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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3374/2009

ATA/681/2010 du 05.10.2010 ( MARPU ) , REJETE

Recours TF déposé le 17.11.2010, rendu le 18.11.2010, IRRECEVABLE, 2C_890/2010
Parties : GETI S.A. / VILLE DE CHENE-BOUGERIES, MARTI IMMOBILIER S.A.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3374/2009-MARPU ATA/681/2010

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 5 octobre 2010

 

dans la cause

 

GETI S.A.

contre

VILLE DE CHÊNE-BOUGERIES
représentée par Me Malek Adjadj, avocat

et

MARTI IMMOBILIER S.A., appelée en cause

 



EN FAIT

1. Le 22 juin 2009, la Ville de Chêne-Bougeries (ci-après : la ville) a publié dans la Feuille d'Avis Officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) un appel d'offres en procédure ouverte portant sur des travaux de construction, soit la rénovation et la transformation d'un bâtiment à usage de bureaux administratifs, sis 8 bis, route du Vallon à Chêne-Bougeries. Le montant du marché était estimé à CHF 2'330'000.-.

La date de remise des offres était fixée au 17 août 2009 à 16h30.

Le marché en question était soumis à l’accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 (AIMP - L 6 05) et à la loi fédérale sur le marché intérieur du 6 octobre 1995 (LMI - RS 943.02).

2. La ville a établi un document d'appel d'offres destiné aux entreprises générales et remis aux soumissionnaires.

Le chiffre 1.9 a pour objet les critères d'adjudication et est libellé comme suit :

Le marché sera adjugé au soumissionnaire ayant présenté :

l'offre la plus avantageuse économiquement

(rapport coût-avantage) 30 %

le délai de livraison, ou la possibilité d'occuper le bâtiment

en étapes, le plus court (crédibilité du planning) 20 %

l'organisation du travail et la structure des entreprises

partenaires pour la réalisation 15 %

des choix de matériaux et des techniques de travail

éco-efficients 10 %

des solutions permettant d'abaisser les coûts

d'exploitation et d'entretien 10 %

le respect du cahier des charges et des attentes du maître

de l'ouvrage 5 %

des références en rapport avec l'objet du marché 5 %

la présentation et la clarté de l'offre 5 %

100 % = 100 points

intégration des variantes d'entreprise = 20 points

Maximum des points = 120 points

Le chiffre 1.10 précise les membres du comité de sélection et d’audition (ci-après : le comité). Ainsi, en font partie Madame Marion Garcia, Messieurs Emile Biedermann, Marc Fassbind, Pierre-Yves Favarger, François Perrin et Fabian Spinelli.

3. L'ouverture des offres a eu lieu le 17 août 2009 à 17h00.

Quatre offres ont été déposées, soit :

Beric S.A. (ci-après : Beric), pour le montant de CHF 3'270'000.-

Geti S.A. (ci-après : Geti) pour le montant de CHF 2'528'599,95

Batineg S.A. (ci-après : Batineg), pour le montant de CHF 2'702'795.-

Gini S.A., devenue depuis lors Marti Immobilier S.A. (ci-après : Marti), pour le montant de CHF 2'913'363.-.

Beric et Batineg n'ont pas présenté de variantes, Geti a accompagné son offre de suggestions et Marti a chiffré une variante pour le montant de CHF 112'000.-.

4. Le comité a décidé de recevoir les quatre soumissionnaires retenus. Ces auditions, menées par cinq des six membres du comité, ont eu lieu le 25 août 2009 et ont fait l'objet d'un procès-verbal.

a. D'entrée de cause, Geti a relevé qu'il n'était pas facile de trouver le moyen de développer une offre par espace ou par local, sans avoir les points de repère nécessaires et pour lesquels il avait fallu faire souvent le métrage. Elle avait essayé de répondre en son âme et conscience.

La ville a constaté que des postes manquaient dans l'offre, ce qui rendait difficile de vérifier la crédibilité du prix. Ainsi en allait-il par exemple des aménagements extérieurs et des câblages, au sujet desquels rien de figurait dans le poste « électricité ». Geti a répondu que tout était écrit dans la soumission. Même si c'était difficile à trouver, il fallait faire des choix dans le descriptif.

Les soumissions étaient tombées durant la période de vacances. Réussir à avoir toutes les réponses et les réunir avait déjà été un exploit. Geti n'avait pas pu vraiment interroger chaque entrepreneur. Ceux-ci avaient rendu leurs prix en lui assurant qu'ils avaient tout regardé mais il était possible que des éléments aient été oubliés. Geti ne pouvait pas le savoir avant d'avoir refait un tour de table. La ville a rappelé à ce sujet qu'elle était intéressée à faire appel à une entreprise générale pour éviter des mauvaises surprises. D'un côté, Geti prétendait que le prix était sûr et de l'autre, elle déclarait qu’elle devait encore faire un tour de table pour confirmer ledit prix. La ville voulait être au clair sur le fait qu'en rendant l'offre, Geti s'engageait à construire l’objet tel qu'il était décrit dans le descriptif pour la somme indiquée. Geti a expliqué que la structure de l'organisation de son entreprise voulait qu'à partir du moment où l'adjudication était confirmée, elle refaisait un tour de table avec les sous-traitants et les partenaires afin que ces derniers prennent également leurs responsabilités. Le principe de Geti était d'avoir un temps de réflexion supplémentaire, non pas pour remettre en cause le prix, mais pour que les partenaires et associés puissent prendre leurs responsabilités. La ville a répété qu'elle ne pouvait pas accepter de documents supplémentaires, ni accorder une semaine supplémentaire de réflexion.

A la question de savoir si Geti serait d’accord de s’engager sur le prix proposé au forfait, étant donné qu’elle avait contacté des entreprises et qu’elle affirmait que tout était intégré, l’intéressée a répondu que la solution idéale consisterait à dire qu’elle avait un prix mais qu’elle avait besoin d’une semaine pour réunir les entreprises et faire encore un tour de table. La soumission avait été rendue le jour après avoir reçu les derniers prix. Cela avait été vraiment fait d’arrache-pied mais l’avait confortée de constater que le prix auquel ils (sic) arrivaient était le prix d’estimation des architectes. A la question de savoir si un système de forfait à livre ouvert était envisageable, Geti a répondu que cela pouvait être un plus ou un moins.

b. Marti a confirmé que l'offre et le planning proposés correspondaient au projet qui avait été dessiné par les architectes. Elle avait travaillé avec des partenaires ce qui l'avait amenée vers une variante de développement durable. Le montant de l'offre se situait aux alentours de CHF 2'913'000.-. Le planning des travaux tenait compte d'une logistique et d'une mise en œuvre conformes aux échéances de l'appel d'offres, avec une date de livraison après onze mois, y compris les vacances hivernales. Concernant l'organigramme opérationnel, l'entreprise générale reprenait la réalisation avec une équipe propre et gérée de divers mandataires. Il y aurait sur place un chef de projet accompagné d'un collaborateur.

S'agissant du prix, Marti a expliqué que le calcul avait été fait en deux blocs : le premier correspondait aux rapports et discussions qu’elle avait pu avoir avec les entreprises partenaires et le second concernait les prestations. Il y avait eu un travail de plus d'un mois de métrés, poste par poste, et pour chaque article, l'entreprise avait essayé de calculer un prix. Par rapport à la prestation telle que définie dans le cahier des charges, elle n'avait pas peur de s'engager sur un prix forfaitaire si ceci devait être souhaité.

Beric et Batineg ont également été auditionnées.

5. Suite aux auditions susmentionnées, les membres du comité ont rempli chacun les feuilles des critères.

 

 

 

Dit tableau a été signé par les cinq commissaires ayant participé aux auditions.

6. Le 1er septembre 2009, la ville s'est adressée aux quatre soumissionnaires en les informant que le comité avait proposé au pouvoir adjudicataire l'entreprise Marti pour la réalisation des travaux.

L'adjudication définitive ferait l'objet d'une publication dans la FAO le lundi 7 septembre 2009, ouvrant les voies d'un éventuel recours au Tribunal administratif dans un délai de dix jours.

7. Selon la publication dans la FAO du 7 septembre 2009, la ville a adjugé le marché à Marti.

8. Par acte déposé au greffe du Tribunal administratif le 17 septembre 2009, Geti a déposé un recours contre la décision d’adjudication.

Elle était surprise de n'avoir reçu aucune explication ni motivation avec la décision d'adjudication. Dans d'autres concours soumis à l’AIMP auxquels elle avait participé, l'annonce du résultat avait toujours été accompagnée de tabelles explicatives motivant la décision.

Elle conclut à ce que le Tribunal administratif ordonne à la ville de motiver sa décision, et à être autorisée à compléter son recours dans un délai raisonnable, avec suite de frais de dépens.

9. Le Tribunal administratif a imparti un délai au 15 octobre 2009 à Geti pour compléter son recours.

Le 5 octobre 2009, Geti a relevé que les motivations de la ville ne lui étaient toujours pas connues, ce qui l'empêchait de pouvoir formuler correctement son recours.

Elle a persisté dans ses conclusions initiales, sollicitant notamment l’autorisation de compléter son recours une fois les motivations connues.

10. Par courrier du 2 novembre 2009, la ville a informé le Tribunal administratif que le contrat relatif au marché querellé avait été signé avec Marti le 29 octobre 2009.

11. Dans sa réponse du 16 novembre 2009, la ville s'est opposée au recours.

L'offre de Marti était très précise, comprenant le calcul détaillé - poste par poste - de chaque élément. En revanche, celle de Geti se limitait à trois pages, sans calcul détaillé des différents postes. La différence entre les deux offres était en outre apparue de manière flagrante lors de l'audition du 25 août 2009. A cette occasion, le représentant de Geti avait exposé que ses sous-traitants n'avaient pas été consultés et que tous les éléments de l'appel d'offres figuraient « probablement » dans son offre. Il apparaissait clairement que la soumission chiffrée de Geti ne prenait pas en compte tous les éléments requis et se fondait sur une offre qui devait encore faire l'objet d'un nouveau tour de table. Le représentant de Geti n'avait ainsi pas hésité à demander une semaine supplémentaire pour confirmer son offre.

Par ailleurs, malgré les questions de la ville, Geti n'avait pas été en mesure d'indiquer sous quel poste étaient visées certaines prestations demandées.

En revanche, lors de son audition, Marti avait démontré le travail effectué sur la fixation des prix : elle avait développé une offre point par point, calculée avec précision et s’assurant de la fiabilité de ses partenaires.

Ces deux éléments s'étaient ressentis lors de la notation. La ville a produit le rapport de synthèse du 25 août 2009 ainsi que le détail de la notation effectuée par chacun des cinq membres du comité.

A teneur de l'art. 45 du règlement sur la passation des marchés publics du 17 décembre 2007 (RMP - L 6 05.01), l'autorité adjudicatrice devait rendre une décision d'adjudication sommairement motivée. En l'espèce, les évaluations des différentes offres avaient été faites conformément aux critères d'adjudication et aucun grief ne pouvait être retenu à l'encontre de la ville.

Le choix des critères d’adjudication était laissé à la libre appréciation de l'autorité adjudicatrice. En particulier, elle était libre de choisir la méthode qu'elle entendait utiliser pour noter les offres qui lui étaient soumises (ATA 486/2009 du 29 septembre 2009).

Le prix n'était qu'un critère d'adjudication parmi les autres et ce n'était pas nécessairement l'offre la meilleure marché qui obtenait l'adjudication (ATA/176/2007 du 17 avril 2007 et les réf. citées). Outre le prix, d'autres critères pouvaient être pris en considération tels que la qualité, les délais, l'adéquation aux besoins, le service après-vente, l'esthétique, l'organisation, le respect de l'environnement. En l'espèce, la condition du prix mentionnait explicitement la comparaison du rapport coût-avantage en parlant d'offre la plus avantageuse économiquement. A cet égard, la crédibilité de l'offre et la possibilité concrète pour l'adjudicateur de respecter celle-ci était primordiale pour déterminer du rapport coût-avantage ainsi qu'examiner l'offre économiquement la plus avantageuse.

Il était clairement ressorti de l'offre déposée - et surtout de l'audition des soumissionnaires - que Geti n'avait pas fourni une soumission dont le prix pouvait être garanti avec certitude. Dans ces circonstances, la ville était légitimée à pénaliser Geti sur le critère prix, le rapport coût-avantage n'étant pas garanti.

Elle conclut au rejet du recours avec suite de frais et dépens.

12. Geti a complété son recours le 30 janvier 2010.

La ville n'avait pas hésité à signer le contrat alors même qu'une procédure était en cours. Elle devrait assumer seule le fait d'avoir décidé de passer outre la procédure de recours, ce d'autant plus qu'en ne motivant pas sa décision, contrairement aux obligations légales, elle avait empêché Geti de déposer un recours motivé, avec, le cas échéant, une demande de restitution de l'effet suspensif.

Nonobstant les documents et explications fournis par la ville, elle n'avait toujours pas obtenu un commencement de motivation.

L'attribution du marché à Marti était arbitraire, non rationnelle et basée sur une procédure de décision insuffisante, dont les motivations étaient soit inexistantes, soit contestables car contraires à la loi.

L’analyse des critères d’adjudication l’amenait aux constations suivantes :

Bien qu'ayant formé l'offre la plus avantageuse économiquement, elle s'était vu attribuer le plus petit score (15 points) alors qu'il s'agissait du critère dont la pondération était la plus importante. Une telle attribution arbitraire des points avait pour conséquence de condamner presque définitivement son offre. Inversement, Marti s'était vu attribuer le second meilleur score (25 points), alors que son offre était la plus onéreuse.

Elle contestait que son offre comporterait des points flous et des incertitudes alors que celle de Marti serait détaillée en tous points. En particulier, elle n'avait jamais demandé un délai supplémentaire ni laissé entendre d'une quelconque façon que son offre manquait de fiabilité.

Aucun document versé à la procédure ne permettait d'expliquer pour quels motifs l'offre de Marti resterait la plus avantageuse économiquement alors qu'elle était la plus chère de toutes.

S'agissant du délai d'exécution, la ville avait attribué pour ce critère le maximum de points à l’entreprise qui avait annoncé un délai de huit mois totalement utopique et le second score, soit 15 points, à Marti qui avait annoncé un délai de onze mois difficile à tenir d'un point de vue objectif.

Quant au troisième critère de jugement, il avait donné lieu à l'attribution du score maximal à Marti alors que celle-ci n'avait pas communiqué les renseignements relatifs à l'organisation du travail et la structure des entreprises partenaires, exigences pourtant formulées de manière impérative par la ville.

Elle obtenait donc un total de 33 points pour les trois premiers critères d’adjudication alors que Marti en obtenait 55. Il lui était donc impossible de reprendre le dessus avec les points - peu nombreux - attribués aux cinq critères restants.

S’agissant en particulier du critère « présentation et clarté de l’offre », elle avait obtenu le score le plus bas en raison du fait que les prix n’auraient pas été formulés de la même façon que Marti et que l’offre de cette dernière serait plus complète. Or, à ce sujet, la ville avait uniquement émis des souhaits et aucune exigence contraignante.

Elle s’est également élevée contre le fait que le procès-verbal d’audition du 25 août 2009 n’avait pas été signé, ce qui constituait une violation de l’art. 40 RMP conduisant à l’annulation de la décision d’adjudication.

Il apparaissait qu'au stade des auditions déjà, les dés étaient jetés puisque les personnes en charge de l'audition des concurrents étaient venues à la rescousse de Marti lorsque celle-ci s'enfonçait par des réponses floues ou de nature à la prétériter alors qu'il n’en avait pas été de même à l'égard des autres concurrents.

Enfin, elle constatait que son offre n'avait pas fait l'objet d'une décision d'exclusion ce qui aurait été possible en application de l'art. 42 al. 1 let. a RMP. La ville n'était par conséquent pas recevable à venir prétendre aujourd'hui que son offre était incomplète et qu'elle ne satisfaisait pas aux exigences et au cahier des charges.

La ville avait violé les principes régissant l'adjudication des marchés publics, en particulier les art. 16 RMP (non discrimination et égalité de traitement), 43 RMP (critères d'adjudication) et 45 RMP (obligation de motiver la décision d'adjudication).

Forte de la conviction que c'était de manière totalement arbitraire que l'adjudication du marché s'était faite en faveur de Marti, Geti sollicitait la restitution de l'effet suspensif au recours et à ce qu'il soit ordonné à la ville d'interrompre toutes démarches entreprises consécutivement à l'adjudication du marché public à Marti et ce, sous la menace des sanctions prévues à l'art. 292 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0).

Elle conclut principalement à l’annulation de la décision d’adjudication publiée dans la FAO du 7 septembre 2009, à l’annulation du contrat conclu le 29 octobre 2009 entre la commune de Chêne-Bougeries et Marti et à ce que lui soit attribué le marché public pour lequel elle avait soumissionné le 17 août 2009, avec suite de frais et dépens. Subsidiairement, elle conclut à ce qu’il soit dit et constaté que la décision d’adjudication publiée dans la FAO du 7 septembre 2009 viole les dispositions relatives à la passation des marchés publics et à la réserve de ses droits de demander à la commune de Chêne-Bougeries la réparation du dommage qu’elle lui a causé en agissant de manière illicite, avec suite de frais et dépens.

13. Invitée à se déterminer sur la question de l'effet suspensif, la ville a conclu à son rejet dans ses observations du 15 février 2010.

14. Le 17 février 2010, le Tribunal administratif a appelé en cause Marti lui impartissant un délai pour faire valoir ses observations.

15. Marti a présenté sa réponse le 25 février 2010, concluant au rejet de la requête d'effet suspensif pour les motifs exposés par la ville.

Elle s'est également déterminée sur les éléments mentionnés par Geti dans son complément de recours du 30 janvier 2010.

Dans le cadre de l’appel d’offres, elle avait proposé une variante « développement durable » afin de satisfaire au label « Minergie ». Le projet actuellement en construction répondait au standard « Minergie ».

L’offre avait été élaborée principalement sur la base d’un partenariat avec les entreprises présentées lors de la séance du 25 août 2009. A l’exception des lots de traitement de façades et de plâtrerie qui étaient en cours de mise au point technique, les prestations avaient été adjugées aux entreprises partenaires annoncées. L’organisation interne de l’entreprise et l’organigramme opérationnel du projet avaient été présentés au maître de l’ouvrage lors de la réunion du 25 août 2009.

Le planning des travaux proposés comptait onze mois, comprenant les vacances hivernales. Le contrat du 29 octobre 2009 était d'ores et déjà exécuté à 45 % et il n'y avait aucune raison de bloquer les travaux en cours.

16. Par décision du 3 mars 2010, la présidente du Tribunal administratif a rejeté, dans la mesure où elle avait un objet, la demande de restitution de l'effet suspensif, respectivement de mesures provisionnelles.

17. Le 10 juin 2010, le Tribunal administratif a tenu une audience de comparution personnelle et d’enquêtes au cours de laquelle il a entendu M. Perrin à titre de renseignement.

Celui-ci a confirmé que, bien que faisant partie du comité, il n’avait pas participé à la séance d’audition du 25 août 2009 et il n’avait pas lu le procès-verbal y relatif. Il n’avait pas pris connaissance des tableaux récapitulatifs de la notation des critères d’adjudication. En résumé, il n’avait pas suivi du tout la procédure d’adjudication. Avant la séance du 25 août 2009, il avait formulé trois demandes à Monsieur Pierre Robyr, mais il ne savait pas si celles-ci avaient été honorées.

En sa qualité de membre du comité, il n’avait pas été avisé que les travaux étaient adjugés à Marti. En revanche, il l’avait été en tant que conseiller municipal lors d’une séance de commission des bâtiments et en tant que citoyen de la ville. Il n’avait pas demandé au comité de justification concernant l’adjudication.

Geti a précisé que lors de l’audition du 25 août 2009, elle n’avait pas été renseignée sur le fait qu’un procès-verbal serait établi et elle n’avait pas reçu ce document.

Marti a déclaré qu’elle avait le souvenir d’avoir été informée de cette question. Elle n’avait pas demandé le procès-verbal et elle ne se souvenait pas de l’avoir reçu.

Les représentants de la ville ont précisé que les membres du comité ayant participé aux auditions du 25 août 2009 n’avaient pas signé le procès-verbal mais en revanche, ils avaient apposé leur signature sur le tableau de synthèse des notations. Ils ne pouvaient pas répondre à la question de savoir la date à laquelle le procès-verbal des auditions avait été établi.

A la demande de Geti, un délai lui a été imparti pour présenter ses observations et des pièces complémentaires ainsi qu’un délai à la ville pour ses observations sur le fond.

Marti n’a pas sollicité de délai ni d’acte d’instruction complémentaire.

18. Le 30 juin 2010, Geti a présenté ses observations.

Lors de son audition, M. Perrin avait admis avoir formulé trois demandes à M. Robyr avant la séance du 25 août 2009 et déclaré ne pas savoir si celles-ci avaient été honorées. Parmi les requêtes de celui-là figurait celle que soit obtenue, avant signature du contrat, la liste complète de tous les mandataires de l’entreprise générale. Or, cette exigence n’avait pas été respectée par la ville puisque le contrat avait été signé avec Marti sans que l’identité des mandataires de l’entreprise générale ne soit connue.

M. Perrin avait également confirmé qu’il n’avait été informé de l’adjudication des travaux à Marti qu’à l’occasion d’une séance du conseil municipal et qu’il ne l’avait pas été précédemment en qualité de membre du comité. Pareille manière de procéder en disait long sur la façon dont la décision d’adjudication avait été prise ; de surcroît, la procédure était contraire à l’art. 2.21 du dossier d’appel d’offres qui précisait que la sélection finale d’une entreprise générale serait soumise au conseil municipal pour approbation. Ce n’était que le 17 septembre 2009 que le conseil municipal de la ville avait été informé de la décision d’adjudication, soit postérieurement à l’adjudication elle-même. A cela s’ajoutait que la décision d’adjudication publiée dans la FAO ne mentionnait pas le montant de l’adjudication et cela contrairement à l’art. 52 du RMP.

De même, la ville avait clairement violé les dispositions de l’art. 40 RMP en ne renseignant pas les soumissionnaires qu’un procès-verbal de l’audition du 25 août 2009 serait établi et signé.

L’attribution d’un marché à une entreprise dont l’offre était de 15 % plus haute que celle du moins-disant violait de façon flagrante le but premier des art. 1 et ss AIMP ainsi que les art. 16, 43 et 45 RMP.

Pour le surplus, Geti reprenait ses arguments précédemment développés sur le fait que son offre avait été acceptée lors de l’ouverture publique du 17 août 2009. Si la ville estimait qu’il manquait un ou plusieurs postes, elle se devait de faire application de l’art. 39 al. 2 RMP et ajuster l’offre de Geti, ce qu’elle n’avait pas fait.

En marge des nombreuses violations commises par la ville, il devait être rappelé que celle-ci n’avait pas demandé non plus aux concurrents de signer le document « engagement à respecter l’égalité entre hommes et femmes » prescrit par les art. 11 AIMP et 21 RMP.

Enfin, le mode de calcul de la « moyenne » opéré par la ville procédait de calculs inexacts et n’était que de la pure cosmétique comptable. Elle versait aux débats un tableau incluant le détail des calculs effectués par elle-même, desquels il ressortait clairement que ceux auxquels s’était livrée la ville étaient tronqués.

Elle a persisté dans ses conclusions du 30 janvier 2010.

19. La ville a présenté ses observations le 15 juillet 2010.

Geti n’avait pas sollicité la restitution de l’effet suspensif. Le contrat avait été conclu. Partant, en tant que Geti demandait autre chose que la constatation d’un éventuel caractère illicite de la décision d’adjudication, son recours devait être déclaré irrecevable.

Elle s’est déterminée comme suit sur les griefs invoqués par Geti :

A teneur de l’art. 45 RMP, l’autorité adjudicatrice devait rendre une décision d’adjudication sommairement motivée. Geti avait parfaitement compris les motifs pour lesquels son offre n’avait pas été retenue ainsi que cela ressortait de ses mémoires des 30 janvier et 30 juin 2010. Il n’existait aucun vice de procédure sur cette question.

La publication dans la FAO du 7 septembre 2009 omettait d’indiquer le montant de l’adjudication. Toutefois, le montant total des travaux était mentionné dans la publication de sorte que la somme concernée par les marchés publics pouvait ainsi être déterminée par les tiers. Cette omission n’avait eu aucune influence sur le fond de la décision d’adjudication et n’avait pas empêché Geti de saisir le Tribunal administratif. Le recours ne saurait être admis pour ce motif.

Les auditions étaient prévues et mentionnées dans le dossier d’appel d’offres du 15 juin 2009. Lors de la séance du 25 août 2009, les parties avaient été informées du fait qu’un procès-verbal serait établi. Les membres présents du comité avaient signé le tableau de synthèse des notations attestant de leur présence lors de tous les actes relatifs à cette adjudication. Le contenu du procès-verbal préparé n’avait en outre été contesté par aucune des parties. Dans ces circonstances, le fait que les membres du comité n’aient pas signé le procès-verbal comme ils auraient dû le faire en application de l’art. 40 al. 2 RMP n’était qu’un vice mineur qui n’avait eu aucune influence sur la procédure.

Geti se plaignait que le conseil municipal ne se soit pas prononcé sur la décision d’adjudication. La ville peinait à voir de quel vice juridique se plaignait la recourante. Le point 2.21 figurant dans le dossier d’appel d’offres ne saurait sérieusement être interprété en ce sens qu’il imposait au conseil municipal in corpore de prendre la décision d’adjudication. Dans cette hypothèse, à quoi donc aurait servi le comité ? Si le conseil municipal avait pu, avec des critères politiques, attribuer le marché à l’entreprise qu’il souhaitait, tous les critères objectifs d’évaluation seraient tombés à faux. Le point 2.21 précité ne pouvait que signifier que le contrat qui serait conclu devait être soumis au conseil municipal pour que ce dernier vote le crédit d’investissement nécessaire, soumis ensuite à la procédure référendaire.

Le fait que les demandes de l’un des membres du comité, qui n’avait finalement pas participé au processus d’évaluation, n’avaient pas été respectées ne constituait pas une violation de la procédure d’adjudication. La ville ne voyait pas quelle règle sur les marchés publics serait touchée par ce grief qui n’était pas pertinent.

De même, aucune violation de l’art. 21 RMP (égalité homme/femme) n’était sérieusement alléguée par Geti.

Geti se plaignait d’une violation de l’égalité de traitement et d’arbitraire, au motif qu’elle avait l’offre la moins-disante. A cet égard, l’autorité était libre de choisir la méthode qu’elle entendait utiliser pour noter les offres qui lui étaient soumises. La nouvelle grille d’évaluation effectuée par Geti elle-même, selon sa propre évaluation des dossiers, ne lui était d’aucun secours. La ville s’était fondée sur une grille d’évaluation et les critères publiés avaient été appliqués avec soin. Enfin, selon l’art. 43 al. 3 RMP, le critère du moins-disant n’était pas absolu. Durant son audition, Geti avait exposé que le prix ne pouvait être garanti avec certitude. Dans ces circonstances, la ville était légitimée à sanctionner le critère « prix » au vu du peu de fiabilité de celui-ci.

Le recours devait être rejeté dans la mesure de sa recevabilité, avec suite de frais et dépens.

20. Sur quoi, comme annoncé lors de l’audience du 10 juin 2010, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Le marché offert est soumis notamment à l’AIMP, au RMP, à la loi autorisant le Conseil d’Etat à adhérer à l’AIMP du 12 juin 1997 - L-AIMP - L 6 05.0 ; art. 55 let. c et 56 al. 1 RMP) ainsi qu’à la LMI.

La décision d’adjudication a fait l’objet d’une publication dans la FAO le 7 septembre 2009. Le délai de dix jours venait à échéance le 17 septembre 2009.

Dès lors, le recours qui respecte le délai légal de dix jours des art. 15 al. 2 AIMP et 56 al. 1 RMP est recevable.

2. a. Selon l’art. 65 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), l’acte de recours contient sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant. En outre, il doit contenir l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. A défaut, un bref délai pour satisfaire à ces exigences est fixé au recourant, sous peine d’irrecevabilité (art. 65 al. 2 LPA).

Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, il convient de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait que ces dernières ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est pas en soi un motif d’irrecevabilité, pourvu que le tribunal et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/496/2008 du 23 septembre 2008 ; ATA/1/2007 du 9 janvier 2007 ; ATA/118/2006 du 7 mars 2006 ; ATA/775/2005 du 15 novembre 2005 et la jurisprudence citée). Une requête en annulation d’une décision doit par exemple être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a de manière suffisante manifesté son désaccord avec la décision, ainsi que sa volonté qu’elle ne développe pas d’effets juridiques (P. MOOR, Droit administratif, Vol. II, Berne 2002, 2ème éd., p. 674 n. 5.7.1.4).

b. Quant à l’exigence de motivation de l’art. 65 al. 2 LPA, elle a pour but de permettre à la juridiction administrative de déterminer l’objet du litige qui lui est soumis et de donner l’occasion à la partie intimée de répondre aux griefs formulés à son encontre (ATA/496/2008 ; ATA/1/2007 ; ATA/775/2005 déjà cités ; ATA/179/2001 du 13 mars 2001 ; Société T. du 13 avril 1988; P. MOOR, op. cit., pp. 672-674 n. 5.7.1.3). Elle signifie que le recourant doit expliquer en quoi et pourquoi il s’en prend à la décision litigieuse (ATA/23/2006 du 17 janvier 2006 ; cf. ég. ATF 130 I 312 rendu à propos de l’ancien art. 108 al. 2 OJ). Il ne suffit par exemple pas d’affirmer qu’une amende administrative est injustifiée sans expliquer la raison de ce grief, ou de reprocher simplement à une décision de constituer un excès du pouvoir d’appréciation de l’autorité qui l’a rendue (ATA précités). La motivation doit être en relation avec l’objet du litige et le recourant se référer à des motifs qui entrent dans le pouvoir d’examen de l’autorité de recours (B. BOVAY, Procédure administrative, 2000, p. 387). Le Tribunal fédéral a pour sa part confirmé qu’il faut pouvoir déduire de l’acte de recours sur quels points et pour quelles raisons la décision entreprise est contestée, ce que le recourant demande et sur quels faits il entend se fonder. Une brève motivation est suffisante à condition toutefois que les motifs avancés se rapportent à l’objet de la contestation (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.143/2005 du 21 avril 2005). Encore faut-il que cette motivation soit topique, à savoir qu’il appartient au recourant de prendre position par rapport au jugement (ou à la décision) attaqué et d’expliquer en quoi et pourquoi il s’en prend à celui-ci (ATF 131 II 470, consid. 1.3 p. 475 [ég. rendu à propos de l’ancienne LOJ] ; Arrêt du Tribunal fédéral I 134/03 du 24 février 2004 ; ACOM/6/2006 du 15 février 2006). Enfin, la simple allégation que la décision attaquée serait erronée est insuffisante, la motivation devant être en relation avec l’objet du litige. Ce n’est que si les conclusions ou la motivation existent, sans avoir la clarté nécessaire, que l’autorité doit impartir un délai de correction au recourant (B. BOVAY, op. cit. p. 388).

En l’espèce, bien que la recourante n’ait pas pris de conclusions formelles dans son acte initial du 17 septembre 2009, la lecture de son recours, même fort succinct, permet de comprendre qu’elle conclut à l’annulation de la décision qui adjuge le marché à Marti.

Il s’ensuit qu’à cet égard également, le recours est recevable.

3. a. La qualité pour recourir appartient à toute personne qui est touchée directement par une décision et a un intérêt personnel digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée (art. 60 let. b LPA). Tel est le cas de celle à laquelle la décision attaquée apporte des inconvénients qui pourraient être évités grâce au succès du recours, qu'il s'agisse d'intérêts juridiques ou de simples intérêts de faits (ATA/155/2010 du 9 mars 2010 et les réf. citées).

En l'espèce, le contrat ayant été conclu avec l’adjudicataire (art. 46 RMP), il convient de se demander si la recourante conserve un intérêt digne de protection au maintien du recours.

b. Selon l'art. 18 al. 2 AIMP lorsque le contrat est déjà conclu, l'autorité qui admet le recours ne peut que constater le caractère illicite de la décision.

En tant que soumissionnaire évincée, et bien que le contrat ait été déjà conclu, la recourante conserve un intérêt actuel à recourir contre la décision d’adjudication au sens de l’art. 60 let. b LPA, son recours étant à même d’ouvrir ses droits à une indemnisation (ATF 125 II 86, consid. 5 b p. 96).

Elle dispose donc de la qualité pour recourir (ATA/390/2010 du 18 mai 2010).

c. Par ailleurs, selon l'arrêt du Tribunal fédéral 2P.307/2005 du 24 mai 2006, le recourant qui conteste une décision d'adjudication et qui déclare vouloir maintenir son recours après la conclusion du contrat conclut, au moins implicitement, à la constatation de l’illicéité de l’adjudication, que des dommages-intérêts soient réclamés ou non.

d. Cela étant, ce n’est que le 30 janvier 2010 que la recourante a pris des conclusions pour réserver ses droits en relation avec le dommage qu’elle prétend avoir subi. En l’état, la recevabilité de ces conclusions souffre de rester ouvertes.

4. La recourante se plaint tout d'abord d'une violation de son droit d'être entendue, la décision attaquée n'étant pas suffisamment motivée.

Le droit à la motivation d’une décision est une garantie constitutionnelle de caractère formel qui est un aspect du droit d’être entendu (art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) ; ATF 126 I 97 consid. 2 pp. 102-103 ; 120 Ib 379 consid. 3b p. 383 ; 119 Ia 136 consid. 2b p. 138 et les arrêts cités). Cette exigence vise à ce que le justiciable puisse comprendre la décision dont il est l’objet et exercer ses droits de recours à bon escient. Elle vise également à permettre à l’autorité de recours d’exercer son contrôle. Il suffit que l’autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l’ont guidée et sur lesquels elle fonde sa décision, de manière à ce que l’intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l’attaquer en connaissance de cause. Elle n’a pas l’obligation d’exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuve et griefs invoqués par les parties, mais peut se limiter à ceux qui, sans arbitraire, apparaissent pertinents (ATF 124 II 146 consid. 2 p. 149 ; 122 IV 8 consid. 2c p. 14 ; ATA/176/2007 déjà cité.).

En matière de marchés publics, cette obligation se manifeste par le devoir qu’a l’autorité d’indiquer au soumissionnaire évincé les raisons du rejet de son offre (J.-B. ZUFFEREY/C. MAILLARD/N. MICHEL, Le droit des marchés publics, Fribourg 2002, p. 256).

En l’espèce, il est vrai que la décision attaquée ne comporte aucune motivation, et qu’à ce titre, elle viole l’art. 29 al. 2 Cst. Cela étant, dans le cadre de la procédure de recours, la ville a produit tous les documents utiles et justifiés de sa motivation. Dans la mesure où le tribunal de céans connaît de la présente cause avec un plein pouvoir d’examen, soit le même que celui de l’autorité intimée, il apparaît que le vice de motivation a été réparé (ATA/176/2007 op. cit.).

En conséquence, la décision n’aurait pas pu être annulée pour ce motif.

5. a. Aux termes de son art. 1er, la LMI garantit à toute personne ayant son siège ou son établissement en Suisse, l’accès libre et non discriminatoire aux marchés afin qu’elle puisse exercer une activité lucrative sur tout le territoire suisse. La LMI ne constitue qu’une loi-cadre orientée vers la protection des soumissionnaires externes et l’unification du marché suisse. Elle ne vise pas à s’immiscer dans les réglementations cantonales, mais se borne à exiger que ces dernières ne constituent pas une entrave au libre-échange des services et des marchandises ainsi qu’à la liberté des personnes de s’établir et de circuler (Message du Conseil fédéral du 23 novembre 1994 concernant la LMI, FF 1995 I p. 1248-1249).

b. Selon l’art. 5 al. 1 LMI, les marchés publics des cantons, des communes et des autres organes assumant des tâches cantonales ou communales sont régis par le droit cantonal ou intercantonal ; ces dispositions, ainsi que les décisions fondées sur elles, ne doivent pas discriminer les personnes ayant leur siège ou leur établissement en Suisse de manière contraire à l'art. 3 LMI qui fixe les conditions auxquelles des restrictions à la liberté d’accès au marché de soumissionnaires externes peuvent être prévues.

c. La LMI comporte ainsi certaines garanties visant principalement à protéger les offreurs externes. Elle fixe un nombre limité de principes fondamentaux dont la Confédération, les cantons et les communes doivent tenir compte tant dans la pratique que dans leur activité législative (Message du Conseil fédéral du 23 novembre 1994 concernant la LMI, FF 1995 I p. 1231).

d. Les cantons, les communes et les autres organes assumant des tâches cantonales et communales veillent à ce que les projets de marchés publics de grande importance portant sur des fournitures, des services ou des travaux, de même que les critères de participation et d’attribution du marché, soient publiés dans un organe officiel. Ils tiennent compte à cet égard des engagements internationaux pris par la Confédération (art. 5 al. 2 LMI). Cette disposition institue une obligation de transparence consistant à garantir un degré de publicité adéquat permettant une ouverture du marché à la concurrence, ainsi que le contrôle de l’impartialité des procédures d’adjudication. Lorsqu’un marché doit faire l’objet d’un appel d’offres selon l’art. 5 al. 2 LMI, le pouvoir adjudicateur est tenu d’énumérer par avance tous les critères d’aptitude et d’adjudication qui seront pris en considération (E. CLERC, Commentaire de l’art. 5 LMI, in Droit de la concurrence : commentaire romand, nos 144-146 pp. 1368-1369 ss.). Il doit aussi spécifier clairement d’emblée l’ordre de priorité des critères, de telle sorte que la manière dont l’évaluation a été effectuée par le pouvoir adjudicateur puisse être retracée par l’autorité de recours (RDAF 2000 p. 181, consid. 4c et 5a).

6. Selon l'art. 16 al. 1 et 2 AIMP, le recours contre une décision d'adjudication peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès ou l'abus de pouvoir d'appréciation, et pour constatation inexacte ou incomplète de faits pertinents. Le grief d'inopportunité ne peut pas être invoqué.

7. L’AIMP a pour objectif l’ouverture des marchés publics (art. 1 al. 1 AIMP). Il poursuit plusieurs objectifs, soit assurer une concurrence efficace entre les soumissionnaires (art. 1 al. 3 let. a AIMP), garantir l’égalité de traitement entre ceux-ci et assurer l’impartialité de l’adjudication (art. 1 al. 3 let b AIMP), assurer la transparence des procédures de passation des marchés (art. 1 al. 3 let. c AIMP) et permettre l’utilisation parcimonieuse des données publiques (art. 1 al. 3 let. d AIMP). Ces principes doivent être respectés notamment dans la phase de passation des marchés (art. 11 AIMP, notamment 11 let. a et b AIMP).

8. Geti critique la notation des critères d’adjudication. Sur cette question, il est difficile de suivre l’argumentation de la recourante, notamment les notes auxquelles elle se réfère dans ses observations du 3 janvier 2010, car celle-ci n’a pas pris la peine de préciser à quel relevé de notation elle fait allusion. Or, dans le cadre de la procédure, la ville a versé aux débats les relevés individuels des membres du comité ainsi qu’un relevé récapitulatif. La recourante était donc en mesure de développer son argumentation sur la base de documents en précisant auxquels elle se référait.

L’autorité adjudicatrice est libre de choisir la méthode qu’elle entend utiliser pour noter les offres qui lui sont soumises. La loi ne lui impose aucune méthode de notation particulière. Le choix de la méthode de notation relève ainsi du pouvoir d’appréciation de l’autorité adjudicatrice, sous réserve d’abus ou d’excès du pouvoir d’appréciation (Arrêt du Tribunal fédéral 2P/172/2002 du 10 mars 2003 consid. 3.2 ; ATA/176/2007 déjà cité, consid. 8 ; D. ESSEIVA, note ad S12 in DC 2/2003, p. 62). L’opportunité du choix de la méthode de notation ne peut être revue par l’autorité de recours (cf. art. 16 al. 2 AIMP). De surcroît, aucune norme n’impose à l’autorité adjudicatrice de faire connaître à l’avance la méthode de notation qu’elle utilisera (Arrêt du Tribunal fédéral 2P/172/2002 du 10 mars 2003 consid. 2.3 ; Arrêt du Tribunal administratif vaudois du 26 janvier 2000 in DC 2/2001, p. 67 et note de D. ESSEIVA ; O. RODONDI, Les critères d’aptitude et les critères d’adjudication dans les procédures de marchés publics, RDAF I 2001, p. 406).

Selon l’art. 43 RMP, l’évaluation est faite selon les critères prédéfinis conformément à l’art. 24 et énumérés dans l’avis d’appel d’offres et/ou les documents d’appel d’offres (al. 1). Le résultat de l’évaluation des offres fait l’objet d’un tableau comparatif (al. 2).

En l’espèce, l’autorité adjudicatrice a fixé des critères d’adjudication et indiqué la pondération de chacun d’entre eux. Les critères choisis et le poids qui leur est donné sont pertinents et ne prêtent pas le flanc à la critique. L’élaboration, par le comité, d’une liste d’éléments permettant d’apprécier chacun des critères d’une manière uniforme, pouvant être qualifiée de grille d’évaluation des critères, est conforme à la pratique. A cet égard, l’analyse de cette grille d’évaluation montre qu’aucun des éléments y figurant n’est exorbitant aux critères annoncés (ATA/338/2010 du 18 mai 2010 et les réf. citées).

Le Tribunal administratif relèvera encore que les pièces produites par l’autorité intimée permettent de vérifier que les membres du comité présents à la séance d’audition du 25 août 2009 ont effectué une appréciation individuelle des soumissionnaires, en fonction des critères d’adjudication publiés et que le résultat de l’évaluation des offres a fait l’objet d’un tableau récapitulatif.

Il s’ensuit que la procédure prévue par l’art. 43 al. 1 et 2 RMP a été parfaitement respectée par la ville.

9. La recourante soutient que son offre devait être considérée comme la plus avantageuse, dès lors qu’elle était moins élevée que celle de l’adjudicataire. Ce faisant, elle discute l’appréciation du critère du prix.

Aux termes de l’art. 43 al. 3 RMP, le marché est adjugé au soumissionnaire ayant déposé l'offre économiquement la plus avantageuse, c'est-à-dire celle qui présente le meilleur rapport qualité/prix. Outre le prix, les critères suivants peuvent notamment être pris en considération : la qualité, les délais, l'adéquation aux besoins, le service après-vente, l'esthétique, l'organisation, le respect de l'environnement.

Selon l’al. 4, l’adjudication de biens largement standardisés peut intervenir selon le critère du prix le plus bas.

Ainsi, en dehors de l’hypothèse du marché portant sur des biens largement standardisés, non applicable en l'espèce, le prix est un critère d’adjudication parmi d’autres. Il en découle premièrement que ce n’est pas nécessairement l’offre la meilleure marché qui obtiendra l’adjudication. Deuxièmement, chacun des critères doit faire l’objet d’une appréciation, en principe sous forme de notation, l’adjudication étant prononcée en faveur de l’offre qui aura obtenu le plus grand nombre de points (cf. D. ESSEIVA, note ad S10-S13 in DC 2/2002, p. 76).

Il résulte de la jurisprudence développée en relation avec l’art. 43 RMP -dont la teneur est largement identique à celle de l’art. 39a RMP - que l’offre économiquement la plus avantageuse ne signifie pas qu’elle doit être la moins chère. Ce n’est qu’en présence de biens standardisés que l’adjudicataire peut alors se fonder exclusivement sur le critère du prix (ATA/278/2002 du 26 novembre 2002).

En l’espèce, les travaux de rénovation et de transformation ne sont pas des biens standardisés. La qualité du travail et la spécificité de l’organisation et de l’expérience sont des éléments essentiels à la bonne réalisation des travaux. Dans ces circonstances, l’autorité adjudicatrice ne pouvait, sauf à violer les dispositions sur le droit des marchés publics, se fonder exclusivement sur le critère du prix.

En matière de prix en particulier, la notation s’effectue en fonction de règles qui définissent la manière de transformer des informations formulées en francs (le prix) en note (cf. D. ESSEIVA, note ad S10-S13 in DC 2/2002, p. 76). La pratique démontre qu’il existe une multitude de méthodes de notation qui permettent d’arriver à des résultats très différents, d’où un risque de manipulations de la part de l’adjudicateur (cf. D. ESSEIVA, L’évolution du droit des marchés publics de construction, 2002, p. 9 s.). Sachant que toutes les méthodes de notation présentent un aspect critiquable, l’autorité de recours n’interviendra cependant que dans la mesure où la méthode retenue est arbitraire.

10. S’agissant du montant des offres, il n’est pas contestable que celui de Marti est supérieur à celui de la recourante. Comme vu ci-dessus, le prix n’est pas un élément décisif en lui-même. L’art. 43 al. 3 RMP est tout à fait clair sur ce point : le marché est adjugé au soumissionnaire ayant déposé l’offre économiquement la plus avantageuse, c’est-à-dire celle qui représente le meilleur rapport qualité/prix. Ainsi, outre le prix, différents critères doivent être pris en considération tels que la qualité, les délais, l’adéquation aux besoins, le service après-vente, l’esthétique, l’organisation, le respect de l’environnement, etc.

En l’espèce, le critère de l’offre économiquement la plus avantageuse est limité à l’aspect coût/avantage, certains des autres éléments retenus par l’art. 43 al. 3 précité constituant des critères d’adjudication en tant que tels.

Il est établi que lors de son audition par le comité, le représentant de Geti n’a pas été en mesure de confirmer les prix avancés dans la soumission. Ses explications liées à la période de vacances ne sont pas pertinentes. En effet, en prenant la décision de soumissionner dans le marché public concerné, il appartenait à la recourante de prendre toutes les mesures nécessaires et utiles pour présenter dans le délai imparti une soumission complète et précise. Si la pratique de refaire un tour de table avant de chiffrer définitivement la soumission n’est en tant que telle pas critiquable, il n’est en revanche pas admissible que cette ultime mesure de vérification intervienne au-delà du délai imparti par l’autorité adjudicatrice pour le dépôt des soumissions.

Dans ces conditions, la ville était fondée à ne pas retenir une offre moins-disante certes en l’état, mais dont elle ne pouvait avoir l’assurance qu’elle serait respectée. Or, sur ce point, Marti a été tout à fait clair, de même que sur la question du forfait.

Compte tenu de ces approches fondamentalement différentes entre les deux soumissionnaires, l’on ne saurait reprocher à la ville de ne pas s’être attachée au seul critère du montant de l’offre pour l’attribution des points de ce premier critère d’adjudication.

11. S’agissant du second critère d’adjudication, soit la question du délai d’exécution, il est établi que Marti a annoncé un délai de onze mois alors que la recourante celui de treize mois. Il est dès lors logique que celle-là ait obtenu davantage de points sur cette question que celle-ci. Au demeurant, l’avancement des travaux tel qu’énoncé par Marti démontre que le délai de onze mois pouvait être parfaitement respecté.

12. La recourante discute également le résultat du critère organisationnel.

A cet égard, force est de constater que les déclarations de la recourante lors de la séance d’audition du 25 août 2009 sont peu précises. En particulier - et contrairement à l’adjudicataire - la recourante n’a produit aucun organigramme opérationnel qui permettrait de se faire une idée exacte du fonctionnement de l’entreprise.

13. L’appréciation des autres critères d’adjudication ne sont pas discutés par la recourante, laquelle, en dernière analyse, entend substituer sa propre évaluation à celle de l’autorité adjudicatrice.

Il résulte de ce qui précède qu’aucune violation des art. 1 LMI et 43 RMP ne peut être retenue dans l’attribution du marché discuté. Le Tribunal administratif ne saurait se substituer à l’appréciation du pouvoir adjudicateur dans une mesure plus importante que ce qu’il a fait ci-dessus.

14. La recourante soulève une série de griefs en relation avec la procédure d’adjudication.

a. La publication de l’adjudication dans la FAO du 7 septembre 2009 ne comportait pas le montant du marché en violation avec l’art. 52 RMP. Or, cette disposition est intégrée au titre IV du RMP consacré aux dispositions spécifiques aux marchés soumis aux traités internationaux, ce qui n’est précisément pas le cas en l’espèce. Ce grief n’est donc pas fondé.

b. Le procès-verbal d’audition du 25 août 2009 n’a pas été signé par les personnes présentes, en violation de l’art. 40 al. 2 RMP.

Cette informalité est admise par la ville. Ce nonobstant, en début d’audition, les personnes participant à l’audition, dont Madame Eliane Monnin procès-verbaliste ont été présentées aux soumissionnaires. Ces derniers savaient donc qu’un procès-verbal serait établi et aucun d’eux, y compris la recourante, n’a demandé à signer ledit procès-verbal.

L’admission de cette irrégularité - plus formelle que fondamentale - n’est pas de nature à conduire à l’annulation du marché public litigieux dès lors qu’en tout état, la recourante a pu faire valoir ses griefs relatifs audit procès-verbal dans la procédure de recours et que comme vu ci-dessus, le Tribunal administratif statue avec un plein pouvoir d’examen.

c. La sélection finale du soumissionnaire n’a pas été soumise au conseil municipal pour approbation et cela en violation du point 2.21 du document d’appel d’offres.

Il résulte du procès-verbal de la séance ordinaire du conseil municipal de la ville du 17 septembre 2009 que le choix de l’entreprise générale retenue avait été présenté aux membres de la commission concernée le 3 septembre 2009. La présentation de ce dossier au conseil municipal n’a suscité aucune discussion et depuis lors le crédit d’investissement a été accepté par ledit conseil.

Au vu des précisions contenues dans le procès-verbal susmentionné, il n’y a pas lieu de retenir une informalité à cet égard.

d. Le comité n’aurait pas pris en compte les exigences émises par le commissaire Perrin en vue de la séance d’audition du 25 août 2009.

La lecture dudit procès-verbal et en particulier sa page 3 établit que M. Robyr, responsable du service technique de la ville, a transmis aux membres du comité les demandes de M. Perrin et que celles-ci ont été discutées avant l’audition des soumissionnaires. Au demeurant, il résulte de l’audition de M. Perrin devant le Tribunal administratif qu’il s’est complètement désintéressé de la procédure d’adjudication et de sa mission de membre du comité.

On peine à voir quels reproches devraient être formulés à l’encontre de l’autorité adjudicatrice sur ce point.

e. La ville n’aurait pas demandé aux soumissionnaires de signer le document « Engagement à respecter l’égalité entre hommes et femmes » prescrit par l’art. 11 AIMP et 21 RMP.

Aux termes de l’art. 11 let. f AIMP, le principe de l’égalité de traitement entre hommes et femmes doit être respecté lors de la passation de marchés. L’art. 21 RMP mentionne l’existence de ce principe. En revanche, aucune des dispositions précitées n’emporte l’obligation pour l’autorité adjudicatrice de faire signer un document écrit à ce sujet. Ce grief n’est nullement étayé par la recourante qui n’allègue pas en quoi il n’aurait pas été respecté.

Il résulte de ce qui précède que les irrégularités de nature essentiellement formelle soulevées par la recourante ne sont pas de nature à conduire à l’annulation du marché public discuté.

15. Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge de la recourante qui succombe. Les frais de procédure s’élevant à CHF 80.- seront également mis à la charge de la recourante. Il ne sera pas alloué d’indemnité à l’appelée en cause qui agit en personne et n’allègue pas avoir exposé des frais pour sa défense. Quant à la ville, conformément à la jurisprudence constante du Tribunal administratif, elle n’a pas droit à une indemnité, disposant de son propre service juridique (ATA/128/2008 du 16 décembre 2008 et les réf. citées) (art. 87 al. 2 LPA).

 

 

* * * * *

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

au fond :

rejette dans la mesure où il est recevable, le recours interjeté le 17 septembre 2009 par Geti S.A. contre la décision du 1er septembre 2009 de la Ville de Chêne-Bougeries ;

met à la charge de Geti S.A. un émolument de CHF 2'000.- ;

met à la charge de Geti S.A. les frais de procédure à hauteur de CHF 80.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité ni à l’appelée en cause, ni à la Ville de Chêne-Bougeries ;

dit que, conformément aux art. 82 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public :

si la valeur estimée du mandat à attribuer n’est pas inférieure aux seuils déterminants de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics ou de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur certains aspects relatifs aux marchés publics ;

s’il soulève une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 et ss LTF ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Geti S.A., à Me Malek Adjadj, avocat de la Ville de Chêne-Bougeries ainsi qu’à Marti Immobilier S.A., appelée en cause.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy, Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

 

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

F. Glauser

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :