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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4045/2016

ATA/874/2018 du 28.08.2018 sur JTAPI/604/2017 ( LCI ) , ADMIS

Recours TF déposé le 05.10.2018, rendu le 06.09.2019, REJETE, 1C_510/2018, 1C_516/2018
Recours TF déposé le 04.10.2018, rendu le 06.09.2019, REJETE, 1C_510/2018, 1C_516/2018
Descripteurs : DROIT PUBLIC DES CONSTRUCTIONS ; QUALITÉ POUR RECOURIR ; VOISIN ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU ; EXPERTISE ; MOTIVATION DE LA DÉCISION ; DISTANCE À LA LIMITE ; CONSTRUCTION À LA LIMITE ; MITOYENNETÉ ; MUR ; 2E ZONE ; PRÉJUDICE SÉRIEUX ; ENSOLEILLEMENT ; BUT D'INTÉRÊT GÉNÉRAL ; INTÉRÊT PUBLIC; PESÉE DES INTÉRÊTS
Normes : LPA.60.alb; Cst.29.al2; LCI.24; LCI.25; RCI.231.al1.leta; LCI.14.al1.leta
Parties : ACQUAROLI Michel, REUGE Anne, RIZZATO Daniel, VARCHER Jean-Michel, ERNST Axel, RUBI Martin, BERRA Jean-Charles, COSTA GRILO Gilberte, DE BRIEY Cynthia, VAZ Maria, ETTER Jean-Philippe, MOSSAZ-MARINIC Jessica, SAJI DAZA ECUVILLON Rosa, BÖSCH Maya, ERNST Catherine, HALPERIN Daniel, MOSSAZ-JOËLSON Maria Katarina, FERNANDES DE OLIVEIRA DOS SANTOS Maria Do Ceu, GLOOR Bernadette, LEW Michael, MOSSAZ Claude, OTT Etienne, SALOM Carole, CHARBONNIER Palmyre, DUCHABLE Rose-Marie, DUCHABLE Michel, GUINAND Stephane, SAINT-M'LEUX Erwan, COTTIER Marie-Anne, DULAC Daniel, CASTIGLIONE Fiore, BERTOLO MONNIER Catherine, CHARBONNIER Marie Louise, LE GAL Frédérique-Anne, ECUVILLON Michel, RUBI Irmengard, PASSARD Corinne, VARCHER Liliane, SALOM Steve, ROSSETTI Giancarlo, AUVERGNE Bertrand et autres, MASON Rainer Michael / DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE - OAC, VILLE DE GENEVE, FULE, FONDATION UNIVERSITAIRE POUR LE LOGEMENT DES ETUDIANTS, BISELX Charles, FEYS Timothé, CHANTRAINE Alex, DOROGI Valentin, BARTOCHA Egon, CURCHOD Georges, MAJOR Attila Louis, SANANES Sidney, BALSENC Lucie, MOVAREKHI Michel, HALL Olivier, MAUREY Paule-Marie, SCIORTINO Marie-Françoise, ARDITI ELIEZ Semeli, HEGER Laurence, CURCHOD Yolande, BUCHERER Michel, DUBOIS-DIT-BONCLAUDE Marianne, HUWYLER Jean, MONTANDON Michel, VILLE DE GENEVE - DEPT. DES CONSTRUCTIONS ET DE L'AMENAGEMENT, BERLI Armand, COLBOC Emmanuel, BIANCHI MOVAREKHI Patrizia, RADWAN Romain, ZAND Morris, WASWO Richard, STERN Théodore, STOPPA Edith, VIOLA Heather, DUBAS Jacques, LADNER Martin, LADNER Véronique, BISELX Yolande, BOIX Gaëlle
Résumé : Projet de construction d'un immeuble de logements pour étudiants venant s'accoler au mur en attente d'un autre immeuble de logements et fermer l'îlot situé entre la rue Emile-Yung, la rue Sautter et la place Édouard-Claparède. Recours du propriétaire de l'immeuble contre lequel la nouvelle construction viendrait s'accoler, et de certains habitants de cet immeuble et des immeubles formant l'îlot. Interprétation de la notion de « mur en attente » contenue à l'art. 231 al. 1 let. a RCI. La construction en limite de propriété n'est pas admissible car aucun immeuble ne pourrait un jour venir s'accoler contre le mur borgne nouvellement créé et donnant sur la cour intérieure. Examen de la perte d'ensoleillement subie par l'immeuble propriété du recourant, qui sera de largement plus de deux heures à l'équinoxe. Cette perte d'ensoleillement constitue un inconvénient grave. Etant donné les circonstances très particulières du cas d'espèce, notamment liées à la configuration de la parcelle concernée, l'intérêt public à la construction de trente-six logements pour étudiants se doit d'être relativisé, et ne saurait l'emporter sur les inconvénients graves causés par la construction projetée sur l'immeuble du recourant et sur les autres immeubles voisins donnant sur la cour intérieure. Recours admis.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4045/2016-LCI ATA/874/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 28 août 2018

 

dans la cause

 

Monsieur Michel ACQUAROLI
représenté par Me Raphaël Reinhardt, avocat

et

Monsieur Bertrand AUVERGNE

Monsieur Jean-Charles BERRA

Madame Catherine BERTOLO MONNIER

Madame Maya BÖSCH

Madame Fiore CASTIGLIONE

Madame Marie Louise CHARBONNIER

Madame Palmyre CHARBONNIER

Madame Gilberte COSTA GRILO

Madame Marie-Anne COTTIER

Madame Cynthia DE BRIEY

Madame Rose-Marie et Monsieur Michel DUCHABLE

Monsieur Daniel DULAC

Monsieur Michel ECUVILLON

Madame Catherine et Monsieur Axel ERNST

Monsieur Jean-Philippe ETTER

Madame Maria Do Ceu FERNANDES DE OLIVEIRA DOS SANTOS

Madame Bernadette GLOOR

Monsieur Stéphane GUINAND

Monsieur Daniel HALPERIN

Madame Frédérique Anne LE GAL

Monsieur Michael LEW

Monsieur Rainer Michael MASON

Monsieur Claude MOSSAZ

Madame Maria Katarina MOSSAZ-JOËLSON

Madame Jessica MOSSAZ-MARINIC

Monsieur Etienne OTT

Madame Corinne PASSARD

Madame Anne REUGE

Monsieur Daniel RIZZATO

Monsieur Giancarlo ROSSETTI

Madame Irmengard et Monsieur Martin RUBI

Monsieur Erwan SAINT-M'LEUX

Madame Rosa SAJI DAZA ECUVILLON

Madame Carole et Monsieur Steve SALOM

Madame Liliane et Monsieur Jean-Michel VARCHER

Madame Maria VAZ

représentés par Me Alexandre Schwab, avocat

 

contre

 

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

et

FULE, FONDATION UNIVERSITAIRE POUR LE LOGEMENT DES ÉTUDIANTS

représentée par Me Pierre Gabus, avocat

et

VILLE DE GENÈVE - DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DE L'AMÉNAGEMENT

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 24 mai 2017 (JTAPI/604/2017)


EN FAIT

1.1) La Ville de Genève (ci-après : la ville) est propriétaire de la parcelle n° 4'220 (anciennement n° 3'556B), feuille 38 de la commune de Genève-Plainpalais, située rue Lombard 13 à l'angle de la rue Emile-Yung.

2.2) Cette parcelle, sise en deuxième zone de construction, a une surface de 225 m2 et se trouve à l'angle de la rue Lombard (parcelle du domaine public n° 3'556) et de la rue Emile-Yung. Elle jouxte la parcelle n° 1'151, propriété de Messieurs Michel ACQUAROLI et Thomas JUNDT, sise rue Emile-Yung 17.

 

 

 

 

 

 

 

 


3.3) Sur la parcelle propriété de MM. ACQUAROLI et JUNDT sont notamment érigés un immeuble de logement de six étages plus rez (cadastré sous le n° F 312) d'une hauteur de 29,57 m et un garage (cadastré sous le n° F 313) d'une hauteur de 3 m. Ces constructions sont érigées en limite de propriété avec la parcelle n° 4'220, avec des murs en attente.

4.4) Le bâtiment F 312, édifié en 1927, fait partie d'un ensemble protégé du XIXème siècle et du début du XXème siècle au sens des art. 89 et ss de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) avec les immeubles formant notamment l'îlot situé entre la rue Emile-Yung, la rue Sautter et la place Édouard-Claparède (« Place Édouard-Claparède - MS - e 37 »).

5.5) a. Au mois de mars 2011, la ville a lancé une procédure d'appel à candidatures pour l'octroi d'un droit de superficie sur la (future) parcelle n° 4'220 en vue de la réalisation et de la gestion de logements à caractère social pour étudiants.

b. Le 29 juin 2011, le conseil administratif de la ville a attribué ce droit de superficie à la Fondation universitaire pour le logement des étudiants (ci-après : FULE).

c. Le 13 juin 2012, le conseil administratif a soumis un projet de délibération (PR-973) en ce sens au conseil municipal, lequel l'a accepté, à l'unanimité, lors de sa séance du 31 octobre 2012.

d. Le 20 décembre 2012, le département de l'intérieur, de la mobilité et de l'environnement, devenu depuis le 1er juin 2018 le département des infrastructures, a approuvé la délibération du conseil municipal de la ville du 31 octobre 2012 (PR-973), autorisant notamment le conseil administratif de la ville à désaffecter la parcelle n° 3'556B du domaine public communal et à l'incorporer au domaine privé communal pour former la nouvelle parcelle n° 4'220.

e. Les recours interjetés par M. ACQUAROLI contre cette décision, ainsi que contre la décision du conseil municipal de la ville prise par délibération du 31 octobre 2012, ont été définitivement rejetés par arrêt du Tribunal fédéral du 24 mai 2016 (arrêt 1C_333/2015).

6.6) a. Le 4 octobre 2011, MM. ACQUAROLI et JUNDT ont déposé auprès du département de l'urbanisme, devenu depuis lors le département du territoire (ci-après : le département) une demande d'autorisation de construire portant sur la construction d'un immeuble commercial sur la parcelle n° 1'151 (DD 104'600).

Le projet visait la réalisation d'un immeuble d'un étage sur rez, implanté en limite de propriété avec la parcelle n° 4'220, affecté à des cabinets médicaux, puis, par la suite, à des logements pour étudiants.

b. Par décision du 15 février 2013, le département a refusé cette autorisation de construire, retenant que les distances et vues droites entre la construction projetée et la limite de propriété de la parcelle n° 4'220 étaient insuffisantes. Le projet ne respectait pas non plus les distances par rapport au bâtiment déjà existant sur la parcelle n° 1'151.

c. Les recours interjetés contre cette décision ont été définitivement rejetés par arrêt de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) du 19 décembre 2017 : le projet ne respectait pas le gabarit d'une construction basse sur cour, ni la distance minimale à l'égard du bâtiment de logements déjà existant sur la parcelle (ATA/1637/2017, procédure A/953/2013).

7.7) Parallèlement, le 10 juillet 2012, la FULE a déposé une demande d'autorisation de construire portant sur la construction d'un immeuble de logements d'étudiants répartis sur neuf étages avec rez commercial, sur la parcelle n° 4'220 (DD 105'142).

Le projet visait la réalisation d'un immeuble d'un gabarit de 30 m de haut, implanté en limite de propriété avec la parcelle n° 1'151, destiné à accueillir trente-six étudiants, à raison de quatre chambres individuelles par étage.

8.8) Dans le cadre de l'instruction de cette requête, les préavis suivants ont notamment été recueillis :

-          le 7 août 2012, la commission d'architecture (ci-après : CA) a préavisé favorablement le projet. Elle appréciait le soin et la grande subtilité architecturale apportés au projet malgré une situation contraignante. La réalisation du projet, véritable répondant au parc situé en face, tendrait à valoriser l'îlot, de même que le petit carrefour et sa placette, à l'intersection rue Lombard - boulevard de la Cluse. Il convenait cependant de prendre une certaine liberté par rapport à l'alignement de la rue Emile-Yung, en ouvrant la perspective. Elle suggérait de créer plus de vitrages, sous la forme de parties translucides côté cour, afin d'atténuer l'effet « mur » pour les voisins ;

-          le 12 septembre 2012, la ville a émis un préavis favorable sous réserves ;

-          le 8 janvier 2013, à la suite du dépôt d'un deuxième projet le 29 décembre 2012, la CA a émis un nouveau préavis favorable ;

-          le 19 avril 2016, après avoir demandé un projet modifié s'agissant des saillies, l'inspection de la construction (ci-après : IC) a émis un préavis favorable sous conditions : la totalité des vitrages du mur à la limite de la parcelle n° 1'151 devrait être fixe et translucide ;

-          le 4 mai 2016, après avoir préalablement demandé un rapport acoustique, le service de l'air, du bruit et des rayonnements non ionisants (ci-après : SABRA) a demandé un projet modifié : le rapport confirmant les forts dépassements des valeurs limites d'immissions aux droits des futurs logements (+6 dB(A) de nuit), le projet était à modifier. D'une part, les écrans que le maître d'ouvrage projetait de mettre en place devant une partie des ouvrants des chambres n'étaient pas des mesures de l'art. 39 de l'ordonnance sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986 (OPB - RS 814.41) au sens strict, et d'autre part, la typologie intérieure des logements pour étudiants était à revoir : le couloir desservant les chambres devrait se trouver côté rue Lombard et les chambres sur l'arrière du bâtiment ;

-          le 3 août 2016, le SABRA a émis un préavis favorable sous conditions du respect des art. 7 et 32 OPB et de la norme SIA 181 édition 2006 concernant la limitation des émissions des nouvelles installations fixes et l'isolation acoustique du bâtiment. Le mandataire ayant démontré qu'une modification typologique était impossible à mettre en place, le SABRA validait la solution architecturale proposée dans le rapport acoustique, dès lors que la mise en place d'écrans proches sur un ouvrant permettrait de respecter les valeurs limites d'immissions fixées par l'OPB.

9.9) Le 13 septembre 2012, MM. ACQUAROLI et JUNDT se sont opposés au projet.

La requête en autorisation de construire qu'ils avaient déposée en octobre 2011 devait être instruite prioritairement. Par ailleurs, l'immeuble projeté priverait les logements existants sur la parcelle n° 1'151 d'ensoleillement durant 5h30 à l'équinoxe. Ils produisaient à l'appui de leurs observations un photomontage du bâtiment projeté, ainsi que des extraits d'une étude des ombres portées par celui-ci sur l'immeuble sis rue Emile-Yung 17.

10.10) Par courriers du 18 octobre 2016, le département a informé les conseils de MM. ACQUAROLI et JUNDT de ce qu'il avait pris la décision, après un examen attentif des divers préavis recueillis et une pesée des différents intérêts en présence et dans les limites de la loi, d'autoriser le projet de la FULE.

11.11) Par décision du même jour, le département a délivré à la FULE l'autorisation de construire sollicitée (DD 105'142), laquelle a été publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 25 octobre 2016.

12.12) Par acte du 23 novembre 2016, M. ACQUAROLI (ci-après : le recourant) a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI) contre la décision précitée, concluant préalablement à la jonction de la procédure avec la procédure A/953/2013 et à l'organisation d'un transport sur place et, au fond, à l'annulation de l'autorisation, sous suite de frais et dépens. 

L'autorisation de construire querellée violait les dispositions régissant les constructions en limite de propriété, les distances entre bâtiments, les vues droites, ainsi que les constructions d'angle (art. 24, 25, 43 et 48 LCI et art. 231 du règlement d'application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 - RCI - L 5 05.01, ainsi que l'art. 37 LCI). En effet, en raison de sa configuration et des constructions existantes sur la parcelle n° 1'151, la parcelle n° 4'220 ne pouvait pas accueillir le bâtiment projeté.

La construction projetée était source d'inconvénients graves au sens de l'art. 14 LCI, dès lors qu'elle causait une perte d'ensoleillement aux équinoxes de plus de trois heures, respectivement de plus de cinq heures, aux immeubles existants sur les parcelles nos 1'150 et 1'151, laquelle n'était pas justifiée. Il produisait à l'appui de son recours une étude des ombres portées réalisée par l'entreprise Alios SA (ci-après : Alios) le 10 septembre 2012. De plus, l'immeuble projeté fermait la cour intérieure existante et créait ainsi un barrage visuel inacceptable.

Le recourant faisait également valoir divers griefs relatifs à l'absence de préavis de la commission des monuments, de la nature et des sites (ci-après : CMNS) et à la préservation de la qualité urbanistique et architecturale du quartier immédiat, lesquels ne sont aujourd'hui plus litigieux.

13.13) Le 23 décembre 2016, la ville a répondu au recours, concluant à son rejet et à la confirmation de la décision querellée.

Le recourant se méprenait en appliquant l'art. 231 RCI au cas d'espèce, cette disposition concernant des constructions en limite de deux propriétés privées, alors que le projet de la FULE était situé en limite de propriété d'une seule parcelle. Par ailleurs, il n'était nul besoin d'une distance de 4 m entre la construction et la limite de propriété.

Dès lors que la construction projetée respectait la législation, elle ne pouvait être source d'inconvénients graves. Par ailleurs, il n'était pas possible d'affirmer, sur la base de l'étude réalisée par Alios, que l'immeuble du recourant perdrait plus de deux heures par jour d'ensoleillement.

La construction projetée présentait un intérêt public important, vu le besoin en matière d'hébergement pour étudiants dans le canton.

14.14) Le même jour, septante-cinq personnes, dont Monsieur Bertrand AUVERGNE, Monsieur Jean-Charles BERRA, Madame Catherine BERTOLO MONNIER, Madame Maya BÖSCH, Madame Fiore CASTIGLIONE, Madame Marie Louise CHARBONNIER, Madame Palmyre CHARBONNIER, Madame Gilberte COSTA GRILO, Madame Marie-Anne COTTIER, Madame Cynthia DE BRIEY, Madame Rose-Marie et Monsieur Michel DUCHABLE, Monsieur Daniel DULAC, Monsieur Michel ECUVILLON, Madame Catherine et Monsieur Axel ERNST, Monsieur Jean-Philippe ETTER, Madame Maria Do Ceu FERNANDES DE OLIVEIRA DOS SANTOS, Madame Bernadette GLOOR, Monsieur Stéphane GUINAND, Monsieur Daniel HALPERIN, Madame Frédérique Anne LE GAL, Monsieur Michael LEW, Monsieur Rainer Michael MASON, Monsieur Claude MOSSAZ, Madame Maria Katarina MOSSAZ-JOËLSON, Madame Jessica MOSSAZ-MARINIC, Monsieur Etienne OTT, Madame Corinne PASSARD, Madame Anne REUGE, Monsieur Daniel RIZZATO, Monsieur Giancarlo ROSSETTI, Madame Irmengard et Monsieur Martin RUBI, Monsieur Erwan SAINT-M'LEUX, Madame Rosa SAJI DAZA ECUVILLON, Madame Carole et Monsieur Steve SALOM, Madame Liliane et Monsieur Jean-Michel VARCHER et Madame Maria VAZ ont demandé à intervenir dans la procédure, concluant préalablement à l'organisation d'un transport sur place et, au fond, à l'annulation de l'autorisation de construire, sous suite de « frais et dépens ».

Ils étaient tous locataires ou propriétaires de logements ou de bureaux situés dans un rayon de 143 m du projet litigieux. La construction projetée leur portait un préjudice important en termes de perte d'ensoleillement et en raison du barrage visuel qu'elle créerait. Ils disposaient donc d'un intérêt spécial, actuel et direct à ce que l'autorisation de construire soit annulée et, par conséquent, de la qualité pour intervenir.

Sur le fond, ils faisaient principalement leurs l'argumentation et les conclusions développées par le recourant.

15.15) Le 26 janvier 2017, la ville s'est déterminée sur la demande d'intervention.

Elle contestait la qualité de voisins ayant un intérêt direct et spécial à recourir des intervenants domiciliés rue Albert-Gos 16, rue Michel-Chauvet 12, place Edouard-Claparède 1, rue Emile-Yung 1, 3, 4, 5, 10, 11 et 15, rue Sautter 11, 13, 15, 25, 27 et 29 et rue Lombard 15, dès lors qu'ils étaient soit domiciliés hors du périmètre concerné, soit domiciliés dans des immeubles depuis lesquels la construction projetée ne serait pas visible, soit qu'ils ne subissaient aucune atteinte directe et spéciale à leurs intérêts du fait de ladite construction.

16.16) Le département s'est déterminé sur le recours et la demande d'intervention par écritures du 30 janvier 2017, concluant à leur rejet.

Les différentes dispositions régissant les gabarits et les limites et vues droites étaient respectées. Le statut de construction d'angle se reflétait dans la forme architecturale du bâtiment voisin F312, puisque ce dernier avait un mur borgne du côté où venait s'accoler la nouvelle construction, démontrant qu'une continuation de cet îlot par une construction d'angle était déjà prévue de longue date. La possibilité de fermer complètement l'îlot se reflétait en outre dans le fait que le bâtiment F313 était également composé d'un mur borgne.

Concernant la partie de la construction du côté de la parcelle n° 1'151, dès lors qu'elle s'accolait sur un mur en attente, l'IC avait requis que les vitrages donnant sur cette parcelle soient fixes et translucides. Ceux-ci ne pouvaient ainsi être comptabilisés comme jours et vues droites, et aucune distance minimale n'avait donc à être respectée vis-à-vis de la parcelle du recourant. Le gabarit des murs en attente n'avait d'ailleurs pas à être calculé puisque, par définition, une construction pouvait ou devait venir s'y accoler à terme.

Le fait que le projet fermait la partie actuellement ouverte de la cour intérieure constituait précisément le but urbanistique recherché et apprécié par la CA. En effet, de nombreuses cours d'immeubles étaient intégralement fermées, ce qui n'avait rien d'inhabituel ou d'illégal. De plus, la cour ne serait pas complètement fermée, puisque sur la parcelle n° 4'034, située du côté sud de la cour, le bâtiment existant ne comportait que deux étages, permettant de conserver un ensoleillement.

La perte d'ensoleillement était admissible vu l'intérêt public important, voire prépondérant, à la création de logements. D'ailleurs, les voisins devaient souffrir de l'éventuelle perte de vue et d'ensoleillement qui découlait d'un projet conforme à la zone. Cette perte n'était d'ailleurs pas aussi importante qu'alléguée : l'étude produite, vu sa date, avait certainement été effectuée sur la base du projet dans sa version initiale, qui prévoyait une hauteur d'environ 0,50 m de plus que le projet finalement autorisé. En partant du principe que l'impact en matière d'ensoleillement dépassait le cadre marginal en début d'après-midi seulement et ne durait que jusqu'à 14h25, respectivement 15h25, il pouvait être considéré que cette diminution de l'ensoleillement n'était pas source d'inconvénients graves.

17.17) Le même jour, le recourant a acquiescé aux demandes d'interventions.

18.18) La FULE s'est déterminée sur le recours et la demande d'intervention par écritures du 15 février 2017, concluant à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet, ainsi qu'au déboutement des intervenants de toutes leurs conclusions.

Le projet respectait les dispositions légales applicables aux constructions en limite de propriété, aux distances entre bâtiments, ainsi qu'aux vues droites. L'immeuble projeté était construit en limite de propriété et venait s'appuyer contre les murs en attente construits sur la parcelle voisine. Il avait de plus le même gabarit que l'immeuble contre lequel il venait s'appuyer. Pour le surplus, elle se rapportait aux observations de la ville et du département.

Enfin, elle avait respecté tous les souhaits et conditions posés par les autorités de préavis pour tenter de limiter les nuisances dues à la construction. L'éventuelle perte d'ensoleillement devait être supportée par les voisins, compte tenu de l'intérêt public à la construction de nouveaux logements pour étudiants et de la limitation du bruit routier obtenue grâce au « mur anti-bruit » que constituerait le nouvel immeuble.

19.19) Par jugement du 24 mai 2017, le TAPI a rejeté les recours et confirmé l'autorisation de construire querellée.

La qualité pour recourir des intervenants domiciliés ou ayant leurs bureaux dans l'immeuble sis rue Emile-Yung 17, immédiatement voisins de la parcelle concernée, devait être reconnue. Elle devait également l'être pour les voisins domiciliés ou ayant leurs bureaux dans les immeubles bordant la cour intérieure située entre les rues Emile-Yung, Sautter et la place Édouard Claparède : ceux-ci donnant tous sur la nouvelle construction, la réalisation du projet était susceptible de porter atteinte à leurs intérêts.

Le transport sur place sollicité n'était pas nécessaire, le dossier contenant tous les éléments nécessaires et suffisants pour établir les faits pertinents et prendre une décision par rapport aux griefs soulevés.

La construction projetée viendrait s'appuyer, à ses deux extrémités, sur des murs en attente construits sur la parcelle n° 1151 voisine (bâtiments F 312 et F 313). La partie longeant la limite de propriété entre les deux murs en attente devait être borgne, conformément à l'art. 231 al. 1 let. a RCI. Les vitrages tolérés sur cette face devaient être, à teneur du préavis de l'IC du 19 avril 2016, fixes et translucides, permettant ainsi à une construction voisine de venir s'y accoler. Lesdits vitrages devaient ainsi être traités comme des murs en attente, de sorte que les dispositions sur les vues droits ne leur étaient pas applicables. La construction projetée pouvait ainsi être autorisée en limite de propriété de la parcelle n° 1151.

La rue Lombard, que longerait l'immeuble projeté, ayant une largeur de 24,40 m, le gabarit prévu de 30 m respectait la hauteur autorisée selon la formule prescrite à l'art. 23 al. 5 LCI et la hauteur maximale de 30 m prévue à l'art. 23 al. 6 LCI. L'harmonie urbanistique était en outre préservée, le projet respectant l'alignement avec les immeubles de la rue Emile-Yung et s'inscrivant en continuité du bâtiment F 312, d'un gabarit similaire, en terminant l'îlot formé par les rues Emile-Yung, Sauttier, Lombard et la place Édouard-Claparède. Le grief soulevé concernant la hauteur du gabarit devait être rejeté.

Le préavis de la CMNS n'avait pas à être requis, la nouvelle construction projetée ne concernant pas un bâtiment faisant partie d'un ensemble visé par l'art. 89 LCI. Le fait que cette construction vienne s'adosser contre le mur en attente d'un bâtiment protégé n'y changeait rien.

Le projet se trouvait dans une zone permettant la construction projetée, de sorte que les voisins devaient en principe souffrir une diminution de l'ensoleillement de leurs parcelles. Il ne résultait pas de l'étude produite par le recourant que la façade du bâtiment F 312 subirait effectivement une perte d'ensoleillement supplémentaire de deux heures à l'équinoxe. La perte d'ensoleillement alléguée ne pouvait ainsi être retenue comme établie. Le projet, qui portait sur la construction de trente-six logements pour étudiants, répondait à un intérêt public évident. Ainsi, le grief formulé au sujet d'une perte d'ensoleillement ne pouvait conduire à un refus de l'autorisation de construire litigieuse. Il en allait de même s'agissant des inconvénients de vue allégués, qui faisaient partie des conséquences pratiquement inévitables de l'édification de nouveaux bâtiments en zone à bâtir. L'effet de « mur » serait par ailleurs atténué par les vitrages translucides créés sur cette face, selon les exigences de l'IC.

23.20) Par acte du 6 juillet 2017, M. ACQUAROLI a formé recours à l'encontre du jugement précité auprès de la chambre administrative, concluant préalablement à la tenue d'une audience d'enquêtes et à la mise en oeuvre d'un transport sur place, et principalement à l'annulation du jugement du TAPI, sous suite de « frais et dépens ».

a. L'interprétation effectuée par le TAPI de la notion de « mur en attente » figurant à l'art. 231 al. 1 let. a RCI et son application à la face arrière du bâtiment projeté était arbitraire.

C'était en violation du droit d'être entendu du recourant et de son devoir de motivation que le TAPI avait écarté le grief relatif à la violation de l'art. 14 LCI en raison de la perte d'ensoleillement induite par la nouvelle construction sur l'immeuble existant sur la parcelle n° 1151. Par ailleurs, contrairement à ce qu'avait retenu le TAPI, cette perte d'ensoleillement causait aux propriétaires et locataires des immeubles voisins des inconvénients graves au sens de l'art. 14 LCI.

La ville était propriétaire, dans le même secteur, d'un certain nombre de parcelles vierges de toute construction et qui avaient un potentiel constructif. Ainsi, il était incompréhensible que la ville persiste à vouloir implanter un immeuble de neuf étages sur le petit carré d'herbe situé en bas de la rue Emile-Yung.

b. Le recourant produisait à l'appui de son recours deux films modélisant l'ensoleillement de l'immeuble sis sur la parcelle n° 1151 en date du 20 mars, soit à l'équinoxe, sans et avec la nouvelle construction. Ces études avaient été actualisées le 2 juillet 2017 par Alios en fonction du gabarit final retenu pour l'immeuble projeté par la FULE selon les plans et coupes visés ne varietur. Contrairement à ce que la TAPI aurait souhaité, il n'était pas possible de distinguer les nuances entre les ombres portées par l'avant-toit et celles induites par la construction projetée. Selon le film de la situation actuelle, pendant la période allant de 11h55 à 15h55, les fenêtres et balcons donnant sur la façade sud/est de l'immeuble bénéficiaient d'un ensoleillement total, et aucune ombre significative n'était projetée par l'avant-toit. À compter de 14h55, une petite ombre était projetée par l'avant-toit, mais celle-ci n'atteignait pas même les fenêtres situées au dernier étage. Ce n'était qu'à partir de 15h55 que les fenêtres situées aux deux derniers étages de l'immeuble étaient en partie impactées par l'ombre projetée par l'avant-toit, les autres étages bénéficiant d'un ensoleillement complet jusqu'à 16h10. Le film relatif à la situation avec l'immeuble projeté montrait en revanche qu'à partir de 10h55, l'ombre projetée par l'immeuble de la FULE commençait à toucher l'immeuble sis sur la parcelle n° 1151 et que, dès 11h55, l'ombre projetée sur le nouvel immeuble privait d'ensoleillement la moitié des fenêtres et balcons donnant sur la façade sud/est de l'immeuble. Graduellement, cette perte d'ensoleillement s'étendait sur toute la façade qui était normalement en plein soleil.

21.21) Par acte du même jour, M. AUVERGNE, M. BERRA, Mme BERTOLO MONNIER, Mme BÖSCH, Mme CASTIGLIONE, Mmes Marie-Louise et Palmyre CHARBONNIER, Mme Gilberte COSTA GRILO, Mme COTTIER, Mme DE BRIEY, Mme et M. DUCHABLE, M. DULAC, M. ECUVILLON, Mme et M. ERNST, M. ETTER, Mme FERNANDES DE OLIVEIRA DOS SANTOS, Mme GLOOR, M. GUINAND, M. HALPERIN, Mme LE GAL, M. LEW, M. MASON, M. MOSSAZ, Mme MOSSAZ-JOËLSON, Mme MOSSAZ-MARINIC, M. OTT, Mme PASSARD, Mme REUGE, M. RIZZATO, M.  ROSSETTI, Mme et M. RUBI, M. SAINT-M'LEUX, Mme SAJI DAZA ECUVILLON, Mme et M. SALOM, Mme et M. VARCHER et Mme VAZ (ci-après : M. AUVERGNE et consorts) ont également interjeté recours contre le jugement précité auprès de la chambre administrative. Ils concluaient, préalablement, à la convocation d'une audience d'enquêtes, à l'organisation d'un transport sur place et à la mise en place d'une expertise quant à l'effet de l'ombre portée par la construction querellée sur le déficit d'apport de chaleur solaire passif sur les bâtiments existants, et, principalement, à l'annulation du jugement entrepris et à la condamnation du département aux « frais et dépens » de la procédure.

Ils souscrivaient intégralement aux développements et conclusions présentés dans le recours déposé simultanément par M. ACQUAROLI.

Ils développaient en particulier les griefs les touchant plus particulièrement, à savoir la violation de leur droit d'être entendus, le formalisme excessif du TAPI qui avait écarté le grief relatif à la violation de l'art. 14 LCI, et la violation du principe de la proportionnalité de par l'absence, lors de la pesée des intérêts, de la prise en compte du préjudice économique subi par les recourants du fait du déficit d'apport de chaleur solaire passif.

Selon une étude faite par l'office fédéral des questions conjoncturelles, qu'ils produisaient, l'effet du soleil sur un bâtiment était générateur de chaleur naturelle et gratuite, alors qu'à l'inverse, l'ombre portée sur un même bâtiment pouvait diminuer de 3 à 5° la température intérieure de celui-ci.

Pour le surplus, leurs arguments seront en tant que de besoin repris dans la partie en droit du présent arrêt.

22.22) Le 30 août 2017, la ville a répondu aux recours, concluant à leur rejet, à la confirmation du jugement entrepris et à la condamnation des recourants en tous les frais et émoluments de la procédure.

C'était à raison que le TAPI avait considéré que la façade de l'immeuble du recourant donnant sur la rue Lombard était borgne vu l'absence de vue, et qu'il permettait à une construction de s'y accoler. Les vitrages pouvaient donc être traités comme des murs en attente.

Le TAPI n'avait pas violé le droit d'être entendu des recourants, mais avait bien examiné leur grief relatif à la perte d'ensoleillement et motivé sa décision, considérant que les éléments de preuve apportés par les recourants n'étaient pas concluants. En effet, il n'était pas possible d'affirmer sur la base du document produit par le recourant - qui n'avait pas été établi par des architectes ou par une entreprise spécialiste dans les études d'ombres - que l'immeuble du recourant perdrait plus de deux heures d'ensoleillement en raison du projet litigieux. En tout état de cause, une perte plus importante serait admissible dans la mesure où le projet répondait à un intérêt public important, à savoir la création de logement pour étudiants.

26.23) Le département a répondu au recours le 12 septembre 2017, concluant également à son rejet et à la confirmation du jugement querellé.

Faisant référence aux travaux préparatoires, il relevait que le projet querellé allait dans le sens de la volonté du législateur s'agissant de l'art. 24 al. 2 LCI, mettant fin à deux murs borgnes existants. Le projet visant à valoriser l'îlot, il était opportun, dans le cas d'espèce, de ne pas surseoir à la réalisation du projet jusqu'à la présentation d'un plan d'ensemble, possibilité prévue par l'art. 24 al. 2 LCI.

S'agissant de la perte d'ensoleillement alléguée, elle concernait, en grande majorité, une infime partie du bâtiment F 312 et était inhérente à la réalisation de l'immeuble en îlot, procédé architectural tout à fait courant au centre-ville et conforme à la zone. Ainsi, une éventuelle perte d'ensoleillement de plus de deux heures ne devait pas être considérée comme source d'inconvénients graves, eu égard à la conformité du projet à la zone, aux spécificités architecturales des lieux et à l'intérêt public à la réalisation de logements pour étudiants. Le prétendu « barrage visuel » n'était également pas problématique, toutes les règles de distances et vues droites étant respectées.

La perte énergétique invoquée par les recourants n'était pas démontrée : selon l'étude produite, cela dépendait notamment de la surface de captage (surfaces vitrées) et d'autres facteurs, non démontrés. Cette prétendue diminution des températures devait en outre être relativisée au regard de l'isolation thermique accrue découlant du fait que l'immeuble F 312 n'aurait plus de mur borgne.

24.24) Le 13 septembre 2017, la FULE a conclu au rejet du recours de M. ACQUAROLI, à la confirmation du jugement entrepris et à l'irrecevabilité du recours déposé par M. AUVERGNE et consorts, le tout sous suite de frais et « dépens ».

On ignorait tout de l'emplacement des appartements des recourants. Il n'était dès lors pas possible d'examiner s'ils étaient atteints de quelconque manière par l'immeuble projeté. Leur recours devait donc être déclaré irrecevable.

Les recourants méconnaissaient la portée de l'art. 231 RCI qui ne faisait qu'expliciter le fait qu'une construction pouvait être érigée en limite de propriété s'il s'agissait d'un mur en attente. Tel était le cas de l'immeuble propriété de M. ACQUAROLI, construit en limite de la parcelle n° 4220. La construction de la FULE serait simplement érigée contre le mur en attente de l'immeuble de M. ACQUAROLI, et respectait de ce fait les art. 22 et 23 LCI et les art. 230 et 231 RCI.

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, pour qu'une perte d'ensoleillement soit qualifiée d'excessive, il fallait qu'elle couvre la totalité de l'habitation ou du bien-fonds voisin durant plus de deux heures à l'équinoxe. Or, l'étude produite par les recourants ne démontrait pas que l'ombre de l'immeuble projeté recouvrirait la totalité de l'immeuble F 312 pendant plus de deux heures à l'équinoxe. À teneur d'une étude qu'elle produisait, réalisée par le bureau d'architecte GROUP 8, seule la façade sud-est de cet immeuble serait partiellement recouverte d'ombre, et ce entre midi et 14h00 seulement. Par ailleurs, à teneur de cette même étude, l'ombre projetée serait partielle, compte tenu de la façade translucide de l'immeuble de la FULE donnant sur cour. Dès lors, la construction de l'immeuble projeté n'aurait pas d'impact sur l'immeuble F 312.

25.25) Le 23 octobre 2017 s'est tenu un transport sur place.

a. Monsieur Tarramo BROENNIMANN, architecte mandaté par la FULE, a indiqué les dimensions et l'emplacement du projet sur la parcelle n° 4220 le long de la rue Lombard.

b. Le bureau de M. ACQUAROLI avait fait poser un gabarit, soit une ligne de ballons en forme de coeur, en haut des immeubles, dont les parties ont admis qu'elle représentait la hauteur future du bâtiment à quelques décimètres près. M. ACQUAROLI a souligné que l'extrémité de la ligne de ballons, côté rue Emile-Yung, était au faîte du toit, alors que l'immeuble se terminerait au droit de la façade du bâtiment le long de cette rue. Depuis le petit carré d'herbe où serait édifié l'immeuble, il a relevé que la construction du bâtiment accolé au mur en attente ne posait pas de problème en soi, contrairement à la partie qui jouxterait la cour. Cette partie-là devrait être à 4 m en retrait, et il n'y avait pas la place pour cela. Si le bâtiment devait être édifié en limite, il pourrait atteindre au maximum 7 m, soit la hauteur du bâtiment de la pharmacie.

c. Le représentant du département a relevé que l'immeuble situé à l'angle de la rue Lombard et de la rue Sautter n'avait pas de fenêtres sur l'extrémité de sa façade sur cour. Ce n'était pas la même situation sur l'immeuble donnant sur la rue Emile-Yung. Sur ce dernier, il y avait des fenêtres avec des vitres cathédrales sur la façade borgne. Celles-ci donnaient sur une courette technique, selon M. ACQUAROLI.

d. Les parties se sont ensuite rendues dans l'appartement de M. ERNST, au 3ème étage de l'immeuble F 312. Dans l'appartement situé à l'angle de la cour et de la rue Lombard, la pièce d'angle était une chambrette.

e. Lors du transport sur place, le nouveau conseil de M. ACQUAROLI a été autorisé à déposer un chargé de pièces complémentaires.

Il s'agissait d'images de synthèse extraites du site internet du système d'information du territoire à Genève (ci-après : SITG, consultable à l'adresse https://ge.ch/sitg/cartes/3d), indiquant l'ombre projetée sur le bâtiment F 312 entre 8h09 et 15h59 au mois de mars, avec et sans le bâtiment projeté.

f. À l'issue du transport sur place, un délai au 18 décembre 2017 a été octroyé aux parties pour produire une ultime écriture.

26) Par courrier du 3 novembre 2017, annexé au procès-verbal par la chambre administrative, la FULE est revenue sur le contenu dudit procès-verbal.

Contrairement à ce qui y était indiqué, M. BROENNIMANN avait précisé que selon lui, la hauteur du gabarit telle que définie par la ligne de ballons, était trop élevée. Vérification faite, tel était bien le cas : le faîte de l'immeuble projeté était bien aligné à la tangente de l'arc de cercle du bâtiment mitoyen, propriété de M. ACQUAROLI. La FULE n'admettait donc pas que la ligne en forme de coeurs, posée par le bureau du recourant, représentait la hauteur du futur bâtiment.

27.27) Le 18 décembre 2017, M. ACQUAROLI a adressé ses observations finales à la chambre administrative, persistant intégralement dans les conclusions de son recours.

En retenant que la façade nord-ouest de l'immeuble projeté longeant la limite de propriété entre les parcelles nos 1151 et 4220 pouvait être assimilée à un « mur en attente », le TAPI et le département avaient cherché à donner une apparence de justification légale à une situation complètement illégale, et étaient ainsi tombés dans l'arbitraire.

Tant l'étude des ombres réalisée par Alios que les clichés des ombres tirés du site SITG démontraient que la construction projetée priverait les chambres, les cuisines et les balcons des appartements donnant sur la façade sud/est de l'immeuble F 312 de tout ensoleillement et de la lumière du jour et ce de manière croissante dès 10h55 et jusqu'à après 15h55, soit pendant au moins quatre heures. Lors du transport sur place, la chambre administrative avait également pu se rendre compte du barrage visuel que constituerait la façade « mur » de l'immeuble projeté, pour les locataires de l'immeuble du recourant, qui disposaient à l'heure actuelle d'une vue dégagée jusqu'au Salève. Ces nuisances graves n'étaient pas justifiées dans le cas présent, l'intérêt privé des propriétaires et de la soixantaine de locataires des immeubles sis sur les parcelles n° 1150 et 1151 à pouvoir continuer de profiter de logements ensoleillés et disposant d'une lumière du jour suffisante et d'une certaine vue l'emportant sur l'intérêt public à la construction de logements destinés à être occupés temporairement par un nombre très réduit d'étudiants.

Enfin, à la lecture des plans visés ne varietur approuvés par le département, les façades de l'immeuble projeté empiétaient sur le domaine public communal, à savoir sur le trottoir longeant la rue Lombard, sans que l'autorisation nécessaire n'ait été sollicitée et obtenue de la part de la ville.

28.28) Le même jour, le département a transmis à la chambre administrative ses observations après le transport sur place, persistant dans ses conclusions préalables.

Il partageait la remarque émise par la FULE dans son courrier du 3 novembre 2017. L'indication erronée du gabarit découlait certainement de l'évolution du gabarit du projet entre sa première version et le gabarit finalement autorisé.

Comme le site SITG ne mentionnait que le volume du projet de construction dans sa première version déposée - le service de la mensuration officielle étant en principe consulté une seule fois -, il allait de soi que les images de synthèse produites ne correspondaient pas à l'image du projet finalement autorisé.

29.29) La ville a également transmis ses observations finales le 18 décembre 2017, persistant intégralement dans ses conclusions.

30.30) Par courrier du même jour, la FULE a persisté dans ses conclusions.

Les documents transmis par M. ACQUAROLI le 23 octobre 2017 ne reflétaient aucune réalité. Il convenait donc de se référer aux plans de réalisation de l'immeuble annexés à l'autorisation de construire, ainsi qu'aux différentes pièces produites par la FULE.

31.31) M. AUVERGNE et consorts se sont déterminés le 3 janvier 2018, persistant également dans leurs conclusions et insistant sur la perte d'apport de chaleur solaire passif que causerait le bâtiment litigieux. Si ce dernier était autorisé, les directives émises en 2012 par la Conférence des directeurs cantonaux de l'énergie, intitulées « principes directeurs de la politique énergétique », seraient manifestement violées. La perte d'apport de chaleur solaire passif étant extrêmement difficile à prouver, seule une expertise serait à même de confirmer celle-ci.

32.32) Le 24 janvier 2018, la FULE a répliqué aux observations des recourants.

Le bâtiment projeté avait pour vocation de venir s'appuyer sur les deux murs en attente des bâtiments cadastrés nos 311 et 312 (recte : 312 et 313), et viendrait ainsi terminer l'îlot d'immeubles présents. Aucune des dispositions légales citées par M. ACQUAROLI n'était ainsi violée.

L'argument selon lequel l'immeuble projeté déborderait sur la rue Lombard était nouveau et ne se fondait sur rien. La ville, propriétaire du terrain, avait par ailleurs toujours soutenu le projet.

Pour le surplus, elle persistait dans ses conclusions.

33.33) Le 26 février 2018, M. ACQUAROLI a adressé sa réplique à la chambre administrative.

Contrairement à ce que soutenait la FULE, l'étude d'ombres effectuée par Alios se basait sur les ombres portées à l'équinoxe, soit le 20 mars 2018.

Il ressortait des plans visés ne varietur par le département que les distances et vues droites n'étaient pas respectées sur la face latérale de l'immeuble projeté en lien avec la parcelle n° 4'034. Par ailleurs, la hauteur du bâtiment projeté était bien plus élevée que l'immeuble F 312. Enfin, les éléments implantés en saillies sur le futur immeuble ne respectaient pas l'art. 25 RCI.

34.34) M. AUVERGNE et consorts ont produit des observations le 9 mars 2018, persistant dans leur conclusion visant à la mise sur place d'une expertise établissant les critères techniques permettant de calculer de manière objective les effets de l'ombre portée sur le bâtiment F 312 en termes de consommation thermique, ce à divers moments de l'année.

L'autorisation projetée allait à l'encontre de la volonté politique écologique de la Confédération, du canton de Genève, du département et des Services industriels de Genève (ci-après : SIG). Aujourd'hui, compte tenu des objectifs politiques et écologiques fixés en fonction des impôts prélevés (soit la taxe sur le CO2), une construction qui générerait une augmentation de la consommation thermique ne devait pas être autorisée. Le Tribunal fédéral ne s'était jamais exprimé quant aux critères à retenir en matière de déficit en apport de chaleur passif solaire. L'hiver et les entre saisons étant des références essentielles à l'estimation du déficit en apport de chaleur passif solaire, l'équinoxe était sans pertinence à cet égard, de sorte que la jurisprudence du Tribunal fédéral relative à la perte d'ensoleillement n'était pas applicable.

35.35) Par courrier du 12 mars 2018, la chambre administrative a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, les recours sont recevables de ces points de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.2) L'objet du litige porte sur la conformité au droit de l'autorisation de construire DD 105'142 délivrée à la FULE par le département.

3.3) La FULE concluant à l'irrecevabilité du recours de M. AUVERGNE et consorts, il convient de trancher au préalable cette question.

a. À teneur de l'art. 60 let. b LPA, les parties à la procédure qui a abouti à la décision attaquée et toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée, sont titulaires de la qualité pour recourir (ATA/632/2011 du 11 octobre 2011). S'agissant des voisins, la jurisprudence a indiqué que seuls ceux dont les intérêts sont lésés de façon directe et spéciale ont l'intérêt particulier requis. Cette lésion directe et spéciale suppose qu'il y ait une communauté de faits entre les intérêts du destinataire de la décision et ceux des tiers. La qualité pour recourir est en principe donnée lorsque le recours émane du propriétaire ou du locataire d'un terrain directement voisin de la construction ou de l'installation litigieuse (ATA/577/2014 du 29 juillet 2014). Les voisins peuvent ainsi recourir en invoquant des règles qui ne leur donnent aucun droit et qui ne sont pas directement destinées à protéger leurs intérêts (ATF 110 Ib 398 consid. 1b p. 400 ; ATA/214/2007 du 8 mai 2007 ; ATA/101/2006 du 7 mars 2006 ; ATA/653/2002 du 5 novembre 2002 ; ATA/35/2002 du 15 janvier 2002 et les références citées).

b. En l'espèce, même si on ignore l'emplacement exact des appartements des recourants, dont l'adresse est mentionnée sur le recours, il n'en demeure pas moins que certains d'entre eux sont locataires de l'immeuble de M. ACQUAROLI (parmi lesquels M. ERNST, dont l'appartement a été visité lors du transport sur place et se trouve à l'angle de la cour et de la rue Lombard), qu'ils sont donc immédiatement voisins de la parcelle concernée par la construction litigieuse. Comme l'a à juste titre retenu le TAPI, ils sont dès lors directement et plus que quiconque touchés par l'immeuble projeté, de sorte que la qualité pour recourir doit leur être reconnue.

La qualité pour recourir des locataires de M. ACQUAROLI permet d'entrer en matière sur leur recours, et la question de savoir si les autres recourants, dont les appartements sont plus éloignés de la future construction, sont directement touchés par celle-ci pourra demeurer indécise.

4.4) M. AUVERGNE et consorts concluent préalablement à la mise sur pied d'une expertise quant à l'effet de l'ombre portée par la construction querellée sur le déficit d'apport de chaleur solaire passif sur les bâtiments existants.

a. Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes (ATF 137 IV 33 consid. 9.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_265/2016 du 23 mai 2016 consid. 5.1 et les arrêts cités), de participer à l'administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 138 I 154 consid. 2.3.3 ; 137 II 266 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1060/2016 du 13 juin 2017 consid. 3.1 ; 2C_848/2016 du 26 septembre 2016 consid. 6 et les arrêts cités). Le droit de faire administrer des preuves n'empêche cependant pas le juge de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s'il acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 136 I 229 consid. 5.2 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_980/2016 du 7 mars 2017 consid. 2.2.1. ; 1C_520/2016 du 16 février 2017 consid. 3.4. ; 1C_119/2015 du 16 juin 2015 consid. 2.1 ; ATA/1111/2017 du 18 juillet 2017). Le droit d'être entendu ne contient pas non plus d'obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 138 I 232 consid. 5.1 ; 138 IV 81 consid. 2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_983/2016 du 20 février 2017 consid. 2.2 ; 2C_835/2014 du 22 janvier 2015 consid. 3.1).

b. L'expertise représente un moyen de preuve (art. 38 LPA) ordonné lorsque l'établissement ou l'appréciation de faits pertinents requièrent des connaissances et compétences spécialisées - par exemple techniques, médicales, scientifiques, comptables - que l'administration ou le juge ne possèdent pas (ATA/661/2015 du 23 juin 2015 ; ATA/568/2015 du 2 juin 2015 ; ATA/595/2006 du 14 mars 2006).

c. En l'espèce, les recourants sollicitant la mise sur pied de l'expertise reconnaissent eux-mêmes que la preuve effective de la perte d'apport de chaleur passif solaire est extrêmement difficile à apporter. L'on peine dès lors à voir quelle expertise la chambre de céans pourrait faire réaliser. Toutefois, comme cela sera exposé ci-après, ce grief n'est pas décisif, et la chambre administrative dispose d'un dossier complet lui permettant de trancher les griefs soulevés en toute connaissance de cause. Ainsi, il ne sera pas donné suite à la demande d'expertise des recourants.

5.5) Dans un grief de nature formelle, les recourants reprochent au TAPI la violation de leur droit d'être entendus, dans la mesure où il aurait omis d'instruire et d'examiner leur grief lié à la perte d'ensoleillement causée par la nouvelle construction.

a. Le droit d'être entendu est une garantie de nature formelle dont la violation entraîne, lorsque sa réparation par l'autorité de recours n'est pas possible, l'annulation de la décision attaquée sans égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 137 I 195 consid. 2.2 ; 133 III 235 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_529/2016 du 26 octobre 2016 consid.4.2.1 ; 1C_387/2014 du 20 juin 2016 consid. 3.1 ; ATA/1007/2016 du 29 novembre 2016 ; ATA/637/2016 du 26 juillet 2016 et les arrêts cités ; Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, p. 696 n. 1982). Ce moyen doit par conséquent être examiné en premier lieu (ATF 138 I 232 consid. 5.1 ; 137 I 195 consid. 2.2). Sa portée est déterminée d'abord par le droit cantonal (art. 41 ss LPA) et le droit administratif spécial (ATF 126 I 15 consid. 2 ; 124 I 49 consid. 3a et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 5A_11/2009 du 31 mars 2009 consid. 2.1 ; 2P.39/2006 du 3 juillet 2006 consid. 3.2). Si la protection prévue par ces lois est insuffisante, ce sont les règles minimales déduites de la Constitution qui s'appliquent (art. 29 al. 2 Cst. ; arrêt du Tribunal fédéral 4A_15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.1 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 509 n. 1526 ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, 2013, vol. 2, 3ème éd., p. 615 n. 1317 ss). Quant à l'art. 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), il n'accorde pas au justiciable de garanties plus étendues que celles découlant de l'art. 29 al. 2 Cst. (arrêts duTribunal fédéral 6B_24/2010 du 20 mai 2010 consid. 1 ;4P.206/2005 du 11 novembre2005 consid. 2.1 et les arrêts cités).

Le droit d'être entendu comprend le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu'une décision ne soit prise, de fournir des preuves quant aux faits de nature à influer sur la décision, d'avoir accès au dossier, de participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance et de se déterminer à leur propos (ATF 142 II 218 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_656/2016 du 9 février 2017 consid. 3.2 et les références citées ; ATA/917/2016 du 1er novembre 2016 et les arrêts cités).

  b. La jurisprudence du Tribunal fédéral en matière de droits constitutionnels a également déduit du droit d'être entendu le droit d'obtenir une décision motivée. L'autorité n'est toutefois pas tenue de prendre position sur tous les moyens des parties ; elle peut se limiter aux questions décisives, mais doit se prononcer sur celles-ci (ATF 138 I 232 consid. 5.1 ; 137 II 266 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 8C_320/2016 du 13 mars 2017 consid. 4.1 ; 6B_431/2015 du 24 mars 2016 consid. 1.1 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 521 n. 1573). Il suffit, du point de vue de la motivation de la décision, que les parties puissent se rendre compte de sa portée à leur égard et, le cas échéant, recourir contre elle en connaissance de cause (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 ; 138 I 232 consid. 5.1 ; 136 I 184 consid. 2.2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_832/2016 du 12 juin 2017 consid. 4.1 ; 1B_450/2015 du 22 avril 2016 consid. 3.1 ; ATA/1059/2017 du 4 juillet 2017 ; ATA/1039/2017 du 30 juin 2017).

La violation du droit d'être entendu doit en principe entraîner l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances du recourant sur le fond (ATF 140 I 68 consid. 9.3 ; 135 I 279 consid. 2.6.1 ; 133 III 235 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 5A_681/2014 du 14 avril 2015 consid. 3.1 ; 2C_489/2013 du 27 août 2013 consid. 2.2 ; ATA/752/2016 du 6 septembre 2016). Une réparation devant l'instance du recours est possible si celle-ci jouit du même pouvoir d'examen que l'autorité intimée (ATF 138 I 97 consid. 4.1.6.1 ; 137 I 195 consid. 2.3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1B_112/2015 du 14 juillet 2015 consid. 2.1 ; 1C_533/2012 du 12 septembre 2013 consid. 2.1 ; ATA/1039/2017 du 30 juin 2017). La réparation dépend cependant de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception (ATF 126 I 68 consid. 2 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1B_112/2015 du 14 juillet 2015 consid. 2.1 ; 1C_641/2012 du 31 avril 2013 consid. 3.4 ; ATA/1039/2017 du 30 juin 2017) ; elle peut se justifier en présence d'un vice grave notamment lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 137 I 195 consid. 2.3.2 ; 136 V 117 consid. 4.2 ; ATA/1039/2017 précité). Enfin, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de la violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir eu le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu'elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/679/2017 du 20 juin 2017 et les arrêts cités).

c. En l'espèce, contrairement à ce que soutiennent les recourants, le jugement entrepris traite de la problématique de l'ensoleillement et arrive à la conclusion, après examen des pièces du dossier, que ce grief ne peut pas conduire à un refus de l'autorisation de construire litigieuse.

Par ailleurs, au vu de la qualité d'impression de l'étude d'ombres produite par les recourants en première instance et du fait que celle-ci se fondait sur la base du projet dans sa version initiale, on ne saurait reprocher au TAPI de ne lui avoir pas retenu de valeur probante.

En tout état de cause, les recourants ont pu produire une nouvelle étude d'ombres et pu faire valoir leurs arguments par-devant la chambre administrative, de sorte que, même si une violation de leur droit d'être entendus devait être retenue en première instance, elle serait réparée devant la chambre de céans, qui dispose du même pouvoir d'examen que le TAPI.

Partant, ce grief sera écarté.

6.6) Dans un premier grief au fond, les recourants invoquent une interprétation arbitraire de la notion de « mur en attente » de l'art. 231 al. 1 let. c LCI. Ils soutiennent que le TAPI aurait méconnu cette notion et se serait fondé sur le constat factuel erroné selon lequel un bâtiment de neuf étages pourrait encore être érigé sur la parcelle n° 1151 et venir s'adosser à la face nord-ouest du bâtiment projeté (qui devrait ainsi être considérée comme un mur en attente).

a. En 2ème zone de construction, les constructions peuvent être édifiées à la limite de deux propriétés privées (art. 24 al. 1 LCI). Le département peut subordonner l'autorisation d'édifier des constructions avec un mur en attente à la présentation préalable par le demandeur d'un plan d'ensemble dont l'exécution soit assurée dans un délai maximum de dix ans (art. 24 al. 2 LCI). Lorsqu'une construction n'est pas édifiée à la limite de propriétés privées, la distance entre cette construction et la limite doit être au moins égale à la moitié de la hauteur du gabarit diminuée de 3 m (art. 25 al. 1 LCI). Les distances entre deux constructions ne peuvent être inférieures à la somme des distances qui seraient exigibles entre chacune de ces constructions et une limite de propriété passant entre elles (art. 45 al. 1 LCI).

L'art. 231 RCI précise que ne peuvent être édifiés à la limite de deux propriétés privées en dérogation aux dispositions sur les distances entre bâtiments que : a) des murs en attente ; b) des constructions basses ; c) des constructions de peu d'importance ; et d) des constructions en sous-sol (al. 1). Restent réservées les dispositions sur les droits de jour et celles des plans localisés de quartier (al. 2).

b. Ni la LCI, ni le RCI ne contiennent de définition de la notion de « mur en attente », contenue aux art. 20 al. 2, 24 al. 2, 28 al. 2 et 3, 33 al. 2 et 3 LCI et 231 al. 1 let. a RCI.

La loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre (interprétation littérale). Le juge ne se fonde cependant sur la compréhension littérale du texte que s'il en découle sans ambiguïté une solution matériellement juste (ATF 137 IV 180 consid. 3.4). En revanche, lorsque des raisons objectives permettent de penser que ce texte ne restitue pas le sens véritable de la disposition en cause, il y a lieu de déroger au sens littéral d'un texte clair (ATF 137 I 257 consid. 4.1 ; ATA/607/2018 du 13 juin 2018 consid. 5) ; il en va de même lorsque le texte conduit à des résultats que le législateur ne peut avoir voulus et qui heurtent le sentiment de la justice et le principe de l'égalité de traitement (ATF 135 IV 113 consid. 2.4.2). De tels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du but et du sens de la disposition, ainsi que de la systématique de la loi (ATF 135 II 78 consid. 2.2). Il convient alors de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires (interprétation historique), du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose, singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation téléologique) ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales (interprétation systématique ; ATF 136 III 283 consid. 2.3.1). Le juge ne privilégie aucune méthode d'interprétation, mais s'inspire d'un pluralisme pragmatique pour rechercher le sens véritable de la norme (ATF 139 IV 270 consid. 2.2 ; 137 IV 180 consid. 3.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_839/2015 du 26 mai 2016 consid. 3.4.1 ; 1C_584/2015 du 1er mars 2016 consid. 4.1).

À teneur des travaux préparatoires relatifs à la LCI, l'art. 24 al. 2 LCI « tend à faire disparaître les mitoyens d'attente qui sont très laids et déparent certains quartiers. [...] La construction de certains immeubles laisse subsister des mitoyens qui, pendant un temps indéterminé, sont vraiment une chose laide. » (Mémorial des séances du Grand Conseil de la République et canton de Genève, 1940/I, pp. 610-611).

Selon la jurisprudence de la chambre de céans, un jour fixe, translucide et non transparent est assimilé à un mur (ATA/880/2003 du 2 décembre 2003 consid. 3).

c. Il ressort de ce qui précède que la notion de « mur en attente » présuppose qu'une autre construction puisse venir s'y accoler un jour. Partant, une telle construction doit être, comme le soutient le recourant, autorisable sous l'angle du droit des constructions.

d. En l'espèce, la construction projetée est prévue en limite de propriété des parcelles privées nos 4'220 et 1'151. La façade nord-ouest de l'immeuble litigieux vient s'appuyer, à ses deux extrémités, sur les murs en attente construits sur la parcelle n° 1'151, qui sont eux-mêmes en limite de propriété (bâtiments F 312 et F 313). Le reste de la façade nord-ouest de l'immeuble litigieux donne sur une partie de la parcelle n° 1'151, qui appartient à la cour intérieure de l'ensemble d'immeubles formé par les rues Sauter, Emile-Yung et la place Édouard-Claparède.

Selon le TAPI, cette partie de façade donnant sur la cour, borgne, devrait être considérée comme un mur en attente au sens de l'art. 231 al. 1 RCI. Si des vitrages y ont été tolérés, ceux-ci seront fixes et translucides, de manière à ce qu'une construction voisine puisse venir s'y accoler (jugement entrepris, consid. 34).

Or, dans la mesure où ce mur donne sur une cour intérieure, il est, comme le soutient le recourant, peu probable, voire impossible qu'une construction puisse venir s'y adosser un jour. En effet, les façades des immeubles existants encerclant cette cour intérieure sont dotées de fenêtres. Si un bâtiment devait être construit contre la façade arrière de l'immeuble de la FULE, cela obstruerait complètement les fenêtres donnant sur cour de l'immeuble F 312, propriété du recourant, et rendrait ses appartements inhabitables. La façade arrière de l'immeuble litigieux donnant sur cour mesurant 16 m de long, il ne serait pas non plus envisageable de construire un immeuble de grand gabarit sur une partie de cette façade, sous peine de violer les dispositions relatives notamment aux distances entre les bâtiments. Dans l'ATA/1637/2017, la chambre administrative avait d'ailleurs refusé la construction d'un immeuble d'un étage sur la parcelle n° 1'151 au motif que cette construction aurait été trop proche de la façade de l'immeuble F 312.

Dans sa réponse, le département reconnaît à ce propos qu'une extension du bâtiment F 312 dans sa typologie actuelle nécessiterait des modifications dans les logements existants. Or, l'on peine à voir quelles modifications apportées auxdits logements permettraient de construire un immeuble dans cette cour intérieure, accolé au mur prétendument en attente de l'immeuble de la FULE.

Dans ces circonstances, l'on ne saurait suivre le raisonnement du TAPI sur ce point, qui valide la construction litigieuse en limite de propriété au motif que ce mur borgne constituerait un mur en attente au sens de l'art. 231 al. 1 LCI. En effet, un mur en attente n'a de sens que si une construction peut un jour venir s'y accoler, ce qui paraît impossible dans le cas d'espèce. Ce mur borgne ne pouvant constituer un mur en attente, la construction de l'immeuble de la FULE en limite de propriété viole l'art. 231 al.1 let. a RCI.

Si l'on peut soutenir, comme le fait le département, que la construction litigieuse irait dans le sens de la volonté du législateur en supprimant deux murs en attente visibles depuis le domaine public (surtout celui du bâtiment F 312), cela ne permet pas pour autant d'autoriser cette construction, prévue en limite de propriété en violation de l'art. 231 al. 1 let. a RCI. Par ailleurs, il sied de relever que le mur en attente le plus dérangeant, soit celui de l'immeuble F 312, pourrait également être supprimé en prolongeant cette immeuble en ligne droite vers le sud, sans fermer la cour intérieure par un immeuble tel que celui projeté.

Au vu de ce qui précède, ce grief sera admis. Pour ce motif déjà, le jugement entrepris et l'autorisation de construire litigieuse seront annulés.

7.7) Les recourants font ensuite valoir que la perte d'ensoleillement et d'apport de chaleur solaire passif serait constitutive d'inconvénients graves au sens de l'art. 14 al. 1 let. a LCI. En fermant la cour interne existant entre les immeubles construits sur les parcelles nos 1'1151, 1'150 et 4'034, l'immeuble projeté créerait également un barrage visuel inacceptable pour les habitants.

a. À teneur de cette disposition, le département peut refuser les autorisations prévues à l'art. 1 lorsqu'une construction ou une installation peut être la cause d'inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public.

Cette disposition appartient aux normes de protection qui sont destinées à sauvegarder les particularités de chaque zone, en prohibant les inconvénients incompatibles avec le caractère d'une zone déterminée. Elle n'a toutefois pas pour but d'empêcher toute construction dans une zone à bâtir qui aurait des effets sur la situation ou le bien-être des voisins (ATA/1345/2015 du 15 décembre 2015 consid. 7c et les références citées). La construction d'un bâtiment conforme aux normes ordinaires applicables au régime de la zone ne peut en principe pas être source d'inconvénients graves, notamment s'il n'y a pas d'abus de la part du constructeur. Le problème doit être examiné par rapport aux caractéristiques du quartier ou des rues en cause (ATA/1444/2017 du 31 octobre 2017 et les références citées).

La notion d'inconvénients graves est une notion juridique indéterminée qui laisse à l'autorité une liberté d'appréciation et n'est limitée que par l'excès ou l'abus de pouvoir. La chambre de céans peut revoir librement l'interprétation des notions juridiques indéterminées, mais contrôle sous le seul angle des limites précitées, l'exercice de la liberté d'appréciation de l'administration, en mettant l'accent sur le principe de la proportionnalité en cas de refus malgré un préavis favorable, et sur le respect de l'intérêt public en cas d'octroi d'une autorisation. Les autorités de recours se limitent ainsi à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/165/2018 du 20 février 2018 ; ATA/926/2016 du 1er novembre 2016).

b. S'agissant de la question de l'ensoleillement, le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de préciser, en s'inspirant de la réglementation existante, qu'une perte d'ensoleillement pour les bâtiments environnants due à une ombre qui recouvre la totalité de l'habitation ou du bien-fonds voisin, de deux heures au maximum, à l'équinoxe ou un jour moyen d'hiver était, en principe, admissible. Toutefois, la question devait être examinée par l'autorité avec un large pouvoir d'examen, compte tenu des circonstances locales. Le critère de deux heures ne saurait au surplus avoir une portée absolue et constituer à lui seul l'élément décisif (ATF 100 Ia 334 consid. 9b et 9d). Le Tribunal fédéral a également indiqué que dans la mesure où la construction projetée respectait les prescriptions applicables à la zone (indice d'utilisation du sol, gabarit, distances aux limites, etc.), il n'existait pas de droit du voisin à voir sa parcelle ensoleillée (arrêt du Tribunal fédéral 1C_582/2012 du 9 juillet 2013 consid. 4.3).  

c. La chambre de céans a précisé qu'en l'absence de réglementation cantonale en la matière, un inconvénient grave peut exister au sens de l'art. 14 let. a LCI lorsque les nouvelles constructions occasionnent sur celles existantes une absence d'ensoleillement supplémentaire de deux heures, cette mesure étant prise par rapport à la date des équinoxes. Une perte plus importante est néanmoins admissible en fonction de l'intérêt public lié à la nouvelle construction (ATA/789/2002 du 10 décembre 2002). Il convient de noter que cette jurisprudence ne permet de tenir compte des ombres portées que sur les constructions déjà existantes, et non sur les bien-fonds sur lesquels elles se trouvent (ATA/684/2002 du 12 novembre 2002). Dans leur principe, ces règles jurisprudentielles sont applicables à toutes les zones (ATA/636/2015 du 16 juin 2015).

Dans l'ATA/514/2018 du 29 mai 2018, la chambre administrative a considéré que la perte d'ensoleillement causée par un projet de surélévation, qui s'élevait au maximum, pour l'un des quatre bâtiments concernés, à 2,4 heures par jour en moyenne, n'était pas d'une amplitude permettant de considérer qu'il s'agissait d'un inconvénient grave au sens de l'art. 14 let. a LCI. Il s'agissait dans ce cas d'immeubles construits du côté nord d'un îlot qui subissaient déjà l'ombre portée des bâtiments sis le long de la rue du Stand. Par ailleurs, la construction respectait les gabarits et distances, hormis celle découlant des limites de parcelles qui étaient uniquement liées au découpage de celles-ci (consid. 5).

d. En l'espèce, l'étude actualisée d'Alios produite par les recourants donne un bon aperçu de la situation sans et avec la construction projetée. Elle permet de démontrer qu'à l'équinoxe (soit au 20 mars), le bâtiment projeté commence à faire de l'ombre sur la façade sud-est du bâtiment F 312 à 10h55, et que cette ombre croit progressivement sur ladite façade pour la couvrir environ aux deux tiers à 12h40. À partir de 13h25, la façade sud-est de l'immeuble F 312 est presque entièrement dans l'ombre, et y demeure jusqu'à 15h55, où l'ombre a sa portée maximale.

À teneur de la modélisation sans le bâtiment projeté, l'on constate que de 11h55 à 15h55, la façade sud-est du bâtiment F 312 bénéficie d'un ensoleillement total. Si une petite ombre est effectivement projetée par l'avant-toit dudit immeuble à partir de 14h55, elle reste minime et n'atteint pas même les fenêtres situées au dernier étage. À partir de 15h40, l'avant-toit semble porter de l'ombre au dernier étage de cet immeuble, et à 15h55, l'ombre impacte en partie le dernier et l'avant-dernier étage dudit immeuble.

Quant à l'étude d'ombres produite par la FULE, elle ne peut avoir de valeur probante, celle-ci ne montrant la perte d'ensoleillement causée par l'immeuble projeté sur l'immeuble F 312 que jusqu'à 14h00, et ne permettant pas de comparer la situation avec et sans l'immeuble projeté. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient la FULE, il ne ressort pas de l'étude qu'elle a produite que l'ombre projetée serait partielle compte tenu de la façade translucide de l'immeuble litigieux donnant sur cour. Cette façade partiellement translucide n'a aucunement pour effet de réduire l'ombre que projetterait ledit immeuble. Enfin, s'il est exact que l'étude d'ombres produites par le recourant se concentre sur la façade sud-est de l'immeuble F 312, il s'agit de la façade la plus ensoleillée de cet immeuble et donc de la principale source de soleil pour ses habitants, la façade sud-ouest (au demeurant complètement obstruée par l'immeuble projeté qui s'y adosserait) étant borgne.

Force est dès lors de constater, contrairement à ce qu'a retenu le TAPI, que la construction projetée engendrera effectivement une perte d'ensoleillement de largement plus de deux heures à l'équinoxe pour l'immeuble F 312.

8.8) Il reste à déterminer s'il s'agit d'un désagrément admissible au vu de l'intérêt public lié à la nouvelle construction. S'il est indéniable que le canton de Genève connaît une pénurie de logements pour étudiants et que des projets répondant à ce besoin doivent être encouragés, il convient de prendre en considération les éléments suivants.

Dans l'ATA/281/2016 du 5 avril 2016, amenée à se prononcer sur la légalité d'un projet de surélévation en vue de créer des logements pour étudiants dans un immeuble porté à l'inventaire, la chambre administrative a retenu que ce projet, qui permettrait de loger au minimum seize étudiants, poursuivait un intérêt public (consid. 9). Dans ce cas de figure toutefois, seules étaient litigieuses les qualités urbanistiques et esthétiques du projet. La surélévation contestée ne causait de désagréments à aucune habitation voisine.

En l'espèce, l'immeuble projeté, de neuf étages sur rez, est destiné à accueillir seulement trente-six étudiants. À teneur du dossier, sont prévus, à chaque étage, quatre chambres individuelles de 17 m2, deux douches et deux toilettes, une pièce commune de 30 m2 composée d'une cuisine ouverte sur un séjour, et un long couloir de distribution de 30 m2 menant aux chambres individuelles et aux pièces d'eau, Ainsi, un immeuble imposant, de 30 m de haut, serait construit pour avoir l'équivalent de neuf appartements de six pièces, d'une surface d'environ 140 m2 chacun.

Par ailleurs, les chambres donnant toutes sur la rue Lombard, elles seraient fortement exposées au bruit routier, à des niveaux supérieurs aux valeurs limites d'immission (ci-après : VLI) de l'OPB, selon l'étude acoustique du 1er mars 2016 figurant au dossier du département. À teneur de cette étude, le projet architecte prévoit la mise en place d'écrans proches sur un ouvrant par chambre, afin d'offrir aux occupants des conditions équivalentes aux valeurs limites fixées par l'OPB. Cette étude relève toutefois que compte tenu de l'exigence relativement élevée applicable pour les chambres en ce qui concerne l'isolation vis-à-vis du bruit extérieur, des dispositifs particuliers devraient probablement être mis en place pour ne pas péjorer l'isolation acoustique de la façade et garantir le respect de l'exigence normative. Ainsi, l'habitabilité de ces futures chambres ne sera vraisemblablement pas extraordinaire, les étudiants risquant de ne pas pouvoir librement aérer leur chambre, sous peine d'être importunés par le bruit important de la rue Lombard.

De surcroît, au vu du nombre de chambres prévues par étage et des mesures spécifiques nécessaires pour assurer le respect des VLI de l'OPB, et ce même si cet élément n'est aucunement décisif, l'on peut questionner le ratio entre les coûts de construction de ce bâtiment et le nombre de logements pour étudiants finalement obtenus.

S'agissant des nuisances causées par l'immeuble projeté, outre l'inconvénient grave lié à la perte d'ensoleillement que subirait l'immeuble F 312, il sied de prendre en considération, comme le soutiennent les recourants, le barrage visuel considérable que causerait l'immeuble de la FULE, principalement pour les habitants de l'immeuble F 312, mais également pour les habitants de tous les autres immeubles donnant sur la cour intérieure. Ces habitations, qui ont à l'heure actuelle une vue dégagée du fait de l'absence d'immeuble de l'autre côté de la rue Lombard, se retrouveraient littéralement face à un mur.

Dans les circonstances très particulières du cas d'espèce, notamment liées à la configuration de la parcelle concernée, l'intérêt public à la création de trente-six logements pour étudiants se doit d'être relativisé, et ne saurait l'emporter sur les inconvénients graves causés par la construction projetée sur l'immeuble F 312 principalement, mais également sur les autres immeubles voisins donnant sur la cour intérieure.

Partant, le département aurait dû refuser l'autorisation de construire déposée par la FULE en application de l'art. 14 al. 1 let. a LCI.

Les recours seront dès lors admis, et le jugement entrepris, de même que l'autorisation du 18 octobre 2016, seront annulés.

9.9) L'admission des recours sur ces deux griefs entraînant l'annulation du jugement entrepris et de l'autorisation initiale du département, il n'est pas nécessaire de trancher la question de savoir si la construction projetée causerait un déficit d'apport de chaleur solaire passif à l'immeuble F 312, comme soutenu par les autres recourants, et, cas échéant, quelles en seraient les conséquences. De même, le grief nouvellement soulevé par M. ACQUAROLI lors du transport sur place au sujet du prétendu empiètement des façades de l'immeuble litigieux sur le domaine public communal souffrira de demeurer indécis.

10.10) Vu l'issue de la procédure, aucun émolument de procédure ne sera prélevé (art. 87 al. 1 LPA). Une indemnité de procédure de CHF 3'000.- sera allouée aux recourants, à hauteur de CHF 1'500.- à M. ACQUAROLI, et à hauteur de CHF 1'500.- aux autres recourants, pris conjointement et solidairement, pour un tiers à la charge de l'État de Genève, pour in tiers à la charge de la FULE et pour un tiers à la charge de la ville, les recourants ayant procédé avec l'aide d'un avocat et y ayant conclu (art. 87 al. 2 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevables les recours interjetés le 6 juillet 2017 par Monsieur Michel ACQUAROLI, Monsieur Bertrand AUVERGNE, Monsieur Jean-Charles BERRA, Madame Catherine BERTOLO MONNIER, Madame Maya BÖSCH, Madame Fiore CASTIGLIONE, Madame Marie Louise CHARBONNIER, Madame Palmyre CHARBONNIER, Madame Gilberte COSTA GRILO, Madame Marie-Anne COTTIER, Madame Cynthia DE BRIEY, Madame Rose-Marie et Monsieur Michel DUCHABLE, Monsieur Daniel DULAC, Monsieur Michel ECUVILLON, Madame Catherine et Monsieur Axel ERNST, Monsieur Jean-Philippe ETTER, Madame Maria Do Ceu FERNANDES DE OLIVEIRA DOS SANTOS, Madame Bernadette GLOOR, Monsieur Stéphane GUINAND, Monsieur Daniel HALPERIN, Madame Frédérique Anne LE GAL, Monsieur Michael LEW, Monsieur Rainer Michael MASON, Monsieur Claude MOSSAZ, Madame Maria Katarina MOSSAZ-JOËLSON, Madame Jessica MOSSAZ-MARINIC, Monsieur Etienne OTT, Madame Corinne PASSARD, Madame Anne REUGE, Monsieur Daniel RIZZATO, Monsieur Giancarlo ROSSETTI, Madame Irmengard et Monsieur Martin RUBI, Monsieur Erwan SAINT-M'LEUX, Madame Rosa SAJI DAZA ECUVILLON, Madame Carole et Monsieur Steve SALOM, Madame Liliane et Monsieur Jean-Michel VARCHER et Madame Maria VAZ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 24 mai 2017 ;

au fond :

les admet ;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 24 mai 2017 ;

annule la décision du département du territoire du 18 octobre 2016 ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument de procédure ;

alloue une indemnité de procédure CHF 3'000.- aux recourants, pour un tiers à la charge de la Fondation universitaire pour le logement étudiant, pour un tiers à la charge de l'État de Genève et pour un tiers à la charge de la ville, à hauteur de CHF 1'500.- à Monsieur Michel ACQUAROLI, et à hauteur de CHF 1'500.- à Monsieur Bertrand AUVERGNE, Monsieur Jean-Charles BERRA, Madame Catherine BERTOLO MONNIER, Madame Maya BÖSCH, Madame Fiore CASTIGLIONE, Madame Marie Louise CHARBONNIER, Madame Palmyre CHARBONNIER, Madame Gilberte COSTA GRILO, Madame Marie-Anne COTTIER, Madame Cynthia DE BRIEY, Madame Rose-Marie et Monsieur Michel DUCHABLE, Monsieur Daniel DULAC, Monsieur Michel ECUVILLON, Madame Catherine et Monsieur Axel ERNST, Monsieur Jean-Philippe ETTER, Madame Maria Do Ceu FERNANDES DE OLIVEIRA DOS SANTOS, Madame Bernadette GLOOR, Monsieur Stéphane GUINAND, Monsieur Daniel HALPERIN, Madame Frédérique Anne LE GAL, Monsieur Michael LEW, Monsieur Rainer Michael MASON, Monsieur Claude MOSSAZ, Madame Maria Katarina MOSSAZ-JOËLSON, Madame Jessica MOSSAZ-MARINIC, Monsieur Etienne OTT, Madame Corinne PASSARD, Madame Anne REUGE, Monsieur Daniel RIZZATO, Monsieur Giancarlo ROSSETTI, Madame Irmengard et Monsieur Martin RUBI, Monsieur Erwan SAINT-M'LEUX, Madame Rosa SAJI DAZA ECUVILLON, Madame Carole et Monsieur Steve SALOM, Madame Liliane et Monsieur Jean-Michel VARCHER et Madame Maria VAZ, pris conjointement et solidairement ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Raphaël Reinhardt, avocat du recourant, à Me Alexande Schwab, avocat de Monsieur Bertrand AUVERGNE et consorts, à Me Pierre Gabus, avocat de la Fondation universitaire pour le logement étudiant, à la Ville de Genève-département des constructions et de l'aménagement, au département du territoire-oac, ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : M. Thélin, président, Mme Krauskopf, MM. Pagan et Verniory, Mme Payot Zen-Ruffinen, juges.

Au nom de la chambre administrative :

Le greffier-juriste :

 

 

M. Mazza

 

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le 

 

 

la greffière :