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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2614/2014

ATA/758/2015 du 28.07.2015 ( LIPAD ) , ADMIS

Descripteurs : CONDITION DE RECEVABILITÉ ; DÉLAI DE RECOURS ; NOTIFICATION IRRÉGULIÈRE ; CONCLUSIONS ; PRINCIPE DE LA TRANSPARENCE(EN GÉNÉRAL) ; COMMUNICATION ; DOCUMENT ÉCRIT ; PROTECTION DES DONNÉES ; PESÉE DES INTÉRÊTS ; ORGANISATION DE L'ÉTAT ET ADMINISTRATION ; GESTION FINANCIÈRE DES COLLECTIVITÉS PUBLIQUES
Normes : LPA.62.al1.leta; LPA.47; LPA.65; LIPAD.3.al1.letb; LIPAD.24; LIPAD.25; LIPAD.26; LIPAD.27
Résumé : Recours contre une décision de la commune refusant à une journaliste l'accès aux documents établissant les conséquences financières du licenciement contraire au droit d'une ancienne secrétaire communale. La gestion du personnel est une tâche étatique importante directement liée à la gestion du patrimoine administratif de la commune. Il existe en principe, en vertu du principe de la transparence, un droit d'accès aux documents demandés. Un tel accès impliquerait une atteinte à la sphère privée de l'ancienne employée. Cette dernière ne s'est toutefois pas opposée à la demande. Il existe un intérêt public certain pour les habitants de la commune à connaître les conséquences sur les ressources publiques d'une violation du droit par la commune dans la gestion du personnel. Accès aux documents anonymisés accordé. Recours admis.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2614/2014-LIPAD ATA/758/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 28 juillet 2015

 

dans la cause

 

Madame A______

contre

COMMUNE DE D______
représentée par Me Yvan Jeanneret, avocat

et

Madame B______, appelée en cause



EN FAIT

1.1) Le 4 février 2010, la commune de D______ (ci-après : la commune) a engagé Madame B______ en qualité de secrétaire à compter du 1er mars 2010.

2.2) Par décision du 24 janvier 2012, la commune a prononcé le licenciement de cette dernière avec effet au 31 mars 2012.

3.3) Par arrêt du 19 février 2013 (ATA/92/2013), confirmé par arrêt du Tribunal fédéral du 25 février 2014 (arrêt 8C_269/2013), la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a constaté que le droit d’être entendu de Mme B______ avait été violé, annulé la décision de licenciement, dit que l’employée n’avait jamais cessé de faire partie du personnel communal et renvoyé la cause à la commune pour instruction et nouvelle décision dans le sens de considérants. Un émolument de CHF 1'000.- a été mis à la charge de la commune et une indemnité de procédure CHF 2'000.- allouée à Mme B______, à la charge de la commune.

4.4) Le 26 mars 2014, la C______ (ci-après : C______) a publié un article intitulé « Un licenciement annulé à D______ : facture salée » rédigé par Madame  A______, journaliste pour la rubrique locale du quotidien. Selon les informations de la C______, le coût du litige opposant la commune à Mme B______ – désignée comme ex-secrétaire sous un prénom fictif – s’élevait à plus de CHF 150'000.- sans les frais judiciaires, soit l’équivalent de deux ans de salaire.

5.5) Lors de la séance du conseil municipal de la commune du 8 avril 2014, à la demande du maire, la présidente a prononcé le huis clos avant d’aborder la question du licenciement de la secrétaire communale.

6.6) Le 9 avril 2014, Mme A______ a déposé auprès de la commune un formulaire de demande d’accès aux documents en possession d’une institution publique. Elle sollicitait l’accès aux coûts totaux relatifs à l’annulation du licenciement de Mme B______, comprenant en particulier le versement du salaire, les éventuelles indemnités et réparations pour tort moral, ainsi que les frais judiciaires engendrés pour la commune.

7.7) Le 10 avril 2014, la C______ a publié un nouvel article rédigé par Mme A______, intitulé « Huis clos à D______ sur une affaire de gros sous ». À teneur de ce dernier, la commune avait affirmé que le huis clos avait été prononcé le 8 avril 2014 non par volonté de dissimulation, mais pour protéger l’image d’une personne. La commune avait en outre déclaré que le montant perdu dans cette affaire serait publié dans les comptes 2014. Le coût minimal du licenciement contraire au droit, s’élevant à CHF 150'000.- selon les informations de la C______, correspondait à 5 % du budget communal, ou CHF 100.- par habitant.

8) Par courriel du 30 avril 2014, adressé en copie au préposé cantonal à la protection des données et à la transparence (ci-après : PPDT), Mme A______ a indiqué à la commune se voir dans l’obligation de saisir ce dernier d’une demande de médiation officielle, en l’absence de réponse à sa demande d’accès du 9 avril 2014.

9.9) Par courriel du 13 mai 2014, la commune a refusé l’accès aux documents demandés, ces derniers ayant trait à la sphère privée d’une ancienne employée.

10.10) Le 19 juin 2014, le PPDT a recommandé à la commune de communiquer à Mme A______ le document détaillant les coûts relatifs à l’annulation du licenciement de Mme B______, sous la forme d’un décompte de salaire caviardé de manière à être rendu anonyme ou de tout autre document comptable attestant des coûts en question.

Faute de consentement de la commune, la médiation n’avait pas pu être organisée. L’arrêt de la chambre administrative du 19 février 2013 impliquait des coûts, qui étaient importants pour une commune dont le budget annuel se montait à CHF 3'000'000.-, et qui avaient trait à la gestion financière d’une institution de droit public. Les informations sollicitées pouvaient favoriser la libre formation de l’opinion publique. L’intérêt des contribuables communaux à connaître l’utilisation des fonds publics l’emportait sur l’intérêt à la protection de la sphère privée de l’ancienne secrétaire communale. Le refus de présenter le document et le prononcé du huis clos le 8 avril 2014 pouvaient être considérés comme davantage liés à la contrariété suscitée par l’obligation de se conformer à l’arrêt du Tribunal fédéral du 25 février 2014 qu’à la nécessité de protéger la sphère privée de l’ancienne employée communale.

11.11) Par décision du 1er juillet 2014, notifiée uniquement au PPDT, la commune a rejeté la requête d’accès de Mme A______.

Il était douteux que les fiches de salaire de Mme B______ constituent un document auquel il existait un droit d’accès de principe. Les seules sommes versées suite aux arrêts de la chambre administrative du 19 février 2013 et du Tribunal fédéral du 25 février 2014 correspondaient au salaire de l’ancienne secrétaire communale, lequel relevait de sa sphère privée. Les conséquences financière de la décision contraire au droit seraient dévoilées lors de la publication des comptes communaux 2014 et les contribuables communaux seraient ainsi à même d’apprécier la gestion des deniers publics. La divulgation des informations sollicitées ne répondait à aucun intérêt public prépondérant. Les frais judiciaires ressortaient quant à eux expressément des arrêts de la chambre administrative et du Tribunal fédéral.

12.12) Par courriel du 30 juillet 2014, adressé en copie au PPDT, Mme A______ s’est enquise de la situation auprès de la commune suite à la recommandation du PPDT du 19 juin 2014, n’ayant jusqu’alors reçu aucune décision.

13.13) Par courriel du 5 août 2014, l’adjointe au PPDT a transmis à l’intéressée la décision de la commune du 1er juillet 2014.

14.14) Par courrier du 6 août 2014, Mme A______ a demandé à la commune de lui notifier sa décision en bonne et due forme.

15.15) Le 19 août 2014, la commune lui a adressé une décision identique à celle du 1er juillet 2014, sous réserve de la date.

16.16) a. Par acte du 3 septembre 2014, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative contre cette décision, concluant à son annulation et à l’injonction à la commune de rendre dans un délai de dix jours une nouvelle décision lui donnant immédiatement accès à toutes les pièces comptables ou autres documents justificatifs des coûts liés au licenciement contraire au droit de Mme B______, notamment les indemnités, les frais de justice et les frais d’avocat, ou, subsidiairement, lui donnant accès au coût global ainsi engendré, avec « suite de frais et dépens ».

N’ayant jamais reçu notification de la décision du 1er juillet 2014, le délai de recours courrait au plus tôt le 5 août 2014, date de sa communication par le PPDT.

Elle demandait à avoir accès aux pièces comptables ou autres documents justificatifs ou à un document unique donnant le détail de l’ensemble des coûts et non aux fiches de salaire ou au fichier personnel de l’ancienne secrétaire communale, dont l’anonymat pouvait être préservé par caviardage. Le nom de l’ex-employée n’était jamais apparu dans les médias, de sorte qu’elle n’était pas reconnaissable par le lecteur moyen. Pour déterminer le salaire de cette dernière en cas de divulgation du montant alloué à titre d’indemnité, il faudrait procéder à un calcul et connaître le nombre de mois durant lesquels elle n’avait pas été rémunérée de manière injustifiée, des recherches étant nécessaires à cet effet. Les documents demandés, relatifs à l’utilisation des fonds publics, concernaient l’accomplissement d’une tâche publique et non des délibérations ou des votes à huis clos. Le huis clos avait été prononcé de manière injustifiée, afin d’empêcher la divulgation d’informations compromettantes en présence d’une journaliste et non pour protéger la sphère privée d’une ancienne employée. Il existait un besoin de transparence accru dans le domaine de la gestion financière des institutions publiques. Les dépenses liées à l’affaire en cause étaient estimées au plus bas à CHF 150'000.-, soit environ 5 % du budget annuel de la commune. Les informations demandées pourraient avoir une influence réelle sur la formation de l’opinion publique dans le cadre des élections municipales du printemps 2015. Les journalistes avaient un rôle essentiel d’information du public. Les éléments demandés ne pouvaient être obtenus directement par Mme B______, du fait de l’absence d’accès de cette dernière à l’ensemble des informations et en raison du principe déontologique de recoupement des sources. Les comptes, constitués de rubriques générales et susceptibles de ne pas être publiés avant les élections, ne permettraient pas de retrouver le coût total de l’annulation du licenciement. Il existait un intérêt public prépondérant à l’accès au détail des dépenses engendrées par le licenciement contraire au droit de l’ancienne secrétaire communale. Même à admettre un intérêt privé prépondérant, la communication du coût global devrait être envisagée.

b. À l’appui de son recours, elle a versé à la procédure un document indiquant que le budget 2014 de la commune se montait à environ CHF 3'000'000.-, ainsi que des extraits des comptes 2012 de cette dernière.

17.17) a. Par réponse du 24 octobre 2014, la commune a émis une réserve particulière quant à la recevabilité des conclusions de Mme A______ et a conclu, préalablement, à l’appel en cause de Mme B______ ainsi que, principalement, au rejet du recours, avec « suite de frais et dépens ».

Elle a repris et développé l’argumentation développée précédemment.

Les versements en faveur de l’ancienne secrétaire communale ne relevaient pas de l’accomplissement d’une tâche publique, mais de l’exécution d’une décision judiciaire. Le licenciement contraire au droit avait eu pour seule conséquence l’obligation de verser le salaire de l’ex-employée pendant un temps limité, respectivement de désintéresser la caisse de chômage subrogée. La commune n’avait assumé aucun autre coût, la procédure ayant été intégralement prise en charge par l’assurance de protection juridique. Le montant de CHF 150'000.- avait déjà été dévoilé par la C______, de sorte que l’opinion publique avait déjà été suffisamment informée. S’agissant de la simple exécution d’une décision de justice à laquelle la commune ne pouvait se soustraire, il ne s’agissait pas d’une décision communale affectant la gestion des deniers publics. Les informations réclamées figureraient dans les comptes communaux 2014, lesquels seraient publiés début 2015. L’intérêt de la journaliste à l’obtention des informations demandées était nettement insuffisant pour justifier l’atteinte grave aux droits de la personnalité de l’ex-secrétaire communale, qui avait déjà démontré une sensibilité particulière au respect de sa sphère privée.

b. Elle a produit deux pièces à l’appui de sa réponse.

Dans un courrier du 19 juin 2013 à la commune, Mme B______ se plaignait d’une atteinte à sa personnalité du fait de la publication en ligne du procès-verbal de la séance du conseil municipal du 16 avril 2013, dans lequel son nom apparaissait et le litige l’opposant à la commune était évoqué. Elle en demandait dès lors le retrait immédiat du site internet, ou tout au moins des pages la concernant, le caviardage étant insuffisant du fait qu’elle était facilement identifiable par tous les habitants de la commune.

Un extrait de la police d’assurance individuelle de protection juridique de la commune démontrait qu’elle était assurée pour la période du 2 janvier au 31 décembre 2014, sans que le risque assuré soit précisé. Sous la rubrique « Prestations » figuraient notamment la protection juridique d’entreprise, ainsi que la protection juridique contractuelle, sans précision de l’inclusion ou non du droit du travail et avec plafond à respectivement CHF 300'000.- et CHF 150'000.-. Il existait une franchise en relation avec les frais d’avocats non recommandés par l’assurance.

18.18) Par décision du 29 octobre 2014, la chambre administrative a ordonné l’appel en cause de Mme B______.

19.19) Cette dernière ne s’est pas toutefois déterminée sur le fond du litige dans le délai au 21 novembre 2014 imparti par le juge délégué.

20.20) Le 8 janvier 2015, la commune a persisté dans l’intégralité de ses conclusions.

21.21) Dans ses observations complémentaires du 9 janvier 2015, Mme A______ a persisté dans son recours.

La police d’assurance produite par la commune était incomplète et n’attestait pas d’une couverture dans le cas d’espèce. L’éventuelle prise en charge par une assurance ne remettait pas en cause ses conclusions, la commune pouvant faire mention des montants couverts dans les documents à produire. Mme B______ avait renoncé à se prononcer, ce qui démontrait qu’elle ne considérait pas la divulgation des documents comme une atteinte à sa sphère privée. Les informations demandées ne concernaient pas seulement l’exécution d’une décision judiciaire, mais également les conséquences financières dommageables d’une décision contraire au droit de la commune, le public étant en droit d’avoir connaissance des agissements de la commune et de leurs suites, dont il subissait les effets.

22.22) Mme B______ n’a pas formulé de requêtes ou observations complémentaires, malgré l’invitation du juge délégué en ce sens.

23.23) Par délibération du 12 mai 2015, le conseil municipal de la commune a approuvé les comptes 2014 de la commune. Cette délibération n'a pas fait l'objet d'une demande de référendum.

24) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.1) Interjeté devant la juridiction compétente contre le refus d’accès aux documents prononcé par la commune suite à l’échec de la médiation et à la recommandation du PPDT, le présent recours est recevable de ces points de vue (art. 132 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 60 al. 1 de la loi sur l’information du public et l’accès aux documents du 5 octobre 2001- LIPAD - A 2 08).

2.2) a. Selon l'art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), le délai de recours est de trente jours s’agissant d’une décision finale. Il court dès le lendemain de la notification de la décision (art. 62 al. 3 1ère phrase LPA). Les délais en jours fixés par la loi ou par l’autorité ne courent pas du 15 juillet au 15 août inclusivement (art. 63 al. 1 let. b LPA).

b. Les décisions sont notifiées aux parties, le cas échéant à leur domicile élu auprès de leur mandataire, par écrit (art. 46 al. 2 LPA). Ont qualité de partie les personnes dont les droits ou les obligations pourraient être touchés par la décision à prendre, ainsi que les autres personnes, organisations ou autorités qui disposent d'un moyen de droit contre cette décision (art. 7 LPA).

c. La notification doit permettre au destinataire de prendre connaissance de la décision et, le cas échéant, de faire usage des voies de droit ouvertes à son encontre. Une décision est notifiée, non pas au moment où le contribuable en prend connaissance, mais le jour où elle est dûment communiquée (ATF 113 Ib 296 consid. 2a p. 297 ; arrêt du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.1 et les références citées ; ATA/179/2015 du 17 février 2015 consid. 6a ; ATA/822/2014 du 28 octobre 2014 consid. 2b).

S’agissant d’un acte soumis à réception, telle une décision ou une communication de procédure, la notification est réputée parfaite au moment où l’envoi entre dans la sphère de pouvoir de son destinataire (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 353 n. 2.2.8.4). Il suffit que celui-ci puisse en prendre connaissance (ATF 118 II 42 consid. 3b p. 44 ; 115 Ia 12 consid. 3b p. 17 ; arrêts du Tribunal fédéral 2P.259/2006 du 18 avril 2007 consid. 3.1 ; 2A 54/2000 du 23 juin 2000 consid. 2a et les références citées).

Une notification irrégulière ne peut entraîner aucun préjudice pour les parties (art. 47 LPA). L'administré doit toutefois, en application du principe de la bonne foi, agir dans un délai raisonnable dès la connaissance de la décision (ATF 122 V 189 ; 119 IV 330 p. 334 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 522 n. 1576).

d. En l’espèce, l’autorité intimée a prononcé sa décision de refus d’accès aux documents sollicités le 1er juillet 2014. Elle ne l’a toutefois notifiée qu’au PPDT, sans l’adresser à la recourante, qui était pourtant l’auteur de la demande d’accès et, partant, partie à la procédure. La recourante a eu connaissance de la décision du 1er juillet 2014 uniquement le 5 août 2014, suite à sa transmission par le PPDT. Ce n’est ensuite que sur demande de notification de la recourante que la commune lui a formellement notifié la décision du 1er juillet 2014, en la datant du 19 août 2014. La recourante a interjeté son recours devant la chambre administrative le 3 septembre 2014.

Au vu de ce qui précède, le recours a été formé dans un délai raisonnable dès la connaissance de la décision du 1er juillet 2014, délai par ailleurs inférieur au délai de trente jours à compter de la connaissance de la décision du 1er juillet 2014, commençant à courir après les suspensions d’été, le 16 août 2014.

Le recours est ainsi recevable de ce point de vue également.

3.3) Par ailleurs, dans la mesure où l’objet du litige porte sur le refus d’accès aux documents sollicités et que le destinataire de cette décision est la recourante, cette dernière est directement touchée par cette décision. Elle bénéficie ainsi d’un intérêt digne de protection à l’annulation éventuelle de la décision lui refusant l’accès aux documents demandés.

Elle a donc la qualité pour recourir contre la décision attaquée (art. 60 al. 1 let. a et b LPA).

4.4) L’autorité intimée a émis une réserve particulière quant à la recevabilité des conclusions de la recourante, sans plus de précisions.

a. L’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant (art. 65 al. 1 LPA). Il contient également l’exposé des motifs, ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. À défaut, la juridiction saisie impartit un bref délai au recourant pour satisfaire à ces exigences, sous peine d’irrecevabilité (art. 65 al. 2 LPA).

b. Compte tenu du caractère peu formaliste de cette disposition, il convient de ne pas se montrer trop strict sur la manière dont sont formulées les conclusions du recourant. Le fait que les conclusions ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est pas, en soi, un motif d’irrecevabilité, pourvu que l’autorité judiciaire et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant (ATA/88/2015 du 20 janvier 2015 consid. 2b ; ATA/754/2014 du 23 septembre 2014 consid. 2a ; ATA/427/2014 du 12 juin 2014 consid. 3a ; ATA/350/2014 du 13 mai 2014 consid. 4 ; ATA/818/2013 du 18 décembre 2013 consid. 3 ; ATA/844/2012 du 18 décembre 2012 consid. 3 ; ATA/681/2010 du 5 octobre 2010 consid. 2a). Une requête en annulation d’une décision doit par exemple être déclarée recevable dans la mesure où le recourant a, de manière suffisante, manifesté son désaccord avec la décision ainsi que sa volonté qu’elle ne développe pas d’effets juridiques (ATA/88/2015 du 20 janvier 2015 consid. 2b ; ATA/350/2014 du 13 mai 2014 consid. 4 ; Pierre MOOR/Étienne POLTIER, op. cit., p. 624 n. 5.3.1.2).

c. En l’espèce, il ressort clairement des conclusions de la recourante qu’elle demande l’annulation de la décision du refus d’accès prononcée par l’autorité intimée et qu’elle souhaite obtenir l’accès aux documents sollicités.

Dans ces circonstances, le recours est recevable.

5.5) Le recours porte sur la conformité au droit du refus de la commune de donner accès à la recourante aux documents établissant les conséquences financières du licenciement contraire du droit de l’appelée en cause.

6) a. La LIPAD régit à la fois l’information relative aux activités des institutions et la protection des données personnelles (art. 1 al. 1 LIPAD). Elle poursuit deux objectifs, à savoir, d’une part, favoriser la libre formation de l’opinion et la participation à la vie publique ainsi que, d’autre part, protéger les droits fondamentaux des personnes physiques ou morales de droit privé quant aux données personnelles les concernant (art. 1 al. 2 let. a et b LIPAD).

b. En édictant cette loi, le législateur a érigé la transparence au rang de principe aux fins de renforcer tant la démocratie que le contrôle de l’administration et de valoriser l’activité étatique et favoriser la mise en œuvre des politiques publiques (MGC 2000 45/VIII 7641 p. 7671 ss). Le principe de transparence est un élément indissociable du principe démocratique et de l’État de droit prévenant notamment des dysfonctionnements et assurant au citoyen une libre formation de sa volonté politique (ATA/341/2015 du 14 avril 2015 consid. 4 ; ATA/805/2012 du 27 novembre 2012 consid. 3b ; ATA/390/2011 du 21 juin 2011 consid. 4 ; ATA/307/2008 du 10 juin 2008 consid. 3 ; Alexandre FLÜCKIGER, Le projet de loi sur la transparence in : L’administration transparente, Thierry TANQUEREL/François BELLANGER [éd.], 2002, p. 142).

7.7) a. La LIPAD s’applique, sous réserve de l’art. 3 al. 3 et 5 LIPAD, aux institutions publiques visées à l’art. 3 al. 1 LIPAD et aux entités mentionnées à l’art. 3 al. 2 LIPAD. Sont notamment concernées les communes, ainsi que leurs administrations et les commissions qui en dépendent (art. 3 al. 1 let. b LIPAD).

b. Le droit fédéral est réservé (art. 3 al. 5 LIPAD). S’agissant de ce dernier, il convient de relever que ni la loi sur le principe de transparence dans l’administration du 17 décembre 2014 (loi sur la transparence - Ltrans - RS 152.3), ni la loi fédérale sur la protection des données du 19 juin 1992 (LPD - RS 235.1) ne sont applicables à la consultation de documents émanant d’une autorité communale (art. 2 al. 1 LTrans ; art. 2 al. 1 LPD).

c. La LIPAD est par conséquent applicable au cas d’espèce.

8.8) a. Toute personne a accès aux documents en possession des institutions, sauf exception prévue ou réservée par la LIPAD (art. 24 al. 1 LIPAD). L’accès comprend la consultation sur place des documents ou l’obtention de copies des documents (art. 24 al. 2 LIPAD).

b. Les documents sont tous les supports d’information détenus par une institution contenant des renseignements relatifs à l’accomplissement d’une tâche publique (art. 25 al. 1 LIPAD), à savoir une activité étatique ou paraétatique (MGC 2000 45/VIII 7641 p. 7693). Constituent notamment des documents les messages, rapports, études, procès-verbaux approuvés, statistiques, registres, correspondances, directives, prises de position, préavis ou décisions (art. 25 al. 2 LIPAD ; MGC 2000 45/VIII 7641 p. 7693 s. ; MGC 2001 49/X 9676 p. 9696). Pour les informations qui n’existent que sous forme électronique, l’impression qui peut en être obtenue sur support papier par un traitement informatique est un document (art. 25 al. 3 LIPAD). En revanche, les notes à usage personnel, les brouillons ou autres textes inachevés ainsi que les procès-verbaux encore non approuvés ne constituent pas des documents (art. 25 al. 4 LIPAD).

c. La demande d’accès n’est en principe soumise à aucune exigence de forme. Elle n’a pas à être motivée, mais doit contenir des indications suffisantes pour permettre l’identification du document recherché. En cas de besoin, l’institution peut demander qu’elle soit formulée par écrit (art. 28 al. 1 LIPAD).

d. Dans le domaine de la LIPAD, l’intérêt personnel et la qualité du demandeur n’interfèrent en aucune manière dans l’examen de ces conditions. Bien que le cercle des bénéficiaires de l’accès à l’information ne soit pas précisé dans le texte de ces dispositions (ATA/341/2015 du 14 avril 2015 consid. 8 ; ATA/805/2012 du 27 novembre 2012 consid. 3e ; ATA/621/2005 du 20 septembre 2005 consid. 3), l’exposé des motifs figurant dans le rapport du Conseil d’État à l’appui du projet de loi précise que le droit d’accès aux documents est un droit reconnu à chacun, sans restriction liée notamment à la démonstration d’un intérêt digne de protection du requérant. Dès lors qu’un document doit être considéré comme accessible à une personne en vertu du principe de la transparence (et non en vertu des dispositions sur la protection des données personnelles ou des droits inhérents à la qualité de partie à une procédure), il n’y a pas de raison d’en refuser l’accès à d’autres personnes. Les exceptions prévues à l’art. 26 LIPAD constituent ainsi des clauses de sauvegarde pour les informations qui ne doivent pas être portées à la connaissance du public. Dès lors, ce qui est décisif dans l’application de la LIPAD, c’est le contenu même de l’information sollicitée et non la qualité du requérant (ATA/341/2015 du 14 avril 2015 consid. 8 ; ATA/805/2012 du 27 novembre 2012 consid. 3e ; ATA/390/2011 du 21 juin 2011 consid. 7b ; ATA/621/2005 du 20 septembre 2005 consid. 3 ; MGC 2000/VIII 7641 p. 7691 s.).

9.9) a. L’adoption de la LIPAD a renversé le principe du secret de l’administration pour faire primer celui de la publicité. Toutefois, l’application de la LIPAD n’est pas inconditionnelle. En effet, dans la mesure où elle est applicable, elle ne confère pas un droit d’accès absolu et fait l’objet d’exceptions, aux fins notamment de garantir la sphère privée des administrés et de permettre le bon fonctionnement des institutions (ATA/341/2015 du 14 avril 2015 consid. 9 ; ATA/919/2014 du 25 novembre 2014 consid. 4a ; ATA/767/2014 du 30 septembre 2014 consid. 3a ; ATA/390/2011 du 21 juin 2011 consid. 4 ; ATA/211/2009 du 28 avril 2009 consid. 10 ; ATA/307/2008 du 10 juin 2008 consid. 3 ; MGC 2000/VIII 7641 p.7694 ; MGC 2001 49/X 9676 p. 9680 ss, 9697 et 9738). L’application des restrictions au droit d’accès implique une juste pesée des intérêts en présence lors de leur mise en œuvre (MGC 2000 45/VIII 7641 p. 7694 ss ; MGC 2001 49/X 9676 p. 9680).

b. Sont soustraits au droit d’accès les documents à la communication desquels un intérêt public ou privé prépondérant s’oppose (art. 26 al. 1 LIPAD). Tel est notamment le cas lorsque l’accès aux documents est propre à rendre inopérantes les restrictions légales à la communication de données personnelles - soit toutes les informations se rapportant à une personne physique ou morale de droit privé identifiée ou identifiable (art. 4 let. a LIPAD) - à des tiers (let. f), porter atteinte à la sphère privée ou familiale (let. g), révéler des informations sur l’état de santé d’une personne (let. h) ou révéler des délibérations et votes intervenus à huis clos ou compromettre les intérêts ayant justifié le huis clos d’une séance (let. l ; art. 26 al. 2 LIPAD). Par ailleurs, les notes échangées entre les membres d’une autorité collégiale ou entre ces derniers et leurs collaborateurs ainsi que les documents à l’accès desquels le droit fédéral ou une loi cantonale fait obstacle sont également exclus du droit d’accès (art. 26 al. 3 et 4 LIPAD). Finalement, l’institution peut refuser de donner suite à une demande d’accès à un document dont la satisfaction entraînerait un travail manifestement disproportionné (art. 26 al. 5 LIPAD).

L’exception au droit d’accès prévue à l’art. 26 al. 2 let. f LIPAD vise à ce que l’accès aux documents ne rende pas inopérantes les restrictions légales à la communication de données personnelles à des tiers, prévues par l’art. 39 LIPAD (ATA/919/2014 du 25 novembre 2014 consid. 4b ; ATA/767/2014 du 30 septembre 2014 consid. 3c). La communication de données personnelles à une tierce personne de droit privé n’est possible, alternativement, que si une loi ou un règlement le prévoit explicitement (let. a) ou un intérêt privé digne de protection du requérant le justifie sans qu’un intérêt prépondérant des personnes concernées ne s’y oppose (let. b ; art. 39 al. 9 LIPAD). Par personne concernée, il faut entendre la personne physique ou morale au sujet de laquelle des données sont traitées (art. 4 let. g LIPAD).

L’art. 26 al. 2 let. g LIPAD, établit une exception au droit d’accès aux documents lorsque celui-ci implique une atteinte notable à la sphère privée d’administrés ou d’institutions. Il n’exclut pas automatiquement l’accès à tout document concernant la sphère privée d’un tiers mais exige une pesée des intérêts en présence (ATA/341/2015 du 14 avril 2015 consid. 12 ; ATA/767/2014 du 30 septembre 2014 consid. 3c ; MGC 2000 45/VIII 7641 p. 7697). Le Conseil d’État, dans son message, donnait l’exemple suivant en rapport avec la communication d’informations qu’autoriserait la LIPAD : « un avocat mandaté par une institution doit s’attendre à ce que le montant des honoraires qu’il perçoit du chef de ce mandat soit le cas échéant communiqué à des tiers, dès lors qu’il s’agit de l’utilisation des ressources de l’institution chargée de l’accomplissement de tâches de droit public, bien que cette information concerne sa sphère privée économique » (MGC 2000/VIII 7641 p. 7697).

Les séances des conseils municipaux sont publiques (art. 16 al. 1 LIPAD et 18 al. 1 de la loi sur l’administration des communes du 13 avril 1984 - LAC - B 6 05). Les conseils municipaux siègent toutefois à huis clos pour délibérer sur les demandes de naturalisation d’étrangers de plus de 25 ans (let. a), pour délibérer sur les demandes de levée du secret dans les cas où la loi impose une obligation de secret aux conseillers municipaux (let. b) ou lorsqu’ils en décident ainsi en raison d’un intérêt prépondérant (let. c ; art. 16 al. 2 LIPAD et 18 al. 2 LAC).

c. Enfin, l’art. 27 LIPAD est, dans ses quatre alinéas, une concrétisation du principe de la proportionnalité (MGC 2000 45/VIII 7641 p. 7699 s.). Pour autant que cela ne requière pas un travail disproportionné, un accès partiel doit être préféré à un simple refus d’accès à un document dans la mesure où seules certaines données ou parties du document considéré doivent être soustraites à communication, en vertu de l’art. 26 LIPAD (art. 27 al. 1 LIPAD). Les mentions à soustraire au droit d’accès doivent être caviardées de façon à ce qu’elles ne puissent être reconstituées et que le contenu informationnel du document ne s’en trouve pas déformé au point d’induire en erreur sur le sens ou la portée du document (art. 27 al. 2 LIPAD). Le caviardage des mentions à soustraire au droit d’accès peut représenter une solution médiane qui doit l’emporter (MGC 2000 45/VIII 7641 p. 7699). L’éventuelle anonymisation de données soustraites au droit d’accès survenant en application de l’art. 27 al. 2 LIPAD intervient indépendamment du fait que le requérant connaisse ou non l’identité de la personne concernée (art. 8 du règlement d’application de la LIPAD du 21 décembre 2011 - RIPAD - A 2 08.01). Lorsque l’obstacle à la communication d’un document a un caractère temporaire, l’accès au document doit être différé jusqu’au terme susceptible d’être précisé plutôt que simplement refusé (art. 27 al. 3 LIPAD). La décision de donner un accès total, partiel ou différé à un document peut être assortie de charges lorsque cela permet de sauvegarder suffisamment les intérêts que l’art. 26 LIPAD commande de protéger (art. 27 al. 4 LIPAD).

10.10) Dans une affaire dans laquelle une transaction avait été conclue entre la Fondation de l’orchestre de la Suisse romande (ci-après : FOSR), soumise à la LIPAD en tant que fondation privée subventionnée à 72 % par des fonds publics, et un ancien employé dans le cadre d’un litige relatif au licenciement de ce dernier, la chambre administrative a confirmé le refus d’accès à la convention transactionnelle opposé par l’autorité intimée à la recourante. Le document demandé était lié à un conflit soumis au droit privé et ne touchait pas à l’exécution d’une tâche publique par l’institution, dans le cadre de laquelle des informations auraient été données et permettant d’admettre la communication du montant des honoraires d’un mandataire extérieur à l’institution, engagé dans l’exécution de cette tâche. En outre, la communication de documents concernant les rapports de l’entité avec ses employés était délicate, pouvant toucher à la sphère privée de ces derniers. Par ailleurs, même si l’existence d’une procédure prud’homale avait été révélée au public avec le montant maximal réclamé par l’employé à titre d’indemnité, cela ne donnait pas de droit automatique à l’accès au montant de la transaction. Si la communication de la convention pouvait présenter un intérêt public, il se résumait toutefois à la possibilité de connaître plus de détails sur la façon dont le conflit avait été résolu, information qui resterait incomplète et tronquée, une convention transactionnelle étant par essence conclue sans reconnaissance de responsabilité et sans détails sur le mode de fixation du montant convenu. Par conséquent, l’intérêt public à la communication de données concernant le fonctionnement d’une collectivité ou d’une institution soumise à la LIPAD cédait le pas à la protection de la sphère privée du travailleur, dès lors que ce dernier n’était pas d’accord avec leur communication (ATA/341/2015 du 14 avril 2015 consid. 13).

11) En l’espèce, la recourante demande l’accès aux documents permettant d’établir les coûts totaux engendrés par le licenciement contraire au droit de l’appelée en cause, soit notamment le versement du salaire, les éventuelles indemnités et réparations pour tort moral, ainsi que les frais judiciaires engendrés pour la commune. L’autorité intimée ne conteste pas l’existence de tels documents, mais soutient qu’ils ne concerneraient pas l’accomplissement d’une tâche publique et n’affecteraient pas les deniers publics, s’agissant de la simple exécution d’une décision judicaire.

Toutefois, si les informations demandées sont consécutives aux arrêts de la chambre administrative du 19 février 2013 et du Tribunal fédéral du 24 février 2014, il n’en demeure pas moins qu’elles découlent directement du prononcé par la commune d’un licenciement en violation du droit. Or, la gestion du personnel constitue une tâche étatique importante, la commune accomplissant ses activités publiques par le biais de ses employés, qui y participent conformément à leur cahier des charges. Par ailleurs, la gestion du personnel est directement liée à la gestion du patrimoine administratif de la commune, les charges de personnel constituant du reste l’un des postes les plus importants parmi les charges de fonctionnement de l’autorité intimée, dont le budget 2014 s’élevait à un peu plus de CHF 3'100'000.-. Ainsi, les coûts liés à un licenciement contraire au droit, générés par une violation du droit par l’institution publique dans la gestion de ses relations avec un employé et prélevés sur les ressources de la commune, sont directement liés à l’activité publique de cette dernière. À cet égard, il convient de constater que la présente cause se distingue largement l’ATA/341/2015, puisqu’elle concerne une entité publique en tant que telle, dont les rapports de travail sont en outre régis par le droit public.

Dès lors, la demande formulée auprès de l’autorité intimée concernant des documents contenant des informations identifiées, soit les conséquences financières du licenciement contraire au droit de l’appelée en cause, et se rapportant à l’accomplissement d’une tâche étatique, il existe en principe un droit d’accès à ces derniers, conformément au principe de la transparence, sous réserve d’exceptions.

12.12) L’autorité intimée affirme que les documents sollicités devraient être soustraient au droit d’accès du fait de la nécessité de protéger la sphère privée de l’appelée en cause, raison pour laquelle le conseil municipal aurait déjà prononcé le huis clos lors de la séance du 8 avril 2014. En effet, la seule conséquence du licenciement contraire au droit de l’ancienne secrétaire communale aurait consisté au versement de son salaire pendant un temps limité, de sorte que les informations demandées permettraient de déterminer son traitement mensuel.

Comme la chambre administrative a déjà eu l’occasion de le constater dans son ATA/341/2015, la communication de documents concernant les rapports de l’entité avec ses employés est délicate, car elle peut toucher à la sphère privée de ces derniers. Dans le cas d’espèce, la communication des pièces demandées reviendrait à dévoiler le montant total perçu par l’appelée en cause suite à son licenciement contraire au droit et ainsi des informations liées à son salaire. Par conséquent, l’accès aux documents sollicités impliquerait une atteinte à la sphère privée de l’appelée en cause.

Toutefois, si l’autorité intimée souligne le souci manifesté par le passé par son ancienne secrétaire au respect de sa sphère privée, cette dernière ne s’est pas opposée à la demande d’accès formulée par la recourante, ayant renoncé à se déterminer et à prendre des conclusions dans le cadre de la présente procédure, malgré son appel en cause. En outre, si cela ne donne pas un droit automatique d’accès aux documents sollicités, il convient de constater que l’affaire opposant la commune à l’appelée en cause a déjà fait l’objet de publications, lors de la parution dans le quotidien genevois des deux articles rédigés par la recourante et du fait de la mise en ligne de la jurisprudence de la chambre administrative et du Tribunal fédéral. Par ailleurs, conformément au principe de la transparence, il existe un intérêt public certain pour les habitants de la commune à connaître les conséquences sur les ressources publiques d’une violation du droit par la commune dans la gestion de son personnel. Sur ce point, il convient de constater que la situation du cas d’espèce diffère de celle de l’ATA/341/2015, puisqu’elle ne concerne pas un accord transactionnel, par essence dépourvu de reconnaissance de responsabilité et arrêtant l’indemnité au montant négocié par les parties. La présente cause se rapporte au contraire à une violation avérée du droit, établie par la chambre administrative puis confirmée par le Tribunal fédéral, la commune supportant dès lors la responsabilité des conséquences financières découlant directement de son comportement.

Au vu de ce qui précède, l’intérêt public à l’accès à des données concernant le fonctionnement de la commune l’emporte sur la protection de la sphère privée de l’ancienne employée communale, qui n’a pas exprimé de désaccord avec une telle communication, les documents devant toutefois être caviardés afin de préserver autant que possible l’anonymat de l’appelée en cause.

Au surplus, l’affirmation selon laquelle les éléments nécessaires à l’information du public seraient en tout état de cause publiés dans les comptes de 2014 ne sauraient convaincre. Au contraire, il ressort de la délibération du 12 mai 2015 et du procès-verbal de la séance y relative qu'aucun élément pertinent n'y figure.

13.13) Dans ces circonstances, le recours de Mme A______ sera admis et la décision litigieuse annulée. Il sera ordonné à la commune d’accorder à la recourante l’accès aux documents établissant les conséquences financières du licenciement contraire au droit de l’appelée en cause, au préalable caviardés de manière à préserver l’anonymat de cette dernière. En effet, même si la recourante a en tout état connaissance du nom de l'appelée en cause, la diffusion éventuelle du ou des documents auxquels elle aura accès devra préserver son anonymat, ce qu'un caviardage du document « à la source » permet justement.

14.14) Vu l’issue du litige, aucun émolument ne sera mis à la charge de l’autorité intimée (art. 87 al. 1 LPA), pas plus qu’à la charge de l’appelée en cause, qui n’a ni produit d’écriture, ni formulé de conclusions. Aucune indemnité de procédure ne sera allouée à la recourante, dans la mesure où elle n’expose pas de frais pour sa défense, qu’elle a assurée elle-même avec l’aide du service juridique de son employeur (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 3 septembre 2014 par Madame A______ contre la décision de la commune de D______ du 1er juillet 2014 ;

au fond :

l’admet ;

annule la décision de la commune de D______ du 1er juillet 2014 ;

ordonne à la commune de D______ de donner accès à Madame A______ aux documents établissant les conséquences financières du licenciement contraire au droit de Madame B______, au préalable caviardés de manière à préserver l’anonymat de cette dernière ;

l’y condamne en tant que de besoin ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame A______, à Me Yvan Jeanneret, avocat de la commune de D______, à Madame B______, appelée en cause, ainsi qu’au préposé cantonal à la protection des données et à la transparence.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, MM. Dumartheray, Verniory et Pagan, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :