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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/149/2009

ATA/58/2009 du 03.02.2009 ( ELEVOT ) , REJETE

Parties : DE LASSUS Erwin / CONSEIL D'ETAT, SERVICE DES VOTATIONS ET ELECTIONS
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/149/2009-ELEVOT ATA/58/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 3 février 2009

 

dans la cause

 

Monsieur Erwin DE LASSUS
représenté par Me Romain Jordan, avocat

contre

CONSEIL D'ÉTAT


 


EN FAIT

1. Le 8 février 2009 est organisée à Genève une votation portant sur un objet fédéral, non litigieux en l’espèce, et sur quatre objets cantonaux dont seul le premier est concerné par le présent litige.

Il s’agit de l’objet n° 1, soit la loi constitutionnelle du 28 août 2008 modifiant la constitution de la République et canton de Genève (ci-après : Cst-GE) (introduction du vote électronique) - A 200 - 10013 (ci-après : l'objet n°1 ou le projet de loi).

2. Le matériel électoral envoyé aux membres du corps électoral par le service des votations et élections, comprend notamment une brochure explicative relative aux différents objets précités. Celle-ci est en outre consultable sur le site internet de l'Etat de Genève (http://www.ge.ch/votations-elections/doc/brochure-explicative-08-02-09.pdf).

S'agissant de l'objet n°1, la brochure comporte le texte de la loi constitutionnelle (p. 6) et le commentaire des autorités, présenté comme tel et à la fin duquel figure la recommandation favorable de vote du Grand Conseil et du Conseil d'Etat (p. 7 à 9).

3. Par acte du 19 janvier 2009, Monsieur Erwin de Lassus, né en 1946, domicilié 8, rue Simon-Durand, 1227 Les Acacias, a saisi le Tribunal administratif d’un recours contre le libellé de la brochure explicative concernant l'objet n°1 susmentionné, pour violation de la garantie des droits politiques.

Le Conseil d'Etat avait failli à son devoir d'information objective, son exposé se limitant à une série d'affirmations subjectives et favorables au projet de loi. Il ne faisait pas état des importantes réserves en termes de sécurité qu'impliquait l'instauration générale du vote électronique, alors même que cela avait été longuement discuté lors des débats parlementaires. Il alléguait gratuitement qu'il fallait accepter l'objet n°1 car, autrement, les Suisses de l'étranger se verraient privés du droit de vote. Il affirmait tout aussi péremptoirement que "la professionnalisation du contrôle des opérations électorales offrait des garanties accrues aux électrices et aux électeurs genevois" mais taisait la suppression de la séance publique de contrôle. Le texte légal soumis au vote populaire ne mettait pas en évidence la suppression de cette séance. Enfin, seules 6 lignes dans les conclusions sur les 85 du texte étaient consacrées à l'importante minorité qui s'était exprimée contre le projet de loi.

Le matériel de vote ayant été distribué et le vote par correspondance étant ouvert, seule l'annulation du scrutin permettrait de réparer les vices graves affectant la procédure électorale.

Le recourant a pris les conclusions suivantes :

"Par ces motifs,

M. Erwin de Lassus conclut à ce qu'il plaise au Tribunal administratif

En la forme

Déclarer recevable le présent recours

sur mesures provisionnelles

Constater que le commentaire des autorités intégré dans le matériel de vote distribué en vue de la votation du 9 (sic) février 2009 relatif à l'objet n° 1 viole la garantie des droits politiques des citoyens et des (sic) recourants.

Cela fait

Annuler le scrutin du 9 (sic) février 2009 s'agissant de l'objet n° 1.

Ordonner le report de la votation du 9 (sic) février 2009 et l'établissement d'un nouveau matériel de vote pour l'objet n° 1 qui soit conforme à la garantie constitutionnelle des droits politiques des citoyens et des (sic) recourants.

Ordonner au Conseil d'Etat la notification à ses frais à tous les citoyens genevois de l'arrêt du Tribunal administratif constatant la violation des droits politiques.

Condamner le Conseil d'Etat à faire publier, respectivement lire, le contenu de l'arrêt du tribunal de céans constatant la violation des droits politiques de manière régulière jusqu'au jour de la votation dans la Feuille d'Avis Officielle, la Tribune de Genève, 24 Heures, le Matin, GHI, le Courrier, le Temps, Léman Bleu, Radio Lac, One FM.

Au fond

Préalablement

Ordonner au Conseil d'Etat de produire l'intégralité de la correspondance échangée avec le bureau du Grand Conseil dans le cadre de la rédaction du commentaire des autorités intégré dans le matériel de vote distribué en vue de la votation du 9 (sic) février 2009 relatif à l'objet n° 1.

Principalement

Constater que le commentaire des autorités intégré dans le matériel de vote distribué en vue de la votation du 9 (sic) février 2009 relatif à l'objet n° 1 viole la garantie des droits politiques des citoyens et des (sic) recourants.

Ordonner le report de la votation du 9 (sic) février 2009 et l'établissement d'un nouveau matériel de vote pour l'objet n° 1 qui soit conforme à la garantie constitutionnelle des droits politiques des citoyens et des (sic) recourants.

Constater la nullité du, subsidiairement annuler, le scrutin du 9 (sic) février 2009 relatif à l'objet n° 1.

Allouer à M. de Lassus une indemnité équitable pour les frais indispensables au présent recours.

Débouter tout opposant de toutes autres ou contraires conclusions."

4. Le 19 janvier 2009, le Tribunal administratif a demandé au recourant de payer, le 29 janvier 2009 au plus tard, une avance de frais de CHF 500.-, à défaut de quoi son recours serait déclaré irrecevable.

5. L'avance de frais ayant été réglée le 20 janvier 2009, le Conseil d'Etat a été invité le jour même à faire parvenir ses observations sur la requête de mesures provisionnelles présentée par le recourant.

6. Le 23 janvier 2009, le Conseil d'Etat s'est opposé aux mesures provisionnelles sollicitées car elles correspondaient aux conclusions au fond. En raison d'ailleurs de cette imbrication, sa détermination portait aussi sur le fond.

Le recours devait être rejeté, la brochure explicative relative à l'objet n°1 ne violant pas la garantie des droits politiques des citoyens. Les explications destinées au corps électoral avaient été élaborées par le Conseil d'Etat, puis soumises au Bureau du Grand Conseil, qui avait demandé à ce qu'apparaissent le résultat du vote du législatif et l'avis de l'importante minorité qui s'était exprimée à cette occasion. Le texte finalement approuvé se composait pour l'essentiel d'informations purement factuelles et objectives, destinées à replacer le projet de loi dans son contexte historique et à en préciser les aspects organisationnels et financiers. Il n'était nullement indiqué que le rejet du projet de loi priverait les Suisses de l'étranger de leur droit de vote. Les autorités mises en cause ne cherchaient pas à taire une prétendue disparition de contrôle des opérations électorales par les citoyens mais estimaient au contraire que la mise en place d'une commission permanente renforcerait ce contrôle démocratique. Les réserves émises par une importante minorité du Grand Conseil étaient énumérées en bonne place dans les conclusions et il n'était pas allégué qu'elles l'auraient été de manière fallacieuse ou incomplète. En matière de référendum obligatoire, aucune norme n'imposait d'exigence particulière aux autorités dans la relation des avis minoritaires.

7. Par décision du 26 janvier 2009, la présidente du Tribunal administratif a rejeté la requête de mesures provisionnelles de M. de Lassus, dès lors qu'elles se confondaient avec les conclusions de son recours sur le fond (ATA/45/2009).

8. Le 28 janvier 2009, les observations du Conseil d'Etat ont été transmises au recourant.

EN DROIT

1. Le Tribunal administratif est compétent pour connaître des recours visant la violation de la procédure des opérations électorales cantonales (art. 56 A al. 1 et 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05).

L'envoi à tous les électeurs du matériel de vote fait partie de la procédure des opérations électorales, de sorte que le Tribunal administratif est matériellement compétent pour trancher le litige (ATA/583/2008 du 18 novembre 2008 ; ATA/304/2000 du 16 mai 2000).

2. M. de Lassus est domicilié dans le canton de Genève où il exerce ses droits politiques (art. 1 let. a de la loi sur l’exercice des droits politiques du 15 octobre 1982 - LEDP - A 5 05) : il a ainsi la qualité pour recourir.

3. L’acte de recours a été déposé au greffe du tribunal de céans le 19 janvier 2009. Selon les indications du Conseil d'Etat, le matériel de vote a été expédié aux électeurs à partir du 12 janvier 2009. Le recourant a indiqué avoir reçu ce matériel le 13 janvier 2009. Il s’ensuit que le recours a été déposé dans le délai de six jours prescrit à l’article 63 alinéa 1 lettre c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), par renvoi de l’article 180 alinéa 2 LEDP.

4. Le 1er janvier 2009 est entrée en vigueur une modification de la LPA subordonnant l'examen d'un recours au paiement d'une avance de frais dans le délai fixé par la juridiction saisie (art. 86 al. 1 LPA). L'absence de paiement en temps utile entraîne l'irrecevabilité du recours (art. 86 al. 2 LPA).

En l'espèce, l'avance de frais demandée a été versée avant l'échéance du délai imparti.

5. Selon l'article 53 LEDP, le Conseil d'Etat - pour les élections cantonales - envoie aux électeurs avant l'ouverture du scrutin :

le bulletin de vote ;

les textes soumis à la votation ;

des explications qui comportent, s'il y a lieu, un commentaire des autorités d'une part et des auteurs du référendum ou de l'initiative d'autre part ;

les recommandations du Grand Conseil ou du Conseil municipal
(al.1).

En matière cantonale, le commentaire des autorités est rédigé par le Conseil d'Etat. Il défend de façon objective le point de vue du Grand Conseil et indique le résultat du vote en mentionnant, le cas échéant, l'avis du Conseil d'Etat et d'importantes minorités. Le Conseil d'Etat soumet son projet de commentaire au bureau du Grand Conseil, dont il recueille les observations (al. 2).

6. Le recours est dirigé contre la brochure explicative concernant un objet cantonal, envoyée par le Conseil d'Etat aux électeurs, soit contre un acte dont la jurisprudence a reconnu qu'il entrait dans la procédure des opérations électorales cantonales au sens de l'article 180 LEDP (ATA/508/2008 du 28 novembre 2008).

7. La liberté de vote est garantie par l’article 34 alinéa 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse, du 18 avril 1999 (Cst.- RS 101).

Selon la doctrine, cette liberté se décompose en plusieurs sous-principes, au nombre desquels figure l’intervention de l’autorité dans les campagnes référendaires et électorales (A. AUER, G. MALINVERNI, M. HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse vol. I, 2ème édition, Berne 2006, n° 876). Pour ces auteurs, la liberté de vote impose aux autorités une double obligation, qui comporte un aspect positif et un aspect négatif. Positivement, les autorités sont tenues de fournir aux électeurs les informations relatives à l’objet et aux enjeux des votations populaires, ainsi qu’aux modalités des élections. Négativement, elles doivent s’abstenir de leur donner des informations susceptibles d’exercer une influence illicite sur le résultat du scrutin. Il peut s’agir de messages explicatifs qui donnent une image subjective ou inexacte du but et de la portée de ce dernier (…) (n° 887).

Le respect de la garantie des droits politiques suppose que les objets soumis au vote soient portés à temps et de façon adéquate à la connaissance des électeurs. La manière dont l’information des citoyens doit intervenir découle avant tout du droit cantonal, étant précisé que les dispositions de ce droit qui règlent le devoir d’information des autorités ne sont pas de simples prescriptions d’ordre. Les explications ne doivent toutefois pas donner une image subjective ou inexacte du but et de la portée de la votation (S. GRODECKI, L’initiative populaire cantonale et municipale à Genève n° 1322 p. 369, thèse Genève, 2008).

8. a. Le Tribunal fédéral a déduit de cette disposition constitutionnelle que les procédures électorales devaient être menées de manière à garantir la libre formation de la volonté des électeurs (ATF 130 I 290 consid. 3).

Selon la jurisprudence constante du Tribunal fédéral, le droit de vote autorise tout électeur à exiger que le résultat d'une votation ou d'une élection ne soit reconnu que s'il est l'expression fidèle et sûre d'une volonté librement exprimée par le corps électoral. La validité du scrutin suppose en outre la libre formation de cette volonté ; cela implique que chaque électeur puisse se déterminer dans le cadre d'un processus d'élaboration de l'opinion publique comportant une discussion et une confrontation des points de vue les plus libres et les plus ouvertes possibles. Le résultat peut donc être faussé par une influence inadmissible exercée sur l'opinion publique (ATF 121 I 252 consid. 2, et les réf. citées). A cet égard, le Tribunal fédéral a précisé, que s’il était admis que l’autorité compétente recommande au peuple d’accepter le projet qu’il lui soumet et qu’il lui adresse un message explicatif, elle devait toutefois se borner à une information objective ; sans être tenue à la neutralité, elle devait s’abstenir de toute assertion fallacieuse sur le but et la portée du projet (ATF 117 I a 46 et ss. consid. 5a). Ainsi, le Tribunal fédéral a jugé que l’autorité attente au droit de vote si elle s’écarte de ses devoirs de retenue et d’objectivité, si elle intervient en violation de prescriptions destinées à garantir la liberté des électeurs ou si elle influence l’opinion par d’autres procédés condamnables (ATF 121 I 252 consid. 2).

Toute informalité entachant une procédure électorale ne conduit pas forcément à l’annulation du scrutin. Encore faut-il que l’irrégularité constatée revête une importance déterminante dans la formation de la volonté des électeurs. Il faut bien plutôt examiner selon l’ensemble des circonstances, d’un point de vue tant quantitatif que qualitatif, si le résultat de la votation peut, respectivement, a pu en être influencé, sans que le recourant ait à établir un lien de causalité entre le vice allégué le scrutin et les résultats de ce dernier : il suffit que les irrégularités soient propres à influencer ceux-ci (ATF 130 I 290 consid. 4 à 6 ; 117 I a 41 et ss, consid. 5 b).

b. Ces principes ont été pleinement reçus par la jurisprudence cantonale (ATA/583/2008 du 18 novembre 2008 et les références citées).

9. Les notices explicatives officielles ne doivent pas porter atteinte à la libre formation de la volonté du corps électoral. Contrairement aux partis ou groupements politiques, l'autorité doit faire preuve d'une grande rigueur (A. AUER, L'intervention des collectivités publiques dans les campagnes référendaires in RDAF 1985 pp. 200, 201).

La brochure explicative doit être claire, objective (A. AUER, G. MALINVERNI, M. HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, vol. I, Berne, 2000, p. 287) aisément compréhensible, ne pas être trop longue et elle n'a pas pour dessein de reproduire le débat parlementaire.

Elle doit permettre à l'électeur de se forger une opinion sur le but et la portée de l'objet de la votation (ATA/122/2004 du 3 février 2004). Elle doit correspondre, dans le ton utilisé et la manière dont les arguments sont exposés aux critères de retenue et d’objectivité qu’exige la jurisprudence. Elle ne doit pas donner l’impression que l’autorité détient la vérité absolue sur la question soumise au vote, ce qui serait de nature à influencer la libre volonté des votants (ATA/508/2008 précité).

10. Sur la base des principes rappelés ci-dessus, il convient d’examiner la pertinence de l'argumentation et des conclusions du recourant.

a. On retiendra en premier lieu que l'objet n°1 porte sur une loi constitutionnelle, ce qui implique le référendum obligatoire (art. 47 al. 2 Cst.-GE). Il ressort du dossier que l'auteur du projet de loi soumis initialement au Grand Conseil est le Conseil d'Etat. La brochure explicative n'a donc pas à présenter la position d'initiants ou d'un comité référendaire mais uniquement le commentaire des autorités prévu à l'article 53 alinéa 2 LDEP.

A cet égard, il résulte du dossier que le projet du texte litigieux a bien été soumis par le Conseil d'Etat au bureau de Grand Conseil, dont les observations ont été recueillies et prises en compte. Le résultat du vote est indiqué et l'avis de la minorité est mentionné de sorte que les exigences formelles de la disposition précitée sont respectées.

b. Le commentaire est divisé en six parties, annoncées par un titre : "l'origine du projet", "six ans d'expérience", "aspect organisationnel", "aspects financiers"; "conclusion". Le recourant ne prétend pas que leur contenu serait en tout ou partie mensonger, erroné ou inexact. Il allègue que "les éléments les plus essentiels soulevés par le débat parlementaire" ne seraient pas mis en évidence et reproche à l'autorité intimée de ne pas avoir fait état des problèmes de sécurité, en particulier du risque de piratage, liés à l'instauration générale du vote électronique. Force est toutefois de constater que ces préoccupations sont bien mentionnées, à travers la synthèse de la position de l'importante minorité, ainsi formulée : " (La minorité) a fait valoir qu'à son avis, la sécurité des ordinateurs individuels était difficile à garantir. Elle a affirmé que les banques investissaient dans leur propre sécurité informatique des moyens financiers sans comparaison avec ceux de l'Etat et a souligné que la procédure de dépouillement électronique n'était pas compréhensible par tous, à la différence des bulletins papier" (brochure p. 9).

Au stade du vote de la norme constitutionnelle portant sur le principe de l'introduction du vote électronique comme mode d'expression du choix des électeurs, en plus de ceux existant déjà - le vote dans l'isoloir et le vote par correspondance - cette évocation claire de l'existence de risques propres à la transmission de données par voie électronique qui lui sont liés, est suffisante pour admettre que l'autorité a satisfait à son devoir d'information objective.

La mention de l'avis de la minorité du Grand Conseil échappe également au reproche de disproportion. En effet, la seule exigence légale en matière de référendum obligatoire est de mentionner cet avis de manière objective, sans qu'il soit imposé de restituer l'intégralité du débat, au demeurant public, qui a animé les rangs du parlement, ni d'accorder à sa minorité un texte d'égale longueur à celui de la majorité. Il résulte d'ailleurs de l'historique de l'article 53 LDEP que le législateur a volontairement renoncé à une proposition allant dans ce sens (MGC 1977 VI p. 5177-5180 ; MGC 1982 III p. 3662-3766, not. 3670).

c. Le recourant fait encore grief au Conseil d'Etat de ne pas annoncer la suppression de la séance publique de récapitulation des votes, prévue actuellement par l'article 48 alinéa 3 Cst.-GE dont la teneur est la suivante :

"La récapitulation des votes se fait en séance publique, dès le lendemain de l'opération électorale, par les soins de la chancellerie d'Etat et sous le contrôle d'au moins cinq électeurs choisis par le Conseil d'Etat dans des partis ou groupements différents".

L'article 53 alinéa 1 LDEP impose au Conseil d'Etat de communiquer au corps électoral le texte soumis au vote, in casu la loi constitutionnelle 10013, dans sa teneur adoptée par le Grand Conseil. L'autorité exécutive ne peut en aucune manière modifier le texte de loi soumis à votation, sauf à violer à la fois l'article 53 alinéa 1 LDEP et le principe de la séparation des pouvoirs. En particulier, il ne peut y ajouter la teneur de l'article 48 alinéa 3 Cst.-GE, qui est simplement cité avec la mention "abrogé" entre parenthèses.

Cela étant, la brochure fait état de la suppression de la séance publique de récapitulation selon les modalités susmentionnées, en mentionnant qu'"afin de renforcer le contrôle démocratique sur les modalités d'exécution des opérations électorales, le Grand Conseil a souhaité la création d'une commission électorale centrale et permanente. Cette commission doit remplacer les actuels contrôleurs proposés par les partis et nommés lors de chaque scrutin par le Conseil d'Etat. La professionnalisation du contrôle des opérations électorales offrira ainsi des garanties accrues aux électrices et électeurs genevois"(brochure p. 8-9). L'électeur peut ainsi comprendre que le mode de contrôle est modifié et, cas échéant après avoir nourri sa réflexion d'éléments complémentaires comme la consultation de la teneur actuelle de l'article 48 Cst, décider si la proposition qui lui est soumise lui convient ou non. Là encore, la brochure incriminée échappe à toute critique.

d. Le recourant soutient enfin que la notice explicative encouragerait à voter en faveur du projet de loi car, sans cela, les Suisses de l'étranger se verraient privés du droit de vote. Il se fonde pour ce faire sur le passage figurant en page 8, selon lequel le vote par internet était souhaité par les Suisses de l'étranger en raison des difficultés concrètes auxquelles se heurte l'exercice de leur droit de vote du fait des délais postaux. Le recourant ne prétend pas que cela serait faux. Il se contente d'en tirer une conclusion à laquelle la lecture du texte ne permet pas de parvenir sans témérité et qui doit être écartée.

11. Au vu de ce qui précède, le recours, mal fondé, sera rejeté.

Un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge du recourant qui succombe et aucune indemnité ne lui sera allouée (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 19 janvier 2009 par Monsieur Erwin De Lassus contre la brochure explicative relative à l'objet n°1 de la votation du 8 février 2009 (loi constitutionnelle du 28 août 2008, modifiant la constitution de la République et canton de Genève - introduction du vote électronique) ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur Erwin de Lassus un émolument de CHF 1'000.- ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Romain Jordan, avocat du recourant ainsi qu'au Conseil d'Etat.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy, Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière :

 

 

K. Hess

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :