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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1316/2023

JTAPI/253/2024 du 21.03.2024 ( LCI ) , REJETE

ATTAQUE

Descripteurs : QUALITÉ POUR RECOURIR;DROIT D'ÊTRE ENTENDU
Normes : LPA.60.al1.letb; Cst; LCI.14; LCI.121; AEAI.35; AEAI.36; AEAI.37; LCI.109.al1; ODAIOUs; HACCP; LPMNS.9; LCI.90.al1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1316/2023 LCI

JTAPI/253/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 21 mars 2024

 

dans la cause

 

A______ SA, représentée par Mes David BENSIMON et Morgane DE LA GANDARA, avocats, avec élection de domicile

 

contre

 

B______ SA, représentée par Me François BELLANGER, avocat, avec élection de domicile

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

 


EN FAIT

1.             B______SA, dont le but est « l’acquisition, la possession, la location et la vente d’immeubles à l’affectation exclusivement commerciale », est propriétaire, depuis le ______ 2019, de 'la parcelle n° 1______ de la commune C______, d’une surface de 1’034 m2.

2.             Cette parcelle se situe entre 1a______[GE], 1b______[GE] et 1c______[GE]. Elle se trouve par ailleurs dans le périmètre d’un site inscrit à l’inventaire des sites construits d’importance nationale à protéger en Suisse
(ci-après : ISOS) avec l’objectif de sauvegarde A, sauvegarde de la substance : il est retenu que ledit site a certaines qualités spatiales et des hautes qualités historico-architecturales.

Deux bâtiments de six étages y sont érigés : le n° 2______, d’une surface au sol de 628 m2 et destiné à des bureaux, et le 3______, d’une surface au sol de 406 m2 et accueillant des commerces. Ils appartiennent à un ensemble protégé du début du XXème siècle (4______) qui se compose des immeubles 1d______[GE], 1c(a)______[GE] et 1a(a)______[GE].

En outre, 1c ______[GE] est inscrit à l’inventaire sous la référence 5______.

3.             A______ SA, dont le but est « l’exploitation de discothèques, cafés, restaurants et établissements publics, prise de participation dans tous commerces ou sociétés poursuivant des buts analogues, et activités liées à la communication et l’événementiel », est locataire depuis le 1er novembre 2016 d’un local commercial situé dans 1c______[GE], à l’adresse 1a(b)______[GE], portant sur les surfaces suivantes :

-          rez-de-chaussée d’environ 205 m2 ;

-          1er étage d’environ 93 m2 + terrasse, sous réserve des autorisations nécessaires ;

-          2ème étage d’environ 95 m2 ;

-          Sous-sol d’environ 255 m2.

Ces locaux accueillent un café-restaurant, ouvert le midi et le soir, et un lounge au rez-de-chaussée et au 1er étage, ainsi qu’un cabaret-dancing au sous-sol, exploités sous les enseignes « D______ » et « E______ ».

À teneur du contrat de bail, conclu pour une durée de dix ans renouvelable,
« le locataire est seul responsable de l’obtention des autorisations nécessaires aux travaux et à son activité, afin d’être en parfaite conformité avec la législation en vigueur ». Il y est par ailleurs précisé que « toutes les installations commandées par le locataire devront être conformes aux normes anti-feu » (art. 8 et 13 des Dispositions particulières du contrat de bail).

Le contrat de bail est accompagné de deux annexes comportant les plans du
rez-de-chaussée et le plan du 1er étage ainsi que de la terrasse, visés par les parties.

4.             La régie « F______ » est en charge de la gérance de ces immeubles.

5.             Le ______ 2016, le département a délivré à A______ SA l’autorisation de construire en procédure accélérée APA 6______ portant notamment, sur la transformation de locaux commerciaux en vue de l’exploitation du restaurant D______ et sur l’installation de canaux de ventilation en façade.

Il y était précisé que les conditions figurant dans les préavis des différents services, notamment celui de la police du feu du 4 août 2016 imposant le respect des mesures définies dans le concept de sécurité incendie G______ SA du 14 juin 2016, devaient être strictement respectées. De même, dite autorisation était conditionnée à la prise de toutes les précautions nécessaires pour assurer la sécurité des occupants et la salubrité de l’immeuble.

6.             Le ______ 2017, le département lui a par ailleurs délivré l’autorisation de construire complémentaire APA 6______/2 portant sur la suppression de l’ascenseur qui figurait dans le projet initial, la transformation d’une fenêtre en porte-fenêtre, l’aménagement du sous-sol et la modification de la terrasse.

Il y était précisé que les conditions figurant dans les préavis des différents services, notamment celui de la police du feu du 1er décembre 2016 devaient être strictement respectées. Il en allait de même des mesures définies dans le préavis de la police du feu du 4 août 2016 émis dans le cadre de l'APA 6______/1 et des conditions supplémentaires spécifiquement prévues.

7.             Courant octobre 2020, le bureau d’architecte H______ SA, au nom et pour le compte de B______ SA, a déposé une demande d’autorisation de construire portant sur la « démolition de la marquise existante et réfection des
façades / transformation et aménagements intérieurs rez-de-chaussée et 1er étage en commerces et du 2ème au 6ème en surfaces administratives
(banque privée) / réfection du sous-sol ».

Cette requête a été enregistrée sous la référence DD 7______/1.

8.             Dans le cadre de l’instruction de cette requête, la police du feu a notamment rendu un préavis favorable, le 21 juin 2021, sous conditions suivantes :

« 1. les mesures définies dans le concept de protection incendie établi le 7 mai 2021 par I______ soient respectées. Il en est de même pour les plans de sécurité des niveaux, accompagnant ledit concept.

Pour ce qui n’est pas précisément défini par le concept susmentionné ou par les plans de sécurité, compartimentage, évacuation etc… et/ou le présent préavis, les prescriptions incendie de l’AEAI [Association des établissements cantonaux d’assurance incendie], version 2015-2017, doivent être appliquées.

2. Selon les plans déposés et les informations globales transmises, le projet est classifié en degré 2 d’assurance qualité conformément à la Directive de l’AEAI "Assurance qualité en protection incendie" 11-15fr ».

9.             Dite autorisation a été délivrée le ______ 2021 et publiée dans la Feuille d’avis officielle (ci-après : FAO) du même jour.

Il y était indiqué que les conditions figurant dans les préavis - dont ceux de la police du feu du 21 juin 2021, du service de la consommation et des affaires vétérinaires du 9 novembre 2020, ainsi que du service des monuments et sites
(ci-après : SMS) du 9 juillet 2021 - devaient être strictement respectées et faisaient partie intégrante de l’autorisation.

10.         Le 18 février 2022, A______ SA, sous la plume de son conseil, a interpellé la police du feu, s’étant rendue compte que les issues de secours du restaurant et du night-club, ainsi que le couloir des communs étaient obstrués à cause du chantier en cours dans l’immeuble. En outre, la porte anti-feu, installée initialement dans la voie de fuite, avait été remplacée par une simple porte en bois. Soucieuse de la sécurité de sa clientèle et de ses employés, notamment, elle l’invitait dès lors à s’assurer que les travaux en cours étaient conformes, précisant avoir déjà interpellé la bailleresse.

11.         Par décision du 25 février 2022 déclarée exécutoire nonobstant recours, le département, relevant qu’un ou plusieurs éléments contrevenant aux prescriptions de protection incendie de l’AEAI, du règlement sur les chantiers du 30 juillet 1958 (RChant - L 5 05.03) et de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) avaient été constatés dans le cadre du chantier de la DD 7_______/1, a ordonné à A______ SA l’interdiction immédiate d’exploiter le night-club « E______ » et ce jusqu’à la mise en conformité des sorties de secours. L’impraticabilité des sorties de secours était notamment constatée. Au surplus, il conditionnait l’exploitation du restaurant à la mise en place, sans délai, de plusieurs points destinés, en substance, à mettre en conformité les sorties de secours et à supprimer les conteneurs à ordures ou autre charge thermique.

12.         Le 1er mars 2022, sous la plume de son conseil, A______ SA a mis en demeure B______ SA d’exécuter tous les travaux de mise en conformité d’ici au 3 mars 2022 à 12h00.

13.         Le 2 mars 2022, sous la plume de son conseil, B______ SA a informé A______ SA avoir pris toutes les mesures requises pouvant l’être et que les autres mesures, notamment l’aménagement de l’ensemble des voies de fuites, étaient en cours.

14.         Le 22 octobre 2022, B______ SA a déposé une demande d’autorisation de construire complémentaire (enregistrée sous la référence DD 7______/3) portant sur les « démolition de la marquise existante et réfection des façades - transformation et aménagements intérieurs rez-de-chaussée et premier étage en commerce et du deuxième au sixième étage en surfaces administrative (banque privée) - modifications diverses du projet initial et des installations techniques », à l’adresse 1a(c)______[GE].

Dans ce cadre, les architectes du projet ont indiqué, à l’intention de la police du feu, prévoir notamment les quatre mesures suivantes :

-          mise en place d’un réseau sprinkler le long de la vitrine intérieure du D______ pour assurer un rideau d’eau en cas de sinistre à l’intérieur du restaurant ou dans 1c______[GE] pour protéger les personnes concernées et éviter une propagation du feu du passage vers le restaurant ou inversement ;

-          mise en place d’un compartimentage local respectueux des exigences de la police du feu pour le monobloc de ventilation au 3ème étage ;

-          mise en place d’un accès permanent pour le service du feu, inexistant jusqu’alors, au monobloc ;

-          modification de la cuisine du restaurant du 2ème étage par la création de deux voies d’évacuation verticales, soit le couloir et l’escalier de secours.

15.         Le 21 décembre 2022, la police du feu a pris note de ces changements et requis une version modifiée du concept de protection incendie déposé dans le cadre de l’autorisation principale.

16.         Le 3 février 2023, les architectes de B______SA ont transmis le nouveau concept de protection incendie mis à jour, avec en surbrillance les modifications apportées par rapport à la version autorisée du 7 mai 2021, à savoir notamment :

« p. 1 : 1.1 Contexte : (…) L’autorisation de construire a été obtenu le ______ 2021 sous la référence DD 7______/1. Des modifications de projet ont eu lieu qui aboutissent à la présente demande complémentaire.

p. 4 : 2.2 Description du projet - Nombre de voies d’évacuation : Pour évacuer la cuisine professionnelle du 2ème étage, il faut emprunter l’escalier intérieur du restaurant pour rejoindre les voies de fuite pour arriver au 1b______[GE].

p. 14 : 7.2 Compartimentage coupe-feu : (…) 1c______[GE] est un ouvrage classé. La commission des monuments, de la nature et des sites (ci‑après : CMNS) impose une construction à l’identique d’une partie de la vitrine du commerce (cf. plan de protection incendie). Les cadres des vitrines devant être restauré et étant très fin, il n’est pas possible d’obtenir un vitrage EI30 mais EW60. Pour les autres commerces du 1c______[GE], la CMNS avait également cette demande (…) », rappelant la nécessité de prévoir une ligne de sprinkler le long des fenêtres pour créer une barrière d’eau en cas de sinistre dès lors que le 1c______[GE] était considéré par la Police du feu comme une voie d’évacuation verticale.

« p. 19 : 8.4.1 Evacuation de la cuisine du restaurant du 2ème étage : (…) L’évacuation se fait en transitant par le 1er étage du restaurant puis en empruntant une nouvelle vie de fuite verticale pour aboutir dans 1b______[GE].

8.4.2 : Voies de fuites du commerce : La capacité maximale sera limitée à 300 personnes sur l’ensemble du commerce. Chaque niveau sera limité à 200 personnes. Les portes des issues de secours vers 1b______[GE] mesurant 1,2 cm.

8.4.3 : Portes existantes de la cage d’escaliers centrale du niveau 4 et 5 : En raison de leur caractère patrimonial, les portes existantes de la cage d’escaliers centrale au niveau 4 et 5 seront conservées. Celles-ci seront constamment bloquées mécaniquement en position ouverte. Des nouvelles portes coupe-feu coulissantes avec fonction swing-out seront mises en place.

p. 22 : 11 : Installations sprinklers : (…) L’installation sprinkler hors protection des vitrines du commerce sera faite en fonction du preneur, si besoin.

12 : Installation de détection incendie : (…) Le commerce sera aménagé au gré du preneur.

p. 23 : 13 : Installations d’extraction de fumée et de chaleur – 13.2 Surfaces commerciales : La surface commerciale étant supérieure à 600 m2, une installation d’extraction de fumée et de chaleur est nécessaire pour la surface commerciale à raison de 8 renouvellement horaires. Le débit est de 13’500 m3/h.

p. 24 : 17 : Installations aérauliques : (…) Le monobloc du restaurant est actuellement situé au 3ème étage du bâtiment et reste en place. Une convention « d’utilisation et de passage » a été établie entre le propriétaire et la banque afin de garantir l’accès à ce local par les secours. Il sera équipé de cylindre SI ainsi que toutes les portes qui permettent d’accéder à ce local depuis l’entrée du bâtiment.

p. 29 : Synthèse et engagement : Le bâtiment 1a(c)______[GE] subit d’important travaux de rénovation sauf dans le restaurant. Une nouvelle voie de fuite verticale est créée pour l’évacuation de la cuisine du restaurant au 2ème étage et 1er étage du D______ ainsi que de l’arcade commerciale ».

Les plans de protection incendie étaient également mis à jour pour refléter les changements du projet.

17.         Dans le cadre de l’instruction de cette requête, la police du feu a rendu un préavis favorable le 1er mars, exigeant le respect du concept de sécurité incendie et des plans l’accompagnant. Tous les autres préavis rendus, soit en particulier celui du SMS du 16 février 2023 suivant une demande de complément de la CMNS du 13 décembre 2022, étaient favorables sans observations, avec souhaits
et/ou conditions.

18.         En date du ______ 2023, le département a délivré l’autorisation complémentaire DD 7______/3, laquelle a été publiée dans la FAO du même jour.

19.         Par acte du 17 avril 2023, sous la plume de ses conseils, A______ SA a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après: le tribunal) contre cette autorisation, concluant, sur mesures superprovisionnelles et provisionnelles, à ce que soit ordonnée la suspension immédiate des travaux de la DD 7______/3, à ce qu’il soit fait interdiction à B______ SA d’entreprendre les modifications découlant de cette dernière et à ce que soit ordonnée l’évacuation immédiate de toutes personnes se trouvant au sein des locaux situés dans les bâtiments nos 2______ et 3______, occupés par la J______ (ci-après : la banque), sous la menace des peines et sanctions de l’art. 292 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0).

Pour le surplus, elle a conclu, préalablement, à ce qu’il soit dit que le recours était assorti de l’effet suspensif, à l’audition des parties et de Monsieur K______, directeur du restaurant, à ce que l’entier du dossier soit versé à la procédure, à l’établissement d’un rapport d’expertise indépendant analysant les voies de fuite prévues dans le cadre de la DD 7______/3 querellée, notamment celle de la cuisine qu’elle exploitait au 2ème étage, au regard des dispositions applicables en la matière, et à ce qu’un transport sur place soit ordonné. Principalement, l’autorisation querellée devait être annulée, subsidiairement, la cause renvoyée au département pour nouvelle décision, le tout sous suite de frais et dépens.

Le prononcé de mesures provisionnelles se justifiait par le fait que l’intimée avait commencé des modifications faisant objet de l’autorisation querellée. Ainsi, notamment, les voies de fuite de la cuisine qu’elle exploitait au 2ème étage avaient été définitivement condamnées, conformément au résultat auquel souhaitait parvenir B______ SA dans le cadre de sa demande complémentaire. Les travaux de modification de la toiture semblaient également être en cours. À cela s’ajoutait que la banque avait commencé à emménager dans les locaux - des employés étaient déjà présents sur les lieux - qu’elle louait à l’intimée, alors que le permis d’occuper n’avait pas été délivré. Au regard de l’absence de ladite autorisation et des manquements constatés vis-à-vis des normes de protection incendie, il apparaissait urgent, aux fins d’assurer la sécurité de tout un chacun, d’exiger l’arrêt des travaux et l’évacuation des locaux loués par la banque.

Le recours était recevable dans la mesure où ses intérêts étaient directement touchés par l’autorisation querellée dès lors que les modifications apportées à l’autorisation de base concernaient les locaux qu’elle louait, ainsi que les bâtiments dans lesquels ils se situaient. Qui plus était la modification des mesures de protection incendie, autorisée dans le cadre de la demande complémentaire, avait pour conséquence de prétériter la sécurité de sa clientèle et de ses employés, dans le cadre de l’exploitation du restaurant. Elle ne pouvait imaginer que ses cuisines soient soustraites d’une voie de fuite essentielle en cas d’incendie. L’autorisation querellée avait aussi pour conséquence de supprimer les accès prévus aux personnes à mobilité réduite au sein de ses locaux. En effet, il n’était plus possible d’emprunter l’ascenseur central pour se rendre, par exemple, au cabaret-dancing E______. Elle se retrouverait également confrontée à des problématiques d’hygiène et de sécurité alimentaire puisqu’elle ne disposerait plus que d’une voie d’accès pour transporter les denrées alimentaires au travers d’un passage annexe à celui utilisé pour le transport des plats cuisinés et des déchets. Elle ne disposait aujourd’hui plus que d’une voie d’accès à ses stocks et sa cuisine.

Au fond, la décision entreprise violait l’art. 14 LCI. Ses locaux en location accueillaient un restaurant et un cabaret-dancing qui, par définition, étaient ouverts au public. Ceux-ci étaient disposés sur trois étages et la cuisine avait été installée, conformément à l’APA 6______, au 2ème étage. Dans le cadre de cette autorisation de construire, le département avait requis qu’elle installe, au sein de la cuisine, une voie de fuite annexe à l’escalier central reliant le 2ème au 1er étage du restaurant. Cette voie de fuite permettait aux collaborateurs de cet établissement d’emprunter, en cas d’incendie, un escalier commun aux bâtiments. Ce dernier avait fait l’objet d’une démolition dans le cadre de l’autorisation de base. Lors du dépôt de la demande d’autorisation DD 7_______/1, qui prévoyait une nouvelle disposition des voies de fuite des bâtiments nos 2______ et 3______, les autorités compétentes avaient sollicité la création d’une nouvelle voie de fuite verticale, donnant sur 1b______[GE] et partant directement des cuisines du restaurant. L’autorisation querellée avait néanmoins autorisé la suppression de toute voie de fuite au 2ème étage de ses locaux malgré la présence d’une cuisine professionnelle. En conséquence, les personnes se trouvant à cet étage devraient emprunter l’escalier central - qui était une voie d’utilisation entre le restaurant et la cuisine dépourvue de bloc et de porte anti-feu - afin d’atteindre la voie de fuite du 1er étage, sise à un emplacement décalé. Cette configuration n’était à l’évidence pas conforme aux normes de protection incendie et, dès lors, ne remplissait pas les conditions de sécurité qu’exigeait l’exploitation du restaurant et la protection du public. Preuve en était que la police du feu avait, lors de l’étude des deux demandes d’autorisation antérieures, exigé que la cuisine dispose d’une voie de fuite particulière.

De plus, les instances de préavis compétentes n’avaient pas procédé à une analyse des normes AEAI applicables, se contentant de renvoyer auxdites normes et au rapport de I______. Or, ce rapport était imprécis, n’indiquant pas clairement que le 2ème étage du restaurant devrait se contenter d’une seule voie d’utilisation en guise de voie de fuite. Elles n’avaient pas non plus procédé à un calcul des distances des voies d’évacuation. Or, l’embouchure d’évacuation du 1er étage, telle qu’autorisée, n’était pas d’une largeur suffisante. Dans la mesure où les conditions de sécurité requise pour l’exploitation du restaurant et pour assurer la protection du public étaient bafouées, l’autorisation devait être annulée.

Cette dernière violait également l’art. 121 al. 1 LCI, la norme de protection incendie de l’AEAI du 1er janvier 2015 (ci-après : norme AEAI) et les directives AEAI, obligatoires et directement applicables à titre de droit intercantonal et cantonal (art. 121 al. 2 LCI notamment). Ces norme et directives fixaient des exigences en matière de voie d’évacuation (cf. art. 35 ss) et de sauvetage.
Or, en l’espèce, l’autorisation querellée n’imposait plus de voie d’évacuation directe depuis le 2ème étage, alors que celle-ci avait été spécifiquement requise dans le cadre de l’APA 6______, puis lors de l’autorisation de base. Ni le rapport d’expert, ni les plans ne faisaient état des informations nécessaires pour vérifier leur respect.

En outre, tant dans le cadre de l’autorisation de base que dans celui de l’autorisation querellée, l’intimée avait fait fi des prescriptions applicables aux accès à prévoir pour les personnes à mobilité réduite. Les art. 209 al. 2 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012
(Cst-GE - A 2 00), 109 al. 1 LCI, 2 al.1 et 8 al. 1 du règlement concernant l’accessibilité des constructions et installations diverses du 29 janvier 2020
(RACI - L 5 05.06) avaient dès lors été violés.

En supprimant le passage utilisé jusqu’alors en vue d’apporter les denrées alimentaires en cuisine, de manière sécurisée, la décision litigieuse violait aussi l’ordonnance du 23 novembre 2005 sur les denrées alimentaires et les objets usuels (ODAIOUs - RS 817.02) et les normes HACCP [méthode de l’analyse des dangers et des points de contrôle critiques - Hazard Analysis and Critical Control Point(s)]. Elle ne disposait aujourd’hui plus que d’un accès pour parvenir à la cuisine du 2ème étage, de sorte que la configuration souhaitée par B______ SA ne lui permettait plus de respecter les normes applicables en matière d’hygiène alimentaire.

L’art. 9 de la loi sur la protection des monuments, de la nature et des sites du 4 juin 1976 (LPMNS - L 4 05) était violé. Les bâtiments visés par l’autorisation querellée figuraient à l’inventaire. L’intérêt à les protéger était donc prépondérant sur celui consistant, notamment, à installer des panneaux solaires et autres éléments techniques de manière visible, ainsi qu’à apporter des modifications à l’enveloppe des bâtiments, notamment par l’agrandissement et l’ajout de fenêtres. En tous les cas, il ne ressortait pas du dossier, que le département et l’intimée aient présenté et discuté des intérêts opposés.

Les modifications importantes envisagées sur les façades des bâtiments, dont l’agrandissement et la modification de certaines fenêtres, ainsi que la mise en place de tuiles sur l’entièreté de la toiture visible apparaissaient enfin contraires à l’art. 90 al. 1 LCI, étant rappelé que les immeubles concernés étaient inscrits dans l’ensemble n° 4______ et représentaient, ensemble, une unité architecturale et urbanistique particulière d’une époque. Cet ensemble devait ainsi demeurer dans le même esprit et, dans toute la mesure du possible, dans l’état dans lequel il se trouvait actuellement.

20.         Par courrier recommandé du 21 avril 2023, le tribunal a accusé réception du recours de A______ SA et refusé les mesures superprovisionnelles sollicitées dans ce cadre, au motif que l’existence d’une situation d’extrême urgence justifiant l’octroi de telles mesures n’avait, à ce stade, pas été démontrée. Il était précisé que la présente décision n’était pas sujette à recours.

21.         Le 2 mai 2023, le département s’est déterminé sur la requête de mesures provisionnelles formulée par A______ SA, indiquant s’y opposer.

La recourante n’indiquait ni l’urgence ni le dommage difficile à réparer qu’elle subirait, étant relevé que les travaux querellés avaient été préavisés favorablement par la police du feu. Ainsi, à titre d’exemple, la condamnation de la voie de fuite de la cuisine au 2ème étage était expressément prévue par l’autorisation de construire litigieuse et l’on ne discernait pas en quoi cela entraînerait un danger. A______ SA ne l’expliquait d’ailleurs pas. L’urgence alléguée, sans aucun élément de preuve, était enfin contredite par le fait que sa requête intervenait environ un mois et demi après la délivrance de l’autorisation de construire litigieuse.

22.         Le 3 mai 2023, la responsable de l’assurance qualité en protection incendie, Madame L______ de I______ a déposé la déclaration de conformité AEAI pour le Concept de sécurité incendie avec une seule remarque concernant la porte coupe-feu du local technique présent au palier intermédiaire de cette voie de fuite, qui était provisoire dans l’attente de la livraison de la porte définitive.

23.         Dans ses observations sur mesures provisionnelles du 8 mai 2023, B______ SA a conclu, préalablement, au rejet de la demande de mesures provisionnelles formée par A______ SA et à ce que cette dernière soit condamnée à verser un montant de sûretés de CHF 5’000’000.- préalablement à l’octroi de tout ou partie des mesures provisionnelles requises, cas échéant. Principalement, elle a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la DD 7______/3, le tout sous suite de frais et dépens.

Le recours était dirigé contre l’autorisation complémentaire DD 7______/3. Or, A______ SA, locataire d’une petite partie du bâtiment visé par cette autorisation, n’était pas touchée par cette dernière qui ne concernait pas le périmètre des surfaces louées. Elle alléguait des prétendues violations en matière de sécurité incendie pour obtenir des mesures provisionnelles totalement injustifiées, qui lui causeraient un préjudice extrêmement important, comme d’ailleurs à son locataire principal, la banque.

Vu l’effet suspensif attaché au recours, l’autorisation complémentaire querellée ne déployait plus d’effet, de sorte que jusqu’à droit connu l’éventuelle poursuite des travaux le serait sans droit, ce que le département serait, cas échéant, à même de sanctionner. Partant, la demande formulée par A______ SA tendant à l’arrêt des travaux à titre de mesures provisionnelles était sans objet. En particulier, les deux conclusions « Ordonner la suspension immédiate des travaux relatifs à l’Autorisation Querellée DD 7______/3 » et « Faire interdiction à B______ SA d’entreprendre les modifications découlant de l’Autorisation Querellée DD 7______/3 » étaient manifestement irrecevables.

À titre de mesures provisionnelles, A______ SA demandait aussi l’interdiction d’utilisation du bâtiment propriété de B______ SA et l’évacuation de la banque, au motif de l’existence de prétendus défauts de sécurité. De telles mesures provisionnelles, fondées sur l’art. 129 LCI, étaient contraires au droit, n’entrant pas dans les compétences du tribunal mais du département. La condition d’une irrégularité au sens de l’art. 131 LCI n’était en outre pas réalisée. La demande de A______ était irrecevable pour ce motif. À supposer qu’elles soient admissibles, les mesures ne remplissaient pas les conditions d’application de l’art. 21 al. 1 LPA. A______ SA invoquait un prétendu intérêt au respect de mesures de sécurité-incendie, sans toutefois avancer aucun élément qui permettrait d’envisager l’existence réelle d’un risque et surtout, le moindre inconvénient pour son établissement. Il n’existait par ailleurs aucun intérêt public justifiant les mesures demandées. À cet égard, le Concept global de sécurité incendie de l’immeuble, entièrement réalisé, avait été validé dans le cadre de la DD 7______/1, en force, et les modifications apportées dans le cadre de la demande complémentaire querellée, très limitées, avaient été expressément validées par la police du feu, dans son préavis favorable du 1er mars 2023.

Les travaux, engagés avec l’octroi de l’autorisation querellée compte tenu de leur caractère indissociable des travaux de l’autorisation principale avaient depuis lors été finalisés. La déclaration de conformité AEAI pour le Concept de sécurité incendie avait été déposée le 3 mai 2023. Il n’existait donc aucun intérêt public à une quelconque mesure provisionnelle.

En deuxième lieu, A______ SA omettait de préciser que la voie de fuite du 2ème étage a été supprimée et remplacée par celle du 1er étage à la fin de l’été 2022. A______ SA en avait été informée le 12 août 2022. Elle avait d’abord contesté la nouvelle voie de fuite, alléguant que cette modification mettrait un terme définitif à son usage de la cage d’escaliers principale du bâtiment et notamment de son ascenseur, ce à quoi il lui avait été répondu en expliquant l’intérêt de la nouvelle voie de fuite pour la sécurité des usagers et en lui rappelant qu’elle n’avait aucun droit, comme locataire, à utiliser l’escalier principal ou l’ascenseur. Elle avait finalement accepté cette nouvelle voie de fuite et la signalétique correspondante dans sa cuisine et l’escalier jusqu’au 1er étage. Cette voie de fuite existait et était ainsi utilisée, d’abord dans une forme provisoire puis avec un aménagement définitif, depuis de nombreux mois, sans que A______ SA n’allègue, jusqu’ici, un quelconque danger.

En troisième lieu et enfin, il paraissait incohérent de sa part de prétendre qu’il y aurait un danger pour les occupants de l’immeuble principal, dont le Concept feu était déterminé par l’autorisation principale DD 7______/1 en force et qu’il n’y aurait en revanche aucun danger pour les clients ou les employés du restaurant D______ qui étaient concernés par la sortie de secours du 1er étage. S’il y avait effectivement un danger, il concernerait d’abord ses clients et employés. La sortie de secours incriminée par A______ SA concernait en effet exclusivement sa partie.

Qui plus était, l’autorisation principale DD 7______/1 prévoyant une sortie de secours directe sur l’extérieur depuis la cuisine du 2ème étage, il aurait suffi de percer une porte permettant l’accès à la sortie de secours par la cuisine. Ces travaux avaient été refusés par A______ SA, ce qui l’avait forcée à réaliser une sortie alternative au premier. La recourante avait donc provoqué la situation qu’elle contestait aujourd’hui. Elle avait de plus construit une installation non conforme aux normes de sécurité incendie pour son monobloc de ventilation et l’avait dissimulé. Cette situation l’avait contrainte à remettre ce local en conformité, ce qui était prévu par l’autorisation complémentaire DD 7______/3. Enfin, l’installation d’une ligne de sprinkler le long de la vitrine du rez s’étant avérée nécessaire pour la sécurité des usagers du 1c______[GE] et des locaux de A______ SA, elle avait proposé de réaliser les travaux à ses frais, durant une période de fermeture du restaurant, et de couvrir une éventuelle perte d’exploitation pendant les quinze jours de chantier, ce que A______ SA avait refusé, la forçant à obtenir un délai d’exécution de la police du feu et à déposer, le 14 mars 2023, une action en obligation de tolérer des travaux prévenant un dommage à l’encontre de A______ SA auprès de la Commission de conciliation en matière de baux et loyers.

En conséquence, les mesures provisionnelles étaient totalement infondées et il n’existait aucun intérêt les justifiant. A______ SA ne pouvait se prévaloir d’aucun intérêt privé et il n’y avait pas plus d’intérêt public, vu le strict respect de toutes les mesures admises par la police du feu. À l’inverse, les mesures demandées lui causeraient un dommage extrêmement important ainsi qu’à la banque. Pas moins de 157 collaborateurs travaillaient désormais sur le site. Si elle ne pouvait plus occuper ses locaux, la banque devrait mettre en place son plan de « business continuity ». Cela causerait un préjudice de plusieurs millions pour trouver les locaux nécessaires, les aménager et transférer toute l’activité en extrême urgence. Ceci, sans tenir compte de son dommage commercial par rapport à sa clientèle. Il était évident qu’elle ferait alors l’objet d’une action en responsabilité. Dans cette mesure, il devait être ordonné à A______ SA, en application de l’art. 21
al. 1 LPA, de verser au préalable un montant de sûretés de CHF 5’000’000.-, si par extraordinaire les mesures provisionnelles devaient être ordonnées. Ce montant correspondait à une partie du dommage pouvant en résulter.

24.         A______ SA a répliqué le 23 mai 2023 aux observations du département et de B______ SA reprenant, en les étayant, ses précédents arguments et conclusions.

Elle avait suffisamment démontré, dans le cadre de son recours, l’urgence liée à la sécurité du système incendie de l’immeuble qui, dans le cadre de l’autorisation querellée, avait fait l’objet de changements importants. À ce jour, elle n’avait reçu aucune information quant à l’avancée des travaux relatifs à la modification du schéma de protection incendie. L’intimée soutenait que ces derniers auraient été effectués. Elle constatait toutefois que des ouvriers et techniciens étaient, encore ce jour, présents sur les lieux et afférés à l’exécution de l’ouvrage. Il y avait ainsi urgence de les interrompre, aux fins de sauvegarder ses intérêts. De même, en l’absence de voie de fuite au 2ème étage du restaurant, il existait un réel danger pour les usagers de l’immeuble dans sa globalité, dont les intérêts prépondérants seraient fortement compromis, en cas d’incendie provenant tant des cuisines que des espaces inférieurs.

L’intimée ayant pris le risque d’entamer les travaux sans attendre l’entrée en force de l’autorisation querellée, ni même, visiblement, sa délivrance, l’on ne percevait pas pour quelle raison elle devrait se voir contrainte à fournir des sûretés. Le dommage allégué n’était en tout état pas démontré. En outre, l’intimée n’avait pas démontré avoir procédé au dépôt de plans conformes à l’exécution, ainsi que de l’attestation de conformité établie par un mandataire professionnellement qualifié auprès du département, préalablement à l’occupation des locaux par la banque. La question de la délivrance d’une autorisation au sens de l’art. 7
al. 4 LCI pouvait également se poser. Elle persistait enfin à soutenir que le concept de protection incendie, tel que validé par la police du feu, n’était pas conforme aux dispositions applicables en matière de sécurité incendie.

25.         Par décision du 12 juin 2023, le tribunal, après avoir rappelé en tant que de besoin que le recours avait effet suspensif, a rejeté la requête de mesures provisionnelles formée par A______ SA (DITAI/253/2023).

26.         Le 20 juin 2023, B______ SA s’est déterminée sur le recours.

Ce dernier était irrecevable, A______ SA ne disposant pas de la qualité pour recourir, puisque l’autorisation contestée n’impliquait aucune intervention dans ses locaux et ne concernait pas le périmètre des surfaces qu’elle louait. En premier lieu, la recourante prétendait que l’autorisation entreprise supprimerait une voie de fuite essentielle en cas d’incendie, ce qui prétériterait la sécurité de sa clientèle et de ses employés. Elle avait toutefois été informée qu’elle ne pourrait plus utiliser cette voie de fuite à partir du 19 août 2022, compte tenu du concept de sécurité global du bâtiment rénové et elle pouvait utiliser, depuis la fin de l’été 2022, la voie d’évacuation empruntant l’escalier au 2ème étage pour accéder au 1er afin de rejoindre les voies de fuites donnant sur 1b______[GE]. Elle ne disposait ainsi d’aucun intérêt actuel à ce que l’autorisation contestée soit annulée, de sorte que sa qualité pour recourir s’agissant de ses deux premiers griefs faisait défaut. Ces derniers devaient être déclarés irrecevables. En second lieu, la recourante prétendait que la décision querellée aurait pour conséquence de lui supprimer la possibilité d’utiliser l’ascenseur central, ce qui empêcherait les personnes à mobilité réduite d’accéder aux locaux qu’elle louait. Cela serait par ailleurs problématique d’un point de vue du respect des normes d’hygiène et de sécurité alimentaire, attendu qu’elle devait disposer d’accès différencié pour transporter les denrées alimentaires. Son contrat de bail n’impliquait cependant pas un droit d’utilisation de l’ascenseur central qui se trouvait en dehors des locaux qu’elle louait. Cette question relevait en tout état de rapport de droit privé sur lequel le tribunal de céans ne saurait entrer en matière. L’autorisation de construire querellée respectait le droit de la construction, attendu qu’un ascenseur était effectivement présent dans le bâtiment. Le fait que la recourante ne puisse plus en disposer ne relevait pas du droit public mais du droit privé. Les deux derniers griefs étaient dès lors aussi irrecevables, faute pour la recourante de disposer d’un intérêt pour recourir au sens du droit public. S’agissant des griefs de violation des art. 9 LPMNS et 90 al. 1 LCI du fait que l’immeuble figurait à l’inventaire et était inscrit dans l’ensemble n° 4______, de sorte que les installations solaires et autres objets techniques ainsi que les modifications des façades porteraient atteinte à l’aspect extérieur du bâtiment, relevaient de l’action populaire et devaient partant être déclarés irrecevables, la recourante n’indiquant pas en quoi elle serait particulièrement touchée par les modifications extérieures du bâtiment et n’exposant pas dans quelle mesure ces installations et modifications lui causeraient un préjudice. Le tribunal était enfin incompétent pour connaître des violations de l’art. 209 al. 2 Cst-GE, de l’ODAIOUs et des normes HACCP.

Au fond, le recours devait être rejeté sous suite de frais et dépens. Elle persistait à s’opposer aux mesures d’instruction requises.

La recourante invoquait la violation des art. 14 et 121 al. 2 LCI au motif que toute voie d’évacuation aurait été supprimée au 2ème étage, ceci en violation des exigences de l’AEAI. Ainsi que cela découlait des plans de protection incendie des 1er et 2ème étages et du Concept de protection incendie de I______ du 30 janvier 2023, une voie d’évacuation était prévue au 2ème étage. En effet, pour évacuer ce niveau, les quelques employés qui occupaient la cuisine devraient emprunter l’escalier se trouvant à l’intérieur du restaurant pour accéder au niveau 1 et rejoindre la voie de fuite verticale permettant d’arriver dans 1b______[GE]. Cette voie d’évacuation avait fait l’objet du Concept de protection incendie précité, avalisé par la police du feu dans son préavis positif du 1er mars 2023. Ledit préavis préconisait aussi que pour tout ce qui n’était pas précisément défini dans le concept de I______, les prescriptions incendies de l’AEAI dans leurs versions 2015-2017 devaient être appliquées. Le 3 mai 2023, la déclaration de conformité devant contrôler que le projet avait été réalisé conformément aux prescriptions incendies AEAI et attestant que le Concept de protection incendie avait bien été respecté, avait été déposée par Mme L______. La voie d’évacuation telle que prévue dans l’autorisation contestée respectait les prescriptions AEAI et le Concept de protection incendie de I______, ainsi que la police du feu l’avait constaté dans son préavis du 1er mars 2023 et d’après la déclaration de conformité du 3 mai 2023. La recourante ne démontrait pas pour quels motifs le département aurait dû s’écarter du préavis de l’autorité spécialisée en matière de protection contre les incendies, de sorte que le tribunal de céans se devait de le suivre également. En tout état, la voie d’évacuation prévue au 2ème étage correspondait à la notion de l’art. 35 al. 1 norme AEAI et il pouvait être aisément constaté à la lecture des plans de protection incendie que les longueurs des voies d’évacuation avaient été respectées. En outre, le chemin le plus court - respectant le concept global de sécurité du bâtiment rénové - à disposition des employés de la cuisine était bien celui empruntant l’escalier interne pour accéder au 1er étage et évacuer sur 1b______[GE]. De plus, contrairement à ce qu’affirmait la recourante, l’art. 37 al. 1 norme AEAI prévoyait expressément que les voies d’évacuation et de sauvetage pouvaient servir de voies de communication.

Les art. 209 al. 2 Cst-GE, 109 al. 1 LCI, 2 al. 1 et 8 al. 1 RACI étaient également respectés, ce que confirmait le préavis positif de la direction des autorisations de construire du ______ 2023. Aucune remarque n’avait en particulier été formulée s’agissant de l’accessibilité des constructions, suivi par le département ; le tribunal ne saurait s’en écarter.

S’agissant enfin du respect des art. 9 LPMNS et 90 al. 1 LCI, le projet avait été modifié conformément aux remarques de la CMNS et un préavis favorable sous condition avait été rendu par le SMS le 16 février 2023. L’autorité spécialisée, dont le préavis était motivé, avait ainsi examiné la conformité de l’autorisation querellée avec les règles prévues dans la LPMNS et la LCI et la recourante ne soulevait aucun élément permettant d’affirmer que le département aurait dû s’écarter de ce préavis obligatoire positif.

Un chargé de pièces a été joint à ces écritures.

27.         Dans ses observations du 20 juin 2023, le département s’en est rapporté à justice s’agissant de la recevabilité du recours, concluant à son rejet sur le fond. Il a transmis son dossier.

Aucune des mesures d’instruction sollicitées n’apparaissait nécessaire.

Au fond, la recourante faisait valoir que le projet enfreindrait l’art. 14 LCI dans la mesure où la modification prévue par la DD 7______/3 ne serait pas conforme aux prescriptions en matière de sécurité incendie et que le projet constituerait donc un danger pour la sécurité des employés de cuisine. Or, les voies de fuite prévues dans l’APA 6______ et dans la DD 7______/1 n’avaient pas été exigées, mais proposées par la police du feu, parmi d’autres solutions possibles, dans les concepts de protection incendie et validées par la police du feu car conformes aux normes applicables. En outre, le projet, soit, spécifiquement pour le 2ème étage, l’abandon de l’escalier extérieur et le passage en cas d’incident feu par l’escalier de liaison avec le 1er étage, avait été examiné par la police du feu, soit l’instance spécialisée et compétente en la matière. Ainsi que cela ressortait de sa demande de complément du 21 décembre 2022, dite instance avait porté une attention particulière aux modifications apportées par la complémentaire et avait demandé que le concept sécurité soit adapté afin de mettre en évidence ces éléments. Cela démontrait à l’évidence, qu’en préavisant favorablement le dossier le 1er mars 2023, la police du feu s’était assurée que ce dernier et son concept de sécurité incendie étaient adéquats et donc que les mesures prévues respectaient bien les normes de protection incendie. Elle avait en outre rappelé que pour ce qui ne serait, par hypothèse, pas défini dans le concept sécurité, les normes AEAI devaient être respectées et exigé que le projet soit suivi et géré par le responsable en protection incendie afin de veiller précisément au respect des prescriptions de l’AEAI. Par ailleurs, il ressortait expressément des plans de protection incendie que le respect de la longueur de la voie d’évacuation avait été examinée. Partant, le projet autorisé ne présentant aucun souci de sécurité pour les utilisateurs du bâtiment et, en particulier, pour les employés de cuisine, aucune violation de l’art. 14 LCI ne saurait être retenue.

La recourante estimait que la construction ne remplirait pas les conditions de sécurité et salubrité mentionnées par l’art. 121 LCI. A nouveau, il convenait de rappeler que le projet avait fait l’objet d’un concept de protection incendie établi par le bureau I______, lequel s’était assuré du respect de l’ensemble des normes utiles. Dit concept avait été examiné et validé par la police du feu. Il en résultait que deux contrôles avaient été réalisés quant à la prise des mesures nécessaires à la sécurité des usagers notamment de la cuisine. Concernant le respect des prescriptions suisses de protection incendie de l’AEAI, lesquelles se composaient de la norme et des directives de protection incendie, il fallait tout d’abord souligner que le local en question entrait dans la catégorie d’un bâtiment administratif, industriel et artisanal, au sens de la directive de protection incendie 16-15, car il concernait moins de 300 personnes. Partant, en vertu de l’art. 3.3.4 de ladite directive, il était admis que l’évacuation se fasse par un local voisin pour autant qu’il se trouve dans la même unité d’utilisation et permette de rejoindre une voie d’évacuation horizontale ou verticale. Ainsi, l’évacuation, en cas de sinistre, des employés de cuisine pouvait parfaitement se faire, comme prévu en l’occurrence, par l’escalier de liaison situé dans la même unité de liaison afin d’atteindre la voie d’évacuation prévue au 1er étage menant directement vers l’extérieur. De telles voies de liaison ne nécessitaient pas de compartimentage coupe-feu ou autre mesures particulières. De plus, pour la même raison, le fait que la voie d’évacuation soit « décalée » ne contrevenait pas aux normes applicables. Seuls environ cinq employés travaillant en cuisine, l’évacuation par l’escalier en question, afin de rejoindre la voie d’évacuation située à l’espace inférieur, apparaissait parfaitement adéquate. Il ressortait en outre des plans de protection incendie que la longueur de 35 m des voies d’évacuation (chiffre 2.4.3 al. 1 Directive AEAI) était respectée. Quant à la largeur de la porte située 1er au étage, laquelle mesurait 87 cm selon les plans, des dérogations étaient possibles dans certaines situations. Or, en l’espèce, il fallait prendre en compte que l’ouverture en question représentait un élément déjà existant et non une nouvelle construction, de plus elle était destinée uniquement à permettre le passage des utilisateurs de la cuisine, soit un nombre très restreint de personnes et elle ne présentait qu’une différence minime de 3 cm. Par conséquent, la police du feu avait estimé que ladite ouverture était adéquate et qu’il serait disproportionné d’en demander sa modification. Le 1er étage comportait par ailleurs une autre voie de fuite pour les autres usagers du 1er étage dont l’ouverture mesurait 120 cm de large.

La recourante arguait ensuite que l’autorisation querellée ne respecterait pas les normes destinées aux personnes à mobilité réduite, car elle et ses usagers ne pourrait plus utiliser l’ascenseur pour atteindre le local situé au sous-sol. En l’espèce, la DD 7______/1 initiale était entrée en force et ne pouvait pas être contestée par le biais de la complémentaire. Quant à la DD 7______/3, elle ne portait ni sur une construction nouvelle, ni sur une transformation ou rénovation importante. Dès lors, l’art. 109 LCI ne s’appliquait pas. En tout état, l’ascenseur était maintenu dans le projet litigieux et un accès était techniquement bel et bien possible pour les personnes à mobilité réduite. Qu’il ne le soit plus pour la recourante ne relevait pas du respect du droit de la construction.

Le grief relatif à la violation de l’ODAIOUs et des normes HACCP, pour autant qu’il soit recevable, devait être rejeté, celles-ci ne lui étant pas applicables et ne constituant pas des prescriptions du droit de la construction mais des exigences pour l’exploitant des lieux (art. 78 ODAIOUs). La lecture qu’en faisait la recourante était au demeurant erronée. En tout état, l’autorisation de construire complémentaire n’apparaissait pas avoir eu d’incidence sur l’accès à la cuisine depuis l’ascenseur central lequel était déjà restreint à la suite de l’autorisation de construire initiale DD 7______/1, en force, et la recourante pourrait toujours se retourner contre le propriétaire sur le plan civil si elle estimait que les conditions pour l’exercice de son activité de restauration n’étaient plus adéquates.

Aucune violation de l’art. 9 LPMNS n’était à déplorer, seul 1c______[GE] et non le bâtiment étant inscrit à l’inventaire. Or, la recourante ne faisait état d’aucun élément portant spécifiquement atteinte aux éléments dignes d’intérêt dudit passage. Ce grief, de portée générale, était en tout état irrecevable.

Il n’en allait pas différemment de l’art. 90 al. 1 LCI, la recevabilité d’un tel grief purement patrimonial, en l’absence d’intérêt en la matière démontré de la part de la recourante, faisait défaut. En tout état, celle-ci n’exposait en aucune façon en quoi les éléments modifiés représenteraient des éléments particulièrement dignes de protection au sens de la disposition précitée, étant rappelé que des rénovations/transformations étaient possibles sur un immeuble inscrit dans un ensemble protégé, seuls les éléments particulièrement dignes de protection devant impérativement être maintenus, et que les préavis de la CMNS et du SMS étaient favorables sous conditions après modification du projet. Des panneaux solaires thermiques ou photovoltaïques pouvaient en outre être autorisés en toiture.

28.         Dans le délai prolongé au 24 juillet 2023 pour sa réplique, la recourante a persisté dans les conclusions de son recours et dans sa requête de mesures probatoires en vue de constater la non-conformité du système de protection incendie prévu par l’autorisation querellée, de se rendre compte des espaces et de la distance à parcourir pour emprunter la voie de fuite du 1er étage et d’avoir la position d’un expert indépendant quant à la légalité et les risques du système de protection incendie autorisé à l’occasion de la demande complémentaire, au regard des normes applicables en matière de police du feu et d’accès aux personnes à mobilité réduite. Il était étonnant, que la présence d’une voie d’évacuation au 2ème étage, exigée à deux reprises, ne soit aujourd’hui plus essentielle.

Contrairement à ce que soutenait les parties intimées, ses locaux étaient directement concernés par l’autorisation querellée. Tant la sécurité que les voies d’accès et d’évacuation desdits locaux étaient des préoccupations essentielles. Par décision du 25 février 2022, le département, relevant notamment qu’elle était dépourvue d’issue de secours en violation de l’APA 9______ et de l’autorisation de construire de base, avait d’ailleurs ordonné la fermeture immédiate du dancing « E______ ». Cette fermeture n’avait donné lieu à aucune indemnisation. ce qui démontrait le peu d’égards de l’intimée.

Elle persistait à considérer que la suppression définitive de toute voie de fuite au sein de ses cuisines, au 2ème étage, au profit d’une seule voie de fuite était problématique, configuration qui s’opposait radicalement et de manière surprenante aux exigences qui lui avaient été imposées dans le cadre de l’APA 9______. L’autorisation querellée entrait ainsi en flagrante contradiction avec l’APA 9______ et les exigences imposées par la police du feu dans ce cadre. Elle joignait des photographies afin d’illustrer la dangerosité de la situation, que la configuration des lieux et l’affectation des locaux venaient encore augmenter. L’incendie survenu au Lignon en juillet 2023 confirmait la dangerosité de ne pas prévoir, comme en l’espèce, de voie de fuite au 2ème étage. La sécurité des locaux n’apparaissait ainsi pas garantie, ce qu’il appartiendrait au tribunal de vérifier.

A cet égard, il découlait des plans de protection incendie établi par I______ que son établissement était « hors étude ». Les exigences en termes de protection incendie n’avaient ainsi pas fait l’objet d’une analyse exhaustive. En outre, bien que certaines longueurs apparaissaient sur les plans quant aux voies d’évacuation envisagées, les cloisons séparant les espaces du 2ème étage n’avaient pas été prises en compte dans ce calcul. Aussi, la longueur séparant l’escalier central de l’issue de secours souhaitée au 1er étage n’était pas indiquée. Le rapport de protection incendie était, à l’évidence, lacunaire concernant ses locaux. À cela s’ajoutait que les plans de la DD 7______/3, dépourvu d’échelle, ne permettaient pas de confirmer les distances retenues par l’architecte de l’intimée pour les voies d’évacuation.

Concernant l’accessibilité à l’établissement, les autorisations de base et complémentaires devaient être analysées globalement, l’une n’allant pas sans l’autre. De plus, c’était dans le cadre de l’autorisation querellée que l’accès à l’ascenseur avait été réservé à la banque locataire, excluant son personnel et sa clientèle de toute utilisation. Les personnes à mobilité réduite se voyaient ainsi privées d’un accès au sous-sol où se situaient notamment les toilettes de l’établissement, sans qu’aucune explication au sens de l’art. 3 al. 1 RACI ne soit donnée.

La DD 7______/3 n’étant pas en force, elle devait enfin toujours pouvoir disposer d’une voie de fuite au sein de ses cuisines du 2ème étage, ce qui n’était pas le cas en raison de l’exécution prématurée des travaux prévus par la demande y relative.

29.         Par duplique du 17 août 2023, le département a persisté dans ses conclusions à la forme, au fond et s’agissant des mesures probatoires sollicitées.

Il n’y avait aucune contradiction ou opposition entre l’autorisation querellée et les exigences posées dans les autorisations précédemment délivrées. Les conditions de sécurité incendie avaient été imposées car elles étaient proposées dans les concepts sécurité et convenaient aux exigences de la police du feu. Il en allait de même de l’aménagement de sécurité prévu dans l’autorisation querellée qui respectait les normes et exigences de sécurité.

Vérification faite auprès de la police du feu, le calcul de la distance à la voie de fuite mentionné sur le plan de sécurité incendie apparaissait correct, une distance de 35 m étant bien respectée jusqu’à la cage d’escalier. La distance jusqu’à la porte coupe-feu située au 1er étage n’était au surplus que d’une vingtaine de mètres. S’agissant des risques soulevés par la recourante en cas d’incendie, l’accumulation de poussières, béton, etc. dans la ventilation relevait de l’entretien des locaux et non du concept sécurité. Quant au risque que le feu se propage du 1er  vers le 2ème étage, renseignements pris auprès de la police du feu, les hottes n’auraient aucune incidence sur la propagation d’un départ de feu à l’étage inférieur, mais uniquement éventuellement sur la fumée. En tout état, le bâtiment était équipé de détection incendie émettant un signal sonore en cas d’une quelconque émission de fumée. Les hottes pourraient au besoin être reliées à la détection incendie et s’arrêter en cas d’alarme feu. La présente configuration n’était enfin pas comparable à celle du Lignon puisque l’on se trouvait dans une seule et même unité d’utilisation alors que pour l’immeuble du Lignon, il s’agissait d’une voie verticale d’évacuation pour plusieurs unités d’utilisation (appartements).

Concernant l’accessibilité à l’établissement, l’autorisation querellée ne prévoyait pas d’intervention dans les locaux de la recourante et l’ascenseur n’était pas localisé dans ces derniers. Son utilisation jusqu’à présent relevait de leur accord privé. Les APA 6______/1 et /2 avaient enfin été délivrées avant l’entrée en vigueur du RACI et, dans la mesure où les travaux visés par l’autorisation litigieuse ne concernaient pas la structure ou les aménagements intérieurs des locaux de la recourante, il ne se justifiait pas d’en exiger le respect pour ceux-ci. Si la recourante souhaitait se mettre aux normes fixées par le RACI, il lui était loisible de déposer une demande d’autorisation de construire pour aménager ses locaux en conséquence.

30.         Dans le délai prolongé au 28 août 2023 pour sa duplique, B______ SA a également persisté dans ses précédentes écritures, s’opposant à nouveau aux mesures probatoires requises.

Aucune lacune du rapport de protection incendie n’était à déplorer. L’intérieur du restaurant était représenté avec ses cloisons sur les plans de protection incendie et la recourante ne prétendait pas que lesdits plans seraient erronés et pas représentatifs de l’aménagement intérieur. Le tracé des voies d’évacuation tenait compte de ces cloisons.

S’agissant de la distance entre l’escalier et l’issue de secours du 1er étage, le tracé de la voie d’évacuation partait du 2ème étage pour arriver au 1er, jusqu’à l’issue de secours. Sur le plan du 2ème étage, il était indiqué que la distance de la voie d’évacuation la plus longue était de 35 m. La distance entre l’escalier central et l’issue de secours du 1er étage était incluse dans ces 35 m, ce que confirmait la mention, au niveau de la sortie de secours sur le plan du 1er étage, « 35 m depuis cuisine ». L’échelle était enfin indiquée en haut à gauche des plans produits.

L’attitude de la recourante était pour le moins contradictoire. Elle se prévalait d’un danger en lien avec la protection incendie mais refusait l’installation des sprinklers.

Les mêmes arguments que le département étaient invoqués s’agissant de l’accessibilité à l’établissement.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 62 à 65 LPA.

3.             La recevabilité d’un recours suppose encore que son auteur dispose de la qualité pour recourir.

4.             La qualité pour recourir est notamment reconnue à toute personne atteinte par la décision attaquée et qui dispose d’un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (art. 60 al. 1 let. b LPA).

Cette notion d’intérêt digne de protection s’interprète à la lumière de la jurisprudence fédérale rendue en application de l’art. 89 al. 1 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110 ; ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_170/2018 du 10 juillet 2018 consid. 4.1 ; ATA/1346/2023 du 12 décembre 2023 consid. 2.2).

D’une manière générale, la jurisprudence et la doctrine n’admettent que de manière relativement stricte la présence d’un intérêt propre et direct lorsqu’un tiers entend recourir contre une décision dont il n’est pas le destinataire
(ATF 133 V 239 consid. 6.3 ; 131 II 652 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_852/2017 du 25 juin 2018 consid. 2.2.2). Il découle d’ailleurs du texte de l’art. 89 al. 1 let. b LTF que le législateur a voulu rendre encore plus stricte la condition de l’intérêt personnel au recours, puisqu’il est précisé que le recourant doit être « particulière-ment atteint » par l’acte attaqué (ATF 137 II 40 consid. 2.3 ; cf. aussi Pierre MOOR/Etienne POLTIER, Droit administratif, vol. II, 2011, pp. 734 s.).

L’intérêt digne de protection, qui ne doit pas nécessairement être de nature juridique, un intérêt de fait étant suffisant (ATF 148 I 160 consid. 1.4 ; 144 I 43 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_91/2023 du 12 février 2024 consid. 1.1), réside dans le fait d’éviter de subir directement un préjudice de nature économi-que, idéale, matérielle ou autre, qui serait causé par la décision entreprise. Il implique que le recourant, qui doit pouvoir retirer un avantage réel et pratique de l’annulation ou de la modification de la décision, doit se trouver dans une relation spécialement étroite et digne d’être prise en considération avec l’objet de la contestation et doit être touché de manière directe, concrète et dans une mesure et avec une intensité plus grandes que la généralité des administrés, de façon à exclure l’action populaire (ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_442/2020 du 4 mars 2021 consid. 1.2.1 ; 1C_382/ 2020 du 16 novembre 2020 consid. 4.1). Tel n’est notamment pas le cas de celui qui n’est atteint que de manière indirecte ou médiate (ATF 138 V 292 consid. 4 ; 133 V 188 consid. 4.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1054/2016, 2C_1059/2016 du 15 décembre 2017 consid. 2.2 ; ATA/988/2016 du 22 novembre 2016 consid. 2d).

Le recours ne sert donc pas à faire contrôler abstraitement la légalité objective de l’activité étatique, mais plutôt à procurer un avantage pratique à la partie recourante. Le simple objectif d’empêcher l’adverse partie d’accéder à un avantage censément illicite ne suffit en outre pas à conférer la qualité pour recourir, si cet objectif ne se rattache pas à un avantage digne de protection pour le recourant (ATF 141 II 307 consid. 6.2 ; 141 II 14 consid. 4.4). Cela signifie notamment que le recours d’un particulier formé dans l’intérêt général et abstrait à la correcte application du droit ou dans l’intérêt de tiers est irrecevable, parce qu’assimilable à une action populaire (cf. ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; 139 II 499 consid. 2.2 ; 138 II 162 consid. 2.1.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_593/2019 du 19 août 2020 consid. 1.2 ; 1C_170/2018 du 10 juillet 2018 consid. 4.1 ; ATA/752/2023 du 11 juillet 2023 consid. 2.2).

5.             S’agissant d’un recourant tiers locataire, il convient d’apprécier l’enjeu de la procédure pour lui, en fonction de sa situation concrète, soit d’apprécier la gravité de l’atteinte apportée par le projet à ses intérêts. Le Tribunal fédéral a jugé que s’il existe un moyen de droit privé, même moins commode, à sa disposition pour écarter le préjudice dont il se plaint, la qualité pour agir fondée sur l’intérêt digne de protection doit lui être niée. Les intérêts du locataire dans ses rapports avec le bailleur sont plus spécifiquement protégés par les dispositions spéciales du droit du bail, complétées, le cas échéant, par certaines règles de droit public cantonal (ATF 131 II 649 consid 3.4 ; ATA/950/2022 du 20 septembre 2022 consid. 2d ; ATA/710/2021 du 6 juillet 2021 consid. 4b).

La qualité pour recourir contre une autorisation de construire des locataires dont les baux n’étaient pas résiliés a été admise, lorsque, si elle était confirmée, ladite autorisation les priverait de la jouissance de locaux situés dans les combles de l’immeuble dont la transformation était projetée. Certains des griefs invoqués portaient sur le gabarit de l’immeuble après travaux et sur les vices de forme ayant affecté la procédure, qui, s’ils devaient se révéler bien-fondés, pourraient abouti à un refus de l’autorisation de construire litigieuse, à l’abandon du projet, voire à un remaniement substantiel de celui-ci, et à la mise en œuvre d’une nouvelle enquête (arrêt du Tribunal fédéral 1C_61/2011 du 4 mai 2011 ; ATA/710/2021 du 6 juillet 2021 consid. 4c ; ATA/985/2020 du 6 octobre 2020 consid. 3c ; ATA/1755/2019 du 3 décembre 2019 consid. 3b ; ATA/181/2013 du 19 mars 2013 consid. 4 et l’arrêt cité).

6.             En l’espèce, la recourante est locataire de locaux dans l’immeuble concerné par les travaux autorisés. Elle se prévaut pour le surplus de violations de dispositions légales en lien avec le droit de la construction susceptibles d’avoir une incidence concrète sur sa situation de fait. Elle invoque ainsi notamment une violation des art. 14 et 121 LCI. Partant, sa qualité pour recourir sera admise.

7.             L’admission de la qualité pour recourir ne signifie pas encore que toutes les conclusions, respectivement griefs, formulés par un recourant sont recevables.

En effet, un recourant ne peut pas présenter n’importe quel grief ; il ne se prévaut d’un intérêt digne de protection, lorsqu’il invoque des dispositions édictées dans l’intérêt général ou dans l’intérêt de tiers, que si ces normes peuvent avoir une influence sur sa situation de fait ou de droit. Tel est souvent le cas lorsqu’il est certain ou très vraisemblable que l’installation ou la construction litigieuse sera à l’origine d’immissions - bruit, poussières, vibrations, lumière, fumée - atteignant spécialement les voisins. À défaut, il n’y a pas lieu d’entrer en matière sur le grief soulevé (ATA/85/2022 du 1er février 2022 consid. 5b). Ils doivent en outre se trouver dans le champ de protection des dispositions dont ils allèguent la violation et être touchés par les effets prétendument illicites de la construction ou de l’installation litigieuse (ATF 121 I 267 consid. 2 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 1P.282/2005 du 7 juillet 2005 consid. 1 ; 1P.292/2004 du 29 juillet 2004 consid. 1.3 ; ATA/801/2014 du 14 octobre 2014 consid. 6d).

8.             L’application du droit d’office par les juridictions administratives ne saurait avoir un quelconque effet sur la question d’un refus d’examiner un grief. En effet, si la juridiction administrative arrive à la conclusion que l’administré ne dispose pas d’un avantage pratique par rapport au grief soulevé, les règles de procédure imposent à celle-ci de ne pas entrer en matière et de déclarer irrecevable le grief invoqué (ATA/17/2023 du 10 janvier 2023 consid. 11d ; ATA/881/2022 du 30 août 2022 consid. 3d).

9.             La question de la recevabilité de certains des griefs soulevés par la recourante sera examinée ci-après.

10.         À titre liminaire, le tribunal tient à rappeler que l’objet du litige est principalement défini par l’objet du recours, les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu’il invoque. En d’autres termes, l’objet du litige correspond objectivement à l’objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; ATA/353/2023 du 4 avril 2023 consid. 2.1).

En l’espèce, le litige porte sur l’autorisation complémentaire DD 7______/3 du ______ 2023 ayant pour objet « modifications diverses du projet initial et des installations techniques », soit :

-          mise en place d’un réseau sprinkler le long de la vitrine intérieure du D______ pour assurer un rideau d’eau en cas de sinistre à l’intérieur du restaurant ou dans 1c______[GE] pour protéger les personnes concernées et éviter une propagation du feu du passage vers le restaurant ou inversement ;

-          mise en place d’un compartimentage local respectueux des exigences de la police du feu pour le monobloc de ventilation au 3ème étage ;

-          mise en place d’un accès permanent pour le service du feu, inexistant jusqu’alors, au monobloc ;

-          modification de la cuisine du restaurant du 2ème étage par la création de deux voies d’évacuation verticales, soit le couloir et l’escalier de secours.

Dans ce cadre, le nouveau concept de protection incendie transmis au département et les plans de protection incendie mis à jour pour refléter les changements du projet ont été validés et la responsable de l’assurance qualité en protection incendie a déposé le 3 mai 2023 la déclaration de conformité AEAI pour le Concept de sécurité incendie avec une seule remarque concernant la porte coupe-feu du local technique présent au palier intermédiaire de cette voie de fuite qui était provisoire dans l’attente de la livraison de la porte définitive.

11.         Préalablement, la recourante sollicite l’audition de M. K______, directeur du restaurant, l’établissement d’un rapport d’expertise indépendant analysant les voies de fuite prévues par l’autorisation querellée, notamment celle de la cuisine au 2ème étage, au regard des dispositions applicables en la matière ainsi qu’un transport sur place.

12.         Le droit d’être entendu garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend, classiquement, le droit, pour l’intéressé, de s’exprimer sur les éléments pertinents avant qu’une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d’avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 149 I 91 consid. 3.2 ; 145 I 167 consid. 4.1).

Ce droit ne s’étend toutefois qu’aux éléments pertinents pour décider de l’issue du litige et le droit de faire administrer des preuves n’empêche pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_159/2020 du 5 octobre 2020 consid. 2.2.1).

Par ailleurs, il ne confère pas le droit à la tenue d’une inspection locale, en l’absence d’une disposition cantonale imposant une telle mesure d’instruction, ce qui n’est pas le cas à Genève (ATF 120 Ib 224 consid. 2b ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_243/2013 du 27 septembre 2013 consid. 3.2.1 ; ATA/285/2021 du 2 mars 2021 consid. 2b).

13.         En l’espèce, le tribunal estime que le dossier contient les éléments suffisants et nécessaires à l’établissement des faits pertinents pour traiter les griefs soulevés par la recourante et statuer sur le litige. Cette dernière a en particulier eu la possibilité de faire valoir ses arguments, dans le cadre de son recours puis de sa réplique et de produire tout moyen de preuve utile en annexe de ses écritures. Le département et la partie intimée y ont répondu de façon circonstanciée. Il n’apparaît ainsi pas utile d’ordonner une expertise indépendante aux fins d’analyser les voies de fuite prévues par l’autorisation querellée ni de procéder à l’audition de M. K______, la recourante n’expliquant au demeurant pas quels éléments ce dernier viendrait apporter que la procédure écrite ne lui permettait pas déjà d’exprimer. Enfin, les motifs pour lesquels la recourante souhaite l’annulation de la décision entreprise ressortant clairement du dossier et les plans versés au dossier permettant parfaitement de visualiser les points litigieux du projet, il n’apparaît pas que la tenue d’un transport sur place, acte d’instruction en soi non obligatoire, serait susceptible de fournir des informations pertinentes supplémentaires. Les conclusions préalables de la recourante seront donc rejetées.

14.         Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire, l’égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_712/2020 du 21 juillet 2021 consid. 4.3 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

15.         Les arguments formulés par les parties à l’appui de leurs conclusions respectives seront repris et discutés dans la mesure utile (ATF 145 IV 99 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 1C_136/2021 du 13 janvier 2022 consid. 2.1 et les références citées), étant rappelé que, saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office et que s’il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, il n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/84/2022 du 1er février 2022 consid. 3).

16.         La recourante invoque la violation des art. 14 et 121 al. 1 LCI relevant, en substance que l’autorisation querellée aurait été délivrée en contradiction avec l’APA 6______ qui exigeait une voie de fuite annexe à l’escalier central reliant le 2ème au 1er étage du restaurant, laquelle permettait aux collaborateurs d’emprunter, en cas d’incendie, un escalier commun aux bâtiments, voie de fuite également prévue dans la DD 7______/1. Elle soutient que la nouvelle disposition des voies de fuite autorisée n’est pas conforme aux normes de protection incendie, que les normes AEAI applicables n’ont pas été analysées et que le renvoi au rapport de I______ est insuffisant, ce dernier étant imprécis, n’indiquant en particulier pas clairement que le 2ème étage du restaurant devrait se contenter d’une seule voie d’utilisation en guise de voie de fuite. Elle relève encore que le calcul des distances des voies d’évacuation est absent et que la largeur de l’embouchure autorisée d’évacuation du 1er étage est insuffisante.

17.         L’art. 14 LCI prévoit que le département peut refuser une autorisation lorsqu’une construction ou une installation peut être la cause d’inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public (let. a), ne remplit pas les conditions de sécurité et de salubrité qu’exige son exploitation ou son utilisation (let. b), ne remplit pas des conditions de sécurité et de salubrité suffisantes à l’égard des voisins ou du public (let. c), offre des dangers particuliers (notamment incendie, émanations nocives ou explosions), si la surface de la parcelle sur laquelle elle est établie est insuffisante pour constituer une zone de protection (let. d) ou peut créer, par sa nature, sa situation ou le trafic que provoque sa destination ou son exploitation, un danger ou une gêne durable pour la circulation (let. e).

18.         La notion d’inconvénients graves est une norme juridique indéterminée, qui doit s’examiner en fonction de la nature de l’activité en cause et qui laisse à l’autorité une liberté d’appréciation. Celle-ci n’est limitée que par l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation. Le pouvoir d’examen du tribunal s’exerce dans les limites précitées, sous réserve du respect du principe de proportionnalité en cas de refus malgré un préavis favorable et de l’intérêt public en cas d’octroi d’une autorisation (ATA/811/2021 du 10 août 2021 consid. 6 ; ATA/448/2021 du 27 avril 2021 consid. 8a ; ATA/165/2018 du 20 février 2018 consid. 4b).

19.         L’art. 14 LCI vise les nuisances issues ou induites par la construction ou l’installation projetée elle-même et non celles provoquées par les modalités de sa réalisation. Ainsi, il n’était pas arbitraire de considérer que les inconvénients causés par un chantier de construction, notamment la circulation temporairement accrue qui en résultait, ne constituent pas des inconvénients graves au sens de cette disposition, même si, suivant les circonstances, ils peuvent être plus ou moins sensibles pour les voisins (arrêt du Tribunal fédéral 1P.530/2002 du 3 février 2002 confirmant l’ATA/447/2002 du 27 août 2002 ; cf. aussi ATA/1220/2020 du 1er décembre 2020 consid. 7a et les arrêts cités ; ATA/399/2020 du 23 avril 2020 consid. 7d).

20.         Une construction, une installation et, d’une manière générale, toute chose doit remplir en tout temps les conditions de sécurité et de salubrité exigées par la LCI, son règlement d’application ou les autorisations délivrées en application de ces dispositions légales et réglementaires (art. 121 al. 1 LCI).

Selon l’art. 121 al. 2 LCI, les exigences imposées pour les constructions et les installations en matière de prévention des incendies sont régies par la norme de protection incendie et les directives de l’AEAI.

Une construction, une installation et, d’une manière générale, toute chose doit être maintenue en tel état et utilisée de telle sorte que sa présence, son exploitation ou son utilisation ne puisse, à l’égard des usagers, du voisinage ou du public, ni porter atteinte aux conditions exigibles de sécurité et de salubrité, ni être la cause d’inconvénients graves, ni offrir des dangers particuliers (notamment incendie, émanations nocives ou explosions) par le fait que la surface de la parcelle sur laquelle elle est établie est insuffisante pour constituer une zone de protection (art. 121 al. 3 let. a LCI).

21.         Les propriétaires sont responsables, dans l’application de la LCI et sous réserve des droits civils, de la sécurité et de la salubrité des constructions et installations (art. 122 LCI).

22.         L’art. 120 LCI précise que ces dispositions sont applicables à toutes les constructions, quelle que soit la date de leur établissement.

23.         Les prescriptions de protection incendie se composent de la norme de protection incendie, qui, d’une part, fixe le cadre de la protection incendie sur le plan des devoirs généraux, de la construction, des équipements de protection incendie et de l’organisation, ainsi que les mesures de défense incendie qui s’y rapportent et, d’autre part, définit les standards de sécurité applicables, et des directives de protection incendie, qui fixent les exigences et les mesures détaillées de sa mise en œuvre. L’AEAI publie aussi des « notes explicatives », où sont explicitées certaines questions de protection incendie, ainsi que des « aides de travail » visant à faciliter l’application des directives de protection incendie (art. 4, 5 et 6 de ladite norme).

24.         À teneur de l’art. 2 norme AEAI (« champ d’application ») :

1 Les prescriptions de protection incendie s’appliquent aux bâtiments et aux autres ouvrages à construire ainsi que, par analogie, aux constructions mobilières.

2 Les bâtiments et les autres ouvrages existants seront rendus conformes aux prescriptions de protection incendie, suivant un principe de proportionnalité :

a. en cas de transformation, d’agrandissement ou de changement d’affectation importants de la construction ou de l’exploitation ;

b. lorsque le danger est particulièrement important pour les personnes.

25.         L’art. 3 al. 1 norme AEAI prévoit que la prévention incendie doit en particulier être assurée par des mesures organisationnelles, telles que le dégagement des voies d’évacuation et de sauvetage (let. a) et l’ordre irréprochable sur le plan de la technique de protection incendie (let. b). Les propriétaires et les exploitants des bâtiments et des autres ouvrages doivent prendre les mesures nécessaires, sur les plans de l’organisation et du personnel, pour assurer la sécurité incendie (al. 2).

26.         Les art. 35 à 37 norme AEAI traitent des voies d’évacuation.

Selon l’art. 35, est considéré comme voie d’évacuation le chemin le plus court qui peut être emprunté, depuis n’importe quel endroit du bâtiment ou de l’ouvrage, pour rejoindre un lieu sûr à l’air libre ou dans le bâtiment (al. 1). Est considéré comme voie de sauvetage le chemin le plus court vers n’importe quel endroit des bâtiments ou des ouvrages où les sapeurs-pompiers et les équipes de sauvetage doivent intervenir. Les voies d’évacuation peuvent servir de voie de sauvetage (al. 2). Si les voies d’évacuation et de sauvetage horizontales et verticales ne sont pas séparées par une fermeture coupe-feu, les voies d’évacuation et de sauvetage horizontales sont soumises aux mêmes exigences que les voies d’évacuation et de sauvetage verticales (al. 3).

L’art. 36 dispose que les voies d’évacuation et de sauvetage doivent être disposées, dimensionnées et réalisées de manière à ce qu’elles puissent toujours être empruntées rapidement et en toute sécurité. Sont notamment déterminants : a. l’affectation et la situation des bâtiments et des autres ouvrages ou des compartiments coupe-feu; b. la géométrie des bâtiments; c .le nombre d’occupants (al. 1). Dans le cadre de questions particulières liées aux exigences des voies d’évacuation, il est possible, en accord avec l’autorité de protection incendie, pour des zones spécifiques d’un bâtiment ou d’un autre ouvrage de recourir à des méthodes de calcul (al. 2).

Il ressort enfin de l’art. 37 que les voies d’évacuation et de sauvetage peuvent servir de voies de communication. Elles doivent toujours rester dégagées et utilisables en toute sécurité. À l’extérieur de l’unité d’utilisation, elles ne doivent pas servir à d’autres usages (al. 1). En fonction de leur affectation et du nombre de niveaux, les cages d’escalier doivent être équipées d’installations d’extraction de chaleur et de fumée donnant directement sur l’extérieur (al. 2).

27.         D’après la jurisprudence, la norme AEAI est directement applicable à titre de droit intercantonal et l’emporte sur le droit cantonal qui lui serait contraire (arrêts du Tribunal fédéral 1C_666/2021 du 28 juillet 2022 consid. 2.1.1 ; 1C_303/2010 du 28 septembre 2010 consid. 2.1, résumé in DC 2011 p. 20 avec une note de Philippe PONT).

28.         La directive AEAI « Voies d’évacuation et de sauvetage » 16-15 du 1er janvier 2017, état au 1er août 2021 définit les exigences auxquelles doivent répondre ces dernières sur le plan de leur disposition, de leur dimensionnement, de leur exécution, de leur équipement et leur non-obstruction. Dans ce cadre, la catégorie du bâtiment concerné ainsi que le nombre d’occupants des locaux sont notamment pris en compte.

Selon son chiffre 2.4.3, la longueur totale des voies d’évacuation est limitée à 35 m lorsqu’elles aboutissent à une seule voie d’évacuation verticale ou une seule issue donnant sur un lieu sûr à l’air libre (al. 1).

La largeur exigée pour les portes et pour les voies d’évacuation horizontales et verticales dépend du nombre d’occupants. La largeur des voies d’évacuation est déterminée par le local recevant le plus grand nombre de personnes (voir chiffres 3.5.2 et 3.5.3). La largeur de passage des portes doit être de 0,9 m au minimum. Des dérogations sont possibles en fonction de l’affectation (voir chiffre 3) (chiffre 2.4.5).

Quant à son chiffre 3.3.4, il stipule, s’agissant de la voie d’évacuation à l’intérieur d’une unité d’utilisation, qu’il est admis que l’évacuation se fasse par un local voisin (zone polyvalente, par exemple), pour autant qu’il se trouve dans la même unité d’utilisation et permette de rejoindre une voie d’évacuation horizontale ou verticale.

29.         L’autorité chargée d’appliquer la loi dispose d’un pouvoir d’appréciation lorsque celle-ci lui laisse une certaine marge de manœuvre, laquelle peut notamment découler de la liberté de choix entre plusieurs solutions, ou encore de la latitude dont l’autorité dispose au moment d’interpréter des notions juridiques indéterminées contenues dans la loi. Bien que l’interprétation de notions juridiques indéterminées relève du droit, que le juge revoit en principe librement, le juge doit néanmoins restreindre sa cognition lorsqu’il résulte de l’interprétation de la loi que le législateur a voulu, par l’utilisation de telles notions, reconnaître à l’autorité de décision une marge de manœuvre que le juge doit respecter, étant précisé que cette dernière ne revient pas à limiter le pouvoir d’examen du juge à l’arbitraire. Viole le principe de l’interdiction de l’arbitraire le tribunal, qui, outrepassant son pouvoir d’examen, corrige l’interprétation défendable qu’une autorité disposant d’autonomie a opérée d’une norme déterminée
(ATF 140 I 201 consid. 6.1 et les références citées).

30.         Selon une jurisprudence bien établie, la juridiction de recours observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis, pour autant que l’autorité inférieure suive l’avis de celles-ci. Elles se limite à examiner si le département ne s’est pas écarté sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/896/2021 du 31 août 2021 consid. 4d ; ATA/155/2021 du 9 février 2021 consid. 7c et 10e ; ATA/1311/2020 du 15 décembre 2020 consid. 7d ; ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3e ; ATA/1098/2019 du 25 juin 2019 consid. 2e).

31.         En l’espèce, les plans, rapports et documents techniques nécessaires à l’instruction de la demande concernée ont été versés au dossier d’instruction. Il s’est en particulier agi, sur requête de la police du feu, soit l’instance spécialisée et compétente en la matière, d’une version modifiée du concept de protection incendie déposée dans le cadre de l’autorisation principale. L’ensemble des instances de préavis, en particulier la police du feu, s’est, au regard de ces documents, prononcé favorablement quant au projet querellé, exigeant le respect du concept de sécurité incendie et des plans l’accompagnant. Le préavis de la police du feu préconisait également que pour tout ce qui n’était pas précisément défini dans le concept de I______, les prescriptions incendies de l’AEAI dans leurs versions 2015-2017 devaient être appliquées. Deux contrôles ont été réalisés quant à la prise des mesures nécessaires à la sécurité des usagers, notamment de la cuisine. Mme L______ a enfin déposé la déclaration de conformité AEAI pour le Concept de sécurité incendie avec une seule remarque concernant la porte coupe-feu du local technique présent au palier intermédiaire de cette voie de fuite qui était provisoire dans l’attente de la livraison de la porte définitive.

A______ SA fonde son argumentation sur le fait que d’autres exigences avaient été posées à l’époque dans l’APA 6______ et dans la DD 7______/1, concernant les voies d’évacuation. Or, d’une part, ces autorisations ne font pas l’objet du présent litige. D’autre part, le département a expliqué, sans être contredit, que les voies de fuite prévues dans les autorisations précitées n’avaient pas été exigées mais proposées par la police du feu, parmi d’autres solutions possibles. La recourante ne démontre pour le surplus pas que la voie d’évacuation telle que prévue dans l’autorisation querellée ne respecterait les prescriptions AEAI et le Concept de protection incendie de I______ ni pour quels motifs le département aurait dû s’écarter du préavis de la police du feu.

À cet égard, concernant les normes et directives AEAI, il doit être pris en compte que le bâtiment en question entre dans la catégorie d’un bâtiment administratif, industriel et artisanal (directive de protection incendie 16-15), car il concerne moins de 300 personnes. Il est ainsi admis que l’évacuation se fasse par un local voisin (zone polyvalente, par exemple), pour autant qu’il se trouve dans la même unité d’utilisation et permette de rejoindre une voie d’évacuation horizontale ou verticale (chiffre 3.3.4 dite directive). La voie d’évacuation apparait ainsi parfaitement adéquate dès lors que, en cas de sinistre, l’évacuation des employés de cuisine, au nombre de cinq environ même s’ils peuvent être parfois plus nombreux sur les lieux, pourra se faire par l’escalier de liaison situé dans la même unité de liaison afin d’atteindre la voie d’évacuation prévue au 1er étage menant directement vers l’extérieur. La voie d’évacuation prévue au 2ème étage est de plus conforme aux art. 35 al. 1 et 37 al. 1 norme AEAI. En outre, le chemin - à disposition des employés de la cuisine et respectant le concept global de sécurité du bâtiment rénové - empruntant l’escalier interne pour accéder au 1er étage et évacuer sur 1b______[GE], est bien le plus court, étant rappelé que les voies d’évacuation et de sauvetage peuvent aussi servir de voies de communication.

De telles voies de liaison ne nécessitaient pas de compartimentage coupe-feu ou autre mesures particulières. Pour le surplus, le tribunal a pu vérifier que la longueur de 35 m des voies d’évacuation (chiffre 2.4.3 al. 1 directive AEAI) était respectée. Quant à la largeur de la porte située au 1er étage, de 87 cm selon les plans, elle présente une différence de 3 cm par rapport au 90 cm requis au chiffre 2.4.5 directive AEAI qui précise toutefois que des dérogations sont possibles en fonction de l’affectation, le nombre d’occupants étant notamment un aspect à prendre en compte dans ce cadre. Or ici, la voie d’évacuation est destinée uniquement à permettre le passage des utilisateurs de la cuisine
(5 personnes environ), le 1er étage comportant une autre voie de fuite, pour les autres usagers dudit étage, dont l’ouverture mesure 120 cm de large. Le tribunal ne saurait dès lors s’écarter du préavis de la police du feu qui a estimé, après s’être assurée que le projet et son concept de sécurité incendie étaient adéquats et que les mesures prévues respectaient bien les normes de protection incendie, que ladite voie d’évacuation était appropriée et qu’il serait disproportionné d’en demander la modification. L’autorisation rappelle enfin que les normes AEAI doivent être respectées et exige que le projet soit suivi et géré par le responsable en protection incendie afin de veiller précisément au respect de ces dernières.

Dans ces conditions, il doit être admis, avec le département, que le projet autorisé ne présentant aucun souci de sécurité pour les utilisateurs du bâtiment et, en particulier, pour les employés de la recourante, aucune violation des art. 14 et 121 LCI ne saurait être retenue.

32.         La recourante estime que l’autorisation viole les art. 209 al. 2 Cst-GE, 109 al. 1 LCI, 2 al.1 et 8 al. 1 RACI.

33.         L’art. 209 Cst-GE stipule que l’État favorise l’intégration économique et sociale des personnes handicapées. Lors de constructions nouvelles, les logements et les places de travail sont rendus accessibles et adaptables aux besoins des personnes handicapées. Lors de rénovations, les besoins de celles-ci sont pris en considération de manière appropriée.

34.         Selon l’art. 109 al. 1 LCI, les constructions et installations, de même que leurs abords, doivent être conçus et aménagés de manière à en permettre l’accès et l’utilisation par tous les usagers, y compris ceux qui éprouvent des difficultés à s’orienter, à se mouvoir ou à communiquer.

35.         Un ascenseur est obligatoire à partir de trois niveaux, sous-sol compris. Une dérogation peut être accordée pour des immeubles de trois niveaux au maximum, sous-sol compris, qui n’offrent qu’un nombre restreint de places de travail ou ne comportent que quelques logements à condition de préserver la possibilité de les équiper ultérieurement d’un monte-escalier au moins
(art. 8 al. 1 RACI).

36.         En l’espèce, la DD 7______/3 ne porte ni sur une construction nouvelle, ni sur une transformation ou rénovation importante. L’ascenseur est maintenu dans le projet litigieux et un accès est techniquement possible pour les personnes à mobilité réduite. Aucune remarque n’a d’ailleurs été faite par les instances de préavis consultées, dans le cadre de l’instruction du dossier, s’agissant de l’accessibilité des constructions. Le fait que les employés ou la clientèle de la recourante ne seraient plus en mesure d’utiliser l’ascenseur ne relève enfin, comme rappelé à juste titre par le département, pas du respect du droit de la construction, mais de ses relations de droit privé avec l’intimée.

Ce grief sera par conséquent écarté.

37.         La recourante allègue la violation de l’ODAIOUs et des normes HACCP.

38.         Selon les principes généraux du droit, il n’appartient pas à l’administration de s’immiscer dans les conflits de droit privé pouvant s’élever entre un requérant et un opposant. La législation genevoise en matière de police des constructions a en effet pour seul but d’assurer la conformité des projets présentés aux prescriptions en matière de constructions et d’aménagements, intérieurs et extérieurs, des bâtiments et des installations (art. 3 al. 6 LCI ; cf. not. ATA/307/2021 du 9 mars 2021 consid. 4a ; ATA/169/2020 du 11 février 2020 consid. 7b ; ATA/1724/2019 du 26 novembre 2019 consid. 8e ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 1C_413/2019 du 24 mars 2020 consid. 7.1 et les références citées). La procédure de recours prévue par l’art. 145 LCI ne permet donc en principe de faire valoir que des moyens de droit public et n’a pas pour vocation de veiller au respect de droits réels ou de ceux des tiers, le contrôle du respect de ceux-ci (de même que l’examen de tout autre litige relevant du droit privé) restant dévolu aux tribunaux civils (cf. not. arrêts du Tribunal fédéral 1C_413/2019 du 24 mars 2020 consid. 7.1 et les références citées ; 1C_416/2012 du 6 décembre 2012 consid. 5 in fine ; ATA/752/2014 du 23 septembre 2014 consid. 7c ; ATA/900/2010 du 21 décembre 2010 consid. 11).

39.         En l’espèce, l’ODAIOUs et les normes HACCP ne constituent pas des prescriptions du droit de la construction mais des exigences pour l’exploitant des lieux (art. 78 ODAIOUs). La question de leur respect ne saurait dès lors être examinée dans le cadre du présent recours, cette problématique relevant des relations de droit privé entre les parties. Il appartiendra dès lors à la recourante de se retourner contre la propriétaire sur le plan civil si elle estime que les conditions pour l’exercice de son activité de restauration ne sont plus adéquates. L’on rappellera encore, à toutes fins utiles, que l’accès à la cuisine depuis l’ascenseur central était déjà restreint à la suite de l’autorisation de construire initiale DD 7______/1, en force.

40.         La recourante soutient encore que la décision querellée viole les art. 9 LPMNS et 90 al. 1 LCI, les bâtiments visés par l’autorisation querellée figurant à l’inventaire et l’intérêt à les protéger devant prévaloir sur les installations et modifications envisagées.

41.         La LPMNS poursuit la protection générale des monuments de l’histoire, de l’art ou de l’architecture et des antiquités immobilières situés ou découverts dans le canton, qui présentent un intérêt archéologique, historique, artistique, scientifique ou éducatif, ainsi que les terrains contenant ces objets et leurs abords (art. 4 let. a LPMNS), et des immeubles et des sites dignes d’intérêt, ainsi que des beautés naturelles (art. 4 let. b LPMNS).

42.         S’agissant des bâtiments, elle prévoit l’établissement d’un inventaire de tous les immeubles dignes d’être protégés au sens de l’art. 4 (art. 7 al. 1 LPMNS), ainsi que la possibilité pour le Conseil d’État d’ordonner le classement d’un monument ou d’une antiquité (art. 10 LPMNS). Les immeubles inscrits à l’inventaire doivent être maintenus et leurs éléments dignes d’intérêt préservés (art. 9 al. 1 LPMNS).

43.         Selon l’art. 90 al. 1 LCI, les ensembles dont l’unité architecturale et urbanistique est complète sont maintenus. En cas de rénovation ou de transformation, les structures porteuses, de même que les autres éléments particulièrement dignes de protection doivent, en règle générale, être sauvegardés.

44.         En l’espèce, sous l’angle de l’art. 9 LPMNS, l’on relèvera tout d’abord que seul 1c______[GE] et non le bâtiment en tant que tel est inscrit à l’inventaire. Or, la recourante ne fait pas valoir d’atteinte aux éléments dignes d’intérêt dudit passage. Son grief, de portée générale, est dès lors irrecevable. Celle-ci n’expose pas plus en quoi les éléments modifiés représenteraient des éléments particulièrement dignes de protection au sens de l’art. 90 al. 1 LCI, étant rappelé que des rénovations/transformations sont possibles sur un immeuble inscrit dans un ensemble protégé, seuls les éléments particulièrement dignes de protection devant impérativement être maintenus. Or, à cet égard, l’autorisation querellée se fonde sur les préavis favorables sous conditions de la CMNS et du SMS, lesquels ont procédé à un examen minutieux du projet, après en avoir, préalablement, demandé la modification. La recourante ne fait pour sa part que substituer sa propre appréciation à celle des instances de préavis précitées. Le grief de la recourante sera dès lors rejeté si tant est qu’il est recevable.

45.         En tous points infondés, le recours doit être rejeté.

46.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986
(RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe sur mesures superprovisionnelles, provisionnelles et sur le fond, est condamnée au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 3’000.- ; il est partiellement couvert par l’avance de frais de CHF 900.- versée à la suite du dépôt du recours.

47.         Vu l’issue du litige, une indemnité de procédure de CHF 3’000.-, à la charge de la recourante, sera allouée à l’intimée (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA)


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 17 avril 2023 par A______ SA contre la décision du département du territoire du ______ 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 3’000.-, lequel est partiellement couvert par l’avance de frais en CHF 900.- ;

4.             condamne la recourante à verser à B______ SA une indemnité de procédure de CHF 3’000.- ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Marielle TONOSSI, présidente, Diane SCHASCA et Carmelo STENDARDO, juges assesseurs

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

 

Genève, le

 

Le greffier