Skip to main content

Décisions | Tribunal pénal

1 resultats
P/14692/2019

JTDP/1493/2023 du 23.11.2023 sur OPMP/3210/2022 ( OPOP ) , JUGE

Normes : CP.125
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL DE POLICE

Chambre 20


23 novembre 2023

 

MINISTÈRE PUBLIC

A______, partie plaignante, assisté de Me P______

contre

X______, né le ______1990, domicilié ______, prévenu, assisté de Me Marc HOCHMANN FAVRE


CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :

Le Ministère public conclut à ce que X______ soit reconnu coupable de lésions corporelles par négligence (art. 125 al. 1 CP) et à ce qu'il soit condamné à une peine pécuniaire de 50 jours-amende à CHF 70.- le jour, assortie du sursis avec un délai d'épreuve de 3 ans ainsi qu'à une amende de CHF 700.-, assortie d'une peine privative de liberté de substitution de 10 jours. Il conclut enfin à ce que le prévenu soit condamné aux frais de la procédure, arrêtés à CHF 510.-.

A______, par la voix de son Conseil, conclut à ce que X______ soit reconnu coupable de lésions corporelles par négligence, persiste dans ses conclusions civiles et conclut à ce que X______ soit condamné à lui verser une indemnité de CHF 12'860.-, en application de l'article 433 CPP.

X______, par la voix de son Conseil, conclut, principalement, à son acquittement, renonçant à une indemnité au sens de l'article 429 CPP, subsidiairement, en cas de verdict de culpabilité, il conclut à ce que A______ soit renvoyé à agir par la voie civile, s'agissant de ses conclusions civiles.

*****

Vu l'opposition formée le 5 mai 2022 par X______ à l'ordonnance pénale rendue par le Ministère public le 20 avril 2022;

Vu la décision de maintien de l'ordonnance pénale du Ministère public du 23 mai 2022;

Vu l'art. 356 al. 2 CPP selon lequel le tribunal de première instance statue sur la validité de l'ordonnance pénale et de l'opposition;

Attendu que l'ordonnance pénale et l'opposition sont conformes aux prescriptions des art. 352, 353 et 354 CPP;

EN FAIT

A. Par ordonnance pénale du 20 avril 2022, valant acte d'accusation, il est reproché à X______ d'avoir, à Genève le 26 avril 2019 vers 14h30, à la rue de la Croix-d'Or à la hauteur du n° 12, alors qu'il circulait en direction de Rive au guidon de son vélo sur une voie interdite aux cycles et cyclomoteurs, heurté A______, piéton qui était en train de traverser la chaussée, causant de la sorte des blessures à ce dernier, lequel a chuté et subi une fracture du cotyle droit, avec déplacement et impaction, ainsi qu'une fracture trochiter humérus proximal droit puis a été hospitalisé aux soins intensifs du 30 avril au 18 juin 2019 pour insuffisance respiratoire et choc septique à streptoccocus anginosus associés à une défaillance multi-viscérale ARDS, puis aux soins intermédiaires,

faits qualifiés de lésions corporelles simples par négligence au sens de l'art. 125 al. 1 du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP ; RS 311.0).

B. Les éléments pertinents suivants ressortent de la procédure.

a. Selon le rapport de police du 20 août 2019, un accident de la circulation s'est produit le 26 avril 2019 à 14h28 entre le cycliste X______ et le piéton A______ à la hauteur du numéro 12 de la rue de la Croix-d'Or. A l'arrivée de la police, A______, blessé, recevait les soins prodigués par les ambulanciers. X______ avait quitté les lieux sur ordre des agents de police municipale sans que la position de son vélo n'ait été marquée sur la chaussée. Aucune trace de freinage ni de ripage n'était visible sur la chaussée. Le point de choc a été situé approximativement, d'après les indications fournies par les parties en cause et la témoin et compte tenu des éléments recueillis sur place, entre les rails de tram situées du côté droit de la chaussée dans le sens Bel-Air – Rive.

Selon les constatations de la police, X______, venant de la place Bel-Air, circulait malgré le signal de prescription "circulation interdite aux cycles et cyclomoteurs" sur la rue de la Croix-d'Or en direction de Rive lorsqu'au niveau du numéro 12 de cette rue, un heurt s'est produit entre l'avant de son cycle et le flanc droit ou gauche de A______, piéton qui s'était engagé sans circonspection sur la chaussée, pour traverser en direction du lac. Il n'a pas été possible d'établir si A______ avait traversé de face ou de dos.

La route était en ligne droite et la chaussée mouillée. Le tracé de la route était plat. Il faisait jour, pleuvait et la visibilité était normale.

Un dossier photographique et un croquis figurent à la procédure.

b. Le 12 juillet 2019, A______ a déposé plainte pénale contre inconnu pour lésions corporelles graves par négligence. A l'appui de celle-ci, il a exposé qu'il était arrivé d'Istanbul le 11 avril 2019 pour rendre visite à sa fille, laquelle résidait à Genève.

Le 26 avril 2019, aux alentours de 14h30 ou 15h00, il cheminait sur le trottoir de la rue de Rive à la hauteur du magasin Davidoff. Arrivé au croisement avec la rue de la Fontaine, il avait décidé de traverser la chaussée pour se rendre sur le trottoir d'en face et, avant de s'engager, avait bien vérifié que la route était dégagée, en s'assurant notamment qu'aucun tram n'était en approche.

Après avoir franchi la moitié, voire les trois quarts de la rue, un cycliste avait surgi de sa droite, l'avait violemment heurté sur le côté droit, au point de le faire "voler", et l'avait fait tomber. La suite de l'accident était quelque peu confuse mais il se souvenait que des personnes l'avaient relevé et assis sur une chaise avant que la police et l'ambulance arrivent. Il avait été pris en charge et conduit immédiatement aux urgences des Hôpitaux Universitaires de Genève (ci-après HUG). Le cycliste qui avait causé l'accident ne s'était jamais manifesté.

Cet accident lui avait causé une fracture de l'acétabulum de la hanche droite ainsi qu'une fracture de l'humérus proximal droit, ce dont attestaient les deux certificats médicaux (30 avril et 2 mai 2019) et le rapport médical (4 juillet 2019) annexés à sa plainte. En outre, son hospitalisation avait eu des conséquences très pénibles pour lui puisque, outre ces fractures, il avait souffert de complications infectieuses et respiratoires qui avaient nécessité une antibiothérapie et un placement aux soins intensifs jusqu'au 18 juin 2019. Enfin, cette hospitalisation prolongée lui avait causé une escarre très douloureuse nécessitant un suivi quotidien par des médecins chirurgiens-plastiques et anesthésistes. Ces faits étaient également attestés par le rapport médical du 4 juillet 2019.

Les HUG envisageaient désormais un transfert sanitaire en Turquie.

Il souffrait encore "affreusement" des fractures mais également d'un état confusionnel résultant des suites de son séjour prolongé aux soins intensifs.

Il n'existait pas de convention bilatérale entre la Suisse et la Turquie si bien qu'il était possible que les soins qu'il avait reçus en Suisse lui soient facturés personnellement.

c.a.a. L'audition de A______ prévue le 18 juillet 2019 aux HUG en présence du Dr B______ a finalement été ajournée à la demande de ce dernier, lequel a estimé, au vu de l'incohérence des premières réponses de l'intéressé, que celui-ci n'était pas en mesure de répondre aux questions de la police.

c.a.b. Entendu par-devant le Ministère public en audience de confrontation le 11 janvier 2022, A______ a confirmé sa plainte pénale. Il a déclaré qu'il essayait d'aller du magasin DAVIDOFF jusqu'au lac et qu'avant de traverser, il avait regardé à gauche et à droite car il savait que le tram circulait sur cette route. Tandis qu'il s'approchait du trottoir opposé, il avait tout d'un coup senti "quelque chose" le toucher, puis était tombé à terre. Il avait voulu se redresser mais en était incapable car sa jambe droite ne tenait pas. Il avait alors compris qu'il venait d'avoir un accident et avait sorti son téléphone portable pour contacter sa fille. Des personnes avaient accouru et avaient appelé les secours. Il se souvenait qu'il avait été installé dans l'ambulance et que son tee-shirt avait été coupé mais ne se rappelait pas de la suite. Il était resté durant 3 mois à l'hôpital mais n'en avait aucun souvenir.

Il n'avait pas traversé avec son appareil photo ni avec son téléphone à la main, lequel était dans son sac et n'avait été sorti qu'après l'accident. Sur le moment, il n'avait pas su par "quoi" il avait été renversé et n'avait pas entendu de cri avant le choc.

Désormais, il n'arrivait plus à monter les escaliers, il avait des douleurs et perdait l'équilibre. A l'usine, le médecin de l'entreprise avait constaté qu'il n'était pas en état de travailler et avait mis fin à son contrat de travail. Il n'arrivait plus à faire de vélo ni de la natation alors qu'avant l'accident son état de santé était "parfait": il faisait du sport et travaillait trois jours par semaine de 07h00 à 17h00 dans le secteur du métal. Sa jambe droite était plus courte que la gauche.

c.a.c. A______ a produit un relevé téléphonique attestant qu'il n'était pas au téléphone lors de l'accident et une attestation de son employeur traduite en anglais.

c.b.a. X______ a été entendu par la police le 8 juin 2019. Il a déclaré qu'il rentrait du travail et circulait sur les voies de tram en direction de Rive, en tenant sa droite, lorsqu'il avait heurté un homme qui avait soudainement fait un grand pas en avant. Le piéton traversait du trottoir de droite en direction du trottoir de gauche.

Il ignorait que la circulation était interdite aux cycles sur cette rue. Il avait essayé de freiner et de tourner son guidon afin de dévier de la trajectoire du piéton mais il n'avait pas eu suffisamment de temps. Il était incapable de dire exactement à quelle vitesse il circulait au moment de l'accident. Il n'avait pas été distrait par quoi que ce soit avant le heurt et regardait la route. Il n'avait ni vu ni remarqué le piéton avant le choc, précisant qu'à ce moment-là, il y avait beaucoup de monde sur les trottoirs.

L'état de santé du piéton, bien qu'il se tînt l'épaule, ne lui avait pas semblé grave. Celui-ci était conscient, parlait, et avait même pris son téléphone pour appeler ses proches.

Suite au heurt, la police municipale était arrivée et, après lui avoir demandé ses coordonnées, l'avait sommé de quitter les lieux car, sur place, en présence des proches du piéton, "les esprits commençaient à s'échauffer".

c.b.b. Entendu à nouveau par la police le 19 juillet 2019, X______ a confirmé ses précédentes déclarations. Il a ajouté que, juste avant le choc, il avait crié dans le but d'éviter le piéton, lequel s'était trouvé face à lui, au moment du choc. Il circulait alors à une "allure normale", soit peut-être à 15 km/h.

c.b.c. Entendu par-devant le Ministère public en audience de confrontation le 11 janvier 2022, X______ a confirmé ses précédentes déclarations. Il avait toujours vu des gens circuler sur la rue de la Croix-d'Or et ignorait que celle-ci était interdite aux cycles. Il ne circulait sans doute pas vite car il n'était pas pressé. Lorsqu'il avait réalisé qu'il allait heurter A______, il avait crié pour l'avertir. Il a également confirmé que, selon ses souvenirs, après son cri, X______, lequel regardait vers le lac, avait fait un pas en avant pour l'éviter. Lui-même avait essayé de freiner et de faire un écart, en vain.

Il a précisé que le choc s'était passé entre les voies de tram, au milieu de la route.

Il n'avait pas pris de nouvelles de l'intéressé, n'ayant compris la gravité de l'accident qu'un mois et demi après les faits, lorsque la police l'avait convoqué pour l'auditionner.

c.c.a. Entendue par la police en qualité de témoin le 1er juin 2019, C______ a déclaré qu'au moment de l'accident elle était en pause et fumait une cigarette sur le trottoir. Elle regardait en direction du magasin de jouets FRANZ CARL WEBER lorsqu'un homme, qui se trouvait "vers l'opticien", avait reculé en direction de la chaussée, dos à la route, en tenant un téléphone ou un appareil photo dans ses mains. Elle avait eu peur qu'un tram arrive.

C'est à ce moment-là qu'elle avait vu le cycliste, lequel, venant de la place Bel-Air et roulant en direction de Rive, circulait au milieu de la route, entre les voies du tram. Elle avait entendu un cri, précisant qu'il provenait peut-être du cycliste, ce qui avait effrayé le piéton, lequel, tandis qu'il reculait doucement, avait fait un bond en arrière. C'est au moment où il avait fait ce bond que l'accident avait eu lieu.

c.c.b. Entendue par-devant le Ministère public le 19 juillet 2022, C______ a confirmé qu'elle faisait sa pause à la rue de Rive entre le magasin KIKO où elle travaillait et "l'opticien", lorsqu'elle avait vu "un papi" traverser la route. Elle a confirmé que le piéton avait quelque chose entre les mains, peut-être un téléphone ou un appareil photo, précisant qu'il avait "les mains levées".

Elle ne se souvenait pas si A______ avait traversé la route de face ou à reculons car les évènements étaient anciens. Elle a par ailleurs confirmé qu'elle avait entendu un cri mais qu'elle ne savait pas d'où il provenait.

d.a. Selon la fiche d'intervention rédigée par les ambulanciers le 26 avril 2019, A______ a été heurté par un vélo sur le flanc droit. A leur arrivée, les secours ont constaté une fracture/luxation et une douleur à l'épaule droite, ainsi que des douleurs au flanc droit et à la hanche droite.

d.b. Selon le résumé de séjour du 3 mai 2019 des Drs D______ et E______, médecin chef de clinique et médecin interne aux HUG, A______ a souffert d'une fracture du cotyle droit ainsi que d'une fracture du trochiter humérus proximal droit. Selon l'anamnèse, A______ a expliqué avoir été renversé par un vélo électrique à haute cinétique sur le côté droit. Il s'est plaint de douleurs à l'épaule droite, à une côte droite, à la hanche et au flanc droit. Le patient n'a émis "aucune autre plainte".

Dans la synthèse de ce résumé (p. 2/4), il est retenu que A______ a chuté sur le côté droit.

d.c. Selon le rapport du 4 juillet 2019 du Dr F______, médecin adjoint aux HUG, A______ a été pris en charge dans le service des soins intensifs du 30 avril au 18 juillet 2019. Le précité avait été percuté par un vélo électrique et s'était réceptionné sur le côté droit. Le bilan lésionnel montrait une fracture du cotyle droit et une fracture du trochiter humérus proximal droit. Il avait été transféré aux soins intermédiaires le 27 avril 2019, puis aux soins intensifs le 30 avril 2019 pour insuffisance respiratoire et choc septique à streptococcus anginosus associés à une défaillance multi-viscérale et un syndrome de détresse respiratoire aiguë.

d.d. D'après le rapport du 16 juillet 2019 du Dr G______, médecin chef de clinique aux HUG, A______ a été hospitalisé le 26 avril 2019 et pris en charge dans le service d'anesthésie du 27 au 30 avril 2019. Il a été transféré dans le service des soins intensifs le 30 avril 2019, où il est resté jusqu'au 18 juillet 2019, puis dans le service de médecine interne générale.

Selon l'anamnèse, A______ a été percuté sur le côté droit. Il n'a pas souffert de traumatisme crânien mais sa chute s'est compliquée d'une fracture de l'acétabulum de la hanche droite et d'une fracture de l'humérus proximal droit.

L'hospitalisation de A______ a été prolongée pour plusieurs raisons. Sur le plan orthopédique, une prothèse de hanche était indiquée en lien avec la fracture acétabulaire mais ne pourrait avoir lieu que lorsque l'intéressé présenterait une évolution favorable sur le plan global. Une physiothérapie intensive était requise tant pour ladite fracture que pour la fracture humérale, laquelle a été traitée conservativement par gilet orthopédique.

Sur le plan des complications infectieuses et respiratoires A______ a, le 30 avril 2019, présenté une pneumonie avec un choc septique et une détresse respiratoire aiguë nécessitant une intubation orotrachéale par ventilation mécanique, ce qui a conduit à son transfert aux soins intensifs. En raison d'une intubation prolongée, une trachéostomie a été effectuée le 28 mai 2019 et A______ a pu être décanulé le 17 juin 2019.

Sur le plan de la chirurgie-plastique, A______ a souffert d'une escarre, survenue durant son séjour aux soins intensifs et nécessitant des soins de la plaie quotidiens, à tout le moins bihebdomadaires.

Sur le plan de la gestion de la douleur, l'escarre était très douloureuse et nécessitait un suivi quasi-quotidien.

A______ a également souffert d'un état confusionnel persistant, point fondamental et au premier plan dans les complications de l'hospitalisation prolongée. Cet état entravait le projet de réhabilitation global, nécessitant une prolongation du séjour aux soins intermédiaires. Cette problématique avait déjà été mise en évidence aux soins intensifs. L'état confusionnel était multifactoriel : séjour prolongé aux soins intensifs, effets indésirables médicamenteux, douleurs importantes non contrôlées et désafférentation en lien avec la barrière linguistique. A______ présentait des signes d'état confusionnel 24/24h, surtout la nuit où il était très agité et agressif. Enfin, sur le plan nutritionnel, A______ montrait des signes de déficit protéino-caloriques, ce qui compliquait l'évolution favorable de l'escarre.

En résumé A______ souffrait sévèrement de l'état confusionnel et de la douleur en lien avec son escarre. Un transfert dans un hôpital en Turquie était indiqué et apparaissait comme une nécessité d'un point de vue médical, afin d'agir sur la composante de désafférentation associée à la barrière linguistique.

d.e. Selon la lettre de sortie du 23 juillet 2019 des Drs H______ et I______, médecins aux HUG, A______ a été rapatrié le 20 juillet 2019.

C.a.a. Par courrier de son Conseil du 28 septembre 2023, A______ a déposé des conclusions civiles comportant un poste "dommage corporel", couvrant tous les frais médicaux facturés en Suisse, un poste "perte de gain" pour une perte de revenus de 4 ans et 4 mois, un poste "préjudice ménager", un poste "tort moral", ainsi que des conclusions en indemnité basées sur l'art. 433 CPP.

Il a conclu à ce que X______ soit condamné à payer à A______ :

-          CHF 477'275.50 avec intérêts à 5% dès le 21 juin 2019 (dommage corporel);

-          CHF 57'940.60 avec intérêts à 5% dès le 29 octobre 2023 (perte de gain);

-          CHF 4'800.- avec intérêts à 5% dès le 1er juillet 2019 (préjudice ménager);

-          CHF 67'267.20 avec intérêts à 5% dès le 29 octobre 2023 (préjudice ménager futur);

-          CHF 40'000.- avec intérêts à 5% dès le 26 avril 2019 (tort moral);

-          CHF 12'860 (juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure).

Il a également déposé un chargé de pièces comprenant:

- un rapport d'hospitalisation au ______ du 31 juillet 2019 et sa traduction anglaise;

- une facture de CHF 468'171.- des HUG du 1er mars 2020 ainsi qu'une lettre de rappel du 22 avril 2020 ;

- une lettre de mise en demeure pour le paiement de CHF 884.10 de J______SA du 15 juillet 2019 ;

- une facture de CHF 1'120.- de K______ SA du 21 juillet 2019 pour un transport sanitaire des HUG à l'aéroport de Genève le 21 juillet 2019 ;

- une facture de CHF 6'986.- de L______ du 17 juillet 2019 ;

- des bulletins de salaire (non traduits) de A______ pour les mois de mars et avril 2019 ;

- le taux de conversion de la livre turque vers le franc suisse au 1er mai 2019 ;

- un certificat d'incapacité de travail du 6 septembre 2019 et sa traduction anglaise;

- une attestation de travail de la société M______ A.S du 5 juillet 2021 et sa traduction anglaise;

- un rapport médical du Dr N______ du 31 mai 2021 et sa traduction anglaise;

- les notes d'honoraires de Me P______ des 18 août 2022 et 28 septembre 2023.

b. A l'audience de jugement, le Tribunal a rejeté, pour les motifs figurant au procès-verbal, la question préjudicielle du conseil de X______ persistant à requérir l'audition de C______ et des deux ambulanciers.

c.a. X______ a déclaré que A______ avait traversé la route en marche avant, avant de préciser qu'il pouvait se tromper, vu la rapidité à laquelle les faits s'étaient produits. Il avait crié lorsque le précité s'était engagé sur la route, puis ce dernier avait fait un pas en avant et s'était "jeté sous ses roues". La chute de A______ avait ainsi été causée par ce mouvement inattendu. Il était compliqué de dire de quel côté il avait heurté l'intéressé mais il lui semblait que, lorsque celui-ci avait entendu le cri, il s'était retourné, et avait donc été heurté sur le côté gauche. Il avait vu A______ avant le choc et il lui avait semblé que celui-ci n'allait pas traverser la route.

Il considérait qu'il roulait alors à une vitesse adaptée. Il avait essayé de freiner et de tourner son guidon mais le mouvement de A______ était si inattendu qu'il n'avait pas pu éviter la chute.

Après l'accident, A______ était conscient, se tenait l'épaule et souffrait d'une fracture. Il n'avait eu aucune nouvelle, puis 1 mois après, il avait appris de la police que ce dernier était en train de mourir suite à des complications. Il ne savait pas que faire, pensant qu'il était la dernière personne que la famille de A______ aurait souhaité voir, raison pour laquelle il ne s'était pas manifesté.

Il avait l'habitude d'emprunter cette route qu'il prenait régulièrement pour rentrer chez lui de son travail, depuis 4 à 5 mois qu'il avait son vélo. Aucun problème n'était survenu sur ce trajet avant l'accident et il n'avait jamais été verbalisé, tandis qu'il avait souvent croisé des véhicules de police. D'autres vélos circulaient par ailleurs régulièrement sur ce tronçon. Il était toujours particulièrement attentif sur cette route sur laquelle se trouvaient souvent des piétons et passait le tram.

c.b. A______ a confirmé sa plainte et ses précédentes déclarations. Il avait traversé la route de face et n'était pas capable de préciser d'où venait X______ car il n'avait rien vu. Il a d'abord déclaré qu'il n'était pas non plus capable de dire s'il avait été heurté à droite ou à gauche, avant d'expliquer qu'il était exact qu'il avait été heurté du côté droit. Confronté au témoignage de la témoin C______, selon lequel il avait traversé à reculons en tenant un téléphone ou un appareil photo dans sa main, il a déclaré que cela était inexact. Il avait traversé et avait été renversé tandis qu'il se trouvait à un mètre du trottoir vers lequel il se dirigeait.

Il ne se rappelait pas avoir entendu de cri, n'avait pas fait de bond avant le choc, n'avait pas traversé en courant et son téléphone se trouvait dans sa sacoche.

Depuis l'accident, il marchait avec difficulté, avait des douleurs persistantes et ne pouvait pas travailler. Il avait été licencié car il travaillait dans l'industrie lourde. Son accident l'avait fait vieillir de 10 ans.

Il n'avait pas réglé la facture de CHF 468'171.- des HUG car il n'en avait pas les moyens et n'avait pas fait l'objet de poursuites ni de mesures d'exécution en lien avec cette facture.

Il n'avait pas payé non plus la facture d'ambulance de CHF 884.10, ni celle de CHF 1'120.-. Peut-être que son beau-fils s'en était acquitté.

c.c. O______, fille de A______, a été entendue en qualité de témoin. Elle a déclaré qu'avant les faits, son père était en bonne santé et travaillait en qualité de conseiller dans les usines de tuyauterie. Après l'accident, il avait repris le travail au rythme d'un jour par semaine avant d'être finalement licencié car il ne pouvait pas se déplacer, ce qui était incompatible avec l'industrie lourde. En dehors de son travail, A______ nageait souvent, faisait du vélo et s'occupait de son grand jardin. Il était quelqu'un de très sportif qui ne restait jamais assis. Selon elle, son père aurait encore travaillé durant cinq ans au moins s'il n'avait pas eu son accident, dans la mesure où il était très actif, dynamique et n'avait aucun problème de santé. Aujourd'hui, il était très différent : certains matins, il avait des difficultés à se lever de son lit et il ne pouvait rien faire comme avant. Il vivait difficilement et n'était par exemple pas capable de mettre ses chaussettes.

D.a. X______, de nationalité italienne, est né le ______1990 à ______. Il est célibataire, sans enfant. Au bénéfice d'un permis C, il vit en Suisse, où il est venu chercher du travail, depuis 2018. Il est comptable et réalise un revenu mensuel net de CHF 4'200.-. Le montant de son loyer s'élève à CHF 1'270.- et celui de son assurance-maladie à CHF 311.-. Il n'a ni dette ni fortune.

b. A teneur de son extrait de casier judiciaire suisse, il n'a aucun antécédent.

EN DROIT

Culpabilité

1.1.1. Selon l'art. 125 al. 1 aCP, celui qui, par négligence, aura fait subir à une personne une atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé sera, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

1.1.2. La réalisation de l'infraction réprimée par l'art. 125 aCP suppose la réunion de trois éléments constitutifs, à savoir une négligence imputable à l'auteur, des lésions corporelles subies par la victime, ainsi qu'un lien de causalité naturelle et adéquate entre la négligence et les lésions. Conformément à l'art. 12 al. 3 CP, il y a négligence si, par une imprévoyance coupable, l'auteur a agi sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte. Il faut que l'auteur ait, d'une part, violé les règles de prudence que les circonstances lui imposaient pour ne pas excéder les limites du risque admissible et que, d'autre part, il n'ait pas déployé l'attention et les efforts que l'on pouvait attendre de lui pour se conformer à son devoir de prudence. Pour déterminer plus précisément les devoirs imposés par la prudence, on peut se référer à des normes édictées par l'ordre juridique pour assurer la sécurité et éviter des accidents. S'agissant d'un accident de la route, il convient de se référer aux règles de la circulation routière (arrêt du Tribunal fédéral 6B_69/2017 du 28 novembre 2017 consid. 2.1).

1.1.3.1. La violation fautive des devoirs de prudence doit être la cause naturelle et adéquate de l'accident (ATF 133 IV 158 consid. 6; 129 IV 119 consid. 2.4). Un comportement est la cause naturelle d'un résultat s'il en constitue l'une des conditions sine qua non, c'est-à-dire lorsque, sans lui, le résultat ne se serait pas produit (ATF 138 IV 57 consid. 4.1.3; arrêt du Tribunal fédéral 6B_253/2012 du 7 septembre 2012 consid. 3.3.2). Le rapport de causalité peut être qualifié d'adéquat si, d'après le cours ordinaire des choses et l'expérience générale de la vie, le comportement était propre à entraîner un résultat du genre de celui qui s'est produit (ATF 138 IV 57 consid. 4.1.3; arrêt du Tribunal fédéral 6B_253/2012 du 7 septembre 2012 consid. 3.3.2). La causalité adéquate suppose une prévisibilité objective. Il faut se demander si un tiers observateur neutre, voyant l'auteur agir dans les circonstances où il agit, pourrait prédire que le comportement considéré aura très vraisemblablement les conséquences qu'il a effectivement eues, quand bien même il ne pourrait prévoir le déroulement de la chaîne causale dans ses moindres détails. L'acte doit être propre, selon une appréciation objective, à entraîner un tel résultat ou à en favoriser l'avènement, de telle sorte que la raison conduit naturellement à imputer le résultat à la commission de l'acte (ATF 138 IV 57 consid. 4.1.3). La causalité adéquate sera admise même lorsque le comportement de l'auteur n'est pas la cause directe ou unique du résultat. Peu importe que le résultat soit dû à d'autres causes, notamment à l'état de la victime, à son comportement ou à celui de tiers (ATF 131 IV 145 consid. 5.2).

1.1.3.2. La causalité adéquate peut toutefois être exclue si une autre cause concomitante, par exemple le comportement de la victime, constitue une circonstance tout à fait exceptionnelle ou apparaît si extraordinaire que l'on ne pouvait s'y attendre. L'imprévisibilité d'un acte concurrent ne suffit pas, en soi, à interrompre le rapport de causalité adéquate. Il faut encore que cet acte revête une importance telle qu'il s'impose comme la cause la plus probable et la plus immédiate de l'évènement considéré, reléguant à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont contribué à l'amener et notamment le comportement de l'auteur (ATF 134 IV 255 consid. 4.4.2). La jurisprudence connaît comme exemple de circonstance tout à fait exceptionnelle et, partant, imprévisible, à laquelle ni (en l'occurrence) le chauffeur de bus, ni un autre automobiliste ne pouvait s'attendre, le cas d'un piéton qui, habillé de noir, en pleine nuit et alors que les conditions météorologiques sont défavorables, se couche sans aucune raison et sans d'ailleurs qu'on puisse comprendre un tel comportement, sur les voies d'autoroute (arrêt du Tribunal fédéral 6B_291/2015 c.3.2).

1.1.4. Le résultat typique de l'art. 125 aCP se définit en référence aux art. 122 et 123 aCP.

L'art. 122 aCP prévoit que sera puni d'une peine privative de liberté de six mois à dix ans celui qui, intentionnellement, aura blessé une personne de façon à mettre sa vie en danger (hyp. 1), aura mutilé le corps d'une personne, un de ses membres ou un de ses organes importants ou causé à une personne une incapacité de travail, une infirmité ou une maladie mentale permanentes, ou aura défiguré une personne d'une façon grave et permanente (hyp. 2), aura fait subir à une personne toute autre atteinte grave à l'intégrité corporelle ou à la santé physique ou mentale (hyp. 3).

L'art. 123 al. 1 phr. 1 aCP prévoit que celui qui, intentionnellement, aura fait subir à une personne une autre atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé sera, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

1.1.5. Selon l'art. 26 de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (RS 741.01 ; LCR), chacun doit se comporter, dans la circulation, de manière à ne pas gêner ni mettre en danger ceux qui utilisent la route conformément aux règles établies (al. 1). Une prudence particulière s'impose à l'égard des enfants, des infirmes et des personnes âgées, et de même s'il apparaît qu'un usager de la route va se comporter de manière incorrecte (al. 2).

La jurisprudence et la doctrine ont déduit de l'art. 26 al. 1 LCR le principe de la confiance, en vertu duquel l'usager qui se comporte réglementairement peut attendre des autres usagers, aussi longtemps que des circonstances particulières ne doivent pas l'en dissuader, qu'ils se comportent également de manière conforme aux règles de la circulation, c'est-à-dire ne le gênent ni ne le mettent en danger (ATF 129 IV 282 consid. 2.2.1; ATF 118 IV 277 consid. 4a; ATF 104 IV 28 consid. 3; ATF 99 IV 173 consid. 3b; arrêt du Tribunal fédéral 6B_770/2017 du 11 janvier 2018 consid. 3.1).

1.1.6. Selon l'art. 27 al. 1 phr. 1 LCR, chacun se conformera aux signaux et aux marques ainsi qu'aux ordres de la police.

Selon l'art. 19 al. 1 let. c phr. 1 de l'ordonnance sur la signalisation routière (RS 741.22 ; OSR), le signal "Circulation interdite aux cycles et cyclomoteurs" interdit de circuler avec des cycles ou des cyclomoteurs.

1.1.7. Selon l'art. 31 al. 1 LCR, le conducteur devra rester constamment maître de son véhicule de façon à pouvoir se conformer aux devoirs de la prudence.

L'art. 3 al. 1 de l'ordonnance sur les règles de la circulation routière du 5 septembre 1979 (RS 741.11 ; OCR) précise que le conducteur vouera son attention à la route et à la circulation. Le degré de l'attention requise par l'art. 3 al. 1 OCR s'apprécie au regard des circonstances d'espèce, telles que la densité du trafic, la configuration des lieux, l'heure, la visibilité et les sources de danger prévisibles (ATF 137 IV 290 consid. 3.6 et les références citées; arrêt 6B_665/2015 du 15 septembre 2016 consid. 2.2).

Lorsqu'un conducteur doit prêter son attention visuelle principalement dans une direction déterminée, on peut admettre que son attention soit moindre dans les autres (ATF 122 IV 225 consid. 2b p. 228; arrêt 6B_1157/2016 du 28 mars 2017 consid. 4.3). Le conducteur doit avant tout porter son attention, outre sur sa propre voie de circulation (cf. arrêt 6B_783/2008 du 4 décembre 2008 consid. 3.3), sur les dangers auxquels on doit s'attendre et peut ne prêter qu'une attention secondaire à d'éventuels comportements inhabituels ou aberrants (ATF 122 IV 225 consid. 2c p. 228; arrêt 6B_1157/2016 du 28 mars 2017 consid. 4.3).

1.1.8. Selon l'art. 33 al. 1 LCR, le conducteur facilitera aux piétons la traversée de la chaussée.

L'art. 6 al. 3 OCR dispose que sur une chaussée dépourvue de passage pour piétons, le conducteur circulant dans une colonne s'arrêtera au besoin lorsque des piétons ou des utilisateurs d'engins assimilés à des véhicules attendent de pouvoir traverser.

1.1.9. Une éventuelle violation de l'art. 90 LCR est absorbée par l'art. 125 aCP (arrêt du Tribunal fédéral 6B_291/2015 du 18 janvier 2016, consid. 3.2).

1.1.10. Selon l'art. 21 CP, quiconque ne sait ni ne peut savoir au moment d'agir que son comportement est illicite n'agit pas de manière coupable. Le juge atténue la peine si l'erreur était évitable.

Pour qu'il y ait erreur sur l'illicéité, l'auteur doit agir alors qu'il se croyait, à tort, en droit de le faire (ATF 129 IV 238 consid. 3.1). La réglementation relative à l'erreur sur l'illicéité repose sur l'idée que le justiciable doit faire tout son possible pour connaître la loi et que son ignorance ne le protège que dans des cas exceptionnels (ATF 129 IV 238 consid. 3.1; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1102/2015 consid. 4.1).

1.1.11. Le Tribunal apprécie librement les preuves recueillies selon l'intime conviction qu'il retire de l'ensemble de la procédure. Lorsque subsistent des doutes insurmontables quant aux éléments factuels justifiant une condamnation, le Tribunal se fonde sur l'état de fait le plus favorable au prévenu (art. 10 al. 2 et 3 CPP).

Lorsque le Tribunal peut forger sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents, il importe peu que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit à lui seul insuffisant. L'appréciation des preuves doit être examinée dans son ensemble. Il n'y a pas d'arbitraire si l'état de fait retenu peut être déduit de manière soutenable du rapprochement de divers éléments ou indices. De même, il n'y a pas d'arbitraire du seul fait qu'un ou plusieurs arguments corroboratifs sont fragiles, si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (arrêt du Tribunal fédéral 6B_623/2012 du 6 février 2013, consid. 2.1).

1.2. En l'espèce, il est établi que le prévenu circulait à vélo, sur la rue de la Croix-d'Or où la circulation était interdite aux cycles, de Bel-Air en direction du rond-point de Rive, lorsque le plaignant s'est engagé sur la chaussée pour la traverser, du côté de la Vieille-Ville à celui du lac. Il est également établi par les déclarations du prévenu qu'au moment de l'accident il y avait beaucoup de monde sur les trottoirs. Enfin, le heurt a eu lieu, selon la version d'une des parties, au milieu de la chaussée, selon la version de l'autre, déjà du côté gauche de celle-ci, soit du côté du lac, mais en tout état lorsque le plaignant était franchement engagé sur celle-ci.

S'agissant de la position du plaignant avant le choc, les déclarations des parties et du témoin divergent. Le plaignant a déclaré, tant dans sa plainte qu'à l'audience de jugement, qu'il s'était engagé sur la chaussée en avançant mais qu'il avait été heurté du côté droit. Il a également déclaré que le prévenu avait "surgi de [sa] droite". Il a enfin expliqué à ses médecins avoir été renversé sur le côté droit. Or, vu la direction que le plaignant a indiqué suivre et à moins d'admettre qu'il ait fait un bond à 180 degrés, un heurt ne pourrait s'être produit sur le côté droit que s'il s'était engagé sur la chaussée à reculons.

Quant au prévenu, il a d'abord déclaré que le plaignant avait traversé face à la route, avant d'affirmer qu'il ne pouvait en être certain car les choses s'étaient passées très rapidement. Il a en outre déclaré que, dans ses souvenirs, le plaignant s'était engagé de face mais que, lorsqu'il avait crié, celui-ci s'était retourné et avait ainsi été heurté sur le côté gauche. Or, vu la trajectoire suivie par le plaignant, selon le prévenu, si celui-ci s'était engagé de face, ce serait son flanc droit qu'il aurait exposé en se retournant.

Selon la fiche ambulancière, le plaignant a été heurté sur le flanc droit. Dans les rapports médicaux, on lit tantôt que le plaignant s'est réceptionné sur le flanc droit (rapport du 4 juillet 2019), tantôt qu'il a été percuté sur le côté droit (rapport du 16 juillet 2019 et lettre de sortie du 23 juillet 2019). Enfin, dans le rapport du 3 mai 2019, l'anamnèse fait état d'un piéton renversé sur le côté droit, tandis que la synthèse mentionne une chute sur le côté droit.

La témoin C______ a affirmé que le plaignant avait reculé, le dos tourné, tenant un appareil photo ou un téléphone à la main, comportement qui l'avait inquiétée. Elle avait par ailleurs entendu un cri avant le choc. Enfin, elle a déclaré qu'elle avait vu le plaignant faire un bond, ce qui corrobore les déclarations du prévenu, selon lesquelles le plaignant avait fait "un grand pas en avant". De tels détails tendent à démontrer que la témoin regardait avec une certaine attention le lieu de l'accident et qu'elle a assisté à son déroulement intégral puisqu'elle a observé le plaignant depuis l'instant qui a précédé son engagement sur la chaussée jusqu'au moment du heurt. Le fait en particulier qu'elle ait déclaré s'être inquiétée pour le plaignant conforte l'hypothèse selon laquelle celui-ci avait à ce moment-là un comportement inadéquat eu égard à la situation et à la configuration des lieux. Certes, lors de son audition du 19 juillet 2022, la témoin a déclaré qu'elle ne se souvenait pas du sens dans lequel le plaignant s'était engagé sur la chaussée. Cela étant, on conçoit aisément que, trois ans plus tard, elle n'ait pas eu encore en mémoire tous les détails d'un évènement dans lequel elle n'était pas impliquée personnellement. Cela n'est pas de nature à remettre en cause sa déposition initiale. Pour toutes ces raisons, ses déclarations constituent un élément central dans cette procédure et ne peuvent être écartées au motif que les déclarations des parties sont partiellement concordantes. Au contraire, le Tribunal est fondé à s'appuyer sur cette seule déclaration en raison de sa neutralité et des précisions données ci-dessus, pour retenir que le plaignant s'est engagé sur la chaussée alors qu'il tournait le dos à celle-ci et qu'après avoir entendu un cri, il a fait un bond.

D'ailleurs, si l'on ne peut exclure qu'une personne heurtée sur le côté gauche puisse être blessée du côté droit, suite à la chute de son corps de ce côté-là, il est peu vraisemblable qu'aucune lésion ni douleur ne soit relevée dans ce cas sur le côté où elle a été heurtée. Or, selon rapport du 3 mai 2019, le plaignant n'a fait état de douleurs que du côté droit de son corps.

Par conséquent, le Tribunal retient que le plaignant s'est engagé à reculons sur la chaussée, sans s'assurer préalablement que personne ne venait dans sa direction, et qu'il a été heurté sur le côté droit de son corps après avoir fait un bond, suite au cri du prévenu.

En roulant sur la rue de la Croix-d'Or, le prévenu ne s'est pas conformé au signal de prescription interdisant la circulation aux cycles, en violation des art. 27 al. 1 LCR et 19 al. 1 let. c OSR. Par ailleurs, en heurtant le plaignant, le prévenu n'a pas fait preuve de l'attention exigée par les circonstances. S'il n'a pas vu le plaignant avant le heurt, comme il l'a déclaré lors de l'instruction, il a en tout cas réalisé que les trottoirs de cette rue étaient très fréquentés, ce qui aurait dû l'amener à adopter une allure et un comportement adapté. Et s'il a vu le plaignant avant le heurt, comme il l'a déclaré lors de l'audience de jugement, il aurait dû pouvoir s'arrêter à temps pour ne pas le heurter, ce d'autant plus que le choc est survenu au plus tôt lorsque le plaignant avait déjà traversé la moitié de la chaussée. En agissant ainsi, le prévenu a violé son devoir de prudence.

Le prévenu ne peut se prévaloir d'une erreur sur l'illicéité. En effet, même s'il ignorait qu'il n'avait pas le droit de circuler à vélo sur cette rue qu'il empruntait depuis plusieurs mois sans avoir jamais été contrôlé par la police, si de nombreux autres cyclistes en faisaient de même et s'il semblait exister à cet égard une certaine "tolérance", l'on ne saurait admettre que le prévenu a fait tout son possible pour connaître la loi, dans la mesure où une simple attention aux signaux permettait de constater que la rue était interdite aux cycles.

S'agissant des lésions subies par le plaignant, l'ordonnance pénale ne distingue pas les fractures subies au moment de l'accident, des complications survenues suite à l'hospitalisation. Dans la mesure où les lésions sont qualifiées de lésions corporelles simples et non de lésions corporelles graves par négligence, l'on comprend que seules les fractures sont retenues.

Par ailleurs, le lien de causalité naturelle est certes acquis pour l'ensemble des lésions subies par le plaignant puisque, sans le comportement du prévenu, le résultat ne se serait pas produit mais tel n'est toutefois pas le cas du lien de causalité adéquate. En effet, s'agissant des fractures subies par le plaignant, si l'on peut reprocher une faute concomitante à ce dernier, lequel s'est engagé sur la chaussée sans égard aux autres usagers de la route, faute qui a concouru à la survenance de l'accident, elle ne saurait toutefois reléguer à l'arrière-plan la faute du prévenu et ainsi rompre le lien de causalité. Non seulement il n'y a pas de compensation de fautes en droit pénal, mais le fait, pour un piéton, de s'engager sur la chaussée à reculons ne constitue pas un comportement si imprévisible et exceptionnel qu'il relèguerait à l'arrière-plan tous les autres facteurs qui ont concouru à l'avènement du résultat, ce d'autant moins dans la configuration du cas d'espèce, à savoir une rue commerçante, très fréquentée et dont la circulation est interdite à certaines catégories de véhicules. Le bond fait par le plaignant un instant avant le heurt, lequel constitue probablement un mouvement de réflexe, au moment où il a entendu le cri et/ou réalisé que le prévenu était sur le point de le heurter n'est pas non plus un comportement si imprévisible qu'il serait propre à reléguer à l'arrière-plan la faute du prévenu et ainsi rompre le lien de causalité.

En revanche, l'ensemble des complications survenues à l'hôpital ne sont pas en lien de causalité adéquate avec le comportement du prévenu. Par définition, des complications sont des évolutions défavorables dont la survenue n'est pas automatique. Au surplus, les complications n'ont pas résulté des fractures causées au plaignant qui ont évolué défavorablement mais d'une infection contractée pendant l'hospitalisation, laquelle s'est aggravée et a nécessité un transfert aux soins intensifs. L'escarre a par ailleurs été causée par le séjour prolongé aux soins intensifs en raison de l'infection précitée. Le comportement du prévenu n'était ainsi pas propre à causer les conséquences qui s'en sont suivies.

Compte tenu de ce qui précède, en ne se conformant pas au signal de prescription interdisant la circulation aux cycles et en ne faisant pas preuve de l'attention nécessaire, le prévenu a violé ses devoirs de prudence. Cette violation est en rapport de causalité naturelle et adéquate avec les fractures subies par le patient et non pas avec les complications qui s'en sont suivies.

X______ sera par conséquent reconnu coupable de lésions corporelles simples par négligence au sens de l'art. 125 al. 1 aCP.

Peine

2.1.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

2.1.2. Selon l'art. 34 CP, sauf disposition contraire, la peine pécuniaire est de trois jours-amende au moins et ne peut excéder 180 jours-amende. Le juge fixe leur nombre en fonction de la culpabilité de l'auteur (al. 1).

2.1.3. L'art. 42 CP prévoit que le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits (al. 1).  

Le juge peut prononcer, en plus d'une peine avec sursis, une amende conformément à l'art. 106 CP (art. 42 al. 4 CP). La combinaison prévue par l'art. 42 al. 4 CP se justifie lorsque le sursis peut être octroyé, mais que notamment pour des motifs de prévention spéciale une sanction ferme accompagnant la sanction avec sursis paraît mieux à même d'amener l'auteur à s'amender. Elle doit contribuer, dans l'optique de la prévention tant générale que spéciale, à renforcer le potentiel coercitif de la peine avec sursis. Cette forme d'admonestation adressée au condamné - ainsi qu'à tous - doit attirer son attention sur le sérieux de la situation en le sensibilisant à ce qui l'attend s'il ne s'amende pas (ATF 134 IV 60 consid. 7.3.1 p. 74 s.; plus récemment arrêt 6B_952/2016 du 29 août 2017 consid. 3.1). La combinaison prévue à l'art. 42 al. 4 CP constitue un " sursis qualitativement partiel " (ATF 134 IV 1 consid. 4.5.2 p. 8). 

Si le juge suspend totalement ou partiellement l'exécution d'une peine, il impartit au condamné un délai d'épreuve de deux à cinq ans (art. 44 al. 1 CP).

2.1.4. A teneur de l'art. 106 CP, sauf disposition contraire de la loi, le montant maximum de l'amende est de 10'000 francs (al. 1). Le juge prononce dans son jugement, pour le cas où, de manière fautive, le condamné ne paie pas l'amende, une peine privative de liberté de substitution d'un jour au moins et de trois mois au plus (al. 2). Le juge fixe l'amende et la peine privative de liberté de substitution en tenant compte de la situation de l'auteur afin que la peine corresponde à la faute commise (al. 3).

2.2. En l'espèce, la faute du prévenu n'est pas anodine. Il ne s'est pas conformé à l'interdiction de circuler à vélo, faisant preuve de négligence et causant ainsi une atteinte à l'intégrité physique de la victime.

La collaboration du prévenu au cours de la procédure a été médiocre. Il a persisté à nier avoir su et pu savoir que le tronçon en question était interdit aux cycles, contestant ainsi les faits qui lui sont reprochés.

Sa prise de conscience n'est pas bonne non plus: il n'a présente aucune excuse, exprimé aucun regret et fait porter la faute sur le plaignant.

Sa situation personnelle n'explique ni n'excuse ses agissements.

Il n'a aucun antécédent judiciaire, facteur neutre au niveau de la peine.

Au vu de l'ensemble des circonstances, le prévenu sera condamné à une pécuniaire de 50 jours-amende. Le montant du jour-amende sera fixé à CHF 40.- pour tenir compte de sa situation personnelle et financière.

Dans la mesure où le prévenu n'a aucun antécédent et que le pronostic ne s'annonce pas sous un jour défavorable, le sursis lui sera octroyé, avec un délai d'épreuve de 3 ans. Il sera par ailleurs renoncé au prononcé d'une amende à titre de sanction immédiate.

3.1.1.   En qualité de partie plaignante, le lésé peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure pénale (art. 122 al. 1 CPP), l'autorité judiciaire saisie de la cause pénale jugeant les conclusions civiles indépendamment de leur valeur litigieuse (art. 124 al. 1 CPP).

Conformément à l'art. 126 al. 1 let. a et b CPP, le Tribunal statue sur les conclusions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu ou lorsqu'il l'acquitte et que l'état de fait est suffisamment établi.

Lorsque les preuves recueillies dans le cadre de la procédure sont suffisantes pour permettre de statuer sur les conclusions civiles, le juge pénal est tenu de se prononcer sur le sort de celles-ci, en examinant, pour chacune d'elles, si elles sont justifiées en fait et en droit (arrêts du Tribunal fédéral 6B_434/2018 du 12 septembre 2018 consid. 1.1, 6B_443/2017 du 5 avril 2018 consid. 3.1). En revanche, le juge renvoie la partie plaignante à agir par la voie civile lorsqu'elle n'a pas chiffré ses conclusions de manière suffisamment précise ou ne les a pas suffisamment motivées (art. 126 al. 2 let. b CPP).

Si, par suite de l'emploi d'un véhicule automobile, une personne est tuée ou blessée ou qu'un dommage matériel est causé, le détenteur est civilement responsable (art. 58 al. 1 LCR).

Selon l'art. 59 al. 1 LCR, le détenteur est libéré de la responsabilité civile s'il prouve que l'accident a été causé par la force majeure ou par une faute grave du lésé ou d'un tiers sans que lui-même ou les personnes dont il est responsable aient commis de faute et sans qu'une défectuosité du véhicule ait contribué à l'accident. Si néanmoins le détenteur ne peut se libérer en vertu de l'al. 1 mais prouve qu'une faute du lésé a contribué à l'accident, le juge fixe l'indemnité en tenant compte de toutes les circonstances (al. 2).

Selon l'art. 62 al. 1 LCR, le mode et l'étendue de la réparation ainsi que l'octroi d'une indemnité à titre de réparation morale sont régis par les principes du code des obligations concernant les actes illicites.

3.1.2.   La responsabilité civile des cyclistes est régie par le code des obligations (art. 70 LCR).

Chacun est tenu de réparer le dommage qu'il cause à autrui d'une manière illicite, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence (art. 41 al. 1 CO). La preuve du dommage incombe au demandeur (art. 42 al. 1 CO). Le juge détermine le mode ainsi que l'étendue de la réparation d'après les circonstances et la gravité de la faute (art. 43 al. 1 CO).

N'est en principe réparable que le dommage direct causé au lésé, c'est-à-dire ce qui est directement touché par un acte illicite et qui subit par là une atteinte directe à son patrimoine, non à ses créanciers, à l'assureur, ou à d'autres tiers, par ricochet (CC/CO annoté, 11ème édition, 2020, ad. art. 41, p. 45). Le dommage se définit comme une diminution de l'actif, d'une augmentation du passif, d'une non-diminution du passif ou d'une non-augmentation de l'actif (ATF 123 IV 17 consid. 3.d).

Dans un arrêt de 2009, le Tribunal fédéral s'est penché sur la question de la caractérisation du dommage, sous l'angle de l'augmentation du passif, dans le cas de factures de tiers mises à la charge d'un lésé. Selon cette jurisprudence, pour parler de diminution involontaire du patrimoine, il faut pouvoir présumer que le créancier fera valoir sa créance, étant précisé que dans le cadre d'actes juridiques dans lesquels les intérêts économiques des parties sont en jeu, on peut en principe admettre que les créances concernées seront exécutées. Si l'on peut supposer qu'en cas de litige elles seront vraisemblablement reconnues judiciairement, ces créances doivent être comptabilisées au passif (arrêt du Tribunal fédéral 4A_520/2008 du 20 juillet 2009, consid. 5.1).

3.1.3.   Selon l'art. 44 al. 1 CO, le juge peut réduire les dommages-intérêts, ou même n'en point allouer, lorsque la partie lésée a consenti à la lésion ou lorsque des faits dont elle est responsable ont contribué à créer le dommage, à l'augmenter, ou qu'ils ont aggravé la situation du débiteur.

La possibilité de réduire une indemnité pour tenir compte d'une faute concomitante, résultant de l'art. 44 al. 1 CO, existe également dans le cas d'une indemnité pour tort moral (ATF 131 III 12 consid. 8; 128 1149 consid. 4.2 et arrêt du Tribunal fédéral 6B_213/2012 du 22 novembre 2012 consid. 3.1).

La faute concomitante suppose que l'on puisse reprocher au lésé un comportement blâmable, en particulier un manque d'attention ou une attitude dangereuse, alors qu'il n'a pas déployé les efforts d'intelligence ou de volonté que l'on pouvait attendre de lui pour se conformer aux règles de la prudence. La réduction de l'indemnité - dont la quotité relève de l'appréciation du juge - suppose que le comportement reproché au lésé soit en rapport de causalité naturelle et adéquate avec la survenance du préjudice (arrêt du Tribunal fédéral 6B_987/2017 du 12 février 2018 consid. 6.1).

Dans un arrêt 6B_987/2017 du 12 février 2018, le Tribunal fédéral a confirmé une réduction de 20% pour faute concomitante de l'indemnité pour tort moral accordée au piéton, grièvement blessé alors qu'il traversait un passage piétons à la phase rouge pour rejoindre un bus à l'arrêt, par un automobiliste circulant en soirée à une vitesse ahurissante au centre-ville de Genève.

3.1.4.   En cas de lésions corporelles, la partie qui en est victime a droit au remboursement des frais et aux dommages-intérêts qui résultent de son incapacité de travail totale ou partielle, ainsi que de l'atteinte portée à son avenir économique (art. 46 al. 1 CO).

3.1.5.1.  Aux termes de l'art. 47 CO, le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles une indemnité équitable à titre de réparation morale. Les lésions corporelles, qui englobent tant les atteintes physiques que psychiques, doivent donc en principe impliquer une importante douleur physique ou morale ou avoir causé une atteinte durable à la santé.

Les circonstances particulières évoquées dans la norme consistent dans l'importance de l'atteinte à la personnalité du lésé, l'art. 47 CO étant un cas d'application de l'art. 49 CO. Les lésions corporelles, qui englobent tant les atteintes physiques que psychiques, doivent donc en principe impliquer une importante douleur physique ou morale ou avoir causé une atteinte durable à la santé. Parmi les circonstances qui peuvent, selon les cas, justifier l'application de l'art. 47 CO, figurent avant tout le genre et la gravité de la lésion, l'intensité et la durée des répercussions sur la personnalité de la personne concernée, le degré de la faute de l'auteur ainsi que l'éventuelle faute concomitante du lésé (ATF 141 III 97 consid. 11.2 et les références citées). A titre d'exemple, une longue période de souffrance et d'incapacité de travail, de même que les préjudices psychiques importants sont des éléments déterminants (arrêt du Tribunal fédéral 4A_373/2007 du 8 janvier 2008 consid. 3.2 non publié in ATF 134 III 97 ; ATF 132 II 117 consid. 2.2.2; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1066/2014 du 27 février 2014 consid. 6.1.2).

3.1.5.2. S'agissant du montant de l'indemnité, toute comparaison avec d'autres affaires doit intervenir avec prudence, dès lors que le tort moral touche aux sentiments d'une personne déterminée dans une situation donnée et que chacun réagit différemment face au malheur qui le frappe. Une comparaison avec d'autres cas similaires peut cependant, suivant les circonstances, constituer un élément d'orientation utile (ATF 130 III 699 consid. 5.1; 125 III 269 consid. 2a).

3.2.1. En l'espèce, s'agissant des postes "dommage corporel", "perte de gain" et "préjudice ménager" figurant dans le mémoire du 28 septembre 2023, les conclusions sont chiffrées mais ne sont pas suffisamment étayées. Sous l'angle de l'art. 41 al. 1 CO, le rapport de causalité adéquate entre l'acte illicite et le préjudice allégué n'est pas établi. On ignore, faute pour ce point d'avoir été instruit, quelle part du dommage est en lien avec les fractures causées par l'accident et lesquelles sont en lien avec les complications survenues, lesquelles ne sont pas en rapport de causalité adéquate avec celui-ci et ne peuvent pas être imputées au prévenu. Or la preuve du dommage incombe au demandeur (art. 42 al. 1 CO), celle du lien de causalité en particulier (TF 4A 38/2008 du 21 avril 2008, consid. 2.1). Par conséquent, le plaignant sera renvoyé à agir par la voie civile sur ces points (art. 126 al. 2 let. b CPP).

3.2.2. Bien qu'il ne soit pas spécifiquement documenté, il se justifie d'allouer une indemnité pour tort moral en lien avec les fractures subies uniquement, lequel sera chiffré ex aequo et bono à CHF 5'000.-. Sera retenu comme facteur réduisant l'indemnité pour tort moral la faute concomitante du plaignant, lequel, en traversant la chaussée à reculons avec un appareil photo ou un téléphone dans ses mains levées, a contribué à la survenance du dommage. Une réduction de 15% sera dès lors opérée. Ainsi, le prévenu sera condamné à verser au plaignant une indemnité de CHF 4'250.-, avec intérêts à 5% dès le 26 avril 2019 à titre de réparation du tort moral.

4.1.1. La question de l'indemnisation du prévenu et de la partie plaignante (art. 429 à 434 CPP) doit être traitée en relation avec celle des frais (ATF 137 IV 352 consid. 2.4.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_385/2017 du 5 décembre 2017 consid. 2.1 ; 6B_620/2016 du 17 mai 2017 consid. 2.2.2 ; 6B_792/2016 du 18 avril 2017 consid. 3.3).

Le prévenu supporte les frais de procédure s'il est condamné (art. 426 al. 1 CPP). Les frais de procédure causés par les conclusions civiles de la partie plaignante peuvent être mis à la charge de celle-ci lorsque la partie plaignante a été renvoyée à agir par la voie civile (art. 427 al. 1 let. c CPP).

4.1.2. L'art. 433 al. 1 let. a CPP, applicable par renvoi de l'art. 436 al. 1 CPP, permet notamment à la partie plaignante de demander au prévenu une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure lorsqu'elle obtient gain de cause. La partie plaignante obtient gain de cause au sens de l'art. 433 al. 1 CPP si les prétentions civiles sont admises et/ou lorsque le prévenu est condamné. Dans ce dernier cas, la partie plaignante peut être indemnisée pour les frais de défense privée en relation avec la plainte pénale (ATF 139 IV 102 consid. 4.1 et 4.3 p. 107 s. ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_549/2015 du 16 mars 2016 consid. 2.3). Cette disposition ne vise pas à réparer le dommage subi par la partie plaignante ensuite de l'infraction, mais s'attache au remboursement de ses débours (T. BÜCHLI, Commentaire de l'arrêt du Tribunal fédéral 6B_47/2017 du 13 décembre 2017 consid. 2.2.4 destiné à la publication, in Revue de l'avocat 2018, p. 90 ; ATF 143 IV 495, consid. 2.2.4.).

4.1.3. Si la partie plaignante est renvoyée à agir par la voie civile, elle ne peut pas être considérée comme ayant eu gain de cause en sa qualité de demandeur au civil, ni comme ayant succombé. Les frais d'avocat liés exclusivement à l'action civile ou les autres frais de la partie plaignante qui concernent uniquement la question civile ne sont pas indemnisés dans la procédure pénale en cas de renvoi de l'action civile au juge civil (ATF 139 IV 102, consid. 4.4).

4.1.4. La notion de juste indemnité de l'art. 433 CPP ne se confond pas avec celle des prétentions civiles, tendant notamment à la réparation du dommage, mais est spécialement réglée par l'art. 433 CPP (ATF 143 IV 495 consid. 2.2.4 ; L. MOREILLON / A. PAREIN-REYMOND, Petit commentaire CPP, 2e éd., Bâle 2016, n. 6 ad art. 433 CPP).

4.1.5. La juste indemnité, notion qui laisse un large pouvoir d'appréciation au juge, couvre ainsi les dépenses et les frais nécessaires pour faire valoir le point de vue de la partie plaignante dans la procédure pénale. Il s'agit en premier lieu des frais d'avocat (ATF 139 IV 102 consid. 4.1 p. 107). En particulier, les démarches doivent apparaître nécessaires et adéquates pour la défense raisonnable du point de vue de la partie plaignante (ATF 139 IV 102 consid. 4.3 p. 108 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_524/2017 du 22 novembre 2017 consid. 2.1 ; 6B_864/2015 du 1er novembre 2016 consid. 3.2 ; 6B_159/2012 du 22 juin 2012 consid. 2.3).

4.1.6. Les honoraires d'avocat se calculent selon le tarif usuel du barreau applicable dans le canton où la procédure se déroule (arrêt du Tribunal fédéral 6B_392/2013 du 4 novembre 2013 consid. 2.3). Bien que le canton de Genève ne connaisse pas de tarif officiel des avocats, il n'en a pas moins posé, à l'art. 34 de la loi sur la profession d'avocat (LPAv), les principes généraux devant présider à la fixation des honoraires, qui doivent en particulier être arrêtés compte tenu du travail effectué, de la complexité et de l'importance de l'affaire, de la responsabilité assumée, du résultat obtenu et de la situation du client. Sur cette base, la Cour de justice retient en principe un tarif horaire entre CHF 400.- et CHF 450.- pour un chef d'étude, de CHF 350.- pour les collaborateurs et de CHF 150.- pour les stagiaires (arrêts du Tribunal fédéral 2C_725/2010 du 31 octobre 2011 consid. 3 ; 2C_25/2008 du 18 juin 2008 consid. 3, en matière d'assistance juridique, faisant référence aux tarifs usuels d'un conseil de choix à Genève ; AARP/125/2012 du 30 avril 2012 consid. 4.2 ; ACPR/178/2015 du 23 mars 2015 consid. 2.1).

4.2. En l'occurrence, le plaignant s'est porté demandeur au pénal et au civil. S'il a obtenu gain de cause au pénal, il a été renvoyé à agir devant le juge civil pour l'essentiel de ses conclusions civiles. Ainsi, sur la base des règles qui précédent, le prévenu sera condamné aux 4/5 des frais de la procédure, qui s'élèvent CHF 1'309.-, y compris un émolument de jugement de CHF 500.- (art. 426 al. 1 CPP), lesquels correspondent aux frais liés au volet pénal ainsi qu'à l'indemnité pour tort moral. Le plaignant sera condamné à 1/5 des frais de la procédure (art. 427 al. 1 let. c CPP), lesquels correspondent aux frais liés au volet civil pour lequel il est renvoyé à agir devant le juge civil.

Enfin, à l'aune de l'art. 433 CPP, le prévenu sera condamné à verser au plaignant une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure sur le plan pénal. Le note d'honoraires du Conseil du plaignant sera revue à la baisse pour tenir compte de 45 minutes pour la rédaction de la plainte, 4h30 de temps d'audiences (déplacements compris), 2h30 d'entretien, 6h00 d'étude dossier, de consultation de dossier et de préparation d'audience, 2h30 de rédaction de conclusions civiles (chargé de pièces inclus), soit 16h15 au taux horaire de CHF 350.- auquel le Tribunal ajoutera 20% en lien avec la correspondance et les appels téléphoniques, soit la somme de CHF 6'825.-. Le prévenu sera condamné à verser 4/5 de celle-ci au plaignant, soit CHF 5'460.-.

 

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL DE POLICE

statuant sur opposition :

Déclare valables l'ordonnance pénale du 20 avril 2022 et l'opposition formée contre celle-ci par X______ le 5 mai 2022.

et statuant à nouveau et contradictoirement :

Déclare X______ coupable de lésions corporelles simples par négligence (art. 125 al. 1 aCP).

Condamne X______ à une peine pécuniaire de 50 jours-amende (art. 34 CP).

Fixe le montant du jour-amende à CHF 40.-.

Met X______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit X______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Condamne X______ à payer à A______ CHF 4'250.-, avec intérêts à 5% dès le 26 avril 2019, à titre de réparation du tort moral (art. 47 CO).

Renvoie A______ à agir par la voie civile s'agissant de ses autres conclusions civiles (art. 126 al. 2 let. b CPP).

Condamne X______ à verser à A______ 5'460.-., à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure (art. 433 al. 1 CPP).

Condamne X______ aux 4/5 des frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 1'309.-, y compris un émolument de jugement de CHF 500.- (art. 426 al. 1 CPP).

Condamne A______ à 1/5 des frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 1'309.-y compris un émolument de jugement de CHF 500.- (art. 427 al. 1 let. c CPP).

Ordonne la communication du présent jugement aux autorités suivantes : Casier judiciaire suisse, Office cantonal de la population et des migrations, Service des contraventions (art. 81 al. 4 let. f CPP).

 

La Greffière

Léa Audrey GARCIA

La Présidente

Anne JUNG BOURQUIN

 

Voies de recours

Les parties peuvent annoncer un appel contre le présent jugement, oralement pour mention au procès-verbal, ou par écrit au Tribunal pénal, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, CH-1211 Genève 3, dans le délai de 10 jours à compter de la communication du dispositif écrit du jugement (art. 398, 399 al. 1 et 384 let. a CPP).

Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.

Si le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit conteste également son indemnisation, il peut interjeter recours, écrit et motivé, dans le délai de 10 jours dès la notification du jugement motivé, à la Chambre pénale d'appel et de révision contre la décision fixant son indemnité (art. 396 al. 1 CPP).

L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).

Etat de frais

Frais du Ministère public

CHF

620.00

Convocations devant le Tribunal

CHF

90.00

Frais postaux (convocation)

CHF

28.00

Emolument de jugement

CHF

500.00

Etat de frais

CHF

50.00

Frais postaux (notification)

CHF

21.00

Total

CHF

1'309.00

 

Notification à X______, soit pour lui son Conseil, Me Marc HOCHMANN FAVRE
Par voie postale

Notification à A______, soit pour lui son Conseil, Me P______
Par voie postale

Notification au Ministère public
Par voie postale