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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3624/2024

JTAPI/1079/2024 du 04.11.2024 ( MC ) , CONFIRME

REJETE par ATA/1367/2024

Descripteurs : DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION
Normes : LEI.75.al1.leth; LEI.76.al1.letb.ch1; LEI.76.al1.letb.ch3; LEI.76.al1.letb.ch4
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3624/2024 MC

JTAPI/1079/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 4 novembre 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Patrick MOUTTET, avocat

 

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

 


 

EN FAIT

1.            Monsieur A______, né le ______ 1978 et originaire du Maroc, également connu sous l'alias de Monsieur B______, est très défavorablement connu des services juridiques suisses.

2.            En effet, entre janvier 2014 et ce jour, il a été condamné à seize reprises, notamment pour des vols, brigandage, dommages à la propriété, injure, menaces, voies de fait, rupture de ban et infractions à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) et à la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01).

3.            Le 30 octobre 2008, l'intéressé a fait l'objet d'une décision d'interdiction d'entrer en Suisse prise à son encontre par le secrétariat d'État aux migrations (ci‑après : SEM) et valable du 14 novembre 2008 au 13 novembre 2028.

4.            Par jugement du 28 mars 2019, le Tribunal de police a déclaré l'intéressé coupable de brigandage, dommage à la propriété et séjour illégal, l'a condamné à une peine privative de liberté de 9 mois, sous déduction de 115 jours de détention avant jugement, et a simultanément prononcé son expulsion de Suisse pour une durée de cinq ans.

5.            Par décision du 30 août 2019, l'office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) a refusé de reporter l'exécution de l'expulsion de Suisse de l'intéressé, lequel s'est vu octroyer un délai de 48 heures pour quitter la Suisse dès sa libération par les autorités judiciaires, soit jusqu'au 5 septembre 2019.

6.            N'ayant pas respecté ce délai, l'intéressé a été inscrit à la base de données « RIPOL » de la police, le 9 septembre 2019.

7.            L'intéressé a continué à occuper les services de police et la justice suisse une fois remis en liberté. Il a d'ailleurs été condamné à de nombreuses reprises pour rupture de ban, à défaut d'avoir quitté le territoire dans le délai qui lui avait été imparti pour ce faire.

8.            Le 20 avril 2022, les autorités helvétiques ont relancé la demande d'identification qu'elles avaient adressée, déjà le 23 août 2019, aux autorités marocaines, en vue de l'identification de l'intéressé.

9.            Alors que M. A______ se trouvait en exécution de différentes peines pénales depuis le 12 avril 2022, le Tribunal d'application des peines et mesures a, par jugement du 17 janvier 2023, refusé la libération conditionnelle de l'intéressé. Le tribunal a considéré que le pronostic de ce dernier se présentait sous un jour fort défavorable, en raison de ses nombreux antécédents et du fait que les peines privatives de liberté successives prononcées à son encontre, ainsi que les libérations conditionnelles dont il avait bénéficié ne l'avaient pas dissuadé à récidiver. Par ailleurs, sa situation personnelle demeurait inchangée et on ne percevait aucun effort de sa part pour modifier la situation. En effet, il séjournait en Suisse illégalement depuis de nombreuses années et était démuni de documents d'identité. Aucun projet viable n'était présenté par l'intéressé, si ce n'était de se retrouver en situation illicite dans un autre pays, en l'occurrence la France. Ce projet était d'ailleurs similaire à celui qu'il avait invoqué en 2015 lorsqu'il avait indiqué vouloir quitter la Suisse pour la Belgique, et qui a conduit aux récidives. Ainsi, le risque que l'intéressé commette de nouvelles infractions s'il devait être mis en liberté conditionnelle apparaissait très élevé.

10.        Par communication du 25 avril 2024, le secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) a informé les autorités genevoises que l'intéressé avait été identifié par les autorités marocaines et les a invitées à procéder à une réservation de vol, dès que cela serait possible, en respectant un délai d'annonce de six semaines.

11.        Le 19 octobre 2024, l'intéressé a été interpellé par le forces de l'ordre genevoises pour appropriation illégitime, rupture de ban et infraction à la LEI. L'intéressé a refusé de répondre aux questions qui lui ont été posées.

12.        Faisant l'objet d'une parution RIPOL pour deux ordres d'exécution émanant du service de l'application des peines et mesures pour 11 jours de détention pénale, il a été conduit à Champ-Dollon le 20 octobre 2024, après avoir été entendu par le Ministère public.

13.        A sa sortie de prison, l'intéressé a été remis en mains des services de police en vue de l'exécution de son expulsion de Suisse.

14.        M. A______ a été inscrit sur un vol DEPA, soit avec escorte policière, pour le Maroc au départ de Genève le 2 décembre 2024 à 13h55.

15.        Le 31 octobre 2024, à 15h10, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de deux mois, sur la base de l’art. 75 al. 1 let. h LEI en lien avec l’art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, et respectivement de l’art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI, principalement en raison de ses condamnations pénales, notamment pour vol et brigandage, et pour son absence de collaboration au renvoi, ainsi qu’au vu de son risque de fuite.

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi au Maroc dans la mesure où il était algérien et qu’il était en Europe depuis 30 ans.

Selon le procès-verbal du commissaire de police, la détention administrative pour des motifs de droit des étrangers avait débuté à 14h30.

16.        Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) le même jour.

17.        Entendu ce jour par le tribunal, M. A______ a déclaré qu'il n'était pas A______ et qu'il s'appelait B______. Il n'avait pas de formation professionnelle. Il avait beaucoup d'amis ici mais pas de famille, ni au Maroc ou en Algérie. Il n'était pas d'accord de quitter la Suisse car il n'avait pas d'argent et il suivait un traitement médical pour des problèmes psychologiques. Il suivait une formation d'utilisation du I______ Genève.

La représentante du commissaire de police a indiqué s'agissant de la situation médicale de M. A______ que le nécessaire serait fait quant à la détermination de son aptitude au vol et s'il était utile qu'il reçoive une prescription médicale ou un accompagnement dans l'avion.

Sur question de son conseil, M. A______ a indiqué qu'il ne connaissait personne au Maroc pouvant l'aider financièrement. Il était abattu psychologiquement à l'idée de retourner dans un pays qu'il connaissait pas et n'avait pas d'argent. Il avait déjà fait plusieurs tentatives de suicide, comme en témoignaient les cicatrices sur son bras montrées en audience.

La représentante du commissaire de police a plaidé et conclu à la confirmation de l'ordre de détention administrative pour une durée de deux mois, l'intéressé ayant été condamné pour des faits graves contrairement à ce qu'il affirmait, notamment pour menace, injure, vol et brigandage. Il apparaissait évident qu'il disparaîtrait dans la clandestinité s'il devait être relâché avant son départ, d'autant qu'il n'avait d'ores et déjà pas déféré à sa décision d'expulsion de Suisse depuis 2019. L'intérêt public à sa mise en détention primait sur son intérêt privé.

M. A______, par la voix de son conseil, a plaidé et conclu principalement à l'annulation de l'ordre de mise en détention et à sa libération immédiate, subsidiairement à l'annulation de l'ordre de mise en détention, à sa mise en liberté immédiate et comme mesure de substitution, l'obligation de se présenter aux autorités quotidiennement ou l'obligation de s'héberger au lieu-dit "Le Passage" jusqu'au 2 décembre, en précisant que les deux moyens de substitution peuvent être cumulés. La détention s'avérait injustifiée dès lors que le renvoi était impossible sous l'angle de l'art. 80 LEI au vu de la gravité de sa situation psychique, lui qui avait d'ores et déjà commis des tentatives de suicide et dont l'état allait nécessairement s'aggraver en cas de renvoi. Le Maroc ne disposait pas d'hôpitaux prenant en charge convenablement les troubles psychiques. Cette détention s'avérait également disproportionnée sous l'angle du droit à la vie. Les mesures de substitution préconisées permettraient assurément de garantir sa présence le jour de son vol de départ d'autant qu'il s'était engagé à les respecter.

18.        Il a versé à la procédure un bordereau de pièces comprenant une attestation du département psychiatrique des HUG du 1er novembre 2024, listant 20 hospitalisations de l’intéressé depuis 2010, et respectivement un extrait de rapport sur la santé mentale et les causes de suicide au Maroc de 2022, un article du journal Le Matin concernant « La triste réalité des hôpitaux publics de psychiatrie au Maroc » du 4 septembre 2022, des courriers de M. B______ du 1er novembre 2024 mentionnant qu’il se rendrait quotidiennement auprès des autorités et qu’il s’engageait à dormir à l’abri de l’E______ aux F______ jusqu’à son départ du 2 décembre 2024, ainsi que des captures d’écran des sites web de l’hébergement d’urgence « G______ » de l’E______ et de « H______ ».

19.        Le commissaire de police a versé à la procédure une demande de laissez-passer pour M. A______ du 30 octobre 2024, ainsi qu’un courrier de l’Ambassade du Maroc à Berne du 18 avril 2024, confirmant notamment l’indentification de « […] M. A______, alias C______, alias D______ […] ».

 

EN DROIT

1.            Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour examiner d'office la légalité et l’adéquation de la détention administrative en vue de renvoi ou d’expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. d de loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.            Il doit y procéder dans les nonante-six heures qui suivent l'ordre de mise en détention (art. 80 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20 ; anciennement dénommée loi fédérale sur les étrangers - LEtr ; 9 al. 3 LaLEtr).

3.            En l'espèce, le tribunal a été valablement saisi et respecte le délai précité en statuant ce jour, la détention administrative ayant débuté le 31 octobre 2024 à 14h30.

4.            La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l’art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; 135 II 105 consid. 2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_237/2013 du 27 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_413/2012 du 22 mai 2012 consid. 3.1) et de l’art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu’elle repose sur une base légale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_584/2012 du 29 juin 2012 consid. 5.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1). Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne peut être prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 du 10 avril 2013 consid. 4.1 ; 2C_237/2013 du 27 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1).

5.            Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 36 Cst., se compose des règles d'aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de la personne concernée et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/752/2012 du 1er novembre 2012 consid. 7).

6.            Il convient dès lors d'examiner, en fonction des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi au sens de l'art. 5 par. 1 let. f CEDH est adaptée et nécessaire (ATF 135 II 105 consid. 2.2.1 ; 134 I 92 consid. 2.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_26/2013 du 29 janvier 2013 consid. 3.1 ; 2C_420/2011 du 9 juin 2011 consid. 4.1 ; 2C_974/2010 du 11 janvier 2011 consid. 3.1 ; 2C_756/2009 du 15 décembre 2009 consid. 2.1).

7.            Selon l'art. 76 al. let b ch. 1 LEI, en relation avec l'art. 75 al. 1 let. c LEI, après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'expulsion l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée si celle-ci a franchi la frontière malgré une interdiction d'entrer en Suisse et ne peut pas être immédiatement renvoyée, ou respectivement en lien avec l’art. 75 al. 1 let. h LEI, lorsqu’elle a été condamnée pour un crime.

8.            De même, une mise en détention administrative est envisageable si des éléments concrets font craindre que la personne entend se soustraire au renvoi ou à l'expulsion, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer en vertu de l'art. 90 LEI (art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI), ou encore si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (art. 76 al. 1 let. b ch. 4 LEI).

9.            Ces deux dispositions décrivent toutes deux des comportements permettant de conclure à l'existence d'un risque de fuite ou de disparition, de sorte que les deux éléments doivent être envisagés ensemble (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1 ; ATA/740/2015 du 16 juillet 2015 ; ATA/943/2014 du 28 novembre 2014 ; ATA/616/2014 du 7 août 2014).

10.        Selon la jurisprudence, un risque de fuite - c'est-à-dire la réalisation de l'un des deux motifs précités - existe notamment lorsque l'étranger a déjà disparu une première fois dans la clandestinité, qu'il tente d'entraver les démarches en vue de l'exécution du renvoi en donnant des indications manifestement inexactes ou contradictoires ou encore s'il laisse clairement apparaître, par ses déclarations ou son comportement, qu'il n'est pas disposé à retourner dans son pays d'origine. Comme le prévoit expressément l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI, il faut qu'il existe des éléments concrets en ce sens (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.2 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.2 ; 2C_658/2014 du 7 août 2014 consid. 1.2).

11.        Lorsqu'il existe un risque de fuite, le juge de la détention administrative doit établir un pronostic en déterminant s'il existe des garanties que l'étranger prêtera son concours à l'exécution du refoulement, soit qu'il se conformera aux instructions de l'autorité et regagnera son pays d'origine le moment venu, c'est-à-dire lorsque les conditions seront réunies ; dans ce cadre, il dispose d'une certaine marge d'appréciation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 3.3 ; 2C_806/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 2C_400/2009 du 16 juillet 2009 consid. 3.1 ; ATA/740/2015 du 16 juillet 2015 ; ATA/739/2015 du 16 juillet 2015 ; ATA/682/2015 du 25 juin 2015 ; ATA/261/2013 du 25 avril 2013 ; ATA/40/2011 du 25 janvier 2011).

12.        Comme cela ressort du texte même de l'art. 76 al. 1 LEI et de la jurisprudence constante, une mise en détention administrative n'implique pas que la décision de renvoi ou d'expulsion qui la sous-tend soit entrée en force et exécutoire (cf. ATF 140 II 409 consid. 2.3.4 ; 140 II 74 consid. 2.1 ; 130 II 377 consid. 1 ; 129 II 1 consid. 2 ; 122 II 148 consid. 1 ; 121 II 59 consid. 2a ; ATA/252/2015 du 5 mars 2015 consid. 6a ; Grégor CHATTON/Laurent MERZ in Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE [éd.], Code annoté de droit des migrations, vol. II [Loi sur les étrangers], 2017, n. 5 p. 779).

13.        En l’espèce, les conditions posées par l'art. 75 al. 1 let. h et 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI sont réunies dès lors que l’intéressé a été condamné à trois reprises pour vol (art. 139 al. 1 CP) les 8 février et 18 mars 2014, ainsi que le 10 janvier 2018, et respectivement pour brigandage (art. 140 al. 1 CP) le 28 mars 2019, infractions qualifiées de crime au sens de l’art. 10 al. 2 CP.

14.        L’intéressé fait l’objet d’une décision d’expulsion de Suisse du 28 mars 2019 qu’il n’a pas respectée.

15.        Il n'est pas autorisé à séjourner en Suisse, et force est de relever qu’à teneur du dossier, il ne dispose ni des ressources financières devant lui permettre de subvenir à ses besoins à Genève où il n'indique pas avoir des attaches particulières, ni d'un lieu de séjour propre, les services d'aide sociale n'étant pas pertinents à cet égard. Il faut rappeler qu'il n'est pas en mesure de quitter simplement la Suisse par ses propres moyens et - du moins en l'état - dans un autre pays que son pays d'origine. Chargée de procéder à l'exécution de son refoulement par l'OCPM, la police devra pouvoir s'assurer de l'effectivité de son refoulement (cf. not. art. 15f de l'ordonnance sur l'exécution du renvoi et de l'expulsion d'étrangers du 11 août 1999 - OERE - RS 142.281). Dans ces conditions, contrairement à ce qu'allègue l'intéressé en lien avec les mesures de substitution sollicitées, il faut admettre l'existence d'un risque concret qu'il disparaîtrait dans la clandestinité s'il devait être libéré, notamment au vu de son absence de collaborer au renvoi que ce soit sous l'angle de son identification ou de sa réticence au départ, situations visées par le motif de détention prévu par la combinaison des art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI (cf. à cet égard ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.2 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.2 ; 2C_658/2014 du 7 août 2014 consid. 1.2). Le principe de la légalité est donc respecté.

16.        L'assurance de l'exécution du renvoi de l’intéressé à destination de son pays d'origine répond par ailleurs à un intérêt public évident et, compte tenu des éléments énoncés ci-avant, il est clair qu'aucune autre mesure moins incisive que la détention ne saurait être envisagée pour garantir sa présence jusqu'à l'exécution de son refoulement aux fins duquel la détention est adéquate (cf. not. ATA/672/2016 du 8 août 2016 consid. 7c ; ATA/949/2015 du 18 septembre 2015 consid. 8 ; ATA/846/2015 du 20 août 2015 consid. 8 ; ATA/810/2014 du 28 octobre 2014 consid. 6). La détention respecte par conséquent le principe de la proportionnalité.

17.        Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi doivent être entreprises sans tarder par l'autorité compétente (art. 76 al. 4 LEI). Il s'agit, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (arrêt 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; cf. aussi ATA/315/2010 du 6 mai 2010 ; ATA/88/2010 du 9 février 2010 ; ATA/644/2009 du 8 décembre 2009 et les références citées).

18.        Selon la jurisprudence, le devoir de célérité est en principe violé lorsque, pendant plus de deux mois aucune démarche n’est plus accomplie en vue de l’exécution du renvoi par les autorités compétentes, sans que cette inaction soit en première ligne causée par le comportement des autorités étrangères ou celui de l’étranger lui-même (ATF 139 I 206 consid. 2.1 et les arrêts cités).

19.        En l’espèce, l’intéressé vient d’être mis en détention, il y a moins de quatre jours et un vol de retour à destination de son pays d’origine avec escorte policière a déjà été prévu pour le 2 décembre 2024. Dès lors, les autorités suisses ont accompli l'ensemble des démarches que l'on pouvait attendre d'elles jusqu'ici. Le principe de célérité posé par l'art. 76 al. 4 LEI est ainsi respecté.

20.        A teneur de l'art. 79 al. 1 LEI, la détention en vue du renvoi ou de l'expulsion ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l’accord de l’autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l’autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l’obtention des documents nécessaires au départ auprès d’un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI). Ainsi, dans ces circonstances, la détention administrative peut atteindre dix-huit mois (cf. not. ATA/22/2017 du 12 janvier 2017 ; ATA/1052/2016 du 14 décembre 2016 ; ATA/1017/2016 du 6 décembre 2016 ; ATA/3/2013 du 3 janvier 2013 ; ATA/40/2012 du 19 janvier 2012).

21.        Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, il est admissible qu’un étranger, libéré d’une première détention administrative, soit détenu une nouvelle fois en vue de son renvoi dans le cadre de la même procédure. Il faut toutefois qu’un changement déterminant des circonstances permette de le justifier, comme la survenance d’un nouveau motif de détention ou la disparition de l’impossibilité dont était affecté le renvoi (ATF 140 II 1 consid. 5.2). Tel peut par exemple être le cas si l'étranger part dans la clandestinité après la libération de sa première détention. Est aussi envisageable la situation où l'autorité aurait levé une première détention administrative dès lors que l'exécution du renvoi de l'étranger, en soi possible, n'apparaissait plus comme vraisemblable dans un délai utile; en tant que les causes pour la mise en détention de l'étranger persisteraient, cette même autorité pourrait ordonner la réincarcération de celui-ci, si ce renvoi s'avérait par la suite à nouveau vraisemblable dans un délai raisonnable (ATF 140 II 1 et les références citées).

22.        Savoir s'il existe des circonstances nouvelles dépend donc des motifs qui ont présidé à la première libération (arrêt 2C_658/2014 du 7 août 2014 consid. 3.2).

23.        Le fait qu'un étranger ait commis de nouveaux crimes entre sa relaxe et sa nouvelle mise en détention, et qu'il refuse toujours de rentrer dans son pays constituent des circonstances nouvelles pertinentes, tout comme le fait qu'il soit au moment de la seconde mise en détention au bénéfice d'un laissez-passer établi par le département fédéral compétent, qui considérait que son identité et sa nationalité étaient suffisamment établies (arrêt du Tribunal fédéral 2C_700/2015 du 8 décembre 2015 consid. 4.1.2).

24.        L’art. 76 al. 3 LEI précise que le nombre de jours de détention doit être comptabilisé dans la durée maximale de détention visé à l’art. 79 LEI.

25.        La détention en vue du renvoi ou de l’expulsion « ordinaire » (art. 76 al. 1 let. a et let. b ch. 1 à 4 LEI) et la détention pour insoumission (art. 78 LEI) ne connaissent pas de plafond autonome. Selon le cas d’espèce, les différentes formes de détention susmentionnée peuvent s’enchaîner. Dans cette optique, le législateur a décidé de plafonner le total combiné desdites formes de détention. Seule la rétention administrative n’est pas prise en compte dans ce calcul (art. 73 al. 6 LEI) (Gregor CHATTON et Laurent MERZ in Code annoté de droit des migrations volume II loi sur les étrangers (LEtr) p. 848 et les références citées).

26.        Pour établir la durée de la détention, il faut partir du moment de la détention effective de l’intéressé pour des motifs tirés du droit des étrangers. Pour le surplus, le mois et l’année sont comptés de quantième à quantième (allemand : « nach der Kalenderzeit »), par analogie avec l’art. 110 ch. 6 CP (Gregor CHATTON et Laurent MERZ, op. cit. p. 849).

27.        Dans tous les cas, la durée de la détention doit être proportionnée par rapport aux circonstances d'espèce (arrêts du Tribunal fédéral 2C_18/2016 du 2 février 2016 consid. 4.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 2.3).

28.        En l’espèce, il s’agit d’une nouvelle procédure de renvoi venant de débuter le 31 octobre, au titre de laquelle les durées de détention précédentes n’entrent pas en ligne de compte. Ainsi, la durée de détention de deux mois décidée par le commissaire de police respecte le cadre légal et n'apparaît pas disproportionnée. Dans l'hypothèse où l’intéressé refuserait de prendre le vol qui lui sera réservé, l'autorité devra pouvoir disposer de quelques jours pour initier des démarches pour organiser son retour par un autre vol.

29.        Selon l’art. 80 al. 4 LEI, l’autorité judiciaire qui examine la décision de détention administrative tient compte de la situation familiale de la personne détenue et des conditions d’exécution de la détention. Celle-ci doit en particulier être levée lorsque son motif n’existe plus ou si, selon l’art. 80 al. 6 let. a LEI, l’exécution du renvoi ou de l’expulsion s’avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles, ou qu’elle ne peut être raisonnablement exigée, cette dernière disposition légale renvoyant à l’art. 83 al. 1 à 4 LEI.

30.        S'agissant de la question de l'impossibilité de l'exécution du renvoi, l'art. 80 al. 6 let. a LEI renvoie à l’art. 83 al. 1 à 4 LEI (cf. ATA/92/2017 du 3 février 2017 consid. 5a ; ATA/1173/2015 du 30 octobre 2015 consid. 5b), qui stipulent que cette dernière n'est pas possible lorsque l'étranger ne peut pas quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans l'un de ces États (al. 2), n'est pas licite lorsque le renvoi de l'étranger dans son État d'origine, dans son État de provenance ou dans un État tiers est contraire aux engagements de la Suisse relevant du droit international (al. 3) et ne peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi ou l'expulsion de l'étranger dans son pays d'origine ou de provenance le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (al. 4).

31.        L'art. 83 al. 3 LEI vise notamment l'étranger pouvant démontrer qu'il serait exposé à un traitement prohibé par l'art. 3 CEDH ou l'art. 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984 (Conv. torture - RS 0.105 ; ATF 139 II 65 consid. 5.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_55/2015 du 9 mai 2016 consid. 4.1).

32.        Quant à l’art. 83 al. 4 LEI, relatif à l’inexigibilité du renvoi, il s’applique en premier lieu aux « réfugiés de la violence », soit aux étrangers qui ne remplissent pas les conditions de la qualité de réfugié parce qu’ils ne sont pas personnellement persécutés, mais qui fuient des situations de guerre, de guerre civile ou de violence généralisée. Elle s’applique ensuite aux personnes pour qui un retour reviendrait à les mettre concrètement en danger, notamment parce qu’objectivement, au regard des circonstances d’espèce, elles seraient, selon toute probabilité, conduites irrémédiablement à un dénuement complet, exposées à la famine, et ainsi à une dégradation grave de leur état de santé, à l’invalidité, voire à la mort. L’autorité à qui incombe la décision doit donc dans chaque cas confronter les aspects humanitaires liés à la situation dans laquelle se trouverait l’étranger concerné dans son pays après l’exécution du renvoi à l’intérêt public militant en faveur de son éloignement de Suisse (ATAF 2010/54 consid. 5.1 ; 2010/41 consid 8.3.6 ; 2009/52 consid. 10.1 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral E-5092/2013 du 29 octobre 2013 consid 6.1 ; D-5085/2010 du 14 février 2013 consid. 4.1 ; D-5434/2009 du 4 février 2013 consid. 15.1 ; ATA/731/2015 du 14 juillet 2015 consid. 11a).

33.        Les motifs résultant de difficultés consécutives à une crise socio-économique (pauvreté, conditions d'existence précaires, difficultés à trouver un travail et un logement, revenus insuffisants, absence de toute perspective d'avenir), ou encore, la désorganisation, la destruction des infrastructures ou des problèmes analogues auxquels chacun peut être confronté, dans le pays concerné, ne suffisent pas en soi à réaliser une mise en danger concrète selon l'art. 83 al. 4 LEI (ATAF D-3039/2014 du 13 mai 2015). Si, dans un cas d'espèce, le mauvais état de santé ne constitue pas en soi un motif d'inexigibilité sur la base des critères qui précèdent, il peut demeurer un élément d'appréciation dont il convient alors de tenir compte dans le cadre de la pondération de l'ensemble des éléments ayant trait à l'examen de l'exécution du renvoi (JICRA 2003 n° 24 consid. 5b p. 157).

34.        L'exécution du renvoi demeure raisonnablement exigible si les troubles physiologiques ou psychiques ne peuvent être qualifiés de graves, à savoir s'ils ne sont pas tels qu'en l'absence de possibilités de traitement adéquat, l'état de santé de l'intéressé se dégraderait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (ATAF E-6672/2013 du 22 mai 2015).

35.        Cela étant, il ne faut pas perdre de vue que le juge de la détention, dans le contrôle de celle-ci, doit en principe seulement s'assurer qu'une décision de renvoi existe, sans avoir à vérifier la légalité de cette dernière (ATF 129 I 139 consid. 4.3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_47/2017 du 9 février 2017 consid. 5.2 ; 2C_1178/2016 du 3 janvier 2017 consid. 4.2 ; ATA/184/2017 du 15 février 2017 consid. 6). Les objections concernant ces questions doivent être invoquées et examinées par les autorités compétentes lors des procédures ad hoc et ce n'est que si une décision de renvoi apparaît manifestement inadmissible, soit arbitraire ou nulle, qu'il est justifié de lever la détention en application de l'art. 80 al. 6 LEtr, car l'exécution d'un tel ordre illicite ne doit pas être assurée par les mesures de contrainte (ATF 129 I 139 consid. 4.3.2 ; 125 II 217 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_47/2017 du 9 février 2017 consid. 5.2 ; 2C_1178/2016 du 3 janvier 2017 consid. 4.2 ; 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 7).

36.        En l'espèce, les séjours intermittents de l'intéressé aux HUG n'apparaissent pas déterminants quant à la réalité de la gravité de son état de santé d'autant que son aptitude au vol sera encore examinée avant son départ et qu'une prise en charge et des prescriptions médicales pourront le cas échéant être ordonnées. L'impossibilité du renvoi tirée de l’état de santé de l’intéressé n'apparaissant pas notablement incapacitante, elle ne peut être retenue par le tribunal dans le cadre de la présente procédure, qui ne saurait donc revenir sur la question de la validité de la décision de renvoi d'autant qu'à teneur des pièces versées par l'intéressé lui-même, il existe une prise en charge hospitalière des troubles psychiques au Maroc bien qu'elle puisse être d'un niveau inférieur au système de santé suisse.

37.        Le dossier ne laisse ainsi apparaître aucun élément donnant à penser que le renvoi ne serait, en l’état, pas possible, pas licite ou pas raisonnablement exigible.

38.        Au vu de ce qui précède, il y a lieu de confirmer l'ordre de mise en détention administrative de M. A______ pour une durée de deux mois.

39.         Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             confirme l’ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police le 31 octobre 2024 à 15h10 à l’encontre de Monsieur A______ pour une durée de deux mois, soit jusqu'au 30 décembre 2024 inclus ;

2.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

Le président suppléant

Michel CABAJ

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à A______, à son avocat, au commissaire de police et au secrétariat d'État aux migrations.

 

 

 

Genève, le 4 novembre 2024

 

Le greffier