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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1151/2024

ATA/242/2025 du 11.03.2025 sur JTAPI/476/2024 ( LCR ) , REJETE

Recours TF déposé le 05.05.2025, rendu le 13.05.2025, IRRECEVABLE, 1C_244/2025
Descripteurs : CIRCULATION ROUTIÈRE(DROIT DE LA CIRCULATION ROUTIÈRE);LOI FÉDÉRALE SUR LA CIRCULATION ROUTIÈRE;NÉCESSITÉ;PROFESSION;APPRÉCIATION DES PREUVES;FORCE MAJEURE;RESTITUTION DU DÉLAI;FORMALISME EXCESSIF;CERTIFICAT MÉDICAL;DÉLAI;RETARD;CONDITION DE RECEVABILITÉ;AVANCE DE FRAIS;DÉLAI DE RECOURS;FICTION DE LA NOTIFICATION
Normes : LPA.16.al1; LPA.86.al1; LPA.86.al2
Résumé : Confirmation d'un jugement d'irrecevabilité du TAPI pour non-paiement de l'avance de frais dans le délai imparti. Le recourant ne peut se prévaloir en l'occurrence d'un cas de force majeure justifiant une restitution du délai. Examen du contenu du certificat médical rétroactif produit. Rappel de la jurisprudence constante selon laquelle la gravité des conséquences d'un retard dans le paiement de l'avance sur la situation de la partie recourante ne sont pas prises en considération. Rejet du recours.
En fait
En droit

république et

canton de genève

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1151/2024-LCR ATA/242/2025

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 11 mars 2025

1ère section

 

dans la cause

 

A______ recourant

contre

OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES intimé

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 21 mai 2024 (JTAPI/476/2024)


EN FAIT

A. a. Par jugement du 21 mai 2024, le Tribunal administratif de première instance
(ci-après : TAPI) a déclaré irrecevable pour défaut de paiement de l’avance de frais, le recours formé le 5 avril 2024 par A______ contre la décision de l’office cantonal des véhicules (ci-après : OCV) du 23 février 2024.

b. Le courrier recommandé du TAPI, contenant l’invitation à s’acquitter de l’avance de frais de CHF 500.- dans un délai échéant le 10 mai 2024, avait été retourné par la Poste avec le mention « non réclamé » à l’issue du délai de garde, qui était arrivé à échéance le 18 avril 2024. Ce courrier précisait qu’à défaut de paiement de l’avance de frais dans le délai imparti, le recours serait déclaré irrecevable. Aucun paiement n’était intervenu dans ce délai.

B. a. Par acte expédié le 1er juillet 2024, A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre ce jugement, concluant à son annulation.

Pièces médicales à l’appui, il alléguait ne pas avoir pu retirer son recommandé en raison de son état de santé et donc ne pas avoir été en mesure de prendre connaissance en temps utile de la demande d'avance de frais qui lui avait été adressée par pli recommandé. Il avait ainsi été victime d’un empêchement non fautif de s’acquitter de cette avance de frais, souffrant d’un burn out qui l’avait laissé complètement apathique.

b. L’OCV n’a pas formulé d’observations.

c. Le 15 août 2024, le recourant a transmis un certificat médical établi par son médecin, le docteur B______, attestant de son « incapacité à gérer l’administratif », « depuis plusieurs semaines ou mois ».

Adressé à l’avocat du recourant et établi à sa demande, ce certificat médical précisait que le recourant était suivi par ledit médecin depuis juin 2024. D’après les éléments de l’anamnèse réalisée a posteriori, associés aux observations lors des entretiens, le recourant avait « sans aucun doute », depuis « plusieurs semaines ou mois avant cela », une « incapacité à gérer les problèmes administratifs (factures, courriers etc.) ». Cette incapacité à gérer l’administratif n’entravait pas, selon ce médecin, sa capacité dans d’autres domaines et était « connue dans certains troubles psychiques ».

d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.             Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Est litigieuse l’irrecevabilité du recours formé devant le TAPI pour non-paiement de l’avance de frais dans le délai imparti.

2.1 L'exigence de l'avance de frais et les conséquences juridiques en cas de
non-paiement de celle-ci relèvent du droit de procédure cantonal. Les cantons sont libres, dans le respect des garanties constitutionnelles, d'organiser cette matière à leur guise (arrêt du Tribunal fédéral
2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 5.1 ; ATA/1262/2017 du 5 septembre 2017 consid. 2a et les références citées).

2.2 En vertu de l’art. 86 LPA, la juridiction invite le recourant à faire une avance ou à fournir des sûretés destinées à couvrir les frais de procédure et les émoluments présumables ; elle fixe à cet effet un délai suffisant (al. 1). Si l’avance n'est pas faite dans le délai imparti, la juridiction déclare le recours irrecevable (al. 2). À rigueur de texte, l'art. 86 LPA ne laisse aucune place à des circonstances extraordinaires qui justifieraient que l'avance de frais n'intervienne pas dans le délai imparti. La référence au « délai suffisant » de l'al. 1 de cette disposition laisse néanmoins une certaine marge d'appréciation à l'autorité judiciaire saisie (ATA/1043/2021 du 5 octobre 2021 consid. 3b ; ATA/184/2019 du 26 février 2019 consid. 3c).

2.3 Selon la jurisprudence constante, il convient d'appliquer par analogie la notion de cas de force majeure de l'art. 16 al. 1 LPA afin d'examiner si l'intéressé a été empêché sans sa faute de verser l'avance de frais dans le délai fixé (ATA/184/2024 du 6 février 2024 consid. 2.2 et les arrêts cités).

Tombent sous la notion de force majeure les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d'activité de l'intéressé et qui s'imposent à lui de façon irrésistible (ATA/160/2019 du 19 février 2019 consid. 2b ; ATA/916/2015 du 8 septembre 2015 consid 2c ; ATA/378/2014 du 20 mai 2014 consid. 3d ;).

Selon la jurisprudence, la maladie ou un accident peuvent être considérés comme un empêchement non fautif et, par conséquent, permettre une restitution d'un délai, s’ils mettent l'administré ou son représentant légal objectivement ou subjectivement dans l'impossibilité d'agir par soi-même ou de charger une tierce personne d'agir en son nom dans le délai (arrêt du Tribunal fédéral 9C_209/2012 du 26 juin 2012 ; ATA/234/2014 du 8 avril 2014 consid. 10). La désorganisation de la vie privée suite au décès d’un proche a été considérée comme pouvant constituer un empêchement non fautif d’agir à temps et justifier une restitution de délai s’il survient peu avant l’échéance de celui-ci (arrêts du Tribunal fédéral 9C_54/2017 du 2 juin 2017 consid. 5 ; 1C_293/2010 du 21 juin 2010 consid. 2 ; ATA/153/2023 du 14 février 2023 consid. 2.3). En revanche, il n'est pas possible pour un recourant de se prévaloir d’un burn out ayant valu la délivrance d’un certificat médical, plusieurs mois après le délai imparti, pour déposer sa demande de renouvellement d’une autorisation et, plusieurs semaines après le refus d'entrer en matière de l'autorité, avec effet rétroactif à une date antérieure à l'échéance du délai de dépôt de la demande, dans la mesure où les circonstances de la délivrance d’un tel certificat médical interpellaient et que ce document n’attestait pas de l’impossibilité pour le recourant de finaliser sa demande à temps, fût-ce avec l’aide d’un tiers (ATA/1110/2023 du 10 octobre 2023).

Selon la casuistique, n'ont pas été considérés comme des cas de force majeure une panne du système informatique du mandataire du recourant l'ayant empêché de déposer un acte de recours dans le délai légal (ATA/222/2007 du 8 mai 2007 consid. 3b), le fait qu'un avocat ait transmis à son client la demande d'avance de frais par pli simple en prenant le risque que celui-ci ne reçoive pas ce courrier (ATA/596/2009 du 17 novembre 2009 consid. 6), pas plus que la maladie, celle-ci n'étant admise comme motif d'excuse que si elle empêche le recourant d'agir par lui-même ou de donner à un tiers les instructions nécessaires pour agir à sa place (ATA/50/2009 du 27 janvier 2009 consid. 3c). Ainsi, selon la jurisprudence de la chambre de céans, le seul état de santé déficient au moment de la notification de la décision est insuffisant (ATA/212/2014 du 1er avril 2014), de même qu’une dépression importante (ATA/660/2015 du 23 juin 2015). N'a de même pas été considérée comme constitutive d'un cas de force majeure, nonobstant un certificat mentionnant la nécessité de soins de l’intéressé et son incapacité à pouvoir gérer sa vie professionnelle et personnelle pendant six mois, la situation d’un administré atteint d’un cancer dont l'état de santé se péjorait et le traitement s’alourdissait, dès lors qu'il pouvait être attendu de sa part, compte tenu de son état de santé au moment de l'omission litigieuse, qu'il fasse appel à l'aide d'un tiers pour accomplir l'acte requis (ATA/888/2014 du 11 novembre 2014).

2.4 Il n'y a pas de rigueur excessive à ne pas entrer en matière sur un recours lorsque, conformément au droit de procédure applicable, la recevabilité de celui-ci est subordonnée au versement d'une avance de frais dans un délai déterminé. Il faut cependant que son auteur ait été averti de façon appropriée du montant à verser, du délai imparti pour le paiement et des conséquences de l'inobservation de ce délai (ATF 133 V 402 consid. 3.3 ; 104 Ia 105 consid. 5). La gravité des conséquences d'un retard dans le paiement de l'avance sur la situation du recourant n'est pas pertinente (arrêts du Tribunal fédéral 2C_107/2019 du 27 mai 2019 consid. 6.3 ; 2C_1022/2012 du 25 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées). Le Tribunal fédéral a confirmé l'application stricte, dans la jurisprudence genevoise, de l'art. 86 al. 2 LPA et des conséquences légales d'un non-paiement de l'avance de frais dans le délai imparti (arrêt du Tribunal fédéral 1C_339/2020 du 20 octobre 2020 consid. 2.4 et les références citées).

2.5 En l’espèce, le recourant ne conteste pas avoir omis de s'acquitter de l'avance de frais en faveur du TAPI dans le délai imparti. Il ne soutient, à juste titre, pas non plus que le délai de paiement d’un mois qui lui avait été imparti aurait été insuffisant.

Devant la chambre de céans, le recourant invoque un empêchement non fautif de de retirer son courrier et de s’acquitter de l’avance de frais, en raison de son état de santé, démontré selon lui par un certificat médical du Dr B______.

La chambre de céans observe toutefois que le certificat médical produit par l’intéressé, s’il évoque une « incapacité à gérer les problèmes administratifs (factures, courriers etc.), depuis « plusieurs semaines ou mois avant cela », n’est pas précis quant aux causes de cette incapacité ou ses effets.

Au demeurant, cette assertion ne peut pas être comprise comme une totale incapacité fonctionnelle due à une affection – au demeurant non mentionnée – de recevoir du courrier, de faire un téléphone, de solliciter de l’aide de la part de proches voire de contacter un mandataire pour gérer ses affaires administratives urgentes. En outre, se sachant partie à une procédure, le recourant devait s’assurer que les communications du TAPI, même (voire surtout) adressées par voie recommandée, lui parviennent. Le certificat médical sur lequel il fonde son argumentation a été établi visiblement à la demande du conseil du recourant le « 14 août 2014 » (recte : 2024), soit plus de quatre mois après le début supposé de l'incapacité alléguée. Il est peu détaillé, notamment en ce qui concerne les causes de l'incapacité, la durée de cette dernière et les actes concernés par celle-ci. Il n'en résulte notamment pas que le recourant n'aurait pas été capable de mandater un tiers pour gérer ses affaires, ce qui, au vu de la durée supposée de l'incapacité et du nombre d'actes administratifs qu'implique la vie quotidienne, apparaît peu vraisemblable. Ceci est d’autant plus vrai que la période concernée s’étale, selon le certificat, imprécis sur ce point, sur plusieurs semaines ou mois.

Force est d’ailleurs de constater que le recourant a été apte à interjeter, en personne, son recours devant le TAPI le 5 avril 2024 et à consulter un avocat. Cet élément relativise d’autant la portée du certificat médical produit. Le recourant échoue ainsi à établir qu’il se serait trouvé empêché de retirer son courrier dans le délai et de s’acquitter à temps de l’avance de frais réclamée par le TAPI en raison d’un cas de force majeure.

Partant, la chambre de céans ne peut que constater que, n’ayant pas versé l’avance de frais dans le délai imparti par le TAPI, le recourant n’a pas satisfait à une condition de recevabilité de son recours devant cette juridiction. Dans ces circonstances, le TAPI était fondé à déclarer le recours irrecevable conformément à l'art. 86 al. 2 LPA.

Manifestement mal fondé, le recours devra ainsi être rejeté.

3.             Au vu de l’issue du litige, un émolument de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui ne peut se voir allouer d’indemnité de procédure (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 1er juillet 2024 par A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 21 mai 2024 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 400.- à la charge de A______ ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à A______, à l'office cantonal des véhicules, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu’à l’office fédéral des routes.

Siégeant : Patrick CHENAUX, président, Eleanor McGREGOR, Claudio MASCOTTO, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. SCHEFFRE

 

 

le président siégeant :

 

 

P. CHENAUX

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :