Décisions | Assistance juridique
DAAJ/92/2024 du 28.08.2024 sur AJC/1484/2024 ( AJC ) , REJETE
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||
POUVOIR JUDICIAIRE AC/613/2024 DAAJ/92/2024 COUR DE JUSTICE Assistance judiciaire DÉCISION DU MERCREDI 28 AOUT 2024 |
Statuant sur le recours déposé par :
Madame A______, domiciliée c/o CHC de B______, ______, représentée par C______, juriste à D______ [institution sociale],
contre la décision du 14 mars 2024 de la vice-présidence du Tribunal civil.
A. a. A______ (ci-après : la recourante) est née le ______ 1977 au Kosovo, pays dont elle est originaire.
b. Elle a allégué s'être mariée le ______ 2019 au Kosovo de manière traditionnelle avec E______, ressortissant serbe résidant à Genève et titulaire d'un permis C.
c. A______ est arrivée en Suisse le 12 décembre 2021, où elle a rejoint le précité.
d. Le 17 mars 2022, elle a déposé une demande auprès de l'Office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) tendant à l'octroi d'une autorisation de séjour en vue de son mariage civil avec E______.
e. Le 28 septembre 2022, A______ a quitté le domicile commun en raison de violences conjugales et élu domicile au foyer F______.
f. Plainte pénale a été déposée en raison de ces faits le 31 octobre 2022.
A______ a relaté avoir été étranglée, bousculée et griffée à plusieurs reprises par E______ entre les mois de janvier et septembre 2022. Celui-ci la contraignait en outre à avoir des rapports sexuels.
A______ est assistée de Me G______ dans le cadre de cette procédure pénale, laquelle est toujours pendante.
g. Depuis qu'elle a quitté le domicile, la recourante est suivie médicalement.
Le 8 décembre 2022, le Dr H______, médecin adjoint aux Hôpitaux Universitaires de Genève (ci-après : HUG), a dressé un rapport dans lequel il a relevé la présence d'une symptomatologie compatible avec un état anxio-dépressif chez la recourante.
Le 26 septembre 2023, il a établi un rapport complémentaire à la demande de A______. Il a noté la persistance de la symptomatologie anxio-dépressive diagnostiquée précédemment ainsi que la présence d'un stress post-traumatique en lien avec les violences alléguées.
h. A______ émarge à l'aide sociale depuis le 1er décembre 2022.
B. Par décision du 14 décembre 2023, l'OCPM a refusé l'octroi de l'autorisation de séjour sollicitée par la recourante et, par conséquent, prononcé son renvoi de Suisse.
L'OCPM a considéré que, faute de ménage commun avec E______ et de volonté de reprendre la vie commune, la recourante ne pouvait bénéficier d'un permis de séjour pour regroupement familial. En outre, leur union traditionnelle n'était pas reconnue en Suisse et n'avait pas été vécue sur le territoire helvétique, de sorte que la recourante, en tant que célibataire selon les standards d'état civil suisse, ne pouvait se prévaloir d'une autorisation de séjour postérieure à la dissolution de la famille. Elle ne pouvait non plus prétendre à une autorisation de séjour pour cas de rigueur, au vu de la courte durée de son séjour en Suisse, de l'absence d'une intégration socio-professionnelle exceptionnelle - celle-ci émargeant à l'aide sociale - et d'un lien avec la Suisse au point que son retour au Kosovo - pays dans lequel elle avait vécu les années essentielles au développement de sa personnalité - constituerait un déracinement complet. Par ailleurs, les violences conjugales subies n'atteignaient pas les minima requis et son état dépressif pouvait être soigné au Kosovo. Finalement, la procédure pénale pouvait se poursuivre par-devant les autorités suisses nonobstant le retour de la recourante dans son pays d'origine, cette dernière étant représentée par un avocat et pouvant en tout état de cause solliciter un visa pour participer à d'éventuelles audiences.
C. a. Le 30 janvier 2024, la recourante a formé recours à l'encontre de cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), concluant notamment à son annulation et expliquant pour l'essentiel que sa situation était similaire à celle d'une femme mariée, au vu de son mariage traditionnel au Kosovo en juin 2019 et de sa venue en Suisse pour célébrer son union par-devant l'Officier d'état civil suisse. Elle devait dès lors bénéficier d'une application analogique des dispositions relatives à l'octroi d'une autorisation de séjour après la dissolution de la famille.
b. Par courrier du 5 février 2024, le TAPI a imparti à la recourante un délai au 6 mars 2024 pour s'acquitter d'une avance de frais d'un montant de 500 fr.
D. Le 1er mars 2024, la recourante a sollicité l'assistance juridique, limitée à la prise en charge des frais judiciaires, pour la procédure susmentionnée.
E. Par décision du 14 mars 2024, notifiée le 25 du même mois, la vice-présidence du Tribunal civil a rejeté la requête d'assistance juridique précitée, au motif que la cause de la recourante paraissait dénuée de chance de succès.
La décision de refus de l'OCPM du 14 décembre 2023 ne semblait pas prêter le flanc à la critique dès lors que la recourante n'avait pas sollicité la reconnaissance du prétendu mariage traditionnel célébré au Kosovo en 2019 auprès des autorités suisses. Elle n'en avait fait mention qu'après que la vie commune avec son fiancé eût pris fin et que sa demande d'autorisation de séjour eût été compromise, de sorte que la validité de ce mariage traditionnel semblait douteuse et sa mention à l'OCPM motivée par les besoins de la cause. En outre, les violences subies ne semblaient pas atteindre les seuils minimaux fixés par la jurisprudence.
F. a. Recours est formé contre cette décision, par acte expédié le 24 avril 2024 à la Présidence de la Cour de justice.
La recourante conclut principalement à la recevabilité de son recours, à l'annulation de la décision du 14 mars 2024, à la constatation que les conditions d'octroi de l'assistance juridique sont remplies, à l'octroi de l'assistance juridique et à l'allocation d'une indemnité équitable à titre de participation aux frais engendrés par le recours.
b. La vice-présidence du Tribunal civil a renoncé à formuler des observations.
1. 1.1 La décision entreprise est sujette à recours auprès de la présidence de la Cour de justice en tant qu'elle refuse l'assistance juridique (art. 10 al. 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10), compétence expressément déléguée à la vice-présidente soussignée sur la base des art. 29 al. 5 de la Loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ ‑ E 2 05) et 10 al. 1 du Règlement de la Cour de justice (RCJ - E 2 05.47). Le recours, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance de recours dans un délai de 30 jours (art. 10 al. 3 LPA, 130, 131 et 321 al. 1 du Code de procédure civile du 19 décembre 2008 - CPC - RS 272), applicables par renvoi des art. 10 al. 4 LPA et 8 al. 3 du Règlement sur l'assistance juridique du 28 juillet 2010 (RAJ - E 2 05.04); arrêt du Tribunal fédéral 1B_171/2011 du 15 juin 2011 consid. 2.2).
1.2 En l'espèce, le recours est recevable pour avoir été interjeté dans le délai utile et en la forme écrite prescrite par la loi.
1.3 Lorsque la Cour est saisie d'un recours (art. 10 al. 3 LPA), son pouvoir d'examen est limité à la violation du droit et à la constatation manifestement inexacte des faits (art. 320 CPC, applicable par renvoi de l'art. 8 al. 3 RAJ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_171/2011 précité). Il appartient en particulier au recourant de motiver en droit son recours et de démontrer l'arbitraire des faits retenus par l'instance inférieure (Fabienne Hohl, Procédure civile, tome II, 2ème éd., n. 2513-2515).
1.4 Il n'y a pas lieu d'entendre la recourante, celle-ci ne le sollicitant pas et le dossier contenant suffisamment d'éléments pour statuer (art. 10 al. 3 LPA; arrêt du Tribunal fédéral 2D_73/2015 du 30 juin 2016 consid. 4.2).
2. Reprenant l'art. 29 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), l'art. 117 CPC prévoit que toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit à l'assistance judiciaire à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès.
Un procès est dépourvu de chances de succès lorsque les perspectives de le gagner sont notablement plus faibles que les risques de le perdre, et qu'elles ne peuvent donc être considérées comme sérieuses, de sorte qu'une personne raisonnable et de condition aisée renoncerait à s'y engager en raison des frais qu'elle s'exposerait à devoir supporter; en revanche, une demande ne doit pas être considérée comme dépourvue de toute chance de succès lorsque les perspectives de gain et les risques d'échec s'équilibrent à peu près ou lorsque les premières sont seulement un peu plus faibles que les seconds. Ce qui est déterminant est de savoir si une partie, qui disposerait des ressources financières nécessaires, se lancerait ou non dans le procès après une analyse raisonnable. Une partie ne doit pas pouvoir mener un procès qu'elle ne conduirait pas à ses frais, uniquement parce qu'il ne lui coûte rien (ATF 142 III 138 consid. 5.1; ATF 128 I 225 consid. 2.5.3).
Pour déterminer les chances de succès d'un recours, le juge peut prendre en considération la décision de première instance, en comparant celle-ci avec les griefs soulevés. De la sorte, l'examen sommaire des chances de succès auquel il doit procéder est simplifié. Cet examen ne doit toutefois pas conduire à ce qu'une partie voit quasiment rendu impossible le contrôle d'une décision qu'elle conteste (arrêt du Tribunal fédéral 5A_572/2015 du 8 octobre 2015 consid. 4.1).
L'absence de chances de succès peut résulter des faits ou du droit. L'assistance sera refusée s'il apparaît d'emblée que les faits pertinents allégués sont invraisemblables ou ne pourront pas être prouvés (arrêt du Tribunal fédéral 4A_614/2015 du 25 avril 2016 consid. 3.2).
3. Selon l’art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b; al. 1). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi, non réalisée en l’espèce (al. 2; art. 10 al. 2 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10, a contrario).
4. 4.1 Le 1er janvier 2019 est entrée en vigueur une modification de la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr), devenue la loi sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), et de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201). Conformément à la jurisprudence du Tribunal fédéral (arrêts du Tribunal fédéral 2C_841/2019 du 11 octobre 2019 consid. 3; 2C_737/2019 du 27 septembre 2019 consid. 4.1), les demandes déposées avant le 1er janvier 2019 sont régies par l'ancien droit, étant précisé que la plupart des dispositions de la LEI sont demeurées identiques.
4.2 En l'occurrence, la demande d'autorisation de séjour ayant été formée le 17 mars 2022, le dossier de la recourante est soumis aux dispositions de la LEI dans sa teneur en vigueur à partir du 1er janvier 2019.
4.3 En vertu de l'art. 43 al. 1 LEI, le conjoint étranger du titulaire d'une autorisation d'établissement a droit à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité, à condition de vivre en ménage commun avec lui. Cette disposition requiert non seulement le mariage des époux, mais aussi leur ménage commun (ATF 136 II 113 consid. 3.2).
4.4 Selon l'art. 50 al. 1 let. a LEI, après la dissolution de la famille, le droit du conjoint à l'octroi d'une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité en vertu de l'art. 43 LEI subsiste si l'union conjugale a duré au moins trois ans et que l'intégration est réussie.
L'union conjugale suppose le mariage en tant que condition formelle ainsi que la vie commune des époux, sous réserve des exceptions de l'art. 49 LEI (arrêts du Tribunal fédéral 2C_594/2010 du 24 novembre 2010 consid. 3.1; 2C_416/2009 du 8 septembre 2009 consid. 2.1.2; ATA/15/2018 du 9 janvier 2018 consid. 9a et les références citées). La limite légale de trois ans se calcule en fonction de la durée pendant laquelle les époux ont fait ménage commun en Suisse (ATF 136 II 113 consid. 3.3.5; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1111/2015 précité consid. 4.1), soit depuis la date du mariage, à condition que la cohabitation ait lieu en Suisse, jusqu'à ce que les époux cessent d'habiter sous le même toit; la cohabitation des intéressés avant leur mariage ne peut être prise en compte dans la durée de l'union conjugale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_594/2010 du 24 novembre 2010 consid. 3.1; 2C_195/2010 du 23 juin 2010 consid. 5.1; ATA/215/2020 du 25 février 2020 consid. 5b).
Il est constant que le législateur suisse ne reconnaît pas le mariage religieux et que seul le mariage civil célébré en Suisse déploie des effets juridiques, à moins d'un jugement d'exéquatur des mariages célébrés à l'étranger (art. 101 et 159 ss du code civil suisse du 10 décembre 1907 - CC - RS 210; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1094/2013 du 26 novembre 2013 consid. 3; arrêt du Tribunal administratif fédéral E-2930/2011 du 22 novembre 2012 p. 5; ATA/589/2015 du 9 juin 2015 consid. 8b ; ATA/674/2014 du 26 août 2014 consid. 6a).
Il n'est pas nécessaire d'examiner la condition de la réussite de l'intégration lorsque l'union conjugale a duré moins de trois ans, les deux conditions étant cumulatives (ATF 136 II 113 consid. 3.3.3; arrêts du Tribunal fédéral 2C_352/2014 du 18 mars 2015 consid. 4; 2C_220/2014 du 4 juillet 2014 consid. 2.2; ATA/15/2018 précité consid. 9b).
5. 5.1 Outre les hypothèses retenues à l'art. 50 al. 1 let. a LEI, le droit au renouvellement de l'autorisation de séjour existe également si la poursuite du séjour en Suisse s'impose pour des raisons personnelles majeures (art. 50 al. 1 let. b LEI). Les raisons personnelles majeures visées à l'al. 1 let. b, sont notamment données lorsque le conjoint est victime de violence conjugale, que le mariage a été conclu en violation de la libre volonté d'un des époux ou que la réintégration sociale dans le pays de provenance semble fortement compromise (art. 50 al. 2 LEI). Cette disposition a pour vocation d'éviter les cas de rigueur ou d'extrême gravité (ATF 137 II 1 consid. 3.1; arrêts du Tribunal fédéral 2C_500/2014 du 18 juillet 2014 consid. 7.1; 2C_165/2014 du 18 juillet 2014 consid. 3.1).
L'art. 50 al. 1 let. b LEI vise à régler les situations qui échappent aux dispositions de l'art. 50 al. 1 let. a LEI, soit parce que le séjour en Suisse durant le mariage n'a pas duré trois ans ou parce que l'intégration n'est pas suffisamment accomplie ou encore parce que ces deux aspects font défaut mais que – eu égard à l'ensemble des circonstances – l'étranger se trouve dans un cas de rigueur après la dissolution de la famille
(ATF 138 II 393 consid. 3.1; 137 II 345 consid. 3.2.1; 137 II 1 consid. 4.1). A cet égard, c'est la situation personnelle de l'intéressé qui est décisive et non l'intérêt public que revêt une politique migratoire restrictive. Il s'agit par conséquent uniquement de décider du contenu de la notion juridique indéterminée "raisons personnelles majeures" et de l'appliquer au cas d'espèce, en gardant à l'esprit que l'art. 50 al. 1 let. b LEI confère un droit à la poursuite du séjour en Suisse, contrairement à l'art. 30 al. 1 let. b LEI (ATF 138 II 393 consid. 3.1; 137 II 345 consid. 3.2.1; 137 II 1 consid. 3; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-626/2019 du 22 mars 2021 consid. 8.1; ATA/215/2020 du 25 février 2020 consid. 6a).
5.2 Lors de l'examen des raisons personnelles majeures au sens de l'art. 50 al. 1 let. b LEI, les critères énumérés à l'art. 31 al. 1 OASA peuvent entrer en ligne de compte, même si, considérés individuellement, ils ne sauraient fonder un cas individuel d'une extrême gravité (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3; arrêt du Tribunal fédéral 2C_822/2013 du 25 janvier 2014 consid. 5.2; ATA/981/2019 du 4 juin 2019 consid. 6b et l'arrêt cité).
L'admission d'un cas de rigueur personnel survenant après la dissolution de la communauté conjugale suppose que, sur la base des circonstances d'espèce, les conséquences pour la vie privée et familiale de la personne étrangère liées à ses conditions de vie après la perte du droit de séjour découlant de la communauté conjugale soient d'une intensité considérable (ATF 137 I 1 consid. 4.1; 137 II 345 consid. 3.2.1 à 3.2.3). S'agissant de la réintégration sociale dans le pays d'origine, l'art. 50 al. 2 LEI exige qu'elle soit fortement compromise. La question n'est donc pas de savoir s'il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d'examiner si, en cas de retour dans le pays d'origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (arrêts du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1; 2C_369/2010 du 4 novembre 2010 consid. 4.1). Le simple fait que l'étranger doive retrouver des conditions de vie qui sont usuelles dans son pays de provenance ne constitue pas une raison personnelle majeure au sens de l'art. 50 LEI, même si ces conditions de vie sont moins avantageuses que celles dont cette personne bénéficie en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2C_1188/2012 du 17 avril 2013 consid. 4.1).
5.3 A teneur de l'art. 31 al. 1 OASA, une autorisation de séjour peut être octroyée dans les cas individuels d'extrême gravité; lors de l'appréciation, il convient de tenir compte notamment : de l'intégration du requérant (let. a); de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c); de la situation financière (let. d); de la durée de la présence en Suisse (let. e); de l'état de santé (let. f); et des possibilités de réintégration dans l'Etat de provenance (let. g).
S'agissant de l'intégration professionnelle, celle-ci doit être exceptionnelle : le requérant doit posséder des connaissances professionnelles si spécifiques qu'il ne pourrait les utiliser dans son pays d'origine ou alors son ascension professionnelle est si remarquable qu'elle justifierait une exception aux mesures de limitation (arrêt du Tribunal fédéral 2A_543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2; ATA/981/2019 précité consid. 6c et l'arrêt cité).
A elles seules, la longue durée du séjour et l'intégration (travail régulier, absence de condamnations et de dépendance à l'aide sociale) ne suffisent pas à rendre la poursuite du séjour imposable au sens de l'art. 50 al. 1 let. b LEI (ATA/775/2018 du 24 juillet 2018 consid. 4d et les références citées).
5.4 Selon la jurisprudence, il existe au Kosovo sept centres de traitements ambulatoires pour les maladies psychiques (Centres Communautaires de Santé Mentale) ainsi que des services de neuropsychiatrie pour le traitement des cas de psychiatrie aiguë au sein des hôpitaux généraux dans les villes de Prizren, Peja, Gjakova, Mitrovica, Gjilan, Ferizaj et Pristina. De plus, grâce à la coopération internationale, de nouvelles structures appelées «Maisons de l'intégration» ont vu le jour dans certaines villes. Ces établissements logent des personnes atteintes de troubles mineurs de la santé mentale dans des appartements protégés et leur proposent un soutien thérapeutique et socio‑psychologique (arrêts du Tribunal administratif fédéral F‑7044/2014 du 19 juillet 2016 consid. 5.5.4; C 2748/2012 du 21 octobre 2014 consid. 8.2.4.3; C‑5631/2013 du 5 mars 2014 consid. 5.3.3 et la jurisprudence citée; ATA/539/2022 du 24 mai 2022 consid. 8f; ATA/821/2021 du 10 août 2021 consid. 3f et les arrêts cités, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 2C_671/2021 du 15 février 2022 consid. 8.2 et les références citées).
6. En l'espèce, le mariage de la recourante avec E______ n’étant plus d’actualité au vu du dossier, il semble donc qu’à première vue, il n’existe pas de raison d’entrer en matière sur une demande d’autorisation de séjour en vue de préparer ledit mariage, ce que la recourante ne conteste pas. De prime abord, l’art. 50 LEI ne serait d’aucun secours à la recourante, cette dernière n’étant précisément pas mariée avec le précité. L’existence, alléguée mais non démontrée d’un mariage coutumier ne modifie a priori pas la conclusion qui précède. En effet, s'agissant de l'application de l'art. 50 LEI, comme déjà mentionné, le législateur suisse ne reconnait pas le mariage religieux, a fortiori un mariage coutumier, pour autant que ce dernier existe d’ailleurs, les quelques photographies produites du couple ne suffisant pas à le démontrer. Dans ces circonstances, il n’apparaît pas qu’elle puisse se prévaloir de cette disposition puisqu'elle n'a jamais été mariée en Suisse. Ainsi, dans la mesure où les deux conditions posées par l’art. 50 al. 1 let. a LEI sont cumulatives et que la première d’entre elles n’est pas remplie, il n’y a pas lieu d’examiner, dans un examen limité à la vraisemblance, si l’intégration de la recourante est réussie ou si sa situation est constitutive de «raisons personnelles majeures». Cette dernière ne peut ainsi déduire aucun droit de l’art. 50 LEI.
Sous l’angle des critères de l’art. 31 al. 1 OASA, la recourante est arrivée en Suisse le 12 décembre 2021, selon ses explications, soit à l’âge de 44 ans. La durée de son séjour ne peut donc être qualifiée de longue. Elle a en outre passé son enfance, adolescence et le début de sa vie d'adulte au Kosovo, soit des périodes déterminantes pour le développement de la personnalité. Elle connaît les us et coutumes de son pays d'origine et en maîtrise la langue. Ainsi, son intégration en Suisse ne paraît pas revêtir un caractère exceptionnel. Sa situation financière semble de prime abord précaire, en raison de son recours à l’aide sociale. Enfin, elle ne soutient a priori pas qu'elle aurait acquis en Suisse des connaissances professionnelles à ce point spécifiques qu'elle ne pourrait les exercer à l'étranger.
S'agissant de l'intégration de l'intéressée sur le plan social, il semble qu’a priori celle-ci ne fasse état d'aucune attache particulière en Suisse. Il ne ressort en outre pas des pièces au dossier qu'elle serait de prime abord particulièrement investie dans la vie associative et culturelle locale. Enfin, le fait qu’elle allègue suivre des cours de français ne suffit pas à retenir une intégration supérieure à celle de la moyenne des étrangers dans une situation similaire. Ainsi, la réintégration de la recourante dans son pays ne semble pas fortement compromise au sens de la jurisprudence.
La recourante se prévaut également de son état de santé, dont la dégradation découlerait des violences conjugales subies.
Les documents versés au dossier indiquent que la recourante a effectivement consulté une association dans le cadre des violences alléguées et qu’une intervention de la police a eu lieu dans ce contexte au domicile des concubins. Ils n’attestent toutefois pas de la récurrence de celles-ci ni de leur gravité. Si l’état de santé de la recourante paraît en avoir pâti, rien n’indique qu’a priori la recourante ne pourrait poursuivre son suivi psychologique, de même que son traitement médicamenteux dans son pays d’origine, qui dispose, selon la jurisprudence, de structures adéquates. Dès lors, de prime abord, la situation médicale de la recourante ne parait pas assimilable à une situation d'extrême gravité propre à fonder l'application de l'art. 30 al. 1 let. b LEI au sens de la jurisprudence précitée.
Dans ces circonstances, a priori, il ne semble pas ressortir du dossier que les difficultés auxquelles la recourante devrait faire face en cas de retour au Kosovo seraient pour elle plus importantes que pour les compatriotes confrontés à la même obligation de se réinsérer.
Au vu de ce qui précède et du dossier en mains de l'Autorité de céans, le recours auprès du TAPI contre la décision de l’OCPM paraît à première vue dépourvu de chances de succès.
7. 7.1 Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou dont l'autorisation, bien que requise, est révoquée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé. La décision de renvoi est assortie d'un délai de départ raisonnable (art. 64d al. 1 LEI).
7.2 A teneur de l'art. 83 LEI, le renvoi d'un étranger ne peut être ordonné que si l'exécution de celui-ci est possible, licite ou peut être raisonnablement exigée (al. 1). L'exécution du renvoi n'est pas possible lorsque l'intéressé ne peut quitter la Suisse pour son Etat d'origine, son Etat de provenance ou un Etat tiers ni être renvoyé dans un de ces Etats (al. 2). Elle n'est pas licite lorsque le renvoi serait contraire aux engagements internationaux de la Suisse (al. 3). Elle n'est pas raisonnablement exigible si elle met concrètement en danger l'étranger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (al. 4).
S'agissant plus spécifiquement des personnes en traitement médical en Suisse, l'exécution du renvoi ne devient inexigible, en cas de retour dans leur pays d'origine ou de provenance, que dans la mesure où elles pourraient ne plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine (arrêt du TAF E-3320/2016 du 6 juin 2016 et les références citées; ATA/731/2015 du 14 juillet 2015 consid. 11b). L'art. 83 al. 4 LEI ne confère pas un droit général d'accès en Suisse à des mesures médicales visant à recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que l'infrastructure hospitalière et le savoir-faire médical dans le pays d'origine de l'intéressé n'atteignent pas le standard élevé prévalant en Suisse. Ainsi, si les soins essentiels nécessaires peuvent être assurés dans le pays d'origine ou de provenance de l'étranger concerné, l'exécution du renvoi sera raisonnablement exigible. Elle ne le sera plus, en raison de l'absence de possibilités de traitement adéquat, si l'état de santé de l'intéressé se dégradait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique (arrêt du TAF E-2693/2016 du 30 mai 2016 consid. 4.1 et les références citées; ATA/895/2019 précité consid. 7d; ATA/801/2018 précité consid. 10d et les arrêts cités).
7.3 En l'espèce, la recourante n'allègue pas que l'exécution de son retour dans son pays d'origine serait impossible, illicite ou inexigible au regard de l'art. 83 LEI. Elle ne rend toutefois pas vraisemblable, de prime abord, que celles-ci ne seraient pas disponibles au Kosovo et il n’apparaît pas que tel soit le cas. Le dossier ne laisse pas apparaître a priori d'éléments qui tendraient à démontrer le contraire. Le renvoi de la recourante apparaît ainsi possible, licite et raisonnablement exigible, de sorte qu’il appartenait à l’OCPM de le prononcer.
Au vu de ce qui précède, la vice-présidence du Tribunal civil était fondée à retenir que les chances de succès du recours de la recourante auprès du TAPI paraissaient faibles. C'est donc de manière conforme au droit qu'elle a refusé d'octroyer le bénéfice de l'assistance judiciaire à la recourante aux fins d'avancer les frais relatifs audit recours.
La recourante affirme enfin que le refus d'octroi de l'assistance judiciaire entraverait son droit d’accès à la justice. Elle perd cependant de vue que l'assistance judiciaire a certes pour but de garantir l'accès à la justice, mais que l'octroi de l'aide étatique est notamment subordonné à la condition que la procédure engagée ou envisagée ne soit pas dépourvue de chances de succès (DAAJ/8/2020 du 3 mars 2020 consid. 2.3), condition qui n'est pas remplie en l'occurrence, comme il a été vu précédemment.
Au vu de ce qui précède, le recours contre la décision de l'Autorité de première instance, mal fondé, sera rejeté.
8. Sauf exceptions non réalisées en l'espèce, il n'est pas perçu de frais judiciaires pour la procédure d'assistance juridique (art. 119 al. 6 CPC). Compte tenu de l'issue du litige, il n'y a pas lieu à l'octroi de dépens.
* * * * *
PAR CES MOTIFS,
LA VICE-PRÉSIDENTE DE LA COUR :
A la forme :
Déclare recevable le recours formé le 24 avril 2024 par A______ contre la décision rendue le 14 mars 2024 par la vice-présidence du Tribunal civil dans la cause AC/613/2024.
Au fond :
Le rejette.
Déboute A______ de toutes autres conclusions.
Dit qu'il n'est pas perçu de frais judiciaires pour le recours, ni alloué de dépens.
Notifie une copie de la présente décision à A______, soit pour elle à C______, juriste à D______ [institution sociale], mandataire de la recourante (art. 137 CPC).
Siégeant :
Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, vice-présidente; Madame Maïté VALENTE, greffière.
Indication des voies de recours :
Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière de droit public; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 82 ss de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110). Il connaît également des recours constitutionnels subsidiaires; la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 113 à 119 et 90 ss LTF. Dans les deux cas, le recours motivé doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la décision attaquée. L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire.
Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.