sur les montres sera maintenu, la valeur de celles-ci devant être suffisante pour permettre de garantir le recouvrement des montants précités, le solde du produit des réalisations pouvant cas échéant être restitué aux prévenus.

Au vu de ce qui précède, le séquestre sera levé sur les bijoux figurant à l'inventaire n° 20822620190412 du 12 avril 2019 et sera maintenu sur les montres figurant au même inventaire.

9.2.6. Le séquestre sur les sommes de CHF 700.-, EUR 100.- et USD 900.- figurant sous chiffre 10 de l'inventaire n°20789320190410 du 10 avril 2019 ainsi que sur la somme de EUR 100.-, figurant sous chiffre 6 de l'inventaire n°20784020190410, sera maintenu en vue de l'exécution de la créance compensatrice.

9.2.7. Le sort des armes, figurant sous chiffre 14 à 17, 19 et 26 de l'inventaire n°20789320190410 du 10 avril 2019 et sous chiffre 3 à 5 et 14 de l'inventaire n°20784020190410 du 10 avril 2019 sera délégué Brigade des armes, de la sécurité privée et des explosifs (BASPE) afin que celle-ci vérifie que les conditions administratives d'une restitution au prévenu X______ sont bien réunies.

9.2.8. Les fausses plaques, figurant sous chiffre 17 de l'inventaire n°20784020190410, et la contrefaçon de montre CARTIER, figurant sous chiffre 19 de l'inventaire n°20822620190412 du 12 avril 2019, seront confisquées et détruites.

9.2.9. Pour le surplus, les objets figurant sur tous les inventaires répertoriés dans le dispositif seront restitués à leurs ayant-droit respectifs, sous réserve des documents dont l'apport à la procédure a été ordonné suite à la levée partielle des scellés et des restitutions déjà opérées.

Frais et indemnités

10.1. A teneur de l'art. 426 CP, le prévenu supporte les frais de procédure s'il est condamné (al. 1). Lorsque la procédure fait l'objet d'une ordonnance de classement ou que le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de procédure peuvent être mis à sa charge s'il a, de manière illicite et fautive, provoqué l'ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci (al. 2).

10.2. En l'espèce, vu les condamnations prononcées et afin de tenir compte des classements et acquittement dont les prévenus ont bénéficié, ceux-ci seront condamnés, pour moitié chacun, au 9/10ème des frais de la procédure, qui s'élèvent au total à CHF 13'406.-, y compris un émolument de jugement fixé à CHF 1'500.-. Le solde des frais de la procédure sera laissé à la charge de l'Etat.

10.3 Les indemnités des conseils juridiques gratuits des parties plaignantes seront fixées conformément aux articles 135 et 138 CPP.

 

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL DE POLICE

statuant contradictoirement en ce qui concerne X______:

Classe la procédure du chef d'incitation à l'entrée illégale (art. 116 al. 1 let a LEI), en lien avec les faits décrits sous chiffre 1.1.2.b) de l'acte d'accusation (art. 329 al. 5 CPP).

Déclare X______ coupable d'usure (art. 157 ch. 1 CP), d'empêchement d'accomplir un acte officiel (art. 286 CP), d'incitation au séjour illégal (art. 116 al. 1 let. a et b LEI), d'emploi d'étrangers sans autorisation (art. 117 al. 1 LEI) et d'infraction à la Loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, pour la période du 1er janvier 2018 au 10 avril 2019 (art. 87 ch. 3 LAVS).

Acquitte X______ d'infraction à la Loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (art. 76 al. 2 LPP) et d'infraction à la Loi fédérale sur l'assurance-accident (art. 112 al. 1 let. a LAA).

Condamne X______ à une peine privative de liberté de 15 mois, sous déduction de 164 jours de détention avant jugement (9 jours de détention avant jugement et 155 jours à titre d'imputation des mesures de substitution (art. 40 et 51 aCP).

Condamne X______ à une peine pécuniaire de 80 jours-amende (art. 34 aCP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 2'000.-.

Dit que la peine pécuniaire est partiellement complémentaire à celle prononcée le 23 mai 2015 par le Ministère public du canton de Genève (art. 49 al. 2 aCP).

Met X______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 aCP).

Avertit X______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 aCP).

Renonce à révoquer le sursis octroyé le 23 mai 2015 par le Ministère public du canton de Genève (art. 46 al. 2 aCP).

Condamne X______ à une amende de CHF 10'000.- (art. 42 al. 4 aCP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 50 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

statuant par défaut en ce qui concerne Y______

Classe la procédure du chef d'incitation à l'entrée illégale (art. 116 al. 1 let a LEI), en lien avec les faits décrits sous chiffre 1.2.2.b) de l'acte d'accusation (art. 329 al. 5 CPP).

Déclare Y______ coupable d'usure (art. 157 ch. 1 CP), d'incitation au séjour illégal (art. 116 al. 1 let. a et b LEI), d'emploi d'étrangers sans autorisation (art. 117 al. 1 LEI) et d'infraction à la Loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, pour la période du 1er janvier 2018 au 10 avril 2019 (art. 87 ch. 3 LAVS).

Acquitte Y______ d'infraction à la Loi fédérale sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (art. 76 al. 2 LPP) et d'infraction à la Loi fédérale sur l'assurance-accident (art. 112 al. 1 let. a LAA).

Condamne Y______ à une peine privative de liberté de 15 mois, sous déduction de 164 jours de détention avant jugement (9 jours de détention avant jugement et 155 jours à titre d'imputation des mesures de substitution) (art. 40 et 51 aCP).

Condamne Y______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende (art. 34 aCP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 2'000.-.

Met Y______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 aCP).

Avertit Y______ que si elle devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 aCP).

Condamne Y______ à une amende de CHF 10'000.- (art. 42 al. 4 aCP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 50 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

***

Condamne X______ et Y______, conjointement et solidairement, à payer à D______ CHF 3'000.-, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2006, à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Condamne X______ et Y______, conjointement et solidairement, à payer à C______ :

- CHF 111'485.60, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2017, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO);

- CHF 2'000.- avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2017, à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Condamne X______ et Y______, conjointement et solidairement, à payer à B______ :

- CHF 119'820.80, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2018, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO);

- CHF 2'000.-, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2018, à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Condamne X______ et Y______, conjointement et solidairement, à payer à A______ :

- CHF 121'963.25, avec intérêts à 5% dès le 31 juillet 2014, à titre de réparation du dommage matériel (art. 41 CO);

- CHF 2'000.-, avec intérêts à 5% dès le 31 juillet 2014, à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Renvoie les parties plaignantes A______, B______ et C______ à agir par la voie civile pour le surplus (art. 126 al. 2 CPP).

Prononce à l'encontre de X______, aussi bien qu'à l'encontre de Y______, en faveur de l'Etat de Genève, une créance compensatrice à hauteur de CHF 493'567.-, celle-ci s'éteignant automatiquement dans la mesure du paiement par l'un ou l'autre des prévenus (art. 71 al. 1 CP).

Ordonne, en vue de l'exécution de la créance compensatrice, du paiement de l'amende et des frais de la procédure (art. 71 al. 3 CP), le maintien des séquestres portant sur:

- les montres figurant sous chiffres 1 à 18, 20 à 31, 109 et 110, 127 et 128, 154 à 161 de l'inventaire n°20822620190412 du 12 avril 2019;

- les valeurs patrimoniales, figurant sous chiffre 10 de l'inventaire n°20789320190410 du 10 avril 2019 ainsi que sous chiffre 6 de l'inventaire n°20784020190410 du 10 avril 2019.

Alloue aux parties plaignantes D______, C______, B______ et A______ le montant de la créance compensatrice et des amendes payées par X______ et Y______, chacune de celles-ci cédant à l'Etat de Genève la part correspondante de leurs créances respectives en réparation des dommages matériels et moraux contre X______ et Y______ (art. 73 al. 1 let. a et c et al. 2 CP) :

- D______, à concurrence de CHF 52'640.10 avec intérêts à 5% dès le 1er février 2006, CHF 22'107.40 avec intérêts à 5% dès le 1er septembre 2008, CHF 85'951.80 avec intérêts à 5% dès le 31 août 2008, sous déduction de CHF 20'400.-, et CHF 3'000.- avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2006;

- C______, à concurrence de CHF 113'485.60, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2017;

- B______, à concurrence de CHF 121'820.80, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2018;

- A______, à concurrence de CHF 123'963.25, avec intérêts à 5% dès le 31 juillet 2014.

Dit que la part de la créance cédée à l'Etat de Genève s'éteindra automatiquement dans la mesure du paiement de la créance compensatrice ou de l'amende par X______ et/ou Y______.

Ordonne la libération de la moitié des sûretés fournies par X______ et Y______, les alloue à due concurrence au paiement de l'amende de CHF 10'000.- prononcée à l'encontre de X______ et de sa part des frais de la procédure et en restitue le solde à X______ (art. 239 al. 1 et 2 CPP).

Ordonne la dévolution à l'Etat de Genève de la moitié des sûretés fournies par X______ et Y______ (art. 240 al. 1 CPP).

Alloue aux parties plaignantes D______, C______, B______ et A______ le montant des suretés dévolues, celles-ci ayant cédé à l'Etat de Genève la part correspondante de leurs créances respectives en réparation des dommages matériels et moraux contre X______ et Y______, au pro rata de leurs créances (art. 240 al. 4 CPP et art. 73 al. 1 et 2 CP).

Lève pour le surplus les mesures de substitution ordonnées le 23 avril 2019 par le Tribunal des mesures de contrainte à l'égard de X______ et de Y______.

Ordonne la confiscation et la destruction des fausses plaques d'immatriculation figurant sous chiffre 17 de l'inventaire n°20784020190410 et de la fausse montre CARTIER, figurant sous chiffre 19 de l'inventaire n°20822620190412 du 12 avril 2019 (art. 69 CP).

Délègue à la Brigade des armes, de la sécurité privée et des explosifs (BASPE) la compétence de statuer sur le sort des armes figurant sous chiffre 14 à 17, 19 et 26 de l'inventaire n°20789320190410 du 10 avril 2019 et sous chiffre 3 à 5 et 14 de l'inventaire n°20784020190410 du 10 avril 2019.

Ordonne la restitution à X______ (art. 267 al. 1 et 3 CPP) :

-            des objets et monnaies figurant sous chiffres 1, 2 et 4 de l'inventaire n°20808820190411 du 11 avril 2019;

-            des objets et documents figurant sous chiffres 1 à 12 de l'inventaire n°20896520190416 du 16 avril 2019, sous réserve de ceux qui figurent sous chiffres 9, 11 et 12 et pour lesquels les scellés ont été partiellement levés, dont l'apport à la procédure a été ordonné;

-            des objets et documents figurant sous chiffres 1 et 4 à 6 de l'inventaire n°20784220190410 du 10 avril 2019, sous réserve de ceux qui figurent sous chiffres 1 et 5 et pour lesquels les scellés ont été partiellement levés, dont l'apport à la procédure a été ordonné;

-            des objets et documents figurant sous chiffres 1 à 3 de l'inventaire n°20789020190410 du 10 avril 2019;

-            des objets et documents figurant sous chiffres 1 à 9, 11 à 12, 18 et 20 à 25, de l'inventaire n 20789320190410 du 10 avril 2019, sous réserve de ceux qui figurent sous chiffre 25 et pour lesquels les scellés ont été partiellement levés, dont l'apport à la procédure a été ordonné;

-            des objets et documents figurant sous chiffres 1, 2, 7 à 13, 15 et 16 et 18 à 20 de l'inventaire n°20784020190410 du 10 avril 2019, sous réserve de ceux qui figurent sous chiffres 7, 12, 15 et 16 et pour lesquels les scellés ont été partiellement levés, dont l'apport à la procédure a été ordonné;

-            des bijoux figurant sous chiffres 32 à 108, 111 à 126, 129 à 153 et 162 à 202 de l'inventaire n°20822620190412 du 12 avril 2019.

Ordonne la restitution à Y______ du téléphone portable figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n°20778320190410 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Condamne X______ et Y______, pour moitié chacun, au 9/10ème des frais de la procédure, qui s'élèvent au total à CHF 13'406.-, y compris un émolument de jugement de CHF 1'500.- (art. 426 al. 1 CPP).

Laisse le solde des frais de la procédure à la charge de l'Etat (art. 423 al. 1 CPP).

Fixe à CHF 11'068.35 l'indemnité de procédure due à Me E______, conseil juridique gratuit de A______ (art. 138 CPP).

Fixe à CHF 16'590.60 l'indemnité de procédure due à Me F______, conseil juridique gratuit de B______ et C______ (art. 138 CPP).

Fixe à CHF 11'261.05 l'indemnité de procédure due à Me G______, conseil juridique gratuit de D______ (art. 138 CPP).

Ordonne la communication du présent jugement aux autorités suivantes : Casier judiciaire suisse, Office cantonal de la population et des migrations, Service des contraventions (art. 81 al. 4 let. f CPP).

La Greffière

Dorianne FISCHLI

La Présidente

Judith LEVY OWCZARCZAK

 

 

Voies de recours

Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.

La personne condamnée par défaut peut demander un nouveau jugement au Tribunal pénal, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, CH-1211 Genève 3, dans les 10 jours dès la notification du jugement, par écrit ou oralement. Dans sa demande, la personne condamnée expose brièvement les raisons qui l'ont empêchée de participer aux débats. Le Tribunal rejette la demande lorsque la personne condamnée, dûment citée, a fait défaut aux débats sans excuse valable (art. 368 CPP). La personne condamnée peut également faire une déclaration d'appel en adressant une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé (art. 371 al. 1, 399 al. 3 et 4 CPP). Un appel n'est recevable que si la demande de nouveau jugement a été rejetée (art. 371 al. 2 CPP).

Si le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit conteste également son indemnisation, il peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours dès la notification du jugement motivé, à la Chambre pénale d'appel et de révision contre la décision fixant son indemnité (art. 396 al. 1 CPP).

L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).

Etat de frais

Frais du Ministère public

CHF

11171.00

Frais du Tribunal des mesures de contraintes

CHF

100.00

Convocations devant le Tribunal

CHF

120.00

Frais postaux (convocation)

CHF

56.00

Emolument de jugement

CHF

1'500.00

Etat de frais

CHF

50.00

Frais postaux (notification)

CHF

49.00

Total

CHF

13'046.00

==========

 

Indemnisation du conseil juridique gratuit, Me G______

Vu les art. 138 al. 1 CPP et 16 RAJ et les directives y relatives ;

Bénéficiaire :  

D______

Avocate :  

______

Etat de frais reçu le :  

27 juin 2023

 

Indemnité :

Fr.

8'750.85

Forfait 10 % :

Fr.

875.10

Déplacements :

Fr.

830.00

Sous-total :

Fr.

10'455.95

TVA :

Fr.

805.10

Débours :

Fr.

0

Total :

Fr.

11'261.05

Observations :

- 30h25 admises* à Fr. 200.00/h = Fr. 6'083.35.
- 8h05 admises* à Fr. 110.00/h = Fr. 889.15.
- 0h40 Audience du 11.05.2023 à Fr. 110.00/h = Fr. 73.35.
- 15h30 Audience du 27 & 28.06.2023 à Fr. 110.00/h = Fr. 1'705.–.

- Total : Fr. 8'750.85 + forfait courriers/téléphones arrêté à 10 % vu l'importance de l'activité déployée (art 16 al 2 RAJ) = Fr. 9'625.95

- 5 déplacements A/R à Fr. 100.– = Fr. 500.–
- 3 déplacements A/R à Fr. 55.– = Fr. 165.–
- 1 déplacement A/R (Audience du 11.05.2023) à Fr. 55.– = Fr. 55.–
- 2 déplacements A/R (Audience du 27 & 28.06.2023) à Fr. 55.– = Fr. 110.–

- TVA 7.7 % Fr. 805.10

* En application de art. 5 al. 1 et 16 al. 2 RAJ, réductions de:
i) 1h00 (chef d'étude) pour le poste "conférences":
- la conférence du 11.02.2020, antérieure à la date d'effet de la nomination d'office (09.03.2020), n'est pas prise en compte par l'assistance juridique.
ii) 1h20 (chef d'étude) et 0h35 (stagiaire) pour le poste "procédure":
- les divers courriers au MP et au TPol de même que les observations au MP sont des prestations comprises dans le forfait "courriers/téléphones".
- A noter que le forfait "déplacements" A/R pour les stagiaires s'élève à CHF 55.-

 

Indemnisation du conseil juridique gratuit, Me F______

Vu les art. 138 al. 1 CPP et 16 RAJ et les directives y relatives ;

Bénéficiaire :  

B______

Avocate :  

F______

Etat de frais reçu le :  

27 juin 2023

 

Indemnité :

Fr.

12'258.30

Forfait 10 % :

Fr.

1'225.85

Déplacements :

Fr.

1'275.00

Sous-total :

Fr.

14'759.15

TVA :

Fr.

1'136.45

Débours :

Fr.

695.00

Total :

Fr.

16'590.60

Observations :

- Frais d'interprètes Fr. 695.–

- 23h05 à Fr. 200.00/h = Fr. 4'616.65.
- 29h30 à Fr. 150.00/h = Fr. 4'425.–.
- 0h35 Audience du 11.05.2023 à Fr. 200.00/h = Fr. 116.65.
- 15h30 Audience du 27 & 28.06.2023 à Fr. 200.00/h = Fr. 3'100.–.

- Total : Fr. 12'258.30 + forfait courriers/téléphones arrêté à 10 % vu l'importance de l'activité déployée (art 16 al 2 RAJ) = Fr. 13'484.15

- 3 déplacements A/R à Fr. 100.– = Fr. 300.–
- 9 déplacements A/R à Fr. 75.– = Fr. 675.–
- 1 déplacement A/R (Audience du 11.05.2023) à Fr. 100.– = Fr. 100.–
- 2 déplacements A/R (Audience du 27 & 28.06.2023) à Fr. 100.– = Fr. 200.–

- TVA 7.7 % Fr. 1'136.45

N.B. la présente proposition d'indemnisation couvre l'activité déployée à la défense de Mesdames B______ (dossier AP/______) et C______ (dossier AP/______) réunie sous le dossier réf. AP/______.

 

Indemnisation du conseil juridique gratuit, Me E______

Vu les art. 138 al. 1 CPP et 16 RAJ et les directives y relatives ;

Bénéficiaire :  

A____________

Avocat :  

E______

Etat de frais reçu le :  

27 juin 2023

 

Indemnité :

Fr.

9'020.00

Forfait 10 % :

Fr.

902.00

Déplacements :

Fr.

355.00

Sous-total :

Fr.

10'277.00

TVA :

Fr.

791.35

Débours :

Fr.

0

Total :

Fr.

11'068.35

Observations :

- 7h admises* à Fr. 110.00/h = Fr. 770.–.
- 25h05 admises* à Fr. 200.00/h = Fr. 5'016.65.
- 0h40 Audience du 11.05.2023 à Fr. 200.00/h = Fr. 133.35.
- 15h30 Audience du 27 & 28.06.2023 à Fr. 200.00/h = Fr. 3'100.–.

- Total : Fr. 9'020.– + forfait courriers/téléphones arrêté à 10 % vu l'importance de l'activité déployée (art 16 al 2 RAJ) = Fr. 9'922.–

- 1 déplacement A/R à Fr. 55.– = Fr. 55.–
- 1 déplacement A/R (Audience du 11.05.2023) à Fr. 100.– = Fr. 100.–
- 2 déplacements A/R (Audience du 27 & 28.06.2023) à Fr. 100.– = Fr. 200.–

- TVA 7.7 % Fr. 791.35

* En application de l'art. 16 al. 2 RAJ, réductions de:
i) 0h15 (stagiaire) pour le poste "conférences":
- les conférences internes ne sont pas prises en charge par l'assistance juridique (cf. remarque "in fine"**).
ii) 0h50 (chef d'étude) et 2h10 (stagiaire) pour le poste "procédure":
- les diverses recherches de dossier (vacations) ne sont pas prises en charge par l'assistance juridique.
- la lecture d'ordonnances de même que les courriers + courriels au MP et les entretiens téléphoniques sont des prestations comprises dans le forfait "courriers/téléphones".
- le temps de déplacement du 17.02.2023 auprès du MP est compris dans le forfait "déplacements".

** Nous profitons de cette décision de taxation pour attirer votre attention sur le fait que les heures consacrées à l'acquisition de connaissances ainsi qu'à la formation du stagiaire en général, ne peuvent ni ne doivent être prises en charge par l'assistance juridique.

*** Lors de l'audience du 27 et 28 juin 2023, il n'a été pris en compte que le chef d'étude.

 

Voie de recours si seule l'indemnisation est contestée

Le conseil juridique gratuit peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours, devant la Chambre pénale de recours contre la décision fixant son indemnité (art. 135 al. 3 let. a et 396 al. 1 CPP; art. 128 al. 1 LOJ).

Restitution de valeurs patrimoniales et/ou d'objets

Lorsque le présent jugement sera devenu définitif et exécutoire, il appartiendra à l'ayant-droit de s'adresser aux Services financiers du pouvoir judiciaire (finances.palais@justice.ge.ch et +41 22 327 63 20) afin d'obtenir la restitution de valeurs patrimoniales ou le paiement de l'indemnité allouée, ainsi que, sur rendez-vous, au Greffe des pièces à conviction (gpc@justice.ge.ch et +41 22 327 60 75) pour la restitution d'objets.

 

Notification à X______, soit pour lui, son conseil Me I______
Par voie postale

Notification à Y______, soit pour elle, son conseil Me I______
Par voie postale

Notification à A______, soit lui son conseil, Me E______
Par voie postale

Notification à B______, soit pour elle son conseil, Me F______
Par voie postale

Notification à C______, soit pour elle son conseil, Me F______,
Par voie postale

Notification à et D______, soit pour elle son conseil, Me G______
Par voie postale

Notification au Ministère public
Par voie postale

 



[1] Selon l'arrêt de la Cour du 6 janvier 2017, le salaire reçu par la plaignante a légèrement dépassé le salaire minimum requis pour un horaire hebdomadaire de base, de janvier 2007 à juillet 2008. La Cour n'a toutefois pas déduit cette différence quand elle a calculé la créance de salaire, aucune compensation n'étant prévue entre les différentes périodes. Le Tribunal tient toutefois compte, dans l'examen de la disproportion, de ces montants versés en plus pendant cette période, version qui est plus favorable aux prévenus. Il en résulte toutefois des différences entre les créances fixées par les autorités de Prud'hommes et les chiffres retenus dans le présent jugement.

[2] Dans son arrêt du 6 janvier 2017, la Cour tient compte d'un salaire impayé de CHF 3'760.- pour août 2008, qui se trouve en dehors de la période pénale.

[3] après 4 ans passés dans la propriété, soit à partir du 1er avril 2013, A______ pouvait prétendre au salaire prévu pour cette catégorie d'employés et après 5 ans, soit à partir du 1er avril 2014, il pouvait faire valoir une expérience utile au poste équivalente à un CFC en qualité de jardinier.

[4] Selon la note figurant dans le CTT-EDOM 2013, le salaire horaire minimum brut, sans supplément pour vacances et jours fériés payés, s'obtient en divisant le salaire mensuel minimum brut par 195 heures travaillées par mois.

[5] Le total est arrondi.