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Décisions | Chambre Constitutionnelle

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A/1695/2016

ACST/8/2016 du 03.06.2016 ( ELEVOT ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1695/2016-ELEVOT ACST/8/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre constitutionnelle

Arrêt du 3 juin 2016

 

dans la cause

 

A______
B______
Monsieur C______
Monsieur D______
Madame E______
Madame F______
Monsieur G______
représentés par Me Pascal Pétroz, avocat

contre

VILLE DE GENÈVE

et


SERVICE DES VOTATIONS ET ÉLECTIONS



EN FAIT

1. B______ et A______ sont des partis politiques constitués sous forme d’associations au sens des art. 60 ss du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210). Ils sont représentés au conseil municipal de la Ville de Genève (ci-après : le conseil municipal) et disposent chacun d’un représentant au sein du bureau de ce conseil. Le A______ dispose en outre d’un représentant au sein du Conseil administratif de la Ville de Genève (ci-après : le conseil administratif).

2. Mesdames E______ et F______ et Messieurs C______, D______ et G______ sont de nationalité suisse et, selon le rôle de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM), sont domiciliés en Ville de Genève (ci-après : la ville), où ils exercent leurs droits politiques. Par ailleurs, Mme E______ est élue B______ au conseil municipal, M. D______ est membre du comité du B______, M. C______ est président du bureau du A______ et Mme F______ est membre de celui-ci.

3. Le 26 août 2015, le conseil administratif a présenté au conseil municipal un projet PR 1158 de budget pour l’exercice 2016.

4. Lors de la séance du 7 septembre 2015, le conseil municipal a refusé l’entrée en matière sur ce projet, qu’il a renvoyé au conseil administratif.

5. Le 11 novembre 2015, le conseil administratif a soumis au conseil municipal un nouveau projet de budget.

Il prévoyait des revenus nets de CHF 1'153'000'000.- et des charges nettes de CHF 1'144'800'000.-, soit un solde positif de CHF 8'200'000.-. L’enveloppe annuelle des investissements était de CHF 130'000'000.-, les amortissements de CHF 82'100'000.-, soit une insuffisance de financement de CHF 39'700'000.-.

6. Le même jour, le conseil administratif a annoncé sur le site Internet officiel de la ville, dans la rubrique « actualités » de l’onglet « agenda et actualités », sous le titre « consensus du conseil administratif pour le projet de budget 2016 », qu’après avoir présenté un premier projet de budget à l’équilibre à la fin du mois d’août 2015, il était revenu vers le conseil municipal avec une nouvelle proposition, « fruit d’un compromis voté à l’unanimité par l’exécutif », qui présentait un bénéfice à hauteur de CHF 8'200'000.-.

7. a. Le 25 novembre 2015, le conseil municipal est entré en matière sur le projet de budget du conseil administratif, qu’il a traité lors des séances des 12, 14 et 15 décembre 2015.

À cette occasion, il a opéré plusieurs réductions budgétaires concernant les groupes de comptes 31 (biens, services et marchandises) et 36 (subventions accordées ; ci-après respectivement : les comptes 31 et 36). Il a ainsi réduit de 2.5 % les mandats extérieurs et les achats de la ville, en particulier les lignes d’entretien ayant trait à la gérance immobilière municipale, au service des sports et des écoles, de 2 % les subventions accordées et de 10 % les fonds généraux culturels. Il a également réduit le budget du fonds municipal de lutte contre le chômage, de CHF 600'000.-, diminué de 50 % les subventions prévues pour le fonds de soutien à l’innovation et supprimé l’« incubateur social ESSAIM ».

b. À l’issue de la séance du conseil municipal du 15 décembre 2015, le budget modifié a été accepté par quarante-et-une voix contre trente-sept.

Il prévoyait des revenus nets de CHF 1'152'987'728.- et des charges nettes de CHF 1'137'533'946.-, soit un solde positif de CHF 15'453'782.-. Les investissements nets se montaient à CHF 130'000'000.- et les amortissements et excédents de revenus de fonctionnement à CHF 97'536'596, soit une insuffisance de financement de CHF 32'463'404.-.

8. Par publication dans la Feuille d’avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du 5 janvier 2016, le comité « Non aux coupes budgétaires en Ville de Genève » (ci-après : le comité référendaire) a annoncé le lancement de deux référendums contre la délibération du conseil municipal du 15 décembre 2015 approuvant le budget 2016 en tant qu’elle prévoyait la diminution d’une part de CHF 4'362'374.- des dépenses du compte 31 et d’autre part de CHF 3'195'714 des dépenses du compte 36 par rapport à l’exercice précédent, le délai référendaire arrivant à échéance le 12 janvier 2016.

9. Par arrêté du 12 février 2016, publié dans la FAO du 16 février 2016, le Conseil d’État a fixé au 5 juin 2016 la date de la votation portant sur la délibération du conseil municipal du 15 décembre 2015 approuvant le budget 2016 et visant les comptes 31 et 36, à savoir le même jour que cinq objets fédéraux et six objets cantonaux.

10. Le 19 février 2016, le service des votations et élections (ci-après : SVE) a requis du conseil administratif qu’il lui transmettre, au plus tard le 22 avril 2016, la brochure explicative en vue du scrutin du 5 juin 2016 en lien avec le référendum lancé contre la délibération du conseil municipal du 15 décembre 2015 approuvant le budget 2016 et visant les comptes 31 et 36.

11. Par arrêté du 24 février 2016, le Conseil d’État a approuvé la délibération du conseil municipal du 15 décembre 2015 concernant le budget de fonctionnement de la ville pour l’exercice 2016, « sous réserve des référendums ».

12. Le 16 mars 2016, le conseil administratif a requis du bureau du conseil municipal de lui faire parvenir jusqu’au 30 mars 2016 ses éventuelles remarques concernant la brochure explicative relative au scrutin du 5 juin 2016 portant sur la délibération du conseil municipal du 15 décembre 2015 approuvant le budget 2016, dont le contenu lui était transmis.

13. Le 18 mars 2016, le bureau du conseil municipal a convoqué ses membres pour une séance devant se tenir le 23 mars 2016, notamment en vue de discuter et de voter sur le contenu de cette brochure explicative.

14. Par arrêtés du 23 mars 2016, publiés dans la FAO du 29 mars 2016, le Conseil d’État a constaté l’aboutissement du référendum contre la délibération du conseil municipal du 15 décembre 2015 approuvant le budget 2016 et visant les comptes 31 et 36.

15. Le 29 mars 2016, le SVE a prié Poste CH SA (ci-après : la poste) de bien vouloir procéder à l’expédition d’environ deux cent vingt-cinq mille enveloppes contenant le matériel électoral pour le scrutin du 5 juin 2016, qui devaient être expédiées de manière à ce que tous les électeurs reçoivent le matériel de vote au plus tôt le lundi 9 mai 2016 et au plus tard le samedi 14 mai 2016, dernier délai légal.

16. a. Pour les citoyens domiciliés sur le territoire de la commune de Genève, le matériel de vote comprenait notamment une brochure explicative concernant la délibération du conseil municipal du 15 décembre 2015 pour les comptes 31 et 36. Cette brochure comportait, pour chacun de ces comptes, une « synthèse brève et neutre » de deux pages, un « commentaire des autorités », subdivisé en un « commentaire de la majorité (A______, B______, H______et I______) » d’une page et demie, et en un « commentaire de la minorité (J______, K______et L______) et du conseil administratif », également d’une page et demie, ainsi qu’un « commentaire du comité référendaire », de deux pages.

b. La « synthèse brève et neutre » des comptes 31 et 36 retraçait la chronologie du budget, indiquant que le 11 novembre 2015, le conseil administratif était « revenu vers le conseil municipal avec une nouvelle proposition de budget, fruit d’un compromis voté à l’unanimité par l’exécutif » (p. 6 et 13). Elle mentionnait ensuite les réductions budgétaires décidées par le conseil municipal, notamment celles de 2.5 % sur les mandats extérieurs et les achats de la ville, « les lignes d’entretien des autres départements, par exemple celles de la gérance immobilière municipale, du service des sports ou du service des écoles (nettoiement des préaux), [étant] touchées » (p. 6 et 13). Elle indiquait également que les réductions budgétaires effectuées par le conseil municipal avaient amélioré le résultat financier, qui était passé de CHF 8'200'000.- d’excédent à CHF 15'500'000.- et que le budget de la ville avait été adopté par quarante-et-une voix contre
trente-sept (p. 7 et 14).

c. Le commentaire de la majorité faisait état de la mauvaise conjoncture économique et de la diminution des recettes fiscales à l’avenir, le manque à gagner étant estimé à CHF 50'000'000.-. L’autofinancement des investissements était en outre nécessaire pour réduire la dette, qui atteignait CHF 1'510'000'000.- actuellement. Malgré les doléances du conseil municipal, le conseil administratif n’avait pas jugé bon de « réduire la voilure » dans son projet de budget 2016, le solde positif présenté, de CHF 8'200'000.-, n’étant pas suffisant (p. 8 et 15), de sorte que la majorité des députés avait pris ses responsabilités et amélioré le résultat de quelque CHF 7'300'000.-, générant ainsi un excédent de CHF 15'500'000.- à affecter au remboursement de la dette (p. 9 et 15). Dès lors que la ville ne s’assurait pas de la qualité des projets qu’elle subventionnait, des audits devaient être mis en place afin de déterminer si ces subventions étaient justifiées (p. 15). Ces mesures d’économie, qui étaient responsables, ne péjoraient en outre pas le fonctionnement de la ville (p. 9) et n’affectaient pas non plus les domaines prioritaires, comme celui de la famille, dans lequel une diminution de 20 % du prix des places de crèche avait été décidée (p. 16).

d. Le commentaire de la minorité et du conseil administratif indiquait, sous le titre « aucune justification financière aux coupes décidées », que le conseil municipal n’avait aucune raison de procéder à une diminution dans les comptes 31 et 36 au regard de l’excellente santé financière dont jouissait la ville, dont la dette avait diminué de 17.9 % depuis 2007, ce qui était rappelé par différentes études, qui saluaient les performances de gestion de la commune (p. 9 et 16).

Sous le titre « Le bon fonctionnement de la ville est mis en danger » était mentionné que la « coupe » décidée était de nature à entraîner une diminution des mandats confiés à des prestataires externes pour l’entretien des infrastructures et des bâtiments municipaux, ce qui avait des conséquences sur le nettoyage des places de jeux, des parcs, des pataugeoires ou des préaux des écoles. Diverses activités et manifestations, notamment les cours de sport pour les enfants et les personnes âgées, la fête de la musique, la ville est à vous ou l’installation de patinoires étaient également touchées (p. 10). Le titre suivant, intitulé « L’économie locale est menacée », indiquait que de nombreux secteurs économiques étaient touchés par cette « coupe », le fait de « priver les petites et moyennes entreprises (ci-après : PME) d’une partie de leurs recettes [étant] incompréhensible » (p. 10).

L’intitulé « Cette coupe pénalise des secteurs clés » indiquait que la mesure soumise au vote, « infondée financièrement », affectait le domaine social en réduisant de 2 % le soutien destiné aux associations et en « rabotant » les prestations complémentaires versées aux retraités. De nombreuses institutions et des emplois étaient en outre menacés, de même que l’accessibilité et la diversité de l’offre culturelle, la réduction des subventions accordées à la solidarité internationale n’étant pas sans conséquences sur la « Genève internationale » (p. 16 s.). Le titre suivant, « La cohésion sociale est menacée », expliquait que le fait d’amputer une partie du budget des associations d’aide aux personnes âgées, de distribution de nourriture aux défavorisés, d’activités de loisirs pour les enfants, d’aide aux femmes battues, de prévention du suicide ou d’encadrement des jeunes en rupture était « irresponsable » (p. 17). Ces explications se terminaient par un dernier titre intitulé « Une mesure qui impactera l’économie et les finances municipales » (p. 17).

e. Le commentaire du comité référendaire indiquait quant à lui que les réductions de CHF 7'000'000.- effectuées par le conseil municipal constituaient une attaque contre les prestations à la population, étaient un programme global de démantèlement du service public, frappaient divers événements culturels populaires, menaçaient la sécurité et le cadre de vie des habitants et constituaient des attaques irresponsables contre la qualité de vie (p. 11-12 et 18-20).

17. La brochure explicative a été placée par le SVE sur le site internet de l’État de Genève après le 21 avril 2016, date de la « création » de ce document.

18. a. L’édition du 19 mai 2016 d’un quotidien a consacré la rubrique « Face-à-face » au thème « Pour ou contre les coupes budgétaires votées par le Conseil municipal de la Ville de Genève ? ». Étaient invitées à s’exprimer sur ce sujet Madame M______, conseillère municipale B______, et Madame N______, conseillère administrative J______.

b. L’article commençait par l’avis de Mme M______, intitulé « Oui à un budget de solidarité ! ». À Genève, près d’un quart du budget de la ville, qui avait augmenté de CHF 217'000'000.- depuis 2002, était consacré à la culture, alors que d’autres grandes villes n’affectaient à ce poste que 4 %, voire 6 % de leur budget. Cette situation était en partie due au refus systématique d’établir des priorités de la part du conseil administratif, lequel se montrait également réticent au changement au motif que « tout était indispensable », malgré certains dysfonctionnements, des prestations superflues ou n’offrant pas de plus-value apparente, ce dont témoignaient ses innombrables publications pour présenter des bilans flatteurs ou son allocution de « rentrée scolaire à la française ». La situation était toutefois inquiétante, dès lors que depuis plusieurs années, les recettes fiscales diminuaient, ce à quoi s’ajoutait la réforme de l’imposition des entreprises, qui devait entraîner à terme des pertes estimées à CHF 60'000'000.- pour la ville. Il s’ensuivait que celle-ci devait réduire ses dépenses et gouverner avec prévoyance. À cette fin, le conseil municipal avait décidé d’adapter les subventions au coût de la vie et à l’indice des prix à la consommation, qui avait chuté, tout en votant un crédit supplémentaire de CHF 2'000'000.- pour la petite enfance, afin de ne pas péjorer la tarification des crèches en faveur de la classe moyenne. Il restait au conseil administratif, dont la marge de manœuvre était importante, à étudier des pistes pour utiliser avec efficience son budget, sans prendre en otage les institutions culturelles et sociales. Le citoyen genevois devait notamment rappeler à la « gauche dogmatique », avide de dilapider l’argent public en exigeant sans cesse des augmentations d’impôts qui fragilisaient la place financière genevoise et faisaient fuir les gros contribuables, que pour offrir des prestations sociales et culturelles riches et abondantes, il convenait d’accepter le budget voté par le conseil municipal.

c. S’ensuivait l’avis de Mme N______, intitulé « Des coupes qui ne s’imposent pas ». Il y était indiqué que la majorité du conseil municipal, se cachant derrière des prévisions fiscales alarmistes, notamment en lien avec la réforme de la fiscalité des entreprises, avait voté des coupes par CHF 7'000'000.- dans le budget proposé par le conseil administratif. Ce projet, pourtant bénéficiaire de CHF 8'200'000.-, qui présentait des charges stables et des investissements autofinancés, qui maintenait les prestations chères à la population, qui permettait de « redoter » certaines politiques publiques, comme les crèches, la sécurité ou la formation des jeunes, était socialement responsable et reflétait l’excellente santé financière de la ville. La dette municipale avait ainsi diminué de 12.7 % depuis 2007, la moyenne d’autofinancement des investissements sur dix ans avait atteint 144 % et les comptes de l’exercice 2015 affichaient un boni de CHF 39'500'000.-. Dans un contexte dans lequel la population, les inégalités et la précarité augmentaient, l’action des pouvoirs publics devait s’intensifier et se focaliser sur le maintien de la cohésion sociale. Or, les mesures décidées par la majorité du conseil municipal suivaient la logique inverse en affectant le monde associatif, lequel déployait un travail important en matière d’aide aux personnes âgées, de soutien aux familles, de prévention du suicide ou d’encadrement des jeunes en rupture. Elles affaiblissaient également le monde artistique, « taclaient » l’économie locale et touchaient les plus précarisés, notamment par le biais des prestations complémentaires AVS/AI versées aux retraités ou du fonds de chômage. Depuis deux ans, le conseil administratif s’engageait avec conviction pour défendre les intérêts de la commune et de ses habitants dans les négociations avec le canton, en adoptant une attitude « proactive » et en mettant tout en œuvre pour continuer à garantir des prestations de qualité à la population. La ville avait également démontré par le passé qu’elle savait gérer les deniers publics et pouvait composer avec moins de recettes fiscales, ce que sa situation fiscale n’exigeait toutefois pas à l’heure actuelle. Il était dès lors essentiel de voter « non » aux coupes budgétaires.

19. Le 20 mai 2016, la poste a informé le SVE que les enveloppes contenant le matériel de vote avaient été distribuées dans les délais requis, soit entre le lundi 9 et le vendredi 13 mai 2016.

20. Par acte remis à la poste le 23 mai 2016, le A______, le B______, Mmes E______ et F______ et MM. C______, D______ et G______ (ci-après : les recourants) ont saisi la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (ci-après : la chambre constitutionnelle) d’un recours « dans le cadre de la votation communale du 5 juin 2016 relative à la délibération du Conseil municipal de la Ville de Genève du 15 décembre 2015 approuvant le budget 2016 en tant qu’elle prévoit la diminution de CHF 4'362'374.- des dépenses du groupe de comptes 31 (biens, services et marchandises) par rapport à l’exercice précédent et la diminution de CHF 3'195'714.- des dépenses du groupe de comptes 36 (subventions accordées) par rapport à l’exercice précédent ».

Ils ont conclu, sur mesures provisionnelles, à ce qu’il soit constaté que l’exposé des motifs intégré dans le matériel de vote et l’article paru dans le quotidien du 19 mai 2016 violaient la garantie des droits politiques, à l’annulation et au report du scrutin du 5 juin 2016 ainsi qu’à l’établissement d’un nouveau matériel conforme à la garantie des droits politiques. Sur le fond, ils ont conclu, « avec suite de dépens », à ce qu’il soit constaté que l’exposé des motifs intégré dans le matériel de vote et l’article paru dans le quotidien du 19 mai 2016 violaient la garantie des droits politiques, à l’annulation et au report du scrutin du 5 juin 2016 et à l’établissement d’un nouveau matériel de vote conforme à la garantie des droits politiques.

Le recours avait été formé dans le délai requis, dès lors que les personnes physiques recourantes, en particulier M. C______, avaient reçu le matériel de vote contenant notamment la brochure explicative à compter du 17 mai 2016, à l’exception de Mme E______ qui ne l’avait pas encore reçu à ce jour.

La brochure explicative contenait plusieurs irrégularités s’agissant des comptes 31 et 36. En particulier, dans une prise de position destinée à être neutre, le conseil administratif décrédibilisait le budget voté par le conseil municipal, en soutenant qu’il était allé à l’encontre du projet adopté à l’unanimité de ses membres, ce qui relevait de la polémique concernant l’impact des diminutions budgétaires. L’utilisation du terme « touché » n’était au surplus pas innocente, ni objective et encore moins neutre, puisque le conseil administratif soutenait par-là que les immeubles, les places de sport et les préaux seraient moins entretenus. Les commentaires de la minorité et du conseil administratif allaient dans le même sens. En prétendant que la santé financière de la ville était excellente et que la dette avait diminué, le conseil administratif omettait de préciser que celle-ci était en réalité abyssale, l’utilisation du terme de « coupe » budgétaire étant au surplus dévalorisant. Les titres de ces commentaires, de même que leur contenu, étaient encore pires. En indiquant que « le bon fonctionnement de la Ville est mis en danger » et que de nombreux secteurs économiques, y compris les PME, seraient touchés et que par conséquent toutes les prestations à la population étaient concernées, le conseil administratif se montrait indûment alarmiste au sujet de la réduction votée, qui n’était que de l’ordre de respectivement 2.5 % et 2 %. L’argument selon lequel le budget litigieux pouvait engendrer une vague de faillites et de licenciements était au surplus faux et mensonger. Il en allait de même du fait d’indiquer que la « coupe » pénalisait « des secteurs clés », qu’elle était « infondée financièrement », qu’elle menaçait la cohésion sociale, que la mesure proposée était « irresponsable » et qu’elle avait des conséquences sur « l’économie et les finances municipales ». Il résultait de ces éléments que la brochure explicative n’était pas rédigée avec objectivité, encore moins avec retenue, tant par rapport aux termes utilisés qu’en lien avec son contenu, comportait des allégués fallacieux et ouvrait la voie à la polémique. À cela s’ajoutait que la synthèse comportait deux pages, celle du conseil administratif une page et demie et celle du comité référendaire deux pages, alors que le commentaire de majorité n’était que d’une page et demie, ce qui constituait un déséquilibre justifiant déjà l’admission du recours.

L’article paru dans le quotidien du 19 mai 2016 constituait une intervention mensongère et illégale de la part du conseil administratif dans le cadre de la campagne de votation et violait de manière crasse l’interdiction de toute propagande électorale de la part des autorités. Il importait peu qu’il soit le fait d’une seule personne, dans la mesure où le citoyen n’était pas en mesure de distinguer entre un magistrat s’exprimant à titre personnel de celui le faisant au nom du collège dont il était membre. Cette situation était d’autant plus problématique que Mme N______ était responsable des finances, dicastère concerné par la votation en cause, s’exprimant sur un sujet dont elle avait la charge, et qu’elle se référait au conseil administratif dans son ensemble. Son contenu était tout aussi faux et mensonger que la brochure explicative, dont elle s’inspirait. L’intéressée y prétendait faussement que les « coupes » en question touchaient les personnes âgées, les familles, les jeunes en rupture, les artistes, les retraités, les chômeurs et plus généralement l’économie locale. Elle omettait toutefois de préciser que le budget voté par le conseil municipal réduisait de 20 % les tarifs des crèches, ce qui représentait une dépense supplémentaire de CHF 7'000'000.- par année. Le fait qu’un partisan du projet ait pu s’exprimer sur la même page dudit quotidien n’y changeait rien, dès lors qu’il ne s’agissait pas d’un débat, mais d’une tribune libre.

21. Le 25 mai 2016, le juge délégué a sollicité des recourants des explications complémentaires au sujet de la date exacte, pour chacun d’entre eux, de la prise de connaissance de la brochure explicative.

22. Le 26 mai 2016, les recourants ont expliqué au juge délégué que M. C______ avait pris connaissance de la brochure explicative le 17 mai 2016, M. D______ le lendemain et Mmes E______ et F______ et M. G______ le 23 mai 2016. Dès lors que Mme F______ était membre du comité du A______ et que M. C______ en était le président, leur prise de connaissance devait être imputée à leur parti, de sorte que le délai pour recourir du A______ était respecté. Les mêmes principes devaient s’appliquer au B______ concernant Mme E______ et M. D______, lesquels étaient membres du comité de leur parti.

23. Le 30 mai 2016, la ville a répondu au recours, concluant, « avec suite de frais et dépens » préalablement au rejet des mesures provisionnelles sollicitées et à l’appel en cause du comité référendaire, principalement à l’irrecevabilité du recours en tant qu’il était dirigé contre le contenu de la brochure explicative et à son rejet pour le surplus et, subsidiairement, au rejet du recours.

L’appel en cause du comité référendaire devait être ordonné, dès lors que sa situation risquait d’être affectée par l’issue du recours. En tant qu’il portait sur le contenu de la brochure explicative, celui-ci était d’ailleurs tardif, le matériel de vote ayant été distribué entre les 9 et 13 mai 2016 et mis en ligne sur le site internet de l’État depuis le 22 avril 2016. À cela s’ajoutait que le contenu de la brochure litigieuse avait été soumise au bureau du conseil municipal, composé d’un représentant par groupe politique, pour consultation durant le mois de mars 2016. Il s’ensuivait que les recourants devaient avoir connaissance du contenu de la brochure bien avant la date qu’ils indiquaient.

Sur le fond, le recours était, en tout état de cause, mal fondé. La « synthèse brève et neutre » respectait tous les critères requis de concision, d’objectivité et de neutralité et ne comportait aucun élément de nature à influencer la libre volonté des électeurs, les commentaires appréciatifs figurant dans une section spécifique. Cette dernière, consacrée au commentaire des autorités, exposait sur trois pages et de manière équivalente la position de la majorité du conseil municipal d’un côté et celle de l’importante minorité ainsi que du conseil administratif de l’autre. Son contenu respectait également les exigences posées par la jurisprudence rendue en la matière, étant précisé qu’il n’avait pas à être neutre étant donné qu’il contenait des prises de position. Ainsi, tant les partisans que les opposants aux réductions budgétaires avaient pu faire valoir leurs arguments.

Dès lors qu’il concernait le budget et que ses conséquences sur le fonctionnement et les prestations offertes par la ville étaient complexes, une information de la part des autorités s’imposait, afin que le citoyen puisse se rendre compte des implications des coupes budgétaires sur lesquelles il devait se prononcer. Dans ce contexte, Mme N______ avait accepté de participer à un débat écrit dans la presse, dûment autorisé par la loi, et s’était exprimée à ce sujet, tout comme Mme M______, également membre des institutions de la ville. Les arguments qu’elle avait développés relevaient du reste tant d’une présentation objective des faits que d’une prise de position licite au regard de la jurisprudence.

b. La ville a notamment joint à ses écritures :

- un communiqué de presse de Standard & Poor’s Ratings Services du 13 novembre 2015 selon lequel la note « AA » de la ville était confirmée, « la perspective [restant] stable » ;

- un rapport de l’Institut de hautes études en administration publique de l’Université de Lausanne (ci-après : IDHEAP) de décembre 2015 à l’attention de la direction du département des finances et du logement intitulé « comparatif des finances de la ville de Genève » indiquant que la situation financière de la ville était très bonne en 2014, après deux « passages à vide » en 2003 et 2013 ;

- le procès-verbal de la séance du bureau du conseil municipal du 23 mars 2016 portant notamment sur la brochure explicative rédigée par le conseil administratif en vue du scrutin du 5 juin 2016 concernant la délibération du conseil municipal du 15 décembre 2015 approuvant le budget 2016.

24. Le 30 mai 2016, le SVE a informé le juge délégué qu’il n’avait aucune observation à formuler sur le recours.

25. Le 31 mai 2016, les recourants ont requis du juge délégué l’octroi d’un délai pour répliquer, que celui-ci leur a accordé le jour-même pour le lendemain.

26. Le 1er juin 2016, les recourants ont répliqué, persistant dans les conclusions et termes de leur recours.

Il était fallacieux de prétendre que le recours était tardif, en particulier s’agissant de M. G______, qui n’occupait aucune fonction élective ni n’était membre d’un quelconque parti politique, l’intéressé n’ayant pas non plus été en mesure de prendre connaissance du matériel de vote sur internet. De plus, la poste ne pouvait pas attester de manière précise la date de réception par pli simple de toutes les enveloppes de vote. Sur le fond, la ville tentait de biaiser le débat en s’en prenant à l’argumentaire de la majorité, qui n’était d’aucune pertinence pour l’issue du présent litige, dans le cadre duquel seule l’attitude des autorités devait être examinée. Il n’était pas non plus possible de soutenir que l’intervention du conseil administratif dans la presse était justifiée par un besoin de rectifier des informations erronées diffusées par des tiers. Une intervention supplémentaire, allant au-delà de celle figurant dans la brochure explicative, ne se justifiait pas davantage. Le respect de l’égalité des armes eût d’ailleurs commandé de confier la tâche de répondre à Mme M______ à un membre du comité référendaire.

27. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

 

 

EN DROIT

1. Selon l’art. 124 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE - A 2 00), la Cour constitutionnelle, c'est-à-dire la chambre constitutionnelle de la Cour de justice (art. 1 let. h ch. 3 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05), a pour compétence notamment de traiter les litiges relatifs à l’exercice des droits politiques en matière cantonale et communale (let. b). Lors de la mise en œuvre de cette disposition constitutionnelle, par le biais de la loi 11311 du 11 avril 2014, le législateur cantonal a, pour ces litiges, transféré à la chambre constitutionnelle (art. 180 de la loi sur l’exercice des droits politiques du 15 octobre 1982 - LEDP - A 5 05) la compétence qu’avait jusqu’alors la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) de connaître des recours ouverts « contre les violations de la procédure et des opérations électorales, indépendamment de l’existence d’une décision » (art. 180 aLEDP).

2. a. Comme le Tribunal administratif, puis la chambre administrative et enfin la chambre de céans l’ont jugé à maintes reprises, entre dans le cadre des opérations électorales tout acte destiné aux électeurs de nature à influencer la libre formation du droit de vote, telle qu’elle est garantie par les art. 34 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) et 44 Cst-GE, indépendamment de l’existence d’une décision. Constitue une opération électorale tout acte destiné aux électeurs et de nature à influencer la libre formation de l’expression du droit de vote ; le matériel de vote en général et la brochure explicative en particulier en font partie, de même que des circulaires et des tracts (ACST/3/2016 du 24 février 2016 ; ACST/10/2015 du 11 mai 2015 ; ACST/6/2015 du 26 mars 2015 ; ACST/5/2015 du 4 mars 2015 ; ATA/65/2013 du 6 février 2013 ; ATA/715/2012 du 30 octobre 2012 ; ATA/331/2012 du 5 juin 2012 ; ATA/180/2011 du 17 mars 2011 ; ATA/51/2011 du 1er février 2011 ; ATA/118/2010 du 23 février 2010 ; ATA/58/2009 du 3 février 2009 ; ATA/583/2008 du 18 novembre 2008). La constatation du résultat exact, de même que le respect de la procédure en matière électorale font partie de la liberté de vote (ATF 140 I 394 consid. 8.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_136/2014 du 22 juillet 2014 consid. 5.1 ; ACST/10/2015 précité ; ACST/8/2015 du 31 mars 2015).

b. En l’espèce, le recours porte sur le matériel de vote, en particulier la brochure explicative transmise aux citoyens domiciliés en ville de Genève, qui fait partie de la procédure des opérations électorales, ainsi que sur l’intervention dans la presse de Mme N______ le 19 mai 2016 en lien avec la délibération du conseil municipal du 15 décembre 2015, objet du scrutin communal du 5 juin 2016. Ces éléments ayant trait à la garantie des droits politiques, qui tend à assurer la régularité du vote et parvenir à la constatation fidèle et sûre de la volonté populaire, la chambre de céans est matériellement compétente pour connaître du présent recours.

3. a. En matière de droits politiques, la qualité pour recourir est reconnue à toute personne disposant du droit de vote dans l’affaire en cause, indépendamment d’un intérêt juridique ou digne de protection à l’annulation de l’acte attaqué (art. 89 al. 3 et 111 al. 1 de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 - LTF -RS 173.110 ; ATF 138 I 171 consid. 1.3 ; 134 I 172 consid. 1.2 ; 128 I 190 consid. 1.1 ; ACST/8/2015 précité ; ACST/6/2015 précité ; ACST/5/2015 précité ; ACST/1/2015 du 23 janvier 2015). La qualité pour recourir est également reconnue notamment aux partis politiques, pour autant qu’ils soient constitués en personnes morales, qu’ils exercent leurs activités dans la collectivité publique concernée pour la votation en cause et qu’ils recrutent principalement leurs membres en fonction de leur qualité d’électeur (arrêt du Tribunal fédéral 1C_424/2009 du 6 septembre 2009 consid. 1.2 non publié de l’ATF 136 I 404 ; ACST/3/2016 précité ; ATA/201/2013 du 26 mars 2013 ; ATA/163/2009 du 31 mars 2009 ; ATA/712/2000 du 21 novembre 2000).

b. En l’espèce, le A______ et le B______ sont des partis politiques constitués en associations au sens des art. 60 ss CC et exercent leurs activités sur le territoire communal, disposant de représentants au conseil municipal ainsi qu’au conseil administratif s’agissant du premier nommé. Ils ont dès lors qualité pour recourir, tout comme les autres recourants, personnes physiques ressortissantes suisses qui sont, selon le rôle de l’OCPM, domiciliées sur le territoire communal, où elles exercent leurs droits politiques. Le recours est ainsi recevable de ce point de vue.

4. a. Aux termes de l’art. 62 al. 1 let. c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), en matière de votations et d’élections, le délai de recours est de six jours.

b. Ce délai court à compter du jour où, en faisant montre à cet égard de la diligence commandée par les circonstances, le recourant a pris connaissance de l’irrégularité entachant, selon lui, les opérations électorales (ACST/10/2015 précité ; ACST/6/2015 précité ; ACST/5/2015 précité ; ATA/118/2014 du 25 février 2014 ; ATA/715/2012 précité).

c. Selon la jurisprudence constante rendue en matière de votations et d’élections, le citoyen qui veut s’en prendre aux dispositions de l’autorité fixant les modalités du vote doit en principe former son recours immédiatement, sans attendre le résultat du scrutin ; s’il omet de le faire alors qu’il en a la possibilité, il s’expose aux risques de la péremption de son droit de recourir. Dans de tels cas, le délai commence à courir au moment où l’intéressé a connaissance de l’acte préparatoire qu’il critique. Il serait contraire aux principes de la bonne foi et de l’économie de procédure démocratique que le recourant attende le résultat du vote pour attaquer les actes antérieurs dont il pourrait, encore avant le vote, faire cas échéant corriger l’irrégularité alléguée (ATF 140 I 338 consid. 4.4 ; 118 Ia 271 consid. 1d ; 118 Ia 415 consid. 2a ; 110 Ia 176 consid. 2a ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_105/2015 du 2 mars 2015 consid. 4 ; 1C_282/2014 du 7 juillet 2014 consid. 2 ; 1C_457/2013 du 26 novembre 2013 consid. 3.1 ; ACST/3/2016 précité ; ACST/10/2015 précité ; ATA/201/2013 précité). Si le délai de recours contre l’acte préparatoire n’est pas encore échu au moment du vote, le citoyen peut encore déposer son recours après celui-ci, mais avant l’expiration du délai (ATF 118 Ia 415 consid. 2), même si le vote a déjà eu lieu et qu’il n’est plus possible de remédier à l’irrégularité alléguée (ATA/680/2000 du 7 novembre 2000, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 1P.733/2000 du 14 mai 2001 ; ATA/456/2011 du 26 juillet 2011 ; ATA/303/2011 du 17 mai 2011).

d. Les délais de réclamation et de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont, en principe, pas susceptibles d’être prolongés (art. 16 al. 1, 1ère phr., LPA), restitués ou suspendus, si ce n’est par le législateur lui-même. Ainsi, celui qui n’agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (ATA/244/2015 du 3 mars 2015 ; ATA/143/2015 du 3 février 2015 ; ATA/284/2012 du 8 mai 2012). Les cas de force majeure restent toutefois réservés (art. 16 al. 1, 2ème phr., LPA). Tombent sous cette notion les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d’activité de l’intéressé et qui s’imposent à lui de l’extérieur de façon irrésistible (ATA/244/2015 précité ; ATA/143/2015 précité ; ATA/280/2012 du 8 mai 2012 ; ATA/105/2012 du 21 février 2012 ; ATA/586/2010 du 31 août 2010).

5. a. Pour les scrutins fédéraux, l’art. 11 al. 3 de la loi fédérale sur les droits politiques du 17 décembre 1976 (LDP - RS 161.1) prévoit que les électeurs reçoivent, au plus tôt quatre semaines avant le jour de la votation, mais au plus tard trois semaines avant cette date, les documents qui, au regard du droit cantonal, leur permettent d’exprimer valablement leur vote (bulletin de vote, carte de légitimation, enveloppe électorale, timbre de contrôle, etc.). Le texte soumis à la votation et les explications peuvent cependant leur être remis plus tôt. La Chancellerie fédérale publie, sur support électronique et au plus tard six semaines avant le jour de la votation, les textes soumis à la votation et les explications qui les accompagnent.

b. À Genève, pour les votations fédérales, les électeurs reçoivent, au plut tôt quatre semaines avant le jour de la votation mais au plus tard trois semaines avant cette date, les bulletins de vote, les textes soumis à la votation et les explications y relatives (art. 52 LEDP). Ces délais sont les mêmes pour les votations cantonales et communales, les électeurs recevant alors le bulletin de vote, les textes soumis à la votation, des explications qui comportent s’il y a lieu un commentaire des autorités d’une part et des auteurs du référendum ou de l’initiative d’autre part ainsi que les recommandations du Grand Conseil ou du conseil municipal (art. 53 al. 1 LEDP).

Depuis le 30 mars 2016, date de l’entrée en vigueur de la loi 11714 modifiant la LEDP, adoptée le 29 janvier 2016, l’art. 53 al. 2 LEDP prévoit, s’agissant des votations cantonales et communales, que le texte soumis à la votation et les explications peuvent être remis plus tôt aux électeurs. La Chancellerie d’État publie, sur support électronique et au plus tard six semaines avant le jour de la votation, les textes soumis à la votation et les explications qui les accompagnent. Cette disposition a été adoptée afin de permettre la publication des documents concernés avant la remise de leur version papier aux citoyens et ainsi, à l’instar du droit fédéral, susciter un débat en toute connaissance de cause, avant que les consignes de vote ne soient données par les partis politiques (exposé des motifs relatif au projet de loi 11714 p. 3, consultable sur le site http://ge.ch/grandconseil/memorial/seances/010213/83/18/). Avant l’entrée en vigueur de cette disposition, l’ancien Tribunal administratif avait jugé, dans un arrêt rendu en 2008, que la législation alors en vigueur ne permettait pas la diffusion de la brochure explicative sur le site internet de l’État. Cette situation, à la différence de l’envoi du texte en tant que tel, n’ouvrait ainsi pas l’exercice du droit de vote. En d’autres termes, ce qui était déterminant était la prise de connaissance des objets soumis au corps électoral par le biais de la transmission du matériel de vote par la poste, la diffusion sur internet des documents y relatif ne constituant qu’une présomption de prise de connaissance (ATA/583/2008 précité consid. 3).

c. Par ailleurs, en matière communale, le commentaire des autorités est rédigé par l’exécutif. Il comprend une synthèse brève et neutre de chaque objet soumis à la votation, défend de façon objective le point de vue du conseil municipal et indique le résultat du vote en mentionnant, le cas échéant, l’avis de l’exécutif et d’importantes minorités. L’exécutif soumet son projet de commentaire au bureau du conseil municipal, dont il recueille les observations (art. 53 al. 4 LEDP).

6. En l’espèce, le recours a été déposé auprès d’un office de poste le 23 mai 2016. En tant qu’il est dirigé contre l’article de presse paru le 19 mai 2016, le recours a été interjeté dans le délai de l’art. 62 al. 1 let. c LPA, de sorte qu’il est recevable de ce point de vue.

Il reste à savoir s’il l’est également s’agissant de la brochure explicative relative au scrutin du 5 juin 2016. Il ressort du dossier que le SVE a requis de la poste la distribution du matériel de vote, dans lequel elle figurait, afin que tous les électeurs le reçoivent au plus tôt le lundi 9 mai 2016 et au plus tard le samedi 14 mai 2016, ce que la poste a confirmé avoir fait, indiquant avoir procédé à sa distribution du lundi 9 au vendredi 13 mai 2016. Les personnes physiques recourantes devaient ainsi avoir reçu ces documents au plus tard le 13 mai 2016, comme l’exige du reste le délai prévu tant par la LDP que la LEDP, et pouvaient en prendre connaissance dès cette date. À cela s’ajoute que la brochure explicative est également publiée sur le site internet du canton de Genève, à l’instar de celles des autres objets soumis au scrutin du même jour, avant même sa distribution dans le matériel de vote. Il paraît ainsi fort douteux que les recourants dans leur ensemble n’aient eu connaissance du contenu de la brochure qu’à compter du mardi 17 mai 2016, après le week-end de Pentecôte, ce d’autant qu’ils n’allèguent aucun empêchement. La question de la recevabilité du recours en lien avec les griefs dirigés contre la brochure explicative peut néanmoins souffrir de rester ouverte au regard de ce qui suit, tout comme celle de la recevabilité sous le même angle du recours des deux partis politiques concernés, qui disposent chacun d’un représentant au bureau du conseil municipal, lequel a été amené à se prononcer sur le contenu de la brochure explicative dans sa séance du 23 mars 2016.

7. L’acte de recours satisfait par ailleurs aux exigences de forme et de contenu prescrites par les art. 64 al. 1 et 65 LPA. En particulier, il comporte un exposé des motifs suffisants (art. 65 al. 2, 1ère phr., LPA), étant précisé que l’exigence d’un exposé détaillé des griefs prévue pour les recours en matière de validité des actes normatifs (art. 65 al. 3 LPA) n’est pas posée pour les recours en matière de votations et d’élection. Appliquant le droit d’office, la chambre de céans n’est cependant pas liée par les motifs invoqués par les parties, mais elle l’est par les conclusions prises par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA).

8. a. L’art. 34 al. 1 Cst. garantit de manière générale et abstraite les droits politiques, que ce soit sur le plan fédéral, cantonal ou communal. Selon l’art. 34 al. 2 Cst., qui codifie la jurisprudence rendue par le Tribunal fédéral sous l’empire de la Constitution fédérale du 29 mai 1874 (arrêt du Tribunal fédéral 1P.298/2000 du 31 août 2000 consid. 3a), cette garantie protège la libre formation de l’opinion des citoyens et l’expression fidèle et sûre de leur volonté. L’art. 44 Cst-GE contient un texte similaire.

b. En particulier, l’art. 34 al. 2 Cst. garantit aux citoyens qu’aucun résultat de vote ne soit reconnu s’il ne traduit pas de façon fidèle et sûre l’expression de leur libre volonté. Chaque citoyen doit pouvoir se déterminer en élaborant son opinion de la façon la plus libre et complète possible et exprimer son choix en conséquence. La liberté de vote garantit la sincérité du débat nécessaire au processus démocratique et à la légitimité des décisions prises en démocratie directe (ATF 140 I 394 consid. 8.2 ; 140 I 338 consid. 5 ; 139 I 2 consid. 6.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_130/2015 du 20 janvier 2016 consid. 3.1).

c. Le résultat d’une votation est faussé lorsque les autorités influencent de manière inadmissible les citoyens. Une telle influence peut notamment s’exercer par le biais des explications officielles adressées aux citoyens, dans lesquelles l’autorité explique l’objet du scrutin et recommande son acceptation ou son rejet. Dans ce cadre, l’autorité n’est pas tenue à un devoir de neutralité et peut formuler une recommandation de vote. Elle doit toutefois respecter un devoir d’objectivité, qui est violé lorsqu’elle informe de manière erronée sur le but et la portée du projet. Les explications de vote satisfont en revanche à l’exigence d’objectivité lorsqu’elles sont équilibrées et répondent à des motifs importants, qu’elles fournissent une image complète du projet avec ses avantages et ses inconvénients et qu’elles mettent les électeurs en mesure d’acquérir une opinion. Le message explicatif peut notamment contenir l’avis des autorités sur des questions d’appréciation, car il appartient en définitive à l’électeur de se faire lui-même sa propre opinion. Au-delà d’une certaine exagération, les explications de vote ne doivent être ni contraires à la vérité ni tendancieuses, voire simplement inexactes ou incomplètes. L’autorité n’est pas tenue de discuter chaque détail du projet ni d’évoquer chaque objection qui pourrait être soulevée à son encontre, mais il lui est interdit de passer sous silence des éléments importants pour la décision du citoyen ou de reproduire de manière inexacte les arguments des adversaires du référendum ou de l’initiative (ATF 140 I 338 consid. 5.1 ; 139 I 2 consid. 6.2 ; ATF 138 I 61 consid. 6.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_130/2015 précité consid. 3.1 ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. 1, 3e éd., 2013, n. 928).

L’autorité ne doit pas non plus intervenir de manière inadmissible dans la campagne précédant une votation, en utilisant des moyens répréhensibles. Par exemple, une commune peut certes mettre en œuvre les mêmes moyens d’information que ceux généralement utilisés par les partisans et adversaires d’un projet mis en votation, mais elle doit faire preuve d’une certaine objectivité et s’abstenir d’engager dans la campagne des moyens financiers disproportionnés (ATF 119 Ia 271 consid. 3b ; 116 Ia 466 consid. 4b et 4c ; 114 Ia 427 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_424/2009 précité consid. 3.1 non publié de l’ATF 136 I 404). L’autorité peut également répondre aux prises de position souvent unilatérales des groupes de pression influents de la société civile, pour tenter de rétablir une certaine objectivité du débat politique (Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, op. cit., n. 929). Quant aux membres de l’autorité concernée, titulaires de la liberté d’expression et citoyens, ils peuvent en principe s’exprimer librement durant la campagne en prenant position dans la campagne référendaire à titre individuel, en signant des appels publics, en rédigeant des articles de presse ou en participant à des émissions tout en mentionnant leur nom et position pour conférer un poids particulier à leur engagement politique. Ce qu’ils doivent éviter en revanche est de donner une touche officielle à leurs interventions privées pour créer l’impression qu’il s’agit d’un acte d’autorité (ATF 130 I 290 consid. 3.3 ; 119 Ia 271 consid. 3d ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_424/2009 précité consid. 3.1 non publié de l’ATF 136 I 404 ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, op. cit., n. 935). Le Tribunal fédéral a par exemple jugé que, dans le cadre d’une campagne référendaire, le fait qu’un conseiller d’État ait répondu publiquement dans un article de presse aux objections qu’avaient soulevées le rapport explicatif du gouvernement ne violait pas la liberté de vote (ATF 130 I 290 consid. 5.3 ; Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, op. cit., p. 310 s. n. 935).

Pour savoir si les électeurs ont acquis une opinion suffisante et objective sur l’objet soumis au vote, il convient de prendre en considération le contexte global et l’ensemble des informations diffusées. Dans ce cadre, il est sans importance que ces informations proviennent en partie des explications du gouvernement dans la brochure de vote ou de déclarations de membres de l’exécutif aux médias, ni que ces derniers s’y soient référés explicitement ou non (ATF 138 I 61 consid. 7.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_130/2015 précité consid. 3.2).

9. a. En droit genevois, l’art. 53 al. 1 LEDP prévoit que les électeurs reçoivent de l’État pour les votations cantonales et des communes pour les votations communales le bulletin de vote, les textes soumis à la votation, des explications qui comportent, s’il y a lieu, un commentaire des autorités d’une part et des auteurs du référendum ou de l’initiative d’autre part, ainsi que les recommandations du Grand Conseil ou du Conseil municipal (al. 1). Depuis le 16 juin 2012, l’art. 53 al. 4 LEDP prévoit en outre qu’en matière communale, le commentaire des autorités est rédigé par l’exécutif. Il comprend une synthèse brève et neutre de chaque objet soumis à votation, défend de façon objective le point de vue du Conseil municipal et indique le résultat du vote en mentionnant, le cas échéant, l’avis de l’exécutif et d’importantes minorités.

L’art. 8A al. 1 du règlement d’application de la loi sur l’exercice des droits politiques du 12 décembre 1994 (REDP - A 5 05.01) précise en outre que pour les votations communales, les explications comportent un commentaire des autorités d’une part et des auteurs du référendum ou de l’initiative d’autre part. Le commentaire des autorités communales exprime de façon objective le point de vue du Conseil municipal, et indique le résultat du vote en mentionnant, le cas échéant, l’avis d’importantes minorités (art. 8B al. 2 REDP).

En application de l’ancien art. 53 LEDP, qui ne prévoyait pas encore l’établissement d’une synthèse brève et neutre de chaque objet soumis à votation, le Tribunal administratif avait jugé que d’intituler « Une initiative qui n’atteint pas sa cible » la rubrique « L’essentiel en bref » figurant dans la brochure explicative et précédant immédiatement le texte de l’initiative, objet du scrutin, allait au-delà de la portée descriptive à laquelle l’autorité devait se limiter. Cette prémisse ne pouvait être comprise autrement que par la volonté du Conseil d’État d’influencer l’électeur, ce d’autant que la rubrique en question laissait penser qu’il s’agissait d’un exposé objectif des enjeux, ce qui n’était pas le cas au regard de son contenu, dont la coloration négative transformait ce qui devait être une présentation en une interprétation de l’autorité exécutive (ATA/583/2008 précité consid. 9a).

b. Aux termes de l’art. 83 LEDP, les communes ne sont pas autorisées à faire de la propagande électorale, ni à supporter les frais de celle des partis politiques, autres associations ou groupements (al. 1). Elles peuvent en revanche organiser des débats contradictoires ou y participer (al. 2). L’art. 8D REDP précise que toute propagande unilatérale, déloyale ou trompeuse est interdite, de même que le financement occulte ou disproportionné de la campagne (al. 1). L’exécutif peut faire parvenir aux électeurs des informations supplémentaires et notamment des avis rectificatifs en cas de changement significatif des circonstances de droit ou de fait durant la campagne ou lorsque la liberté de vote risque d’être faussée par une information erronée ou tendancieuse provenant de tiers (al. 2). Pour les votations communales, les communes peuvent en outre organiser des débats contradictoires ou y participer (al. 3).

10. a. En l’espèce, les recourants se plaignent du contenu de la brochure explicative rédigée par le conseil administratif, qui ne satisferait pas aux exigences de neutralité et d’objectivité et serait, par voie de conséquence, de nature à influencer de manière illicite la libre formation de la volonté des citoyens.

b. Dans ce cadre, ils font d’abord valoir que la « synthèse brève et neutre » des comptes 31 et 36 serait de nature à décrédibiliser le budget voté par le conseil municipal, au regard des termes employés pour décrire l’objet soumis au vote ainsi que ses conséquences.

Il ressort du document en question que celui-ci commence à rappeler, de manière chronologique, les faits ayant donné lieu à la délibération du conseil municipal du 15 décembre 2015, en mentionnant les deux projets de budgets déposés auprès du législatif communal entre les mois d’août et novembre 2015. Contrairement à ce que soutiennent les recourants, le rappel que ce dernier projet a été voté à l’unanimité des membres du conseil administratif ne relève pas de la polémique. Il souligne simplement le consensus qui a régné au sein du conseil administratif à ce sujet, ce qui constitue au demeurant un fait notoire, déjà porté à la connaissance des citoyens par le même conseil en novembre 2015. Il permet en sus d’expliquer pourquoi le conseil administratif s’est rallié à l’avis de la minorité. Les recourants oublient d’ailleurs que la synthèse indique, par la suite, le nombre de voix récoltées par la délibération du conseil municipal en lien avec ce projet, adopté par quarante-et-une voix contre trente-sept.

Il en va de même de l’utilisation du terme « touché », qui ne revêt pas la connotation négative que lui prêtent les recourants, dès lors qu’il se réfère aux domaines concernés par les réductions budgétaires décidées par le conseil municipal. Le document en question indique d’ailleurs par la suite que celles-ci avaient amélioré le résultat financier, passant de CHF 8'200'000.- d’excédents à CHF 15'500'000.-.

Lue dans son ensemble et dans son contexte, la synthèse respecte ainsi les exigences de neutralité et d’objectivité et ne contient aucune prise de position.

c. Les recourants contestent ensuite le caractère objectif de la partie consacrée au commentaire de la minorité et du conseil administratif pour les comptes 31 et 36.

Ils perdent toutefois de vue que ces parties de la brochure explicative, précédées d’un commentaire de la majorité pour chacun des deux objets, sont réservées à l’avis des autorités sur l’objet soumis au vote, dans le cadre duquel elles peuvent exprimer leur point de vue et ne doivent pas respecter une stricte neutralité, à charge pour le citoyen de se forger une opinion sur cette base. Dans ce cadre, contrairement à ce que prétendent les recourants, le commentaire de la minorité ne saurait être lu sans se référer à celui de la majorité et inversement, les deux avis étant complémentaires et permettant à l’électeur de se forger sa propre opinion.

Ainsi, le fait que le commentaire de la minorité ne mentionne pas le montant de la dette de la ville, qui figure déjà dans la présentation de la majorité, n’apparaît pas déterminant et ne saurait préjuger de la santé financière communale, dont l’évaluation repose sur une série d’éléments, auxquels le commentaire contesté se réfère en rappelant que « diverses études saluent les performances de gestion de la commune ».

Quant à l’utilisation du terme « coupe », il n’a rien de dévalorisant au regard du contexte et des importantes réductions budgétaires, linéaires, décidées par le conseil municipal, comme cela résulte de la comparaison entre le projet de budget présenté par le conseil administratif en novembre 2015 et le budget finalement adopté par le législatif en décembre 2015.

Par ailleurs, l’utilisation de termes ou de titres dans le commentaire de la minorité qui pourraient, hors contexte, paraître forts et alarmistes, sont largement contrebalancés par le commentaire de la majorité, qui en contient également, dans un sens opposé. Au demeurant, quoi qu’en disent les recourants, les réductions budgétaires de 2.5 % et 2 % sont loin d’être minimes, dès lors qu’elles portent sur plusieurs millions de francs. Dans ce cadre, le conseil administratif se limite à énumérer les domaines et les politiques publiques concernés par les réductions projetées, en particulier dans le domaine social, sans que cette énumération puisse déjà être qualifiée d’alarmiste, mais permet au citoyen de connaître l'opinion de l'exécutif communal sur les enjeux du scrutin, laquelle reste néanmoins mesurée. Certes, le fait de qualifier les réductions budgétaires effectuées par le conseil municipal d’« infondées financièrement » et d’« irresponsables » (par opposition à la « mesure responsable » figurant dans l’avis de la majorité) constituent des termes forts. Ils sont toutefois admissibles dans le cadre d’une appréciation des autorités, contenus dans une partie spécifique de la brochure explicative destinée à cette fin. Dans ce cadre, les recourants ne sauraient se prévaloir de l’arrêt de l’ancien Tribunal administratif susmentionné, dans lequel celui-ci a condamné l’appréciation à laquelle s’étaient livrées les autorités dans une partie censée décrire de manière neutre et objective l’initiative objet du scrutin en cause.

d. Les recourants contestent enfin le nombre de pages consacrées à l’avis de la majorité, qui serait moindre par rapport à celui de la minorité et du conseil administratif et des référendaires. Ils oublient ce faisant que les avis exprimés dans les rubriques correspondantes répondent aux exigences de l’art. 53 LEDP, qui prévoit non seulement une synthèse brève et neutre, mais également le point de vue du conseil municipal ainsi que celui de l’exécutif et d’importantes minorités, étant précisé que l’avis du conseil administratif a été intégré dans celui de la minorité. Quant à celui des référendaires, qui ne contient au demeurant aucun élément nouveau par rapport aux explications des autorités, mais est exprimé de manière moins mesurée, il apparaît également nécessaire afin que le citoyen comprenne ce qui a conduit une fraction du corps électoral à demander la soumission au vote populaire de la délibération du conseil municipal. Le fait que l’avis de la majorité tienne sur une page et demie n’apparaît pas déterminant et disproportionné, étant précisé que celui de la minorité et du conseil administratif tient sur le même nombre de pages.

e. Il s’ensuit que la brochure explicative ne contient aucune information qui induirait gravement le citoyen en erreur, ni aucune appréciation insoutenable de nature à influencer ou fausser de manière essentielle le résultat du vote.

11. Les recourants voient dans l’article de presse du 19 mai 2016 une intervention illicite du conseil administratif dans le débat politique, en violation de l’interdiction de toute propagande électorale.

Ils ne sauraient toutefois être suivis sur ce point, ce d’autant que l’article en question, dans lequel intervient Mme N______, à titre personnel avec mention - admissible - de ses fonctions de conseillère administrative, se limite à reprendre dans ses grandes lignes le contenu de la brochure explicative, à savoir le commentaire de la minorité et du conseil administratif, sans qu’il ne soit possible de discerner en quoi ces explications pourraient paraître trompeuses ou inadmissibles, comme précédemment mentionné.

Il ne saurait dans ce cadre être reproché à Mme N______ de s’être livrée à une quelconque propagande électorale, ce d’autant que l’article en question est précédé de celui de Mme M______, intervenant en tant que conseillère municipale – qui plus est membre de l'un des partis recourants – et faisant état de l’avis opposé, à savoir celui de la majorité du conseil auquel elle appartient. Le fait qu’il ne s’agisse pas d’un débat stricto sensu mais d’une tribune libre n’y change rien, dès lors que la rubrique « Face-à-face » de l’édition du 19 mai 2016 avait pour thème « Pour ou contre les coupes budgétaires votées par le Conseil municipal de la Ville de Genève », dans le cadre de laquelle chacune des intervenantes a pu exprimer l’avis qu’elle défend à titre personnel.

Le choix des intervenants ne prête pas non plus le flanc à la critique et permet précisément le respect de l’égalité des armes, en rendant possible un débat contradictoire, de manière à ce que le citoyen, en présence d’arguments « pour » et « contre », soit en mesure de se forger une opinion sur l’objet soumis au vote.

12. Entièrement mal fondé, le recours sera rejeté en tant qu’il est recevable.

13. Le prononcé du présent arrêt rend ainsi sans objet la demande de mesures provisionnelles des recourants, dont les conclusions à ce titre se limitent à reprendre celles prises au fond, ainsi que l’appel en cause du comité référendaire sollicité par l’autorité intimée.

14. Les recourants, qui succombent, seront astreints, conjointement et solidairement, au paiement d’un émolument de CHF 1'500.- (art. 87 al. 1 LPA). Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne leur sera allouée, ni d’ailleurs à l’autorité intimée qui dispose de son propre service juridique (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE CONSTITUTIONNELLE

rejette, en tant qu’il est recevable, le recours interjeté le 23 mai 2016 par le A______, le B______, Monsieur C______, Monsieur D______, Madame E______, Madame F______ et Monsieur G______ contre la brochure explicative, en vue du scrutin du 5 juin 2016, relative à la délibération du Conseil municipal de la Ville de Genève du 15 décembre 2015 approuvant le budget 2016 et portant sur les groupes de compte 31 et 36 et contre l’article paru en page 4, dans la rubrique « Face-à-face », de l’édition d’un quotidien du 19 mai 2916.

met un émolument de CHF 1'500.- à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss LTF, le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Pascal Pétroz, avocat des recourants, à la Ville de Genève, au service des votations et élections ainsi qu’au Conseil d’État pour information.

Siégeants : M. Verniory, président, Mme Galeazzi, M. Dumartheray, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Martin, juges.

Au nom de la chambre constitutionnelle :

la greffière-juriste :

 

 

C. Gutzwiller

 

le président siégeant :

 

 

J.-M. Verniory

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :