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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1150/2017

ATA/1355/2017 du 03.10.2017 ( EXPLOI ) , ADMIS

Descripteurs : QUALITÉ POUR RECOURIR ; INTÉRÊT ACTUEL ; ACTE DE RECOURS ; CONCLUSIONS ; OBJET DU LITIGE ; MAXIME INQUISITOIRE ; APPRÉCIATION DES PREUVES ; AUTORISATION D'EXPLOITER ; CAFETIER-RESTAURATEUR ; EXPLOITANT ; POLICE ; ORDRE PUBLIC(EN GÉNÉRAL) ; RETRAIT(VOIE DE DROIT) ; DROIT TRANSITOIRE
Normes : LPA.60.al1.letb ; LPA.65 ; LPA.61 ; LPA.19 ; LPA.22 ; LRDBHD.70.al3 ; LRDBHD.70.al4 ; LRDBHD.4 ; LRDBHD.8 ; RRDBHD.2.al1 ; RRDBHD.3.al2 ; LRDBHD.11.leta ; LRDBHD.1.al4 ; LRDBHD.20.al2 ; LRDBHD.20.al3 ; LRDBHD.21.al2 ; LRDBHD.14 ; RRDBHD.38.al1 ; LRDBHD.70.al9 ; RRDBHD.65
Résumé : Admissions des recours interjetés par l'exploitant d'un café-restaurant contre la décision de révocation de son autorisation d'exploiter ainsi que la décision de rejet d'une demande d'autorisation de remplacement, dans la mesure où les éléments du dossier ne permettent pas de retenir que le recourant ne remplit pas les conditions de sécurité de l'art. 11 let. a LRDBHD.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1150/2017-EXPLOI ATA/1355/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 3 octobre 2017

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______

contre

SERVICE DE POLICE DU COMMERCE ET DE LUTTE CONTRE LE TRAVAIL AU NOIR

 



EN FAIT

1. Monsieur A______, né le ______ 1955, est titulaire, depuis le 11 septembre 2013, d'une autorisation d'exploiter un café-restaurant sous l'enseigne « B______» (ci-après : le restaurant ou l'établissement) situé au ______, rue de C______, à Genève, propriété de D______, société anonyme inscrite au Registre du commerce (ci-après : RC) le 9 mars 2001 et ayant comme but l'« exploitation de cafés-restaurants ainsi que d'établissements publics ».

Selon le RC, Monsieur E______est administrateur, avec signature individuelle, de D______ et M. A______ est au bénéfice d'une procuration collective à deux.

2. Au jour de la délivrance de l'autorisation précitée, une procédure était en cours depuis le 29 octobre 2012 (selon la « plateforme F______ ») auprès de l'office des autorisations de construire (ci-après : OAC) en vue de la réalisation de travaux de rénovation au sein de l'établissement, plus précisément la réunion de deux arcades au rez-de-chaussée et l'installation d'un four à pizzas (APA 37'385/1).

Dans le cadre de cette procédure, la police du feu avait émis un « préavis favorable sous conditions » en date du 14 mars 2013, dans lequel une série de travaux à réaliser étaient énumérés.

3. Le 18 juillet 2014, la police du feu a émis un « préavis défavorable » en raison de la non-conformité des travaux exécutés à la suite du projet autorisé le
15 septembre 2011 et référencé sous dossier APA 34'561, procédure qui concernait la « création initiale du restaurant ».

Les travaux n'avaient pas été exécutés conformément au préavis précédent : d'importantes modifications avaient été apportées au projet initialement autorisé, un bar avait été créé sans autorisation au niveau souterrain et les exigences stipulées n'avaient été réalisées que partiellement. Les mesures de protection incendie et sécurité ne pouvaient par conséquent pas être garanties.

4. Le 5 janvier 2015, la police du feu a émis un nouveau « préavis favorable sous conditions » pour une modification du projet initial en lien avec la réunion des deux arcades au rez-de-chaussée et l'installation du four à pizzas
(APA 37'385/2).

Aucun travail à effectuer n'était mentionné et les exigences stipulées dans les préavis antérieurs liés aux autorisations de construire APA 34'561 et
APA 37'385 demeuraient réservées.

5. Le 15 février 2016 à 22h00, le secteur inspectorat du service du commerce, devenu depuis lors le service de police du commerce et de la lutte contre le travail au noir (ci-après : PCTN), a effectué un contrôle sur place.

6. Selon le rapport de cette visite, daté du 21 mars 2016 et signé le
1er avril 2016, un nouveau propriétaire avait été annoncé au PCTN en date du
18 mars 2014, plus précisément G______, dont l'associé gérant était M. E______. La salle au sous-sol de l'établissement était exploitée par un tiers non autorisé et portait le nom de « H______» ; elle était aménagée avec un
bar / comptoir ainsi que des tables et des chaises. Une cuisine se trouvait également au sous-sol. M. A______ déclarait avoir conclu un contrat de travail avec le tiers en question, lequel apportait sa clientèle, engageait son personnel et gérait sa marchandise. M. A______ avait un droit de regard sur sa gestion et
« s'il y avait un souci, il s'en occupait ».

7. Le 22 mars 2016, M. A______ a déposé une nouvelle requête en autorisation d'exploiter selon la loi sur la restauration, le débit de boissons, l’hébergement et le divertissement du 19 mars 2015 (LRDBHD - I 2 22), entrée en vigueur le 1er janvier 2016.

8. Le 30 mai 2016, le PCTN a rendu une décision de non-entrée en matière concernant la requête précitée.

Son formulaire étant incomplet, M. A______ était invité à en remplir un nouveau et le lui transmettre muni de toutes les pièces requises.

Le PCTN constatait notamment que l'intéressé avait diminué la surface d'exploitation au rez-de-chaussée de trois à deux salles, et que concernant le
sous-sol, la surface avait été augmentée en passant d'une salle de 40 m2 à deux salles de 40 m2 respectivement 41,45 m2. Des explications étaient demandées à M. A______ au sujet desdites modifications, leurs dates exactes, ainsi que la production de plusieurs pièces manquantes.

9. Le 4 juillet 2016, le PCTN a prié M. A______ de lui indiquer si les travaux requis par la police du feu dans son préavis du 5 janvier 2015 avaient été réalisés et, le cas échéant, de lui faire parvenir la preuve de leur réalisation.

Un délai lui a été fixé au 20 juillet 2016, reporté ensuite au
30 septembre 2016.

10. Par courriel du 27 septembre 2016, D______ a informé le PCTN que la procédure était toujours en instruction auprès de l'OAC, plus précisément en relation à une modification à apporter au projet. Il n'était par conséquent pas encore possible, pour l'inspecteur de la police du feu, de faire un contrôle sur place. De ce fait, il lui était impossible de remettre au PCTN la preuve de la réalisation des travaux. Elle demandait un délai supplémentaire à cet effet.

11. Par courriers des 10 octobre et 13 décembre 2016, le PCTN a reporté le délai, initialement au 30 octobre 2016, puis au 15 janvier 2017.

12. Par requête datée du 12 décembre 2016 et reçue par le PCTN le
15 décembre 2016, M. A______ a sollicité une nouvelle autorisation d'exploiter.

a. Le formulaire désignait G______ en qualité de propriétaire de l'établissement ainsi que M. A______ et D______ en qualité d'exploitants.

Il était indiqué que des travaux avaient été réalisés depuis la délivrance de l'autorisation d'exploiter initiale, soit la mise en conformité de la réunion des deux arcades, l'aménagement du sous-sol et le déplacement de la cuisine vers l'arrière du restaurant.

b. Des pièces étaient annexées à la requête, dont notamment :

- un extrait du casier judiciaire de M. A______ attestant de trois condamnations pénales dont deux pour emploi d'étrangers sans autorisation, entrées en force respectivement le 20 mars 2012 et le 23 avril 2013 ;

- un extrait du RC de G______ où M. E______figurait en qualité d'associé gérant avec signature individuelle ;

- un contrat de travail signé le 5 mai 2014 entre D______, en qualité d'employeur, et M. A______, en qualité d'employé.

13. Par décisions du 2 mars 2017, le PCTN a rejeté la requête de M. A______ du 12 décembre 2016 sollicitant l'octroi d'une nouvelle autorisation d'exploiter, et révoqué l'autorisation qui lui avait été accordée le 11 septembre 2013.

Le formulaire déposé par M. A______ n'avait pas été correctement rempli et n'était pas complet. Il manquait en particulier l'extrait du RC attestant que
M. A______ disposait d'un pouvoir de signature au sein de G______, société propriétaire, une copie du contrat de bail à loyer liant ladite société au propriétaire des locaux commerciaux et mentionnant la destination de ces locaux, une copie du contrat de travail ou tout autre contrat liant M. A______ à la société propriétaire, des plans sur lesquels était indiquée la surface dédiée à l'exploitation ainsi que l'autorisation de mise en service délivrée par la police du feu ou toute autre preuve de la réalisation de travaux de mise en conformité exigés par ce service.

Le PCTN renonçait à renvoyer la requête en autorisation à l'intéressé dès lors qu'il apparaissait d'emblée qu'elle ne répondrait pas aux exigences légales, même une fois rectifiée et complétée. En effet, la police du feu avait constaté que de multiples modifications avaient été portées au sein de l'établissement et que le respect des normes de sécurité et incendie n'était plus garanti. Dans ce contexte, elle avait émis un préavis défavorable quant à la mise en service de l'établissement et avait enjoint l'intéressé d'effectuer divers travaux de mise en conformité. Malgré des nombreux reports de délais, ce dernier n'avait toujours pas indiqué si ces travaux avaient été réalisés, ni fourni des pièces attestant du commencement ou de l'état d'avancement de ces travaux.

Le PCTN n'avait par conséquent d'autre choix que de s'en référer au dernier préavis de la police du feu et de constater que les locaux de l'établissement ne répondaient pas aux exigences en matière de sécurité et incendie. Ils étaient, de ce fait, susceptibles de troubler l'ordre public, en particulier la sécurité publique.

Il était en conséquence justifié de révoquer l'autorisation d'exploiter de
M. A______ ainsi que de rejeter sa requête en vue d'en obtenir une nouvelle.

14. Par actes déposés le 31 mars 2017 au greffe de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative), M. A______ a recouru contre les décisions précitées, concluant à leur annulation (causes A/1150/2017 et A/1152/2017).

Le bar au sous-sol faisait partie du projet initial et était présent dans les plans fournis au PCTN et à l'OAC.

Il admettait que les exigences énoncées dans le préavis de la police du feu du 14 mars 2013 n'étaient que partiellement réalisées à la date du contrôle. Le déplacement de la cuisine avait nécessité le dépôt d'une nouvelle demande d'autorisation de construire, laquelle concernait également la mise en conformité des deux arcades, afin de se mettre aux normes avec le préavis.

Le 17 mars 2017, la police du feu avait effectué une nouvelle visite de contrôle. Les nombreux reports de délai sollicités se justifiaient par des réserves supplémentaires émises par la police du feu, en particulier, l'installation d'un rideau anti-feu qui avait pris du temps. L'ultime visite avait été fixée le
4 avril 2017, ensuite il pourrait fournir le document attestant de la réalisation des travaux.

Il gérait les employés et la comptabilité du restaurant avec la société
D______, raison pour laquelle dans la deuxième requête, ils figuraient tous deux en qualité d'exploitants.

Dans l'autorisation d'exploiter du 11 septembre 2013, D______ était la propriétaire d'une des arcades de l'établissement. Le 20 février 2012, un avenant au contrat de bail avait été conclu pour des besoins internes et D______, titulaire du bail, avait été remplacée par G______, afin que les deux arcades soient sous le même nom. Pour rectifier la situation, un contrat de travail prenant effet le
1er avril 2017 avait été conclu entre G______ et M. A______ ; les démarches afin qu'il dispose d'un pouvoir de signature auprès de ladite société avaient été entamées. L'absence d'une copie du contrat de bail était seulement un oubli car ce document avait été déposé lors du dépôt de la première requête et était de ce fait en possession du PCTN.

Il demandait un délai pour fournir les documents manquants, soit le contrat de travail le liant à G______, un extrait du RC attestant de son pouvoir de signature au sein de ladite société, la copie des baux à loyer ainsi que le document émanant de la police du feu attestant de la réalisation des travaux.

15. Le 6 avril 2017, le juge délégué a imparti un délai au 11 avril 2017 à
M. A______ pour produire l'éventuelle attestation de la police du feu faisant suite à sa visite du 4 avril 2017, ainsi que tous les documents, notamment ceux annoncés dans le recours.

16. L'intéressé n'a pas donné suite à cette demande.

17. Le 25 avril 2017 à 14h00, la police du feu a effectué un contrôle au sein de l'établissement.

La chambre administrative a eu connaissance de ce contrôle en date du
7 août 2017. L'information a été transmise au PCTN en date du 10 août 2017.

18. Par courriel du 26 avril 2017, un inspecteur de la police du feu a informé, entre autres, M. E______qu'il n'avait plus d'objections à émettre concernant la sécurité incendie du restaurant, à l'exception du tableau électrique et de la porte du vestiaire.

La chambre administrative a eu connaissance de ce courriel en date du
7 août 2017. L'information a été transmise au PCTN en date du 10 août 2017.

19. Par décision du 23 mai 2017, le jugé délégué a joint les deux causes précitées sous le n° A/1150/2017.

20. Le 9 juin 2017, la police du feu a émis un nouveau préavis favorable sous conditions.

Sous le titre « description de l'objet » figuraient les mentions suivantes :
« (réunion de deux arcades au rez-de-chaussée - installation d'un four à pizzas) - modification du projet initial - mise en conformité - déplacement de la cuisine - création d'un vestiaire au 1er étage » (APA 37'385/3).

Parmi les conditions, demeuraient réservées toutes les exigences stipulées dans les préavis de la police du feu antérieurs liés aux autorisations de construire APA 34'561 et APA 37'385.

De nouveaux travaux à réaliser étaient énoncés, dont notamment le remplacement de la porte du vestiaire situé dans les communs, au sous-sol du bâtiment.

Le PCTN a eu connaissance de cette pièce en date du 13 juillet 2017 et la chambre administrative en date du 21 juillet 2017.

21. Le 12 juin 2017, Monsieur I______ a déposé auprès du PCTN une requête en autorisation d'exploiter le restaurant.

Il joignait à sa demande plusieurs annexes dont notamment un contrat de gérance libre de l'établissement qu'il avait conclu avec G______ en date du
23 février 2017.

22. Le 27 juin 2017, l'OAC a délivré à M. A______ une autorisation de construire concernant la procédure APA 37'385/3.

Le PCTN a eu connaissance de cette pièce en date du 13 juillet 2017, la chambre administrative en date du 21 juillet 2017.

23. Le 5 juillet 2017, le PCTN a conclu principalement à l'irrecevabilité du recours et, subsidiairement à son rejet, ainsi qu'à la confirmation de ses décisions du 2 mars 2017. Encore plus subsidiairement, il concluait au renvoi de la cause pour nouvelle décision ainsi qu'il soit fait injonction à M. A______ de lui faire parvenir une nouvelle requête dûment complétée et accompagnée de l'ensemble des pièces requises dans un délai de trente jours à compter de la notification du jugement, sous peine de fermeture de l'établissement.

M. A______ ne se prévalait d'aucun motif de recours au sens de
l'art. 61 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985
(LPA - E 5 10). Son argumentaire portait exclusivement sur les causes du retard pris dans la réalisation des travaux et les raisons pour lesquelles l'établissement ne répondait toujours pas aux normes de sécurité.

L'intéressé reconnaissait que les exigences posées dans le préavis n'étaient pas réalisées au jour du contrôle et n'alléguait pas avoir fait les travaux requis dans l'intervalle. Il ne produisait aucun document faisant état de faits nouveaux depuis le prononcé des décisions entreprises, bien qu'invité à la faire dans le cadre de la procédure. Il ne remettait aucunement en cause la manière dont le PCTN avait apprécié les faits et appliqué le droit.

Les actes de recours de M. A______ ne répondaient par conséquent pas aux exigences de recevabilité et devaient être déclarés irrecevables.

Sur le fond, la police du feu avait émis un préavis défavorable et refusé d'accorder l'autorisation de mise en service en raison de travaux à réaliser au sein de l'établissement et l'intéressé n'avait pas été en mesure de prouver avoir réalisé ces travaux. De plus, son dossier était lacunaire et incomplet.

24. Le 10 juillet 2017, le juge délégué a imparti un délai au 10 août 2017 à
M. A______ pour déposer toutes observations complémentaires.

25. Le 20 juillet 2017, le PCTN a persisté intégralement dans ses conclusions et relevé que l'autorisation de construire délivrée le 27 juin 2017 était une simple autorisation venant compléter celle relative à la réunion des arcades et à la création du four à pizzas et que le préavis de la police du feu, qui en faisait partie intégrante, ne faisait qu'énoncer les conditions de cette nouvelle autorisation.

26. Le 25 juillet 2017, le PCTN a déposé des observations complémentaires.

Il avait été informé par le secteur « autorisations » de son service de la nouvelle requête en autorisation déposée le 12 juin 2017, dans laquelle G______ désignait M. I______ comme nouvel exploitant pour assurer la gestion de l'établissement. Dans la mesure où ce dernier s'était vu confier la gérance libre de l'établissement, il était réputé propriétaire de celui-ci au sens de la loi.

M. A______ avait par conséquent perdu tout intérêt à recourir, ce qui constituait un motif supplémentaire d'irrecevabilité.

27. Par lettre du 27 juillet 2017, le juge délégué a rappelé à M. A______ le délai au 10 août 2017 et son devoir de collaborer à la constatation des faits et qu'en l'absence d'éléments de fait nouveaux, notamment en lien avec la police du feu et la reprise par un nouvel exploitant, la cause serait jugée en l'état du dossier.

28. Le 3 août 2017, M. A______ a déposé des observations ainsi que plusieurs pièces supplémentaires.

a. Il indiquait que l'établissement répondait aux normes de sécurité incendie et qu'il avait été victime de délais de traitement avec les différents intervenants.

Lors de sa visite du 25 avril 2017, la police du feu avait constaté qu'il n'existait plus aucune objection à émettre concernant la sécurité incendie de l'établissement, hormis l'installation d'un tableau électrique au rez-de-chaussée et d'une porte des vestiaires répondant aux normes incendie « EI30 ». Ces éléments avaient été installés peu de temps après cette visite.

Le 9 mai 2017, un rendez-vous avait eu lieu avec l'inspecteur du contrôle précité, durant lequel les pièces justificatives desdits travaux lui avaient été remises. Le 9 juin 2017, la police du feu avait émis un préavis favorable. Concernant la porte du vestiaire, le fabriquant garantissait que celle installée au sein du restaurant répondait aux normes de sécurité « EI30 ».

M. I______ avait effectivement formulé son souhait de devenir le nouvel exploitant de l'établissement, mais, pour des raisons de mise en conformité avec l'autorisation en cours, M. A______ était au bénéfice d'un contrat de travail avec G______, ce dans l'attente de l'octroi par le PCTN d'une nouvelle autorisation pour M. I______.

À ce jour, ils étaient tous les deux présents au restaurant et M. A______ conservait la totalité de ses fonctions d'exploitant.

b. Les pièces suivantes ont été jointes au dossier :

- la copie d'un bon de travaux établi par la régie concernant la fourniture et la pose d'une « armoire anti-feu sur tableaux électriques » daté du 20 février 2017 ;

- un devis d'un prestataire de services concernant une porte « DB Attastop, avec intumex 42dB […] EI30 » daté du 17 mars 2017 ;

- un courriel du 26 avril 2017 d'un inspecteur de la police du feu indiquant que, « suite au contrôle effectué en date du 25 avril 2017 à 14h00, la police du feu n'a[vait] plus d'objections à émettre concernant la sécurité incendie pour l'objet cité en titre - « B______. Rue de C______ ______» - à l'exception du tableau électrique et de la porte du vestiaire » ;

- une facture du prestataire de services susmentionné du 29 mai 2017 relative à la fourniture et la pose d'une « porte EI30 DB Attastop avec intumex 42dB avec plaques alu vestiaire » ;

- un contrat de travail entre G______ et M. A______ daté du 30 mars 2017 ;

- un extrait du RC de G______ attestant que M. A______ bénéficiait d'une procuration collective à deux auprès de ladite société, à tout le moins depuis le
18 août 2017.

29. Par courrier du 10 août 2017, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ces deux points de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 62 du règlement d'exécution de la loi sur la restauration, le débit de boissons, l'hébergement et le divertissement du 28 octobre 2015 – RRDBHD – I 2 22.01).

2. L'objet du présent litige consiste à examiner la conformité au droit des décisions du 2 mars 2017 du PCTN, l'une révoquant à M. A______ l'autorisation d'exploiter le café-restaurant sous l'enseigne « B______» et l'autre refusant de lui en octroyer une nouvelle, se fondant sur la LRDBHD et son règlement d'exécution.

Un tiers ayant soumis une requête en vue de l'exploitation dudit restaurant, le PCTN nie la recevabilité du recours sous l'angle de la qualité pour recourir de M. A______.

3. a. À teneur de l’art. 60 al. 1 let. b LPA, a qualité pour recourir toute personne touchée directement par une décision et qui a un intérêt personnel digne de protection à ce qu’elle soit annulée ou modifiée.

b. Selon la jurisprudence, le recourant doit avoir un intérêt pratique à l’admission du recours, soit que cette admission soit propre à lui procurer un avantage de nature économique, matérielle ou idéale (ATF 138 II 162
consid. 2.1.2 ; 137 II 30 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_56/2015 du
18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 1C_152/2012 du 21 mai 2012 consid. 2.1 ; ATA/382/2017 du 4 avril 2017 consid. 3b ; ATA/684/2016 du 16 août 2016 consid. 2b). Un intérêt purement théorique à la solution d'un problème est de même insuffisant (arrêts du Tribunal fédéral 2C_1067/2014 et 2C_1077/2014 du 18 mars 2016 consid. 2.2.2 ; ATA/259/2013 du 23 avril 2013 ;
Pierre MOOR/Etienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p.729, n. 5.7.2.1).

c. Un intérêt digne de protection suppose un intérêt actuel à obtenir l’annulation de la décision attaquée (ATF 138 II 42 consid. 1 ; 137 I 23
consid 1.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1157/2014 du 3 septembre 2015
consid. 5.2 ; 1C_495/2014 du 23 février 2015 consid. 1.2 ; ATA/382/2017 du
4 avril 2017 consid. 3c ; ATA/308/2016 du 12 avril 2016). L’existence d’un intérêt actuel s’apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours (ATF 137 I 296 consid. 4.2 ;
136 II 101 consid. 1.1) ; si l’intérêt s’éteint pendant la procédure, le recours, devenu sans objet, doit être simplement radié du rôle (ATF 125 V 373 consid. 1) ou déclaré irrecevable (ATF 123 II 285 consid. 4 ; ATA/322/2016 du
19 avril 2016 ; ATA/308/2016 du 12 avril 2016).

La condition de l’intérêt actuel fait défaut lorsque, par exemple, la décision ou la loi est révoquée ou annulée en cours d’instance (ATF 111 Ib 182 consid. 2 ; ATA/382/2017 du 4 avril 2017 consid. 3d) ou la décision attaquée a été exécutée et a sorti tous ses effets (ATF 125 I 394 consid. 4 ; ATA/193/2013 du
26 mars 2013). Il en va de même en cas de recours contre la décision de remise en état lorsque l'objet de la contestation porte sur un bâtiment dont le recourant n'est plus propriétaire et que le nouveau propriétaire, qui n'a pas recouru contre l'arrêt attaqué, a indiqué s'y soumettre (arrêt du Tribunal fédéral 1C _495/2014 du
23 février 2015 consid. 1.3).

4. En l'espèce, le PCTN a reçu une nouvelle demande en autorisation d'exploiter l'établissement avec un nouveau gérant. Le recourant a, quant à lui, continué de montrer son intérêt à poursuivre la présente procédure en parallèle de la demande que le PCTN doit instruire concernant le gérant en question. Il ressort également de ses écritures que M. A______ est toujours, à l'heure actuelle, l'exploitant du restaurant et il ne mentionne pas vouloir retirer son recours. Il dispose par conséquent d'un intérêt digne de protection à recourir contre les décisions prononcées à son encontre.

5. a. Selon l’art. 65 LPA, l’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant. En outre, il doit contenir l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes (al. 1). À défaut, un bref délai pour satisfaire à ces exigences est fixé au recourant, sous peine d’irrecevabilité (al. 2).

b. Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, il convient de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait que ces dernières ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est pas en soi un motif d’irrecevabilité, pourvu que le tribunal et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/74/2016 du 26 janvier 2016 ; ATA/681/2010 du 5 octobre 2010 et les références citées). Une requête en annulation d’une décision doit, par exemple, être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a, de manière suffisante, manifesté son désaccord avec la décision, ainsi que sa volonté qu’elle ne développe pas d’effets juridiques (ATA/74/2016 du 26 janvier 2016 ; ATA/758/2015 du 28 juillet 2015 et les arrêts cités ; Pierre MOOR / Etienne POLTIER, op. cit., p. 807 n. 5.8.1.4).

c. L’exigence de motivation de l’art. 65 al. 2 LPA a pour but de permettre à la juridiction administrative de déterminer l’objet du litige qui lui est soumis et de donner l’occasion à la partie intimée de répondre aux griefs formulés à son encontre. Elle signifie que le recourant doit expliquer en quoi et pourquoi il s’en prend à la décision litigieuse (ATA/74/2016 du 26 janvier 2016 ; ATA/208/2015 du 24 février 2015 et les arrêts cités ; Pierre MOOR / Etienne POLTIER, op. cit.,
p. 803-805 n. 8.8.1.3). L’exigence de la motivation est considérée comme remplie lorsque les motifs du recours, sans énoncer les conclusions formelles, permettent de comprendre aisément ce que le recourant désire (ATA/1076/2015 du
6 octobre 2015 et les arrêts cités).

La motivation doit être en relation avec l’objet du litige et le recourant doit se référer à des motifs qui entrent dans le pouvoir d’examen de l’autorité de recours (Benoît BOVAY, Procédure administrative, 2ème éd., 2015, p. 551).

Le Tribunal fédéral a pour sa part confirmé qu’il faut pouvoir déduire de l’acte de recours sur quels points et pour quelles raisons la décision entreprise est contestée, ce que le recourant demande et sur quels faits il entend se fonder. Une brève motivation est suffisante à condition toutefois que les motifs avancés se rapportent à l’objet de la contestation (arrêt du Tribunal fédéral 2A.143/2005 du 21 avril 2005 ; ATA/656/2015 du 23 juin 2015).

6. En l'espèce, les actes du recourant permettent de comprendre que celui-ci demande que les décisions litigieuses soient annulées et qu'il veut maintenir son autorisation d'exploiter voire en recevoir une nouvelle. Ils comportent une motivation suffisante, d’autant plus que l’intéressé agit en personne. Le recourant fournit également quelques pièces susceptibles d'étayer ses affirmations.

Les recours sont par conséquent recevables.

7. Le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA). En revanche, la chambre administrative n’a pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée (art. 61 al. 2 LPA). Il n'en résulte toutefois pas que l'autorité est libre d'agir comme bon lui semble, puisqu'elle ne peut pas faire abstraction des principes constitutionnels régissant le droit administratif, notamment la légalité, la bonne foi, l'égalité de traitement, la proportionnalité et l'interdiction de l'arbitraire (ATA/1010/2015 du 29 septembre 2015 consid. 4 ; ATA/857/2015 du
25 août 2015 consid. 2 et les références citées).

8. a. La procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle le juge établit les faits d’office (art. 19 LPA) Ce principe n’est pas absolu, sa portée étant restreinte par le devoir des parties de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA). Celui-ci comprend en particulier l’obligation des parties d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l’absence de preuves
(arrêts du Tribunal fédéral 8C_1034/2009 du 28 juillet 2010 consid. 4.2 ; 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 3.3.2 ; ATA/573/2015 du 2 juin 2015 ; ATA/99/2014 du 18 février 2014).

b. En procédure administrative, tant fédérale que cantonale, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves
(art. 20 al. 1, 2ème phr., LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_668/2011 du 12 avril 2011 consid. 3.3 ; ATA/573/2015 précité ; ATA/716/2013 du 29 octobre 2013). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n’est ni le genre, ni le nombre de preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/573/2015 et ATA/716/2013 précités).

9. Le 1er janvier 2016 est entrée en vigueur la LRDBHD et son règlement d'exécution qui ont abrogé la loi sur la restauration, le débit de boissons et l’hébergement du 17 décembre 1987 (aLRDBH) ainsi que le règlement d’exécution de la loi sur la restauration, le débit de boissons et l’hébergement du 31 août 1988 (aRRDBH).

Il résulte des dispositions transitoires de la LRDBHD que les personnes au bénéfice d’une autorisation d’exploiter délivrée sur la base de l’ancienne législation peuvent poursuivre l’exploitation de leur établissement et offrir les mêmes prestations, à condition qu’elles obtiennent, dans les douze mois à compter de l’entrée en vigueur de la nouvelle législation, les éventuelles autorisations complémentaires ou de remplacement nécessaires leur permettant d’offrir lesdites prestations et, pour le surplus, sont tenues, dès le 1er janvier 2016, de respecter les obligations relatives à l’exploitation, qui sont prévues pour leur catégorie d’entreprise (art. 70 al. 3 et 4 LRDBHD).

Au vu de ce qui précède, le litige sera examiné au regard de la LRDBHD et de son règlement d'exécution.

10. Premièrement, il sied d'examiner si le PCTN était en droit de révoquer l'autorisation d'exploiter de M. A______.

a. À l'instar de la loi qu'elle remplace, la LRDBHD soumet l'exploitation de toute entreprise vouée à la restauration et / ou au débit de boissons à consommer sur place à l'obtention préalable d'une autorisation d'exploiter délivrée par le département de la sécurité et de l'économie, soit pour lui le PCTN
(art. 8 LRDBHD ; art. 2 al. 1 et 3 al. 2 RRDBHD).

b. Selon l'art. 11 let. a LRDBHD, cette autorisation ne peut être accordée que si les locaux ne sont pas susceptibles de troubler l’ordre public, la sécurité, l'environnement et la tranquillité publique, du fait notamment de leur construction, de leur aménagement et de leur implantation manifestement inappropriés, à teneur des préavis des autorités compétentes dans les domaines visés à
l'art. 1 al. 4 LRDBHD, qui réserve l’application des dispositions en matière de construction, de sécurité, de protection de l’environnement, de tranquillité publique, d’utilisation du domaine public, de protection du public contre les niveaux sonores élevés et les rayons laser, de prostitution, de protection contre la fumée et l’alcool, d’âge d’admission pour des spectacles ou divertissements, de denrées alimentaires et d’objets usuels, d’hygiène, de santé, ainsi que de sécurité et / ou de conditions de travail prévues par d’autres lois ou règlements, leur application ressortissant aux autorités compétentes.

Selon l’exposé des motifs relatif à cette loi, l’art. 1 al. 4 LRDBHD rappelle que cette dernière ne règle pas tous les aspects liés à l’exploitation d’une entreprise tombant dans son champ d’application, dès lors que d’autres textes législatifs et réglementaires s’appliquent au domaine visé et relèvent de la compétence de diverses autorités, indépendamment des dispositions spécifiques à l’exploitation proprement dite des entreprises (MGC 2012-2013/XII/1 p.17963). Ainsi, l’art. 11 LRDBHD, qui porte sur les conditions relatives aux locaux, à la vocation et aux équipements des entreprises, se réfère, à l’al. 1, aux domaines énumérés à l’art. 1 al. 4 afin de rappeler l’ensemble des législations à observer avant l’ouverture d’une entreprise, certaines autorités n’intervenant, en application des législations dont elles sont chargées, qu’après le commencement de l’exploitation de l’entreprise, et non pas avant le début de celle-ci
(MGC 2012-2013/XII/1 p. 17971).

c. D'après l'art 20 al. 2 et 3 LRDBHD, la requête et les pièces l'accompagnant sont soumises, à titre consultatif, aux autres autorités intéressées, pour préavis. Celles-ci instruisent les dossiers et établissent un préavis dans leurs domaines de compétences respectifs et en vertu de la législation applicable. Les préavis favorables ne doivent pas comporter des conditions ou des charges préalables à l’exploitation. Les autorités consultées sont, dans leurs domaines de compétences respectifs, habilitées à fixer dans leur préavis des conditions et des charges d'exploitation propres à chaque entreprise.

En vertu de l'art. 21 al. 2 LRDBHD, les conditions et charges d’exploitation visées à l’art. 20 al. 3 LRDBHD, et admises par le PCTN en sa qualité d’autorité de décision font partie intégrante de l’autorisation délivrée. Ces conditions et charges peuvent être modifiées ou complétées si le département l’estime nécessaire, notamment suite à un contrôle d’une autorité.

d. D'après les art. 14 LRDBHD et 38 al. 1 RRDBHD, l'autorisation d'exploiter est révoquée lorsque les conditions de sa délivrance ne sont plus remplies notamment en raison d’un changement de catégorie (locaux exploités de manière non conforme à leur vocation ou qui ne sont pas équipés conformément à leur catégorie).

11. En l'espèce, le PCTN a demandé au recourant, à plusieurs reprises, de lui indiquer si les travaux exigés par la police du feu dans son préavis du
5 janvier 2015 avaient été exécutés, le cas échéant de lui fournir la preuve de leur accomplissement, alors que ce préavis n'indique aucun travail à réaliser. Il énonce uniquement que les exigences stipulées dans les préavis antérieurs demeurent réservées.

Faute d'avoir reçu les preuves demandées nonobstant plusieurs reports de délais, le PCTN a révoqué, en date du 2 mars 2017, l'autorisation d'exploiter de
M. A______ estimant que l'établissement ne répondait plus aux exigences en matière de sécurité et incendie et était susceptible de troubler la sécurité publique.

Certes, il apparaît qu'en date du 18 juillet 2014 la police du feu a effectivement émis un préavis défavorable en raison de la non-conformité des travaux par rapport à la procédure d'autorisation initiale (APA 34'561/1). Cependant, suite à cela, dans le cadre de la modification du projet initial
(APA 37'385/2), il a émis un nouveau préavis, favorable, en date du
5 janvier 2015. Il est impossible de déduire de ce dernier préavis que les conditions exigées dans les préavis précédents n'étaient toujours pas remplies ou que les mesures de sécurité incendie n'étaient alors pas respectées, ce que la police de feu aurait d'ailleurs probablement signalé, en énumérant par exemple, comme elle l'avait déjà fait en date du 14 mars 2013, les éventuels travaux à effectuer pour pouvoir s'y conformer.

Par ailleurs, il ressort du dossier, et plus particulièrement d'un courriel de la police du feu daté du 26 avril 2017 faisant suite à un contrôle des locaux, que cette dernière n'avait alors plus d'objections à émettre concernant la sécurité incendie pour l'établissement de M. A______, « à l'exception du tableau électrique et de la porte du vestiaire ». Ces deux exigences, ne figurant sur aucun préavis précédent, étaient entièrement nouvelles. Le dernier préavis émis par la police du feu en date du 9 juin 2017, lui aussi « favorable sous conditions », ne mentionne plus la mise en conformité du tableau électrique mais uniquement le remplacement de la porte du vestiaire.

Il ressort encore du dossier que M. A______ a, immédiatement après la visite précitée, entrepris des travaux en vue de se conformer aux exigences de la police de feu. En effet, une facture datée du 29 mai 2017 atteste qu'une porte
« EI30 » a été posée dans le vestiaire. Quant au tableau électrique, le bon de travaux établi par la régie et l'absence de mention dans le dernier préavis laissent entendre qu'il a été installé. De même, il ressort du descriptif de l'objet dudit préavis que celui-ci porte sur l'ensemble du restaurant.

Enfin, il ressort de la « plateforme F______ » que la demande d'autorisation APA 37'385/3 a été acceptée par l'OAC le 27 juin 2017.

L'autorité intimée a uniquement pris en compte un trouble à la sécurité publique pour motiver ses deux décisions, sans aller plus loin dans l'établissement des faits. À cela s’ajoute qu'elle n’a pas pris en compte les nouvelles pièces versées au dossier.

À ce stade, il n’appartient pas à la chambre de céans, juridiction de recours appelée notamment à examiner le grief de constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents, de se substituer à l’autorité administrative et de procéder à l’instruction initiale nécessaire à établir si d'autres motifs pouvaient – et peuvent –motiver les décisions prises par le PCTN. En effet, saisie d'un recours, la chambre administrative examine en règle générale si, dans le cadre de la liberté d’appréciation qui lui revient, le PCTN a fait bon usage des éléments qu'il a recueillis dans le cadre de son instruction pour rendre ses décisions, et elle ne peut pas examiner des éléments n’ayant pas fait l’objet du prononcé de l’instance inférieure, sous peine de détourner sa mission de contrôle, de violer sa compétence fonctionnelle, d’enfreindre le principe de l’épuisement des voies de droit préalables et, en définitive, de priver les parties d’un degré de juridiction (ATA/1242/2017 du 29 août 2017 consid. 3c ; ATA/648/2016 du 26 juillet 2016).

Dans ces circonstances, s'il est regrettable que le recourant n'ait pas fourni, bien que sollicité à plusieurs reprises, des preuves attestant de la réalisation des travaux de mise en conformité de son établissement, il ne peut pas lui être reproché de ne plus respecter à ce jour les normes de sécurité incendie.

Par conséquent, considérer que le recourant ne remplit plus les conditions de sécurité découlant de l'art. 11 let. a LRDBHD et lui révoquer, pour ce seul motif, son autorisation d'exploiter, n'est pas conforme au droit.

Compte tenu des faits nouveaux que le recourant est autorisé à invoquer, la décision de révocation attaquée, laquelle était fondée en date du 2 mars 2017, ne l'est plus à ce jour et doit par conséquent être annulée.

12. Il sied encore d'examiner si l'autorité intimée pouvait rejeter la nouvelle requête en exploitation de M. A______ déposée en date du 15 décembre 2016.

Dans ses observations du 5 juillet 2017, l'autorité intimée allègue que, même si les conditions de sécurité étaient remplies, le recourant ne pourrait pas, en tout état de cause, bénéficier d'une autorisation d'exploiter conforme à la nouvelle loi, son dossier étant lacunaire et incomplet.

13. a. Les dispositions transitoires de la LRDBHD prévoient que si le département constate que les conditions d’octroi de l’autorisation d’exploiter prévues par la nouvelle loi ne sont pas remplies par un établissement autorisé en application de l’ancienne législation, il impartit un délai raisonnable à l’exploitant et, au besoin, au propriétaire de l’établissement, pour qu’il soit remédié à cette situation. Il statue à l'expiration du délai fixé, qui peut toutefois être prolongé si les circonstances le justifient. Les délais cumulés ne peuvent pas dépasser douze mois (art. 70 al. 9 LRDBHD).

b. Les dispositions transitoires du RRDBHD, plus particulièrement son art. 65, précisent que les personnes au bénéfice d’une autorisation d’exploiter délivrée sur la base de l’ancienne législation doivent requérir auprès du service, au plus tard dans les six mois à compter de l’entrée en vigueur de la loi, les autorisations de remplacement nécessaires pour pouvoir poursuivre l’exploitation de leur établissement conformément à la loi et au règlement (al. 1). Le service dispose d'un délai de quatre mois pour rendre la décision relative à la requête en autorisation visée à l'al. 1 (al. 2). Le service prononce à l’encontre des établissements omettant d’entreprendre la démarche de régularisation la révocation de l’ancienne autorisation au terme de douze mois à compter de l’entrée en vigueur de la loi (al. 4).

14. D'après l'art. 19 al. 1 RRDBHD, la requête en autorisation d'exploiter est valablement déposée, lorsqu’elle est : a) faite au moyen de la formule officielle établie par le service et dûment remplie par l'exploitant ; b) signée par l'exploitant propriétaire. Si l'exploitant n'est pas propriétaire, le formulaire doit être contresigné par le propriétaire. En cas de gérance, le formulaire doit également comporter la signature du gérant au sens de l'art. 39 al. 2 RRDBHD ; c) complète et comporte toutes les pièces nécessaires à son examen. La formule officielle indique les documents à joindre, parmi ceux visés à l’art. 20 RRDBHD. Si la requête ne réalise pas ces conditions, elle est retournée au requérant, sans fixation d’un délai pour la compléter. Le service n'instruit que les requêtes complètes
(art. 19 al. 2 et 3 RRDBHD).

Aux termes de l'art. 31 RRDBHD, le service s’assure que les conditions d’octroi de l’autorisation sollicitée sont remplies, au vu des pièces produites par le requérant et des informations figurant sur le formulaire (al. 1). Le service peut également exiger du requérant la production de tout document complémentaire lui permettant d’établir que les conditions d'octroi de l'autorisation sollicitée sont remplies (al. 3). Le service statue dans les deux mois au plus, à compter de la date de dépôt de la demande complète au sens de l’art. 19 al. 1 let. c RRDBHD
(al. 12). Il rend une décision de rejet de la requête si les conditions prévues par la loi ne sont pas réalisées ou si des intérêts publics prépondérants l’exigent (al. 13). Lorsque le service accorde l’autorisation sollicitée, il peut assortir sa décision de conditions et charges, afin de garantir le respect des intérêts publics poursuivis par la loi (al. 14).

15. En l'espèce, M. A______ est au bénéfice d'une autorisation d'exploiter délivrée le 11 septembre 2013, soit sur la base de l'ancienne législation. Selon les dispositions transitoires précitées, pour pouvoir poursuivre l'exploitation de son établissement il devait obtenir l'autorisation de remplacement nécessaire lui permettant de se conformer à la nouvelle loi dans les douze mois dès l'entrée en vigueur de la nouvelle loi.

En l'occurrence, il a déposé une nouvelle requête en exploitation
le 22 mars 2016, soit dans les six mois prévus par la loi, suite à laquelle le PCTN a rendu, en date du 30 mai 2016, une décision de non-entrée en matière. Sa requête étant incomplète, il lui a demandé de préciser plusieurs points et de déposer une nouvelle requête en autorisation d'exploiter accompagnée de toutes les pièces nécessaires.

Le recourant a ainsi déposé une nouvelle requête, à l'intérieur du délai prévu par les dispositions transitoires, soit le 15 décembre 2016, laquelle a été rejetée par le PCTN le 2 mars 2017 pour le seul motif que l'établissement ne répondait pas aux exigences en matière de sécurité incendie. Cette fois-ci, le PCTN n'a pas précisé si des pièces étaient manquantes et il n'a pas renvoyé le formulaire au requérant pour un éventuel complément d'informations ou de documentation.

Comme dans le cadre de l'examen de la conformité au droit de la décision de révocation, le motif invoqué par le PCTN ne pouvait pas, dans ce cas également, conduire à lui seul au rejet de la requête d'autorisation d'exploiter du recourant, rien ne permettant de conclure que son établissement ne respecte pas ou plus les exigences de sécurité.

Pour les mêmes raisons que celles évoquées plus haut, il n'appartient pas à la chambre de céans de déterminer si d'autres motifs justifiaient – et
justifieraient – le rejet de la demande d'autorisation de remplacement, de sorte que la décision attaquée doit être annulée.

16. Au vu de ce qui précède, les recours seront admis et les décisions litigieuses seront annulées. Concernant la procédure de renouvellement de l'autorisation d'exploiter selon le nouveau droit, le dossier sera retourné à l'intimé pour instruction complémentaire et nouvelle décision au sens des considérants.

17. Vu l'issue du litige, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 87 al. 1 LPA). Aucune indemnité de procédure ne sera allouée au recourant, ce dernier n’y ayant pas conclu et n'ayant pas invoqué avoir exposé de frais pour sa défense
(art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable les recours interjeté le 31 mars 2017 par
Monsieur A______ contre les décisions du service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir du 2 mars 2017 ;

au fond :

les admet ;

annule les décisions du 2 mars 2017 du service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir ;

retourne le dossier audit service pour instruction complémentaire et nouvelle décision au sens des considérants ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 C______ 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur A______ ainsi qu'au service de police du commerce et de lutte contre le travail au noir.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, MM. Thélin et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

la greffière :