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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3206/2023

JTAPI/754/2024 du 06.08.2024 ( OCPM ) , REJETE

ATTAQUE

Descripteurs : CAS DE RIGUEUR;ENFANT;AUDITION OU INTERROGATOIRE;ATTEINTE À LA SANTÉ
Normes : Cst.29.al2; LEI.30.al1.letb; OASA.31.al1; LEI.83.al4; LEI.64.al1.letc
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3206/2023

JTAPI/754/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 6 août 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Alain MISEREZ, avocat, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1993, son épouse, Madame B______, née le ______ 1994, et leur fille, C______, née le ______ 2014, sont ressortissants du Kosovo.

2.             Par ordonnance pénale du 28 avril 2015, le Ministère public de Genève l’a condamné à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, à CHF 30.-, avec sursis, délai d’épreuve de trois ans, et à une amende de CHF 225.- pour infractions à l’art. 115 al. 1 let. a et b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20 ; anciennement LEtr), au motif qu’il était entrée illégalement en Suisse, le 3 mars 2015 et y avait séjourné illégalement jusqu’au 5 avril 2015, date de son interpellation.

3.             Par décision du 8 juin 2015, le secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) a prononcé à l’encontre de M. A______ une interdiction d’entrée en Suisse (ci-après : IES), valable jusqu’au 7 mai 2017, laquelle ne lui a pas été notifiée.

4.             Le 25 novembre 2019, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a reçu trois demandes d’autorisation de séjour et/ou de travail en faveur des précitées, déposées, respectivement par D______ Sàrl en faveur de M. A______, arrivé à Genève le 1er août 2014, et qu’elle employait depuis le 3 novembre 2015, par l’entreprise E______ en faveur de Mme B______, arrivée à Genève le 22 mai 2016, qu’elle souhaitait engager à plein temps et en faveur de C______, arrivée à Genève en 2015.

Divers justificatifs étaient également joints à ces demandes, notamment des contrats de travail et des fiches de salaires pour chacun des époux.

5.             Par courrier du 23 juillet 2020, l’OCPM a sollicité des pièces et des informations complémentaires, notamment des justificatifs de résidence à Genève de 2015 à 2018, s’agissant de Mme B______ et de C______.

6.             Le 29 octobre 2020, M. A______ a été interpellé et entendu par la police en qualité de prévenu de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), d’exercice d’une activité lucrative sans autorisation (art. 115 al. 1 let. c LEI), de comportement frauduleux à l’égard des autorités (art. 118 LEI) et de faux dans les titres [art. 251 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0)].

Il a déclaré en substance qu’il ignorait que les fiches de salaire qui lui avaient été remises et qu’il avait transmises à l’OCPM étaient des faux ou comportaient des incohérences. Il avait bénéficié de l’aide de tiers et de proches dans le cadre du dépôt de sa demande d’autorisation de séjour. Il avait poursuivi ses études jusqu’au gymnase au Kosovo et y avait ensuite travaillé. Il était arrivé à Genève en 2014. Il ignorait qu’il avait fait l’objet d’une IES. Son épouse et leur fille l’avaient rejoint fin 2016 ou 2017. C______ était scolarisée à Genève. Son épouse ne travaillait pas. Elle avait eu un cancer du côlon et de l’utérus et avait bénéficié d’une très bonne prise en charge en Suisse. Elle devait subir des scanners et des IRM chaque année. Il était venu en Suisse pour son épouse et sa fille, « pour des raisons de santé ». Il y avait également des tantes, des cousins et des amis. Au Kosovo, il avait ses parents, l’un de ses frères et deux sœurs.

7.             Par ordonnance pénale du 30 octobre 2020 (P/1______), contre laquelle M. A______ a formé opposition, le Ministère public de Genève l’a condamné à une peine pécuniaire de 130 jours-amende, à CHF 80.-, avec sursis, délai d’épreuve 3 ans, et à une amende de CHF 2'080.- pour faux dans les titres (art. 251 CP), séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), activité lucrative sans autorisation (art. 115 al. 1 let. c LEI) et tentative de comportement frauduleux à l’égard des autorités (art. 22 al. 1 CP cum 118 al. 1 LEI).

8.             Le 28 avril 2021, M. A______ a été entendu par la police en qualité de prévenu de conduite d’un véhicule automobile alors qu’il se trouvait dans l’incapacité de conduire (fatigue), avec accident [art. 91 de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01), art. 2 de l’ordonnance sur les règles de la circulation routière du 13 novembre 1962 (OCR - RS 741.11), art. 10 et 12a de l’ordonnance sur le contrôle de la circulation routière du 28 mars 2007 (OCCR-741.013)], de devoirs en cas d’accident non remplis lors de dommages matériels (art. 92 LCR ; art. 56 OCR), de marche arrière sans précaution avec accident et dégâts matériels importants (art. 26, 36, 90 LCR ; art. 17 OCR).

9.             Par ordonnance de classement partiel du 17 décembre 2021, le Ministère public, mettant à néant l’ordonnance pénale du 30 octobre 2020, a ordonné le classement de la procédure P/1______ à l’égard de M. A______, s’agissant des infractions de faux dans les titres (art. 251 CP) et de tentative (art. 22 al. 1 CP) d’infraction à l’art. 118 al. 1 LEI et dit que la procédure poursuivait sa voie pour le surplus.

Il ressortait en effet du dossier, qu’entendu par la police, l’associé gérant de D______ Sàrl avait confirmé qu’il avait employé M. A______ de novembre 2015 à avril 2020, que les documents litigieux avaient été établis par sa société et que la caisse de pension ne l’avait pas rendu attentif au fait que le taux que la société avait appliqué aux retenues des cotisations sociales était incorrect.

10.         Le 22 novembre 2022, Mme B______, assistée d’une interprète, a été entendue par la police en qualité de prévenue d’entrée et séjour illégal (art. 115 al. 1 let. a et b LEI), d’exercice d’une activité lucrative sans autorisation (art. 115 al. 1 let. c LEI), de comportement frauduleux à l’égard des autorités (art. 118 LEI) et de faux dans les titres (art. 251 CP).

Elle a déclaré en substance qu’elle avait interrompu ses études au Kosovo, alors qu’elle était au collège. Sa mère, ses quatre sœurs et son frère vivaient au Kosovo. Elle était arrivée en Suisse en 2016. Elle avait une tante paternelle dans le canton de Soleure. Elle n’avait jamais travaillé, ni au Kosovo ni en Suisse. Elle ignorait la raison pour laquelle des fiches de salaire à son nom figuraient dans son dossier. Elle avait été aidé par un tiers qui lui avait été présenté par une « copine ». C’était ce tiers qui avait envoyé les documents litigieux et elle n’était aucunement impliquée. Elle avait effectivement signé un contrat de travail avec un cousin de son époux mais n’avait pas pu commencer cet emploi en raison de problèmes de santé.

11.         Le 8 décembre 2022, l’OCPM a autorisé M. A______ à travailler à plein temps auprès de F______ Sàrl, en qualité de peintre. Cette autorisation, révocable en tout temps, était délivrée jusqu’à droit connu sur la demande d’autorisation de séjour.

12.         Par ordonnance pénale du 21 décembre 2022 (P/2______), contre laquelle Mme B______ a formé opposition, le Ministère public de Genève l’a condamnée à une peine pécuniaire de 130 jours-amende, à CHF 80.-, avec sursis, délai d’épreuve 3 ans, et à une amende de CHF 2'080.- pour faux dans les titres (art. 251 CP), séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI), activité lucrative sans autorisation (art. 115 al. 1 let. c LEI) et tentative (art. 22 al. 1 CP) d’infraction à l’art. 118 al. 1 LEI.

13.         Par ordonnance pénale du 16 mars 2023 (P/1______), contre laquelle M. A______ a formé opposition, le Ministère public de Genève l’a condamné à une peine pécuniaire de 120 jours-amende à CHF 70.-, avec sursis, délai d’épreuve 3 ans, pour infraction aux art. 91a al. 1 LCR et 115 al. 1 let. b et c LEI, et à une amende de CHF 1'500.- pour violation simple des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1 LCR) et violation des obligations en cas d’accident (art. 92 al. 1 LCR).

14.         Par courrier du 17 mars 2023, l’OCPM a fait part aux précités de son intention de refuser de préaviser favorablement leur dossier auprès du SEM, en vue de l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur en leur faveur et en faveur de leur fille, et de prononcer leur renvoi de Suisse.

M. A______ n’avait justifié de sa présence en Suisse qu'à partir d'octobre 2015, date à laquelle sa carte de base émise par les Transports public genevois (ci-après : TPG) avait été établie. Le séjour de son épouse était prouvé depuis la date de la conclusion du contrat d’assurance-maladie le 22 décembre 2018, et celui de C______, depuis le début de sa scolarité en août 2019.

M. A______ ne remplissait ainsi pas la condition du séjour prouvé et continu de dix ans minimum à Genève pour une personne célibataire et sans enfant scolarisé. Il convenait également de relever que pour remplir la condition de la durée de séjour de cinq ans, s’agissant d’une famille avec enfant scolarisé, ce dernier devait justifier de sa présence à Genève durant les cinq dernières années avant le dépôt de la demande et qu'il devait être scolarisé au moment du dépôt. Or, leur fille ne justifiait que d'un peu plus de trois ans de séjour.

Par ailleurs, quand bien même aucun jugement n’avez encore été prononcé, M. A______ avait reconnu lors de son audition du 29 octobre 2020 avoir demandé à une tierce personne d'établir une fausse attestation de logement et son épouse avait reconnu, lors de son audition du 22 novembre 2022, que certains documents qui figuraient dans son dossier étaient des faux. En outre, contrairement à son époux, cette dernière n’avait pas justifié de son niveau de français. Leur intégration ne correspondait ainsi pas au comportement ordinaire attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour.

Ils n’avaient pas non plus démontré qu'une réintégration dans leur pays d'origine aurait de graves conséquences sur leur situation personnelle indépendamment des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires ou scolaires) affectant l'ensemble de la population restée sur place. Ils avaient vécu au Kosovo durant toute leur enfance, leur adolescence, soit les périodes essentielles pour l'intégration socio-culturelle, de même que le début de leur vie d'adulte. Ils y avaient également de la famille proche.

Sous l’angle de la prise en compte de l'intérêt supérieur des enfants conformément à l'article 3 al. 1 de la Convention relative aux droits de l'enfant du 2 novembre 1989 (CDE ; RS 0.107), il convenait de relever que leur fille était arrivée en Suisse au plus tôt en août 2019. Elle était âgée de huit ans, n’avait pas encore atteint l’adolescence et n’était scolarisée que depuis trois ans. Son intégration en Suisse n'était pas encore déterminante, de sorte que sa réintégration dans son pays d'origine ne devrait pas poser de problèmes insurmontables.

Un délai de 30 jours (ultérieurement prolongé au 24 mai 2023) leur était accordé pour faire valoir leur droit d’être entendu par écrit.

15.         Le 22 mai 2023, les intéressés ont usé de ce droit, sous la plume de leur conseil.

Le Ministère public de Genève avait considéré qu’ils n’avaient commis aucune infraction pénale dans le cadre de leurs demandes d’autorisation de séjour. L’OCPM ne pouvait leur reprocher un comportement illicite « sans même avoir eu accès à leur dossier », étant précisé que le Ministère public avait fait part de son intention de classer la procédure dirigée contre Mme B______. En outre, le séjour de M. A______ était démontré dès 2014. S’agissant de son épouse, elle était arrivée en Suisse courant 2016, accompagnée de C______, et disposait de preuves de son séjour depuis 2018, soit depuis cinq ans. C______ était scolarisée à Genève depuis quatre ans. Mme B______ avait été traitée aux Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) en 2018 par radiochimie, puis par chirurgie, et était actuellement suivie selon les recommandations de la société suisse de gastroentérologie (ci-après : SSG) qui préconisait, dans la quatrième année post-opératoire, un suivi annuel avec un « CT thoraco-adominal » qui était prévu en février 2024, tel que cela ressortait du rapport médical produit.

Par ailleurs, M. A______ avait toujours travaillé, ce qui lui avait permis de subvenir aux besoins de sa famille. Ils n’avaient jamais émargé à l’assistance publique ni fait l’objet de poursuites. Ils maîtrisaient la langue française et produiraient prochainement l’attestation de réussite à l’examen passé par Mme B______.

Ils remplissaient ainsi les critères de légalisation de leur séjour.

16.         Le rapport médical précité étant illisible, l’OCPM en a réclamé une nouvelle copie, par courriel du 9 juin 2023.

17.         Par ordonnance de classement du 12 juin 2023, le Ministère public, mettant à néant l’ordonnance pénale du 21 décembre 2022, a ordonné le classement de la procédure P/2______ à l’égard de Mme B______, au motif qu’il n’était pas possible d’établir à satisfaction de droit que cette dernière avait eu connaissance de la remise des faux documents à l’OCPM.

Par ailleurs, l’action était prescrite s’agissant de l’entrée illégale et du séjour illégal en Suisse du 1er janvier au 11 juin 2016. Concernant la période du 11 juin 2016 au 25 novembre 2019, il convenait de renoncer à toute sanction, compte tenu notamment de l’annonce spontanée de l’intéressée en vue de régulariser son statut de séjour.

18.         Alors qu’il n’avait pas encore reçu la pièce médicale requise, l’OCPM a, par décision du 21 juillet 2023 adressée directement aux intéressés, refusé de donner une suite favorable à leur demande d’autorisations de séjour.

19.         Interpellé à cet égard par leur conseil, l’OCPM a expliqué par courriel du 14 août 2023 que, dans la mesure où aucune suite n’avait été donnée à sa requête du 9 juin 2023, il avait rendu une décision qui avait été adressée par erreur aux intéressés. Comme il avait reçu un rapport médical dans l’intervalle, il allait reprendre l’instruction du dossier et rendrait une nouvelle décision dans les meilleurs délais. Il convenait ainsi de ne pas prendre en compte la décision du 9 juin 2023.

20.         Par décision du 25 août 2023, l’OCPM a, pour les motifs qui ressortaient de sa lettre d’intention du 17 mars 2023, refusé de préaviser favorablement le dossier de M. A______, de Mme B______ et de leur fille auprès du SEM, en vue de l’octroi d’autorisations de séjour pour cas de rigueur. Il a également prononcé leur renvoi, leur impartissant un délai au 25 novembre 2023 pour quitter la Suisse, l’exécution de cette mesure paraissant possible, licite et raisonnablement exigible.

La recourante ne justifiait que d’un peu plus de quatre ans de séjour en Suisse, durée qui était bien inférieure au moment du dépôt de la demande, et C______ n’était scolarisée à Genève que depuis quatre ans.

Par ailleurs, il ressortait des certificats médicaux produits que la recourante était en rémission et que ses problèmes de santé ne nécessitaient pas de séjour à l’hôpital ni l’utilisation d’appareils médicaux sophistiqués ni d’intervention chirurgicale. Elle n’avait pas non plus démontré qu’elle ne pourrait être soignée qu’en Suisse. Les motifs médicaux ne justifiaient ainsi pas la poursuite de son séjour en Suisse.

21.         Par acte du 2 octobre 2023, M. A______, sous la plume de son conseil, a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation. Préalablement, il a sollicité l’octroi d’un délai pour compléter son recours, ainsi que son audition, de même que celle de son épouse et de Madame G______, la logopédiste de sa fille.

Le recourant a retracé son parcours sous l’angle professionnel, personnel et familial. Après un séjour de près de neuf ans en Suisse, il n’avait aucune perspective d’avenir au Kosovo. Il était arrivé en Suisse en septembre 2014 et avait trouvé un emploi en 2015. Il était financièrement indépendant, ne faisait l’objet d’aucune poursuite, son casier judiciaire était vierge et il justifiait d’un niveau de français A2. Il avait ainsi fait preuve d’une bonne intégration. Dans le courant de l’année 2016, il avait fait venir son épouse et leur fille en Suisse. Son épouse était tombée gravement malade en 2018. Atteinte d’un cancer colorectal, elle avait bénéficié de soins aux HUG auxquels elle n’aurait pas eu accès au Kosovo. Son état de santé était stable mais nécessitait un suivi médical. C______ était arrivée en Suisse alors qu’elle n’avait que deux ans, et y était scolarisée depuis août 2019. Elle ne parlait que le français. Depuis le 30 mars 2022, elle consultait une logopédiste deux fois par semaine, en raison d’un important trouble du développement de la parole et du langage qui nécessitait un environnement stable. Un bouleversement majeur dans sa vie, tel qu’un retour au Kosovo freinerait ses progrès. Ne parlant pas « un traître mot d’albanais », elle ne parviendrait pas à s’y intégrer.

En tout état, compte tenu des problèmes rencontrés par ces dernières, l’exécution de leur renvoi était inexigible. Elle compromettrait le développement et l’équilibre psychique de C______. Quant à son épouse, si elle était certes en rémission, le risque d’une éventuelle rechute ne pouvait pas encore être écarté. Or, la Suisse connaissait l’un des meilleurs systèmes de santé au monde. Au Kosovo, elle ne pourrait pas bénéficier d’un suivi médical équivalent, ce qui mettrait sa vie en péril.

Dans ces circonstances, la famille remplissait aussi bien les critères de l’opération « Papyrus », en particulier sous l’angle de la durée de leur présence à Genève, que les conditions d’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur, et la décision litigieuse violait le principe de la proportionnalité.

22.         Dans ses observations du 29 novembre 2023, l’OCPM a conclu au rejet du recours.

Le recourant n’avait pas justifié d’un séjour continu d’une durée minimale de dix ans. La condition d’un séjour d’une durée de cinq ans pour chacun des membres de la famille n'était pas non plus réalisée lors du dépôt de la demande. En outre, il n’apparaissait pas que les liens des recourants avec la Suisse étaient étroits au point qu'un retour dans leur pays d'origine les placerait dans une situation personnelle d'extrême gravité.

S’agissant de son épouse, il ne ressortait pas des rapports médicaux datés du 2 février et du 14 juillet 2023, qu’elle nécessitait d’un suivi ou des soins médicaux indisponibles au Kosovo. Il y avait ainsi lieu de considérer que l’exécution de son renvoi était raisonnablement exigible. L’OCPM était également disposé à adapter le délai de départ afin de lui permettre de bénéficier de son suivi annuel prévu en février 2024.

Quant à C______, âgée de neuf ans, elle était arrivée en Suisse à l’âge de cinq ans (sic). Même si elle avait débuté sa scolarité à Genève, son intégration au milieu socio-culturel suisse n'était pas si profonde et irréversible qu'un retour au Kosovo constituerait un déracinement complet. Il convenait également de préciser que des séances de logopédie étaient accessibles au Kosovo.

23.         Le 8 janvier 2024, le recourant a répliqué, sous la plume de son conseil.

L’OCPM n’avait pas pris pleinement en considération la problématique de C______ qui avait « de la difficulté à s’exprimer en langue albanaise ». Elle gérait clairement mieux la langue française qui constituait sa langue maternelle et son seul cercle d’amis de son âge se trouvait en Suisse. Son intégration socio-culturelle y était profonde. Elle ne pouvait pas suivre sa scolarité ailleurs.

Concernant son épouse, l’absence de traitement adéquat dans son pays d’origine était connue de « manière globale ». Son renvoi aurait pour conséquence de dégrader sa santé et également la rémission de sa maladie, mettant en danger son intégrité physique.

L’OCPM avait également omis de prendre en compte le fait qu’ils totalisaient cinq années consécutives de présence sur le territoire avec un enfant scolarisé.

Enfin, la demande tendant à son audition, à celle de son épouse, ainsi que celle des médecins de cette dernière et de leur fille, permettrait au tribunal de se rendre compte de leur situation médicale, humaine et socio-culturelle.

24.         Le 5 février 2024, l’OCPM a indiqué ne pas avoir d’observations complémentaires à formuler.

25.         Par jugement du 19 avril 2024 (P/1______), le tribunal de police a classé les faits de séjour illégal et d’exercice d’une activité lucrative sans autorisation pour la période courant du 29 avril 2015 au 19 avril 2017 (art. 115 al. 1 let. b et c LEI et art. 97 al. 1 let. d CP) et acquitté le recourant d’entrave aux mesures de constatation de l’incapacité de conduire (art. 91a al. 1 LCR), de séjour illégal et d’exercice d’une activité lucrative sans autorisation pour la période pénale courant du 26 novembre 2019 au 29 octobre 2020 (art. 115 al 1 let. b et c LEI), l’a condamné à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à CHF 70.-, avec sursis, délai d’épreuve 3 ans, et à une amende de CHF 600.- pour violation simple des règles de la circulation routière (art. 26, 31 et 90 al. 1 LCR), violation des obligations en cas d’accident (art. 92 al. 1 LCR), séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI) et exercice d’une activité lucrative sans autorisation (art. 115 al. 1 let. c LEI).

26.         Le 9 juillet 2024, faisant suite à la demande du tribunal, le recourant a notamment produit les pièces suivantes :

-          une attestation établie le 27 juin 2024 par la logopédiste de C______ indiquant que cette dernière avait été suivie en logopédie du 30 mars 2022 à mars 2024, à raison de deux séances par semaine, pour un important trouble du développement de la parole et du langage qui impactait sur son apprentissage (notamment la lecture, l'orthographe) et sa socialisation. Parmi les facteurs essentiels présidant à l'amélioration de sa situation scolaire, son intégration sociale et son bien-être psychique, elle avait besoin : d'un environnement stable et rassurant, afin de maintenir une ouverture à cet environnement, de faciliter sa socialisation et son intégration, étant précisé qu’elle avait mis du temps pour se faire une place parmi ses camarades ; d'une stimulation cognitive indispensable au développement de ses connaissances et de pouvoir poursuivre son apprentissage en français, sa langue principale qu'elle avait bien investie « (C______ ne parlant pas l'albanais) ». Un retour dans son pays d'origine pouvait gravement compromettre le développement de son apprentissage et son équilibre psychique ;

-          un document établi par les HUG du 21 février 2024 intitulé « Consultation d’oncologie – Fin de traitement », dont il ressort, qu’à cinq ans de la prise en charge chirurgicale de l’adénocarcinome de la charnière recto-sigmoïdienne, la patiente était guérie. L’arrêt du suivi en oncologie était préconisé, avec une coloscopie tous les cinq ans. Le scanner thoraco-abdominal du 1er février 2024 avait mis en évidence une condensation pulmonaire médio-basale du lobe inférieur droit d'origine infectieuse en premier lieu. Aucune lésion suspecte de récidive loco-régionale ou à distance n’avait été détectée. Un scanner thoracique à trois mois était préconisé pour le suivi de cette condensation ;

-          un document établi le 9 juillet 2024 par le Docteur H______, indiquant que la patiente avait été diagnostiquée d'un cancer du côlon en 2018. Le traitement et le suivi effectués aux HUG étaient un succès et le traitement oncologique avait pu être stoppé. Elle avait un suivi par colonoscopie tous les cinq ans. Le dernier scanner avait mis en évidence un nodule dans le poumon qui nécessitait un scanner de contrôle et les répercussions psychologiques de la maladie oncologique nécessitait un suivi psychiatrique.

27.         Les arguments et pièces produites par les parties seront discutés dans la mesure utile, ci-après, dans la partie « en droit ».

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

5.             À titre préliminaire, le recourant sollicite son audition, l’audition de son épouse et de ses médecins, ainsi que celle des médecins et de la logopédiste de leur fille.

6.             Le droit d'être entendu garanti par l'art. 29 al. 2 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst - RS 101) comprend notamment le droit, pour l'intéressé, de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités). Toutefois, ce droit ne peut être exercé que sur les éléments qui sont déterminants pour décider de l'issue du litige. Il est ainsi possible de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l'authenticité n'est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsque le juge parvient à la conclusion qu'elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_576/2021 du 1er avril 2021 consid. 3.1 ; 2C_946/2020 du 18 février 2021 consid. 3.1 ; 1C_355/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.1).

7.             Par ailleurs, le droit d'être entendu ne comprend pas celui d'être entendu oralement (cf. not. art. 41 in fine LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6.1 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_668/2020 du 22 janvier 2021 consid. 3.3 ; 2C_339/2020 du 5 janvier 2021 consid. 4.2.2 ; ATA/672/2021 du 29 juin 2021 consid. 3b) ni celui d'obtenir l'audition de témoins (ATF 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_725/2019 du 12 septembre 2019 consid. 4.1 ; 2C_1004/2018 du 11 juin 2019 consid. 5.2.1 ; 2C_1125/2018 du 7 janvier 2019 consid. 5.1 ; ATA/672/2021 du 29 juin 2021 consid. 3b).

8.             En l'espèce, le tribunal estime que le dossier contient les éléments suffisants et nécessaires, tel qu'ils ressortent des écritures des parties, des pièces produites et du dossier de l'autorité intimée, pour statuer sur le litige, de sorte qu'il n'apparaît pas utile de procéder à la comparution personnelle des recourants ni à celui des témoins sollicités. Le recourant a en effet eu la possibilité de faire valoir ses arguments à plusieurs reprises dans le cadre du recours et de produire tout moyen de preuve utile en annexe de ses écritures, sans qu’il n'explique quels éléments la procédure écrite l’aurait empêché d'exprimer de manière pertinente et complète. Il a d’ailleurs produit plusieurs rapports médicaux relatifs à l’état de santé de son épouse ainsi que plusieurs attestations établies par la logopédiste qui suivait leur fille. Les documents les plus récents datent du 9 juillet 2024 pour ce qui concerne la première et du 27 juin 2024 pour la seconde. Il convient également de relever que quand bien même le recourant a sollicité, l’audition « des médecins » de sa fille, sans toutefois les nommer, il n’a ni allégué ni même démontré qu’elle suivait un quelconque traitement médical, ce qui ne ressort pas non plus du dossier. En tout état, il n’est pas nécessaire que le tribunal procède aux auditions sollicitées pour appréhender la situation médicale, humaine et socio-culturelle du recourant et de sa famille qui ressort clairement du dossier.

9.             Cette demande d'instruction, en soi non obligatoire, sera par conséquent rejetée, dans la mesure où elle n’apportera pas un éclairage différent sur le dossier.

10.         La LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas en l'espèce.

11.         Selon l'art. 30 al. 1 let. b LEI, il est possible de déroger aux conditions d'admission d'un étranger en Suisse pour tenir compte d'un cas individuel d'extrême gravité.

12.         L'art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l'existence d'une telle situation, il convient de tenir compte, notamment, de l'intégration du requérant sur la base des critères d'intégration définis à l'art. 58a al. 1 LEI (let. a), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l'état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g). Selon l'art. 58a al. 1 LEI, les critères d'intégration sont le respect de la sécurité et de l'ordre publics (let. a), le respect des valeurs de la Constitution (let. b), les compétences linguistiques (let. c), ainsi que la participation à la vie économique ou l'acquisition d'une formation (let. d).

Ces critères, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; 137 II 1 consid. 1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3986/2015 du 22 mai 2017 consid. 9.3 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017), d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (cf. ATA/1669/2019 du 12 novembre 2019 consid. 7b).

Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance de la situation qu'ils visent doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 ; ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6a ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 7c ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1020/2017 du 27 juin 2017 consid. 5b ; cf. aussi arrêts du Tribunal fédéral 2C_602/2019 du 25 juin 2019 consid. 3.3 ; 2C_222/2017 du 29 novembre 2017 consid. 1.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (cf. ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6a ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 7c ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c).

13.         Selon l'art. 58a al. 1 LEI, les critères d'intégration sont le respect de la sécurité et de l'ordre publics (let. a), le respect des valeurs de la Constitution (let. b), les compétences linguistiques (let. c), ainsi que la participation à la vie économique ou l'acquisition d'une formation (let. d).

14.         L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique qu'il se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'il tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question, et auxquelles le requérant serait également exposé à son retour ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d'une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par le requérant à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1131/2017 du 2 août 2017 consid. 5e).

La reconnaissance de l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité implique que les conditions de vie et d'existence de l'étranger doivent être mises en cause de manière accrue en comparaison avec celles applicables à la moyenne des étrangers. En d'autres termes, le refus de le soustraire à la réglementation ordinaire en matière d'admission doit comporter à son endroit de graves conséquences. Le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il y soit bien intégré, tant socialement et professionnellement, et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d'extrême gravité. Encore faut-il que sa relation avec la Suisse soit si étroite que l'on ne puisse exiger qu'il vive dans un autre pays, notamment celui dont il est originaire. À cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage qu'il a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exception (ATF 130 II 39 consid. 3 ; 124 II 110 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C 754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 7.2 ; 2A 718/2006 du 21 mars 2007 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral C-6956/2014 du 17 juillet 2015 consid. 6.1 ; C_5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.3 ; C_6726/2013 du 24 juillet 2014 consid. 5.3 ; ATA/181/2019 du 26 février 2019 consid. 13d ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8).

Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'une telle situation, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse et la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-2584/2019 du 11 décembre 2019 consid. 5.3 ; F-6510/2017 du 6 juin 2019 consid. 5.6 ; F-736/2017 du 18 février 2019 consid. 5.6 et les références citées ; ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6b ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1130/2017 du 2 août 2017 consid. 5b).

La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d’origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l’intéressé, seraient gravement compromises (arrêt du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; ATA/577/2021 du 1er juin 2021 consid. 2c).

15.         Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; 2A.166/2001 du 21 juin 2001 consid. 2b/bb ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-912/2015 du 23 novembre 2015 consid. 4.3.2 ; ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7e ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017 ; ATA/287/2016 du 5 avril 2016).

La durée du séjour (légal ou non) est ainsi un critère nécessaire, mais pas suffisant, à lui seul, pour la reconnaissance d'un cas de rigueur (ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7e ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, vol. II : LEtr, 2017, p. 269 et les références citées). Le simple fait, pour un étranger, de séjourner en Suisse pendant de longues années, y compris à titre légal, ne permet donc pas d'admettre un cas personnel d'extrême gravité sans que n'existent d'autres circonstances tout à fait exceptionnelles (cf. ATAF 2007/16 consid. 7 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral E-643/2016 du 24 juillet 2017 consid. 5.1 et les références citées ; cf. ég., sous l'ancien droit, ATF 124 II 110 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.540/2005 du 11 novembre 2005 consid. 3.2.1).

La jurisprudence requiert, de manière générale, une très longue durée de séjour en Suisse, soit une période de sept à huit ans (ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6c ; ATA/1306/2020 du 15 décembre 2020 consid. 5b ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269 et les références citées). Le caractère continu ou non du séjour peut avoir une influence (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5048/2010 du 7 mai 2012 ; ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7f ; Minh SON NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269).

16.         L'intégration professionnelle de l'intéressé doit en principe revêtir un caractère exceptionnel au point de justifier, à elle seule, l'octroi d'une autorisation de séjour en dérogation aux conditions d'admission. Le requérant doit posséder des connaissances professionnelles si spécifiques qu'il ne pourrait les utiliser dans son pays d'origine ou doit avoir réalisé une ascension professionnelle remarquable, circonstances susceptibles de justifier à certaines conditions l'octroi d'un permis humanitaire (arrêt du Tribunal fédéral 2A543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.4 et les références citées ; ATA/775/2018 du 24 juillet 2018 consid. 4d ; ATA/882/2014 du 11 novembre 2014 consid. 6d et les arrêts cités). À titre d'exemple, le Tribunal fédéral a notamment retenu en faveur d'un étranger installé depuis plus de onze ans en Suisse qu'il y avait développé des liens particulièrement intenses dans les domaines professionnel (création d'une société à responsabilité limitée, emploi à la délégation permanente de l'Union africaine auprès de l'ONU) et social (cumul de diverses charges auprès de l'Eglise catholique) (arrêt 2C_457/2014 du 3 juin 2014 consid. 4 et les références citées).

17.         Lorsqu'une personne a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d'adulte dans son pays d'origine, il y reste encore attaché dans une large mesure. Son intégration au milieu socioculturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Il convient de tenir compte de l'âge du recourant lors de son arrivée en Suisse, et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, de la situation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter ses connaissances professionnelles dans le pays d'origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-646/2015 du 20 décembre 2016 consid. 5.3).

Il est parfaitement normal qu'une personne, ayant effectué un séjour prolongé dans un pays tiers, s'y soit créé des attaches, se soit familiarisée avec le mode de vie de ce pays et maîtrise au moins l'une des langues nationales. Aussi, les relations d'amitié ou de voisinage, de même que les relations de travail que l'étranger a nouées durant son séjour sur le territoire helvétique, si elles sont certes prises en considération, ne sauraient constituer des éléments déterminants pour la reconnaissance d'une situation d'extrême gravité (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.3 ; F-1714/2016 du 24 février 2017 consid. 5.3 ; C-7467/2014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine).

L'intégration socio-culturelle n'est donc en principe pas susceptible de justifier à elle seule l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Néanmoins, cet aspect peut revêtir une importance dans la pesée générale des intérêts (cf. not. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-541/2015 du 5 octobre 2015 consid. 7.3 et 7.6 ; C-384/2013 du 15 juillet 2015 consid. 6.2 et 7 ; Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10), les lettres de soutien, la participation à des associations locales ou l'engagement bénévole pouvant représenter des éléments en faveur d'une intégration réussie, voire remarquable (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-74672014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine ; cf. aussi Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10).

18.         Des motifs médicaux peuvent, suivant les circonstances, conduire à la reconnaissance d'une raison personnelle majeure, lorsque l'intéressé démontre souffrir d'une sérieuse atteinte à sa santé, qui nécessite, pendant une longue période, des soins permanents ou des mesures médicales ponctuelles d'urgence indisponibles dans le pays d'origine, de sorte qu'un départ de Suisse serait susceptible d'entraîner de graves conséquences pour sa santé. En revanche, le seul fait d'obtenir en Suisse des prestations médicales supérieures à celles offertes dans le pays d'origine ne suffit pas pour pouvoir y demeurer (cf. ATF 128 II 200 consid. 5.3 ; 123 II 125 consid. 5b/dd et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_57/2019 du 4 novembre 2019 consid. 6.2 ; 2C_861/2015 du 11 février 2016 consid. 4.2 ; ATA/404/2021 du 13 avril 2021 consid. 6a). En outre, l'étranger qui entre pour la première fois en Suisse en souffrant déjà d'une sérieuse atteinte à la santé ne saurait se fonder uniquement sur ce motif médical pour y poursuivre son séjour (ATF 128 II 200 consid. 5.3 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_861/2015 du 11 février 2016 consid. 4.2 et les références citées ; ATA/404/2021 du 13 avril 2021 consid. 6a).

Une grave maladie (à supposer qu'elle ne puisse être soignée dans le pays d'origine) ne saurait justifier à elle seule la reconnaissance d'un cas de rigueur, l'aspect médical ne constituant que l'un des éléments, parmi d'autres (durée du séjour, intégration socioprofessionnelle et formations accomplies en Suisse, présence d'enfants scolarisés en Suisse et degré de scolarité atteint, attaches familiales en Suisse et à l'étranger, etc.), à prendre en considération (cf. ATF 128 II 200 consid. 5.1 à 5.4 ; 123 II 125 consid. 5b/dd et les références citées ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-6545/2010 du 25 octobre 2011 consid. 6.4 ; C-7939/2007 du 29 mars 2010 consid. 7.2 et 7.2.2). Ainsi, en l'absence de liens particulièrement intenses avec la Suisse, le facteur médical ne saurait constituer un élément suffisant pour justifier la reconnaissance d'un cas personnel d'extrême gravité. Les motifs médicaux constituent avant tout un obstacle à l'exécution du renvoi au sens de l'art. 83 al. 4 LEI et un individu ne pouvant se prévaloir que d'arguments d'ordre médical ne se distingue pas de ses compatriotes restés dans son pays d'origine et souffrant de la même maladie ou d'un état de santé d'une gravité similaire (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_396/2014 du 27 mars 2015 consid. 4.5 ; 2C_187/2008 du 15 mai 2008 consid. 2.3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-4436/2019 du 1er février 2021 consid. 6.3.2 ; F-6616/2017 du 26 novembre 2019 consid.6.6 ; F-6510/2017 du 6 juin 2019 consid. 6.1 et les références citées).

Hormis des cas d'extrême gravité, l'état de santé ne peut fonder un droit à une autorisation de séjour, ni sous l'aspect de l'art. 3, ni sous celui de l'art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_891/2016 du 27 septembre 2016 consid. 3.3 et la référence citée).

19.         Dans un récent arrêt, la chambre administrative a examiné la situation d’un enfant âgé de près de onze ans, scolarisé en Suisse dans une filière spécifique en raison d’un retard de langage et d’un trouble du développement, dont le suivi en logopédie avait pris fin depuis plusieurs mois, et qui nécessitait des séances de psychothérapie et la prise d’un neuroleptique. Elle a jugé qu’il pouvait être pris en charge au Kosovo qui disposait de pédopsychiatres, infirmières, psychologues et travailleurs sociaux à même de traiter et de prendre en charge l’ensemble du spectre des troubles affectant les enfants et les adolescents. Des cours de rattrapage pour enfants présentant des retards de développement étaient disponibles dans la capitale, tout comme, dans tout le pays, des classes d’éducation spécialisée rattachées à l’école publique (arrêt ATA/247/2023 du 14 mars 2023 consid. 5.2).

20.         Lorsqu'il y a lieu d'examiner la situation d'une famille sous l'angle de l'art. 30 al. 1 let. b LEI, la situation de chacun de ses membres ne doit pas être considérée isolément, mais en relation avec le contexte familial global. Le sort de la famille formera en général un tout. Il serait en effet difficile d'admettre le cas d'extrême gravité, par exemple, uniquement pour les parents ou pour les enfants. Ainsi le problème des enfants est un aspect, certes important, de l'examen de la situation de la famille, mais ce n'est pas le seul critère. Il y a donc lieu de porter une appréciation d'ensemble, tenant compte de tous les membres de la famille. Quand un enfant a passé les premières années de sa vie en Suisse ou lorsqu'il y a juste commencé sa scolarité, il reste encore dans une large mesure rattaché à son pays d'origine par le biais de ses parents. Son intégration au milieu socio-culturel suisse n'est alors pas si profonde et irréversible qu'un retour au pays d'origine constitue un déracinement complet (ATAF 2007/16 du 1er juin 2007 et les références citées). Avec la scolarisation, l'intégration au milieu suisse s'accentue. Dans cette perspective, il convient de tenir compte de l'âge de l'enfant lors de son arrivée en Suisse et, au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, du degré et de la réussite de la scolarité, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d'exploiter, dans le pays d'origine, la scolarisation ou la formation professionnelle commencées en Suisse. Un retour dans la patrie peut, en particulier, représenter une rigueur excessive pour des adolescents ayant suivi l'école durant plusieurs années et achevé leur scolarité avec de bons résultats (ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6053/2017 du 13 février 2020 consid. 8.2.1 ; ATA/404/2021 du 13 avril 2021 consid. 7 ; ATA/1818/2019 du 17 décembre 2019 consid. 5f).

Sous l'angle du cas de rigueur, le Tribunal fédéral a considéré que cette pratique différenciée réalisait la prise en compte de l'intérêt supérieur de l'enfant, telle qu'elle est prescrite par l'art. 3 al. 1 CDE (cf. ATF 135 I 153 consid. 2.2.2 ; arrêts 2A.679/2006 du 9 février 2007 consid. 3 et 2A.43/2006 du 31 mai 2006 consid. 3.1 ; cf. aussi ATA/404/2021 du 13 avril 2021 consid. 7 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-6053/2017 du 13 février 2020 consid. 8.2.1).

21.         L'opération « Papyrus », qui a pris fin le 31 décembre 2018 (ATA/1153/2022 du 15 novembre 2022 consid. 7), consistait en un processus de régularisation des personnes séjournant à Genève sans titre de séjour, élaboré par le département de la sécurité et de l'économie, devenu département de la sécurité, de l'emploi et de la santé (DSES), « dans le strict respect du cadre légal en vigueur (art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA [soit du cas de rigueur exposé ci-dessus] » ; cf. communiqué de presse du 21 février 2017 : https://demain.ge.ch/actualite/operation-papyrus-presentee-aux-medias-21-02-2017). Le DSES a ainsi précisé - en tenant compte de la marge d'appréciation possible (cf. brochure officielle publiée en février 2017 : https://demain.ge.ch/document/brochure-papyrus).

Les critères objectifs et cumulatifs permettant aux personnes concernées de demander la légalisation de leur séjour selon ce programme étaient les suivants : une intégration réussie (niveau A2 de français du cadre européen commun de référence pour les langues et scolarisation des enfants notamment) ; une absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal) ; une indépendance financière complète ; un séjour continu de cinq ans (pour les familles avec enfants scolarisés) ou de dix ans pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires.

Ces conditions devaient être remplies au moment du dépôt de la demande d’autorisation de séjour (ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 8b). Par ailleurs, s'écartant sur ce point de la jurisprudence de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre), le Tribunal administratif fédéral a jugé, qu’au vu des spécificités de l'opération « Papyrus », qui était limitée dans le temps, il se justifiait d'en restreindre l'application aux personnes étrangères qui en remplissaient la condition temporelle au moment où ce programme était encore en cours, soit du mois de février 2017 à décembre 2018 (arrêt F-4206/2021 du 2 novembre 2022 consid. 6.3 et réf. cit.).

Enfin, le communiqué de presse du Conseil d’État du 4 mars 2019, selon lequel les conditions de régularisation de cette opération perduraient après sa fin, ne pouvait se substituer aux conditions posées par la législation et la jurisprudence en la matière (ATA/1025/2023 du 19 septembre 2023 consid. 2.11).

22.         Dans le cadre de l'exercice de leur pouvoir d'appréciation, les autorités compétentes doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son degré d'intégration (art. 96 al. 1 LEI).

23.         Lorsque les conditions légales pour se prévaloir d'un droit à l'autorisation de séjour ne sont pas remplies, les autorités ne jouissent pas d'un pouvoir d'appréciation dans le cadre duquel il y aurait lieu de procéder, conformément à cette disposition, à un examen de la proportionnalité. Admettre l'inverse aurait pour effet de déduire de l'art. 96 LEI un droit à l'obtention ou au renouvellement de l'autorisation, ce qui ne correspond pas à la lettre de cette disposition, qui prévoit uniquement que les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d'appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l'étranger, ainsi que de son intégration (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_30/2020 du 14 janvier 2020 consid. 3.2).

24.         L'octroi d'une autorisation de séjour dans un cas individuel d'une extrême gravité et l’octroi d’une autorisation de courte durée ou d’une autorisation de séjour en vue de préserver des intérêts publics majeurs sont soumis au SEM pour approbation (art. 99 LEI ; art. 85 al. 1 et 2 et 86 al. 5 OASA ; art. 5 let. d et e de l'ordonnance du DFJP relative aux autorisations soumises à la procédure d'approbation et aux décisions préalables dans le domaine du droit des étrangers du 13 août 2015 - RS 142.201.1).

25.         En l’espèce, après un examen circonstancié du dossier et des pièces versées à la procédure, il y a lieu de constater que l'OCPM n'a pas mésusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que le recourant, son épouse et leur fille ne satisfaisaient pas aux conditions strictes requises pour la reconnaissance d'un cas de rigueur.

À titre liminaire, le tribunal relèvera que, conformément à la jurisprudence, ils ne peuvent se prévaloir de l’opération « Papyrus », leur demande de régularisation ayant été déposée, alors que cette opération avait déjà pris fin.

Le recourant allègue séjourner de manière continue à Genève depuis septembre 2014, mais il n’en a pas apporté la preuve. Dans l’hypothèse qui lui serait la plus favorable, il y a lieu de retenir qu’il séjourne en Suisse depuis le 3 mars 2015, comme cela ressort de l’ordonnance pénale du 28 avril 2015. Il s’agit d’une longue durée de séjour qui doit néanmoins être fortement relativisée, dès lors qu’elle a été effectuée illégalement dans sa quasi-totalité et à la faveur d’une tolérance des autorités depuis le dépôt de la demande du 25 novembre 2019. Ce constat vaut a fortiori s’agissant de son épouse et de leur fille qui seraient arrivées en Suisse en 2016, sans que cela n’ait toutefois été démontré. Il convient de préciser à cet égard que tous les justificatifs en lien avec une activité lucrative exercée par l’épouse doivent être écartées de la procédure, dès lors qu’il a été établi qu’il s’agissait de faux. Dans cette mesure, les preuves de présence en Suisse ne remontent qu’à décembre 2018, s’agissant de l’épouse, sa police d’assurance auprès de I______ ayant été établie le 22 décembre 2018, et à août 2019, s’agissant de leur fille, scolarisée à Genève à cette date. En tout état, leur séjour en Suisse n’atteint pas, au moment du dépôt de la demande, les cinq ans requis pour prétendre à l’obtention d’un titre pour les membres de la famille (ATA/538/2024 du 30 avril 2024 consid. 6.2).

Cela étant, la durée du séjour n’est qu’un critère parmi d’autres et le simple fait de séjourner en Suisse pendant de longues années, même légalement, ne permet pas d'admettre un cas personnel d'extrême gravité sans que n'existent d'autres circonstances tout à fait exceptionnelles qui font ici défaut.

Le recourant ne peut en effet pas se prévaloir d’une intégration socio-professionnelle exceptionnelle. L’emploi qu’il exerce dans le domaine du bâtiment ne témoigne pas d’une ascension professionnelle remarquable et il n’a pas acquis des qualifications spécifiques susceptibles de justifier l'admission d'un cas de rigueur au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI. Il ne peut pas non plus se prévaloir d’un comportement irréprochable. Il a non seulement séjourné et travaillé illégalement en Suisse durant plusieurs années, ce qui est en soi déjà répréhensible (arrêts du Tribunal fédéral administratif F-989/2022 du 17 mai 2023 consid. 8.6 ; F- 5341/2020 du 7 février 2022 consid. 6.5), mais il a également fait venir son épouse et sa fille, sans l'aval des autorités helvétiques. Or, il existe un intérêt public évident à éviter la politique du fait accompli et à ne pas discréditer gravement les conditions posées par la Suisse à l'admission et au séjour des étrangers (arrêts du Tribunal fédéral 2C_634/2017 du 14 août 2018 consid. 3.8 et 2C_616/2012 du 1er avril 2013 consid. 1.4.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral du 18 novembre 2022 consid. 7.7). De plus, hormis les infractions liées à son statut de séjour, il a fait l’objet, le 19 avril 2024, d’une condamnation pour violation simple des règles de la circulation routière et violation des obligations en cas d’accident.

Sur le plan social, il a certes appris le français (niveau A2), mais il ne ressort pas du dossier qu’il aurait noué avec la Suisse des liens dépassant en intensité ce qui peut être raisonnablement attendu d’un étranger ayant passé un nombre d'années équivalent dans le pays.

Les considérations qui précèdent valent à plus forte raison en ce qui concerne l’intégration socio-professionnelle de la recourante qui n’a jamais exercé d’activité professionnelle en Suisse et qui n’a pas justifié de son niveau de français.

S’agissant de son état de santé, il est établi qu’elle a été diagnostiquée, en 2018, d’un cancer du côlon traité et dont elle est désormais guérie. L’arrêt du suivi en oncologique a été préconisé en février 2024. En l’état, il n’apparaît pas qu’elle souffrirait d’un quelconque problème de santé répondant aux critères jurisprudentiels énoncés plus haut, étant rappelé qu’une maladie - même grave - ne suffirait de toute façon pas à justifier l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas individuel d’une extrême gravité, en l’absence de liens particulièrement intense avec la Suisse, dont l’intéressée ne peut se prévaloir. L’aspect médical sera discuté ci-après, en lien avec la question de l’exécution du renvoi.

De plus, le recourant et son épouse sont nés au Kosovo où ils ont passé leur enfance et adolescence, soit les périodes cruciales pour l’intégration socio-culturelle, et la majeure partie de leur vie d’adulte. Ils ont également conservé de fortes attaches avec leur pays d’origine où vivent, à tout le moins leurs fratries respectives, les parents du recourant, ainsi que la mère de son épouse. Ils ont également sollicité deux visas de retour le 23 juin 2021 (30 jours) et le 7 juin 2022 (90 jours) pour se rendre au Kosovo avec leur fille.

Quoi qu’il en soit, le fait de travailler pour ne pas dépendre de l'aide sociale, d'éviter de commettre des actes répréhensibles et de s'efforcer d'apprendre au moins la langue nationale parlée au lieu du domicile constitue un comportement ordinaire qui peut être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour. Il ne s'agit pas là de circonstances exceptionnelles permettant à elles seules de retenir l'existence d'une intégration particulièrement marquée, susceptible de justifier la reconnaissance d'un cas de rigueur. Or, il ne ressort pas du dossier que les liens qu’ils ont pu se créer en Suisse dépasseraient en intensité ce qui peut être raisonnablement attendu d’étrangers ayant passé un nombre d'années équivalent dans le pays. Ils ne peuvent en tous cas pas se prévaloir d’une intégration sociale remarquable.

Ni l'âge du recourant et de son épouse, ni la durée de leur séjour sur le territoire, ni encore les inconvénients pratiques auxquels ils pourront éventuellement se heurter en cas de retour dans leur pays ne constituent des circonstances si singulières qu'il faille considérer qu'ils se trouveraient dans une situation de détresse personnelle devant justifier l'octroi d'une exception aux mesures de limitation. Une telle exception n'a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d'origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu'on ne saurait exiger d'eux qu'ils tentent de se réadapter à leur existence passée, ce qu’ils n'ont pas établi. Après un temps d’adaptation, ils pourront certainement se réintégrer sans difficultés insurmontables dans leur patrie. Les connaissances linguistiques et professionnelles acquises par le recourant en Suisse, constituant des atouts sur le plan professionnel. En tout état, celui qui place l'autorité devant le fait accompli doit s'attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (cf. ATF 123 II 248 consid. 4a ; 111 Ibb 213 consid. 6b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_33/2014 du 18 septembre 2014 consid. 4.1 ; 1C_269/2013 du 10 décembre 2013 consid. 4.1 et les références citées).

Quant à C______, elle est née au Kosovo et serait arrivée en Suisse, dans l’hypothèse qui lui serait la plus favorable, en 2016. Elle était alors âgée d’environ deux ans. À teneur de l’attestations de scolarité du 10 février 2023, elle est scolarisée à Genève depuis août 2019. Durant l’année scolaire 2022-2023, elle était en classe de 4P, si bien qu’elle devrait entrer en classe de 6P à la rentrée 2024. Les connaissances acquises sont avant tout d'ordre général, de sorte qu'elles lui seront également profitables pour la suite de sa scolarité au Kosovo. Âgée de près de dix ans, elle est encore pré-adolescente. Compte tenu de son âge, elle pourra, après une certaine période d'adaptation et avec l'aide de ses parents et de sa famille sur place, s'adapter à un changement de lieu de vie dans son pays d'origine, étant rappelé que l’intérêt supérieur de l’enfant au sens de l'art. 3 par. 1 de la CDE est d’abord de pouvoir vivre durablement auprès de ses parents, quel que soit l'endroit où il séjournera, intérêt qui n’est nullement affecté en l’espèce, la décision attaquée n'ayant pas pour effet de séparer la famille dont tous les membres séjournent illégalement en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2C_241/2023 du 17 mai 2023 consid. 4.2.3).

Le dossier ne permet pas de déterminer si C______ sera confrontée à la barrière de la langue. À teneur du recours et de l’attestation de la logopédiste, elle ne parlerait pas l’albanais, alors qu’il ressort de la réplique qu’elle aurait de la difficulté à s’exprimer dans cette langue. Même à admettre qu’elle ne parlerait pas l’albanais, ce qui paraît à première vue improbable dès lors qu’il n’a pas été démontré que sa mère parlerait le français, une fois en immersion, C______ devrait surmonter rapidement la barrière de la langue, au besoin, avec l’aide d’une logopédiste, dès lors qu’il s’agit de sa langue maternelle et qu’elle en connaît, à tout le moins, les rudiments.

L’intégration de C______ en Suisse n'est ainsi pas à ce point profonde qu'un retour au Kosovo ne pourrait plus être envisagé.

S’agissant du trouble du développement de la parole et du langage, il ressort du dossier qu’elle ne bénéficie plus d’aucun suivi en logopédie depuis mars 2024, étant précisé, qu’au besoin, un tel suivi, voire un suivi psychologique, serait disponible au Kosovo, tel que cela ressort de la jurisprudence précitée.

26.         Dans ces circonstances, l'OCPM n'a violé ni le droit conventionnel, ni le droit fédéral, ni encore excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation (art. 96 LEI) en refusant de délivrer les autorisations de séjour sollicitées.

27.         Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou dont l'autorisation, bien que requise, est révoquée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé.

Le renvoi constitue la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande tendant à la délivrance ou la prolongation d'une autorisation de séjour, l'autorité ne disposant à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation (ATA/631/2023 du 13 juin 2023 consid. 3.1).

28.         Le recourant et sa famille n'obtenant pas d'autorisations de séjour c'est à bon droit que l'autorité intimée a prononcé leur renvoi de Suisse.

29.         Reste toutefois à examiner la question de l’exécution du renvoi de l’épouse, sous l’angle particulier de l’art. 83 al. 4 LEI, compte tenu de ses problèmes de santé.

30.         Conformément à l'art. 83 al. 1 LEI, le SEM décide d'admettre provisoirement l'étranger si l'exécution du renvoi ou de l'expulsion n'est pas possible, n'est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée. Ces trois conditions susceptibles d'empêcher l'exécution du renvoi sont de nature alternative : il suffit que l'une d'elles soit réalisée pour que le renvoi soit inexécutable.

Les étrangers admis provisoirement en Suisse bénéficient d'un statut précaire, qui assure leur présence dans le pays aussi longtemps que l'exécution du renvoi n'est pas possible, n'est pas licite ou ne peut être raisonnablement exigée (ATF 141 I 49 consid. 3.5 ; 138 I 246 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_639/2012 du 13 février 2013 consid. 1.2.1). L'admission provisoire constitue en d'autres termes une mesure qui se substitue, en principe pour une durée limitée, à la mise en œuvre du renvoi, lorsque celui-ci s'avère inexécutable. Elle coexiste donc avec la mesure de renvoi entrée en force, dont elle ne remet pas en cause la validité. L'admission provisoire n'équivaut pas à une autorisation de séjour, mais fonde un statut provisoire, qui réglemente la présence en Suisse de l'étranger tant et aussi longtemps que l'exécution de son renvoi apparaîtra comme impossible, illicite ou non raisonnablement exigible (ATF 141 I 49 consid. 3.5 ; 138 I 246 consid. 2.3 ; 137 II 305 consid. 3.1 ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2C_1001/2019 du 3 décembre 2019 consid. 3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5915/2007 du 18 février 2009 consid. 6 ; ATA/675/2014 du 26 août 2014 consid. 7 et les références citées).

L’admission provisoire est de la seule compétence du SEM ; elle ne peut être que proposée par les autorités cantonales (art. 83 al. 6 LEI ; cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_1001/2019 du 3 décembre 2019 consid. 3). L'art. 83 al. 6 LEI vise avant tout la situation dans laquelle des autorités cantonales constatent des obstacles liés à l'exécution d'un renvoi. Elle n'est pas conditionnée à une demande de l'intéressé, ni à ce qu'un membre de la famille se trouve déjà au bénéfice d'une admission provisoire. Cette disposition a un caractère facultatif et implique que le SEM n'est saisi que si l'avis de l'autorité cantonale s'avère positif. Les intéressés n'ont, pour leur part, aucun droit à ce que le canton demande au SEM une admission provisoire en leur faveur sur la base de l'art. 83 al. 6 LEI (ATF 141 I 49 consid. 3.5.3 ; 137 II 305 consid. 3.2). Néanmoins, l'existence même de l'art. 83 LEI implique que l'autorité cantonale de police des étrangers, lorsqu'elle entend exécuter la décision de renvoi, statue sur la question de son exigibilité (cf. ATA/675/2014 du 26 août 2014 consid. 7).

31.         Aux termes de l'art. 83 al. 4 LEI, l'exécution de la décision de renvoi peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi de l'étranger dans son pays d'origine ou de provenance le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale.

Cette disposition, qui procède de préoccupations humanitaires du législateur suisse, s'applique notamment aux personnes pour qui un retour reviendrait à les mettre concrètement en danger, notamment parce qu'elles ne pourraient plus recevoir les soins dont elles ont besoin ou qu'elles seraient, selon toute probabilité, condamnées à devoir vivre durablement et irrémédiablement dans un dénuement complet et, ainsi, exposées à la famine, à une dégradation grave de leur état de santé, à l'invalidité, voire à la mort. En revanche, les difficultés socio-économiques qui sont le lot habituel de la population locale, en particulier des pénuries de soins, de logement, d'emploi et de moyens de formation, ne suffisent pas en soi à réaliser une telle mise en danger (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral D-5367/2015 du 24 mars 2020 consid. 8 ; F-838/2017 du 27 mars 2018 consid. 4.3 ; ATA/490/2020 du 19 mai 2020 consid. 11d ; ATA/515/2016 du 14 juin 2016 consid. 6b ; ATA/189/2016 du 1er mars 2016 ; ATA/1278/2015 du 1er décembre 2015 consid. 7b).

Selon une jurisprudence constante, l'exécution du renvoi des personnes en traitement médical en Suisse ne devient inexigible que dans la mesure où, à leur retour dans leur pays d'origine ou de provenance, elles pourraient ne plus recevoir les soins essentiels garantissant des conditions minimales d'existence. Par soins essentiels, il faut entendre les soins de médecine générale et d'urgence absolument nécessaires à la garantie de la dignité humaine. Cette définition des soins essentiels tend en principe à exclure les soins avancés relativement communs et les soins coûteux, les soins devant consister en principe en des actes relativement simples, limités aux méthodes diagnostiques et traitements de routine relativement bon marché ; les soins vitaux ou permettant d'éviter d'intenses souffrances demeurent toutefois réservés. En effet, l'art. 83 al. 4 LEI est une disposition exceptionnelle tenant en échec une décision d'exécution du renvoi et ne saurait être interprété comme une norme qui comprendrait un droit de séjour lui-même induit par un droit général d'accès en Suisse à des mesures médicales visant à recouvrer la santé ou à la maintenir, au simple motif que les structures de soins et le savoir-faire médical dans le pays d'origine ou de destination de l'intéressé n'atteignent pas le standard élevé que l'on trouve en Suisse. Ce qui compte, ce sont, d'une part, la gravité de l'état de santé et, d'autre part, l'accès à des soins essentiels. Ainsi, l'exécution du renvoi demeure raisonnablement exigible, si les troubles physiologiques ou psychiques ne peuvent être qualifiés de graves, à savoir s'ils ne sont pas tels que, en l'absence de possibilités de traitement adéquat, l'état de santé de l'intéressé se dégraderait très rapidement au point de conduire d'une manière certaine à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable et notablement plus grave de son intégrité physique à son retour au pays. De même, l'exécution du renvoi est raisonnablement exigible si l'accès à des soins essentiels, au sens défini ci-dessus, est assuré dans le pays d'origine ou de provenance. Il pourra s'agir, le cas échéant, de soins alternatifs à ceux prodigués en Suisse, qui - tout en correspondant aux standards du pays d'origine - sont adéquats à l'état de santé de l'intéressé, fussent-ils d'un niveau de qualité, d'une efficacité de terrain (ou clinique) et d'une utilité (pour la qualité de vie) moindres que ceux disponibles en Suisse ; en particulier, des traitements médicamenteux (par exemple constitués de génériques) d'une génération plus ancienne et moins efficaces peuvent, selon les circonstances, être considérés comme adéquats (cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral E-6559/2018 du 3 octobre 2019 consid. 3.6 et les références citées).

32.         Dans un arrêt du 18 juillet 2016 (F-1282/2015 consid. 7.2.2), le Tribunal administratif fédéral a retenu, en se fondant sur un consulting rédigé par le secrétariat d'État aux migrations (ci‑après : SEM), qu’un suivi du cancer était réalisable au Kosovo, en particulier à Pristina. En effet, il y existait un institut oncologique au centre hospitalier universitaire de Pristina, avec possibilité d'effectuer des contrôles radiologiques après une chimiothérapie, ainsi que la clinique privée « Rezonanca », laquelle pourrait également procéder à tous les traitements et suivis ultérieurs. Selon le médecin de confiance de l'Ambassade de Suisse à Pristina, le recourant ayant saisi le Tribunal administratif fédéral, qui souffrait du cancer du système lymphatique, pouvait être soigné de manière adéquate au Kosovo. Sur la base de cette jurisprudence, le tribunal a confirmé, par jugement JTAPI/210/2024 du 11 mars 2024 consid. 13e), entré en force, que le suivi médical d’un ressortissant kosovar atteint d’un cancer du côlon, qui avait subi une intervention chirurgicale et pour lequel les médecins avaient recommandé une surveillance selon les critères suisses de gastroentérologie pouvait parfaitement être réalisé dans son pays d’origine.

33.         Il ressort de la jurisprudence qu’il existe au Kosovo sept centres de traitement ambulatoire pour les maladies psychiques (Centres Communautaires de Santé Mentale), que certains hôpitaux généraux disposent de plus d'espaces réservés à la neuropsychiatrie pour le traitement des cas de psychiatrie aiguë, et que grâce à la coopération internationale, de nouvelles structures appelées « Maisons de l'intégration » ont vu le jour dans certaines villes. Ces établissements logent des personnes atteintes de troubles mineurs de la santé mentale dans des appartements protégés et leur proposent un soutien tant thérapeutique que socio-psychologique (arrêt du Tribunal administratif fédéral E-6397/2018 du 22 janvier 2019 ; ATA/1852/2021 du 24 mai 2022 consid. 8f ; ATA/821/2021 du 10 août 2021 consid. 3f et les arrêts cités, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 2C_671/2021 du 15 février 2022 consid. 8.2 et les références citées).

34.         En l’espèce, il ressort des documents médicaux les plus récents datés des 9 juillet et 21 février 2024, que la recourante est désormais guérie du cancer du côlon qui avait été diagnostiqué en 2018 et traité aux HUG. Le scanner réalisé le 1er février 2024, soit cinq années après la prise en charge chirurgicale, n’a montré aucun signe de récidive et un suivi par coloscopie, tous les cinq ans, est désormais préconisé. S’agissant de la condensation pulmonaire d’origine infectieuse, visible sur ce scanner, un scanner thoracique devait être réalisé à trois mois, soit dans le courant du mois de mai 2024, étant relevé une absence de lésion suspecte de récidive loco-régionale ou à distance. À ce jour, aucune information n’a été fournie au tribunal à cet égard.

Il apparaît ainsi que l’état de santé de l’intéressée ne saurait faire échec à l'exécution de son renvoi. En cas de besoin, elle pourra de toute façon bénéficier d’un suivi adéquat au Kosovo qui dispose des infrastructures nécessaires pour le contrôle et le suivi d’un cancer, conformément à la jurisprudence précitée. Il en va de même d’un éventuel suivi psychiatrique qui serait nécessaire, selon le Dr H______, s’agissant des répercussions de la maladie oncologique. Il convient néanmoins de relever qu’il n’a pas été démontré que l’intéressée bénéficierait d’un tel suivi en Suisse.

Au vu de ce qui précède, l'exécution du renvoi du recourant et de sa famille est possible, licite et raisonnablement exigible.

35.         Infondé, le recours sera rejeté et la décision contestée confirmée.

36.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

37.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 2 octobre 2023 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 25 août 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière