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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/374/2013

ATA/99/2014 du 18.02.2014 ( EXPLOI ) , REJETE

Descripteurs : RESTAURANT; EXPLOITANT; EXPLOITANT À TITRE PERSONNEL; OBLIGATION JURIDIQUE; INDICATION DES PRIX; ENSEIGNE; NOM; ALCOOL; BOISSON SANS ALCOOL; BRUIT; VOISIN; ORDRE PUBLIC(EN GÉNÉRAL); VENTE; MAXIME INQUISITOIRE; DEVOIR DE COLLABORER; PREUVE; APPRÉCIATION DES PREUVES; LIBRE APPRÉCIATION DES PREUVES; FORCE PROBANTE; CONSTATATION DES FAITS; AMENDE; PROPORTIONNALITÉ; AUTORISATION D'EXPLOITER
Normes : LPA.19; LPA.22; LRDBH.1.leta; LRDBH.21; LRDBH.24; LRDBH.25; LRDBH.28; LRDBH.32.al3; LRDBH.33; LRDBH.48.al1; LRDBH.62; LRDBH.74.al1
Résumé : Lorsque des faits ressortent d'un rapport de police établi par des agents assermentés, la chambre administrative de la Cour de justice lui accorde généralement une pleine valeur probante, sauf si des éléments permettent de s'en écarter. Celui-ci qui les conteste ne peut donc se contenter de lui substituer sa propre version des faits. Une violation de la LRDBH constatée à une date donnée peut être sanctionnée par le service du commerce plusieurs mois après, et ce, même si les mesures adéquates pour y remédier ont été prises immédiatement après le contrôle. Lorsque le service du commerce sanctionne une ou plusieurs infractions à la LRDBH, il doit prendre en considération la nature, la gravité et la fréquence des infractions commises dans le respect du principe de proportionnalité.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/374/2013-EXPLOI ATA/99/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 18 février 2014

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur N______
représenté par Me Leila Mahouachi, avocate

contre

SERVICE DU COMMERCE

 



EN FAIT

1) M______ Bar Café, N______ (ci-après : l’établissement) est une entreprise individuelle sise à Genève, inscrite au registre du commerce de ce canton depuis le 28 janvier 2011, et qui a pour but statutaire l’exploitation d’un bar-café-restaurant. Son titulaire est Monsieur N______.

2) Selon le rapport de dénonciation à la loi sur la restauration, le débit de boissons et l’hébergement du 17 décembre 1987 (LRDBH – I 2 21) établi le 1er avril 2011 par le poste de police de la Servette, les services de police ont contrôlé l’établissement le 26 mars 2011 à 12h45. Sur place, les policiers ont constaté que l’enseigne de l’établissement prêtait à confusion, dans la mesure où son ancienne dénomination figurait toujours sur la façade et les fenêtres. En outre, les noms du propriétaire et/ou de l’exploitant de l’établissement n’apparaissaient pas sur la porte d’entrée. La carte des boissons, « fort peu claire », n’était autre que la carte de l’ancienne enseigne qui occupait les locaux, certains prix et boissons ayant été ajoutés ou supprimés au moyen d’un stylo vert. Par ailleurs, la carte des boissons ne proposait pas le choix de trois boissons sans alcool à un prix inférieur, à quantité égale, à celui de la boisson alcoolique la moins chère. Du sirop était proposé en lieu et place de l’eau minérale naturelle et la boisson lactée n’était autre que du lait, dont la brique n’était pas entreposée au réfrigérateur. Enfin, s’agissant du registre du personnel, M. N______ a présenté un cahier neuf et vierge, indiquant qu’il n’avait pas eu le temps de le remplir.

De par le fait que son établissement était signalé par plusieurs noms ou enseignes créant la confusion, que le nom du propriétaire et/ou de l’exploitant ne figurait pas sur la porte d’entrée, que les prix nets des mets et des boissons n’étaient pas indiqués à la clientèle de manière appropriée, claire et conforme à la vérité, que l’établissement servait des boissons alcooliques sans proposer le choix de trois boissons sans alcool à un prix inférieur, à quantité égale, à celui de la boisson alcoolique la moins chère et que le registre du personnel sur lequel devait être mentionné l’identité, le domicile, les dates de début et de fin d’engagement, ainsi que le rôle effectif de toute personne participant à l’exploitation ou à l’animation de l’établissement n’existait pas, M. N______ avait violé la LRDBH, ainsi que le règlement d’exécution de la loi sur la restauration, le débit de boissons et l’hébergement du 31 août 1988 (RRDBH – I 2 21.01).

3) Selon le rapport de dénonciation à la LRDBH établi le 26 février 2012 par le poste de police de la Servette, les services de police sont intervenus dans l’établissement sur appel de la centrale d’engagement cantonale et d’alarme (ci-après : la  CECAL ) le 3 février 2012 à 00h07, en raison d’un voisin qui se plaignait du bruit occasionné par la musique. Sur place, les policiers ont constaté qu’un fort bruit de musique amplifiée provenait de l’établissement. Le volume sonore était de nature à engendrer des inconvénients graves pour le voisinage au vu de l’heure tardive. A l’intérieur de l’établissement, un DJ exerçait bruyamment son art. L’établissement n’était pas au bénéfice d’une autorisation d’animation musicale et de danse. Monsieur P______, responsable de l’établissement en l’absence de M. N______, était incompétent pour la tâche qui lui avait été confiée, dans la mesure où il ne savait pas qu’une telle autorisation était nécessaire pour organiser une animation musicale. M. N______ a été averti de ces éléments le 8 février 2012.

De par l’organisation de spectacle, danse ou animation musicale (chaîne HI-FI ou DJ) sans autorisation, l’exploitation de l’établissement de manière à engendrer des inconvénients graves pour le voisinage et du défaut de désignation, en son absence, d’un remplaçant compétent et instruit de ses devoirs assumant la responsabilité de l’exploitation, M. N______ avait violé la LRDBH et le RRDBH.

4) Selon le rapport de dénonciation à la LRDBH établi le 26 février 2012 par le poste de police de la Servette, les services de police sont intervenus dans l’établissement sur appel de la CECAL le 22 février 2012 à 16h00, en raison d’une altercation. Sur place, devant l’établissement, se trouvait un homme blessé au visage. Fortement alcoolisé, ce dernier a expliqué s’être battu avec d’autres clients, lesquels avaient quitté les lieux. M. P______ était le responsable sur place. Il a confirmé les déclarations du blessé et indiqué qu’il avait assisté au conflit entre ce dernier et d’autres clients. Ne parvenant pas à rétablir l’ordre, il avait appelé la police et M. N______, lequel est arrivé durant l’intervention. Lorsque les policiers ont fait remarquer à M. P______ l’état d’ébriété du blessé, qui n’était pas capable de souffler dans l’éthylomètre, celui-ci a reconnu lui avoir servi de l’alcool.

Dans la mesure où des boissons alcooliques avaient été servies à un ou plusieurs clients en état d’ébriété et en raison du défaut de désignation, en son absence, d’un remplaçant compétent et instruit de ses devoirs assumant la responsabilité de l’exploitation, M. N______ avait violé la LRDBH et le RRDBH.

5) Le 27 mars 2012, le service du commerce (ci-après : le « Scom ») a informé M. N______ qu’au vu des infractions constatées dans le rapport de dénonciation à la LRDBH du 1er avril 2011, il envisageait de lui infliger une sanction et/ou une mesure administrative. Il a imparti à l’intéressé un délai au 10 avril 2012 pour faire part de ses observations.

6) Le 2 avril 2012, M. N______ a écrit au Scom que suite au contrôle de police du 26 mars 2011, il avait demandé aux agents de police présents de lui laisser une semaine pour régulariser sa situation. A l’époque, il n’était pas encore sûr de la reprise de l’arcade en raison de problèmes intervenus suite à un changement de régie. L’absence de registre du personnel était un oubli de sa part, corrigé depuis, mais il disposait d’un classeur contenant le contrat d’engagement du personnel. Les raisons des deux enseignes différentes étaient le changement de régie début 2011 et le retard pris par l’entreprise chargée de retirer l’enseigne de l’établissement précédant. Quant à l’absence de l’inscription du nom du propriétaire sur la porte de l’établissement, à l’époque, il n’était pas encore certain de rester dans cette arcade. La carte des boissons était désormais conforme aux exigences légales. Une semaine après le contrôle, tout avait été mis en règle.

7) Le 6 décembre 2012, le Scom a informé M. N______ qu’au vu des infractions constatées dans les rapports de dénonciation à la LRDBH du 26 février 2012, il envisageait de lui infliger une sanction et/ou une mesure administrative. Il a imparti à l’intéressé un délai au 31 décembre 2012 pour faire part de ses observations.

8) Le 12 décembre 2012, M. N______ a écrit au Scom qu’il contestait le premier rapport du 26 février 2012 dans la mesure où trois jours après l’intervention de la police, une autre plainte pour du bruit dans son établissement n’avait eu aucune suite. Quelques jours après ces plaintes pour bruit, l’établissement avait été vandalisé, la marchandise volée et sa voiture endommagée. Ces éléments démontraient un acharnement à son encontre. Depuis la reprise de l’établissement par ses soins, tout avait été fait pour faire respecter l’ordre et la sécurité des clients et du voisinage. La clientèle s’était améliorée. En ce qui concernait le second rapport du 26 février 2012, de l’alcool avait effectivement été servi par trois fois au client concerné, mais celui-ci était sobre. Un café lui avait ensuite été proposé et il avait quitté l’établissement, visiblement fâché. Il était revenu deux heures plus tard dans un état d’ébriété avancé, mais aucun alcool ne lui avait alors été servi. Il s’était fâché et avait crié et insulté d’autres clients. C’est alors que la police avait été appelée, conformément à la loi.

9) Par décision du 21 décembre 2012, le Scom a infligé à M. N______ une amende de CHF 2'700.-, en raison des infractions à la LRDBH et le RRDBH qu’il avait commises et qui étaient énoncées dans les rapports de dénonciation à la LRDBH des 1er avril 2011 et 26 février 2012 et dans les courriers à son attention des 27 mars et 12 décembre 2012. Cette décision pouvait faire l’objet d’un recours dans les trente jours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

10) Par acte du 31 janvier 2013, M. N______ a, par l’intermédiaire de son conseil, recouru contre la décision précitée, concluant principalement à son annulation avec suite de frais et dépens, ainsi qu’à son audition et celle de M. P______.

En premier lieu, il reprochait au Scom d’avoir constaté les faits de manière inexacte.

L’infraction reprochée ne portait que sur l’indication des prix et des boissons et non des mets, à teneur du rapport de dénonciation à la LRDBH du 1er avril 2011. Soutenir que les modifications des prix des boissons apportées à la main rendaient la carte peu claire était purement interprétatif. Il n’était pas prouvé que les clients s’en étaient plaints. L’utilisation d’un stylo vert permettait même de différencier les modifications apportées à la carte de l’ancien établissement. La carte de l’ancien établissement étant conforme à la LRDBH, considérer le contraire suite à son utilisation temporaire dans son établissement n’était pas logique. La carte du précédent établissement avait été utilisée par commodité au début de l’exploitation, en raison d’un changement de régie intervenu au début de l’année 2011, lequel avait entraîné du retard dans la signature du contrat de bail et dans la logistique. Enfin, une nouvelle carte avait été réalisée dans la semaine qui avait suivi le contrôle de police du 26 mars 2011.

Le Scom n’avait pas tenu compte de ses explications relatives au retard pour l’enseigne. De plus, l’entreprise chargée de retirer celle de l’ancien établissement avait interrompu soudainement ses travaux. La mise en conformité avait finalement dû être réalisée par ses propres soins dans les meilleurs délais.

Les services de police avaient indiqué qu’un cahier vierge leur avait été présenté, sans indiquer que le registre du personnel était inexistant. En effet, il leur avait également montré un classeur contenant notamment les contrats d’engagement du personnel. Il n’avait simplement pas eu le temps de retranscrire les informations pertinentes dans le cahier. Cela avait toutefois été fait dans la semaine qui avait suivi le contrôle de police du 26 mars 2011. La position du Scom relevait ainsi d’un formalisme excessif.

Par sa décision du 21 décembre 2012, le Scom sanctionnait ainsi des faits inexactement constatés et qui remontaient à près de 2 ans, ce qui constituait une violation de son obligation de statuer dans un délai raisonnable et faisait perdre toute pertinence à sa sanction.

L’établissement n’avait jamais été équipé d’une installation de DJ. Les services de police avaient manifestement confondu l’activité de DJ avec le fait de changer les CDs de la chaîne stéréo. En outre, ils n’avaient effectué aucun contrôle du volume en décibels, estimant que le volume était trop fort en entrant dans l’établissement. A l’extérieur, aucun dérangement n’était à signaler, du fait que personne n’était sur la terrasse au mois de février et que l’établissement bénéficiait d’une excellente isolation sonore, rénovée lors de la reprise des locaux. Aucune animation musicale n’avait été organisée ce soir-là, la musique de la chaîne stéréo ayant simplement remplacé les commentaires du sport diffusé à la télévision. Par ailleurs, M. N______ était au courant de la nécessité d’obtenir une autorisation pour pouvoir organiser une animation musicale, ayant déposé des demandes en ce sens en janvier 2011 et 2013.

M. P______ était instruit de ses devoirs lorsqu’il devait le remplacer. On ne pouvait pas le considérer comme incompétent du simple fait qu’il aurait peut-être ignoré la nécessité d’avoir l’autorisation précitée. Ce dernier avait reçu des instructions, notamment sur le volume sonore maximum de la musique. En outre, il n’était pas avéré qu’une animation musicale avait eu lieu le 3 février 2012. Dans le même sens, M. P______ avait été avisé de l’interdiction de servir de l’alcool à des clients en état d’ébriété. Il avait refusé de servir le client blessé au-delà de trois verres, alors qu’il était encore sobre. Voyant qu’il se montrait agressif et qu’il ne pouvait pas calmer la situation, il avait immédiatement appelé la police, conformément à ses devoirs. La bagarre avait eu lieu à l’extérieur. Par ailleurs le rapport était lacunaire quant au moment où M. P______ avait servi de l’alcool à ce client. En outre, ledit rapport indiquait que ce dernier avait été incapable de souffler dans l’éthylomètre en raison de son état d’ébriété avancé, ce qui rendait sa déposition peu crédible.

L’établissement n’avait jamais engendré aucun inconvénient grave pour le voisinage, bien au contraire. Depuis sa reprise au début de l’année 2011, le retour au calme et la sécurité étaient constaté, ses voisins étant bien plus tranquille comme cela ressortait des attestations produites. De plus, aucune plainte n’avait été déposée contre l’établissement.

En second lieu, il reprochait au Scom un excès et un abus de son pouvoir d’appréciation, le montant de l’amende infligée étant à l’évidence disproportionné par rapport aux faits et à sa situation, ce d’autant plus qu’il était sans antécédent. Un avertissement aurait été suffisant pour obtenir les effets souhaités dans la mesure où il s’était mis en conformité avec les prescriptions légales.

11) Par décision du 19 février 2013, la vice-présidente du Tribunal civil a rejeté la requête d’assistance juridique formée par M. N______ le 18 février 2013, au motif que sa situation financière lui permettait de supporter ses frais de justice et les honoraires de son conseil.

12) Dans sa réponse du 15 mars 2013, le Scom a conclu au rejet du recours, à la confirmation de sa décision du 21 décembre 2012 et à la condamnation de M.  N______ aux frais et émoluments. Il s’est prononcé sur chacun des griefs du recourant de la manière suivante :

M. N______ n’avait apporté aucun élément objectif qui permette de s’écarter du rapport de dénonciation à la LRDBH du 1er avril 2011 à propos de l’indication des prix.

L’absence de registre du personnel était avérée, ledit registre étant neuf et vierge le jour du contrôle par les services de police. Or, la loi imposait à l’exploitant la tenue d’un registre à jour en tout temps.

Pour ce qui est des problématiques des enseignes et du nom de l’exploitant sur la porte d’entrée de l’établissement, M. N______ ne contestait pas formellement le rapport de dénonciation à la LRDBH du 1er avril 2011, se contentant d’invoquer un retard imputé au changement de régie et à l’interruption des travaux par l’entreprise qui en était chargée. Ainsi, rien ne permettait de s’écarter des constatations de la police.

M. N______ n’avait émis aucun commentaire sur le choix de boissons non alcoolisées, de sorte que la sanction était justifiée de ce chef.

En ce qui concerne la désignation de M. P______ en qualité de remplaçant, ce chef d’infraction avait été constaté par deux fois au cours du mois de février 2012. Malgré cela, le recourant prétendait que celui-ci était parfaitement instruit, en contradiction avec les rapports de dénonciation à la LRDBH du 26 février 2012. En réalité, M. N______ tentait simplement d’échafauder une argumentation pour échapper à toute sanction. Par ailleurs, il ne se prévalait d’aucun élément objectif susceptible de remettre en cause la valeur probante desdits rapports.

Le fait que les services de police n’aient pas procédé à des mesures de décibels lors de leur intervention du 3 février 2012, ne signifiait pas que l’on avait affaire à une appréciation subjective. A ce propos, la musique jouée à l’intérieur de l’établissement était audible depuis l’extérieur, ce qui était confirmé par le fait que les services de police étaient intervenus suite à une plainte d’un voisin. Leurs constatations relatives au DJ étaient claires, malgré les dénégations de M.  N______. Une animation musicale avait donc bel et bien eu lieu, sans autorisation.

Il ressortait du rapport de dénonciation à la LRDBH du 26 février 2012 que M. P______ avait reconnu avoir servi de l’alcool à un client en état d’ébriété. Le recourant tentait d’élaborer une histoire rocambolesque aux fins de se soustraire à ses obligations légales. Là encore, il n’avait pas apporté la preuve des faits qu’il alléguait.

Par conséquent, M. N______ avait bien violé la LRDBH et le RRDBH, justifiant dans son principe l’amende infligée. Le département jouissait d’un large pouvoir d’appréciation pour en fixer le montant. Il convenait de prendre en compte la nature, la gravité et la fréquence des infractions commises. En l’occurrence, l’amende devait être confirmée dans sa quotité au regard des infractions commises et de la situation du recourant.

13) Le 8 avril 2013, la chambre administrative a tenu une audience de comparution personnelle des parties et d’enquêtes.

M. N______ a confirmé les termes de son recours, insistant sur le fait qu’il avait remédié aux éléments relevés par les services de police lors du contrôle du 26 mars 2011 dans le courant de la semaine qui avait suivi. Dans l’établissement, il y avait une chaîne HI-FI. Le soir du 3 février 2012, il y avait de l’ambiance, mais rien d’anormal. M. P______ était son cousin et était généralement présent dans l’établissement le soir. Il l’avait formé, notamment pour qu’il respecte les normes de bruit, afin d’éviter les problèmes qu’avait entraînés l’établissement précédent. Quant à l’événement du 21 février 2012, il a maintenu sa version des faits, précisant que la bagarre n’avait eu lieu ni dans son établissement, ni sur la terrasse ou juste devant.

Quant au Scom, il a précisé que les rapports de dénonciation qu’il recevait étaient traités, même si les problèmes dénoncés avait été réglés depuis. Pour lui, il y avait une animation musicale dès que la musique diffusée couvrait les voix normales des clients, quel que soit l’appareil qui diffusait la musique. En l’occurrence, il s’était fié au rapport de la police.

M. P______ a déclaré avoir été formé par le recourant. Il y avait régulièrement de la musique, des CDs ou la télévision allumée dans l’établissement. Il mettait le son à un niveau raisonnable en raison des clients qui discutaient. Lors de l’intervention de la police du 3 février 2012, le niveau sonore était normal. En ce qui concerne le client en état d’ébriété, il lui avait servi trois ou quatre bières à une machine à sous. Comme il commençait à être agressif, il lui avait demandé de partir. Il n’avait pas obtempéré, ce qui l’avait conduit à appeler la police, laquelle n’était pas venue tout de suite. Ce client était parti avec les personnes qu’il avait insultées. Une ou deux heures plus tard, ces personnes étaient revenues accompagnées de la police et lui avaient indiqué qu’il y avait eu une bagarre. Il ne l’avait pas vue. Elle ne s’était produite ni dans l’établissement, ni devant. Il refusait de servir de l’alcool à des gens qui avaient trop bu.

14) Le 2 mai 2013, M. N______ a fait part de ses observations suite à l’audience du 8 avril 2013. A propos du rapport de dénonciation à la LRDBH du 1er avril 2011, le Scom n’avait procédé à aucun examen concret de la situation ni tenu compte de la mise en conformité réalisée la semaine qui avait suivi le contrôle du 26 mars 2011, mais il le sanctionnait près de deux ans après, sans qu’il puisse le justifier. Pour le surplus, il a rappelé son argumentation et persisté dans ses conclusions.

15) A la suite de quoi la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable à cet égard (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) M. N______ étant l’exploitant de l’établissement en sa qualité de titulaire de l’entreprise individuelle, il est habilité à recourir, de sorte que le recours sera déclaré recevable.

3) Le recours porte sur le principe et la quotité de l’amende de CHF 2'700.- prononcée par le Scom à l’encontre du recourant pour plusieurs infractions à la LRDBH et au RRDBH. M. N______ estime quant à lui n’avoir commis aucune infraction.

4) L’exploitation à titre onéreux d’établissements voués à la restauration et au débit de boissons à consommer sur place est soumise à la LRDBH (art. 1 let. a LRDBH).

Ladite loi a pour but d’assurer qu’aucun établissement qui lui est soumis ne soit susceptible de troubler l’ordre public, en particulier la tranquillité, la santé et la moralité publiques, du fait de son propriétaire ou de son exploitant, ainsi qu’en raison de sa construction, de son aménagement, de son implantation (art. 2 al. 1 LRDBH). Les cafés-restaurants font partie des établissements concernés (art. 16 al. 1 let. a LRDBH).

5) a. La procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire selon laquelle le juge établit les faits d’office (art. 19 LPA). Mais ce principe n’est pas absolu, sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA). Celui-ci comprend en particulier l’obligation des parties d’apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d’elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l’absence de preuves (Arrêts du Tribunal fédéral 8C_1034/2009 du 28 juillet 2010 consid. 4.2 ; 9C_926/2009 du 27 avril 2010 consid. 3.3.2 et références citées; ATA/792/2012 du 20 novembre 2012 consid. 6a ; ATA/797/2010 du 16 novembre 2010 ; ATA 649/2010 du 21 septembre 2010 ; ATA/532/2010 du 4 août 2010 ; ATA/669/2009 du 15 décembre 2009 et les références citées).

b. De jurisprudence constance, la chambre de céans accorde généralement une pleine valeur probante aux constatations figurant dans un rapport de police, établi par des agents assermentés (ATA/818/2013 du 17 décembre 2013 ; ATA/757/2011 du 13 décembre 2011 ; ATA/532/2006 du 3 octobre 2006), sauf si des éléments permettent de s’en écarter.

6) a. Les prix nets des mets et boissons servis dans les établissements doivent être indiqués à la clientèle de façon appropriée, claire et conforme à la vérité (art. 24  LRDBH).

L’indication des prix nets des mets et boissons doit être effectuée soit par des affiches apposées de façon visible à l’entrée de l’établissement, à un endroit accessible à la clientèle, soit par des cartes qui doivent être disponibles en tout temps (art. 34 RRDBH).

b. En l’espèce, il ressort du rapport de dénonciation à la LRDBH du 1er avril 2011 que la carte des boissons n’était autre que la carte de l’ancienne enseigne qui occupait les locaux, certains prix et boissons ayant été ajoutés ou supprimés au moyen d’un stylo vert, ce qui la rendait « fort peu claire ». Si M. N______ admet avoir repris la carte du précédent établissement, il conteste son caractère peu clair et rappelle que la carte respectait la LRDBH avant sa reprise de l’établissement. Elle avait été utilisée par commodité au début de l’exploitation, en raison d’un retard lié à un changement de régie au début de l’année 2011. Par ailleurs, une nouvelle carte avait été réalisée dans la semaine qui avait suivi le contrôle de police du 26 mars 2011.

L’argumentation du recourant ne saurait toutefois être suivie, dans la mesure où il n’apporte aucun élément objectif permettant de remettre en cause les constatations figurant dans le rapport de police. En effet, il se contente d’apporter sa propre vision de la situation. Pour autant que le changement de régie ait effectivement causé un retard, ce qui n’est pas prouvé, cela ne justifie pas l’utilisation d’une carte peu claire. Par ailleurs, le fait qu’une nouvelle carte ait été créée quelques jours plus tard ne change rien au fait que le 26 mars 2011, la carte utilisée n’était pas conforme aux exigences contenues dans la loi.

7) a. L’exploitant doit en tout temps être en mesure de fournir au département et aux services de la police tous les renseignements relatifs à l’identité, au domicile, aux dates de début et de fin d’engagement et au rôle effectif de toute personne participant à l’exploitation ou à l’animation de l’établissement (art. 25 LRDBH).

Les exploitants de cafés-restaurants, dancings et cabarets-dancings doivent avoir un registre du personnel constamment tenu à jour et mentionnant l’identité, le domicile, les dates de début et de fin d’engagement ainsi que le rôle effectif de toute personne participant à l’exploitation ou à l’animation de l’établissement (art. 35 al. 1 RRDBH).

Selon la jurisprudence, l'obligation de tenir un registre du personnel tend à permettre à l'administration de procéder à des contrôles, notamment de vérifier si des employés d'un établissement public sont au bénéfice d'une autorisation de travail valable et s'ils en respectent les conditions (Arrêt du Tribunal fédéral non publié du 30 mars 1994). Dans cet arrêt, le Tribunal fédéral a relevé que la législation genevoise n'avait cependant pas institué de registre-type dont l'usage s'imposerait aux administrés. Le Tribunal fédéral a relevé que l'obligation imposée à l'exploitant de tenir un registre satisfaisant à certaines exigences de forme ne saurait être qualifiée de tracasserie administrative, dans la mesure où elle reposait sur un intérêt public suffisant, consistant à rendre possible le contrôle. Dans ce même arrêt, le Tribunal fédéral a jugé que l'interprétation du Tribunal administratif selon laquelle la notion de registre implique celle d'un cahier ou d'un livre comportant des pages reliées (dictionnaire Le Petit Robert, Paris 1987) n'était pas arbitraire (ATA/744/1999 du 7 décembre 1999).

b. En l’espèce, il ressort du rapport de dénonciation à la LRDBH du 1er avril 2011 que, s’agissant du registre du personnel, M. N______ a présenté un cahier neuf et vierge, indiquant qu’il n’avait pas eu le temps de le remplir. Ce dernier a d’abord admis qu’il ne disposait pas d’un registre du personnel le jour du contrôle, mais qu’il était en possession d’un classeur contenant l’ensemble des contrats d’engagement de ses employés. Dans le cadre de son recours, il a ajouté que ce classeur avait été présenté aux services de police. Outre le fait que l’argumentation de M. N______ a évolué en cours de procédure, il apparaît que le système de classeur pratiqué temporairement par ce dernier est contraire à la notion de registre. De plus, il rend illusoire tout véritable contrôle, contrairement au but et à l’esprit de la loi.

8) a. Il ne peut être donné par l’établissement qu’un seul nom et qu’une seule enseigne, qui ne doivent pas être susceptibles d’induire le public en erreur sur la catégorie à laquelle appartient l’établissement. Les dispositions fédérales sur les enseignes sont en outre réservées (art. 32 al. 3 LRDBH).

Les enseignes de nature à créer une confusion quant à la catégorie à laquelle appartient un établissement sont interdites (art. 39 al. 1 RRDBH).

L’unité de nom et d’enseigne par établissement correspond à l’idée d’unité des locaux et à l’idée d’unité d’exploitation. Cette disposition n’exclut pas que l’exploitant d’un établissement comprenant plusieurs salles donne un nom à chacune d’elles, à la condition que l’établissement lui-même ne porte qu’un seul nom et une seule enseigne (Mémorial du Grand Conseil 1985 III 4253).

b. Le propriétaire et l’exploitant sont tenus de faire figurer leurs noms sur la porte de l’établissement (art. 33 LRDBH).

En raison des responsabilités qu’encourt l’exploitant d’un établissement à l’égard du département et du public, il est logique qu’il soit aisément identifiable (Mémorial 1985 III 4249).

c. En l’espèce, il ressort du rapport de dénonciation à la LRDBH du 1er avril 2011 que l’enseigne de l’établissement prêtait à confusion, dans la mesure où son ancienne dénomination figurait toujours sur la façade et les fenêtres et que le nom de M. N______ ne figurait pas sur la porte d’entrée. Ce dernier a reconnu cet état de fait tout en invoquant le retard pris en raison du changement de régie et de l’arrêt des travaux par l’entreprise chargée de retirer l’ancienne enseigne et le fait qu’il n’était pas certain, au jour du contrôle, de conserver les locaux.

Force est de constater que M. N______ assurait l’exploitation de l’établissement depuis plusieurs semaines quand il a fait l’objet d’un contrôle par la police le 26 mars 2011. Or, à cette date, l’enseigne n’était pas conforme à la loi et son nom ne figurait pas sur la porte. Pour autant qu’un retard ait été effectivement pris en raison du changement de régie et de l’interruption des travaux, ce qui n’est pas prouvé, M. N______ ne démontre pas avoir été empêché de se conformer à la loi, alors qu’il occupait les locaux depuis plusieurs semaines. Il n’apporte aucun élément qui puisse justifier les infractions à la loi constatées par le rapport de dénonciation à la LRDBH du 1er avril 2011.

9) a. Les établissements dans lesquels des boissons alcooliques sont servies doivent offrir, en verre ou en bouteille, un choix de trois boissons au moins, comprenant une eau minérale naturelle, un jus de fruit régional ou une boisson lactée, à un prix inférieur, à quantité égale, à celui de la boisson alcoolique la moins chère (art. 48 al. 1 LRDBH).

Une disposition cantonale, selon laquelle un établissement servant de l'alcool doit offrir un certain nombre de boissons sans alcool à un prix qui ne dépasse pas celui de la boisson alcoolisée la meilleur marché, servie dans la même quantité, ne viole pas le principe de la liberté économique (ATF 109 Ia 33, consid. 3 et 4).

b. En l’espèce, il ressort du rapport de dénonciation à la LRDBH du 1er avril 2011 que la carte des boissons ne proposait pas le choix de trois boissons sans alcool à un prix inférieur, à quantité égale, à celui de la boisson alcoolique la moins chère. M. N______ ne conteste pas la réalisation de cette infraction, se contentant d’indiquer qu’une nouvelle carte conforme à la loi a été réalisée quelques jours après le contrôle de police du 26 mars 2011. Ladite infraction est par conséquent réalisée.

10) a. Sauf dans les cabarets-dancings, l’animation et la présentation de spectacles dans les établissements sont régies par les articles 62 à 64 (art. 17 al. 3 LRDBH).

A teneur de l’art. 62 LRDBH, sauf dans les cabarets-dancings, l’animation et la présentation de spectacles sont subordonnés à l’obtention préalable d’une autorisation du département (al. 1). L’autorisation est délivrée pour un genre d’animation ou un spectacle et une durée déterminés (al. 2).

Doivent faire l’objet d’une requête l’autorisation d’animation et spectacles (art. 2 let. l RRDBH).

Doivent être déposées quinze jours à l’avance, les requêtes prévues pour l’autorisation de danse et l’autorisation d’animation et spectacles, si la demande est mensuelle, trimestrielle ou annuelle (art. 3 al. 2 let. b RRDBH). Doivent être déposées cinq jours à l’avance les requêtes prévues pour l’autorisation de danse et l’autorisation d’animation et spectacles, si la demande est ponctuelle pour plusieurs soirs (art. 3 al. 3 let. e RRDBH). En cas d’imprévu, peuvent exceptionnellement être déposées le jour même, les requêtes prévues pour l’autorisation de danse et l’autorisation d’animation et spectacles, si la demande ne vise qu’un seul soir (art. 3 al. 4 let. b RRDBH).

b. En l’espèce, il ressort du premier rapport de dénonciation à la LRDBH du 26 février 2012 que le 3 février 2012 à 00h07, une animation musicale avait été organisée dans l’établissement, sans autorisation. M. N______ se défend d’avoir organisé une animation musicale, indiquant que seule une chaîne HI-FI standard était installée dans l’établissement.

Au vu du dossier, la chambre de céans ne dispose d’aucun élément objectif lui permettant de s’écarter des constatations du rapport de police. Il semble en effet peu probable que les agents de police aient confondu une activité de DJ avec un employé de l’établissement qui manipulait une chaîne HI-FI. Par ailleurs, M. N______ ne fait que substituer les constatations figurant au rapport par les siennes. Le fait que le recourant ait requis des autorisations pour pouvoir organiser des animations musicales en 2011 et 2013 n’y change rien puisqu’à la date de l’intervention des services de police, une telle autorisation n’avait pas été délivrée. Ainsi, une animation musicale a bien été organisée sans autorisation.

11) a. Selon l’art. 21 LRDBH, l’exploitant doit gérer l’établissement de façon personnelle et effective (al. 1). En cas d’absence de l’établissement, il doit désigner un remplaçant compétent et instruit de ses devoirs, qui assume la responsabilité de l’exploitation (al. 2). Il répond du comportement adopté par les personnes participant à l’exploitation et à l’animation de l’établissement dans l’accomplissement de leur travail (al. 3).

b. En l’espèce, il ressort des rapports de dénonciation à la LRDBH du 26 février 2012 que M. N______ a été remplacé à deux reprises par M. P______, lequel n’était pas compétent et instruit de ses devoirs, dans la mesure où il ignorait qu’une autorisation était nécessaire pour organiser une animation musicale dans l’établissement et qu’il n’était pas autorisé à servir de l’alcool à une personne en état d’ébriété. Le recourant considère quant à lui que M. P______ était compétent et correctement instruit.

L’argumentation de M. N______ repose en partie sur les déclarations de M. P______, entendu à titre de renseignements. En outre, les éléments qu’il avance sont en parfaite contradiction avec les rapports précités, desquels il ressort clairement que, du propre aveu de M. P______, ce dernier ignorait la nécessité d’une autorisation pour organiser une animation musicale et qu’il avait servi de l’alcool à une personne en état d’ébriété. Par conséquent, rien ne permet de remettre en cause la valeur probante des rapports de police et de suivre le recourant. Cela est d’autant plus vrai qu’il n’apporte aucun élément objectif à l’appui de sa thèse et que sa présentation des faits apparaît comme fort peu probable.

12) a. L'exploitant doit veiller au maintien de l'ordre dans son établissement et prendre toutes les mesures utiles pour ne pas engendrer d'inconvénients graves pour le voisinage (art. 22 al. 1 à 3 LRDBH).

Une violation de l’art. 22 LRDBH peut être fondée sur le fait que l’exploitant n’a pas pris les mesures nécessaires pour contenir sa clientèle ou pour en atténuer le bruit, par exemple en fermant la porte et en invitant ses clients à modérer leur enthousiasme (ATA/74/2013 du 6 février 2013 ; ATA/627/2011 du 4 octobre 2011 ; ATA/146/1999 du 2 mars 1999). Une éventuelle entrave à la sécurité publique n'est pas réprimée par l'art. 22 al. 2 LRDBH (ATA/74/2013 du 6 février 2013 ; ATA/627/2011 du 4 octobre 2011).

Alors que le projet de loi précisait simplement que si l'ordre était sérieusement troublé ou menacé de l'être, l'exploitant devait faire appel à la police (Mémorial des séances du Grand Conseil, 1985 III p. 4209), la commission ad hoc du Grand Conseil a précisé : « que ce soit à l'intérieur de l'établissement ou dans ses environs immédiats », pour bien souligner que la responsabilité de l'exploitant s’étendait au-delà des strictes limites de son établissement ou de sa terrasse (Mémorial des séances du Grand Conseil, 1987 V p. 6426 ; ATA/74/2013 du 6 février 2013 ; ATA/627/2011 du 4 octobre 2011).

Le dépôt d’une plainte n’est pas nécessaire (art. 74 al. 1 LRDBH). Le fait qu’il ne soit pas procédé, lors des interventions et des contrôles, à des mesures de décibels, ne signifie pas pour autant que l’on ait affaire à une appréciation subjective (ATA/226/2005 du 19 avril 2005 ; ATA/837/2001 du 18 décembre 2001 ; ATA/115/1999 du 9 février 1999).

b. En l’espèce et comme cela a été retenu au préalable, une animation musicale a été organisée dans l’établissement le 3 février à 00h07. Selon le rapport, le volume sonore était de nature à engendrer des inconvénients graves pour le voisinage en raison de l’heure tardive. M. N______ se défend quant à lui d’avoir organisé une animation musicale, le niveau sonore de la musique au sein de son établissement étant normal.

Afin de corroborer sa version, le recourant n’a pas apporté d’autres moyens de preuve que la déclaration de M. P______, responsable en son absence ce soir-là et entendu à titre de renseignements. Ainsi, la chambre de céans ne dispose d’aucun élément objectif suffisant pour nier la valeur probante du premier rapport de dénonciation à la LRDBH du 26 février 2012. Relevons encore que la version des faits de M. N______ est très improbable dans la mesure où la police est intervenue sur place suite à une plainte d’un voisin incommodé par le bruit et qu’elle a pu constater elle-même l’importance du volume sonore depuis l’extérieur de l’établissement déjà. Compte tenu de ces éléments objectifs, la mesure des décibels n’apparaît pas nécessaire, contrairement à ce que soutient le recourant. Il sera encore précisé que les considérations de M. N______ quant aux efforts déployés pour respecter le voisinage, à l’acharnement dont il ferait l’objet et aux autres plaintes pour bruit classées sans suite sont sans pertinence, dans la mesure où elles s’écartent de l’objet du litige et ne permettent de toute façon pas de justifier l’infraction à la loi commise ce soir-là.

13) a. L’exploitant et le personnel des cafés-restaurants ont en principe l’obligation de servir toute personne disposée à payer les mets ou boissons qu’elle commande et ayant une présentation et un comportement appropriés à la catégorie et au style de l’établissement (art. 28 al. 1 LRDBH). Il leur est toutefois interdit de servir des boissons alcooliques à des personnes en état d’ébriété (art. 49 al. 1 let. b LRDBH).

b. En l’espèce et comme relevé précédemment, il apparaît que M. P______ a servi de l’alcool à un client en état d’ébriété le 22 février 2012. Le recourant s’en défend, prétendant que ce client n’a été servi que lorsqu’il était sobre.

Une fois encore, M. N______ avance des faits en totale contradiction avec le rapport de police ayant constaté l’infraction. Il tente, sans succès, de s’appuyer sur les déclarations de M. P______ recueillies par la chambre administrative lors de l’audition d’enquête du 8 avril 2013. Or, comme cela a été rappelé à réitérées reprises, non seulement M. P______ a été entendu à titre de renseignement, mais ses déclarations sont totalement contradictoires avec celles formulées devant la police le 22 février 2012 et auxquelles il convient de se référer. En dernier lieu, on relèvera une fois encore que le déroulement des faits tel que présentés par le recourant apparaît comme fort peu probable.

14) Au vu de ce qui précède, la totalité des violations à la LRDBH et au RRDBH constatées par la police dans les trois rapports de dénonciation à la LRDBH des 1er avril 2011 et 26 février 2012 et reprochées à M. N______ par le Scom sont avérées. L’amende infligée au recourant doit ainsi être confirmée dans son principe.

15) a. Est passible d’une amende administrative allant de CHF 100.- à CHF 60'000.- tout contrevenant à la LRDBH (art. 74 al. 1 LRDBH).

Les amendes administratives prévues par les législations cantonales sont de nature pénale, car aucun critère ne permet de les distinguer clairement des contraventions pour lesquelles la compétence administrative de première instance peut au demeurant aussi exister. C’est dire que la quotité de la sanction administrative doit être fixée en tenant compte des principes généraux régissant le droit pénal (ATA/74/2013 du 6 février 2013 ; ATA/700/2012 du 16 octobre 2012 ; ATA/684/2012 du 9 octobre 2012 ; ATA/14/2011 du 11 janvier 2011 ; ATA/788/2010 du 16 novembre 2010 ; P. MOOR, Droit administratif : les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, Berne 2002, ch. 1.4.5.5, p. 139 ss).

En vertu de l'art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG - E 4 05), les dispositions de la partie générale du code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) s'appliquent à titre de droit cantonal supplétif, sous réserve de celles qui concernent exclusivement le juge pénal (comme notamment les art. 34 ss, 42 ss, 56 ss, 74 ss, 106 al. 2 et 3 et 107 CP ; ATA/71/2012 du 31 janvier 2012 ; P. MOOR, op. cit., p. 141).

Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence (HÄFELIN/MÜLLER/UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 6ème éd., Zürich-Bâle-Genève 2006, p. 252, n. 1179). Selon la jurisprudence constante, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi et jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour infliger une amende (ATA/71/2012 du 31 janvier 2012 ; ATA/14/2011 du 11 janvier 2011 ; ATA/788/2010 du 16 novembre 2010 ; ATA/571/2010 du 31 août 2010). La juridiction de céans ne la censure qu’en cas d’excès ou d’abus (ATA/160/2009 du 31 mars 2009). Le département prend en considération la nature, la gravité et la fréquence des infractions commises dans le respect du principe de proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst. ; ATA/74/2013 du 6 février 2013 ; ATA/684/2012 du 9 octobre 2012 ; Mémorial des séances du Grand Conseil, 1985, III p. 4275).

L’autorité qui prononce une mesure administrative ayant le caractère d’une sanction doit également faire application des règles contenues aux art. 47 ss CP (principes applicables à la fixation de la peine), soit tenir compte de la culpabilité de l’auteur et prendre en considération, notamment, les antécédents et la situation personnelle de ce dernier (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47 al. 2 CP ; ATA/71/2012 du 31 janvier 2012).

b. En l’espèce, le Scom a infligé à M. N______ une amende d’un montant de CHF 2'700.-.

Les violations à la LRDBH et au RRDBH qui ont conduit le Scom à le sanctionner sont avérées. Compte tenu du fait qu’en l’espace de 12 mois, l’établissement du recourant a été contrôlé à trois reprises, que systématiquement des violations à la LRDBH et au RRDBH ont été constatées et que certaines de ces infractions (organisation d’une animation musicale sans autorisation, absence de registre du personnel, service d’alcool à une personne en état d’ébriété et nuisances sonores) sont sérieuses, la quotité de l’amende est justifiée, au regard du principe de proportionnalité. La situation de M. N______ ne permet pas non plus d’envisager une diminution du montant de l’amende, ce dernier s’étant notamment vu refuser l’octroi de l’assistance juridique.

A cet égard, peu importe que le Scom ait mis plusieurs mois pour traiter les rapports de dénonciation, requérir du recourant ses observations et le sanctionner. En effet, au vu du dossier il apparaît que le Scom a choisi de traiter l’ensemble des infractions dans la même décision, ce qui explique en partie le temps écoulé entre le rapport de police du 1er avril 2011 et la décision du 21 décembre 2012. Par ailleurs, le Scom n’est pas resté inactif entre la réception desdits rapports et la communication de sa décision dans la mesure où il s’est adressé au recourant les 27 mars et 6 décembre 2012 afin que celui-ci puisse exercer son droit d’être entendu. Enfin, l’amende administrative prévue à la LRDBH n’est soumise à aucun délai.

16) Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

17) Un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge du recourant et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 31 janvier 2013 par Monsieur N______ contre la décision du service du commerce du 21 décembre 2012 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur N______ un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Leila Mahouachi, avocate du recourant, ainsi qu'au service du commerce.

Siégeants : M. Thélin, président, MM. Verniory et Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :