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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3097/2022

ATA/641/2023 du 14.06.2023 ( PRISON ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 23.08.2023, rendu le 02.04.2024, REJETE, 7B_520/2023
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3097/2022-PRISON ATA/641/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 juin 2023

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______ recourant
représenté par Me Toni KERELEZOV, avocat

contre

PRISON DE CHAMP-DOLLON intimée

 



EN FAIT

A. a. Monsieur A______ a été incarcéré à la prison de Champ-Dollon du 29 janvier au 20 mai 2021 et du 23 août 2021 au 22 janvier 2022. Il a alors fait l’objet de respectivement seize et quinze sanctions disciplinaires.

b. Depuis le 4 mars 2022, il séjourne à nouveau dans cette prison, en exécution de peine.

c. Entre le 18 mars et le 2 août 2022, il a été sanctionné huit fois, pour injures et/ou menaces envers le personnel, trouble à l’ordre de l’établissement, refus d’obtempérer, voire possession d’un objet prohibé. Tous ces faits ont été sanctionnés de cellule forte, la durée variant de trois à dix jours.

d. En raison de la réitération régulière d’infractions aux dispositions réglementaires, M. A______ a été placé en régime de sécurité renforcée du 20 mai au 20 août 2022.

B.            Depuis son retour en régime de détention ordinaire, A______ a fait l’objet des sanctions suivantes :

- a. Selon le rapport d’incident du 22 août 2022, il avait sonné l’interphone à 21h16 le même jour et dit au gardien : « Ta mère c’est une pute », « Tu fais de l’inceste avec ton père » et « Vous êtes tous passés sur YouPorn ». Il avait également dit à un appointé : « Ta sœur c’est une pute, j’la baise ». Le détenu étant seul dans sa cellule, le responsable de la nuit avait décidé d’informer le gardien-chef adjoint le lendemain

Informé des faits le lendemain, ce dernier a décidé, à 08h05, de la mise en cellule forte d’A______.

Le directeur de la prison l’a entendu le même jour, à 09h00, sur les faits reprochés ; le détenu les a niés. Une décision de sanction de trois jours de cellule forte pour injure au personnel lui a ensuite été notifiée, à 9h05. Elle était signée du directeur et du gardien-chef adjoint. A______ a refusé de la signer.

- b. Selon le rapport d’incident du 28 août 2022, établi à 14h00, A______ avait sonné l’interphone durant la journée à de multiples reprises, indiquant au gardien que la mère de celui-ci était « clitoridienne ». Ce dernier lui avait rappelé les règles de l’institution ainsi que l’utilité de l’interphone. Le détenu s’était alors énervé et lui avait dit : « Ramène toi avec ta mère et ta sœur les putes, on va les comparer, va sucer des bites en enfer, viens me voir dans ma cellule et je vais niquer ta mère, je te fais chier parce que tu es un gardien et j’aime pas les gardiens parce que c’est tous des fils de putes ». Le gardien avait avisé le gardien-chef adjoint, qui avait décidé de la mise en cellule forte.

Entendu le même jour à 14h45 par le gardien-chef adjoint, le détenu a reconnu les faits reprochés. Le gardien-chef adjoint a alors décidé, à 14h50, de la mise en cellule forte d’A______ pour quatre jours, en raison de menaces envers le personnel, injures en récidive et attitude incorrecte envers le personnel.

La décision de sanction de quatre jours notifiée, le même jour, à 18h30, est signée du directeur et du gardien chef-adjoint. A______ y a écrit, à la place réservée à sa signature : « TLF A – TA MAIRE ET – SOERE MOIS – PAREILLE ».

- c. Selon le rapport d’incident du 29 août 2022, lors de la ronde médicale, à 16h25, A______ avait tenu des propos incohérents et traité trois gardiens de « bande de fils de pute, je vais vous choper ».

Le détenu n’a pas reconnu les faits lors de son audition à 16h55. Le gardien chef adjoint lui a infligé une sanction de trois jours de cellule forte pour menaces et injures envers le personnel, en récidive.

La décision de sanction notifiée le même jour à 18h30 est signée du directeur et du gardien-chef adjoint. A______ y a indiqué, à la place réservée à sa signature, « CES VOTRE TRAVAILLE A LA CONE SE QUIS VOU RHUMENNE LES SENUIS ».

- d. Selon le rapport d’incident du 12 octobre 2022, lors de la mise en cellule forte d’A______ à 9h55, toute la BIS avait dû être déployée, celui-ci s’étant opposé à la sortie de sa cellule ainsi qu’à la fouille corporelle. Il avait dû être fait usage de clé de bras et de clé de coude et d’un « double verrouillage sur les épaules » pour procéder à ladite fouille.

A______ a été placé en cellule forte le même jour à 10h00.

Une décision de sanction de cinq jours de cellule forte lui a été notifiée, le même jour à 18h30 pour injures envers le personnel et refus d’obtempérer. Elle était signée du directeur et du gardien-chef adjoint. A______ y a indiqué, à la place réservée à sa signature, « CES VOTRE TRAVAILLE A LA CONE SE QUIS VOU RHUMENNE LES SENUIS ».

- e. Selon le rapport d’incident du 14 octobre 2022, A______ avait, lors de la promenade quotidienne, insulté à de multiples reprises les gardiens en leur disant : « fils de pute, j’écrase toutes vos mères et je m’en tape ». Le détenu a ainsi été ramené en cellule forte, sans contrainte. Entendu au sujet des faits, l’intéressé les avait contestés.

Une sanction de trois jours de cellule forte lui a été infligée pour injures envers le personnel en récidive. Il ressort de la notification de sanction, signée par le directeur et le gardien-chef adjoint, qu’A______ s’est exprimé sur les faits le jour même à 15h20 et que la sanction lui a été notifiée à 15h25. L’intéressé a refusé de la signer.

C.           a. Par actes expédiés les 22, 27 et 28 septembre 2022 ainsi que les 11 et 14 novembre 2022 à la chambre administrative de la Cour de justice, A______ a recouru contre les sanctions des 23, 28 et 29 août, 12 et 14 octobre 2022. Il a pris, dans chaque recours, les mêmes conclusions, concluant, préalablement, à ce que soient produits : la décision non caviardée ainsi que les rapports y relatifs, les notes internes autorisant les agents de détention à placer un détenu en cellule forte avant qu’une décision soit prise par le directeur ainsi que celle autorisant la délégation prévue à l’art. 47 al. 7 du règlement sur le régime intérieur de la prison et le statut des personnes incarcérées du 30 septembre 1985 (RRIP - F 1 50.04), les décisions dont il avait été l’objet depuis le 4 mars 2022 et l’ensemble des décisions rendues les cinq dernières années par la prison pour chaque type de faits retenus contre lui dans les différentes décisions, à savoir injures et/ou menaces et/ou attitude incorrecte envers le personnel, en récidive ou non et refus d’obtempérer. La comparution personnelle des parties et « tout acte d’instruction utile » devaient être ordonnés.

Principalement, les décisions querellées devaient être déclarées nulles, subsidiairement annulées, et le caractère illicite de ses placements en cellule forte devait être constaté.

Il faisait l’objet de comportements hostiles, vexatoires et désobligeants de la part des agents de détention. Ceux-ci recherchaient une réaction de sa part en vue de justifier ensuite un rapport d’incident. Il estimait être victime de mesures de représailles, depuis 2021, à la suite d’un incident lors duquel il avait blessé une agente de détention.

Les agents s’ingéraient de manière insupportable dans sa vie privée, en tentant d’obtenir des informations sur ses pratiques religieuses et sexuelles ainsi que sur ses visions politiques. Il refusait de répondre à ces questions, ce que les agents n’acceptaient pas. C’était en réaction à ce refus de répondre que les agents établissaient des rapports d’incident prétendant qu’il avait un comportement violant les règles de l’établissement.

Dans un premier temps, il n’avait pas contesté les sanctions, craignant que les agents « renchérissent avec le harcèlement qu’ils lui infligeaient ». Il avait d’ailleurs demandé un changement d’établissement pénitentiaire.

Au mois d’août 2022, des agents de détention l’avaient insulté et accusé d’inceste impliquant sa mère, son père et la sœur de celui-ci. Ils lui avaient également dit qu’ils savaient qu’il se masturbait dans sa cellule, qu’il avait fréquemment recours à des prostituées et regardait des films à caractère pornographique. En raison de ces insultes, proférées devant d’autres détenus, il avait commencé à se faire insulter par ceux-ci.

a.b. Le 22 août 2022, un détenu en particulier avait persisté à l’insulter depuis la fenêtre de sa cellule. Il avait contacté les agents de détention pour leur rapporter ce que l’autre détenu lui disait. Ceux-ci n’étaient toutefois pas intervenus.

Il avait été placé en cellule forte le lendemain vers 07h00. Aucune explication ne lui avait été donnée. Il avait contesté avoir injurié le personnel, sans avoir eu l’occasion de s’expliquer davantage. Il n’avait pas reçu la sanction ni le rapport d’incident.

Son droit d’être entendu avait été violé. Il ne pouvait être accordé aucun crédit aux rapports des agents de détention.

a.c. À sa sortie de cellule forte, à la suite de la sanction précédente, il avait à nouveau été insulté par les agents de détention, qui « s’en étaient à nouveau pris [à lui] et à sa famille avec des accusations d’inceste ». Il avait répondu qu’il était prêt à faire « une confrontation des accusations d’inceste en présence de sa mère et sa sœur », mais que les agents devaient également venir avec leur mère et leurs sœurs. Il avait alors été placé en cellule forte au motif qu’il avait insulté la mère et les sœurs des agents de détention. Aucun autre motif du placement en cellule forte ne lui avait été fourni. Il avait refusé de signer la notification de la décision du 28 août 2022. Ses indications « TLF A – TA MAIRE ET – SOERE MOIS – PAREILLE » signifiaient qu’il invitait les agents à téléphoner à leur mère et sœurs en vue d’une confrontation.

Il n’avait ni pu s’exprimer ni reconnu les faits relatifs à la sanction du 28 août 2022.

a.d. En indiquant sur la sanction du 29 août 2022 « CES VOTRE TRAVAILLE A LA CONE SE QUIS VOU RHUMENNE LES SENUIS », il entendait exprimer que les actes qu’il subissait de la part des agents de détention constituaient un travail dépourvu de toute justification et entraînaient des ennuis pour les agents. Il n’avait pas pu s’exprimer sur les faits reprochés.

a.e. Le 12 octobre 2022, il n’avait pas injurié le personnel ni refusé d’obtempérer. L’utilisation de la contrainte à son égard n’était pas nécessaire : ayant à plusieurs reprises été malmené, il préférait « se mettre à plat ventre lors des contrôles pour éviter des débordements ». Il n’avait pas pu s’exprimer sur les faits reprochés avant de se voir notifier la décision de sanction. Il avait déposé plainte pénale pour ces faits.

a.f. Il contestait avoir, le 14 octobre 2022, alors qu’il purgeait une sanction de cellule forte, insulté les agents de détention. Devant la porte de la cellule forte dans laquelle il se trouvait et avant de se rendre à la promenade, deux agents l’avaient insulté en l’accusant d’entretenir des relations sexuelles avec sa mère et sa sœur et de prêcher la reconquête musulmane.

b. La direction de la prison a conclu au rejet de chacun des recours.

Il n’y avait pas lieu de donner suite aux actes d’instruction requis, qui n’étaient pas pertinents. Contrairement à ce que soutenait le recourant, il n’existait pas de note interne autorisation les agents de détention à décider et à exécuter la mise en cellule forte avant que la décision ne soit prise par le directeur de la prison ; une telle note ne pouvait donc être produite. En cas de demande de la chambre administrative, les rapports d’incident ayant donné lieu à la sanction querellée seraient transmis non caviardés à celle-ci. Le recourant disposait d’une version non caviardée de la sanction. Dans le cadre de la procédure ayant donné lieu à l’arrêt 1B_358/2022 du Tribunal fédéral, les sanctions prononcées depuis le 4 mars au 19 mai 2022 avaient été produites. Le 12 septembre 2022, les sanctions des mois d’aout et septembre 2022 avaient été produites.

Aucun élément ne justifiait de s’écarter de ces constats dûment documentés dans les rapports d’incident établis par des agents assermentés. Le droit d’être entendu du recourant avait systématiquement été respecté et les sanctions, qui respectaient le principe de la proportionnalité, étaient fondées.

c. À la demande de la chambre de céans, l’ensemble des rapports d’incident des mois d’août au 14 octobre 2022, non caviardés, a été produit.

d. Par courrier du 19 décembre 2022, le recourant a informé la chambre administrative qu’il avait déposé plainte pénale contre des agents de détention. Se posait ainsi la question de savoir s’il convenait de suspendre la présente procédure. Il demandait également à pouvoir recevoir copie des rapports non caviardés.

e. Invité à transmettre copie de la plainte pénale, le recourant l’a transmise en sollicitant qu’elle ne soit pas remise à l’autorité intimée. L’instruction, confiée à l’inspection générale des services (ci-après : IGS) n’en était qu’à ses débuts. Une communication de la plainte pénale pourrait interférer avec le travail de l’IGS.

f. Il a été fait droit à cette requête, le contenu des plaintes émises ayant été résumé dans un courrier de la chambre administrative à l’attention de l’autorité intimée.

g. Dans sa réplique, le recourant a fait valoir que cette dernière ne s’étant pas déterminée sur sa version des faits, celle-ci devait être considérée comme établie. Les images de « bodycam » n’apportaient pas d’éléments pertinents. Il contestait le bien-fondé des sanctions prononcées à son encontre. Les rapports d’incident ne comportaient pas le nom des agents de détention ; un seul nom n’avait pas été caviardé. Il maintenait la demande qu’il soit procédé aux actes d’instruction requis avec son recours. Dès lors qu’il contestait ces rapports, il avait le droit de faire entendre le ou les agents qui les avaient rédigés.

Il avait été placé en cellule forte avant que les sanctions n soient prononcées, ce qui les rendaient illicites. Contrairement à ce que soutenait l’autorité intimée, il avait contesté l’ensemble des faits reprochés, ce qui ressortait notamment du rapport complémentaire du 23 août 2022. Au vu du contexte de maltraitance dont il faisait l’objet, il ne pouvait être accordé de crédit aux rapports des agents de détention.

h. Selon l’arrêt du 6 décembre 2022 rendu par la chambre pénale d’appel et de révision (ci-après : CPAR), A______ a été acquitté des chefs de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires concernant des faits ayant impliqué les agents de détention B______ et C______ ; sa condamnation par le Tribunal de police des chefs de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires exercées à l’encontre de D______et des agents E______ et F______a été confirmée.

i. Par décision du 22 mars 2023, la chambre administrative a joint les cinq recours, refusé de suspendre la procédure dans l’attente de l’issue de la procédure pénale, autorisé le conseil du recourant à venir consulter les rapports d’incident et les sanctions non caviardés et lui a imparti un délai pour se déterminer après cette consultation.

j. Se déterminant après la consultation des rapports d’incidents et des sanctions non caviardés, le recourant a relevé que l’agent D______, impliqué dans la sanction du 23 août 2022, s’était déjà plaint par le passé qu’il l’aurait insulté. Il avait été désavoué dans la procédure pénale. Il convenait donc d’entendre G______, l’auteure du rapport et prétendue victime d’insultes, et les deux autres agents présents lors de l’incident, H______ et I______.

Lors de l’incident du 28 août 2022, seul l’auteur du rapport, J______, était présent. Il convenait d’entendre celui-ci ainsi que le gardien-chef, I______, qui l’avait prétendument entendu à la suite des événements. Le même agent aurait été insulté le 29 août 2022, en compagnie de deux autres agents (K______ et L______) et d’une infirmière. L’ensemble de ces témoins devait être entendu. Il en allait de même des auteurs des rapports d’incident M______ et N______ ainsi que des agents présents lors des incidents auxquels se rapportaient ces rapports, à savoir O______, K______, I______ et P______.

Les comportements décrits dans les cinq rapports d’incidents n’étaient corroborés par aucune image de vidéosurveillance. Celles relatives au rapport d’incident du 12 octobre 2022 n’avaient pas été produites.

k. La chambre de céans a invité le recourant à venir consulter, s’il le souhaitait, les images de vidéosurveillance relatives au rapport d’incident du 12 octobre 2022, produites par la prison.

l. À la suite de cette consultation, le recourant a relevé que les images, prises uniquement dans la cellule forte, n’établissaient pas ce qui s’était produit avant, notamment le refus de collaborer du recourant ou les insultes qu’il aurait proférées. Il ressortait de ces images que l’usage de la contrainte était disproportionné. Il ne s’était pas débattu et n’avait été ni agité, ni agressif.

m. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger, y compris sur la question des actes d’instruction complémentaires requis.

n. Il est précisé que la chambre de céans a visionné l’ensemble des images de vidéosurveillance transmises par la prison et que le recourant a pu visionner. Il sera revenu, en tant que de besoin, sur le contenu de celles-ci ci-après dans la partie « en droit ».

EN DROIT

1.             Les recours ont été interjetés en temps utile devant la juridiction compétente (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2.             Bien que les sanctions aient été exécutées, le recourant conserve un intérêt actuel à l'examen de la légalité de celles-ci, dès lors qu'il pourrait être tenu compte des sanctions contestées en cas de nouveau problème disciplinaire ou de demande de libération conditionnelle (ATF 139 I 206 consid. 1.1 ; ATA/498/2022 du 11 mai 2022 consid. 2 ; ATA/50/2022 du 18 janvier 2022 consid. 2).

Les recours sont donc recevables, sous réserve de ce qui suit.

En effet, en tant que le recourant fait valoir qu’il subirait des actes de malveillance de la part des gardiens, ses griefs sont irrecevables. L’objet de la présente procédure est limité à la question du bien-fondé des sanctions de cellule forte, qui lui ont été infligées. La présente procédure ne peut donc s’étendre à d’autres questions, étant relevé que la chambre de céans n’est pas une autorité de surveillance, mais de recours.

3.             Le recourant sollicite différents actes d’instruction.

3.1 Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et l’art. 41 LPA, le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour l'intéressé d'offrir des preuves pertinentes et d'obtenir qu'il y soit donné suite (ATF 145 I 73 consid. 7.2.2.1 ; 132 II 485 consid. 3.2). Ce droit n'empêche pas la juge de renoncer à l'administration de certaines preuves et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, si elle acquiert la certitude que celles-ci ne l'amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 131 I 153 consid. 3). En outre, il n'implique pas le droit d'être entendu oralement ni celui de faire entendre des témoins (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1).

3.2 En l'espèce, le recourant a eu l’occasion de faire valoir son point de vue tout au long de la procédure devant la chambre de céans dans son recours. Il a, en outre, pu produire toutes les pièces qu’il estimait utiles. Il n’explique pas en quoi son audition permettrait d’apporter des éléments autres que ses allégations. Il n’y a donc pas lieu de procéder à son audition.

Il ne sera pas non plus fait droit à la demande d’audition des agents de détention ayant rédigé les rapports d’incidents, ayant assisté aux faits reprochés ou encore entendu le recourant avant le prononcé des sanctions querellées au vu de ce qui sera développé ci-après.

Il a d’ores et déjà été fait droit à la demande du recourant de prendre connaissance des rapports d’incident et des sanctions non caviardés concernant les cinq sanctions querellées, et le recourant n’a pas contesté l’allégation de l’autorité intimée selon laquelle il avait eu accès, dans le cadre de précédentes procédures, à l’ensemble des sanctions prononcées à son endroit depuis le 4 mars 2022. Ces points sont donc devenus sans objet. La production des sanctions disciplinaires dont le recourant a été l’objet entre le 29 janvier et le 20 mai 2021 n’est pas pertinente, celles-ci ne faisant pas l’objet de la présente procédure, d’une part, et les sanctions querellées ne se référant, de manière détaillée, qu’aux sanctions relatives au « séjour actuel » du recourant à la prison, soit à la période postérieure au 4 mars 2022.

La production par la prison de l’ensemble des sanctions disciplinaires prononcées, les cinq dernières années, à l’encontre de personnes détenues pour injures et/ou menaces et/ou attitude incorrecte envers le personnel, en récidive ou non, refus d’obtempérer n’est pas pertinente, chaque sanction devant tenir compte de l’ensemble des circonstances, y compris des antécédents disciplinaires des détenus, de sorte que la production de ces sanctions ne serait pas de nature à apporter un éclairage pertinent pour la solution du litige.

L’ordre de service relatif à la délégation de compétence pour prononcer une sanction de trois jours de cellule forte ressort de la jurisprudence de la chambre administrative (consid. 5 ci-après), dûment publiée, de sorte que le recourant est supposé en avoir connaissance. Il en va de même des conditions auxquelles un détenu peut être placé en cellule forte avant qu’une décision soit prise (consid. 4 ci-dessous). Il n’y a donc pas lieu non plus d’ordonner la production de l’ordre de service ou de notes internes à cet égard.

Pour le surplus, le dossier, comportant de nombreuses pièces ainsi que les images de vidéosurveillance, est complet et permet à la chambre de céans de trancher le litige sans procéder à d’autres actes d’instruction.

Il ne sera ainsi pas fait droit à la demande d’actes d’instruction complémentaires.

4.             Dans un grief de nature formelle, le recourant se plaint de la violation de son droit d’être entendu, estimant ne pas avoir pu s’exprimer avant que les sanctions à son endroit soient prononcées.

4.1 Comme cela vient d’être évoqué, l’art. 29 al. 2 Cst. et 41 LPA comprennent le droit pour l'intéressé de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique (ATF 133 I 270 consid. 3.1 ; 132 II 485 consid. 3.2). L’art. 47 al. 2 RRIP prévoit expressément qu’avant le prononcé de la sanction, le détenu doit être informé des faits qui lui sont reprochés et être entendu.

4.2 La jurisprudence de la chambre de céans admet qu'en cas d'incident nécessitant une sanction se produisant après les horaires ordinaires d'activité de la prison, soit après 18h00, le droit d'être entendu puisse s'exercer de manière un peu différée, soit en particulier le lendemain matin à la première heure, ceci en raison des besoins du service, notamment dans les cas où l'autorité décisionnaire est le directeur ou un autre membre gradé du personnel, dont le nombre est restreint dès le soir, ou en cas d’urgence (ATA/318/2020 du 31 mars 2020 consid. 4b ; ATA/1846/2019 du 20 décembre 2019 consid. 3c ; ATA/1597/2019 du 29 octobre 2019 consid. 2b ; ATA/500/2017 du 2 mai 2017 consid. 6a).

4.3 En l’espèce, il convient d’examiner séparément pour chaque sanction contestée si le droit d’être entendu du recourant a été respecté.

4.3.1 Les faits reprochés survenus le 22 août 2022 ont eu lieu, selon le rapport d’incident, le jour même à 21h16. Il ressort du rapport d’incident que, le détenu étant seul dans sa cellule, le responsable de nuit avait décidé d’informer des faits le gardien chef adjoint le lendemain. Ce dernier a établi un complément au rapport précité le lendemain, dont il ressort qu’il avait décidé de la mise en cellule forte du recourant à 08h05. Le rapport signé par le directeur de la prison, établi le 23 août 2022 à 09h30, indique que le recourant a été entendu par celui-ci, à 09h05, au sujet des faits et qu’il les avait contestés. Selon la décision de sanction également, le recourant a pu s’exprimer le 23 août 2022 à 09h00 et la sanction lui a été notifiée à 09h05.

Au vu de ce qui précède, il apparaît que le recourant a pu se déterminer sur la sanction litigieuse peu après avoir été conduit en cellule forte.

4.3.2 Selon le rapport d’incident du 28 août 2022, les faits reprochés avaient eu lieu à 13h35. Informé le jour même, le gardien-chef adjoint du jour avait décidé de la mise en cellule forte du détenu. Sous la rubrique « décision ou commentaire », figurant à la suite du rapport d’incident, un autre gardien-chef adjoint a entendu le recourant, le même jour, à 14h45, notant que ce dernier avait reconnu les faits. Il ressort, en outre, de la notification de sanction, cosignée par le gardien chef adjoint et le directeur, que le recourant avait été entendu au sujet des faits le jour en question à 14h45 et que la sanction lui a été notifiée à 14h50.

Il ressort de ce qui précède que le recourant a pu s’exprimer sur les faits ayant fondé la sanction du 28 août 2022 peu après avoir été conduit en cellule forte.

4.3.3 Selon le rapport d’incident du 29 août 2022, les faits reprochés au recourant avaient eu lieu le jour même à 16h25. Sous la rubrique « décision ou commentaire », figurant à la suite du rapport d’incident, le gardien chef adjoint a entendu le recourant, le même jour, à 16h55, notant que ce dernier contestait les faits reprochés. Il ressort, en outre, de la notification de sanction, cosignée par le gardien-chef adjoint et le directeur, que le recourant avait été entendu au sujet des faits le jour en question à 16h55 et la sanction lui a été notifiée à 17h00.

Il ressort de ce qui précède que le recourant a pu s’exprimer sur les faits ayant fondé la sanction du 29 août 2022 peu après avoir été conduit en cellule forte.

4.3.4 Selon le rapport d’incident du 12 octobre 2022, les faits reprochés au recourant avaient eu lieu le 11 octobre 2022 à 20h32 et s’étaient poursuivis jusqu’à 03h06 le lendemain. Un complément à ce rapport d’incident a été établi par le gardien-chef adjoint le 12 octobre 2022, mentionnant qu’il avait décidé de la mise en cellule forte du détenu et que le transfert en cellule forte et la fouille s’étaient faits sous la contrainte. Sous la rubrique « décision ou commentaire », figurant à la suite du complément de rapport d’incident, il est consigné que le gardien-chef adjoint a entendu le recourant, le 12 octobre 2022 à 14h05. Ce dernier ne reconnaissait pas les faits, ne l’avait pas laissé parler et l’avait injurié en disant : « va baiser ta mère ». Il ressort, en outre, de la notification de sanction, cosignée par le gardien-chef adjoint et le directeur, que le recourant a été entendu au sujet des faits le jour en question à 14h05 et la sanction lui a été notifiée à 14h10.

Il ressort de ce qui précède que le recourant a pu s’exprimer sur les faits ayant fondé la sanction du 12 octobre 2022 peu après avoir été conduit en cellule forte.

4.3.5 Selon le rapport d’incident du 14 octobre 2022, les faits reprochés au recourant avaient eu lieu le jour même à 14h03. Sous la rubrique « décision ou commentaire », figurant à la suite du rapport d’incident, le gardien-chef adjoint a entendu le recourant, le même jour, à 15h20, notant que ce dernier contestait les faits reprochés. Il ressort, en outre, de la notification de sanction, cosignée par le gardien chef adjoint et le directeur, que le recourant a été entendu au sujet des faits le jour en question à 15h20 et la sanction lui a été notifiée à 15h25.

Il ressort de ce qui précède que le recourant a pu s’exprimer sur les faits ayant fondé la sanction du 14 octobre 2022, étant précisé que cette dernière n’a été exécutée qu’à compter du 17 octobre 2022, dès lors que les faits reprochés avaient eu lieu alors que le recourant était en train de purger une sanction de cellule forte.

4.4 Outre le fait que le recourant a pu s’exprimer comme cela vient d’être exposé à chaque prononcé de sanction, il a pu, dans le cadre du présent recours, assisté d’un avocat, faire valoir sa version des faits et ses arguments. Ainsi, quand bien même une violation de son droit d’être entendu aurait dû être admise, celle-ci aurait été réparée dans la procédure de recours.

Le grief sera donc rejeté.

5.             Le recourant conteste la compétence des personnes ayant prononcé les sanctions, en tirant un grief de nullité.

5.1 À teneur de l'art. 47 al. 3 RRIP, le directeur ou, en son absence, son suppléant sont compétents pour prononcer, notamment, le placement en cellule forte pour dix jours au plus (let. g). Le directeur peut déléguer ces compétences à un membre du personnel gradé (art. 47 al. 7 RRIP). L'art. 47 al. 7 RRIP prévoit que le directeur peut déléguer la compétence de prononcer les sanctions prévues à l'al. 3 à d'autres membres du personnel gradé. Les modalités de la délégation sont prévues dans un ordre de service. L'ordre de service B 24 de la prison prévoit une telle délégation pour le placement en cellule forte de un à cinq jours en faveur du membre « consigné » de la direction (ATA/1115/2022 du 4 novembre 2022 consid. 4c ; ATA/498/2022 du 11 mai 2022 consid. 5c ; ATA/784/2021 du 27 juillet 2021 consid. 2c ; ATA/1631/2017 du 19 décembre 2017 consid. 3).

5.2 En l’espèce, les décisions de placement en cellule forte ont été prises par un gardien-chef adjoint, selon les rapports d’incident, notamment les indications figurant sous « décision ou commentaire » de ceux-ci, puis ratifiées formellement le même jour par le directeur et un gardien chef adjoint. Les décisions ont donc été prises par les personnes habilitées à les prononcer. Par ailleurs, rien ne permet de douter que le recourant s’est vu notifier les décisions querellées, comme cela figure sur celles-ci, signées notamment du directeur de la prison. Y figurent d’ailleurs parfois des annotations manuscrites du recourant.

Le grief sera ainsi également rejeté.

6.             Le recourant conteste l’ensemble des faits reprochés.

6.1 Le droit disciplinaire est un ensemble de sanctions dont l'autorité dispose à l'égard d'une collectivité déterminée de personnes, soumises à un statut spécial ou qui, tenues par un régime particulier d'obligations, font l'objet d'une surveillance spéciale. Il s'applique aux divers régimes de rapports de puissance publique et notamment aux détenus. Le droit disciplinaire se caractérise d'abord par la nature des obligations qu'il sanctionne, la justification en réside dans la nature réglementaire des relations entre l'administration et les intéressés. L'administration dispose d'un éventail de sanctions dont le choix doit respecter le principe de la proportionnalité (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 142 à 145 et la jurisprudence citée).

Les sanctions disciplinaires sont régies par les principes généraux du droit pénal, de sorte qu'elles ne sauraient être prononcées en l'absence d'une faute (ATA/412/2022 du 13 avril 2022 consid. 4a ; ATA/43/2019 du 15 janvier 2019 ; ATA/1108/2018 du 17 octobre 2018 et les références citées).

6.2 Le statut des personnes incarcérées à la prison est régi par le règlement sur le régime intérieur de la prison et le statut des personnes incarcérées du 30 septembre 1985 (RRIP - F 1 50.04), dont les dispositions doivent être respectées par les détenus (art. 42 RRIP). En toute circonstance, ceux-ci doivent observer une attitude correcte à l'égard du personnel pénitentiaire, des autres personnes incarcérées et des tiers (art. 44 RRIP). Il est interdit aux détenus, d’une façon générale, de troubler l’ordre et la tranquillité de l’établissement (art. 45 let. h RRIP). En tout temps, la direction peut ordonner des fouilles corporelles et une inspection des locaux (art. 46 RRIP).

6.3 Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 5 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), se compose des règles d'aptitude – qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, l'on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATA/219/2020 du 25 février 2020 consid. 6d et la référence citée).

6.4 L'art. 180 al. 1 du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) réprime le comportement de celui qui, par une menace grave, aura alarmé ou effrayé une personne.

Sur le plan objectif, cette infraction suppose la réalisation de deux conditions : il faut que l'auteur ait émis une menace grave, soit une menace objectivement de nature à alarmer ou à effrayer la victime (ATF 122 IV 97 consid. 2b ; 99 IV 212 consid. 1a), et que la victime ait été effectivement alarmée ou effrayée (arrêts du Tribunal fédéral 6B_578/2016 du 19 août 2016 consid. 2.1 ; 6B_871/2014 du 24 août 2015 consid. 2.2.2). Le contexte dans lequel des propos sont émis est un élément permettant d'en apprécier le caractère menaçant ou non (arrêts du Tribunal fédéral 6B_593/2016 du 27 avril 2017 consid. 3.1.3 ; 6B_307/2013 du 13 juin 2013 consid. 5.2).

6.5 Dans sa casuistique, la chambre de céans a considéré que constituaient une menace les propos : « je vais trouver toutes vos adresses et je vais vous retrouver dehors » (ATA/670/2015 du 23 juin 2015) ou encore « fais attention à ta femme et tes enfants, quand je sortirai je m'en occuperai » (ATA/13/2015 du 6 janvier 2015).

En revanche, l’exclamation « Je vous préviens ( ). Le pied contre la porte et les coups (de pieds donnés au chariot ou de pieds donnés par le codétenu dans la porte), c’est aussi pour vous ! » et les phrases « Je ne suis pas détenu ici. Je ne suis pas malade. Vous devez arrêter le cigare ! Vous allez voir » n’atteignaient pas une intensité telle qu’elles pouvaient constituer une menace objectivement de nature à alarmer ou à effrayer un ou des agents de détention (ATA/731/2018 du 10 juillet 2018). De même, elle a retenu que l'expression « Genève, c'est petit » ne constituait pas, d’un point de vue objectif, une menace grave au sens de l’art. 180 al. 1 CP (ATA/1242/2018 précité consid. 9).

6.6 En matière de sanctions disciplinaires, l'autorité dispose d'un large pouvoir d'appréciation, le pouvoir d'examen de la chambre administrative se limitant à l'excès ou l'abus de ce pouvoir d'appréciation (art. 61 al. 2 LPA ; ATA/97/2020 précité consid. 4f et les références citées).

6.7 Dans sa jurisprudence, la chambre administrative a confirmé une sanction de dix jours de cellule forte (ATA/1418/2019 du 24 septembre 2019) à l’encontre d’un détenu dont l'attitude, en particulier son refus d'obéir et de se soumettre, avait entraîné un grand désordre manifeste dans l'établissement, un surveillant ayant même été blessé. Huit jours de cellule forte ont été confirmés par la chambre de céans pour une détenue qui avait exercé de la violence physique sur le personnel, l’avait injurié, avait refusé d’obtempérer et avait troublé l’ordre de l’établissement (ATA/97/2020 du 28 janvier 2020).

Sept jours de cellule forte ont été confirmés par la chambre de céans pour trouble à l’ordre de l’établissement, refus d’obtempérer (remonter à l’étage), insultes à l’encontre du personnel pendant plusieurs minutes notamment (« Fils de pute, nique ta mère ! »), le détenu ayant précédemment fait l’objet de huit sanctions disciplinaires (ATA/1189/2018 du 6 novembre 2018).

La chambre de céans a considéré que la sanction disciplinaire de sept jours de cellule forte pour violence physique envers le personnel de la prison était proportionnée par rapport aux précédentes sanctions de, respectivement deux, trois et cinq jours de cellule forte ainsi qu’en raison du refus persistant du détenu de se conformer aux instructions du personnel de la prison (ATA/1282/2015 du 1er décembre 2015).

Cinq jours de cellule forte pour avoir menacé le personnel, l'avoir insulté et avoir troublé l'ordre de l'établissement ont été confirmés par la chambre de céans (ATA/1242/2018 du 20 novembre 2018), de même que cinq jours de cellule forte pour injures et menaces envers le personnel de la prison (ATA/1820/2019 du 17 décembre 2019).

6.8 De jurisprudence constante, la chambre de céans accorde généralement une pleine valeur probante aux constatations figurant dans un rapport de police, établi par des agents assermentés, sauf si des éléments permettent de s'en écarter. Dès lors que les agents de détention sont également des fonctionnaires assermentés (art. 19 de la loi sur l'organisation des établissements et le statut du personnel pénitentiaire du 3 novembre 2016 - LOPP - F 1 50), le même raisonnement peut être appliqué aux rapports établis par ces derniers (ATA/284/2020 précité consid. 4f et les références citées).

7.             Il convient d’examiner ci-après le bien-fondé des sanctions contestées à l’aune des principes qui viennent d’être énoncés.

7.1 À titre préalable, il est relevé que, contrairement à ce que soutient le recourant, aucun élément ne permet de retenir qu’il serait vraisemblable que les agents de détention se seraient unis pour le « pousser à la faute ». Les rapports d’incident ont été rédigés par les agents de détention ayant été immédiatement témoins des faits reprochés au recourant. Par ailleurs, contrairement aux affirmations du recourant, il n’apparaît pas que ce soit systématiquement le même agent de détention qui ait rapporté les faits sanctionnés ni que les agents présents lors des incidents étaient toujours ou souvent les mêmes. En outre, les agents B______ et C______, dont la plainte à l’encontre du recourant a été rejetée par la CPAR, n’ont établi aucun rapport d’incident ni été présents lors des incidents. Par ailleurs, contrairement à ce qu’indique le recourant, sa condamnation par le Tribunal de police des chefs de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires exercées, notamment, à l’encontre de D______a été confirmée par la CPAR. Ainsi, aucun indice ne rend vraisemblable que les agents de détention feraient preuve d’une attitude hostile à l’égard du recourant ou se seraient concertés pour le provoquer et le « pousser à la faute ». En l’absence de tels indices, il n’y a pas lieu de procéder à l’audition des agents de détention ayant rédigé les rapports d’incident, été témoins des faits sanctionnés ou participé aux décisions querellées.

7.2 La sanction de trois jours de cellule forte du 23 août 2022 a été prononcée pour injures envers le personnel.

7.2.1 Selon le rapport d’incident du 22 août 2022, le recourant avait sonné à l’interphone à 21h16 le même jour et dit à la gardienne qui lui avait répondu : « Ta mère c’est une pute », « Tu fais de l’inceste avec ton père » et « Vous êtes tous passés sur YouPorn ». Il avait également dit à un appointé : « Ta sœur c’est une pute, j’la baise ». Le recourant conteste ce rapport d’incident, faisant valoir qu’il avait été insulté par un autre détenu, le soir en question, et avait contacté les agents de détention pour leur rapporter les propos ; toutefois, aucun agent n’était intervenu pour faire cesser ces propos.

Or, le recourant se borne à opposer sa propre version des faits sans apporter d’éléments permettant de s’écarter du rapport, établi par une agente de détention assermentée. Le fait que l’appointé D______ ait avec deux autres agents de détention déposé plainte pénale contre le recourant pour d’autres faits – ayant d’ailleurs conduit, contrairement aux allégations de celui-ci, à sa condamnation – , ne permet pas à lui seul de remettre en cause les propos décrits par la gardienne dans son rapport. Aucun élément ne permet non plus de douter de l’exactitude du rapport d’incident, notamment des propos qui y figurent.

Il sera donc retenu que le recourant a tenu les propos qui lui sont imputés dans ledit rapport. Ces propos grossiers ne sauraient être acceptés au sein de l’établissement, pas plus d’ailleurs qu'à l'extérieur. Le comportement consistant à s’en prendre verbalement et grossièrement à des agents de détention est susceptibles de troubler l'ordre, la sécurité et la tranquillité de l'établissement. De ce fait, le recourant a violé ses obligations de détenu, telles que figurant aux art. 42 ss RRIP, en particulier aux art. 44 et 45 let. h RRIP. Il s'ensuit que l'autorité intimée était fondée à le sanctionner pour ces faits.

7.2.2 S'il est vrai que le placement en cellule forte constitue la sanction la plus sévère mentionnée à l'art. 47 al. 3 RRIP, il n'en demeure pas moins que le recourant, à teneur du dossier, a fait l’objet de nombreuses sanctions disciplinaires entre le 18 mars et le 2 août 2022, notamment pour injures envers le personnel. L'autorité intimée était dès lors fondée à faire preuve de sévérité en lui infligeant, pour ces faits, une sanction de trois jours de cellule forte, dont la quotité se situe au demeurant en bas de la fourchette, étant rappelé que le placement en cellule forte peut être prononcé pour dix jours au plus.

Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, l'autorité intimée n'a ni abusé ni excédé son pouvoir d'appréciation en prononçant le 23 août 2022 le placement du recourant en cellule forte pour trois jours.

7.3 La sanction de quatre jours de cellule forte du 28 août 2022 a été prononcée pour menaces et injures envers le personnel en récidive et attitude incorrecte envers le personnel.

7.3.1 Selon le rapport d’incident du 28 août 2022, établi à 14h00, le recourant avait sonné à l’interphone durant la journée à de multiples reprises, indiquant au gardien que la mère de celui-ci était « clitoridienne ». Ce dernier lui avait rappelé les règles de l’institution ainsi que l’utilité de l’interphone. Le détenu s’était alors énervé et lui avait dit : « Ramène-toi avec ta mère et ta sœur les putes, on va les comparer, va sucer des bites en enfer, viens me voir dans ma cellule et je vais niquer ta mère, je te fais chier parce que tu es un gardien et j’aime pas les gardiens parce que c’est tous des fils de putes ».

Le recourant conteste le rapport en faisant valoir qu’à sa sortie de cellule forte, à la fin de la sanction précédente, il avait « à nouveau » fait l’objet d’insultes de la part des agents de détention, qui avaient proféré des accusations d’inceste à son égard et à celui de sa famille. Il avait alors riposté en se disant prêt à « une confrontation des accusations d’inceste en présence de sa mère et de sa sœur », les agents devant également faire venir leur propre mère et sœurs. C’était ce qu’il avait exprimé en indiquant, sur la notification de la sanction : « TLF A – TA MAIRE ET – SOERE MOIS – PAREILLE ».

Or, le recourant ne se prononce nullement sur les propos que lui impute le rapport d’incident. Il se borne à alléguer avoir fait l’objet d’insultes de la part du personnel de la prison, mais ne se détermine pas sur ceux qu’il a tenus, selon ledit rapport. Par ailleurs, les commentaires qu’il a écrits sur la notification de sanction ne permettent pas de déduire qu’il n’aurait pas tenu les propos reprochés. Ils semblent au contraire confirmer ceux-ci, le recourant ayant, en des termes grossiers, invité le gardien à faire venir sa mère et sa sœur afin de les « comparer ». Il n’apporte, en outre, aucun élément justifiant de s’écarter du rapport d’incident, hormis des allégations générales relatives à l’hostilité dont les agents de détention feraient preuve à son encontre.

Il sera donc retenu que le recourant a tenu les propos qui lui sont imputés. Ceux-ci sont particulièrement grossiers et sont, pour les motifs déjà exposés ci-dessus, inadmissibles et justifient le prononcé d’une sanction, le recourant ayant failli à son obligation d’observer une attitude correcte à l'égard du personnel pénitentiaire (art. 44) et de ne pas troubler l’ordre et la tranquillité de l’établissement (art. 45 let. h RRIP). Il convient toutefois de constater que les propos ne contiennent pas de menaces, ce dont il y aura lieu de tenir compte dans l’examen de la quotité de la sanction.

7.3.2 Compte tenu des nombreux antécédents disciplinaires du recourant depuis le 18 mars 2022, notamment pour injures et attitude incorrecte envers le personnel, l'autorité intimée était fondée à faire preuve de sévérité en lui infligeant, pour ces faits, une sanction de cellule forte. Il convient cependant de réduire la sanction afin de tenir compte du fait qu’il n’a pas été établi que le recourant aurait, le 28 août 2022, proféré des menaces à l’encontre du personnel de la prison. Ainsi, bien que l’autorité intimée jouisse d’un large pouvoir d’appréciation en la matière, la sanction de quatre jours de cellule forte, en tant qu’elle réprimande également le recourant pour des menaces non établies, ne respecte plus le principe de la proportionnalité. Une sanction de trois jours de cellule forte paraît plus appropriée, au vu tant des faits reprochés, de la faute du recourant et de ses antécédents.

Le recours sera ainsi admis dans cette mesure et l’illicéité de la sanction en tant qu’elle porte sur quatre jours et non trois jours de cellule forte sera constatée.

7.4 La sanction du 29 août 2022 de trois jours de cellule forte a été prononcée pour menaces et injures envers le personnel en récidive.

7.4.1 Selon le rapport d’incident du 29 août 2022, à 16h25, lors de la ronde médicale, le recourant avait traité trois agents de détention présents de « bande de fils de pute, je vais vous choper ».

Le recourant conteste ces propos, expliquant qu’en indiquant sur la sanction notifiée en relation avec ces faits « CES VOTRE TRAVAILLE A LA CONE SE QUIS VOU RHUMENNE LES SENUIS », il entendait exprimer que les actes qu’il subissait de la part des agents de détention constituaient un travail dépourvu de toute justification et entrainaient des ennuis pour les agents. Dans ses écritures, il ne se prononce cependant pas directement sur les propos qui lui sont prêtés ni n’explique en quoi sa prétendue critique du travail des gardiens aurait pu prendre la forme des propos reprochés. L’indication apportée par le recourant sur la notification de sanction, outre qu’elle comporte des termes grossiers, tend plutôt à confirmer les propos qui lui sont prêtés, le recourant insistant sur le fait que le travail des agents de détention leur amènera des ennuis. En l’absence d’élément permettant de s’écarter du rapport d’incident, il sera donc retenu que le recourant a tenu les propos qui y figurent.

L’expression « bande de fils de pute » est injurieuse et est, pour les motifs déjà exposés ci-dessus, inadmissible et justifie le prononcé d’une sanction, le recourant ayant failli à son obligation d’observer une attitude correcte à l'égard du personnel pénitentiaire (art. 44) et trouble l’ordre et la tranquillité de l’établissement (art. 45 let. h RRIP). L’indication « je vais vous choper » constitue une menace susceptible d’alarmer ses destinataires.

7.4.2 Compte tenu des nombreux antécédents disciplinaires du recourant depuis le 18 mars 2022, notamment pour injures envers le personnel et attitude incorrecte envers le personnel, l'autorité intimée était fondée à faire preuve de sévérité en lui infligeant, pour ces faits, une sanction de trois jours de cellule forte. Elle n’a, ce faisant, ni abusé ni excédé son pouvoir d'appréciation.

7.5 La sanction de cinq jours de cellule forte a été prononcée le 12 octobre 2022 pour injures envers le personnel en récidive et refus d’obtempérer.

7.5.1 Selon le rapport d’incident du 11 octobre 2022, le même jour à 20h32, le recourant avait sonné à l’interphone en criant : « Je nique ta mère, ton père et toute ta famille ». Il avait sonné 23 fois entre 20h32 et 03h06, tenant les mêmes propos « délirants » et insultants. Le rapport d’incident du lendemain retient que le recourant, invité à sortir de sa cellule, avait coopéré en sortant de sa cellule. Il s’était toutefois ensuite jeté au sol et avait commencé à insulter les gardiens. Ceux-ci avaient dû le porter jusqu’à la cellule forte. Arrivé à la cellule et interrogé sur la question de savoir s’il allait coopérer, le recourant avait continué à les insulter, en étant assis au sol. Les agents de détention avaient alors décidé d’utiliser la contrainte pour procéder à la fouille corporelle. Lors de celle-ci, le détenu avait refusé de remettre ses pantalons et commencé à gesticuler. Le gardien avait alors décidé de poser les pantalons sur le recourant. Lorsqu’il avait été entendu par le gardien-chef, le recourant avait contesté les faits et dit à celui-ci : « va baiser ta mère ».

Il ressort du visionnement des images de vidéosurveillance, prises dans le couloir menant à la cellule forte, que jusqu’à quelques mètres de celle-ci, le recourant marchait en compagnie de quelques agents de détention. Arrivé à proximité de ladite cellule, il s’est jeté par terre, nécessitant l’intervention de plusieurs agents de détention pour le porter dans la cellule forte. Selon les images prises par les « bodycams », utilisées dès l’arrivée dans la cellule forte et comportant le son, le recourant y est arrivé transporté par quatre agents de détention. Invité à dire s’il collaborait, il avait répondu en disant notamment « fils de pute », termes ensuite utilisés à de nombreuses reprises comme celui de « va baiser ta mère ». Une fois plaqué au sol, le recourant n’avait plus opposé de résistance, étant précisé que les clés de coudes et de bras utilisées empêchaient toute résistance. Le recourant avait cependant, après quelques secondes de silence, continué à parler de manière agitée, en tenant, outre les propose précités, des paroles que la qualité du son ne permet pas de comprendre.

Ces images viennent corroborer le fait que le recourant s’est jeté au sol sur le chemin vers la cellule forte, a dû être transporté par des agents de détention dans celle-ci, a insulté les agents de détention présents et n’a pas collaboré lors de la fouille corporelle. Par ailleurs, la chambre de céans relève qu’elle ne décèle sur les images de vidéosurveillance prises lors de la fouille corporelle pas de gestes pratiqués par les agents relevant d’un exercice disproportionnée de la force.

Le recourant ne donne aucune explication quant au reproche d’avoir sonné 23 fois à l’interphone dans la nuit du 11 au 12 octobre 2022 pour insulter les agents qui répondaient. En l’absence de tout élément permettant de s’écarter des rapports d’incident, il sera donc retenu que le recourant a sonné 23 fois dans la nuit du 11 au 12 octobre 2022, tenu les propos figurant dans les rapports d’incident des 11 et 12 octobre 2022, opposé de la résistance lors de son transfert et de la fouille en cellule forte et continué à insulté les agents durant cette dernière, ce qui est corroboré par les images de vidéosurveillance et des « bodycams ».

7.5.2 De tels agissements contreviennent à l’obligation du recourant d’observer une attitude correcte à l'égard du personnel pénitentiaire (art. 44) et de ne pas troubler l’ordre et la tranquillité de l’établissement (art. 45 let. h RRIP). Ce nouvel écart de comportement justifiait le prononcé d’une sanction. La faute du recourant est importante, son refus t’obtempérer ayant nécessité le déploiement et l’intervention de plusieurs agents de détention et les insultes et injures prononcées constituant une récidive s’inscrivant à la suite de nombreux écarts de langage précédents. Compte tenu de ces éléments, la sanction infligée de cinq jours de cellule forte, bien que sévère, respecte le principe de la proportionnalité.

7.6 La sanction du 14 octobre 2022 de trois jours de cellule forte a été prononcée pour injures envers le personnel en récidive.

7.6.1 Selon le rapport d’incident du 14 octobre 2022, le recourant avait, lors de la promenade journalière, insulté à de multiples reprises les agents de détention présents en disant : « fils de pute, j’écrase toutes vos mères et je m’en tape ».

Le recourant conteste avoir tenu ces propos. Il ne donne toutefois aucune explication quant à la manière dont se serait déroulée la promenade journalière et aux échanges verbaux qu’il aurait eus avec les agents de détention pendant celle-ci. Il se borne à affirmer que deux agents se trouvant devant la porte de sa cellule l’auraient insulté, avant la promenade, en l’accusant d’entretenir des relations sexuelles avec sa mère et sa sœur et de prêcher la reconquête musulmane. Ces éléments – au demeurant non établis – ne permettent pas, même s’ils étaient avérés, de considérer que les propos précités du détenu n’auraient pas été prononcés par lui. Il n’y a donc pas lieu de s’écarter du rapport d’incident qui transcrit les propos prêtés au recourant. Il sera donc retenu que celui-ci a utilisé les termes qui y figurent.

Les termes « fils de pute, j’écrase toutes vos mères et je m’en tape » sont injurieux et grossiers. Ils sont inadmissibles et justifient le prononcé d’une sanction, le recourant ayant failli à son obligation d’observer une attitude correcte à l'égard du personnel pénitentiaire (art. 44) et trouble l’ordre et la tranquillité de l’établissement (art. 45 let. h RRIP).

7.6.2 En infligeant au recourant une sanction de trois de cellule forte, l’intimée a dûment tenu compte des éléments en présence, notamment des antécédents disciplinaires et de la gravité de la faute de l’intéressé. La sanction ne viole ainsi pas la loi ni ne consacre un abus de son pouvoir d’appréciation.

7.7 En résumé, il sera retenu que les recours contre les sanctions des 23 et 29 août, 12 et 14 octobre 2022 sont rejetés. Celui dirigé contre la sanction prononcée le 28 août 2022 sera partiellement admis et l'illicéité de la sanction constatée, au sens des considérants.

8.             La procédure étant gratuite, il ne sera pas perçu d’émolument. Le recourant obtenant très partiellement gain de cause, une indemnité de procédure, réduite, de CHF 500.- lui sera allouée, à la charge de l’État de Genève (art. 87 LPA).

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevables les recours interjetés le 22 septembre, 27 septembre, 28 septembre, 11 novembre et 14 novembre 2022 par A______ contre les décisions de la prison de Champ-Dollon des 23 août, 28 août, 29 août, 12 octobre et 14 octobre 2022 ;

au fond :

les admet partiellement ;

constate le caractère illicite de la sanction du 28 août 2022, au sens des considérants ;

rejette les recours pour le surplus ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

alloue une indemnité de procédure de CHF 500.- à A______, à la charge de l’État de Genève ;

dit que conformément aux art. 78 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière pénale ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Toni KERELEZOV, avocat du recourant, ainsi qu'à la prison de Champ-Dollon.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière :

 

 

S. CROCI TORTI

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :