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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4028/2008

ATA/583/2008 du 18.11.2008 ( DI ) , ADMIS

Recours TF déposé le 21.11.2008, rendu le 24.11.2008, RETIRE, 1C_532/2008
Parties : SCHELLER Yves et autres, MACHEREL Christian, FISCHER Marc, DUVAL André, COMITE D'INITIATIVE 134 "POUR UN CYCLE QUI ORIENTE", ASSOCIATION ARLE / SERVICE DES VOTATIONS ET ELECTIONS, CONSEIL D'ETAT
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4028/2008-DI ATA/583/2008

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 18 novembre 2008

 

dans la cause

 

Monsieur Yves SCHELLER

Monsieur Christian MACHEREL

Monsieur Marc FISCHER

Monsieur André DUVAL

LE COMITÉ D’INITIATIVE 134 « POUR UN CYCLE QUI ORIENTE » REEL RÉSEAU ÉCOLE ET LAÏCITÉ

L’ASSOCIATION ARLE ASSOCIATION REFAIRE L’ÉCOLE

représentés par Me Nicolas Jeandin, avocat

contre

CONSEIL D’éTAT


 


EN FAIT

1. Le 30 novembre 2008 est organisée à Genève une votation portant sur des objets fédéraux, non litigieux en l’espèce, et sur des objets cantonaux dont trois d’entre eux sont concernés par le présent litige.

Il s’agit de l’objet n° 3, Initiative 134 « Pour un cycle qui oriente » (ci-après : IN 134), de l’objet n° 4, la loi modifiant la loi sur l’instruction publique (Un cycle d’orientation exigeant et formateur pour tous) (C 1 10 - 10176), du 12 juin 2008, (contreprojet à l’IN 134) et de l’objet n° 5, soit la question subsidiaire pour départager l’IN 134 et le contreprojet.

2. Le matériel électoral envoyé aux citoyens et citoyennes par l’office cantonal de la population, comprend notamment une brochure explicative relative aux différents objets précités.

S’agissant de l’objet n° 3, la brochure comporte le texte de l’initiative ainsi que les explications du comité d’initiative d’une part, et celles des autorités, d’autre part. Le texte soumis à la votation est précédé, en page 18, d’une présentation intitulée « L’essentiel en bref », au sous-titre « Une initiative qui n’atteint pas sa cible » dans laquelle il est notamment mentionné que « les initiants proposent, en réalité, à travers une structure peu lisible, un cycle qui sélectionne précocement les élèves, n’offre pas de stimulation à ceux qui souhaiteraient élever leur niveau ou qui sont en difficulté. Ces derniers n’ont d’autre choix d’orientation que par l’échec et les plus faibles d’entre eux sont exclus du cursus ordinaire. Enfin, sur différents points, l’IN 134 n’est pas conforme aux dispositions sur l’harmonisation scolaire romande et nationale ».

Le texte énumère les conséquences principales - au nombre de cinq - qui découleront de l’IN 134.

Concernant l’objet n° 4, la brochure contient le texte de la loi soumis à la votation ainsi que les explications des autorités. A l’instar de l’objet n° 3, le texte de la loi est précédé d’une page, intitulée « L’essentiel en bref » de laquelle il résulte que le contreprojet qui porte sur les trois dernières années de la scolarité obligatoire, « propose aux élèves et à leurs parents des parcours de formation mieux définis au sein de sections qui donnent accès à une formation professionnelle, de culture générale ou gymnasiale dans l’enseignement secondaire postobligatoire ».

Quant à l’objet n° 5, la brochure précise que si l’IN 134 et le contreprojet sont acceptés par le peuple, c’est le résultat de la question subsidiaire qui déterminera lequel des deux l’emporte. Le peuple est donc invité à indiquer sa préférence entre l’IN 134 et le contreprojet en répondant à la question subsidiaire.

3. Par acte du 10 novembre 2008, Messieurs Yves Scheller, domicilié 18, chemin de la Gouille-Noire, 1244 Choulex, Christian Macherel, domicilié 6, chemin Martine, 1283 Dardagny, Marc Fischer, domicilié 15bis, rue François-Versonnex, 1207 Genève, André Duval, domicilié 7A, chemin Malvand, 1292 Chambésy, Le Comité d’initiative 134 « Pour un cycle qui oriente » REEL Réseau Ecole et Laïcité, l’association ARLE Association Refaire L’Ecole, p.a. Monsieur Marc Fischer, 15 bis, rue François-Versonnex, 1207 Genève, ont saisi le Tribunal administratif d’un recours contre le matériel électoral.

3.1. Aucune précision ne figurait dans cet acte quant à la date de réception dudit matériel.

3.2. Les recourants contestaient le matériel de vote, et en particulier la présentation figurant à la page 18 de la brochure établie par le Conseil d’Etat au sujet de l’objet n° 3.

Le résumé de l’initiative tel que proposé par le Conseil d’Etat décrivait celle-là de manière lacunaire et inobjective ainsi que ses conséquences si celle-ci devait être acceptée par le peuple.

3.3. L’accusation du Conseil d’Etat relative à la précocité de la sélection, respectivement à l’orientation par l’échec, était infondée et biaisait les citoyens par rapport au mécanisme concret que l’initiative souhaitait mettre en œuvre.

Sur ce point, les recourants protestaient contre les termes utilisés par le Conseil d’Etat au premier paragraphe du résumé, à savoir : « Ces derniers n’ont d’autre choix d’orientation que par l’échec et les plus faibles d’entre eux sont exclus du cursus ordinaire ».

3.4. La présentation du mécanisme que souhaitaient mettre en œuvre les initiants était également tronquée par la description qu’en faisait le Conseil d’Etat au paragraphe 4 du même texte rédigé comme suit : « D’obliger les élèves faibles à parcourir le cycle en quatre ans au lieu de trois et de n’offrir à ceux d’entre eux qui seront en échec que la possibilité de s’orienter vers une filière aux exigences moindres ».

L’IN 134 souhaitait mettre en œuvre une année de transition au sortir du primaire, destinée à renforcer l’élève avant de l’envoyer en 7ème ordinaire et offrir aux élèves non promus de l’école primaire la possibilité d’entrer au cycle d’orientation et d’y combler leurs lacunes. Dans une circonstance analogue, le contreprojet prévoyait le refus pur et simple d’admission de l’élève en 7ème, et par conséquent son exclusion.

3.5. Les recourants contestaient également l’argument du Conseil d’Etat libellé au paragraphe 5 du même texte, à savoir « D’exclure les élèves les plus faibles du cursus ordinaire et de les mettre à l’écart dans une structure spécifique dont l’initiative ne dit pas si et à quelles conditions ils pourraient en sortir, ni ne définit les débouchés auxquels elle mène ».

Cette présentation était tronquée : l’IN 134 ne faisait que rappeler le règlement actuel qui interdisait qu’un élève n’accomplisse plus qu’une année supplémentaire au cycle d’orientation. Le projet des initiants consistait à ce que les élèves qui avaient bénéficié de la classe de transition entrent alors dans une 7ème ordinaire et poursuive leur écolage comme tous les autres élèves.

3.6. Les recourants discutaient le libellé du paragraphe 6, à savoir « De devoir investir dans les infrastructures scolaires et administratives plutôt que dans la formation et l’orientation ». En effet, l’IN 134 ne demandait rien d’autre que l’application de l’article 54 de la loi sur l’instruction publique sur le soutien pédagogique, disposition qui existait déjà dans le droit cantonal.

3.7. Enfin, les recourants s’élevaient contre l’assertion du Conseil d’Etat au paragraphe 7 de ce texte : « Enfin, alors même que les électrices et les électeurs genevois ont accepté à une très large majorité le principe constitutionnel de l’harmonisation scolaire entre cantons lors de la votation du 21 mai 2006, de marginaliser notre canton dans le processus d’harmonisation en cours, harmonisation qui tend vers le rejet de toute sélection précoce et vers une intégration optimale de toutes et tous les élèves ». Les modalités prévues par l’IN 134 n’entraient en conflit ni avec le plan d’études romand, ni avec le concordat Harmos. Elles ne changeaient rien à l’ensemble des enseignements dispensés actuellement en 7ème année, les programmes resteraient les mêmes dans les quatre niveaux de 7ème ; la sensibilisation aux filières prévues au 2ème semestre de la 7ème ne viendrait en rien alourdir la charge de l’élève.

3.8. En résumé, le matériel de vote induisait en erreur les citoyens par une présentation tronquée et lacunaire du projet de l’IN 134. De surcroît, un descriptif résumé établi par l’autorité suscitait, par principe en ce qu’il émane de l’autorité, une confiance légitime du citoyen quant à la véracité de son contenu. En cela, il portait atteinte à la garantie des droits politiques protégeant la libre formation de l’opinion des citoyens et des citoyennes et l’expression fidèle et sûre de leur volonté consacrée par l’article 34 alinéa 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101).

Le matériel de vote ayant d’ores et déjà été adressé à tout le corps électoral genevois, et le vote par correspondance étant déjà ouvert de sorte que de nombreux citoyens avaient sans doute d’ores et déjà retourné leur bulletin au service des votations, la seule réparation envisageable de ces vices importants de procédure consistait en l’annulation pure et simple du scrutin relatif aux objets nos 3, 4 et 5 et son report à une date ultérieure.

3.9. Les recourants prennent les conclusions suivantes :

« PLAISE AU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

Préalablement

sur mesures provisionnelles

Constater que l’exposé des motifs intégré dans le matériel de vote en vue de la votation du 30 novembre 2008 relatif aux objets nos 3, 4 et 5 viole la garantie des droits politiques des citoyens et des recourants ;

Cela fait

Annuler le scrutin du 30 novembre 2008 s’agissant des objets nos 3, 4 et 5 ;

Ordonner le report de la votation du 30 novembre 2008 et l’établissement d’un nouveau matériel de vote pour les trois objets concernés qui soit conforme à la garantie constitutionnelle des droits politiques des citoyens et des recourants,

Si mieux n’aime, le Tribunal administratif

Constater que l’exposé des motifs intégré dans le matériel de vote en vue de la votation du 30 novembre 2008 relatif aux objets nos 3, 4 et 5 viole la garantie des droits politiques des citoyens et des recourants ;

Ordonner au Conseil d’Etat la notification à ses frais à tous les citoyens genevois de l’arrêt du Tribunal administratif constatant la violation des droits politiques,

Si mieux n’aime encore, le Tribunal administratif

Constater que l’exposé des motifs intégré dans le matériel de vote en vue de la votation du 30 novembre 2008 relatif aux objets nos 3, 4 et 5 viole la garantie des droits politiques des citoyens et des recourants ;

Ordonner au Conseil d’Etat, à ses frais, de communiquer le contenu de l’arrêt du Tribunal administratif constatant la violation des droits politiques de manière régulière jusqu’au jour de la votation dans la Feuille d’Avis Officielle, Tribunal de Genève, 20 Minutes, Le Temps, ainsi que de procéder à des annonces idoines auprès de la Radio Suisse Romande, de la radio One FM, ainsi que de procéder à des annonces idoines auprès de la Télévision Suisse Romande et Léman Bleu Télévision ;

A la forme

Déclarer recevable le présent recours.

Au fond

Constater que l’exposé des motifs intégré dans le matériel de vote en vue de la votation du 30 novembre 2008 relatif aux objets nos 3, 4 et 5 viole la garantie des droits politiques des citoyens et des recourants ;

Ordonner le report de la votation du 30 novembre 2008 et l’établissement d’un nouveau matériel de vote pour les trois objets concernés qui soit conforme à la garantie constitutionnelle des droits politiques des citoyens et des recourants ;

Constater d’ores et déjà l’invalidité de la votation et la nullité du scrutin du 30 novembre 2008 relatif aux objets nos 3, 4 et 5 ;

Acheminer les recourants à prouver par toute voie de droit utile leurs allégués dans le cadre de la présente procédure ;

Condamner l’Etat de Genève en tous les frais et dépens, lesquels comprendront une équitable indemnité valant participation aux honoraires du conseil des recourants ».

4. Le 11 novembre 2008, le Tribunal administratif a imparti un délai au 17 novembre 2008 à 12h00 aux recourants pour justifier de la date de la réception du matériel de vote.

Dans ce délai, les recourants ont confirmé avoir reçu le matériel de vote le 4 novembre 2008 (MM. Macherel, Scheller, Patrice Delpin (ARLE) et Madame Lorette Vasta (Comité d’Initiative 134)) et le 5 novembre 2008 (MM. Duval et Fischer).

5. Dans sa réponse du 17 novembre 2008, le Conseil d’Etat a conclu au déboutement des recourants de toutes leurs conclusions en mesures provisionnelles et, principalement, à l’irrecevabilité du recours, subsidiairement à son rejet avec suite de frais et dépens.

a. Retraçant l’historique de l’IN 134, le Conseil d’Etat a relevé que le 28 avril 2006, lorsqu’il avait déposé au Grand Conseil son rapport sur la validité et la prise en considération de l’IN 134, il avait procédé, parallèlement, à une communication spécifique dans le cadre de son point de presse. Celle-là résumait et commentait à l’attention des médias sa position au sujet de l’IN 134, tendant au refus de sa prise en considération et à sa préférence pour un contreprojet, au motif notamment que l’IN 134 était affectée de plusieurs défauts au nombre desquels figuraient la mise en place d’une structure complexe et coûteuse dans chacun des dix-neuf établissements actuels du cycle d’orientation, une sélection précoce et une logique d’exclusion, la marginalisation du canton de Genève dans le contexte de l’harmonisation et de la scolarité obligatoire au plan romand comme au plan suisse et enfin, le constat que l’IN 134 ne reposait sur aucune étude sérieuse de coûts, ni de faisabilité. Le 12 juin 2008, le Grand Conseil avait accepté à l’unanimité le contreprojet du Conseil d’Etat (PL 10176) et le texte de l’initiative et celui du contreprojet avaient été publiés dans la Feuille d’Avis Officielle du 28 juin 2008.

b. Le texte de la brochure explicative, tel que distribué avec le reste du matériel de vote, avait été rendu intégralement accessible sur le site internet de l’Etat de Genève dès le 17 octobre 2008. Cette brochure en format électronique était toujours accessible au public à la même adresse (http://www.ge.ch/votations/20081130/doc/explicative 30 nov 2008.pdf).

A une date indéterminée, mais vraisemblablement dans le courant du mois d’octobre 2008, le groupe REEL avait publié sur son site internet un texte non daté intitulé : « les mensonges au sujet de l’IN 134 » développant un argumentaire de quatre pages sur de prétendus « nombreux mensonges » contenus dans la brochure explicative en pages nos 18, 26, 27 et 28. Ce texte servait de fondement au recours déposé devant le Tribunal administratif et faisait suite à une série d’articles polémiques émanant des initiants ou de leurs sympathisants à l’endroit des autorités cantonales.

Le 10 novembre 2008, le Conseil d’Etat avait tenu conférence de presse sur deux objets spécifiques de la votation du 30 novembre 2008, à savoir la loi sur l’université et le contreprojet sur le cycle d’orientation. Un communiqué avait été distribué aux médias à cette occasion.

Dans la foulée du dépôt du recours reçu le 11 novembre 2008 par le Tribunal administratif, les recourants avaient organisé une conférence de presse le 12 novembre 2008, événement largement repris par les médias, tant écrits qu’audiovisuels.

En réponse aux allégués des recourants, le Conseil d’Etat a confirmé n’avoir jamais entendu procéder à un résumé de l’IN 134, pas plus qu’il n’avait eu l’intention de synthétiser le point de vue des initiants. Il contestait l’intégralité des critiques adressées à la page n° 18 de la brochure explicative.

c. Avant d’aborder le fond du litige, le Conseil d’Etat a soulevé le défaut de qualité pour recourir de l’Association ARLE d’une part, et du groupement REEL, d’autre part.

ARLE ne constituait pas un parti politique stricto sensu, ni un groupement à caractère politique formé pour l’occasion puisqu’elle ne se confondait pas avec le Comité d’initiative de l’IN 134. N’étant pas titulaire des droits politiques, elle ne pouvait se voir conférer la qualité pour recourir de sorte que son recours devait être déclaré irrecevable.

Concernant REEL, le groupement n’était pas constitué en association et n’avait pas la personnalité morale. Il reprenait à son compte la défense de l’IN 134 sans qu’il soit établi que le Comité d’initiative à l’origine du lancement de l’IN 134 se confonde aujourd’hui avec lui. De plus, le mandataire actuel de REEL n’était plus domicilié dans le canton de Genève et ne bénéficiait donc plus de l’exercice des droits politiques dans ce canton.

Toutefois, ces questions de recevabilité concernant ces deux entités pouvaient souffrir de rester indécises, les autres recourants, agissant en personne, ayant la qualité de citoyen dans le canton.

d. Le Conseil d’Etat a excipé de la tardiveté du recours, les recourants invoquant expressément l’article 180 LEDP imposant de respecter un délai de six jours qui ne commencerait à courir que dès la réception du matériel de vote.

La jurisprudence du Tribunal administratif relative au cas où il s’était attaché à déterminer la date exacte de réception concernant des situations dans lesquelles l’acte querellé n’était pas publié, ou dont la date d’expédition ou de réception n’était pas contestée n’était pas applicable en l’espèce. On ne saurait, en effet, assimiler ces situations à celle où l’autorité élabore une brochure explicative et la publie électroniquement sur internet, la rendant ainsi immédiatement accessible à toute la population concernée par la votation. En pareil cas, il fallait assimiler la publication électronique à une publication papier et ne pas tenir compte de la réception effective de l’ensemble du matériel électoral. Etant établi par pièces que l’intégralité de la brochure explicative était disponible via internet pour l’ensemble de la population dès le 17 octobre 2008, le délai de recours venait à échéance le 23 du même mois. Interjeté le 10 novembre 2008, le recours était ainsi manifestement tardif et donc irrecevable.

L’on arrivait au même résultat en prenant comme critère la connaissance effective de la brochure. D’une part, l’intensité du débat, la participation active du Comité d’initiative et de l’Association ARLE et REEL, la multiplication des prises de parole et de positions des recourants, agissant collectivement ou à titre individuel, dans les différents médias depuis le mois de juin 2008, démontraient que ces derniers avaient, quasiment en temps réel et immédiatement, eu connaissance de chaque développement nouveau dans le traitement de l’IN 134. Ce qui était déterminant pour juger du respect du délai de recours les concernant était donc bien, non la date effective de réception de l’imprimé ou du matériel de vote, mais bien celle à partir de laquelle l’information était librement accessible, soit la mise à disposition de la brochure explicative sur internet. En conclusion, recourir le 10 novembre 2008, soit juste après la conférence de presse donnée par le Conseil d’Etat, s’inscrivait à l’évidence dans une stratégie de campagne. Dans ces conditions, le recours devait être considéré comme tardif et partant, déclaré irrecevable.

Les mesures provisionnelles sollicitées par les recourants se confondaient avec celles prises sur le fond, ce qui devait conduire au rejet de celles-ci.

e. Sur le fond, et plus particulièrement à l’encontre des critiques concernant le texte « L’essentiel en bref », le Conseil d’Etat rappelait qu’il avait intégralement reproduit le texte soumis par le Comité d’initiative à l’appui de son initiative. La page « L’essentiel en bref » devait être lue dans le contexte général de la brochure et de l’objet n° 3 dans son ensemble. Elle ne constituait cependant qu’un résumé du point de vue des autorités et non une synthèse des arguments des initiants.

Les cinq points contestés par les initiants ne résistaient pas à l’examen et aucune des appréciations querellées n’était mensongère ou insoutenable au regard du texte de l’initiative.

L’examen de la jurisprudence démontrait que seuls des vices particulièrement graves, entachant les actes préparatoires, avaient été considérés comme constitutifs de propagande prohibée par l’article 34 Cst. En l’espèce, censurer la page n° 18 de la brochure explicative serait manifestement disproportionné et ouvrirait la porte à la remise en cause systématique des commentaires des autorités, en les privant de leur droit de porter une appréciation sur l’objet du vote, alors que tant la loi que la jurisprudence leur reconnaissaient cette latitude.

Le fait que le vote ait déjà commencé, l’importance de l’objet et la nécessité de consacrer enfin l’avènement d’un contreprojet plébiscité par l’ensemble de la classe politique et par l’immense majorité des milieux concernés étaient autant d’intérêts publics supérieurs commandant de débouter intégralement les recourants de toutes leurs conclusions, un report de la votation ne pouvant qu’avoir des effets négatifs sur les objectifs précités.

6. Par télécopie du 17 novembre 2008 à 12h30, le service des votations et élections a confirmé au Tribunal administratif qu’au 17 novembre 2008 à 12h00, le nombre de votants s’élevait à 33'686.

Le service des votations et élections a par ailleurs produit le double de son courrier du 29 septembre 2008 adressé à la Poste suisse, aux termes duquel l’office devait procéder à la distribution de manière à ce que tous les électeurs reçoivent le matériel de vote au plus tard le jeudi 6 novembre 2008 (délai légal).

EN DROIT

1. Le Tribunal administratif est compétent pour connaître des recours visant la violation de la procédure des opérations électorales communales (art. 56 A al. 1 et 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941, dans sa teneur au 11 juin 1999 - LOJ - E 2 05).

L'envoi à tous les électeurs du matériel de vote fait partie de la procédure des opérations électorales, de sorte que le Tribunal administratif est matériellement compétent pour trancher le litige (ATA/304/2000 du 16 mai 2000).

2. MM. Scheller, Macherel, Fischer et Duval sont domiciliés dans le canton de Genève où ils exercent leurs droits politiques (art. 1 let. a de la loi sur l’exercice des droits politiques du 15 octobre 1982 - LEDP - A 5 05) : ils ont ainsi la qualité pour recourir.

L’Association Refaire L’Ecole (ARLE), dont la personnalité morale découle des articles 60 et suivants du Code civil suisse du 10 décembre l907 (CCS - RS 210) ne prétend pas, à juste titre, être un parti politique. Il ne résulte pas du texte de l’article 3 de ses statuts, version du 3 juin 2008, qu’elle serait un groupement à caractère politique. Il s’ensuit que n’étant pas titulaire des droits politiques, elle n’a pas la qualité pour recourir, de sorte que son recours sera déclaré irrecevable.

Le comité d’initiative 134 « Pour un cycle qui oriente » Réseau école et laïcité (REEL) n’a donné aucune précision sur sa forme juridique, de sorte que la recevabilité de son recours ne sera pas admise.

3. L’acte de recours a été posté le 10 novembre 2008. Selon les renseignements du service des votations et élections, le matériel de vote a été expédié de manière à parvenir le 6 novembre 2008 au plus tard chez les électeurs. Les recourants ont confirmé avoir reçu le matériel de vote respectivement le 4 et le 5 novembre 2008. Il s’ensuit que le recours déposé le 10 novembre 2008 respecte le délai de six jours prescrit à l’article 63 alinéa 1 lettre c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), par renvoi de l’article 180 alinéa 2 LEDP.

Pour le Conseil d’Etat, le recours serait tardif car la brochure explicative a été diffusée via internet le 17 octobre 2008.

En l’état de la législation, il est difficile de suivre le Conseil d’Etat sur cette argumentation qui s’inscrit en violation flagrante des termes de l’article 53 LEDP, selon lequel les électeurs reçoivent de l’Etat pour les votations cantonales (…) le bulletin de vote, les textes soumis à votation, les explications et les recommandations du Grand Conseil ou du Conseil municipal. L’alinéa 4 de cette disposition précise que les délais d’expédition fixés par la loi fédérale sur les droits politiques et figurant à l’article 52 s’appliquent également aux votations cantonales et communales organisées simultanément à un scrutin fédéral. Quant à l’article 20 du règlement d’application de la loi sur l’exercice des droits politiques du 12 décembre 1994 (RELDP - A 5 05.01), il précise que les pouvoirs publics expédient à chaque électeur une carte de vote ainsi que le matériel électoral nécessaire pour prendre part aux opérations électorales.

Il résulte des textes précités que c’est bien l’envoi en tant que tel du matériel électoral qui ouvre l’exercice du droit de vote.

Ce qui est déterminant, c’est la prise de connaissance des objets soumis au corps électoral. Or, la diffusion des documents y relatifs sur internet ne constitue qu’une présomption de connaissance. En l’espèce, le Conseil d’Etat ne démontre pas que les recourants auraient eu une connaissance effective du matériel de vote par internet.

Au surplus, l’autorité intimée ne conteste pas que le matériel de vote serait arrivé en mains des recourants entre le 4 et le 5 novembre 2008. En conséquence, le recours a été interjeté dans le délai légal.

4. Selon l'article 53 LEDP, le Conseil d'Etat - pour les élections cantonales - envoie aux électeurs avant l'ouverture du scrutin :

le bulletin de vote ;

les textes soumis à la votation ;

des explications qui comportent, s'il y a lieu, un commentaire des autorités d'une part et des auteurs du référendum ou de l'initiative d'autre part ;

les recommandations du Grand Conseil ou du Conseil municipal
(al.1).

En matière cantonale, le commentaire des autorités est rédigé par le Conseil d'Etat. Il défend de façon objective le point de vue du Grand Conseil et indique le résultat du vote en mentionnant, le cas échéant, l'avis du Conseil d'Etat et d'importantes minorités. Le Conseil d'Etat soumet son projet de commentaire au bureau du Grand Conseil, dont il recueille les observations (al. 2).

5. Le recours est dirigé contre la brochure explicative concernant deux objets cantonaux, envoyée par le Conseil d'Etat aux électeurs, soit contre un acte dont la jurisprudence a reconnu qu'il entrait dans la procédure des opérations électorales cantonales au sens de l'article 180 LEDP (ATA/122/2004 du 3 février 2004).

6. La liberté de vote est garantie par l’article 34 alinéa 2 Cst.

Selon la doctrine, cette liberté se décompose en plusieurs sous-principes, au nombre desquels figurent l’intervention de l’autorité dans les campagnes référendaires et électorales (A. AUER, G. MALINVERNI, M. HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse vol. I, 2ème édition, Berne 2006, n° 876). Pour ces auteurs, la liberté de vote impose aux autorités une double obligation, qui comporte un aspect positif et un aspect négatif. Positivement, les autorités sont tenues de fournir aux électeurs les informations relatives à l’objet et aux enjeux des votations populaires, ainsi qu’aux modalités des élections. Négativement, elles doivent s’abstenir de leur donner des informations susceptibles d’exercer une influence illicite sur le résultat du scrutin. Il peut s’agir de messages explicatifs qui donnent une image subjective ou inexacte du but et de la portée de ce dernier (…) (n° 887).

Le respect de la garantie des droits politiques suppose que les objets soumis au vote soient portés à temps et de façon adéquate à la connaissance des électeurs. La manière dont l’information des citoyens doit intervenir découle avant tout du droit cantonal, étant précisé que les dispositions de ce droit qui règlent le devoir d’information des autorités ne sont pas de simples prescriptions d’ordre. Les explications ne doivent toutefois pas donner une image subjective ou inexacte du but et de la portée de la votation (S. GRODECKI, L’initiative populaire cantonale et municipale à Genève n° 1322 p. 369, thèse Genève, 2008).

7. a. Le Tribunal fédéral a déduit de cette disposition constitutionnelle que les procédures électorales devaient être menées de manière à garantir la libre formation de la volonté des électeurs (ATF 130 I 290 consid. 3).

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, le droit de vote autorise tout électeur à exiger que le résultat d'une votation ou d'une élection ne soit reconnu que s'il est l'expression fidèle et sûre d'une volonté librement exprimée par le corps électoral. La validité du scrutin suppose en outre la libre formation de cette volonté ; cela implique que chaque électeur puisse se déterminer dans le cadre d'un processus d'élaboration de l'opinion publique comportant une discussion et une confrontation des points de vue les plus libres et les plus ouvertes possibles. Le résultat peut donc être faussé par une influence inadmissible exercée sur l'opinion publique (ATF 121 I 252 consid. 2, et les réf. citées). A cet égard, le Tribunal fédéral a précisé, que s’il était admis que l’autorité compétente recommande au peuple d’accepter le projet qu’il lui soumet et qu’il lui adresse un message explicatif, elle devait toutefois se borner à une information objective ; sans être tenue à la neutralité, elle devait s’abstenir de toute assertion fallacieuse sur le but et la portée du projet (ATF 117 I a 46 et ss. consid. 5a). Ainsi, le Tribunal fédéral a jugé que l’autorité attente au droit de vote si elle s’écarte de ses devoirs de retenue et d’objectivité, si elle intervient en violation de prescriptions destinées à garantir la liberté des électeurs ou si elle influence l’opinion par d’autres procédés condamnables (ATF 121 I 252 consid. 2).

Toute informalité entachant une procédure électorale ne conduit pas forcément à l’annulation du scrutin. Encore faut-il que l’irrégularité constatée revête une importance déterminante dans la formation de la volonté des électeurs. Selon les termes du Tribunal fédéral, il faut bien plutôt examiner selon l’ensemble des circonstances, d’un point de vue tant quantitatif que qualitatif, si le résultat de la votation a pu en être influencé. Le recourant n’a pas à établir un lien de causalité entre le vice qui affecte le scrutin et les résultats de ce dernier : il suffit que les irrégularités aient été propres à influencer le résultat du scrutin (ATF 130 I 290 consid. 4 à 6 ; 117 I a 41 et ss., consid. 5 b).

b. Ces principes ont été pleinement reçus par la jurisprudence cantonale (ATA/122/2004 du 3 février 2004 ; ATA/648/1998 du 13 octobre 1998 ; ATA D. du 26 septembre 1991 et ATA L. du 26 mai 1989).

8. Les notices explicatives officielles ne doivent pas porter atteinte à la libre formation de la volonté du corps électoral. Contrairement aux partis ou groupements politiques, l'autorité doit faire preuve d'une grande rigueur (A. AUER, L'intervention des collectivités publiques dans les campagnes référendaires in RDAF 1985 pp. 200, 201).

La brochure explicative doit être claire, objective (A. AUER, G. MALINVERNI et M. HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. I, Berne, 2000, p. 287) aisément compréhensible, ne pas être trop longue et elle n'a pas pour dessein de reproduire le débat parlementaire.

Elle doit permettre à l'électeur de se forger une opinion sur le but et la portée de l'objet de la votation (ATA/122/2004 du 3 février 2004). Elle doit correspondre, dans le ton utilisé et la manière dont les arguments sont exposés aux critères de retenue et d’objectivité qu’exige la jurisprudence. Elle ne doit pas donner l’impression que l’autorité détient la vérité absolue sur la question soumise au vote, ce qui serait de nature à influencer la libre volonté des votants (ATA D. du 26 septembre 1991).

9. a. Sur la base des principes rappelés ci-dessus, il convient d’examiner la pertinence des conclusions des recourants ainsi que celle des objections du Conseil d’Etat.

Le texte incriminé est celui qui figure à la page n° 18 de la brochure explicative, sous le titre « L’essentiel en bref ».

Un tel texte n’est pas prévu par la LEDP. En soi, il constitue un ajout par rapport aux exigences de l’article 53 LEDP qui prévoit que les explications figurant dans la brochure explicative comportent s’il y a lieu, un commentaire des autorités d’une part, et des auteurs du référendum ou de l’initiative, d’autre part (al. 1). Or, et comme l’admet le Conseil d’Etat dans sa détermination, cette page constitue un résumé du point de vue des autorités et non une synthèse objective et factuelle de l'initiative, ou des opinions en présence. Ce faisant, le Conseil d’Etat exprime son point de vue à deux reprises, soit dans la page de présentation, puis dans les commentaires des autorités en pages 26 et suivantes. Un tel mode de procéder n'est pas compatible avec le texte légal, par le déséquilibre qu’il créé en défaveur des initiants.

A la lecture de la brochure explicative, l’on constate que trois des objets cantonaux soumis à la votation du 30 novembre 2008 sont présentés de manière succincte (objets nos 1, 2 et 6). La présentation de l’objet n° 3 est de loin la plus longue et est rédigée en termes polémiques que l’on ne retrouve dans aucune des autres présentations.

La différence de présentation des objets soumis à la votation cantonale d’une part et fédérale d'autre part est frappante, tant le souci de clarté et d’objectivité est patent pour les seconds.

A ces remarques liminaires s’ajoutent les considérations suivantes.

En l’espèce, le texte de présentation discuté, aussi schématique que péremptoire, dont la seule entrée en matière donne le ton de ce qui va suivre en étant intitulée « Une initiative qui n’atteint pas sa cible », va au-delà de la portée descriptive à laquelle il devrait se limiter, si l’on en croit son intitulé. En effet, la teneur de cette présentation ne correspond pas à son intitulé d’une part, et elle précède directement le texte de l’initiative, d’autre part. Par la force des choses, cette prémisse a une signification, qui ne peut être comprise autrement que par la volonté du Conseil d’Etat d’influencer l’électeur. Celui-ci aborde le texte de l’initiative avec le présupposé que les élèves en difficulté sont irrémédiablement exclus du cycle d’orientation. De telles explications, admissibles s'il est clairement indiqué qu'il s'agit de la position de l'autorité, ne le sont plus lorsque tout laisse à penser qu'il s'agit d'un exposé objectif des enjeux.

Même à envisager que la subjectivité que la lecture de ce texte fait naître réside davantage dans sa forme que dans son contenu, force est de constater que la coloration négative qui en découle transforme ce qui devait être une présentation en une interprétation du Conseil d’Etat.

Le tribunal de céans considère que les termes abrupts employés par le Conseil d’Etat sont de nature à créer un déséquilibre portant atteinte au caractère complet et objectif de l’information que l’autorité doit donner au corps électoral au sens de la doctrine et de la jurisprudence rappelées ci-dessus. Une telle présentation de l’IN 134 est de nature à en fausser la lecture. Ce faisant, le Conseil d’Etat a failli à son devoir d’information objective. Il est vrai que selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, le Conseil d’Etat n’est pas tenu à la neutralité. En d’autres termes, il peut exprimer son opinion, ce qu’il a fait d’ailleurs dans ses explications en page nos 26, 27 et 28 de la brochure. En revanche, en présentant l’initiative comme pouvant pénaliser les élèves les plus faibles dans une page dont le titre laisse penser que son contenu sera objectif, le Conseil d’Etat prend le risque d’influencer l’opinion d'une manière inadmissible. Cette position partisane n’est pas conciliable avec le devoir d’information objective et équilibrée qu’il se devait de respecter.

b. Compte tenu de ce qui précède, point n’est besoin d’examiner les autres griefs des recourants.

c. Les irrégularités constatées sont d’autant plus graves qu’elles émanent de l’autorité gouvernementale. Certes, il appartient à l’électeur de se forger sa propre opinion : outre les informations officielles, les débats publics et les articles de presse peuvent contribuer à la formation de cette volonté. En l’occurrence, l’IN 134 a suscité un large débat public et politique qui a débouché sur le dépôt du contreprojet du Conseil d’Etat (objet n° 4 soumis à la votation du 30 novembre 2008) ainsi que sur l’initiative 138 de la Coordination de l’enseignement sur laquelle le corps électoral devra se prononcer dans un avenir proche. Comme le relève le Conseil d’Etat dans sa réponse au recours, le vif débat d’idées existant à Genève depuis plusieurs années sur la question scolaire a engendré d’innombrables prises de positions des autorités et des différents acteurs. La conséquence logique de ce foisonnement d’interventions est que pour l’électeur qui n’est pas un professionnel de l’enseignement, il est particulièrement malaisé de se faire une opinion sur le sujet. Or, c’est sur ce point que le texte querellé revêt une importance capitale : après l’avoir parcouru, l’électeur moyen, partant de l’idée légitime que le Conseil d’Etat a résumé les diverses prises de positions ou procédé à une présentation objective, ne peut que rejeter cette initiative « qui n’atteint pas sa cible ». En l’occurrence, ce qui peut être reproché au Conseil d’Etat, ce n’est pas tant d’avoir exprimé son opinion sur l’IN 134 - ce qu’il avait le devoir de faire et qu’il a d’ailleurs fait dans ses explications des pages 26 et suivantes - mais bien la manière dont il l’a fait, à savoir sur la page de présentation du texte soumis à votation. A cet égard, les précisions apportées par le Conseil d’Etat dans sa réponse au recours - notamment sur l’élaboration du processus législatif d’harmonisation scolaire - ne lui sont d’aucun secours : c’est à l’électorat qu’il fallait donner ces explications, car c’est bien de la formation de la volonté populaire dont il s’agit.

De l’analyse qui précède, le Tribunal administratif arrive à la conclusion que la présentation de l’IN 134 à laquelle a procédé le Conseil d’Etat en page n° 18 de la brochure est susceptible de vicier la formation de la volonté de l’électeur. Dans cette mesure, les irrégularités constatées doivent être qualifiées de graves.

10. Le vote par correspondance a commencé et au jour de la rédaction du présent arrêt à 12h00, le nombre de votants s’élève à 33’686. Il n’est donc plus possible d’ordonner une mesure rectificative.

Les objets cantonaux nos 3, 4 et 5 soumis à la votation du 30 novembre 2008 étant intimément liés, les graves irrégularités constatées étant de nature à fausser de manière essentielle le résultat de la votation, l’opération électorale sur ces objets doit être annulée (ATA/304/2000 du 16 mai 2000).

11. Le Tribunal administratif statuant sur le fond, les mesures provisionnelles sollicitées par les recourants deviennent sans objet.

12. Le recours sera admis au sens de ce qui précède.

Un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de l’Etat de Genève, lequel sera en outre condamné à payer aux recourants, pris conjointement et solidairement, une indemnité de procédure de CHF 2'000.- (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté par Messieurs Yves Scheller, Christian Macherel, Marc Fischer, André Duval, contre la brochure explicative relative à la votation du 30 novembre 2008 ;

déclare irrecevable le recours interjeté par Le Comité d’initiative 134 « Pour un cycle qui oriente » REEL Réseau Ecole et Laïcité ;

déclare irrecevable le recours interjeté par l’association ARLE Association Refaire L’Ecole ;

au fond :

admet le recours en tant qu’il est recevable ;

annule l’opération électorale du 30 novembre 2008 relative aux objets cantonaux nos 3, 4 et 5 ;

met à la charge de l’Etat de Genève un émolument de CHF 1'500.- ;

alloue aux recourants pris conjointement et solidairement une indemnité de procédure de CHF 2'000.-, à charge de l’Etat de Genève ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Nicolas Jeandin, avocat des recourants ainsi qu'au Conseil d’Etat.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy, Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :