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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2435/2009

ATA/900/2010 du 21.12.2010 sur DCCR/741/2010 ( LDTR ) , REJETE

Recours TF déposé le 04.02.2011, rendu le 04.05.2011, REJETE, 1C_61/2011
Parties : ANOUNA Marguerite et autres, HUGUENIN Philippe, MIEVILLE Herminia, STOJKOVIC Jelena / DEPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION, ZANOLETTI Graziella, MULHAUSER Patrick
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2435/2009-LDTR ATA/900/2010

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 21 décembre 2010

 

dans la cause

 

Madame Marguerite ANOUNA

et

Madame Herminia MIÉVILLE

et

Madame Jelena STOJKOVIC

et

Monsieur Philippe HUGUENIN

contre

Madame Graziella ZANOLETTI
représentée par Me Gérald Page, avocat

et

DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION

_________


Recours contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 25 mai 2010 (DCCR/741/2010)


EN FAIT

1. Madame Graziella Zanoletti est propriétaire de la parcelle n° 3781, feuille 54 du cadastre de Genève-Cité, à l’adresse 4, rue de l’Ancien-Port. Sur ce terrain, situé en 2ème zone, est édifié un immeuble constitué d’un rez-de-chaussée destiné à des activités et de cinq niveaux d’habitation. Les combles sont partiellement habitables avec, côté cours, un appartement de deux pièces, une buanderie et un local d’étendage de 2,40 mètres ou plus de hauteur et, côté rue, des greniers situés sous un toit en pente.

2. Le 20 octobre 2008, Mme Zanoletti a déposé au département des constructions et des technologies de l'information (ci-après : DCTI ou le département) une demande définitive d’autorisation de construire, afin de créer deux appartements dans les combles. Le projet visait à surélever la façade côté rue pour rendre le toit symétrique et à utiliser l’intégralité de la surface, soit les greniers, la buanderie, le local d’étendage et l'appartement existant pour y créer deux logements.

3. Le 19 mars 2008, la propriétaire a résilié le bail du locataire de l’appartement situé dans les combles, compte tenu des travaux envisagés.

4. Le 22 avril 2008, Mme Zanoletti, par l’intermédiaire de sa régie, a adressé un courrier à chacun des locataires de l'immeuble afin d’informer ceux-ci des travaux envisagés, lesquels seraient entièrement financés par elle-même et ne donneraient pas lieu à des modifications de loyers.

5. Au cours de l’instruction de la requête, la Ville de Genève (ci-après : la ville) a émis un préavis défavorable. La carte qui devait être établie en application de la loi sur la surélévation d’immeubles n’était pas encore élaborée.

La commission d’architecture a indiqué ne pas avoir d’observations à faire au sujet du projet, donnant son accord pour une dérogation de hauteur au sens de l’art. 11 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05).

Après avoir demandé des informations complémentaires, le service juridique du DCTI a émis un préavis favorable, au sens de l’art. 9 de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation (mesures de soutien en faveur des locataires et de l'emploi) du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20). Le loyer de chacun des deux appartements de quatre pièces aménagés dans les combles ne devait pas excéder CHF 7'365.- la pièce et par année, pendant une durée de cinq ans à dater de la fin des travaux. L’ouverture du chantier était subordonnée au relogement du locataire dont le bail avait été résilié. Le loyer des logements existants ne serait pas modifié.

Tous les autres préavis étaient favorables, cas échéant sous réserve ou condition.

6. Les 3 et 7 novembre 2008, Madame Jelena Stojkovic, agissant au nom des locataires de l’immeuble, a transmis au DCTI des observations. La demande d’autorisation de construire devait être déclarée irrecevable car des demandes similaires avaient déjà été déposées et refusées par l'autorité. Le dossier déposé par Mme Zanoletti était incomplet. Les locataires refusaient que leur grenier, de 11 m2, soit remplacé par des caves de 2,6 m2. Ils s’opposaient à la disparition de l’étendage et à la réduction de la surface du local à vélos situé dans la cave.

Ultérieurement, Mme Stojkovic, soit en son nom soit aux noms des locataires de l’immeuble, a échangé une importante correspondance avec le DCTI.

7. Le 28 mai 2009 le DCTI a délivré l’autorisation sollicitée. Une dérogation, au sens de l’art. 11 LCI était accordée. Cette décision a été publiée dans la Feuille d’Avis Officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 5 juin 2009.

8. Par acte reçu à la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : CCRA) le 30 juin 2009, Mesdames Marguerite Anouna, Herminia Miéville et Jelena Stojkovic et Messieurs Philippe Huguenin et Patrick Mulhauser ont formé recours contre l’autorisation de construire délivrée à Mme Zanoletti.

9. Après avoir autorisé un double échanges d’écritures, la CCRA a, le 25 mai 2010, rejeté le recours dans la mesure où il était recevable et confirmé l’autorisation de construire délivrée par l’autorité.

Toutes les conclusions qui ne tendaient pas à l’annulation de la décision litigieuse ou à l’allocation d’une indemnité de procédure étaient déclarées irrecevables, car n’étant pas de la compétence de la CCRA.

Le fait que des requêtes en autorisation de construire aient fait antérieurement l’objet d’un refus d’entrée de la part du DCTI n’était pas pertinent.

Il était exact que l'intitulé de la requête en autorisation de construire ne mentionnait pas les travaux prévus au sous-sol de l’immeuble. Cette omission dans la formule officielle de requête n’avait pas d’incidences sur l’autorisation litigieuse, dès lors que les travaux en question ressortaient clairement du descriptif des travaux et des plans.

Les recourants soutenaient, en vain, que le préavis favorable émis par le service de protection contre le bruit et les rayonnements non ionisants (ci-après : SPBR) était erroné : ils ne produisaient pas d’éléments susceptibles de remettre en cause l’appréciation de ce service spécialisé.

La lettre d’informations adressée le 22 avril 2008 aux locataires répondait aux exigences de l’art. 43 LDTR, étant précisé que l’al. 3 de cette disposition n’obligeait pas le DCTI à refuser l’autorisation de construire en cas de défaut d’informations.

La propriétaire avait attiré l’attention du DCTI sur le fait que l’estimation du coût des travaux ne concernait que ceux réalisés dans les combles, et pas ceux envisagés au sous-sol et au rez-de-chaussée. Cet élément ne pouvait qu’être en défaveur du propriétaire, et non des locataires dont les loyers ne seraient en tout état pas touchés par les travaux.

Certaines informations, tels le numéro de la parcelle, celui du bâtiment ou la signature de l’architecte et du propriétaire, manquaient sur certains plans visés ne varietur. Cette informalité ne pouvait justifier l’annulation de l’autorisation délivrée.

En matière de sécurité incendie, la police du feu, après avoir critiqué une sécurité déficiente, avait émis un préavis favorable suite à une modification du projet visant à installer un coupe-feu installé au sous-sol.

La dérogation accordée pour surélever l’immeuble, fondée sur l’art. 11 LCI, faisait suite à un préavis favorable de la commission d’architecture et ne prêtait pas le flanc à la critique. Les modifications récentes de la LCI concernant la surélévation d’immeubles, qui prévoyaient qu’un inventaire des bâtiments concernés et un plan soient dressés par le Conseil d’Etat, n’interdisaient pas au DCTI, pendant la période transitoire, d'accorder une telle dérogation.

Le fait qu’antérieurement, soit le 1er novembre 1996 et le 2 novembre 2001, certaines autorisation de construire aient été annulées par la CCRA n'empêchait pas le propriétaire d’en déposer des nouvelles.

Un émolument de procédure de CHF 800.- et une indemnité de procédure de CHF 1'500.- en faveur de Mme Zanoletti étaient mis à la charge conjointe et solidaire des recourants.

10. Le 25 juin 2010, Mmes Anouna, Miéville et Stojkovic ainsi que M. Huguenin ont saisi le Tribunal administratif d’un recours contre la décision précitée. M. Mulhauser n’a pas recouru, ayant déménagé le 1er décembre 2009.

L’autorisation de construire publiée ne mentionnait pas les travaux prévus dans les plans visés ne varietur. Ces derniers ne correspondaient pas aux normes SIA et ne mentionnaient pas les numéros des parcelles et des bâtiments concernés. Ces plans ne correspondaient pas aux publications du registre foncier. Les art. 11 al. 4 du règlement d’application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RCI - L 5 05.01), 6, 7, 8 al. 1 et 2, 43 al. 1, 2 et 3 et 44 LDTR, ainsi que l’art. 3 LCI étaient violés. Il n’y avait pas de préavis lié à la présence de combustibles, citernes à mazout et à essence et véhicules à moteur appartenant à l’entreprise exploitant le rez-de-chaussée. Les plans visés ne varietur déposés le 30 avril 2009 n’avaient pas été soumis à la commission d’architecture. Certains documents n’avaient jamais été portés à la connaissance des recourants et n’étaient pas consultables avant l’octroi de l’autorisation de construire. De multiples servitudes grevaient le bâtiment, interdisant de dépasser un gabarit de 19,5 mètres.

Le projet autorisé entraînerait de graves nuisances pour les locataires, notamment ceux du cinquième étage. Les immeubles voisins subiraient une sévère atteinte du point de vue de la lumière et de l’harmonie. Les dispositions concernant la surélévation d’immeubles existants adoptées par le Grand Conseil n’étaient pas respectées. Le fait d’utiliser un autre moyen, soit l’art. 11 LCI, pour arriver au même résultat n’était pas admissible.

Les intéressés demandaient à ce qu’un délai leur soit accordé pour compléter le recours après avoir pris connaissance des documents qu’ils n’avaient pu consulter. Ils concluaient préalablement à ce qu’un plan des façades et toitures des deux immeubles contigus soit produit, à ce qu’un transport sur place soit ordonné et au fond à ce que l’autorisation litigieuse soit annulée.

11. Le 4 août 2010, Mme Zanoletti s’est opposée au recours. Les recourants avaient eu accès au dossier. Ils avaient été informés des travaux prévus, conformément à la LDTR. Le fait que la CCRA n’ait pu se prononcer sur certains griefs, inintelligibles, ne tenait qu’à la qualité de rédaction du recours.

En conséquence, leur droit d’être entendu n’avait pas été violé.

Quant au fond, les plans visés ne varietur avaient été modifiés de façon minime, à la demande des autorités, ce qui n’impliquait pas que les préavis soient renouvelés. La police du feu avait émis un préavis favorable, après que les modifications demandées par cette dernière aient été intégrées dans le dossier. Ce préavis tenait compte de l’existence d’une citerne à mazout et de la présence de combustibles.

Au sujet de la question du bruit, le SPBR s’était fondé sur des mesures réalisées en 2007. La commission d’architecture s’était déterminée en pleine connaissance de cause.

En rapport avec la surélévation du bâtiment, l’art. 23 al. 7 LCI réservait l’octroi de dérogations fondées sur l’art. 11 LCI, comme cela avait été fait en l’espèce.

La création de deux logements dans les combles ne portait atteinte ni à la luminosité des appartements des recourants, ni à l’harmonie des bâtiments.

Les dispositions de la LDTR avaient été respectées par l’information communiquée aux locataires. Une réunion d’information avait de plus été organisée sur place.

L'absence de signature sur les plans ne pouvait entraîner l’annulation de l’autorisation délivrée. On ne voyait pas quelle norme SIA aurait été violée. Les art. 6, 7 et 8 LDTR n’étaient pas pertinents en l’espèce. L’art. 3 LCI concernant la publication des autorisations de construire avait été respecté. Le respect des éventuelles servitudes grevant le bien-fonds était une question de droit privé, que les autorités administratives n’étaient pas compétentes à trancher.

Un transport sur place n’était pas nécessaire, au vu des pièces produites.

12. Le 16 août 2010, le DCTI s’est aussi opposé au recours. La procédure d’autorisation avait été réalisée dans le respect des dispositions légales et le droit d’être entendu des recourants avait été respecté. Le dépassement du gabarit était autorisable, en application de l’art. 11 al. 4 LCI.

13. Le 10 septembre 2010, le Tribunal administratif a accordé un délai, échéant au 10 octobre 2010, pour formuler d’éventuelles requêtes d’instruction complémentaires.

14. Le 13 septembre 2010, les recourants ont demandé à compléter leur recours. Ils avaient obtenu du greffe du Tribunal administratif une copie des pièces auxquelles la CCRA faisait référence, qui n’avaient jamais été portées à leur connaissance antérieurement.

15. Dans le délai imparti, Mme Zanoletti n’a pas formulé de requêtes complémentaires.

16. Le 5 octobre 2010, le DCTI a indiqué que, selon lui, la procédure était en état d’être jugée.

17. Le 12 octobre 2010, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

18. Le 29 octobre 2010, Mme Zanoletti a relevé que les nouveaux griefs figurant dans l’écriture des recourants étaient irrecevables.

19. Le 1er novembre 2010, ce pli a été transmis aux parties, avec la précision que la procédure était toujours gardée à juger.

 

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Les recourants demandent qu’un délai leur soit accordé pour compléter le recours après avoir pris connaissance des documents qu’ils n’avaient pu consulter, que des plans complémentaires soient produits et qu’un transport sur place soit ordonné.

Tel qu’il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 132 II 485 consid. 3.2 p. 494 ; 127 I 54 consid. 2b p. 56 ; 127 III 576 consid. 2c p. 578 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2C.573/2007 du 23 janvier 2008 consid. 2.3). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 131 I 153 consid. 3 p. 158 ; 130 I 425 consid. 2.1 p. 428 ; Arrêts du Tribunal fédéral 2C.402/2008 du 27 juin 2008 consid. 3.2 ; 2P.205/2006 du 19 décembre 2006 consid. 2.1 et les arrêts cités ; ATA/432/2008 du 27 août 2008 consid. 2b).

En l'espèce, tous les plans visés ne varietur se trouvent dans le dossier du DCTI, remis à la CCRA puis au Tribunal administratif. Les recourants pouvaient en avoir connaissance avant de déposer le recours et il n'y a dès lors pas lieu de leur accorder un délai pour compléter ce dernier qui, au demeurant, apparaît déjà exhaustif. Les plans supplémentaires des façades et toitures requit par les recourants ne sont pas déterminant pour l'issue de la procédure, au vu des documents figurants déjà dans le dossier. De même, l'organisation d'un transport sur place apparaît inutile dès lors que les pièces figurant dans la procédure permettent parfaitement de comprendre les travaux envisagés et la situation des immeubles concernés.

3. Les recourants soutiennent que la demande d’autorisation de construire devrait être déclarée irrecevable car des demandes similaires avaient déjà été déposées et refusées par l'autorité.

L'éventuel dépôt antérieur de demande d'autorisations de construire, cas échéant refusées, n'interdit toutefois pas à un propriétaire de déposer de nouvelles requêtes qui, si ces dernières sont conformes aux exigences de la législation, pourront être autorisées.

Partant, ce grief sera écarté.

4. Les recourants reprochent à Mme Zanoletti d'avoir déposé une requête en autorisation de construire incomplète. Les plans ne correspondaient pas aux normes SIA, ne mentionnaient pas les numéros des parcelles et des bâtiments concernés, ne correspondaient pas aux publications du registre foncier et ils n'étaient pas signés. Les publications faites dans la FAO ne mentionnaient pas les travaux en sous-sol.

Ainsi que l'a retenu la commission, les éventuelles informalités et imprécisions en question n'ont pas eu de conséquences pour les recourants, ce qui est démontré par le contenu des écriture de ces derniers. En conséquence, l'annulation de l'autorisation délivrée pour ces motifs emporterait une violation du principe du formalisme excessif.

Ce grief sera aussi rejeté.

5. Les recourants se plaignent d'une violation des dispositions de la LDTR concernant l'information aux locataires.

Selon l'art. 43 LDTR, le propriétaire a l'obligation d'informer au préalable et par écrit les locataires et de les consulter en dehors de toute résiliation de bail, lorsqu'il a l'intention d'exécuter des travaux au sens de la présente loi. Il doit leur exposer son projet et les informer de la modification de loyer qui en résulte. Il leur impartit un délai de trente jours au moins pour présenter leurs observations et suggestions éventuelles (al. 1). Le département doit veiller que le propriétaire informe par écrit, individuellement, les locataires de la liste des travaux autorisés et du programme d'exécution de ces travaux (al. 2). En cas de non-respect de l'obligation d'information et de consultation, le département peut refuser la délivrance de l'autorisation requise (al. 3).

En l'espèce, la propriétaire a adressé à ses locataires un courrier le 22 avril 2008 donnant les indications nécessaires sur les travaux projetés et précisant que ces derniers n'auraient pas d'influence sur les loyers perçus. Si l'on peut regretter qu'un délai n'est pas été formellement fixé aux locataires pour réagir, l'appréciation du DCTI considérant que cette information était suffisante ne prête pas le flanc à la critique dès lors que l'art. 43 al. 3 LDTR lui donne le pouvoir de refuser une autorisation de construire pour défaut d'information, sans l'y obliger.

Ce grief sera aussi écarté.

6. Pour les recourants, l'absence de préavis lié à la présence de combustibles, citernes à mazout et à essence et véhicules à moteur appartenant à l’entreprise exploitant le rez-de-chaussée de l'immeuble aurait dû entraîner le refus de l'autorisation sollicitée.

Cette allégation est toutefois contraire au dossier : la police du feu à émis un premier préavis demandant des compléments, le 8 novembre 2008, puis un préavis favorable sous condition, le 11 mars 2009.

Ce grief sera en conséquence écarté.

7. Les recourants critiquent le fait que les plans visés ne varietur, déposés le 30 avril 2009, n’aient pas été soumis à la commission d’architecture.

Les plans initiaux de la requête en autorisation de construire ont été soumis à cette commission. Les modification faites ultérieurement sont purement techniques, notamment pour répondre aux exigences du service du feu, sans toucher à la substance du projet.. Le nouveau jeu de plans déposé n'avait dès lors pas à être soumis à la commission précitée avant leur autorisation.

8. Pour les recourants, les dispositions concernant la surélévation d’immeubles existants, adoptées par le Grand Conseil, n’étaient pas respectées. Le fait d’utiliser un autre moyen, soit l’art. 11 LCI, pour arriver au même but n’était pas admissible.

a. Le 22 février 2008, le Grand Conseil a adopté une modification de l'art 23 LCI selon laquelle le département peut autoriser le dépassement du gabarit d'un immeuble afin de permettre la création de logements supplémentaires, en tenant compte de celui des immeubles voisins et pour autant que cela ne compromette pas l'harmonie urbanistique de la rue (art. 23 al. 3 LCI). Préalablement à la délivrance d'une telle autorisation, le département devait établir - après consultation de la commission des monuments, de la nature et des sites - des cartes indicatives, par quartier, des immeubles susceptibles d'être surélevés (art. 23 al. 4 LCI).

L'al. 7 de cette disposition précise notamment que les art. 10 et 11 LCI restent applicable.

b. Selon l'art. 11 al. 4 let. c et d LCI, le département peut, après consultation de la commission d'architecture, autoriser un dépassement du gabarit prescrit par la loi lorsque les constructions prévues ne nuisent pas à l'harmonie de la silhouette de l'agglomération ni à la perception de sa topographie et se justifient par leur aspect esthétique et leur destination et sont compatibles avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier.

En l'espèce, la surélévation partielle de l'immeuble et le dépassement du gabarit n'ont pas été autorisés en application des nouvelles dispositions de l'art. 23 LCI, mais par le biais de la clause dérogatoire de l'art. 11 al. 4 LCI, expressément réservée par la nouvelle teneur de l'art. 23 al. 7 LCI. Consultée, la commission d'architecture a émis un préavis favorable, précisant qu'elle donnait son accord à la dérogation susmentionnée.

Dans ces circonstances, ce grief sera aussi écarté.

9. Pour les recourants, le projet autorisé entraînerait de graves nuisances pour les locataires, notamment ceux du cinquième étage.

a. Selon l'art. 14 al. 1 let. a LCI, le département peut refuser une autorisation de construire lorsque le projet peut être la cause d'inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public.

b. La notion d’inconvénients graves de l’art. 14 al. 1 LCI est une notion juridique indéterminée qui laisse à l’autorité une liberté d’appréciation et n’est limitée que par l’excès ou l’abus de pouvoir (ATA/723/2010 du 19 octobre 2010 ; ATA B. du 24 juin 1992). Le Tribunal administratif peut revoir librement l’interprétation des notions juridiques indéterminées, mais contrôle sous le seul angle des limites précitées, l’exercice de la liberté d’appréciation de l’administration, en mettant l’accent sur le principe de proportionnalité en cas de refus malgré un préavis favorable, et sur le respect de l’intérêt public en cas d’octroi d’une autorisation. Il évite de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis, pour autant que l’autorité décisionnelle ait suivi ses préavis (ATA/619/2007 du 4 décembre 2007 ; ATA/105/2006 du 17 mars 2006).

Les autorités de recours se limitent ainsi à examiner si le département ne s'écarte pas sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/190/2009 du 21 avril 2009 ; ATA/646/1997 du 23 octobre 1997 et les réf. citées).

En l'espèce, les préavis pertinents émis ont été favorables. Plus spécifiquement, l'office des autorisations de construire a émis un préavis « sécurité locataires » favorable, mais fixant très précisément les conditions dans lesquelles le chantier devra être réalisé. Aussi, le département était fondé à admettre que le projet n'était pas la source d'inconvénients graves.

Ce grief sera aussi écarté.

10. Les immeubles voisins subiraient, selon les recourants, une grave atteinte du point de vue de la lumière et de l’harmonie.

L'art. 15 al. 1 LCI permet au département d'interdire ou de n'autoriser que sous réserve de modification toute construction qui, par ses dimensions, sa situation ou son aspect extérieur nuirait au caractère ou à l'intérêt d'un quartier, d'une rue ou d'un chemin, d'un site naturel ou de points de vue accessibles au public. La décision du département doit se fonder notamment sur le préavis de la commission d'architecture, et elle tient compte également, le cas échéant, de ceux émis par la commune ou les services compétents du département (art. 15 al. 2 LCI).

En l'espèce, la commission d'architecture à émis un préavis favorable. L'autorisation délivrée est dès lors, sous cet aspect aussi, conforme au droit.

11. De multiples servitudes grèveraient le bâtiment, interdisant - selon les recourants - de dépasser un gabarit de 19,5 mètres.

Cette problématique ressort du droit privé et échappe de ce fait au pouvoir de cognition du tribunal de céans (ATA/450/2009 du 15 septembre 2009).

12. En tous points mal fondé, le recours sera rejeté.

Un émolument de CHF 2'500.- sera mis à la charge des recourants pris conjointement et solidairement. Une indemnité de procédure de CHF 2'500.- sera allouée à Mme Zanoletti, à charge des recourants, pris conjointement et solidairement (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 25 juin 2010 par Mesdames Marguerite Anouna, Herminia Miéville, Jelena Stojkovic, Monsieur Philippe Hugenin contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 25 mai 2010 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 2’500.- ;

alloue une indemnité de procédure à Madame Graziella Zanoletti de CHF 2’500.- à la charge des recourants pris conjointement et solidairement ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Mesdames Marguerite Anouna, Herminia Miéville, Jelena Stojkovic, Monsieur Philippe Hugenin, au département des constructions et des technologies de l'information, à Me Gérald Page, avocat de Madame Graziella Zanoletti ainsi qu’à la commission cantonale de recours en matière administrative.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy, Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

F. Glauser

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :