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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/354/2017

ATA/1242/2017 du 29.08.2017 ( FORMA ) , REJETE

Descripteurs : EXAMEN(FORMATION) ; EXCLUSION(EN GÉNÉRAL) ; OPPOSITION(PROCÉDURE) ; RÈGLEMENT DES ÉTUDES ET DES EXAMENS ; STAGE ; CIRCONSTANCE EXTRAORDINAIRE ; ÉGALITÉ DE TRAITEMENT ; POUVOIR D'EXAMEN
Normes : RIO-UNIGE.36.al1; LPA.68; RE FORENSEC 2015.6; RE FORENSEC 2015.23; RE FORENSEC 2015.10.al3.leta; Statut université 2016.58.al4
Résumé : Étudiante de l'IUFE éliminée de la formation en raison de son double échec à l'évaluation du stage annuel en accompagnement. Le trouble de l'attention invoqué au titre de circonstance exceptionnelle a été attesté par un certificat médical produit durant la procédure de recours, soit tardivement selon la jurisprudence. Les conditions permettant de le prendre en compte malgré sa tardiveté ne sont pas remplies, le trouble en question ne revêtant au demeurant pas le degré de gravité requis pour admettre une circonstance exceptionnelle. Recours rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/354/2017-FORMA ATA/1242/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 29 août 2017

2ème section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Cyril Mizrahi, avocat

contre

UNIVERSITÉ DE GENÈVE



EN FAIT

1) Madame A______, née le ______1976, a obtenu une licence ès lettres en langue et littérature anglaises au sein de la Faculté des lettres de l’Université de Genève (ci-après : UNIGE) à l’issue du semestre de printemps 2007.

2) Au semestre d’automne 2014, elle s’est réimmatriculée à l’UNIGE afin de suivre le cursus du certificat complémentaire de base en didactique de la discipline et en sciences de l’éducation (ci-après : CCDIDA), et a obtenu le titre correspondant après deux semestres passés dans le cursus.

3) Elle a ensuite sollicité son admission à la formation de maîtrise universitaire spécialisée en enseignement secondaire (ci-après : MASE), dans la discipline anglais, auprès de l'institut universitaire de formation des enseignants (ci-après : IUFE) pour la rentrée académique 2015-2016.

4) Par décision du 16 juillet 2015, l’IUFE a refusé l’admission de Mme A______ dans ce cursus, en raison d’un nombre insuffisant de places de stage en anglais disponibles pour l’année académique 2015-2016.

5) Le 1er octobre 2015, le règlement d’études de la formation des enseignements du secondaire relatif à l’année académique 2015-2016 (ci-après : RE FORENSEC 2015) est entrée en vigueur.

Un dispositif transitoire était institué pour permettre aux étudiants dans la situation de Mme A______ de poursuivre leur formation en deuxième année en accédant à la MASE.

6) Par décision du 5 novembre 2015, l’IUFE a prononcé l’admission de Mme A______ à la MASE pour l’année académique 2015-2016 et lui a soumis, pour approbation et signature, un plan d’études aménagé, personnalisé et définitif.

Conformément à son plan d’études, l’intéressée devait effectuer un stage annuel en accompagnement de six heures hebdomadaires au sein de l’école de culture générale (ci-après : ECG) Ella Maillart. Un tel stage, référencé par le titre de cours F4S9373 – Pratique de l'enseignement accompagnée et analysée 1 et 2, était validé par deux attestations (attestation I et attestation II) qui devaient porter la mention « acquis ».

Elle devait également effectuer un stage en accompagnement de trente heures au cycle d’orientation de Drize, ainsi qu’un remplacement de longue durée dans les deux établissements précités, et elle devait suivre différents enseignements théoriques.

Dans le cadre de ces stages, Mme A______ était encadrée par une chargée d'enseignement de l'IUFE, Madame B______, ainsi que par une formatrice de terrain, Madame C______.

7) Mme A______ a commencé sa formation pratique au mois de novembre 2015.

8) Au cours du premier semestre, quatre visites de terrain et deux séances de travail ont été organisées par les formatrices entre le 18 décembre 2015 et le 12 février 2016.

9) Selon son relevé de notes du 19 février 2016, Mme A______ a échoué à la première évaluation de stage annuel en accompagnement pour le module intitulé « Pratique de l’enseignement accompagnée et analysée 1» (ci-après : attestation I).

10) Mme A______ n’a pas contesté cet échec.

11) Le 25 février 2016 s’est tenue une séance tripartite de fin de semestre, qui a réuni Mmes B______ et C______ et Mme A______. Selon le compte rendu de cette séance, près d’une trentaine d’objectifs avaient été fixés à l’intéressée, en accord avec elle.

12) Au cours du second semestre, entre le 17 mars et le 26 mai 2016, six visites de terrain ont été effectuées, dont cinq ont donné lieu à un compte rendu d’observation et d’analyse de leçon (ci-après : CROAL) rédigé par Mme C______.

13) Le 26 mai 2016, un rapport de stage annuel en accompagnement a été signé par Mme A______ et son enseignante d’accueil de l’ECG Ella Maillart.

Mme A______ avait exprimé des difficultés à préparer une leçon, et à anticiper le matériel nécessaire. Les consignes qu’elle donnait aux élèves n’étaient pas toujours assez claires. Son manque d’organisation et d’anticipation rendait la gestion de la classe parfois difficile. Elle prenait toutefois un soin particulier à rédiger des documents clairs et aérés et était toujours arrivée positive en classe.

14) Le 31 mai 2016, au terme d’une séance tripartite, un préavis défavorable a été émis concernant la délivrance de l’attestation I, les objectifs de formation n’ayant pas été atteints selon les formatrices.

15) Le 13 juin 2016, un rapport annuel de synthèse a été rédigé en langue anglaise afin d’évaluer les stages de Mme A______. Il en ressortait en substance qu’elle n’avait pas atteint les objectifs de formation.

16) Le 13 juin 2016, Mme A______ a renvoyé le rapport annuel de synthèse signé, et y a annexé ses observations.

Le rapport contenait des erreurs sur le nombre de visites, certaines dates et lieux de visites, symptomatiques d’un problème de supervision et de manque de sérieux dans le suivi de la part de sa chargée d’évaluation. Le rapport de stage était lacunaire et n’indiquait pas les raisons de difficultés évoquées. Les objectifs des stages en accompagnement et en responsabilité ne lui avaient pas été fixés. La première visite de sa formatrice de terrain n’avait eu lieu qu’à la mi-février, de sorte que le suivi sur le terrain n’avait duré que trois mois. Le temps mis pour comprendre les attentes de ses formateurs n’était donc pas excessif. Le courriel envoyé par sa chargée d’évaluation pour lui conseiller de se retirer de la première attestation n’était pas clair, ce n’était que le 8 juin 2016, lors d’un entretien avec la conseillère aux études, qu’elle avait compris être en situation de double échec.

17) Selon son relevé de notes du 1er juillet 2016, Mme A______ a échoué pour la seconde fois à l’évaluation de l’attestation I durant la session d’examens de mai-juin 2016.

La mention « non réussi » figurait également à l’évaluation des modules : « Pratique de l’enseignement accompagnée et analysée  2 (anglais) » ; « Stage pratique dans l’autre ordre/niveau d’enseignement (anglais) » ; « Anglais – Atelier de didactique B – secondaire I et II ».

18) Par décision du 26 juillet 2016, l’IUFE a prononcé l’élimination de Mme A______ de la MASE en anglais, en raison du double échec qu’elle avait subi à l’évaluation de l’attestation I.

19) Le 23 août 2016, Mme A______, agissant en personne, a formé opposition à l’encontre de cette décision.

Le premier semestre ayant commencé tard en raison du dispositif transitoire auquel elle était soumise, elle n’avait pas pu assimiler dans les temps les différents contenus propres à sa formation. En outre, malgré ses demandes répétées, la première visite de sa formatrice n’avait eu lieu que le 11 février 2016, soit trop peu de temps avant la séance tripartite qui avait conduit à son échec. Le document remis à la suite de la séance tripartite de février avait été rédigé à la hâte et de manière imprécise, de sorte qu’elle n’avait pas saisi clairement les objectifs fixés pour le deuxième semestre. Tant la charge professionnelle que la formation étaient trop importantes au vu des nombreux trajets, méthodes et programmes à assimiler. Son stage de trente heures s’était prolongé au-delà du raisonnable en raison de demandes excessives de son enseignante d’accueil. Elle avait subi de très fortes pressions durant cette année scolaire, notamment en raison de sa vie privée, étant précisé qu’elle avait un enfant en bas âge et que son mari avait récemment perdu son emploi. Elle souhaitait bénéficier d’un plan de compensation pour retenter de valider l’attestation I.

20) En date du 26 août 2016, l’IUFE a accusé réception de l’opposition de Mme A______.

21) Par courrier du 28 septembre 2016, l’IUFE a transmis à Mme A______ un rapport établi par Mmes B______ et C______ le 9 septembre 2016.

Mme A______ avait eu le même statut et la même charge que les autres stagiaires qui avaient réussi à assimiler dans les temps et correctement les contenus propres à la formation dispensée au premier semestre. La chargée d’évaluation avait effectué davantage de visites que celles qui étaient requises par le plan de stage. Il y avait un manque évident de progrès ou d’amélioration de la part de Mme A______, dont les défis, difficultés et incapacités conceptuelles et didactiques ressortaient des différents documents, malgré cinq mois de stage.

22) Le 7 octobre 2016, Mme A______ a transmis ses observations, par lesquelles, en substance, elle contestait les reproches formulés dans le rapport du 9 septembre 2016 en reprenant les arguments développés dans son opposition du 23 août 2016. Elle a annexé à son courrier deux certificats de travail établis respectivement le 30 juin 2014 et le 6 juillet 2015 par les directeurs de l’école de commerce Nicolas-Bouvier et du collège de la Golette, tous deux attestant de leur satisfaction dans les prestations de l’intéressée.

23) Par courrier du 15 novembre 2016, la commission des oppositions de l’IUFE a transmis un préavis négatif daté du 7 novembre 2016 sur l’opposition de Mme A______. Cette dernière bénéficiait d’un délai au 23 novembre 2016 pour faire part de ses observations à son propos, puis son dossier serait présenté le 24 novembre 2016 devant le comité de direction.

24) Mme A______ ne s’est pas manifestée dans le délai imparti.

25) Par décision sur opposition du 12 décembre 2016, l’IUFE a confirmé l’élimination de Mme A______ de la MASE en anglais.

La période d’évaluation était restée identique pour tous les étudiants soumis au dispositif transitoire, seules les séances tripartites avaient été décalées aux mois de février et mars 2016, alors que les autres étudiants avaient été soumis à l’évaluation du jury en décembre 2015. Mme A______ avait donc bénéficié d’un nombre de visites conforme aux modalités d’évaluation, les pièces de son dossier montrant qu’elle avait bénéficié d’un encadrement particulièrement consistant, allant même au-delà de ce qui était requis par le plan de stage. Les objectifs fixés pour le deuxième semestre avaient été explicités à tous les étudiants en début d’année dans le cadre des ateliers de didactique, sur la base de principes inscrits dans le guide de l’étudiant disponible en ligne. L’intéressée avait précisé dans différents courriels avoir compris les objectifs à améliorer à court et moyen terme figurant dans le document établi à la suite de la séance tripartite du 25 février 2016. Aucun élément ne montrait qu’elle aurait eu une charge de travail supérieure aux autres étudiants de sa volée. Sur le fond, elle avait rencontré de nombreuses et récurrentes difficultés qui ne lui avaient pas permis de valider son stage, et qui avaient trait notamment à la planification des cours, à la compréhension des objectifs d’apprentissage, à son incapacité à s’organiser, à travailler de manière autonome et à intégrer les concepts fondamentaux travaillés en ateliers. Mme A______ n’évoquait aucun motif de nature à admettre la possibilité de circonstances exceptionnelles qui auraient ouvert la voie à une ultime tentative à titre dérogatoire, les problèmes familiaux ne s’inscrivant pas dans ce cadre.

26) Par acte du 30 janvier 2017, sous la plume de son conseil, Mme A______ a formé recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) à l’encontre de la décision sur opposition précitée, concluant à son annulation, à l’annulation de la décision du 26 juillet 2016, à ce qu’elle soit autorisée à répéter le module « F4S9373 – Pratique de l’enseignement accompagnée et analysée 1 », ainsi qu’à l’octroi d’une équitable indemnité de procédure.

Était annexé à son recours un certificat médical daté du 17 janvier 2017 du Dr D______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie. Ce dernier attestait la suivre depuis le mois de septembre 2016. Elle était atteinte d’un trouble de l’attention avec ou sans hyperactivité (ci-après : TDA/H). Ce TDA/H lui causait des difficultés chroniques, listées ainsi : « distractibilité et inattention, agitation psychique incessante et désordonnée, difficultés à maintenir durablement son focus d’attention, à canaliser sa pensée, impulsivité, problèmes relationnels et professionnels, etc. ». Ce trouble avait influencé sa scolarité et ses études supérieures dans le sens d’une lenteur pour les processus d’apprentissage et pour tout travail intellectuel à maintenir au long cours. Le trouble rendait également compte de difficultés rencontrées dans l’organisation du travail et l’accomplissement de tâches administratives diverses. Un traitement par methylphenidate avait récemment été introduit et semblait améliorer la symptomatologie.

En raison de son trouble TDA/H, elle avait souffert lors de ses stages d’une situation de handicap au sens de l’art. 1 § 2 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées du 13 décembre 2006 (CDPH – RS 0.109), en lien direct avec son échec. En l’éliminant du programme MASE anglais, l’UNIGE avait donc violé le principe d’égalité garanti par l’art. 8 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. – RS 101) et l’art. 15 al. 2 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE – A 2 00). Pour rétablir une égalité avec ses collègues, elle devait pouvoir effectuer une nouvelle fois l’attestation I, ce qui constituerait un aménagement raisonnable au sens de l’art. 2 § 4 CDPH et 2 al. 2 de la loi fédérale sur l'élimination des inégalités frappant les personnes handicapées du 13 décembre 2002 (LHand – RS 151.3). Elle n’avait pas eu conscience de souffrir de ce trouble pendant ses stages et ne l’avait découvert qu’en janvier 2017. Elle remplissait toutefois les conditions jurisprudentielles pour que son certificat médical soit pris en considération, bien qu’il ait été soumis postérieurement à son second échec. Enfin, sa situation devait être considérée comme exceptionnelle au sens de l’art. 58 al. 4 du statut de l’UNIGE du 28 juillet 2011, de sorte qu’elle devait pouvoir bénéficier d’une chance supplémentaire de passer l’examen.

27) Le 10 mars 2017, l’IUFE a répondu au recours, concluant à son rejet et à la confirmation de la décision sur opposition de l’IUFE du 12 décembre 2016.

L’argument lié à sa situation de handicap était totalement nouveau et par conséquent irrecevable. Subsidiairement, il devait être écarté en raison de sa tardiveté, puisque le Dr D______ suivait l’intéressée depuis septembre 2016, que son certificat datait du 17 janvier 2017 et établissait que le trouble existait déjà avant le début de ses études universitaires, mais qu’elle ne l’avait fait valoir qu’au stade du recours le 30 janvier 2017. Ses problèmes de santé ne semblaient pas revêtir le degré de gravité suffisant pour constituer une circonstance exceptionnelle. Le lien de causalité entre son trouble et l’élimination de la MASE n’était pas établi. Elle avait réussi à valider l’ensemble des matières du cursus hormis celles qui relevaient des dimensions pratiques.

28) Par écriture du 2 mai 2017, sous la plume de son conseil, Mme A______ a transmis sa réplique.

Son argument quant au TDA/H n’était pas une conclusion nouvelle mais un fait nouveau, de sorte qu’il était recevable.

Elle annexait à son écriture un nouveau certificat médical du Dr D______ daté du 11 avril 2017, à teneur duquel ses difficultés étaient accentuées sous stress. Le diagnostic de TDA/H avait été évoqué en novembre 2016 puis s’était consolidé entre décembre 2016 et janvier 2017. L’organisation de sa seconde année d’études pédagogiques avait été marquée par un manque de structuration par rapport à l’année précédente et les stratégies d’adaptation à son trouble devenaient insuffisantes par rapport à l’année précédente. Une augmentation de son anxiété en avait découlé et avait eu un impact défavorable sur ses compétences d’organisation, de structuration de son temps et de ses activités. L’échec de sa seconde année était « très probablement attribuable en grande partie au trouble [qu’elle] présent[ait] », qui pouvait être qualifié de sévérité moyenne mais avait un impact défavorable sur différents aspects de sa vie. Le traitement actuel était en train d’être adapté et avait une incidence positive sur son trouble.

29) Par écriture du 30 mai 2017, l’IUFE a fait part de ses observations, renvoyant aux arguments développés dans sa réponse.

Pour le surplus, il a précisé que seules les sessions d’examens
d’août-septembre constituaient des sessions de rattrapage, au contraire des sessions de janvier-février et mai-juin qui étaient dites ordinaires, et auxquelles les retraits aux évaluations étaient possibles, ce que confirmait l’art. 6 RE FORENSEC 2015, applicable en l’espèce.

30) Par courrier du 15 juin 2017, Mme A______, sous la plume de son conseil, a relevé que la formulation de l’art. 6 RE FORENSEC 2015 portait à confusion s’agissant des sessions pouvant être ou non considérées comme une session de rattrapage, raison pour laquelle il était compréhensible qu’elle ait considéré sa seconde tentative en mai-juin comme une session de laquelle elle n’avait pas été en droit de se retirer.

31) Le 21 juin 2017, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 36 al. 1 du règlement relatif à la procédure d'opposition au sein de l'université du 16 mars 2009 - RIO -UNIGE).

2) Le litige porte sur la conformité au droit de la décision de l’IUFE prononçant l’élimination de la recourante de la formation MASE en raison de son double échec à l’évaluation « Pratique de l’enseignement accompagnée et analysée I » (ci-après : attestation I).

3) a. Dans son recours, la recourante fait valoir qu’elle souffre d’un TDA/H dont elle a découvert l’existence après que soit rendue la décision attaquée et qui serait constitutif d’une circonstance exceptionnelle lui ouvrant la voie à une ultime tentative de validation de l’attestation I. L’intimée soutient quant à elle que le TDA/H constitue un fait nouveau irrecevable au sens de l’art. 68 LPA.

b. Selon l’art. 68 LPA, le recourant peut invoquer des motifs, des faits et des moyens de preuve nouveaux qui ne l’ont pas été dans les précédentes procédures, sauf exception prévue par la loi. A contrario, cette disposition ne permet pas au recourant de prendre des conclusions qui n’auraient pas été formées devant l’autorité de première instance (ATA/648/2016 du 26 juillet 2016).

c. Selon la jurisprudence constante de la chambre de céans, l’objet d’une procédure administrative ne peut pas s’étendre ou se modifier qualitativement au fil des instances. Il peut uniquement se réduire, dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés devant l’autorité de recours (ATA/239/2016 du 15 mars 2016; ATA/208/2016 du 8 mars 2016). Si un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions qui ont été traitées dans la procédure antérieure. Quant à l’autorité de recours, elle n’examine pas les prétentions et les griefs qui n’ont pas fait l’objet du prononcé de l’instance inférieure, sous peine de détourner sa mission de contrôle, de violer la compétence fonctionnelle de cette autorité-ci, d’enfreindre le principe de l’épuisement des voies de droit préalables et, en définitive, de priver les parties d’un degré de juridiction (ATA/648/2016 précité ; ATA/319/2015 du 31 mars 2015 ; ATA/209/2014 du 1er avril 2014).

d. En l’espèce, il ressort des termes de son opposition du 23 août 2016 et de son complément d’opposition du 7 octobre 2016 que la recourante, alors non représentée, demandait l’annulation de la décision du 26 juillet 2016 qui prononçait son élimination de la formation MASE. Sous la plume de son conseil, dans son recours du 30 janvier 2017, elle a formellement conclu à l’annulation de la décision sur opposition du 12 décembre 2016 et à l’annulation de la décision du 26 juillet 2016. Elle n’a ainsi pas formulé de nouvelles conclusions dans le cadre de la présente procédure.

S’il est exact qu’elle n’avait pas fait valoir son trouble TDA/H lors de la procédure d’opposition au titre de circonstance exceptionnelle, elle avait alors toutefois invoqué avoir vécu une année particulièrement difficile, notamment en raison de sa charge familiale, soit son enfant en bas âge et son époux qui avait récemment perdu son emploi. Cette argumentation avait au demeurant conduit l’autorité intimée, dans sa décision sur opposition, à examiner si la situation de la recourante constituait ou non une circonstance exceptionnelle, pour répondre par la négative.

Par conséquent, ainsi que le relève la recourante, il convient d’admettre qu’elle avait déjà, au stade de l’opposition, demandé à être mise au bénéfice d’une circonstance exceptionnelle, de sorte que l’invocation de son trouble TDA/H et les certificats médicaux à son appui ne constituent pas un grief n’ayant pas fait l’objet du prononcé de la décision attaquée, mais un fait et des moyens de preuve nouveaux à l’appui dudit grief, et qui sont, partant, recevables.

Il convient donc d’examiner si le TDA/H invoqué constitue une circonstance exceptionnelle, et si les certificats médicaux faisant état du trouble ont été ou non produits tardivement comme le soutient l’intimée.

4) Étudiante en MASE, la recourante était initialement soumise au RE FORENSEC 2014. Dès 2015, elle a été soumise au RE FORENSEC 2015. Le litige entre les parties s'étant déroulé durant l'année académique 2015-2016, il doit être tranché au regard des dispositions du RE FORENSEC 2015.

5) La MASE correspond à 94 crédits ECTS, et comprend des cours, des séminaires, des ateliers ainsi que des stages d'observation, un stage en responsabilité d'enseignement, un stage en accompagnement ainsi qu'un travail de fin d'études (art. 23 RE FORENSEC 2015).

Chaque enseignement, cours, séminaire, atelier, module ou stage fait l’objet d’une évaluation, attestée par une note ou une mention, selon des modalités propres à chaque diplôme (art. 6 al. 1 et 5 RE FORENSEC 2015).

Pour chaque évaluation, l’étudiant doit obtenir une note de 4 au minimum sur un maximum de 6, ou la mention « acquis », étant précisé que pour obtenir tous les crédits ECTS liés à un programme, il est nécessaire de réussir indépendamment chaque évaluation (art. 6 al. 6 RE FORENSEC 2015). L’étudiant dispose de deux tentatives pour chaque évaluation, réparties sur les sessions d’examens de janvier-février et de mai-juin de l’année académique correspondante  (art. 6 al. 10 RE FORENSEC 2015). Un étudiant est éliminé de la formation s'il subit deux échecs à une évaluation (art. 10 al. 3 let. a RE FORENSEC 2015).

6) a. L'art. 58 al. 4 du statut de l'université prévoit la prise en compte des situations exceptionnelles lors d'une décision d'élimination.

b. Selon la jurisprudence constante rendue par l’ancienne commission de recours de l’université, reprise par la chambre administrative, à propos de l’art. 22 al. 3 du règlement de l’université du 7 septembre 1988 (aRU - C 1 30.06) et à laquelle il convient de se référer dans cette cause, l’admission d’une situation exceptionnelle doit se faire avec restriction. Il en va de l’égalité de traitement entre tous les étudiants s’agissant du nombre de tentatives qu’ils sont autorisés à effectuer pour réussir leurs examens. N’est ainsi exceptionnelle que la situation particulièrement grave et difficile pour l’étudiant, ce tant d’un point de vue subjectif qu’objectif. Les effets perturbateurs doivent avoir été dûment prouvés par l’étudiant et être en lien de causalité avec l’événement. En outre, les autorités facultaires disposent dans ce cadre d’un large pouvoir d’appréciation, dont l’autorité de recours ne censure que l’abus (ATA/906/2016 du 25 octobre 2016 ; ATA/712/2016 du 23 août 2016 ; ATA/654/2012 du 25 septembre 2012 ; ACOM/118/2008 du 18 décembre 2008).

c. Ont été considérées comme des situations exceptionnelles le décès d’un proche s’il est établi qu’il a causé un effet perturbateur en lien de causalité avec l’échec de l’étudiant (ACOM/69/2006 du 31 juillet 2006 ; ACOM/51/2002 du 22 mai 2002), de graves problèmes de santé ou encore l’éclatement d’une guerre civile avec de très graves répercussions sur la famille de l’étudiant (ATA/906/2016 précité ; ATA/712/2016 précité ; ATA/155/2012 du 20 mars 2012).

d. Les candidats qui ne se sentent pas aptes, pour des raisons de santé, à se présenter à un examen doivent l’annoncer avant le début de celui-ci. À défaut, l’étudiant accepte le risque de se présenter dans un état déficient qui ne peut justifier par la suite l’annulation des résultats obtenus (ATA/906/2016 précité ; ATA/712/2016 précité ; ATA/424/2011 du 28 juin 2011).

D’après la jurisprudence, un motif d’empêchement ne peut, en principe, être invoqué par le candidat qu’avant ou pendant l’examen (arrêt du Tribunal administratif fédéral B-6593/2013 du 7 août 2014 consid. 4.2 ; ATA/906/2016 précité ; ATA/712/2016 précité ; ATA/721/2014 du 9 septembre 2014 consid. 17 et la référence citée).

e. Des exceptions au principe évoqué ci-dessus permettant de prendre en compte un certificat médical présenté après que l’examen a été passé ne peuvent être admises que si cinq conditions sont cumulativement remplies : la maladie n’apparaît qu’au moment de l’examen, sans qu’il ait été constaté de symptômes auparavant, le candidat à l’examen acceptant, dans le cas contraire, un risque de se présenter dans un état déficient, ce qui ne saurait justifier après coup l’annulation des résultats d’examens ; aucun symptôme n’est visible durant l’examen ; le candidat consulte un médecin immédiatement après l’examen ; le médecin constate immédiatement une maladie grave et soudaine qui, malgré l’absence de symptômes visibles, permet à l’évidence de conclure à l’existence d’un rapport de causalité avec l’échec à l’examen ; l’échec doit avoir une influence sur la réussite ou non de la session d’examens dans son ensemble (arrêts du Tribunal administratif fédéral B-6593/2013 précité et B-354/2009 du 24 septembre 2009 et les références citées ; ATA/906/2016 précité consid. 5d ; ATA/712/2016 précité consid. 5c).

f. Les principes dégagés par cette jurisprudence s’appliquent mutatis mutandis aux stages de formation et à leur évaluation. Dans la mesure où ceux-ci se déroulent sur une longue période, il appartient à l’étudiant stagiaire qui constate être atteint dans sa santé d’entreprendre sans attendre les démarches lui permettant d’exposer sa situation à ses formateurs, voire à son employeur, en vue, si nécessaire, d’interrompre son stage ou d’en reporter l’évaluation et/ou négocier une adaptation de sa formation, ceci avant une évaluation négative de l’instance universitaire ou une décision d’interruption du stage (ATA/906/2016 précité ; ATA/721/2014 du 9 septembre 2014).

7) En l’espèce, il ressort du dossier que la recourante a échoué pour la seconde fois à l’évaluation litigieuse lors de la session d’examens de mai-juin 2016, étant précisé que le relevé de notes constatant son double échec est daté du 1er juillet 2016 et lui a été notifié le 26 juillet 2016. Ce n’est toutefois qu’à compter du mois de septembre 2016 qu’elle s’est présentée à la consultation du Dr D______, soit plus de deux mois plus tard. La condition d’immédiateté de la consultation du médecin telle que prévue par la jurisprudence n’est donc pas remplie.

En outre, dans ses deux certificats médicaux, le Dr D______ rapporte que « le diagnostic de TDA/H a été évoqué en novembre 2016 » seulement, soit après deux mois de suivi, « puis s’est progressivement consolidé par la suite entre décembre 2016 et janvier 2017 ». La condition de la constatation immédiate de la maladie par le médecin n’est ainsi pas non plus réalisée.

Ce dernier atteste par ailleurs que le trouble dont souffre la recourante « a influencé sa scolarité et ses études supérieures », si bien que l’on comprend que des symptômes s’étaient déjà manifestés avant l’évaluation et le stage litigieux, quand bien même aucun diagnostic n’avait été posé. Il lui revenait cependant dans ce cas de les faire constater et de s’en prévaloir avant de recevoir une évaluation négative, a fortiori si le trouble dont elle se prévaut atteignait un tel degré de gravité.

Or, le Dr D______ qualifie le TDA/H de la recourante de sévérité moyenne, ce qui l’exclut des maladies considérées comme graves.

Partant, même si le TDA/H était en lien de causalité avec son double échec à l’attestation I, ce qui n’est pas démontré, le certificat médical de la recourante ne peut être pris en compte, les cinq conditions précitées étant cumulatives.

En conséquence, les problèmes de santé de la recourante ne sauraient pas non plus être considérés comme des circonstances exceptionnelles justifiant une dérogation. En prononçant son élimination de la MASE, l’autorité intimée n’a donc pas non plus violé le principe d’égalité garanti par la Cst. et la Cst-GE.

Le grief sera écarté.

8) Enfin, il sera relevé que la recourante s’est prévalue de différents motifs à l’appui de son opposition et de son complément d’opposition. Au vu du pouvoir d’examen extrêmement restreint de l’autorité de recours en matière d’évaluation des résultats d’examens, consacré par la jurisprudence constante de la chambre de céans, c’est à raison qu’elle ne les a plus invoqués dans le cadre de la présente procédure de recours (ATA/762/2016 du 6 septembre 2016 ; ATA/592/2015 du 9 juin 2015).

9) Par conséquent, rien ne permet de considérer que l’autorité intimée se serait laissée guider par des considérations sans rapport avec les examens ou les prestations de la recourante, ou encore que son appréciation serait partiale ou arbitraire. En prononçant son élimination, la direction de l'IUFE n'a donc pas abusé de son pouvoir d'appréciation.

10) Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante. Aucune indemnité de procédure ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 30 janvier 2017 par Madame A______ contre la décision sur opposition de l’Université de Genève du 12 décembre 2016 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 500.- à la charge de Madame A______

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du
17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral :

-          par la voie du recours en matière de droit public ;

-          par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, s'il porte sur le résultat d'examens ou d'autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d'exercice d'une profession (art. 83 let. t LTF) ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Cyril Mizrahi, avocat de la recourante, ainsi qu'à l'Université de Genève.

Siégeant : Mme Junod, présidente, MM. Dumartheray et Verniory, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :