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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3049/2022

JTAPI/1389/2023 du 14.12.2023 ( LCI ) , REJETE

ATTAQUE

Descripteurs : APPROVISIONNEMENT EN ÉNERGIE;GAZ NATUREL;ÉNERGIE NON RENOUVELABLE;INDICE D'UTILISATION;ORDRE CONTIGU;SURFACE;ESTHÉTIQUE;CONDUITE(TUYAU);ÉVACUATION DES EAUX
Normes : RCI.79; LEn.22.al4; LCI.58.al1; RCI.3.al3; LCI.67; LCI.69.al1; LCI.70.al§; LCI.71; LCI.58.al2; LCI.15; LAT.22.al2.letb; LAT.19
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3049/2022 LCI

JTAPI/1389/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 14 décembre 2023

 

dans la cause

 

Madame A______ et Monsieur B______, représentés par Me Andreas FABJAN, avocat, avec élection de domicile

 

contre

Madame C______ et Monsieur D______, représentés par Me Romain CANONICA, avocat, avec élection de domicile

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

 


EN FAIT

1.             Madame C______ et Monsieur D______ sont copropriétaires de la parcelle n° 1______ de la commune de E______ (ci-après: la commune), sise à l'adresse 7, chemin des F______, en zone 5, sur laquelle une villa, un garage et une piscine sont érigés.

Madame A______ et Monsieur B______ sont copropriétaires de la parcelle n° 2______ de la commune, sise à l'adresse ______, chemin des F______, en zone 5, sur laquelle une villa, un garage et une piscine sont érigés.

Les deux villas sont reliées par le garage.

2.             Les parcelles nos 1______, 2______ et 3______, sont issues de la mutation des anciennes parcelles nos 4______, 5______ et 6______ inscrite au registre foncier le 6 décembre 1985 (tableau de mutation n° 7______).

3.             Par décision du 18 novembre 1985, le département des travaux publics, devenu le département du territoire (ci-après: le département) a délivré l'autorisation de construire une villa avec garage et piscine sur parcelle n° 4______ (DD 8______).

4.             Par décision du 16 avril 1986, le département a délivré l'autorisation de construire deux villas jumelées avec garages sur les parcelles nos 6______ et 8______ (DD 9______). Cette décision faisait référence au tableau de mutation n° 7______.

5.             Par requête du 5 avril 2022, Mme C______ et M. D______, par le biais de leur mandataire professionnellement qualifié (ci-après: MPQ), ont requis du département une autorisation de construire en procédure accélérée portant sur la transformation et l’agrandissement de la villa (22.3%), la création d’une annexe (pool-house) et l’installation d’une pompe à chaleur (ci-après: PAC) air/eau et de panneaux solaires, sur leur parcelle (APA 10______).

6.             Dans le cadre de l'instruction de cette requête, plusieurs instances de préavis ont été sollicitées, notamment :

-          le 5 mai 2022, la commission d'architecture (ci-après: CA) a requis la modification du projet, estimant que les élévations étaient mal dessinées, pointant que l'avant-toit de la construction projetée empiétait sur celui de la villa existante. De plus, le parti pris d'un agrandissement avec une toiture plate était questionné, dans la recherche d'une harmonie architecturale d'ensemble, ajoutant que la grandeur de la terrasse en bout de piscine venait péjorer la surface végétale. En outre, cette instance a requis la production de documents complémentaires, notamment pour analyser les aspects d'intégration des deux volumes grâce à une image 3D et à une maquette ;

-          le 9 juin 2022, le service de l'air, du bruit et des rayonnements non ionisant (ci-après: SABRA), après avoir requis des modifications du projet ainsi que la production de documents complémentaires, l'a préavisé favorablement, sous conditions, notamment que la PAC devait en tout temps être en fonctionnement nocturne à maximum 50% comme indiqué dans la fiche technique de l'installation, et relevant que cette installation respecterait les valeurs de planification au droit des fenêtres ouvertes des locaux sensibles au bruit les plus exposés ;

-          le 12 avril 2022, l'office cantonal de l'eau (ci-après: OCEau) a rendu un préavis favorable, sous conditions. Les canalisations privées devaient être exécutées en système séparatif et être raccordées au système public d'assainissement des eaux desservant la parcelle n° 11______ pour les eaux usées et pluviales ;

-          le 20 avril 2022, l'office cantonal de l'énergie (ci-après: OCEN) a préavisé favorablement le projet, avec dérogation à l'obligation de distribuer le gaz de cuisine, car le bâtiment possédait une production de chaleur non fossile; et sous conditions, notamment le respect des standards HPE Extension et que les capteurs solaires thermiques permettent de couvrir au moins 30% des besoins de chaleur admissibles pour l'eau chaude sanitaire du bâtiment ;

-          le 31 mai 2022, la CA s'est prononcée favorablement, sans observation ;

-          le 31 mai 2022, l'office de l'urbanisme (ci-après: OU) a émis un préavis favorable sans observations ;

-          le 5 juillet 2022, après avoir sollicité des documents supplémentaires et des modifications du projet, la direction des autorisations de construire (ci-après: DAC) a rendu un préavis favorable, sans observation ;

-          le 14 juin 2022, la commune a émis un préavis défavorable. Elle considérait que la construction de la maison principale à la limite de propriété ne respectait pas l'art. 67 al. 1 et 2 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) au motif qu'aucune servitude légitimant sa construction en limite de propriété n'était inscrite au registre foncier et que la notion de contiguïté n'était pas correctement appliquée. Les deux maisons étaient considérées comme contiguës par les garages, mais pas la maison principale (cuisine). Au niveau du rez-de-chaussée, cette dernière était distante du mur voisin d'environ 80 cm. Le mur de la cuisine ne touchait pas le mur du garage de la parcelle voisine n° 2______ et n'était donc pas mitoyen.

Le projet ne respectait pas le caractère de l'ensemble et présentait un impact important sur les constructions environnantes. La lucarne devait être divisée en plusieurs éléments s'intégrant dans le gabarit de toit actuel.

Elle ne retenait pas l'application de la directive LCI 021-v5 dans le calcul des surfaces du fait que la densification de la parcelle n° 1______ ne s'était pas faite dans la même temporalité que les parcelles voisines nos 2______ (DD 8______) et 3______ (DD 9______) et sans l'approbation d'un plan d'ensemble.

7.             Par décision du 28 juillet 2022, le département a délivré à M. D______ l'autorisation de construire APA 10______ sollicitée, laquelle a été publiée dans la Feuille d'avis Officielle (ci-après: FAO) du même jour.

8.             Par acte du 14 septembre 2022, Madame A______ et Monsieur B______ (ci-après : les recourants) ont, sous la plume de leur conseil, recouru contre cette autorisation de construire auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant principalement à la nullité de l’autorisation, subsidiairement à son annulation, sous suite de frais et dépens.

Une dérogation relative à la distribution de gaz de cuisine avait été sollicitée et obtenue, de sorte que les conditions de l'art. 3 al. 7 let. a LCI n'étaient pas remplies et que les autres hypothèses de cet article ne s'appliquaient pas. La requête aurait ainsi dû être instruite en procédure ordinaire, ce qui conduisait à la nullité de la décision.

Les dispositions légales concernant les limites de propriété avaient été mal appliquées. Si les garages sis sur les parcelles nos 1______ et 2______ étaient érigés en ordre contigu, le bâtiment principal sur la parcelle n° 1______ était construit en limite de propriété, sans aucun lien de contiguïté avec une construction sur la parcelle n° 2______. La situation était contraire au droit, dès lors que la contiguïté devait concerner l'ensemble des constructions érigées sur les parcelles mitoyennes et non seulement l'une ou certaines d'entre elles. La mitoyenneté exigeait ainsi un parallélisme. La situation existante était la conséquence du morcellement des parcelles autorisé le 25 septembre 1985 et de la délivrance de l'autorisation de construire DD 8______ le 18 novembre 1985. En l'absence d'une servitude de distances aux limites, le bâtiment principal aurait dû être érigé à 5 m au moins de la limite de propriété, respectivement, le morcellement aurait dû être modifié afin d'offrir une distance de 6 m entre le bâtiment principal et la limite de propriété. En l'état, seul le rez-de-chaussée de la partie de la villa située en limite de propriété était habitable, à l'exclusion du grenier, et rendre habitable l'étage en limite de propriété aggraverait la situation existante, comme l'avait souligné la commune dans ses préavis défavorables. Aucune construction supplémentaire en limite de propriété ne pouvait donc être autorisée. En tout état l'ampleur de l'extension aurait dû conduire le département à interdire le projet en application de l'art. 58 al. 3 LCI.

L’art. 59 LCI relatif au rapport des surfaces était également violé. La surface brute de plancher (ci-après: SBP) n'était pas clairement établie : aucun calcul de la SBP admissible ne figurait au dossier, les formulaires de la DAC étaient vierges et incomplets, les deux plans de surfaces contenaient des divergences au sujet des surfaces retenues et le couloir devait être pris en compte, puisqu'il constituait une construction hors-sol faisant corps avec la villa, était muré de ses deux côtés, se situait sous le grenier et disposait de deux portes, étant précisé que cette surface n'était pas comptabilisée en tant que construction de peu d'importance (ci-après: CDPI). Ce couloir était d'une longueur de 6 m pour 1 m de large. Avec l'extension projetée de la cuisine, sa longueur était portée à 8.5 m, pour une surface totale de 8.5 m2. De plus, le rapport relatif à la partie énergétique se fondait sur la norme concernant les bâtiments neufs (HPE Neuf), alors que le standard énergétique visé était HPE Extension réglé par une autre norme. À défaut d'un standard HPE pour l'ensemble du bâtiment, un coefficient de 25% devait être retenu, ce qui équivalait à une SBP admissible de 274.75 m2 (1'099 x 0.25), alors que la SBP totale du projet était de 280.5 m2, ce qui excédait le coefficient de 25%.

La surface de la parcelle de 1'099 m2 impliquait que la surface totale des CDPI ne pouvait excéder 87.92 m2. Or, compte tenu de la piscine et du garage existants, de 50 m2 chacun, la limite de surface des CDPI admissibles était déjà dépassée, empêchant la construction du pool-house.

Le projet violait la clause d'esthétique. L'extension projetée formait une excroissance en limite de propriété, dotée d'un toit plat et d'une large baie vitrée qui ne respectait pas l'harmonie architecturale d'ensemble. En particulier, il n'existait aucun toit plat dans le périmètre élargi autour de la parcelle. Bien que la CA eut rendu un préavis favorable, celui-ci reposait sur une analyse lacunaire du dossier, ce d'autant que les remarques et demandes contenues dans ses précédents préavis n'avaient pas été prises en compte. L'OAC aurait dû s'écarter du second préavis de la CA et au contraire s'appuyer sur le préavis défavorable de la commune.

Enfin, les canalisations relatives aux eaux usées et aux eaux claires du pool-house devaient être raccordées sur leur parcelle (n° 2______), sans qu'aucune servitude n'existait à cet effet, de sorte que ce raccordement n'était pas juridiquement garanti.

9.             Mme C______ et M. D______, sous la plume de leur conseil, ont répondu au recours le 21 novembre 2022, concluant à son rejet, sous suite de frais et dépens.

Le projet litigieux ne comportait aucune dérogation à la LCI, la dispense de distribuer le gaz de cuisine relevant de la loi sur l'énergie du 18 septembre 1986 (LEn - L 2 30) et le règlement d'application de la loi sur l'énergie du 31 août 1988 (REn - L 2 30.01). Cette dérogation était par ailleurs sans effet sur les droits des tiers. L'instruction de la procédure par la voie de la procédure accélérée était donc justifiée.

Les villas concernées étaient rattachées par le garage, disposant chacune de leur propre accès en rez-de-chaussée, devaient être qualifiées de contiguës. Il n'y avait donc pas lieu d'exiger que le bâtiment principal respectait une distance de 5 m à la limite de propriété. Au contraire, si celui-ci pouvait disposer d'un mur mitoyen en sus du rattachement par le garage, cela n'était pas nécessaire pour remplir les conditions de l'art. 58 al. 2 LCI. De plus, s'agissant d'une construction en ordre contigu réalisée il y a plus de quarante ans, il ne se justifiait pas de faire inscrire une quelconque servitude permettant de déroger aux règles relatives aux limites de propriété, ni de remettre en cause la légalité de la villa construite en 1985.

Ils n'avaient pas modifié le précédent rapport de surfaces tel qu'autorisé par la DD 8______, sous réserve de l'ajout de la totalité de la surface du grenier ainsi que l'agrandissement projeté de 16.57 m2, le pool-house de 37 m2 étant comptabilisé comme une CDPI. Selon le tableau des rapports de surfaces du 17 mai 2022, le projet respectait tant le coefficient autorisé calculé sur l'ensemble des parcelles nos 1______, 2______ et 3______ (2'502 m2) que celui de l'agrandissement calculé sur la seule parcelle n° 1______, pour un coefficient global de 24.15%. S'agissant du couloir semi-enterré, sa partie hors-sol avait été comptabilisée à l'époque comme une CDPI intégrée à la surface du garage, ces deux éléments totalisant ensemble 50m2.

La piscine ne figurait pas dans la liste d'exemples de CDPI dans la directive du département en la matière. Seuls le garage (50 m2) et le pool-house (37 m2) devaient être comptabilisés dans les CDPI, soit 7.91% de la surface totale de la parcelle.

Concernant l'esthétique du projet, les recourants substituaient leur propre appréciation à celle des instances de préavis spécialisées. Le département s'était fondé sur les préavis de la CA des 5 et 31 mai 2022 ainsi que ceux de la commune des 29 avril, 30 mai et 14 juin 2022, lesquels s'ajoutaient aux autres préavis favorables recueillis. Rien ne permettait de retenir que la CA n'avait pas examiné attentivement le projet et ce n'était qu'à réception du projet modifié que celle-ci l'avait préavisé favorablement. En effet, l'architecte avait tenu compte des remarques de la CA et avait adapté le projet afin de mieux l'intégrer dans l'ensemble bâti existant. Il avait remis au département un jeu de photographies illustrant l'état actuel de la villa et des constructions voisines ainsi qu'une projection de l'extension sur une capture d'écran Google Earth du voisinage, laquelle démontrait la similitude du projet avec les constructions voisines. En outre, la commune, dont l'opposition était principalement motivée par une divergence légale, n'avait pas recouru contre l'autorisation de construire et ne participait pas à la présente procédure.

Enfin, la villa, construite en 1985, de même que la piscine et la douche extérieure, étaient déjà raccordées au réseau de canalisations eaux claires/eaux usées de la parcelle n° 1______. Il n'y avait dès lors pas de raison de mettre en doute l'équipement du terrain à ce stade, ce d'autant que le pool-house ne nécessitait pas en soi de raccordement au réseau de canalisations et que l'OCEau avait préavisé favorablement le projet. Au demeurant, l'éventuel défaut d'accord des recourants était une question de droit privé et, en pareille situation, ils confirmaient que le projet ne serait pas réalisable.

10.         Le département a transmis ses observations le 6 décembre 2022, concluant également au rejet du recours. Il a produit son dossier.

Si le préavis de l'OCEN du 20 avril 2022 mentionnait une dérogation, l'art. 79 LCI n'était pas applicable in casu, étant donné qu'une cuisine existait déjà et que le projet d'extension n'en modifiait aucunement l'équipement, que le réseau d'adduction ne desservait pas le chemin des F______, ne permettant dès lors pas un raccordement, et que ladite dérogation avait en tout état déjà été octroyée lors de la réalisation de la villa existante. Au demeurant, vu l'évolution de la politique publique cantonale en matière de logement, cette norme était obsolète. En outre, cette dérogation n'avait pas d'influence sur les tiers, en particulier les recourants. Il n'y avait donc pas lieu de remettre en cause l'instruction de la procédure par la voie de la procédure accélérée.

Les plans démontraient que les constructions concernées étaient en ordre contigu et chacune disposait de son propre accès de plain-pied. Les recourants soutenaient à tort que le bâtiment principal devait respecter une distance de 5 m à la limite de propriété, l'art. 69 al. 2 LCI ne s'appliquant pas. Par ailleurs, aucune ouverture n'était créée en direction de la parcelle des recourants. Les règles de distances entre constructions n'avaient donc pas à être respectées. Au surplus, les dispositions qu'ils invoquaient n'exigeaient pas un parallélisme entre les constructions, mais uniquement un lien de contiguïté pouvant se faire par l'entremise d'une CDPI. Enfin, vu le préavis favorable de la CA, rien ne commandait le refus du projet sur la base de l'art. 58 al. 3 LCI.

Les villas existantes avaient été autorisées le 16 avril 1988, en application du droit alors en vigueur, leur taux ne pouvait dépasser le maxima de 20%. Si l'architecte avait mentionné un taux de 21.74%, il avait sans doute omis de déduire des surfaces sous toiture inférieure au vide d'étage minimal. Par ailleurs, un taux de 2.3% pour l'agrandissement avait été calculé, en lieu et place du taux de 2.41% calculé par l'architecte. Ainsi, en ajoutant 2.3% au taux de 20% existant, le taux maximal autorisé de 25% était largement respecté, sans prétériter les droits des voisins, raison pour laquelle une réactualisation des calculs n'avait pas été demandée à l'architecte. Selon le tableau des rapports de surfaces du 17 mai 2022, le projet respectait tant le coefficient autorisé calculé sur l'ensemble des parcelles nos 1______, 2______ et 3______ (2'502 m2) que celui de l'agrandissement calculé sur la seule parcelle n° 1______, pour un coefficient global de 24.15%, lequel comprenait le coefficient autorisé de 21.74% et le coefficient d'agrandissement de la parcelle concernée de 2.41%.

La directive relative aux CDPI ne mentionnait pas les piscines et la jurisprudence récente de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après: chambre administrative) précisait qu'une piscine ne répondait pas à la définition d'une CDPI. Par conséquent, les seules CDPI étaient le garage (50 m2) et le pool-house (37 m2).

Les recourants ne démontraient pas que les documents demandés par la CA dans son préavis du 5 mai 2022 n'étaient pas suffisants. Au contraire, celle-ci avait considéré que le projet respectait l'harmonie architecturale d'ensemble, en particulier sur la base des photographies transmises le 17 mai 2022.

Enfin, l'OCEau avait émis un préavis favorable à condition que les canalisations privées soient raccordées au système d'assainissement des eaux desservant la parcelle n° 11______, et non pas celle appartenant aux recourants. Par ailleurs, selon le plan de canalisations, celles du projet seraient raccordées en passant par des conduites existantes déjà utilisées dans le cadre de la villa existante. En tout état, la question des conduites nécessaires relevait du droit privé.

11.         Les recourants ont répliqué le 20 janvier 2023, maintenant leurs conclusions.

Le département admettait qu'une dérogation avait été requise. Ce n'était pas parce qu'un équipement de cuisine non raccordé au gaz était déjà existant que l'obligation de distribution de gaz ne s'appliquait pas. En outre, il ne démontrait pas qu'une dérogation aurait été déjà accordée par le passé. La question de l'obsolescence de la norme n'était pas pertinente, dès lors que celle-ci était en vigueur. La question de leur qualité pour recourir à ce sujet n'était pas déterminante, dès lors que la décision querellée était nulle, en raison du choix de la mauvaise procédure. En outre, l'interprétation restrictive de l'art. 3 al. 7 LCI des intimés n'était confirmée ni par la loi ni par la jurisprudence, ni par la doctrine, ce d'autant qu'ils ne motivaient pas leur interprétation.

Le fait que la construction avait été réalisée quarante ans auparavant n'influençait aucunement la nécessité de l'époque d'inscrire ou non une servitude. Il ressortait de la genèse de la loi que la qualification d'une construction en ordre contigu, en cas de mitoyenneté par le garage ou par une autre CDPI, avait principalement pour effet d'augmenter l'indice d'utilisation du sol et non de permettre de déroger aux distances aux limites de manière désordonnée ou asymétrique.

Les projets de construction du groupe de villas existantes concernés avaient tenu compte de la future division parcellaire, mais les différents projets n'avaient pas été autorisés simultanément, en ordre contigu et avec des coefficients identiques. Il se justifiait donc de ne prendre en compte que la parcelle n° 1______.

Le département ne contestait pas que le couloir devait être considéré comme une surface hors-sol et il persistait à contester que la SBP déterminante s'élevait à 272 m2. Ses suppositions relatives aux calculs des SBP n'étaient pas vérifiées, gravement lacunaires et violaient leur droit d'être entendu, dès lors qu'ils n'avaient pas pu se déterminer vu l'opacité des calculs.

Tant le tribunal de céans que la chambre administrative considéraient que des piscines de moins de 50 m2 étaient des CDPI.

Le département estimait à tort que leur parcelle ne serait pas impactée par les canalisations projetées, dès lors que le raccordement du pool-house devait nécessairement passer par les canalisations traversant leur parcelle, ce que reconnaissait expressément les intimés. Au surplus, ces derniers admettaient qu'en l'absence d'accord, le projet ne pourrait pas être réalisé, ce qui démontrait l'absence de caractère juridiquement garanti.

Enfin, ils reprenaient en substance leur argumentation relative à la violation de la clause d'esthétique.

12.         Le 16 février 2023, le département a dupliqué, persistant dans ses conclusions et son argumentation.

Il admettait avoir omis, dans ses observations du 6 décembre 2022, de relever la présence de trois préavis défavorables de la commune, lesquels avaient néanmoins été pris en considération. Un courrier avait été adressé à la commune en date du 28 juillet 2022 pour lui expliquer pourquoi sa position défavorable avait été écartée.

Il rappelait que le réseau d'adduction ne desservant pas le chemin des F______, le raccordement n'était pas possible, du moins à des coûts raisonnables. Exiger un tel équipement serait disproportionné. Il ne s'agissait donc pas d'une dérogation à la règle générale de raccordement, puisqu' en réalité, les conditions de raccordement pour les petites maisons destinées à l'habitation de l'art. 79 RCI n'étaient pas remplies en l'espèce, dispensant de toute obligation en la matière. La question de savoir s'il pouvait être dérogé à la règle générale de raccordement pouvait souffrir de rester indécise.

Les règles de distances entre constructions n'avaient en l'espèce, par déduction logique, pas à être respectées entre constructions contiguës. Aucune servitude ne s'avérait nécessaire, tant pour la situation actuelle que future.

L'architecte de la DAC, après une analyse sommaire sur la base des plans autorisés (DD 8______ et DD 9______), était arrivé au constat que la villa litigieuse avait une surface de 229 m2 (selon la manière de calculer à l'époque), respectivement 246 m2 (soit le chiffre retenu par le MPQ, selon la méthode actuelle). S'y ajoutait, pour l'ensemble des parcelles, une surface de 261 m2 (selon l'ancienne méthode) et 268 m2 (selon la nouvelle méthode), soit des taux de 19.58% ((229 + 261) / 2502), respectivement 20.54% ((246 + 268) / 2502). Sachant que le taux fixé à l'art. 59 al. 1 LCI était passé de 20% à 25% entre les projets autorisés dans les années 80 et ce jour, une marge importante existait, raison pour laquelle, par économie de procédure, en application du principe de célérité, et pour éviter tout formalisme excessif, aucune pièce complémentaire n'avait été exigée. Les 25.5 m2 du projet (26.57 m2 selon le MPQ) faisaient que le nouveau taux, sur la base de la seule parcelle du projet, restait nettement en dessous des 25%, l'accroissement n'était que de 2.32% (25.5/1099). Le projet ne violait donc pas l'art. 59 LCI et les droits à bâtir de tiers n'étaient pas prétérités.

Le couloir de 6m2 devait être pris en compte dans le rapport des surfaces, ce qui avait été déjà fait au stade du calcul de l'existant. S'agissant de la manière de procéder au calcul, selon l'art. 59 al. 3 LCI, il pouvait renoncer à comptabiliser la SBP des combles dont la hauteur était inférieure à 1.8 m. Il arrivait parfois que le MPQ fit une confusion avec la règle portant sur l'évaluation de l'habitabilité des combles (art. 49 al. 2 LCI), ce qui pouvait expliquer les divergences de calcul, sachant que cela ne portait pas à conséquence en l'espèce. En outre, tout hypothétique futur projet d'agrandissement devrait faire l'objet d'un calcul des rapports des surfaces selon le droit alors en vigueur.

Concernant le calcul des CDPI, bien que l'ATA/791/2022 ne fut pas encore entré en force en raison du recours au Tribunal fédéral, il s'agissait de la jurisprudence cantonale la plus récente. Il ne s'agissait par ailleurs pas d'un revirement de jurisprudence mais de la clarification d'une notion floue. Ainsi, seuls le garage de 50 m2 et le pool-house de 37 m2 devaient être considérés comme CDPI, pour un total de 87 m2.

Les recourants n'apportaient aucun élément supplémentaire s'agissant de la clause d'esthétique, persistant à remettre en question les compétences de la CA et à considérer que l'harmonie architecturale ne serait pas respectée par le projet.

Les recourants confondaient le droit public prévoyant qu'un terrain était équipé lorsqu'il était, entre autres, desservi d'une manière adaptée à l'utilisation prévue par des conduites et le droit privé qui réglait les aspects de détails (frais de réalisation et d'entretien par exemple).

13.         Les intimés ont dupliqué par écritures du 23 févier 2023, persistant en substance dans leurs conclusions et leur argumentation.

Les recourants persistait à invoquer la nullité de l'autorisation en raison du choix de la procédure d'autorisation de construire. Or, le projet ne comportait aucune dérogation. Faute de raccordement possible du chemin des F______, ils n'étaient pas tenus de se conformer à l'obligation de distribution du gaz en application de l'art. 79 RCI.

À suivre les recourants, la dérogation prévue à l'art. 67 LCI ne viserait pas les constructions édifiées en ordre contigu par le garage. La notion de construction en ordre contigu était définie de manière claire et précise à l'art. 58 al. 2 LCI. Les recourants soutenaient que cette définition ne s'appliquerait qu'aux seules questions de densification, à l'exclusion de celles visant à la dérogation aux distances aux limites, sans se prévaloir de la moindre référence jurisprudentielle ou doctrinale en ce sens. De plus, il ne se justifiait pas de faire inscrire une quelconque servitude permettant de déroger aux règles relatives aux limites de propriété.

Les recourants omettaient que la directive LCI « rapport des surfaces en zone 5 » n° 021-v07 reposait sur l'ATA/517/2018, imposant la prise en considération, dans le cadre d'un projet d'agrandissement, de la densité autorisée sur l'ensemble des parcelles morcelées, de manière à éviter qu'un propriétaire ne soit tenté d'augmenter à l'envi, par ces morcellements successifs des parcelles, le taux d'utilisation du sol, en violation des prescriptions légales. Les trois villas contiguës étant issues d'une seule et même division parcellaire, il y avait lieu d'appliquer les règles applicables en matière de report des droits à bâtir.

La totalité de la surface du couloir semi-enterré ne devait pas être intégrée au calcul de la SBP. Concernant ce calcul, le projet respectait à la fois le coefficient autorisé calculé sur l'ensemble des trois parcelles nos 1______, 3______ et 3______ (2'502 m2), que celui de l'agrandissement calculé sur la seule parcelle n° 1______, le coefficient global étant dans les deux cas inférieur au coefficient maximal autorisé de 25%.

Il n'existait aucune pratique établie en cours prévoyant la comptabilisation des piscines comme CDPI. Il n'était ainsi pas question d'un revirement de jurisprudence mais d'une clarification. Le département avait ainsi à raison exclu la piscine existante du calcul des CDPI.

Les recourants persistaient à substituer leur propre appréciation à celle des autorités spécialisées, sans apporter d'élément nouveau.

Ils persistaient également à se prévaloir de grief de droit civil, soit de l'absence de servitude de canalisation pour tenter de faire obstacle au projet. Le terrain ayant déjà été jugé équipé à l'occasion de l'autorisation de construire principale, il n'y avait pas lieu de mettre en doute l'équipement du terrain au stade de l'agrandissement.

14.         Par courrier du 23 février 2023, les intimés ont sollicité l’autorisation/l’exécution anticipée de l’autorisation de construire en ce qui concernait le remplacement de la PAC afin qu’ils n’aient pas à attendre l’entrée en force de l’autorisation de construire pour pouvoir se chauffer convenablement.

15.         Le 8 mars 2023, les recourants ont transmis des déterminations spontanées sur les dupliques des parties, persistant en substance dans leur argumentation et leurs conclusions.

La villa des intimés était une grande maison destinée à l'habitation et devait être raccordée au réseau d'adduction. En tout état, même une petite maison n'était pas exonérée ipso facto de cette obligation, les intimés ne démontrant pas que le raccordement serait impossible ou disproportionné. Par ailleurs, l'OCEN avait considéré qu'une dérogation était nécessaire.

Les travaux préparatoires confirmaient que la distance aux limites devait être respectée par des constructions principales lorsque la contiguïté ne concernait que les CDPI. Le projet litigieux constituait une aggravation de la situation actuelle, déjà non conforme à la réglementation, par la réalisation d'une exception de la partie de la villa située en limite de propriété. Aucune des autres parties ne se prononçait sur l'irrégularité initiale de la construction de la villa à la limite de propriété, respectivement de l'irrégularité du morcellement parcellaire.

Aucune instruction sérieuse n'avait été menée aux fins de vérifier le respect de la SBP du projet, le département ayant reconnu avoir procédé à une analyse sommaire. Les surfaces de terrain déterminante utilisée pour le calcul des coefficients de constructibilité étaient les surfaces des parcelles après morcellement. Rien n'indiquait que des transferts de droit à bâtir avaient eu lieu. De plus, les constructions sur les parcelles nos 1______, 2______ et 3______ n'avaient pas été autorisées simultanément, en ordre contigu. Ainsi, seule la surface de la parcelle des recourants devait être prise en considération dans le calcul du coefficient de constructibilité limité à 25%.

Selon le plan de la ville, les surfaces retenues pour le rez-de-chaussée et le sous-sol étaient identiques (138 m2), de sorte que la surface du couloir n'avait pas été prise en considération dans le cadre du calcul de la SBP. Un coefficient de 25% limitait la SPB à 274.75 m2 pour une parcelle de 1'099 m2. La SPB retenue pour les intimés et le département était de 246 m2. À cela s'ajoutait la surface du couloir (8.5 m2), ainsi que la surface de l'agrandissement de 26.7 m2 selon les intimés et 25.5 m2 selon le département, de sorte que la SPB s'élevait à 281 m2, respectivement 280 m2, ce qui excédait le maximum admissible de 274.75 m2.

La piscine et le garage existants étaient des CDPI, de sorte que la surface maximale de ces constructions était déjà atteinte.

Contrairement à ce qu'imposait l'art. 4 al. 2 LCUA, le second préavis de la CA n'était pas motivé, alors qu'aucune des demandes sollicitées dans son premier préavis n'avait été satisfaite. En effet, aucune maquette n'avait été fournie, ni aucune image 3D, et le principe du toit plat ainsi que la surface du pool-house avaient été maintenus.

Le pool-house devait être raccordé aux canalisation, de sorte que la constitution d'une servitude en ce sens était nécessaire. Le préavis de l'OCEau était ainsi lacunaire.

16.         Le 9 mars 2023, les recourants ont indiqué au tribunal ne pas s’opposer à demande d’autorisation/d’exécution anticipée de l’autorisation de construire en ce qui concernait le remplacement de la PAC.

17.         Le département en a fait de même par écriture du 9 mars 2023 également.

18.         Par décision du 14 mars 2023 (DITAI/114/2023), le tribunal a admis la demande de retrait d'effet suspensif en ce qui concernait la PAC.

19.         Le 24 mars 2023, le département a informé le tribunal qu'il n'avait pas d'observations supplémentaires à formuler.

20.         Le détail des écritures et des pièces produites sera repris dans la partie « En droit » en tant que de besoin.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la LCI (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             La recevabilité du recours suppose encore que ses auteurs disposent de la qualité pour recourir.

4.             La qualité pour recourir est reconnue à toute personne atteinte par la décision attaquée et qui dispose d’un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (art. 60 let. b LPA).

Le recourant doit se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d’être prise en considération avec l’objet de la contestation et retirer un avantage pratique de l’annulation ou de la modification de la décision en cause, qui permette d’admettre qu’il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l’intérêt général, de manière à exclure l’action populaire. Cet intérêt digne de protection ne doit pas nécessairement être de nature juridique, un intérêt de fait étant suffisant (ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; 143 II 506 consid. 5.1 ; 137 II 30 consid. 2.2.3 et 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_206/2019 du 6 août 2019 consid. 3.1).

5.             En matière de droit des constructions, le voisin direct de la construction ou de l’installation litigieuse a en principe la qualité pour recourir (ATF 139 II 499 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_164/2019 du 20 janvier 2021 consid. 1).

La proximité avec l’objet du litige ne suffit cependant pas à elle seule à conférer au voisin la qualité pour recourir contre la délivrance d’une autorisation de construire. Les tiers doivent en outre retirer un avantage pratique de l’annulation ou de la modification de la décision contestée, qui permette d’admettre qu’ils sont touchés dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l’intérêt général des autres habitants de la collectivité concernée (ATF 139 II 499 consid. 2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_727/2016 du 17 juillet 2017 consid. 4.2.3 ; 1C_226/2016 du 28 juin 2017 consid. 1.1). Le recourant doit ainsi rendre vraisemblables les nuisances qu’il allègue et sur la réalisation desquelles il fonde une relation spéciale et étroite avec l’objet de la contestation (ATF 125 I 173 consid. 1b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_469/2014 du 24 avril 2015 consid. 2.2 ; 1C_453/2014 du 23 février 2015 consid. 4.2 et 4.3).

6.             En l'espèce, les recourants sont propriétaires de la parcelle directement voisine de celle concernée par le projet litigieux. Ils font par ailleurs valoir des griefs liés au droit de la construction. Leur qualité pour recourir, qui n'est au demeurant pas contestée par les parties intimées, sera donc admise.

7.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire, l’égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9).

8.             Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n’ont qu’un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l’autorité reste ainsi libre de s’en écarter pour des motifs pertinents et en raison d’un intérêt public supérieur. Toutefois, lorsqu’un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser (ATA/448/2021 du 27 avril 2021 consid. 6a et les références citées).

9.             Selon une jurisprudence bien établie, la juridiction de recours observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis, pour autant que l’autorité inférieure suive l’avis de celles-ci. Elle se limite à examiner si le département ne s’est pas écarté sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/896/ 2021 du 31 août 2021 consid. 4d ; ATA/155/2021 du 9 février 2021 consid. 7c et 10e).

10.         Les recourants estiment que la décision serait nulle en raison d'une erreur dans le choix de la procédure d'autorisation de construire suivie. Ils estiment que, du fait que l'OCEN a admis l'octroi d'une dérogation à l'obligation de raccordement au gaz, la voie d'une procédure définitive aurait dû être suivie.

11.         Selon l'art. 1 al. 1 let. a LCI, sur tout le territoire du canton nul ne peut, sans y avoir été autorisé, élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail.

Dès que les conditions légales sont réunies, le département est tenu de délivrer l'autorisation de construire (art. 1 al. 6 LCI).

12.         Selon l’art. 3 al. 7 LCI, selon lequel le département peut traiter par une procédure accélérée les demandes d’autorisation relatives à des travaux soumis à l’art. 1 LCI :

a) s’ils sont projetés en cinquième zone aux conditions prévues par le titre II, chapitre VI, de la présente loi et lorsqu’aucune dérogation n’est sollicitée ;

b) s’ils portent sur la modification intérieure d’un bâtiment existant ou ne modifient pas l’aspect général de celui-ci ;

c) pour des constructions nouvelles de peu d’importance ou provisoires ; ou

d) à titre exceptionnel, pour des travaux de reconstruction présentant un caractère d’urgence.

Dans ces cas, la demande n’est pas publiée dans la Feuille d’avis officielle (ci-après: FAO) et le département peut renoncer à solliciter le préavis communal. L’autorisation est, par contre, publiée dans la FAO et son bénéficiaire est tenu, avant l’ouverture du chantier, d’informer, par écrit, les locataires et, le cas échéant, les copropriétaires de l’immeuble concerné des travaux qu’il va entreprendre. Une copie de l’autorisation est envoyée à la commune intéressée.

13.         Selon la jurisprudence, la nullité absolue d'une décision ne frappe que les décisions affectées d'un vice devant non seulement être particulièrement grave, mais aussi être manifeste ou, dans tous les cas, clairement reconnaissable, et pour autant que la constatation de la nullité ne mette pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Hormis dans les cas expressément prévus par la loi, il n'y a lieu d'admettre la nullité qu'à titre exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire. Entrent principalement en ligne de compte comme motifs de nullité la violation grossière de règles de procédure, ainsi que l'incompétence qualifiée (fonctionnelle ou matérielle) de l'autorité qui a rendu la décision (ATF 139 II 243 consid. 11.2 ; 138 II 501 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_573/2020 du 22 avril 2021 consid. 5 ; 2C_1031/2019 du 18 septembre 2020 consid. 2.1 ; 1C_474/2017 du 13 décembre 2017 consid. 3.2 ; 8C_355/2016 du 22 mars 2017 consid. 5.3 ; 1C_111/2016 du 8 décembre 2016 consid. 5.1). L'illégalité d'une décision (reposant sur des vices de fond) ne constitue en revanche pas par principe un motif de nullité ; elle doit au contraire être invoquée dans le cadre des voies ordinaires de recours (cf. not. arrêts du Tribunal fédéral 2C_573/2020 du 22 avril 2021 consid. 5 ; 2C_1031/2019 du 18 septembre 2020 consid. 2.1 ; 1C_474/2017 du 13 décembre 2017 consid. 3.2 ; 1C_156/2016 du 1er novembre 2016 consid. 4.1.1 ; 6B_538/2013, 6B_563/2013 du 14 octobre 2013 consid. 5.3).

La nullité doit être constatée d'office, en tout temps et par l'ensemble des autorités étatiques (ATF 138 II 501 consid. 3.1 ; 136 II 415 consid. 1.2 ; 132 II 342 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_573/2020 du 22 avril 2021 consid. 5 ; 1C_474/2017 du 13 décembre 2017 consid. 3.2 ; 4A_142/2016 du 25 novembre 2016 consid. 2.2). Elle peut aussi être constatée en procédure de recours (ATF 138 II 501 consid. 3.1 ; 137 III 217 consid. 2.4.3 ; 132 II 342 consid. 2.1 ; 122 I 97 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 5A_998/2014 du 14 avril 2015 consid. 2.1.2), y compris en dépit de l'irrecevabilité éventuelle du recours (cf. arrêts du Tribunal fédéral 5A_998/2014 du 14 avril 2015 consid. 2.1.2 ; 7B.20/2005 du 14 septembre 2005 consid. 1.3, non publié in ATF 131 III 652).

14.         De jurisprudence constante, la chambre administrative estime que l'application de la procédure accélérée au lieu de la procédure ordinaire constitue un vice particulièrement grave, de sorte qu'il s'agit d'un cas de nullité ; est donc nulle une autorisation délivrée à la suite d'une procédure accélérée en lieu et place de la procédure ordinaire (cf. ATA/1602/2019 du 29 octobre 2019 consid. 6b ; ATA/1299/2019 du 27 août 2019 consid. 3b ; ATA/205/2015 du 24 février 2015 consid. 5 ss ; ATA/725/2013 du 29 octobre 2013 et les références citées ; ATA/303/2000 du 16 mai 2000 consid. 5 et les références citées ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 1C_641/2012 du 30 avril 2013 consid. 3.4).

L'art. 79 RCI est entré en vigueur en mars 1978 dans le but, notamment, de mettre à disposition le gaz pour le chauffage des bâtiments. Ainsi, le gaz naturel s’est développé sur le canton par le biais du RCI mais avec une arrière-pensée énergétique (Jad KHOURY/Bernard Marie LACHAL, Réflexion sur l’art. 79 RCI concernant l’obligation de mettre à disposition le gaz dans les cuisines des bâtiments d’habitation, Groupe Energie – Université de Genève Institut des Sciences de l’Environnement (ISE), Rapport pour le Service de l’énergie (ScanE) de l’Etat de Genève, 2011 [ci-après: rapport ScanE], p. 7).

15.         Au terme de l'art. 79 RCI, le gaz doit être distribué, en règle générale, dans toutes les cuisines des grandes maisons destinées à l’habitation et, partout où le réseau d’adduction le permet, des petites maisons destinées à l’habitation. L'adoption de cette norme poursuivait un objectif d'intérêt public, afin d'éviter de recourir à l'énergie électrique (ATA/774/2000 du 5 décembre 2000, consid. 14).

Cette disposition légale oblige de mettre à disposition le gaz dans toutes les cuisines des immeubles résidentiels, et des maisons individuelles situées à proximité du réseau de gaz. A l’époque d’adoption de cette norme, il était prévu d’étendre le réseau de gaz sur tout le territoire cantonal, à l’instar du réseau électrique. Aujourd’hui, l’obligation de raccordement des bâtiments résidentiels au gaz ménager se restreint aux bâtiments situés dans le périmètre potentiellement raccordable défini par SIG (rapport ScanE, p. 9). Le rapport précité avait pour objectif d’orienter le ScanE sur la manière d’appliquer cette disposition légale au plus grand bénéfice de la politique énergétique (rapport ScanE, p. 6).

16.         Avec une électrification croissante de la société, dès le début du XXIe siècle, les enjeux de la politique énergétique genevoise ont évolué, visant notamment la diminution de la consommation d’énergies fossiles dans le canton (dont le gaz) et l’encouragement de la production et de l’utilisation d’énergies renouvelables locales (rapport ScanE, p. 8). Cette situation a conduit à l’entrée en vigueur de la nouvelle mouture de la LEn, laquelle a pour but de favoriser un approvisionnement énergétique suffisant, sûr, économique, diversifié et respectueux de l’environnement et de déterminer les mesures visant notamment à l’utilisation rationnelle et économe de l’énergie et au développement prioritaire de l’exploitation des sources d’énergies renouvelables et indigènes (art. 1 al. 1 et 2 LEn).

17.         Selon l'art. 22 al. 4 LEn, il n'y a pas d'obligation de raccordement à un réseau d'énergie utilisant une énergie non renouvelable, s'il existe une alternative recourant à une source renouvelable.

18.         Il est ainsi patent qu'il existe un conflit entre les art. 79 RCI et 22 al. 4 LEn.

19.         En cas de conflit de normes s’appliquent trois règles classiques principales : lex superior derogat inferiori (la norme supérieure prime la norme inférieure), lex specialis derogat generali (la norme spéciale prime la norme générale), et lex posterior derogat anteriori (la norme postérieure prime la norme antérieure).

La primauté du droit supérieur découle du principe de la hiérarchie des normes (arrêt du Tribunal fédéral 2C_736/2010 du 23 février 2012 consid. 6.3). En présence de règles de droit contradictoires de rangs différents, le juge est tenu de se conformer à la règle supérieure. Entre les principes lex specialis derogat generali et lex posterior derogat anteriori, il n’existe pas de hiérarchie stricte (ATF 134 II 329 consid. 5.2). Il est néanmoins incontesté que le rapport de spécialité entre deux normes n’est pas toujours facile à déterminer, et qu’il doit le cas échéant être dégagé selon les règles classiques de l’interprétation juridique. Par ailleurs, si la question du caractère postérieur d’une norme par rapport à une autre est généralement plus facile à établir, il n’en est pas moins nécessaire de se demander le cas échéant si le nouveau droit visait bien à matériellement « abroger » l’ancien (ATA/1125/2020 du 10 novembre 2020 consid. 3e ; ATA/1000/2014 du 16 décembre 2014 consid. 11 et les références citées).

20.         En l'occurrence, l'obligation de ditribuer le gaz se situe au niveau réglementaire, alors que la norme supprimant l'obligation de raccordement à une énergie non renouvelable se situe au rang légal, de sorte que pour cette raison déjà, il convient de se conformer à la règle de droit supérieur, soit à l'art. 22 al. 4 LEn. À cela s'ajoute que l'art. 79 RCI, dans sa teneur actuelle, est entré en vigueur en 1978, alors qu'il ressort des travaux préparatoires que l'art. 22 al. 4 LEn est issue d'une réflexion politique postérieure en fonction des nouveaux enjeux énergétiques tendant à la diminution de l'utilisation des énergies fossiles ayant conduit à l'entrée en vigueur de cette norme en août 2010 (MGC 2008-2009/XII/1 A 15772). Ainsi, en vertu du principe de la lex posterior derogat anteriori également, il convient d'appliquer la solution préconisée par l'art. 22 al. 4 LEn.

Dans le présent cas, il ressort du préavis de l'OCEN du 20 avril 2022 que la « dérogation » à l'obligation de distribuer le gaz de cuisine, selon l'art. 79 RCI, est justifiée par le fait que le bâtiment possède une production de chaleur non fossile. Il est ainsi manifeste que la justification de l'OCEN se base en réalité sur les conditions d'application de l'art. 22 al. 4 LEn.

Partant, si le texte du préavis parle certes de « dérogation », en réalité, il faut en tirer qu'il ne s'agit que de la simple application de l'art. 22 al. 4 LEn, laquelle supplante in casu l'application de l'art. 79 RCI. Ainsi, force est ainsi d'admettre qu'il ne s'agit pas d'une dérogation, de sorte que les conditions de l'art. 3 al. 7 LCI sont en l'espèce remplies et que le choix de la voie de la procédure accélérée n'est pas critiquable.

Le grief est rejeté.

21.         Les recourants prétendent que les dispositions légales au sujet des limites de propriétés auraient été mal appliquées.

22.         Les constructions sont édifiées en ordre contigu ou non contigu (art. 58 al. 1 LCI). Est réputée en ordre contigu, l’édification de deux maisons au moins, réunies par un mur mitoyen ou par une CDPI et disposant chacune de son propre accès de plain-pied (art. 58 al. 2 LCI). Le département peut exiger un plan d’ensemble pour les constructions en ordre contigu. Il peut aussi les interdire lorsque par leur échelle, leur importance ou leur esthétique, elles nuiraient au caractère du quartier ou du site (art. 58 al. 3 LCI).

23.         Selon l'art. 3 al. 3 RCI, sont réputées CDPI, à la condition qu'elles ne servent ni à l'habitation, ni à l'exercice d'une activité commerciale, industrielle ou artisanale, les constructions dont la surface n'excède pas 50 m2 et qui s'inscrivent dans un gabarit limité par :

-          une ligne verticale dont la hauteur n'excède pas 2,50 m ;

-          une ligne oblique faisant avec l'horizontale partant du sommet de la ligne verticale un angle de 30 degrés ;

-          une ligne horizontale de faîtage située à 4,50 m du sol au maximum.

24.         Selon l’art. 67 LCI, les constructions ne peuvent être édifiées en dessus du sol, à la limite de deux propriétés privées (al. 1). Le département peut cependant autoriser des constructions en dessus du sol, à la limite de deux propriétés privées lorsque les constructions sont édifiées en ordre contigu (al. 2 let. b).

25.         Selon l’art. 69 al. 1 LCI, lorsqu’une construction n’est pas édifiée à la limite de propriétés privées, la distance entre cette construction et la limite doit être au moins égale à la hauteur du gabarit diminuée de 1 m (D ≥ H - 1). Sous réserve des dispositions des art. 67 et 68 LCI, la distance entre une construction et une limite de propriété ne peut être en aucun cas inférieure à 5 m (D ≥ 5) (art. 69 al. 2 LCI). Les distances entre constructions et limites de propriétés ou entre deux constructions doivent être également appliquées aux angles de ces constructions (art. 69 al. 3 LCI).

26.         Selon l’art. 70 al. 1 LCI, les distances entre deux constructions ne peuvent être inférieures à la somme des distances qui seraient exigibles entre chacune de ces constructions et une limite de propriétés passant entre elles.

Pour permettre une réalisation architecturale satisfaisante sur une parcelle déterminée, le département peut accorder, sur préavis de la commission d’architecture, des dérogations aux dispositions du présent article, à la condition que les locaux d’habitation et de travail soient disposés d’une manière rationnelle et salubre (art. 70 al. 3 LCI).

27.         Selon l'art. 71 LCI, lorsque les distances aux limites de propriétés et les distances entre constructions ne sont assurées que par un accord entre propriétaires voisins, sans modification des limites de leurs parcelles, cet accord doit faire l’objet d’une servitude inscrite au registre foncier (al. 1). L’autorisation de construire est subordonnée à la remise d’un extrait du registre foncier attestant que cette inscription a été opérée (al. 2). Le règlement d’application fixe les termes dans lesquels la servitude doit être établie (al. 3).

28.         En l'espèce, à titre préalable, les recourants prétendent que la mitoyenneté dans le cas des constructions en ordre contigu devrait concerner l'ensemble des constructions érigées sur les parcelles en cause. Cependant, il ressort du texte même de l'art. 58 al. 2 LCI, lequel donne la définition de l'ordre contigu, que la contiguïté ne doit pas nécessairement concerner l'ensemble des bâtiments présents sur les parcelles concernées, mais uniquement les bâtiments d'habitation.

Or, selon les plans visés ne varietur versés au dossier, ainsi que des données librement accessibles sur le SITG, les villas érigées sur les parcelles nos 1______, 2______ et 3______ sont manifestement en ordre contigu. En effet, les bâtiments situés sur les parcelles nos 1______ et 2______ sont reliés par un garage de 50 m2, soit une CDPI – ce que les recourants admettent d'ailleurs –, et les bâtiments érigés sur les parcelles nos 2______ et 3______ le sont par un mur mitoyen. En outre, chacune des maisons dispose de son propre accès de plain-pied. Il est ainsi manifeste que les conditions de l'art. 58 al. 2 LCI sont remplies, de sorte que, conformément à l'art. 69 al 2 LCI et en vertu de l'art. 67 al. 2 let. b LCI, les normes relatives aux distances aux propriétés ne s'appliquent pas.

À cela s'ajoute que les instances de préavis spécialisées, notamment la DAC et la CA, n'ont relevé aucun problème à ce sujet. En particulier, la CA n'a émis aucune remarque quant à d'éventuelles nuisances au caractère du quartier, de sorte que le département n'avait manifestement aucune raison d'exiger un plan d'ensemble au sens de l'art. 58 al. 3 LCI.

Le grief est donc rejeté.

29.         Les recourants critiquent le calcul du rapport de surface et estiment que le projet viole l'art. 59 LCI. Ils doutent également du respect des conditions spécifiques au standard HPE Extension.

30.         En avril 1988, lors de l'octroi de l'autorisation de construire des villas en ordre contigu (DD 8______ et DD 9______), l'art. 59 al. 1 LCI prévoyait que la surface de la construction, exprimée en m2 de plancher, ne devait pas excéder 20 % de la surface de la parcelle. Quant à l'art. 59 al. 4 let. a LCI, il disposait, dans sa teneur d'alors, que lorsque les circonstances le justifiaient et que cette mesure était compatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, le département pouvait autoriser, après consultation de la commune et de la commission d'architecture, un projet de construction en ordre contigu dont la surface de plancher habitable n'excédait pas 25 % de la surface du terrain.

31.         Les taux de densité prévus à l'art. 59 al. 1 LCI ont évolué, depuis octobre 2004, à la hausse dans le cadre de plusieurs modifications législatives, dont la dernière est entrée en vigueur le 26 janvier 2013 (exposé des motifs relatif au projet de loi [ci-après : PL] 10'891 ; ATA/659/2017 du 13 juin 2017 consid. 4b ; ATA/699/2015 du 30 juin 2015 consid. 8b).

32.         Selon la teneur actuelle de l'art. 59 al. 1 LCI, entrée en vigueur le 26 janvier 2013, la surface de la construction, exprimée en m2 de plancher, ne doit pas excéder 25 % de la surface de la parcelle. Le rapport de 25 % peut être porté à 27,5 % lorsque la construction est conforme à un standard de haute performance énergétique, respectivement à 30 % lorsque la construction est conforme à un standard de très haute performance énergétique, reconnue comme telle par le service compétent.

En vertu de l'art. 59 al. 2 LCI, par surface de plancher prise en considération dans le calcul du rapport des surfaces, il faut entendre la SBP de la totalité de la construction hors sol. Tel qu'il en résulte de la systématique de la LCI, cette définition s'applique uniquement aux constructions situées en zone 5.

33.         La notion de SBP relève du droit cantonal (arrêts du Tribunal fédéral 1C_225/ 2020 du 19 novembre 2020 consid. 2.1 ; 1C_55/2016 du 3 mars 2016 consid. 3.2).

Elle ne reçoit pas de définition précise dans le système de la LCI et, surtout, ne s'étend pas aux mêmes surfaces selon la zone dont il est question. L'incertitude liée à cette notion a amené la chambre administrative, dans un arrêt de principe dont le Tribunal fédéral a confirmé la validité (arrêt 1C_76/2015 du 12 novembre 2015), à recourir à la définition posée par la norme ORL 514 420. Selon cette dernière, « la surface brute de plancher utile [SBP] se compose de la somme de toutes les surfaces d’étages en dessous et en dessus du sol, y compris les surfaces des murs et des parois dans leur section horizontale. N’entrent toutefois pas en considération : toutes les surfaces non utilisées ou non utilisables pour l’habitation ou le travail, telles que par exemple les caves, les greniers, les séchoirs et les buanderies des logements ; les locaux pour le chauffage, les soutes à charbon ou à mazout ; les locaux pour la machinerie des ascenseurs, des installations de ventilation et de climatisation ; les locaux communs de bricolage dans les immeubles à logements multiples ; les garages pour véhicules à moteur, vélos et voitures d’enfants, non utilisés pour le travail ; les couloirs, escaliers et ascenseurs desservant exclusivement des surfaces non directement utiles ; les portiques d’entrée ouverts ; les terrasses d’attique, couvertes et ouvertes ; les balcons et les loggias ouverts pour autant qu’ils ne servent pas de coursive ». À cet égard, la jurisprudence a précisé que la seule intention subjective des constructeurs ne joue pas un rôle décisif. Il convient plutôt de déterminer si, objectivement, les aménagements prévus au niveau considéré permettent aisément de rendre ces surfaces habitables (voir dans ce sens ATF 108 Ib 130).

34.         Afin de préciser la portée de l’art. 59 LCI, le département a établi la directive SBP (directive n° 021-7) qui donne, par le biais de schémas, des précisions sur la manière de calculer la SBP. Elle se calcule au nu de façade, sans déduire les embrasures de fenêtres. Il n'est pas fait mention de la surface habitable et/ou chauffée, ni des vides d'étage. Sous réserve des surfaces définies à l'alinéa 3, les constructions annexes définies à l'art. 29 RCI ainsi que toute SPB qui est nécessaire à l'accessibilité des locaux d'habitation telle que les circulations verticales et horizontales, chauffées ou non (coursive, ascenseur, sas d'entrée vitré ou non) sont à prendre en compte.

Concernant le mode de calcul du rapport de surface lors d'agrandissements de villas contigües, la directive énonce, s'agissant de l'état existant, que la plupart des villas contiguës ont été autorisées à un coefficient (rapport de surfaces) identique sur une parcelle ou un ensemble de parcelles (sans tenir compte d'une éventuelle future division parcellaire). Cela signifie que chaque villa a, pour le respect du coefficient, la même surface virtuelle de parcelle. En d'autres termes, cela équivaut à un report de surface virtuelle des plus grandes parcelles au profit des plus petites, communément appelé report de droits à bâtir. Concernant les projets d'agrandissements, selon la jurisprudence (ATA/517/2018) une augmentation de la densité est possible aussi sur des parcelles issues de morcellement. Il convient de tenir compte de la densité autorisée sur l'ensemble, par contre le supplément de densité se prend uniquement à la parcelle concernée. Le coefficient ainsi défini est à appliquer pour la construction agrandie projetée, sans modifier le coefficient des autres villas autorisées dans l'autorisation initiale. Chacune garde ainsi son potentiel d'agrandissement par rapport à sa propre parcelle. Le coefficient global correspond à la somme du coefficient autorisé et celui défini entre l'agrandissement et la surface de la parcelle. Lors d'un projet d'agrandissement, si la villa et l'agrandissement sont prévu en HPE, respectivement TPHE, alors le coefficient peut être prévu jusqu’à 44%, respectivement 48% HPE. Dans le cas où seul l'agrandissement est projeté HPE, respectivement THPE, étant entendu que la villa existante reste non HPE, il n'est pas possible d'augmenter de 10%, respectivement de 20% ni la surface de l'agrandissement ni la villa entière. En effet, l'OCEN exige que l'isolation de l'agrandissement respecte les normes thermiques, mais l'ensemble de la villa n'obtient pas le standard HPE, respectivement THPE.

35.         Selon la doctrine et la jurisprudence, en droit de la construction, la loi applicable est celle en vigueur au moment où statue la dernière instance saisie du litige. Si l'affaire est traitée par plusieurs autorités, sont déterminantes en principe les prescriptions en force lorsque la dernière juridiction statue. La jurisprudence admet ainsi d'une façon générale qu'une demande d'autorisation de bâtir déposée sous l'empire du droit ancien est examinée en fonction des dispositions en vigueur au moment où l'autorité statue sur cette demande, même si aucune disposition légale ou réglementaire ne le prévoit : les particuliers doivent en effet toujours s'attendre à un changement de réglementation (ATF 101 1b 299). En statuant sur une demande d'autorisation suivant des prescriptions devenues obligatoires après son dépôt, le juge ne tombe pas dans l'arbitraire ni ne viole une disposition impérative pas plus que la garantie de la propriété (ATF 107 1b 138 ; ATA/22/2009 du 13 janvier 2009 ; ATA/792/2004 du 19 octobre 2004 ; ATA/541/2002 du 10 septembre 2002 ; Pierre MOOR/Alexandre FLÜCKIGER/Vincent MARTENET, Droit administratif, vol. I, Les fondements, 3ème éd., 2012, pp. 194-195 ; Alfred KOELZ, Intertemporalesverwaltungsrecht, RDS 1983, p. 191 ; Marco BORGHI, Il diritto amministrativo intertemporale, RDS 1983, p. 485 ; André GRISEL, L'application du droit public dans le temps, ZBl 1974, pp. 251-252).

36.         En l'espèce, en préambule, s'agissant des craintes des recourants relatives au respect du standard HPE Extension, si le document « Chemin des F______ - Extension d'un villa – Phase autorisation, partie énergétique » du 18 février 2022 mentionne certes l'art. 12B al. 2 REn portant sur le standard HPE Neuf, la phrase précédente indique clairement que « le standard énergétique visé est HPE Extension ». Il est ainsi clair que l'intention du requérant est le respect du standard HPE Extension. Dès lors, la référence erronée à l'art. 12B al. 2 REn, au lieu de l'art. 12B al. 3 REn, doit être considérée comme une simple erreur de l'ingénieur. Au demeurant, le préavis favorable de l'OCEN du 20 avril 2022 est conditionné au respect du standard HPE Extension, condition reprise par la décision d'autorisation de construire litigieuse à son chiffre 7.

Les parcelles nos 1______, 2______ et 3______, dont la surface totale est de 2'502 m2, sont issues d'une division parcellaire inscrite au registre foncier le 6 décembre 1985, selon le tableau de mutation n° 7______. Le taux fixé à l'art. 59 al. 1 LCI alors en vigueur était de 20%, et ce n'est que suite à l'entrée en vigueur de la loi 10'891 que le taux prévu à l'art. 59 al. 1 LCI est passé à 25% (MGC 2011-2012 II A 1332 ss).

À teneur des plans de la villa existante, selon la DD 8______, celle-ci est d'une surface de 246 m2 (138 m2 : rez-de-chaussée + 108 m2 : étage). Selon le registre foncier, la surface de la parcelle n° 1______, destinée à accueillir le projet litigieux, est de 1'099 m2. S'agissant du couloir, celui-ci n'est qu'indirectement touché par le projet querellé. En effet, la comparaison des plans de la DD 8______ et du plan des surfaces du 17 mai 2022 montre que le projet aura pour effet qu'au rez-de-chaussée, l'extension de la cuisine entraînera également le déplacement de la terrasse. Cela étant, s'agissant du couloir reliant uniquement la terrasse au garage, on constate que ses dimensions restent identiques. En réalité, là où les recourants aperçoivent une augmentation de la surface du couloir, à teneur du plan des surfaces du 17 mai 2022, il ne s'agit que d'une augmentation de la surface de la terrasse en raison de l'agrandissement de la cuisine. Il est ainsi faux de prétendre que la surface du couloir (6 m2) sera augmentée. En outre, bien que le département affirme que cette surface devrait être prise en compte, il ressort des plans de la villa que celui-ci ne constitue qu'un lien entre la terrasse et le garage, desservant ainsi manifestement exclusivement des surfaces non directement utiles ou nécessaires à l'habitation ou le travail, de sorte qu'il ne doit pas être pris en considération dans le calcul de la SBP admissible.

Sur cette base, il n'est pas nécessaire de trancher la question de savoir si, comme l'affirment les recourants, la méthode de calcul définie par la directive n° 021-7 au sujet des projets d'agrandissement ne serait pas applicable en raison du fait que le morcellement aurait eu lieu avant la délivrance des autorisations de construire les villas. En effet, même à suivre leur raisonnement, en ce sens qu'il ne faudrait prendre en compte que la surface de la parcelle n° 1______ pour déterminer la densité maximale autorisée, cela aboutirait à retenir que la villa existante présenterait un coefficient de densité de 22.38 % (246 m2 / 1099 m2) selon la méthode de calcul actuelle de la SBP à prendre en compte. Le projet d'extension, d'une surface de 26.57 m2 selon le requérant (272.67 m2 – 246 m2), présente un coefficient d'agrandissement de 2.41 % (26.57 m2 / 1099 m2). Ainsi, la villa existante et l'agrandissement projeté porte le coefficient total de la villa à 24.8 %, de sorte que la limite fixée par l'art. 59 al. 1 LCI de 25 % est respectée. Le grief est rejeté.

37.         Les recourants critiquent le calcul des CDPI et prétendent que les limites maximales pour ces surfaces seraient dépassées.

38.         La LCI ne donne aucune définition des CDPI. Ces dernières y sont toutefois mentionnées dans diverses dispositions, notamment à l’art. 3 al. 7 let. c LCI qui prévoit qu’elles peuvent être soumises à la procédure accélérée d’autorisation de construire ; à l’art. 43 LCI pour indiquer qu’elles peuvent être édifiée en limite de propriété ou à une distance inférieure à celle prévue pour les distances aux limites de propriétés, dans les conditions fixées par le règlement d’application (même principe à l’art. 68 pour la zone 5 et à l’art. 81 al. 2 LCI pour les zones industrielles, artisanales ou ferroviaires) ; dans la définition de constructions en ordre contigu : est réputée en ordre contigu, l’édification de deux maisons au moins, réunies par un mur mitoyen ou par une CDPI et disposant chacune de son propre accès de plain-pied (art. 58 al. 2 LCI) ; en zone 5, dans la disposition qui fixe les différents rapports de surfaces des constructions hors sol, la LCI prévoit que les CDPI ne sont pas prises en considération pour ce calcul (art. 59 al. 7 LCI) mais en principe dans celui du calcul du rapport des surfaces de sous-sol (art. 59 al. 8 LCI), le département pouvant toutefois admettre une surface de sous-sol non comprise dans le calcul du rapport des surfaces, si la construction de garages au sous-sol permet de renoncer à l’édification de CDPI à destination de garages en surface (art. 59 al. 9 LCI).

39.         La définition des CDPI se trouve dans le RCI. Comme indiqué précédemment, selon son art. 3 al. 3, sont réputées constructions de peu d’importance, à la condition qu’elles ne servent ni à l’habitation, ni à l’exercice d’une activité commerciale, industrielle ou artisanale, celles dont la surface n’excède pas 50 m2 et qui s’inscrivent dans un gabarit limité par :

a) une ligne verticale dont la hauteur n’excède pas 2,50 m ;

b) une ligne oblique faisant avec l’horizontale partant du sommet de la ligne verticale un angle de 30° ;

c) une ligne horizontale de faîtage située à 4,50 m du sol au maximum.

La même disposition prévoit encore que dans le cadre d’un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d’habitat groupé, et afin d’améliorer l’insertion dans le site et pour autant qu’il n’en résulte pas de gêne pour le voisinage, le département peut autoriser, après consultation de la commission d’architecture, des constructions de peu d’importance groupées d’une surface de plus de 50 m2 au total. Dans tous les cas, la surface totale des constructions de peu d’importance ne doit pas excéder 8% de la surface de la parcelle et au maximum 100 m2. (art. 3 al. 3 RCI ; ATA/318/2017 du 21 mars 2017 ; ATA/284/2016 du 5 avril 2016 ; ATA/1345/2015 du 15 décembre 2015), ces seuils constituant des conditions cumulatives (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_641/2012 du 30 avril 2013 consid. 3.3).

40.         Les CDPI font l’objet d’une directive du département du 3 février 2014, modifiée d’abord le 10 mars 2017 sous le numéro 024-v5, puis le 9 mars 2021 sous le numéro 024-v7 (ci-après : la directive CDPI). Cette dernière version comporte quelques ajouts issus de la jurisprudence (ATA/805/2020 du 25 août 2020 ; ATA/1300/2019 du 27 août 2019 consid. 4e et les arrêts cités : pour le calcul relatif aux balcons/terrasses), mais ne change pas le contenu de la version antérieure.

S’agissant des types de construction considérée comme CDPI, la directive cite les garages, ateliers non professionnel, couverts à voitures, couverts de plaisance, couverts à bois, abris ou cabanes de jardin et pool-house. Elle précise également que les constructions de très peu d’importance au sens de l’art. 1 al. 4 LCI ne sont pas à prendre en compte au titre de CDPI, ainsi que les jardins d’hiver au sens de l’art. 59 al. 3 LCI et les pergolas (p. 1). S’agissant de ce dernier objet, une note de bas de page précise (p. 5) qu’une pergola est « une construction légère dans un jardin, servant de support à des plantes grimpantes ». Cette mention est accompagnée de deux photographies d’installations comprenant des lamelles orientables, avec la précision que ce type de constructions est considéré comme une pergola et non comme un couvert.

41.         La chambre administrative se fonde, de jurisprudence constante, sur la directive CDPI pour déterminer les surfaces à prendre en compte à ce titre, (ATA/93/2021 du 26 janvier 2021 consid. 9d et 10 ; ATA/1104/2020 du 3 novembre 2020 consid. 3d et 4).

42.         Les directives n’ont pas force de loi et ne lient ni les administrés, ni les tribunaux, ni même l’administration. Elles ne dispensent pas cette dernière de se prononcer à la lumière des circonstances concrètes du cas d’espèce. Par ailleurs, elles ne peuvent sortir du cadre fixé par la norme supérieure qu’elles sont censées concrétiser. En d’autres termes, à défaut de lacune, elles ne peuvent prévoir autre chose que ce qui découle de la législation ou de la jurisprudence (ATF 141 II 338 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_522/ 2012 du 28 décembre 2012 consid. 2.3). Le juge peut toutefois en tenir compte lorsqu’elles permettent une application correcte des normes légales dans un cas concret (cf. ATA/25/2022 du 11 janvier 2022 consid. 3g).

43.         Dans le cadre de l’application de l’art. 3 al. 3 RCI, la jurisprudence a déjà été amenée à préciser que les surfaces déterminantes étaient celles de l’emprise au sol d’une construction (ATA/927/2021 du 7 septembre 2021 consid. 3b et les références citées).

44.         Dans un arrêt du 9 mai 2023, le Tribunal fédéral a confirmé la jurisprudence de la chambre administrative (ATA/437/2023 précité consid. 6 ; ATA/791/2022 du 9 août 2022), selon laquelle une piscine extérieure non couverte, quelle que soit sa surface, est exclue du champ d'application de l'art. 3 al. 3 RCI et n’entre en conséquence pas dans le calcul des CDPI (arrêt du Tribunal fédéral 1C_494/2022).

45.         En l'espèce, aucune des parties ne conteste que le garage (50 m2) et le pool-house (37 m2) constituent des CDPI, de sorte que cette qualification ne sera pas remise en doute par le tribunal de céans. S'agissant de la piscine, bien qu'elle soit d'une dimension de 50 m2, celle-ne n'est pas à qualifier de CDPI, conformément à la jurisprudence tant de la chambre administrative que celle du Tribunal fédéral.

Ainsi, la surface totale des CDPI du projet s'élève à 87 m2, de sorte que les limites imposées par l'art. 3 al. 3 RCI. En effet, ni la limite de 8% de la surface de la parcelle, soit 87.92 m2 (8% x 1'099 m2) ni celle des 100 m2 n'est atteinte. Le grief sera écarté.

46.         Les recourants prétendent que le projet violerait la clause d'esthétique.

47.         Selon l'art. 15 al. 1 LCI, le département peut interdire ou n'autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur nuirait au caractère ou à l'intérêt d'un quartier, d'une rue ou d'un chemin, d'un site naturel ou de points de vue accessibles au public.

Sa décision se fonde notamment sur le préavis de la CA ou, pour les objets qui sont de son ressort, sur celui de la CMNS. Elle tient compte également, le cas échéant, de ceux émis par la commune ou ses services compétents (art. 15 al. 2 LCI).

48.         L'art. 15 LCI ne limite pas la possibilité de refuser un projet de construction ou de lui imposer des modifications aux seules situations dans lesquelles ce projet interagit avec un objet protégé au sens de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 4 juin 1976 (LPMNS - L 4 05), qu'il s'agisse par exemple d'un bâtiment ou d'un site. Comme l'indique la lettre de cette disposition, il suffit que, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur, le projet entraîne un impact nuisible sur le caractère ou l'intérêt d'un quartier, d'une rue ou d'un chemin, d'un site naturel ou de points de vue accessibles au public.

49.         La clause d'esthétique de l'art. 15 LCI fait appel à des notions juridiques imprécises ou indéterminées, dont le contenu varie selon les conceptions subjectives de celui qui les interprète et selon les circonstances de chaque cas d'espèce. Ces notions laissent à l'autorité une certaine latitude de jugement. Lorsqu'elle estime que l'autorité inférieure est mieux en mesure d'attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, l'autorité de recours s'impose alors une certaine retenue. Il en va ainsi lorsque l'interprétation de la norme juridique indéterminée fait appel à des connaissances spécialisées ou particulières en matière de comportement, de technique, en matière économique, de subventions et d'utilisation du sol, notamment en ce qui concerne l'esthétique des constructions (ATA/896/2021 du 31 août 2021 consid. 4b ; ATA/155/2021 du 9 février 2021 consid. 6b).

50.         L'art. 15 LCI reconnaît au département un large pouvoir d'appréciation. Ce dernier n'est limité que par l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation (ATA/1065/2018 du 9 octobre 2018 consid. 3e et la référence citée). Constitue un abus du pouvoir d'appréciation le cas où l'autorité reste dans le cadre fixé par la loi, mais se fonde toutefois sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et l'égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 137 V 71 précité ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème éd., 2018, p. 179).

51.         En l'espèce, le projet a été préavisé favorablement par la CA en date du 31 mai 2022, sans que celle-ci n'émette d'observations, après que cette instance ait sollicité des modifications du projet par préavis du 5 mai 2022, lequel questionnait notamment l'agrandissement avec une toiture plate, dans la recherche d'une harmonie architecturale d'ensemble. Force est ainsi d'admettre que celle-ci a examiné minutieusement le projet avant de rendre son préavis favorable sans observations. Il ne faut également pas perdre de vue que sous l'angle de l'art. 15 LCI, le préavis de la CA revêt une importance prépondérante. Au demeurant, les recourants n'apportent pas d'éléments convaincants qui permettraient de douter de l'objectivité de l'appréciation de la CA, ou qui laisseraient entendre que celle-ci se serait basée sur des éléments erronés ou étrangers au but de la loi.

En définitive, il appert que les recourants entendent avant tout substituer leur propre appréciation subjective à celle de l'instance spécialisée, sans que rien ne permette de penser que le département, en se fondant sur le préavis de la CA, aurait fait un usage excessif ou abusif de son pouvoir d'appréciation en refusant de délivrer l'autorisation de construire querellée. Le grief sera écarté.

52.         Enfin, les recourants sont d'avis que la parcelle ne serait pas équipée, dès lors qu'il n'existerait aucune servitude en faveur des intimés au sujet du raccordement à la canalisation au niveau de la parcelle n° 2______.

53.         Conformément à l'art. 22 al. 2 let. b LAT, l'autorisation de construire n'est délivrée que si le terrain est équipé. Tel est le cas selon l'art. 19 al. 1 LAT lorsqu'il est desservi d'une manière adaptée à l'utilisation prévue par des voies d'accès et par des conduites auxquelles il est possible de se raccorder sans frais disproportionnés pour l'alimentation en eau et en énergie, ainsi que pour l'évacuation des eaux usées.

54.         Selon la jurisprudence, l'exigence de garantie juridique ne s'étend pas en matière de conduites de canalisation. D'une part, car elle ne ressort pas du texte de l'art. 19 al. 1 LAT et d'autre part, le raccordement n'est pas exigé de façon absolue. Le principe de la proportionnalité permet une certaine flexibilité, notamment lorsqu'un équipement en énergie ou en eau n'est pas obligatoirement nécessaire pour des raisons de police ou environnementales. Si l'analyse globale répond aux exigences de l'art. 19 al. 1 LAT, l'absence d'inscription d'une servitude de canalisation au registre foncier ne permet pas de considérer que le terrain ne serait pas équipé au sens de cette disposition (arrêt du Tribunal fédéral 1C_471/2020 du 19 mai 2021 consid. 3.2 et les références citées).

55.         Il suffit que le terrain soit équipé au moment de la réalisation de la construction projetée (« spätestens im Zeitpunkt der Realisierung »), étant précisé que les autorités communales et cantonales disposent en ce domaine d'un important pouvoir d'appréciation. Il faut simplement que ces dernières s'assurent que la réalisation de l'équipement soit garantie en fait et en droit de sorte qu'il n'existe aucun risque que des constructions soient érigées nonobstant un sous-équipement durable. Il leur est notamment possible d'octroyer une autorisation de construire assortie de la condition suspensive selon laquelle cette autorisation n'entrera en force que lorsque le principe et la forme de l'équipement seront assurés sur le plan juridique (Éloi JEANNERAT, Commentaires pratiques LAT : planifier l'affectation, 2016, ad. art. 19 n. 36 p. 555).

56.         Tout comme le Tribunal fédéral, la doctrine ne prévoit pas de garantie sur le plan juridique à propos des conduites d'amenée en eaux et d'évacuation des EU, contrairement à la problématique de la voie d'accès suffisant. Il convient uniquement de procéder à une analyse globale de la situation (Éloi JEANNERAT, op. cit., ad. art. 19 LAT n. 36 et ss ; ATA/439/2021 du 20 avril 2021).

57.         Selon les principes généraux du droit, il n'appartient pas à l'administration de s'immiscer dans les conflits de droit privé pouvant s'élever entre un requérant et un opposant. La législation genevoise en matière de police des constructions a pour seul but d'assurer la conformité des projets présentés aux prescriptions en matière de constructions et d'aménagements, intérieurs et extérieurs, des bâtiments et des installations. En revanche, elle n'a pas pour objet de veiller au respect des droits réels, notamment des servitudes (art. 3 al. 6 LCI ; cf. not. ATA/169/2020 du 11 février 2020 consid. 7b ; ATA/1724/2019 du 26 novembre 2019 consid. 8 ; ATA/97/2019 du 29 janvier 2019 consid. 5 ; ATA/517/2018 du 29 mai 2018 consid. 5g ; ATA/166/2018 du 20 février 2018 consid. 5 et les arrêts cités ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 1C_416/2012 du 6 décembre 2012 consid. 5 in fine).

58.         En l'espèce, selon le plan des canalisations versé au dossier, il appert que les raccordements aux canalisations seront exécutés en système séparatif comme l'impose le préavis de l'OCEau du 12 avril 2022, lequel prévoit un raccordement au système public d'assainissement desservant la parcelle n° 11______. En outre, il ressort manifestement dudit plan que les nouvelles canalisations induites par le projet seront raccordées à un réseau de canalisations préexistant, déjà utilisé pour le bâtiment principal. En outre, le raccordement lié à l'agrandissement projeté et à l'installation du pool-house ne devrait pas entraîner d'importants débits d'eaux supplémentaires, de sorte que l'impact du projet sur le réseau de canalisations existant sera à l'évidence de faible importance.

Ainsi, il ressort de l'analyse globale de la situation que rien ne permet de penser que la parcelle ne serait pas équipée au niveau des conduites au sens de l'art. 19 LAT, étant rappelé que l'autorisation de construire litigieuse réserve expressément le droit des tiers. Le grief sera écarté.

59.         Mal fondé, le recours est rejeté.

60.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les époux A______ et B______, pris conjointement et solidairement, qui succombent, sont condamnés au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 1'100.-.

61.         Vu l'issue du litige, une indemnité de procédure de CHF 2'500.-, à la charge conjointe et solidaire des époux A______ et B______, sera allouée aux époux C______ et D______ (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA).


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 14 septembre 2022 par Madame A______ et Monsieur B______ contre la décision du département du territoire du 28 juillet 2022 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de Madame A______ et Monsieur B______, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 1'100.-, lequel est partiellement couvert par l'avance de frais ;

4.             condamne Madame A______ et Monsieur B______ à verser à Madame C______ et Monsieur D______ une indemnité de procédure de CHF 2'500.- ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Sophie CORNIOLEY BERGER, présidente, Bénédicte MONTANT et Damien BLANC, juges assesseurs.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Sophie CORNIOLEY BERGER

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière