Skip to main content

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/664/2023

ATA/50/2024 du 16.01.2024 ( AIDSO ) , REJETE

Descripteurs : ASSISTANCE PUBLIQUE;PRESTATION D'ASSISTANCE;AIDE FINANCIÈRE;DEVOIR DE COLLABORER;REMBOURSEMENT DE FRAIS(ASSISTANCE);BÉNÉFICIAIRE DE PRESTATIONS;RESTITUTION(EN GÉNÉRAL);DOMICILE;OBLIGATION DE RENSEIGNER;PRINCIPE DE LA BONNE FOI;REMISE DE LA PRESTATION
Normes : Cst.12; LIASI.1.al1; LIASI.8; LIASI.11.al1; LIASI.28; LIASI.32.al1; LIASI.33.al1; CC.23; Cst.9; LPA.20; LIASI.35.al1; LIASI.36; LIASI.42.al1
Résumé : Confirmation de la demande de restitution de prestations accordées à la recourante dans la mesure où il a été établi qu’elle ne disposait pas réellement d’un domicile dans le canton de Genève et qu’elle a failli à son obligation de renseigner. Confirmation du refus de la remise. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/664/2023-AIDSO ATA/50/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 16 janvier 2024

2ème section

 

dans la cause

 

A______ recourante
représentée par Me Catarina MONTEIRO SANTOS, avocate

contre

HOSPICE GÉNÉRAL intimé

 



EN FAIT

A. a. Née le ______ 1995 à Genève et citoyenne suisse, A______ a bénéficié de l’aide financière de l’Hospice général (ci-après : l'hospice) du 1er novembre 2017 au 30 septembre 2019.

b. Lors de sa demande de prestations, signée le 19 novembre 2017, elle a indiqué être domiciliée chez ses grands-parents au ______ à Genève et n’a fait état d’aucune charge de loyer. Elle a signé le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général » par lequel elle s'est engagée, notamment, à donner immédiatement et spontanément à celui-ci toute pièce nécessaire à l’établissement de sa situation personnelle, familiale et économique, en particulier de l’informer immédiatement et spontanément de tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d’aide financière.

c. Selon l’hospice, lors d’un entretien téléphonique du 1er février 2019, A______ a indiqué à son assistante sociale qu’elle avait quitté le domicile de son grand-père et dormait chez un ami d’enfance, dont elle n’a précisé ni le nom, ni l’adresse. Elle n’a pas fait état d’un loyer. Les prestations d’aide financière ont donc été recalculées en tenant compte d’un cohabitant (en lieu et place d’une communauté de majeurs).

d. Entre mars 2019 et juillet 2019, l'hospice a rencontré des difficultés pour entrer en contact avec A______, jusqu'à un entretien téléphonique du 10 juillet 2019 durant lequel celle-ci a indiqué à son assistante sociale qu’elle était à l’étranger. N'ayant pas pu la joindre de nouveau par la suite, l’assistante sociale a laissé un message téléphonique à A______ le 26 juillet 2019, la priant de la rappeler. L’hospice a appris plus tard qu'elle avait effectué un stage linguistique à B______ du 30 juin 2019 au 20 juillet 2020.

e. Le 18 septembre 2019, le grand-père de l’intéressée s’est présenté au guichet de l’office cantonal des assurances sociales (ci-après : OCAS) en indiquant que sa petite-fille n’habitait pas chez lui et s’était domiciliée à son adresse auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) à son insu. Elle vivait en France, à C______. L’OCAS a transmis cette information à l’hospice.

f. Les 24, 25 et 30 septembre 2019, un collaborateur du service d’enquêtes de l’hospice s’est présenté au domicile du grand-père de A______. Celui‑ci a déclaré, le 30 septembre 2019, qu’elle n’avait jamais habité chez lui et vivait à C______ chez sa mère. L’enquêteur a constaté que le nom de A______ ne figurait ni sur la boîte aux lettres, ni sur la porte palière.

g. L’hospice a cessé toute prestation le 1er octobre 2019.

h. Par décision du 16 octobre 2020, l’hospice a réclamé à A______ la restitution des montants versés du 1er novembre 2017 au 30 septembre 2019, à savoir CHF 27'129.20. Il ressortait du registre tenu par l’OCPM qu’elle avait quitté Genève pour C______ le 8 janvier 2020. La décision, indiquant comme adresse de l’intéressée celle de son grand-père, a été publiée dans la FAO du ______ 2020.

i. Par courriers des 18 et 25 février 2021, adressés respectivement à l’adresse du grand-père et à celle de la mère de A______ à C______, le service de recouvrement de l’hospice a invité A______ à s’acquitter de la somme précitée ou, en cas de difficultés, à le contacter afin de mettre en place un plan de remboursement.

j. Par pli du 8 avril 2021, suivi d'un autre du 3 septembre 2021, A______ a formé opposition contre la décision du 16 octobre 2020. Celle-ci lui avait été notifiée le 9 mars 2021, date à laquelle elle avait reçu le courrier du service de recouvrement. Elle avait quitté Genève le 8 janvier 2020 pour C______. L’hospice disposait de son adresse en France puisqu’elle effectuait alors un stage auprès de lui. Pendant la période d’aide financière, elle avait été domiciliée chez son grand-père. Celui-ci avait des sautes d’humeur. Ils se disputaient régulièrement et à plusieurs reprises, il l’avait empêchée de rentrer au domicile, ce qui l’avait contrainte de loger chez sa tante.

Elle a produit une attestation de l'OCPM du 8 janvier 2020 confirmant qu'elle avait résidé sur le territoire du canton du 25 octobre 2017 au 8 janvier 2020, date de son départ pour C______ en France. Étaient également produites une attestation sur l’honneur de son grand-père du 10 octobre 2019, selon laquelle elle habitait chez lui depuis le 25 octobre 2017 et une autre, du 21 mars 2021, certifiant qu’elle avait habité chez lui du 25 octobre 2017 au 8 janvier 2020, une attestation sur l'honneur signée par sa tante le 21 mars 2021 confirmant qu'elle l'avait hébergée occasionnellement lorsque son grand-père l'empêchait de rentrer au domicile et, enfin, une attestation sur l'honneur signée par son demi-frère le 22 mars 2021 confirmant qu'il avait résidé chez son grand-père durant la même période que l'intéressée et qu'il avait également été empêché de rentrer au domicile.

La décision entreprise était entre autres fondée sur les propos tenus par le grand-père de A______ lors du troisième contrôle de terrain du 30 septembre 2019, selon lesquels celle-ci n'avait jamais vécu chez lui, mais vivait en France avec sa mère. Or, le même grand-père avait attesté par deux fois, quelques jours et quelques mois plus tard, que sa petite-fille avait bel et bien habité chez lui du 25 octobre 2017 au 8 janvier 2020. Ces propos étaient contradictoires et donc peu crédibles.

k. Par décision du 11 octobre 2021, l’hospice a déclaré l’opposition irrecevable, car tardive.

B. a. Par acte expédié le 11 novembre 2021 à la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), A______ a recouru contre cette décision. Elle a en substance conclu au constat que son opposition n’était pas tardive et à l’annulation des décisions des 11 octobre 2021 et 16 octobre 2021 [recte : 2020].

Elle a également repris et développé ses arguments sur le fond du litige.

b. Par arrêt du 8 mars 2022 (ATA/245/2022), la chambre administrative a admis partiellement le recours, annulé la décision du 11 octobre 2021 et renvoyé la cause à l’hospice pour statuer sur l'opposition de la recourante.

C.           Par décision sur opposition du 24 janvier 2023, l'hospice a partiellement admis l'opposition formée par A______, tout en confirmant la décision de restitution du CAS à concurrence de CHF 11'740.10 en capital, somme correspondant aux prestations d'aide financière perçues indûment par elle du 1er janvier 2019 au 30 septembre 2019.

L'absence de résidence effective à Genève de A______ était établie pour la période précitée. À partir de janvier 2019 et jusqu'à janvier 2020 à tout le moins, elle avait fait réacheminer son courrier en Poste restante à D______. Il ressortait des relevés bancaires remis à l'hospice que si elle avait effectué de nombreux achats en France voisine en semaine, aucun paiement ni aucun retrait d'argent n'avaient été opérés dans le quartier de E______où se situait d'après elle son domicile du 25 octobre 2017 au 8 janvier 2020. À cela s'ajoutaient ses propres déclarations selon lesquelles elle avait quitté le domicile de son grand-père en décembre 2018, de même que les déclarations de son grand-père rapportées précédemment. Ces nombreux éléments permettaient de retenir qu'à tout le moins dès le 1er janvier 2019, elle n'était plus domiciliée chez ce dernier, mais résidait en France. Les prestations d'aide financière versées pour cette période l'avaient été sur la foi d'une information incorrecte, ce qui justifiait une demande de restitution.

D.           a Par acte expédié le 24 février 2023, A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative contre la décision précitée. À titre préalable, elle a sollicité son audition ainsi que celles de F______, G______ et H______, et conclu principalement à l'annulation de la décision sur opposition du 24 janvier 2023 et à l'octroi d'une indemnité de procédure.

Ayant annoncé dès son arrivée sur le territoire genevois à l'OCPM être domiciliée chez son grand-père, son prénom n'avait pas à figurer sur la boîte aux lettres et la porte palière de son domicile.

Les allégations de l'hospice selon lesquelles il ressortait de ses relevés bancaires qu'elle n'avait effectué aucun paiement ni retrait dans le quartier de E______durant toute la période d'aide, ne permettaient pas de fonder ou non sa domiciliation.

La décision querellée constituait, en toute hypothèse, une mesure disproportionnée et, en l'absence d'instruction approfondie, arbitraire. Elle la plongeait, en tant que jeune diplômée à la recherche d'un emploi, dans une situation personnelle et financière précaire.

Elle a également repris et développé les arguments avancés dans son opposition.

b. Le 5 avril 2023, l'hospice a conclu au rejet du recours, contestant les allégations de la recourante au sujet de sa domiciliation chez son grand-père.

c. Lors de l'audience de comparution personnelle et d'enquêtes du 10 mai 2023, la recourante a déclaré qu'elle n'avait pas remarqué le changement dans les montants d'aide sociale puisqu'ils variaient tous les mois. Son hébergement chez son ami d'enfance, comme annoncé à son assistante sociale le 1er février 2019, était temporaire, celle-ci savait qu'elle rencontrait des conflits avec son grand-père qui déchirait, par exemple, ses courriers. Elle n'avait pas donné de précision sur son ami d'enfance, que ce soit son nom ou son adresse. Elle avait porté le choix sur D______ pour la poste restante parce que cela permettait soit à sa sœur qui habitait à C______ en France de récupérer son courrier pour le lui remettre à Genève soit à elle-même de passer retirer son courrier lors de ses déplacements en France voisine pour faire ses courses. Elle avait eu avec sa mère une grosse dispute, à la suite de laquelle elle était venue s'installer chez ses grands-parents. Elle s'était réconciliée par la suite avec sa mère et était retournée vivre chez elle en 2020.

d. Lors de l'audience de comparution personnelle et d'enquêtes du 28 juin 2023, l'hospice, représenté par l'assistante sociale ayant suivi la recourante jusqu'au 31 mars 2019, a confirmé que celle-ci lui avait indiqué lors de l'entretien du 1er février 2019 avoir quitté la maison de son grand-père et dormir chez un ami de manière temporaire. Selon elle, il s'agissait tout de même d'une période pouvant porter sur plusieurs mois, sans quoi elle n'aurait pas procédé à la modification du calcul des prestations. Elle ne se rappelait pas, ni n'avait noté dans son « journal de bord », comme elle l'aurait fait, cas échéant, selon l'usage, des renseignements sur les conflits familiaux de la recourante avec son grand-père, ni des problèmes de correspondance ou de courrier lorsqu'elle vivait chez ce dernier.

Le demi-frère de la recourante a confirmé qu'il avait résidé chez son grand-père durant la même période que l'intéressée entre 2019 et 2020. Il avait pris domicile chez son grand-père et sa sœur était venue peu après. Il ne savait pas qui avait indiqué à l'OCPM qu'il y avait résidé du 19 novembre 2018 au 30 juin 2019. L'appartement de son grand-père comprenait deux chambres et leur oncle y habitait aussi. Comme la recourante, il avait également subi les humeurs changeantes de son grand-père, qui l'avait plusieurs fois empêché de rentrer au domicile et déchirait ses courriers. Son grand-père confondait du reste fréquemment la recourante avec son autre petite-fille. À sa connaissance, la recourante avait toujours eu une très bonne entente avec sa mère.

La recourante a expliqué au sujet des paiements effectués entre le 1er janvier 2019 et le 31 mars 2019 qu'elle faisait ses courses en France car c'était moins cher et qu'il y avait des boucheries halal. Elle pouvait y aller après son travail. La tombe de son père se trouvait au cimetière de C______. Elle n'effectuait pas ses achats à I______ ou J______ parce qu'elle ne connaissait pas ce côté-là de la frontière. Elle avait fait quelques achats à la Migros, mais pas dans le quartier de E______. Elle n'avait pas mentionné la présence de son oncle dans l'appartement à l'hospice parce que cela ne lui semblait pas pertinent à l'époque. Enfin, elle n'avait pas dévié son courrier chez sa tante, parce qu'elle pensait que cela n'était possible que si elle habitait chez cette dernière.

e. Dans ses observations du 24 août 2023, la recourante a persisté dans ses conclusions. Compte tenu des problèmes rencontrés avec son grand-père lorsqu'elle résidait chez lui, elle avait décidé de trouver un autre logement à Genève. À cet effet, elle avait créé un compte auprès de la régie K______ et avait adressé à celle-ci plusieurs courriels de recherche de logement. Des échanges avec cette régie, il résultait qu'elle avait souhaité visiter un logement et que les collaboratrices de la régie lui avaient indiqué que le logement en question était destiné uniquement à des personnes étudiantes. Cela attestait qu'elle résidait toujours à Genève, chez son grand-père et n'avait aucune intention de partir s'installer en France voisine en 2019.

f. Dans ses observations du 24 août 2023, l'intime a persisté dans ses conclusions.

g. Sur ce, la cause a été gardée à juger.

h. Les arguments des parties et la teneur des pièces de la procédure seront pour le surplus repris ci-dessous dans la mesure utile au traitement du litige.

 

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10 ; art. 52 de la loi sur l’insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 - LIASI - J 4 04).

2.             Le recours porte sur le bien-fondé de la demande de restitution des prestations versées à la recourante du 1er janvier 2019 au 30 septembre 2019, dont le montant, de CHF 11'740.10, n'est pas contesté.

2.1 La LIASI a pour but de prévenir l’exclusion sociale et d’aider les personnes qui en souffrent à se réinsérer dans un environnement social et professionnel (art. 1 al. 1). Elle vise à garantir à ceux qui se trouvent dans la détresse matérielle et morale des conditions d’existence conformes à la dignité humaine (art. 1 al. 2 phr. 2). Avec le règlement d'exécution de la LIASI du 25 juillet 2007 (RIASI - J 4 04.01), elle concrétise les art. 12 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 39 al. 1 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00 ; ATA/256/2020 du 3 mars 2020 consid. 4b).

2.2 Ont droit à des prestations d'aide financière les personnes majeures qui ne sont pas en mesure de subvenir à leur entretien ou à celui des membres de la famille dont ils ont la charge (art. 8 al. 1 LIASI). Ces prestations ne sont pas remboursables, sous réserve des art. 12 al. 2 et 36 à 41 LIASI (art. 8 al. 2 LIASI).

L’art. 11 al. 1 LIASI précise que ces personnes doivent avoir leur domicile et leur résidence effective sur le territoire genevois (let. a), ne pas être en mesure de subvenir à leur entretien (let. b) et répondre aux autres conditions de la loi (let. c).

Selon l’art. 28 LIASI, le droit aux prestations d'aide financière naît dès que les conditions de la loi sont remplies, mais au plus tôt le premier jour du mois du dépôt de la demande (al. 1). Il s’éteint à la fin du mois où l’une des conditions dont il dépend n’est plus remplie (al. 2).

2.3 Les conditions du domicile et de la résidence effective sur le territoire du canton de Genève sont cumulatives, de sorte que des prestations d’aide financière complète ne sont accordées qu’aux personnes autorisées à séjourner dans le canton de Genève, soit aux personnes d’origine genevoise, aux Confédérés et aux étrangers bénéficiant d’un titre de séjour (ATA/1093/2022 du 1er novembre 2022 consid. 3b ; ATA/1001/2022 du 4 octobre 2022 consid. 3d).

2.4 Selon l’art. 23 CC, le domicile de toute personne est au lieu où elle réside avec l’intention de s’y établir (al. 1). Nul ne peut avoir en même temps plusieurs domiciles (al. 2). L’art. 24 CC prévoit que toute personne conserve son domicile aussi longtemps qu’elle ne s’en est pas créé un nouveau (al. 1). Le lieu où elle réside est considéré comme son domicile, lorsque l’existence d’un domicile antérieur ne peut être établie ou lorsqu’elle a quitté son domicile à l’étranger et n’en a pas acquis un nouveau en Suisse (al. 2).

La notion de domicile contient deux éléments : d'une part, la résidence, soit un séjour d'une certaine durée dans un endroit donné et la création en ce lieu de rapports assez étroits et, d'autre part, l'intention de se fixer pour une certaine durée au lieu de sa résidence qui doit être reconnaissable pour les tiers et donc ressortir de circonstances extérieures et objectives. Cette intention implique la volonté manifestée de faire d'un lieu le centre de ses relations personnelles et professionnelles. Le domicile d'une personne se trouve ainsi au lieu avec lequel elle a les relations les plus étroites, compte tenu de l'ensemble des circonstances. Le lieu où les papiers d'identité ont été déposés ou celui figurant dans des documents administratifs, comme des attestations de la police des étrangers, des autorités fiscales ou des assurances sociales constituent des indices qui ne sauraient toutefois l'emporter sur le lieu où se focalise un maximum d'éléments concernant la vie personnelle, sociale et professionnelle de la personne intéressée (ATF 141 V 530 consid. 5.2 ; 136 II 405 consid. 4.3). Du point de vue subjectif, ce n'est pas la volonté interne de la personne concernée qui importe, mais les circonstances reconnaissables pour des tiers, qui permettent de déduire qu'elle a cette volonté (ATF 137 II 122 consid. 3.6 ; 133 V 309 consid. 3.1).

Pour qu'une personne soit domiciliée à un endroit donné, il faut donc que des circonstances de fait objectives manifestent de manière reconnaissable pour les tiers que cette personne a fait de cet endroit, ou qu'elle a l'intention d'en faire, le centre de ses intérêts personnels, sociaux et professionnels (ATF 119 II 64 consid. 2b/bb ; arrêt du Tribunal fédéral 5C.163/2005 du 25 août 2005 consid. 4.1 et les références citées). Même un séjour d'emblée temporaire peut constituer un domicile, lorsqu'il est d'une certaine durée et que le centre des intérêts de la personne y est transféré (Daniel STÄHELIN, in ZGB - Basler Kommentar, 6ème éd. 2018, n. 7 ad art. 23 CC et les références). L’intention de quitter un lieu plus tard n’empêche pas d’y constituer un domicile (ATF 127 V 237 consid. 2c).

2.5 Selon l’art. 32 al. 1 LIASI, le demandeur ou son représentant légal doit fournir tous les renseignements nécessaires pour établir son droit et fixer le montant des prestations d'aide financière.

Le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l’Hospice général » concrétise l’obligation de collaborer et de renseignement. Le bénéficiaire ou son représentant légal doit immédiatement déclarer à l’hospice tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d’aide financière qui lui sont allouées ou leur suppression (art. 33 al. 1 LIASI ; ATA/1304/2021 du 30 novembre 2021 consid. 3a ; ATA/93/2020 du 28 janvier 2020 consid. 3a). L’engagement écrit du bénéficiaire de l’aide sociale comprend l’obligation de signaler tout départ, absence de Genève ou voyage à l’étranger (ATA/1090/2022 du 1er novembre 2022 consid. 3 ; ATA/437/2022 du 26 avril 2022 consid. 2d).

2.6 L'art. 35 al. 1 LIASI décrit six cas dans lesquels les prestations d'aide financière peuvent être réduites, suspendues, refusées ou supprimées. Tel est notamment le cas lorsque la personne bénéficiaire ne répond pas ou cesse de répondre aux conditions de la loi (let. a) ou lorsqu'elle ne s'acquitte pas intentionnellement de son obligation de collaborer telle que prescrite par l'art. 32 (let. c) ou qu'elle refuse de donner les informations requises au sens des art. 7 et 32, donne des indications fausses ou incomplètes ou cache des informations utiles (let. d). Conformément à l’art. 35 al. 2 LIASI, l’hospice rend alors une décision écrite et motivée, avec les voies de droit (al. 2).

2.7 La suppression ou la réduction des prestations d'assistance doit être conforme au principe de la proportionnalité, imposant une pesée de l'ensemble des circonstances. Il faut alors prendre en considération la personnalité et la conduite du bénéficiaire des prestations, la gravité des fautes qui lui sont reprochées, les circonstances de la suppression des prestations ainsi que l'ensemble de la situation de la personne concernée (ATF 122 II 193 consid. 3b, in JdT 1998 I 562 ; ATA/1662/2019 du 12 novembre 2019 consid. 7).

2.8 Sous le titre « Prestations perçues indûment », l'art. 36 LIASI dispose qu'est considérée comme étant perçue indûment toute prestation qui a été touchée sans droit (al. 1). Par décision écrite, l'hospice réclame au bénéficiaire, à sa succession ou à ses héritiers qui l'ont acceptée, le remboursement de toute prestation d'aide financière perçue indûment par la suite de la négligence ou de la faute du bénéficiaire (al. 2). Le remboursement des prestations indûment touchées peut être réclamé si le bénéficiaire, sans avoir commis de faute ou de négligence, n'est pas de bonne foi (al. 3). L’action en restitution se prescrit par cinq ans, à partir du jour où l’hospice a eu connaissance du fait qui ouvre le droit au remboursement. Le droit au remboursement s’éteint au plus tard dix ans après la survenance du fait (al. 5).

De jurisprudence constante, toute prestation obtenue en violation de l'obligation de renseigner l'hospice est une prestation perçue indûment (ATA/15/2023 du 10 janvier 2023 consid. 2g ; ATA/850/2022 du 23 août 2022 consid. 5b ; ATA/918/2019 du 21 mai 2019 consid. 2).

Celui qui a encaissé des prestations pécuniaires obtenues en violation de son obligation de renseigner est tenu de les rembourser selon les modalités prévues par la LIASI qui concrétisent tant le principe général de la répétition de l’enrichissement illégitime que celui de la révocation, avec effet rétroactif, d’une décision administrative mal fondée, tout en tempérant l’obligation de rembourser en fonction de la faute et de la bonne ou mauvaise foi du bénéficiaire (ATA/93/2020 précité consid. 3c et les références citées).

2.9 Les bénéficiaires des prestations d’assistance sont tenus de se conformer au principe de la bonne foi dans leurs relations avec l’administration, notamment en ce qui concerne l’obligation de renseigner prévue par la loi, sous peine d’abus de droit. Si le bénéficiaire n’agit pas de bonne foi, son attitude doit être sanctionnée et les décisions qu’il a obtenues en sa faveur peuvent être révoquées en principe en tout temps. Violer le devoir de renseigner est contraire à la bonne foi (ATA/93/2020 précité consid. 3c). Il convient toutefois d’apprécier, au cas par cas, chaque situation pour déterminer si l’entier des prestations, ou seulement une partie de celles-ci, a été perçu indûment et peut faire l’objet d’une demande de remboursement (ATA/947/2018 précité consid. 3d).

2.10 Ancré à l'art. 9 Cst., et valant pour l'ensemble de l'activité étatique, le principe de la bonne foi exige que l'administration et les administrés se comportent réciproquement de manière loyale (arrêt du Tribunal fédéral 2C_596/2022 du 8 novembre 2022 consid. 8.1). En particulier, l'administration doit s'abstenir de tout comportement propre à tromper l'administré et ne saurait tirer aucun avantage des conséquences d'une incorrection ou insuffisance de sa part (ATF 138 I 49 consid. 8.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_596/2022 du 8 novembre 2022 consid. 8.1). La protection de la bonne foi ne s'applique pas si l'intéressé connaissait l'inexactitude de l'indication ou aurait pu la connaître en consultant simplement les dispositions légales pertinentes (ATF 135 III 489 consid. 4.4 ; 134 I 199 consid. 1.3.1).

Selon la jurisprudence rendue en matière d'assurances sociales, le défaut de renseignement dans une situation où une obligation de renseigner est prévue par la loi, ou lorsque les circonstances concrètes du cas particulier auraient commandé une information de l'assureur, est assimilé à une déclaration erronée de sa part qui peut, à certaines conditions, obliger l'autorité à consentir à un administré un avantage auquel il n'aurait pas pu prétendre, en vertu du principe de la protection de la bonne foi découlant de l'art. 9 Cst. Un renseignement ou une décision erronés de l'administration peuvent obliger celle-ci à consentir à un administré un avantage contraire à la réglementation en vigueur, à condition que (a) l'autorité soit intervenue dans une situation concrète à l'égard de personnes déterminées, (b) qu'elle ait agi ou soit censée avoir agi dans les limites de ses compétences et (c) que l'administré n'ait pas pu se rendre compte immédiatement (« ohne weiteres ») de l'inexactitude du renseignement obtenu. Il faut encore qu'il se soit fondé sur les assurances ou le comportement dont il se prévaut pour (d) prendre des dispositions auxquelles il ne saurait renoncer sans subir de préjudice et (e) que la réglementation n'ait pas changé depuis le moment où l'assurance a été donnée. Ces principes s'appliquent par analogie au défaut de renseignement, la condition (c) devant toutefois être formulée de la façon suivante : que l'administré n'ait pas eu connaissance du contenu du renseignement omis ou que ce contenu était tellement évident qu'il n'avait pas à s'attendre à une autre information (ATF 143 V 341 consid. 5.2.1; 131 V 472 consid. 5 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_419/2022 du 6 avril 2023 consid. 4.3).

2.11 La procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle le juge établit les faits d’office (art. 19 LPA), sans être limité par les allégués et les offres de preuves des parties. Dans la mesure où l'on peut raisonnablement exiger de l’autorité qu’elle les recueille, elle réunit ainsi les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision. Elle apprécie les moyens de preuve des parties et recourt s’il y a lieu à d'autres moyens de preuve (art. 20 LPA). Mais ce principe n’est pas absolu, sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA). Celui‑ci comprend en particulier l’obligation des parties d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l’absence de preuves (ATF 128 II 139 consid. 2b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_454/2017 du 16 mai 2018 consid. 4.1 ; 2C_524/2017 du 26 janvier 2018 consid. 4.2 ; ATA/880/2021 du 31 août 2021 consid. 3a et les références citées).

En procédure administrative, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2). Le juge forme ainsi librement sa conviction, en analysant la force probante des preuves administrées, dont ni le genre, ni le nombre n'est déterminant, mais uniquement la force de persuasion (art. 20 al. 1 LPA ; ATA/382/2023 du 18 avril 2023 consid. 5b ; ATA/109/2021 du 2 février 2021 consid. 12b).

De jurisprudence constante, en présence de déclarations contradictoires, la préférence doit en principe être accordée à celles que l'intéressé a données en premier lieu, alors qu'il en ignorait les conséquences juridiques, les explications nouvelles pouvant être, consciemment ou non, le produit de réflexions ultérieures (arrêt du Tribunal fédéral 9C_728/2013 du 16 janvier 2014 consid. 4.1.2 ; ATA/174/2022 du 17 février 2022 consid. 3f ; ATA/184/2023 du 28 février 2023 consid. 3.3).

3.             En l'espèce, il convient d’examiner si la recourante pouvait se prévaloir d'un domicile ou d'une résidence effective à Genève du 1er janvier 2019 au 30 septembre 2019, indispensables pour avoir droit à des prestations d'aide financière, puis si la demande de restitution est fondée.

Selon les déclarations de son demi-frère lors de l'audience de comparution personnelle, cet appartement comprenait deux chambres à coucher et hébergeait en sus du grand-père, lui-même, son oncle et la recourante. Il n'y avait pas de chambre attribuée pour lui et celle-ci, de sorte qu'ils dormaient où ils pouvaient. La recourante allègue que la cohabitation avec son grand-père était difficile parce que, non seulement il l'a empêchée à plusieurs reprises d'accéder au logement, la contraignant ainsi de loger chez sa tante dont le domicile se trouvait à proximité, mais aussi il déchirait son courrier. On ne comprend cependant pas pourquoi la recourante a attendu la décision de restitution des prestations pour évoquer la cohabitation conflictuelle avec son grand-père dans son opposition. Elle aurait dû faire part de ses difficultés à son assistante sociale et même solliciter son aide pour trouver un logement, étant précisé que l'hospice prend en charge à certaines conditions le loyer des bénéficiaires des prestations. De surcroît, elle n'a pris aucune initiative pour s'inscrire pour les logements de fondations et de régies publiques, ni entrepris des démarches auprès de régies privées en vue de trouver un logement, à l'exception de l'ouverture d'un compte auprès de la régie K______ suivi d'un échange de courriels avec celle-ci en février 2019 relatif à la demande de visite d'un logement. Dans ces conditions et contrairement à ce que soutient la recourante, cette unique manifestation d'intérêt pour un logement confine à l'inaction, laquelle est incompatible avec une cohabitation difficile avec son grand-père dans son appartement dans lequel les conditions d'hébergement n'étaient, qui plus est, pas optimales pour elle (voir ATA/1310/2023 du 5 décembre 2023 consid. 3).

Plus important, la recourante a annoncé à son assistante sociale le 1er février 2019 qu'elle avait quitté à la fin décembre 2018 le logement de son grand-père pour loger chez son ami d'enfance sans indiquer, ni son nom, ni son adresse. Elle n'a pas non plus fait mention d'un quelconque loyer à payer. Elle a indiqué dans son recours que ce départ faisait suite à des conflits avec son grand-père et qu'elle n'avait séjourné que de manière ponctuelle chez son ami, soit précisément deux jours. Selon son assistante sociale qui a retenu le caractère temporaire de ce séjour, celui-ci pouvait porter sur plusieurs mois, ce qui explique qu'elle ait procédé à la modification du calcul des prestations. Au-delà du fait que les allégations de la recourante sont ainsi contredites par celle-ci et que son absence de curiosité concernant l'adresse de l'ami d'enfance de la recourante paraisse incompréhensible, cette dernière ne pouvait se satisfaire de cette situation et laisser l'autorité intimée continuer à lui consentir des prestations dont les conditions d'octroi étaient susceptibles d'être réévaluées à l'aune de la modification de sa situation personnelle. Il en va ainsi d'autant plus que ce défaut de renseignements ou cette information parcellaire a été suivi par la suite par d'autres éléments allant dans le même sens.

On peut relever que le moment du départ de la recourante du logement de son grand‑père coïncidait avec la période durant laquelle elle a donné l'ordre pour le réacheminement de son courrier pour la poste restante de D______, lequel a duré du 21 janvier 2019 au 31 janvier 2020. La logique aurait pourtant commandé qu'elle optât pour une poste restante à E______ou qu'elle indiquât l'adresse de sa tante, dont le logement était proche de celui de son grand-père et avec laquelle elle a affirmé entretenir de bonnes relations, comme adresse de réception de ses correspondances ou encore qu'elle choisît un office postal proche du logement de son ami d'enfance. Son argument selon lequel elle pensait qu'il fallait habiter chez sa tante pour y faire dévier son courrier ne convainc pas, car elle aurait pu se renseigner de la faisabilité de la démarche à la poste lorsqu'elle s'y est rendue pour requérir une poste restante. Le choix d'un office postal à proximité de la frontière avec la Haute-Savoie accroît la vraisemblance qu'elle aurait en réalité vécu chez sa mère à C______.

Il ressort des relevés bancaires (lisibles) de la recourante, qui ne le conteste pas, qu'elle a effectué la majorité de ses achats ou paiements en semaine à D______ ou en Haute-Savoie entre janvier 2019 et son départ pour le Canada. La fréquence desdits achats et la modicité des montants consacrés aux courses alimentaires dans les enseignes avec pignon sur rue en France cadrent toutefois mal avec la logique d'économie avancée par la recourante, ce d'autant plus qu'elle a affirmé se servir dans ce cadre d'une voiture.

Hormis un entretien téléphonique du 10 juillet 2019 au cours duquel la recourante a indiqué qu'elle se trouvait à l'étranger, celle-ci a été injoignable entre mars 2019 et juillet 2019. Ce n'est que plus tard, soit à la suite de la transmission d'un document le 11 septembre 2019, que l'hospice a appris qu'elle avait effectué un séjour linguistique au Canada.

En outre, dans la mesure où le grand-père de la recourante a indiqué le 18 septembre 2019 lors d'un déplacement à l'OCAS que la recourante n'avait jamais habité chez lui, qu'elle utilisait son adresse à son insu et qu'elle vivait en France voisine à C______ chez mère, elle doit se voir opposer ces déclarations. En effet, en présence de déclarations contradictoires, la préférence doit en principe être accordée à celles que l'intéressé a données en premier lieu. Lors d'un contrôle effectué par l'enquêteur de l'hospice à l'occasion de la visite à son domicile le 30 septembre 2019, l'intéressé a réitéré ses déclarations. Les attestations sur l'honneur produites par la recourante et signées par celui-ci le 10 octobre 2019 et le 21 mars 2021, soit après la décision de restitution de l'hospice, certifiant qu'elle avait habité chez lui pendant la période litigieuse ne renversent pas cette présomption de véracité. C'est en vain qu'elle se prévaut de ces attestations pour décrédibiliser les déclarations initiales de l'intéressé qui lui sont défavorables. Les affirmations selon lesquelles ce dernier la confondait avec une cousine ou qu'il avait des problèmes d'alcool qui provoquaient chez lui des changements soudains d'humeur ne sont pas non plus de nature à infléchir cette appréciation. De même, l'attestation sur l'honneur signée par sa tante n'est corroborée par aucun autre élément de preuve crédible et ne lui est d'aucun secours. Il en va de même de celle émanant de son demi-frère, étant relevé à titre superfétatoire que ce dernier a tenu des déclarations tantôt confuses au sujet des dates de sa présence dans le logement de son grand-père, tantôt contraires à celles de la recourante sur la qualité des relations existant entre elle et sa mère.

Enfin, les indications figurant au registre de l’OCPM du 8 janvier 2020 confirmant que la recourante avait résidé sur le territoire du canton du 25 octobre 2017 au 8 janvier 2020, date de son départ pour C______ en France, ne sont pas déterminantes dès lors que de nombreux éléments ne permettent pas de conclure à l'existence d'une résidence habituelle sur le territoire genevois.

Il apparaît sur la base des développements qui précèdent des indices suffisants pour retenir que la recourante avait le centre de ses intérêts en France voisine et non sur le territoire genevois entre janvier et septembre 2019. À défaut de cette condition, elle ne pouvait prétendre au versement des prestations d'aide financière. La recourante ayant perçu sans droit les prestations qui lui ont été servies au cours de la période pertinente, l'intimé était fondé à lui réclamer leur restitution.

Dans ces circonstances, l'hospice n'a pas violé la loi, y compris le principe de la proportionnalité, ni abusé de son pouvoir d'appréciation en ordonnant la restitution de l'intégralité des prestations perçues indûment. La décision sur opposition de l'hospice du 24 janvier 2023 de la somme de CHF 11'740.10 sera ainsi confirmée.

Mal fondé, le recours sera rejeté sur ce point.

4.             Reste à examiner le bien-fondé de la demande de remise sollicitée à titre subsidiaire par la recourante.

4.1 Conformément à l'art. 42 LIASI, le bénéficiaire de bonne foi n’est tenu au remboursement, total ou partiel, que dans la mesure où il ne serait pas mis, de ce fait, dans une situation difficile (al. 1). Dans ce cas, il doit formuler par écrit une demande de remise dans un délai de 30 jours dès la notification de la demande de remboursement. Cette demande de remise est adressée à l'Hospice général (al. 2).

De jurisprudence constante, les conditions de la bonne foi et de la condition financière difficile sont cumulatives (ATA/1231/2022 du 6 décembre 2022 consid. 4g ; ATA/93/2020 précité consid. 4b et les références citées).

La condition de la bonne foi doit être réalisée dans la période où l’assuré concerné a reçu les prestations indues dont la restitution est exigée (arrêt du Tribunal fédéral 8C_766/2007 du 17 avril 2008 consid. 4).

Selon la jurisprudence de la chambre administrative, un assuré qui viole ses obligations d’informer l’hospice de sa situation financière ne peut être considéré de bonne foi (ATA/93/2020 précité consid. 4b et les références citées). La bonne foi doit être niée quand l’enrichi pouvait, au moment du versement, s’attendre à son obligation de restituer parce qu’il savait ou devait savoir, en faisant preuve de l’attention requise, que la prestation était indue (art. 3 al. 2 CC ; ATF 130 V 414 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_385/2011 du 13 février 2012 consid. 3; ATA/1310/2023 du 5 décembre 2023 consid. 3).

4.2 En l'espèce, la recourante a formulé dans son opposition du 3 septembre 2021, puis réitéré dans son recours que l'hospice soit condamné à renoncer à la créance réclamée d'un montant CHF 11'740.10 pour le motif que la restitution d'un tel montant la plongerait dans une situation personnelle et financière précaire.

Hormis que la précarité financière de la recourante n'est étayée par aucun élément de preuve, la recourante a dès la première demande d'aide donné des informations fausses ou incomplètes. En effet, le formulaire de demande de prestations d'aide financière qu'elle a rempli le 19 novembre 2017 comprenait une rubrique intitulée « Données personnelles des autres personnes vivant sous le même toit » dans laquelle elle avait indiqué seulement les noms de son grand-père et de sa grand‑mère. Or, elle a sciemment omis d'indiquer à ce moment-là ou ultérieurement, comme l'y engage le document intitulé « Mon engagement en demandant une aide financière à l'Hospice général », la présence de son demi-frère ou de son oncle dans l'appartement de son grand-père qui lui servait de domicile. L'argument avancé lors de l'audition de comparution personnelle selon lequel elle ne trouvait pas pertinente la communication concernant son oncle ne saurait être décisif puisque, selon la jurisprudence de la chambre de céans, il n'appartient pas au bénéficiaire des prestations d'aide financière mais à l'hospice d'apprécier la pertinence des éléments utiles à l'examen ou la réévaluation du droit de la recourante aux prestations d'aide financière.

Lors de l'entretien périodique du 1er février 2019 par téléphone, elle n'a déclaré, ni le nom, ni l'adresse de son ami d'enfance qui l'avait hébergée, à tout le moins, temporairement. En prétendant par la suite qu'elle résidait à Genève en dépit de nombreux indices susceptibles de permettre d'aboutir à une conclusion contraire, elle a agi contrairement à son engagement d’informer immédiatement et spontanément l’hospice de tout fait nouveau de nature à entraîner la modification du montant des prestations d'aide financière, notamment de toute modification de sa situation personnelle.

À l'exception d'un entretien téléphonique du 10 juillet 2019, la recourante a été injoignable entre mars et juillet 2019, l'hospice apprenant en septembre 2019 qu'elle avait effectué un séjour linguistique au Canada. Or, en n'informant pas l'hospice, avant son départ, de son voyage à l'étranger et de sa durée, elle a violé son devoir de collaboration selon la jurisprudence constante de la chambre de céans précitée.

Au vu de ce qui précède, la recourante ne peut se prévaloir de sa bonne foi puisqu'elle a enfreint à plusieurs reprises son obligation d'informer, soit en omettant sciemment de signaler des informations ou de préciser certaines annonces à satisfaction du droit, lesquelles étaient à l'évidence importantes pour l'intimé dès qu'elles pouvaient conduire à la réévaluation des conditions d'octroi des prestations d'aide financière. Elle ne soutient d'ailleurs pas, à juste titre, avoir ignoré qu'elle aurait dû s'acquitter de son obligation de renseigner l'intimé dans les circonstances indiquées. En l'absence de bonne foi, elle ne remplit pas l'une des deux conditions cumulatives nécessaires pour obtenir la remise sollicitée.

Mal fondé également sur ce point, le recours sera rejeté.

5.             Vu la nature du litige, aucun émolument ne sera perçu (art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 ‑ RFPA – E 5 10.03), et au vu de son issue aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 24 février 2023 par A______ contre la décision de l'Hospice général du 24 janvier 2023 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Catarina MONTEIRO SANTOS, avocate de la recourante ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : Claudio MASCOTTO, président, Florence KRAUSKOPF, Jean-Marc VERNIORY, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. HÜSLER ENZ

 

 

le président siégeant :

 

 

C. MASCOTTO

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

Genève, le  la greffière :