Aller au contenu principal

Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/3812/2014

ATA/723/2015 du 14.07.2015 ( FORMA ) , ADMIS

Descripteurs : FACULTÉ(UNIVERSITÉ) ; INSTITUTION UNIVERSITAIRE ; ÉTUDIANT ; RÈGLEMENT DES ÉTUDES ET DES EXAMENS ; ÉLIMINATION(FORMATION) ; OPPOSITION(PROCÉDURE) ; CIRCONSTANCE EXTRAORDINAIRE ; INTERDICTION DE L'ARBITRAIRE
Normes : LPA.61 ; LPA.68 ; LPA.69 ; Règlement d'études du baccalauréat universitaire en relations internationales, en vigueur dès le 16 septembre 2013 (RE 2013).24 ; Cst.9 ; Cst.36
Résumé : L'élimination de la recourante du programme du BARI a été prononcée sans qu'il soit tenu compte des circonstances bien particulières liées à sa situation académique. Le résultat de l'application de la norme selon laquelle l'étudiant n'ayant pas acquis un minimum de 30 crédits au cours de deux semestres d'études s'avère, dans le cas concret, choquant et disproportionné. Le recours est admis.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3812/2014-FORMA ATA/723/2015

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 14 juillet 2015

 

dans la cause

 

Mme A______

contre

 

UNIVERSITÉ DE GENÈVE



EN FAIT

1) Mme A______, née le ______ 1992, est immatriculée à l'Université de Genève (ci-après : l'université) et s'est inscrite dès le semestre d'automne 2011 à la faculté des sciences économiques et sociales (ci-après : la faculté des SES), pour l'obtention d'un baccalauréat universitaire en relations internationales (ci-après : BARI).

Ce programme est composé de deux parties, la première valant 60 crédits et la seconde valant 120 crédits, soit un total de 180 crédits devant être obtenus dans un délai de huit semestres au maximum.

2) À l'issue de l'année académique 2011-2012, Mme A______ avait réussi la première partie en acquérant 60 crédits et une moyenne générale de 4,79. Elle avait également obtenu 3 crédits relatifs à la deuxième partie.

Conformément à la réglementation applicable pour la première partie, elle avait choisi de conserver une note inférieure à la moyenne, comprise entre 3 et 4, obtenant ainsi 6 des 60 crédits précités « en conservation de notes ».

3) Au terme de l'année académique 2012-2013, elle avait acquis 72 crédits relatifs à la deuxième partie de sa formation, soit un total de 132 crédits. Il lui manquait ainsi 48 crédits pour obtenir le BARI.

Conformément à la réglementation applicable pour la deuxième partie, elle avait choisi de garder deux notes comprises entre 3 et 4, pour un total de 6 crédits.

4) Au cours de l'année académique 2013-2014, Mme A______ a suivi quatre cours du programme du BARI valant au total 26 crédits, ainsi que le cours de droit pénal général valant 10 crédits et le cours, hors cursus, de droit international privé, valant 5 crédits, auquel elle s'était inscrite par le biais du formulaire idoine. Elle s'était en outre inscrite à un projet de recherche valant
12 crédits.

5) Le 1er janvier 2014, la faculté des SES a été remplacée par deux nouvelles facultés, soit la faculté des sciences et de la société et la faculté d'économie et de management. Dans ce contexte, le BARI a été intégré en tant que programme pluridisciplinaire au sein du Global Studies Institute de l'université (ci-après : GSI ou l'institut), offert par l'université, en collaboration avec les facultés de droit, d'économie et de management, des lettres, ainsi que des sciences et de la société.

6) Le 23 mai 2014, la faculté des lettres de l'université a attesté que Mme A______ avait régulièrement assisté au séminaire « initiation à la langue coréenne », à raison de quatre heures par semaine durant deux semestres, et avait obtenu d'excellents résultats aux contrôles continus.

7) En juin 2014, Mme A______ avait obtenu les 26 crédits relatifs aux quatre cours du programme du BARI, ainsi que les 5 crédits relatifs au cours hors cursus. Elle avait en revanche échoué à l'examen de droit pénal général et n'avait pas rendu son projet de recherche, n'obtenant pas les 22 crédits correspondant.

8) Entre les mois de juin et août 2014, l'étudiante s'est rendue en Corée, afin de suivre une « summer school » à la Seoul National University.

9) Le 12 septembre 2014, le GSI a prononcé l'élimination de Mme A______ du programme du BARI, au motif que le nombre minimum de 30 crédits exigés par année (deux semestres) n'avait pas été acquis, selon l'art. 24 al. 1 let. a du règlement d'études du baccalauréat universitaire en relations internationales, en vigueur dès le 16 septembre 2013 (RE 2013).

À ce stade, elle avait obtenu 98 crédits de deuxième partie, dont 92 obtenus à l'institut et 6 crédits conservés.

10) Le 30 septembre 2014, Mme A______ a demandé au directeur du GSI des renseignements quant au but de l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013. Elle comptait former opposition contre son élimination, dans la mesure où elle doutait que cette disposition eut été adoptée pour être appliquée à des étudiants qui, comme elle, avaient pris de l'avance dans leurs études durant les deux premières années du BARI afin de pouvoir suivre des cours hors faculté durant la troisième année.

11) Le 2 octobre 2014, le directeur du GSI lui a répondu que l'art. 24 al. 1
let. a RE 2013 visait à éviter que les étudiants ne multiplient les formations en parallèle et à faire en sorte qu'ils terminent et obtiennent le diplôme de la formation dans laquelle ils étaient inscrits, selon les délais et modalités réglementaires.

12) Le 4 octobre 2014, Mme A______ a formé opposition contre son élimination auprès du directeur du GSI.

Elle s'apprêtait à commencer sa quatrième et dernière année d'études en vue de décrocher le BARI et de débuter la « passerelle » en droit, lorsque son élimination avait été prononcée au motif qu'elle avait obtenu 26 crédits au cours de sa troisième année, au lieu des 30 crédits minimum requis. L'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 lui était « sorti de la tête », ce qu'elle regrettait amèrement. Elle demandait toutefois l'annulation de son élimination, afin qu'elle puisse continuer ses études au sein du GSI, en dérogation à la disposition précitée.

Elle considérait que les 5 crédits qu'elle avait acquis en réussissant l'examen, hors cursus, de droit international privé pouvaient être cumulés aux 26 crédits acquis dans le cadre du BARI, portant ainsi le total de crédits obtenus durant l'année 2013-2014 à 31. En effet, ce cours figurait dans le plan d'études BARI et était obligatoire pour les étudiants qui, comme elle, se destinaient à poursuivre ses études par une maîtrise en droit. Elle ne pouvait pas s'y inscrire dans le cadre du baccalauréat, car cela aurait conduit à un dépassement du nombre de crédits autorisés, mais se retrouvait éliminée parce qu'elle n'avait pas assez de crédits, ce qui était contradictoire.

Le fait de suivre un cours de coréen lui avait permis de s'épanouir tant personnellement qu'intellectuellement, mais elle avait toujours gardé le BARI en priorité. Elle avait d'ailleurs pris de l'avance au cours de ses premières années d'études, acquérant 63 crédits en première année, au lieu des 60 requis, et 69 crédits en deuxième, de sorte qu'il ne lui en restait que 48 à obtenir en troisième année ; il avait suffi qu'elle échoue à un examen et décide de différer la reddition de son travail de recherche pour passer « sous la barre » des 30 crédits. Or, si elle avait suivi un cours à 6 crédits en troisième plutôt qu'en deuxième, sa situation académique aurait été la même, excepté son élimination. L'insuffisance de crédits obtenus en troisième année était par conséquent due à son avance et non à un retard qu'elle aurait pris.

Une pesée des intérêts en présence devaient amener à la conclusion que le non-respect de l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 n'avait, dans son cas, fait subir aucun préjudice aux autres étudiants, ni à l'université, alors que son élimination réduisait à néant ses trois années d'études au GSI, bien qu'il ne lui restât plus qu'un examen à réussir et son projet de recherche, déjà commencé, à rendre pour obtenir le diplôme. Son élimination avait pour conséquence de la faire entrer en première année de droit, alors que l'obtention du BARI lui permettait de débuter directement un master en droit ; qu'elle effectue deux ou trois années de plus pour parvenir au même résultat n'étaient ni dans son intérêt, ni dans celui de l'université.

13) En octobre 2014, Mme A______ a formulé une demande de changement de faculté pour s'inscrire au baccalauréat en droit, acceptée le 9 octobre 2014.

14) Le 22 octobre 2014, le directeur du GSI a informé l'étudiante avoir transmis son opposition à la commission chargée d'instruire les oppositions de l'institut (ci-après : la commission RIO).

15) La commission RIO a examiné la situation de Mme A______ le 22 octobre 2014 et préavisé le rejet de son opposition.

16) Le 14 novembre 2014, le directeur du GSI a, sur préavis de la commission RIO dont le procès-verbal était joint, rejeté l'opposition et confirmé sa décision d'élimination de Mme A______.

Les 5 crédits qu'elle avait acquis hors cursus au cours de l'année académique 2013-2014 ne pouvaient pas être comptabilisés dans le programme d'études du BARI, ainsi que le mentionnait expressément le formulaire d'inscription qu'elle avait rempli et signé pour l'enseignement de droit international privé. La commission n'avait par ailleurs identifié aucune circonstance exceptionnelle dans son dossier lui permettant de préaviser la levée de son élimination.

17) Le 10 décembre 2014, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision sur opposition précitée, concluant à son annulation et à ce qu'un délai de deux semestres lui soit restitué pour tenter d'obtenir le BARI.

Elle avait, en septembre 2014, avant d'apprendre son élimination du GSI, entamé une quatrième année, suivant à nouveau le cours de droit pénal général et continuant son projet de recherche. Elle était aussi admise à suivre la « passerelle droit », soit plusieurs cours de droit dont la réussite était nécessaire pour s'inscrire par la suite au programme de maîtrise en droit.

Elle persistait à considérer que les 5 crédits qu'elle avait acquis hors cursus en réussissant l'examen de droit international privé portaient à 31 le nombre de crédits obtenus au cours de l'année 2013-2014. Le rappel de la commission RIO selon lequel les crédits hors cursus n'étaient pas comptabilisés dans le programme d'études était dépourvu de pertinence, dès lors qu'elle ne contestait pas ne pas pouvoir les compter parmi les 180 crédits nécessaires à l'obtention du BARI. La question était en l'occurrence de savoir s'ils devaient être comptés parmi les
30 crédits devant être acquis chaque année. L'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 n'indiquait nullement que lesdits crédits devaient compter parmi les 180 crédits du BARI, n'excluait pas la prise en compte de crédits obtenus hors cursus et permettait tout au plus de comprendre que les 30 crédits en question devaient avoir un lien étroit avec le programme du BARI, ce qui était le cas. En effet, le cours de droit international privé apparaissait sur le plan d'études et était obligatoire pour les étudiants souhaitant poursuivre avec une maîtrise en droit ; l'inscription en dehors du cursus n'était due qu'à un formalisme administratif, ainsi que cela était indiqué dans le plan d'études. Partant, elle n'avait pas violé l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013.

Subsidiairement, la décision attaquée, en particulier l'application de l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 dans sa situation, violait les principes constitutionnels de l'égalité de traitement et de l'interdiction de l'arbitraire, et une lacune proprement dite devait être comblée.

Il résultait de l'application de cette disposition que l'étudiant ayant acquis
60 crédits à la fin de la première année de la deuxième partie, puis en obtenant
38 lors de la seconde année, pouvait continuer ses études et bénéficier d'un septième et d'un huitième semestres d'études. En revanche, elle qui avait acquis
72 crédits dès la première année de deuxième partie, puis en avait obtenu 26 la seconde année, était éliminée dès son sixième semestre d'études. Ces deux situations étaient pourtant identiques, dans la mesure où, dans les deux cas,
98 crédits de la deuxième partie, ayant la même valeur, avaient été effectivement acquis après deux années. La distribution différente du nombre de crédits sur les deux années ne rendait pas ces deux situations dissemblables. Une distinction pouvait en revanche être opérée dans le cas d'un étudiant obtenant, en deux ans, un nombre de crédits si faible qu'il compromettait la réussite de ses études, un traitement différent se justifiant alors.

La décision rendue ne revêtait en outre ni sens, ni but. Le cas de figure visé par l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 n'était pas celui du cas d'espèce. Lors d'un entretien avec la conseillère aux études, cette dernière lui avait indiqué que l'objectif de cette disposition était d'éviter que les étudiants accumulent un tel retard dans leurs études qu'il leur devienne finalement impossible d'obtenir
180 crédits dans le délai de huit semestres. En cas de retard, l'élimination permettait d'éviter qu'ils persistent dans une formation très probablement sanctionnée par un échec. Cette explication quant à l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 avait été confirmée par le directeur du GSI, dans son courrier du 2 octobre 2014. Or, elle ne se trouvait ni en échec, ni dans un retard rendant difficile l'obtention du BARI. Au contraire, il lui restait encore deux semestres pour n'obtenir que
22 crédits, correspondant seulement à un cours et au projet de recherche, pour lesquels elle disposait encore de deux tentatives. Vu sa bonne réussite les trois années précédentes et le temps à disposition, le BARI lui était à portée de main. Dans ces circonstances, le but de la disposition litigieuse ne visait pas sa situation et son application littérale violait même son propre but.

Une interprétation téléologique restrictive de l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 était ainsi de mise ; il convenait à tout le moins de constater l'existence d'une lacune et de la combler. Les auteurs de cette disposition, craignant qu'un étudiant prenne un retard compromettant l'obtention du BARI, avaient oublié qu'un étudiant pouvait aussi acquérir sur une année un nombre de crédits inférieur au seuil fixé, sans pour autant accumuler un retard dangereux, par exemple lorsqu'il avait pris de l'avance au cours de ses premières années d'études et qu'il ne lui restait plus qu'un nombre de crédits réduit à obtenir en dernière année. Or, l'élimination d'un étudiant dont l'obtention du diplôme n'était pas compromise s'avérait contraire au but du règlement. La question de savoir à quel moment un retard devait être considéré comme excessif était discutable ; néanmoins, dès lors qu'une année valait 60 crédits et vu le seuil fixé à 30 crédits, il apparaissait qu'un étudiant ayant acquis au moins 90 crédits après deux années en deuxième partie n'accumulait pas un retard compromettant l'obtention du BARI et ne devait donc pas se voir opposer une décision d'élimination. Dès lors qu'elle avait elle-même obtenu 98 crédits à l'issue de la deuxième année de deuxième partie, la décision d'élimination avait été prise à tort.

18) Le 14 janvier 2015, l'université a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision attaquée.

L'étudiante avait choisi, à l'issue de l'année 2012-2013, de garder deux notes comprises entre 3 et 4, pour un total de 6 crédits. Elle avait effectué ce choix, malgré la possibilité de repasser ces deux examens. Ces notes et crédits avaient ainsi été définitivement acquis et les examens ne pouvaient désormais plus être représentés. Dès lors que la totalité des crédits ainsi acquis ne devaient pas dépasser 12 crédits, elle ne pouvait plus obtenir que 6 crédits « en conservation de notes » pour les années académiques suivantes. Elle ne pouvait ainsi plus valider l'examen de droit pénal général auquel elle avait échoué en juin 2014, dès lors qu'il équivalait à 10 crédits. Elle avait toutefois eu la possibilité de le représenter à la session d'août 2014, ce qu'elle n'avait pas fait, se trouvant alors en Corée.

L'information selon laquelle les crédits correspondant aux enseignements hors cursus n'étaient pas comptabilisés dans le programme du BARI figurait sur de nombreux documents et avait été communiquée à plusieurs reprises aux étudiants.

La teneur de l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 n'était pas nouvelle, dès lors que le règlement d'études applicable au moment où l'étudiante avait été admise au programme du BARI (RE 2010) la mentionnait déjà. N'ayant pas atteint les
30 crédits réglementaires durant l'année 2013-2014, c'était à juste titre qu'elle avait été éliminée du cursus du BARI. Aucune situation exceptionnelle n'était apparue, ni n'avait été alléguée, permettant de remettre en cause cette décision.

Dans son opposition, Mme A______ avait indiqué à plusieurs reprises avoir transgressé « par négligence » l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 qui lui était « sorti de la tête ». Or, l'oubli d'une condition d'élimination, s'il pouvait s'avérer regrettable, ne constituait pas un motif de reconsidération d'une décision. Par ailleurs, l'intérêt public du GSI à n'accueillir que des étudiants remplissant les critères de sélection primait l'intérêt privé de la recourante à poursuivre ses études. Ses arguments étant infondés, son élimination, confirmée par la décision sur opposition, était justifiée.

Les griefs soulevés par l'étudiante à l'appui de son recours devaient être déclarés irrecevables, dès lors qu'ils n'avaient pas été exposés dans son opposition et n'avaient ainsi pas fait l'objet de la décision attaquée, notamment sous l'angle de violation des principes de l'égalité de traitement et de l'interdiction de l'arbitraire, ainsi que de l'interprétation erronée d'une disposition réglementaire. Néanmoins, dans l'hypothèse de leur recevabilité, il convenait de les écarter.

Contrairement à ce qu'alléguait la recourante, les 30 crédits minimum devant être obtenus chaque semestre (recte : année) devaient faire partie du programme du BARI et de la liste des enseignements obligatoires décrite dans le plan d'études, ce qui n'était pas le cas du cours de droit international privé. Mme A______ n'avait ainsi acquis que 26 crédits au cours de l'année 2013-2014, de sorte que son élimination se justifiait conformément à l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013.

S'agissant de l'inégalité de traitement dont se prévalait la recourante, l'exemple sur lequel se fondait cette dernière n'était pas relevant. En effet, les situations n'étaient pas identiques, car dans un cas un étudiant validait à chaque fois 30 crédits par année alors que dans son cas, elle n'avait validé que 26 crédits par année. Dans le premier cas, l'étudiant suivait régulièrement son cursus et dans le second elle n'obtenait pas les 30 crédits réglementaires. Tous les étudiants remplissant la condition d'élimination de l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 étaient éliminés pour ce motif  ; ce n'était que s'il restait moins de 30 crédits à obtenir pour terminer le cursus qu'un étudiant était autorisé à suivre des cours pour un total inférieur à 30 crédits par année. Le but de la disposition précitée était de responsabiliser les étudiants, en les incitant à se concentrer sur une seule et unique formation et à suivre les cours de manière régulière et efficace. Le principe de l'égalité de traitement n'avait ainsi pas été violé.

Le principe d'interdiction de l'arbitraire n'avait pas non plus été violé. La décision d'élimination avait été prise conformément aux dispositions du RE 2013, lequel avait été adopté selon les procédures applicables par l'assemblée participative du GSI et approuvé par le rectorat de l'université. L'application de l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 n'entraînait aucun résultat insoutenable, choquant ou en contradiction manifeste avec la situation effective. Un étudiant devait organiser ses études conformément au règlement et prendre connaissance des dispositions régissant ses études. Il devait également organiser son temps et ses activités ou prendre les mesures qui s'imposaient pour se conformer aux règles.

Enfin, l'interprétation et le but de l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 étaient parfaitement clairs au vu de l'ensemble des dispositions régissant l'obtention du BARI. Il appartenait à la recourante de se renseigner quant au sens de cette norme, ce qu'elle pouvait faire aisément auprès de la conseillère aux études ou du directeur du GSI, ce avant son élimination. Il était en effet contraire au principe de la bonne foi de n'invoquer une interprétation lacunaire et évasive d'une disposition qu'une fois l'élimination prononcée sur cette base. L'article litigieux ne faisait que sanctionner le manque de régularité d'un étudiant et cette pratique avait cours dans la plupart des facultés. Une lacune ne pouvait être admise que si l'université avait omis de régler des cas concrets outre la règle générale et qu'il était impossible, y compris à l'aide de la documentation annexe, de définir le sens et le but de la règle, ce qui n'était pas le cas en l'occurrence. L'université n'avait pas oublié de traiter le cas d'étudiants n'ayant pas accumulé suffisamment de crédits durant deux semestres, mais ne se trouvant pas pour autant en situation irrégulière. De nombreux moyens se trouvaient à leur disposition pour ne pas être mis en échec. Ils avaient en particulier la possibilité de conserver les crédits de cours non réussis, de repasser jusqu'à trois fois des examens, de demander des congés en cas de difficultés au cours des études et d'obtenir des dérogations dans des circonstances exceptionnelles. La réglementation en matière d'études universitaires était en général complète et exhaustive, le règlement du GSI ne faisant pas exception à la règle. Le fait de valider 30 crédits en une année académique ne s'avérait au demeurant pas être un rythme insoutenable. En l'absence de lacune proprement dite, il n'appartenait pas au juge de combler une réglementation claire et exhaustive.

19) Le 13 février 2015, Mme A______ a persisté dans ses précédentes conclusions et argumentation.

Bien qu'innomés, les griefs exposés dans son recours figuraient déjà dans son opposition et l'intimée avait choisi de les ignorer. Elle avait déjà rendu cette dernière attentive au fait qu'elle était traitée différemment d'un étudiant obtenant le même nombre de crédits, mais de manière différente. Concernant l'arbitraire, elle avait expliqué avoir pris de l'avance dans ses études conformément au but de l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013, ce qui avait entraîné par la suite le non-respect de cette disposition. Or, la prise en compte de ses deux premières années d'études montrait qu'elle respectait le but de l'article. Enfin, elle avait indiqué que son élimination n'était pas une solution voulue par le législateur, ce qui montrait une mauvaise interprétation, cas échéant l'existence d'une lacune. Son acte d'opposition n'était certes pas parfait et ne se référait pas explicitement à des concepts juridiques. Elle était cependant non-juriste, n'était pas assistée par un conseil dans la présente procédure et n'avait jamais eu l'occasion auparavant de rédiger un mémoire ou de travailler sous la surveillance d'un juriste. Le degré d'exigence de forme ne devait pas être le même que si elle avait été représentée par un professionnel, ce d'autant que la procédure d'opposition était menée par des professeurs habitués à lire des travaux d'étudiants.

Les 5 crédits relatifs au cours de droit international privé, enseignement obligatoire dans son cas et figurant dans la liste des enseignements à choix, devaient être pris en compte, l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 ne spécifiant pas l'origine des crédits devant être obtenus. La « liste des enseignements
obligatoires » à laquelle l'intimée se référait prêtait à confusion, dès lors que les enseignements obligatoires pour tous les étudiants du BARI ne totalisaient que
36 crédits sur trois ans ; or il n'était pas possible d'effectuer la deuxième partie en trois ans si les 30 crédits ne faisaient partie que de cette liste. La deuxième partie se composait de 36 crédits d'enseignements obligatoires, 12 crédits de projet de recherche dans la discipline choisie, 24 crédits d'enseignements obligatoires dans les deux disciplines choisies et 48 crédits d'enseignements à choix. Il n'y avait aucune raison pour que l'une de ces catégories ne soit pas prise en compte.

Sous l'angle de l'égalité de traitement, l'intimée avait évoqué pour la première fois dans son écriture responsive la notion de régularité, s'agissant du but de l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013. Elle n'avait d'ailleurs jamais allégué, et le contraire eut été étonnant, que cette disposition visait à empêcher les étudiants de prendre de l'avance dans leurs études. Il était difficile de comprendre en quoi un étudiant obtenant 60 puis 30 crédits, soit 90 en deux ans, était plus régulier et efficace que celui obtenant 72 dès la première tentative puis 26 crédits, soit 98 en deux ans.

En ne prenant pas en considération les crédits qu'elle avait obtenus en deuxième année, l'intimée avait choisi d'appliquer la disposition litigieuse en violation de son but. La théorie selon laquelle l'application du règlement ne pouvait pas être arbitraire puisqu'il avait été adopté dans le respect des procédures ne se vérifiait pas, encore moins dans un cas non prévu par le législateur.

Enfin, le grief d'interprétation lacunaire d'une disposition, conduisant au prononcé d'une décision ne pouvait pas être invoqué plus tôt. Elle avait agi en toute bonne foi tout au long de la procédure. Elle avait fait preuve de sérieux et de régularité au cours de ses études, réussissant ses deux premières années.

20) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 43 al. 2 de la loi sur l’université du 13 juin 2008 - LU - C 1 30 ; art. 18 al. 1, 19 al. 2 et 36 al. 1 du règlement relatif à la procédure d'opposition au sein de l'université du 16 mars 2009 - RIO-UNIGE ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le litige porte sur l'élimination de la recourante du programme du BARI au sein du GSI, au motif qu'elle n'a pas acquis le nombre minimum réglementaire de 30 crédits au cours de l'année académique 2013-2014, soit sa troisième année d'études.

3) L'intimée estime que les griefs soulevés par la recourante dans son écriture de recours, en particulier en tant qu'ils portent sur l'interprétation de la disposition litigieuse, ainsi que sur les principes de l'égalité de traitement et d'interdiction de l'arbitraire, seraient nouveaux et, partant, irrecevables.

a. Selon l’art. 68 LPA, le recourant peut invoquer des motifs, des faits et des moyens de preuve nouveaux qui ne l’ont pas été dans les précédentes procédures, sauf exception prévue par la loi. A contrario, cette disposition ne permet pas au recourant de prendre des conclusions qui n’auraient pas été formées devant l’autorité de première instance.

b. Selon la jurisprudence constante de la chambre de céans, l’objet d’une procédure administrative ne peut pas s’étendre ou se modifier qualitativement au fil des instances. Il peut uniquement se réduire, dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés devant l’autorité de recours (ATA/560/2006 du 17 octobre 2006). Si un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions qui ont été traitées dans la procédure antérieure. Quant à l’autorité de recours, elle n’examine pas les prétentions et les griefs qui n’ont pas fait l’objet du prononcé de l’instance inférieure, sous peine de détourner sa mission de contrôle, de violer la compétence fonctionnelle de cette autorité-ci, d’enfreindre le principe de l’épuisement des voies de droit préalables et, en définitive, de priver les parties d’un degré de juridiction (ATA/319/2015 du 31 mars 2015 ; ATA/209/2014 du 1er avril 2014 consid. 6b ; ATA/737/2013 du 5 novembre 2013 ; ATA/145/2013 du 5 mars
2013 ; ATA/18/2013 du 8 janvier 2013 ; ATA/163/2010 du 9 mars 2010 ; ATA/503/2009 du 6 octobre 2009 ; ATA/30/2009 du 20 janvier 2009 ; ATA/168/2008 du 8 avril 2008 ; ACOM/49/2008 du 17 avril 2008 ; Benoit BOVAY, Procédure administrative, Berne, 2000, p. 390/391).

c. En l'espèce, dans son opposition du 4 octobre 2014, la recourante n'a certes pas expressément formulé les griefs qu'elle fait désormais valoir devant la chambre administrative. Elle a toutefois d'ores et déjà exposé, à ce stade de la procédure, les circonstances de fait dont l'intimée n'aurait pas suffisamment tenu compte avant de rendre sa décision, ainsi que les diverses raisons pour lesquelles sont élimination du programme du BARI apparaitrait contraire au droit. Comme l'indique d'ailleurs la recourante dans son écriture du 13 février 2015, les arguments contenus dans son opposition, bien qu'ils ne se réfèrent pas à des concepts juridiques, ne s'avèrent pas divergents de ceux, plus formels, contenus dans son recours.

En conséquence, ce serait faire preuve de formalisme excessif que de reprocher à une étudiante, agissant sans l’intermédiaire d’un avocat, de n’avoir pas nommément désigné les griefs à l’origine de son opposition, alors que ceux-ci transparaissent du complexe de faits allégué et de son argumentation. Lesdits griefs seront donc déclarés recevables.

4) a. Saisie d'un recours contre une décision universitaire, la chambre administrative, comme avant elle le Tribunal administratif et la commission cantonale de recours de l’université (ci-après : CRUNI), applique le droit d'office. Elle ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n'est liée ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA) ni par leur argumentation juridique. Elle peut donc admettre un recours pour d'autres motifs que ceux invoqués par la recourante ; elle peut aussi rejeter un recours en opérant une substitution de motifs, c'est-à-dire en adoptant une autre argumentation juridique que celle retenue par l’autorité universitaire (ATA/162/2009 du 31 mars 2009 ; ACOM/28/2008 du 6 mars 2008 ; ACOM/103/2007 du 12 décembre 2007, consid. 2).

b. Le recours devant la chambre administrative ne peut être fondé que sur une violation du droit ou sur la constatation inexacte ou incomplète des faits sur lesquels repose la décision. L’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation sont assimilés à la violation du droit (art. 61 al. 1 LPA).

5) a. La décision d’élimination à l’origine de la décision attaquée du 14 novembre 2014 ayant été prise le 12 septembre 2014 et la recourante ayant commencé son cursus universitaire en septembre 2011, le litige est soumis aux dispositions de la LU, du statut de l’université, approuvé par le Conseil d'État le 27 juillet 2011 et entré en vigueur le lendemain (ci-après : le statut), du RIO-UNIGE, ainsi que du RE 2013, en application de l'art. 28 al. 1 et 2 de ce règlement.

b. Le BARI est une formation interdisciplinaire, organisée et administrée par le GSI, à partir d'une part d'enseignements qu'il gère directement et, d'autre part, d'enseignements des facultés partenaires, détaillés dans le plan d'études (art. 1
al. 1 et 2 RE 2013). L’obtention du BARI permet l’accès au deuxième cursus de la formation de base, à savoir les études de maîtrise universitaire consécutive, non-consécutive et spécialisée, sous réserve des conditions d’admissions spécifiques aux maîtrises postulées (art. 2 al. 2 RE 2013). Le plan d’études comprend des enseignements obligatoires, des enseignements à option et un projet de recherche (art. 9 al. 2 RE 2013).

Selon l'art. 10 RE 2013, les études du BARI sont divisées en deux parties (al. 1). La première partie correspond aux deux premiers semestres d'études et permet d'acquérir 60 crédits (al. 2). La deuxième partie correspond à quatre autres semestres et permet d'acquérir 120 crédits (al. 3). Pour obtenir le baccalauréat, l'étudiant doit donc acquérir un total de 180 crédits, conformément au plan d'études (art. 10 al. 4 et 22 al. 7 RE 2013).

Aux termes de l'art. 11 RE 2013, la durée totale des études est normalement de six semestres et la durée maximale des études est de huit semestres (al. 1), étant précisé que la durée de la première partie est de deux semestres au minimum et quatre semestres au maximum (al. 2).

c. Dans le cadre de la deuxième partie du programme d'études, un enseignement est réussi si l'étudiant obtient une note égale ou supérieure à 4. Dans ce cas, la note et le nombre de crédits correspondants sont définitivement acquis par le candidat (art. 22 al. 1 RE 2013). L'étudiant qui obtient une note inférieure à 4 mais égale ou supérieure à 3 peut demander à conserver sa note. La note et les crédits afférents sont alors définitivement acquis et l’examen ne peut pas être présenté à nouveau. Cette faculté est limitée à un total de 12 crédits et ne s'applique pas aux crédits relatifs au projet de recherche (art. 22 al. 2 RE 2013).

d. Selon l'art. 58 al. 3 du statut, l’étudiant qui échoue à un examen ou à une session d’examens auxquels il ne peut plus se présenter, en vertu du règlement de la faculté, est éliminé (let. a). De même, celui qui ne subit pas les examens ou qui n’obtient pas les crédits requis dans les délais fixés par le règlement d’études est éliminé (let. b). La décision d’élimination est prise le doyen de l’unité principale d’enseignement et de recherche ou le directeur du centre ou de l’institut interfacultaire, lesquels tiennent compte des situations exceptionnelles (art. 58
al. 4 du statut).

À teneur de l'art. 24 al. 1 let a et al. 3 RE 2013, l'étudiant qui n'a pas acquis au moins 30 crédits lors des deux semestres d’études de l’année en cours, et ce, au plus tard à l’issue de la session extraordinaire, sous réserve de son droit à faire valoir l’article 22 alinéa 2, subit un échec définitif à la deuxième partie et est éliminé par décision du directeur du GSI.

6) En l'espèce, la recourante a débuté ses études au semestre d'automne 2011, se destinant, après l'obtention du BARI, à une maîtrise en droit. Elle a réussi la première partie du programme de baccalauréat après deux semestres d'études, acquérant les 60 crédits correspondants, avec une moyenne générale de 4,79. Dans le même temps, elle avait déjà obtenu 3 crédits relatifs à des enseignements de deuxième partie. Au cours des deux semestres suivants dans la deuxième partie, elle a obtenu 69 crédits supplémentaires, usant de la possibilité offerte par l'art. 22 al. 2 RE 2013 pour conserver des notes inférieures à la moyenne, pour un total de 6 crédits sur les 12 autorisés. Ainsi, à la fin de l'année académique 2012-2013, après quatre semestres, soit deux années d'études, elle avait cumulé 132 crédits sur les 180 nécessaires à l'obtention du BARI, dont 72 en deuxième partie, de sorte qu'il ne lui en restait que 48 à acquérir, dans un délai restant de quatre semestres au maximum, conformément à l'art. 11 al. 1 RE 2013.

Au cours de l'année académique 2013-2014, la recourante a acquis
26 crédits relatifs à des enseignements du programme du BARI et 5 crédits relatifs à un enseignement hors cursus (droit international privé). Cependant, échouant à un examen valant 10 crédits, choisissant de différer la reddition de son projet de recherche valant 12 crédits et renonçant à se représenter à la session extraordinaire d'août-septembre 2014, elle n'a pas obtenu les 22 crédits correspondants. Dès lors, après six semestres, soit trois années d'études, elle comptabilisait 158 crédits sur les 180 nécessaires à l'obtention du BARI, dont 98 en deuxième partie.

Elle a été éliminée de la formation le 12 septembre 2014, au motif qu'elle n'avait pas obtenu un minimum de 30 crédits lors des deux semestres d’études de l’année en cours, cette décision étant fondée sur l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013.

7) La recourante estime que les 5 crédits qu'elle a acquis en réussissant l'examen, hors cursus, de droit international privé, devraient être compris dans le nombre de crédits obtenus durant l'année académique 2013-2014, portant ainsi le total de 26 à 31 crédits. Selon elle, si l'enseignement précité n'est effectivement pas inclus dans le programme du BARI et n'a ainsi pas à être comptabilisé dans les 180 crédits nécessaires à l'obtention du diplôme, il n'en demeure pas moins qu'il est un enseignement obligatoire pour les étudiants briguant, par la suite, une maîtrise en droit, et donc étroitement lié au programme d'études, dont les crédits devraient être pris en compte dans le total de crédits acquis au cours d'une année. L'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 n'exclurait d'ailleurs pas cette manière de comptabiliser, dès lors qu'il ne précise pas à quels types d'enseignements les crédits à acquérir doivent correspondre. Elle respecterait ainsi, pour l'année académique 2013-2014, le nombre minimum de 30 crédits, ce qui rendrait la décision d'élimination infondée.

L'intimée ne partage pas ce point de vue, considérant que les étudiants ont été informés à plusieurs reprises de ce que les crédits relatifs aux enseignements hors cursus n'étaient pas comptabilisés dans le programme du BARI, dès lors que lesdits enseignements n'étaient pas considérés comme obligatoires. Ils ne pourraient ainsi pas non plus compter dans le nombre de crédits minimum à acquérir.

Cette question litigieuse peut toutefois souffrir de rester ouverte, au vu de ce qui suit.

8) Dans la mesure où la recourante a obtenu 26 crédits au cours de l'année académique 2013-2014, c'est à juste titre que l'intimée s'est fondée sur
l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 pour prononcer l'élimination.

Il convient néanmoins d'examiner la situation personnelle de la recourante sous l'angle de l'existence d'éventuelles circonstances exceptionnelles dont aurait dû tenir compte le directeur du GSI avant de prononcer l'élimination.

9) a. Selon la jurisprudence constante en matière d’élimination, rendue par la CRUNI et reprise par la chambre administrative, n’est exceptionnelle au sens de l’art. 58 al. 4 du statut que la situation particulièrement grave et difficile pour l’étudiant, ce tant d’un point de vue subjectif qu’objectif. Les effets perturbateurs doivent avoir été dûment prouvés par l’étudiant et être en lien de causalité avec l’événement. En outre, les autorités facultaires disposent dans ce cadre d’un large pouvoir d’appréciation, dont l’autorité de recours ne censure que l’abus (ATA/443/2015 du 12 mai 2015 ; ATA/348/2013 du 4 juin 2013 ; ATA/654/2012 du 25 septembre 2012 ; ATA/321/2012 du 22 mai 2012 ; ACOM/118/2008 du
18 décembre 2008). Cette jurisprudence est conforme au principe de l’instruction d’office.

b. Une décision est arbitraire au sens de l’art. 9 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) lorsqu’elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou lorsqu’elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité. La chambre administrative ne s’écarte de la solution retenue par l’autorité cantonale que lorsque celle-ci est manifestement insoutenable, qu’elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, si elle a été adoptée sans motif objectif ou en violation d’un droit certain. L’arbitraire ne résulte pas du seul fait qu’une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu’elle serait préférable. Pour qu’une décision soit annulée pour cause d’arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 138 I 232 consid. 6.2 p. 239 ; 136 I 316
consid. 2.2.2 p. 318 s ; ATA/596/2015 du 9 juin 2015 et les références citées ; ATA/585/2015 du 9 juin 2015 ; ATA/131/2013 du 5 mars 2013 consid. 6).

c. Dans l’exercice de ses compétences, toute autorité administrative doit respecter le principe de la proportionnalité, que ce respect soit imposé par l’art. 36 al. 3 Cst. ou, de manière plus générale, par l’art. 5 al. 2 Cst., dans ses trois composantes, à savoir l’aptitude, la nécessité et la proportionnalité au sens étroit. Ainsi, une mesure étatique doit être apte à atteindre le but d’intérêt public visé, être nécessaire pour que ce but puisse être réalisé, et enfin être dans un rapport raisonnable avec l’atteinte aux droits des particuliers qu’elle entraîne
(ATF 136 I 87 p. 92 ; 136 I 17 p. 26 ; 135 I 176 p. 186 ; 133 I 110 p. 123 ;
130 I 65 p. 69 ; ATA/832/2013 du 17 décembre 2013 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2011, p. 187).

10) En l'espèce, il apparaît que l'intimée, pour justifier l'élimination de la recourante au terme de sa troisième année d'études, a appliqué l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013, dès lors que cette dernière n'a pas obtenu, au cours des deux semestres de l'année académique 2013-2014, un nombre minimal de 30 crédits.

Il ressort des explications claires, non contestées et cohérentes de l'intimée que cette disposition a pour objectif d'éviter le « tourisme universitaire », soit que les étudiants ne multiplient les formations parallèles, et de faire en sorte qu'ils terminent et obtiennent le diplôme de la formation dans laquelle ils sont inscrits, selon les délais et modalités réglementaires.

Toutefois, il convient de relever que, comme indiqué précédemment, la recourante a réussi sa première année en acquérant les 60 crédits requis et obtenant une moyenne générale de 4,79. Elle a également, durant ses deux premiers semestres d'études, suivi un enseignement de deuxième partie, dont la réussite de l'examen lui a permis d'obtenir les 3 crédits correspondants. Au cours de sa deuxième année, elle a obtenu 69 crédits supplémentaires, portant le total de crédits acquis à 132 après quatre semestres, soit davantage que si elle s'était strictement conformée au plan d'études. Il lui restait à ce stade 48 crédits à valider pour obtenir son diplôme. L'avance qu'elle a ainsi prise dans le programme du BARI lui a permis de suivre, en parallèle durant l'année académique suivante, un cours de coréen à raison de quatre heures hebdomadaires, ce qui ne saurait cependant lui être reproché, dans la mesure où aucun élément ne permet de considérer que ce choix aurait été la cause du fait qu'elle n'a pas obtenu les
30 crédits réglementaires au cours de l'année académique litigieuse.

En effet, il appert que la recourante s'est inscrite, au début de sa troisième année, à des enseignements du BARI et au projet de recherche à hauteur des 48 crédits qui lui manquaient, ainsi qu’à l’enseignement hors cursus de droit international privé pour 5 crédits. Or, échouant à l'examen de droit pénal général et renonçant à la reddition de son travail de recherche, elle n'a acquis que
26 crédits de plus dans le cadre du programme du BARI au cours de cette troisième année d'études. Elle n'a pas pu valider « en conservation de note » l'examen de droit pénal général valant 10 crédits auquel elle a obtenu la note de 3,5, car elle avait déjà validé des examens à hauteur de 6 crédits sur les 12 autorisés par l'art. 22 al. 2 RE 2013. Elle a néanmoins obtenu un total de 158 crédits après six semestres d'études. Par ailleurs, conformément au à l'art. 11 al. 1 RE 2013, il lui restait encore deux semestres pour acquérir les 22 crédits manquants pour obtenir le diplôme - ce nombre correspondant à l'examen de droit pénal général à hauteur de 10 crédits et à son projet de recherche à hauteur de 12 crédits, qu'elle n'a pas validés en troisième année - ce qui s'avérait parfaitement réalisable. Il ressort en outre des relevés de notes produits que la recourante a obtenu, pour une grande part tout au long de ses études, de bonnes notes aux examens et qu'elle ne se trouvait objectivement pas en situation d'échec ou de retard lorsqu'elle a été éliminée.

Il convient également de relever, vu ce qui précède, que si la recourante avait choisi un enseignement valant au maximum 6 crédits en lieu et place de celui de droit pénal général valant 10 crédits, ou à tout le moins si elle avait pu faire valider « en conservation de note » l’examen de droit pénal général, auquel elle a échoué, à hauteur des 6 crédits qu’elle était encore autorisée à acquérir de cette manière en vertu de l’art. 22 al. 2 RE 2013, elle aurait atteint, voire dépassé, le nombre minimum de 30 crédits requis au sens de l’art. 24 al. 1 let. a RE 2013 pour l’année 2013-2014.

Par ailleurs, bien qu’elle ne puisse, selon le GSI, pas faire comptabiliser dans le nombre précité les 5 crédits qu’elle a obtenus hors cursus en réussissant l’examen de droit international privé, il n’en demeure pas moins qu’elle les a acquis dans le cadre de sa formation visant à l’obtention du BARI.

Ainsi, dans la situation bien particulière de la recourante, la décision d'élimination par l'application stricte de l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l’équité, dans la mesure où les conséquences de cette élimination sont particulièrement graves, la recourante se trouvant empêchée d’obtenir le diplôme pour lequel elle a déjà consacré six semestres d’études. La décision attaquée apparaît dès lors arbitraire dans son résultat, celui-ci étant contraire au but poursuivi par la réglementation applicable, soit éviter que les étudiants multiplient les formations parallèles et accumulent un retard compromettant l’issue de leur formation.

L'argumentation de l'intimée selon laquelle la décision d'élimination aurait été prise conformément au but de l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 pour sanctionner un manque de régularité n'emporte pas la conviction, puisque la recourante a, jusqu'en troisième année, toujours fait en sorte d'acquérir au total davantage de crédits que nécessaire.

Au contraire, la décision litigieuse s'avère disproportionnée, dès lors qu'elle n'est ni apte, ni nécessaire pour atteindre le but d'intérêt public visé, à savoir celui que les étudiants universitaires suivent et achèvent la formation entreprise dans les délais et modalités requis.

De même, l'intimée ne saurait être suivie lorsqu'elle allègue que cette pratique aurait cours dans la plupart des facultés.

En effet, à titre d'exemple, dans le cadre du programme de baccalauréat en droit, correspondant également à 180 crédits et aussi scindé en deux parties, le candidat doit avoir, sous peine d’élimination, présenté des examens de deuxième série pour des enseignements correspondant au moins à 60 crédits au plus tard quatre semestres après la réussite de la première série et doit avoir réussi la deuxième série complète dans un délai maximum de huit semestres après la réussite de la première série (art. 28 al. 8 du règlement d'études de la faculté de droit). Ainsi, sous réserve des dérogations accordées par le doyen pour justes motifs (tels que maladie, maternité, service militaire, activité professionnelle importante, charges de famille lourdes), l'inobservation des délais prévus, notamment à l'art. 23 al. 8, entraîne l'élimination du candidat de la faculté.

Par ailleurs, toujours à titre d'exemple, selon l'art. 8 du règlement d'études du baccalauréat en lettres, 60 crédits correspondent en principe à une année d'études à plein temps (al. 1). Pour obtenir le baccalauréat, l'étudiant doit acquérir un total de 180 crédits, ce qui correspond à des études à plein temps d'une durée minimum de six semestres (al. 2), la durée des études étant limitée à un maximum de douze semestres (al. 3). Sous réserve d'une dérogation accordée pour de justes motifs, est éliminé l'étudiant qui n’a pas obtenu au moins 24 crédits à la fin du deuxième semestre, 60 crédits à la fin du quatrième semestre, 90 crédits à la fin du sixième semestre, 120 crédits à la fin du huitième semestre, 150 crédits à la fin du dixième semestre et 180 crédits à la fin du douzième semestre (al. 5).

Il ressort d'une comparaison entre la teneur de ces dispositions et celle de l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 que, dans d'autres facultés, si le but visé est également d'éviter que les étudiants se dispersent dans plusieurs formations, prennent du retard et compromettent ainsi la réussite de leurs études, la situation particulière dans laquelle se trouve aujourd'hui la recourante ne pourrait pas se produire.

Compte tenu de ce qui précède, notamment des circonstances toutes particulières susmentionnées ressortant du dossier, prises dans leur ensemble, il y a lieu d'admettre que la situation personnelle et académique de la recourante présente un caractère exceptionnel et que la décision attaquée conduit à un résultat arbitraire et disproportionné. Dans un tel contexte, le fait que la recourante ait pu commettre une erreur en ne prenant pas les mesures nécessaires pour s'assurer d'obtenir un minimum de 30 crédits à l'issue de l'année académique 2013-2014 ne suffit pas à remettre en cause ce qui précède, vu les circonstances particulières. Le directeur du GSI a ainsi mésusé de son pouvoir d'appréciation en ne retenant pas et en ne prenant pas en considération des circonstances exceptionnelles, soit les motifs précités cumulés, rendant l'élimination de l'étudiante arbitraire et disproportionnée, de sorte qu’elle devra être annulée.

11) Au vu de ce qui précède, la chambre de céans renoncera à examiner les griefs de la recourante relatifs au principe de l'égalité de traitement, ainsi qu'à l'interprétation de l'art. 24 al. 1 let. a RE 2013 et à l'existence d'une éventuelle lacune.

12) Le recours sera ainsi admis. La décision sur opposition attaquée, de même que le relevé de notes du 12 septembre 2014 valant décision d'élimination, seront annulés. Par économie de procédure, l'intimée sera invitée à autoriser la recourante à bénéficier des deux semestres d'études qui lui restent à disposition au sein du GSI, conformément à l'art. 11 al. 1 RE 2013, pour tenter d'achever la deuxième partie du programme d'études et d'obtenir le BARI.

Aucun émolument ne sera mis à la charge de l'université, malgré l'issue du litige (art. 87 al. 1 2ème phr. LPA). Aucune indemnité ne sera allouée à la recourante, celle-ci agissant en personne et n'ayant pas allégué d'éventuels frais indispensables causés par le recours (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 10 décembre 2014 par Mme A______ contre la décision sur opposition de l'Université de Genève du 14 novembre 2014 ;

au fond :

l'admet ;

annule la décision sur opposition du directeur du Global Studies Institute du 14 novembre 2014 ;

annule la décision d'élimination du Global Studies Institute du 12 septembre 2014 ;

invite l'Université de Genève à autoriser Mme A______ à bénéficier de deux semestres pour tenter d'achever la deuxième partie du programme d'études et d'obtenir le baccalauréat universitaire en relations internationales ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les
art. 113 ss LTF, s'il porte sur le résultat d'examens ou d'autres évaluations des capacités, en matière de scolarité obligatoire, de formation ultérieure ou d'exercice d'une profession (art. 83 let. t LTF) ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Mme A______ ainsi qu'à l'Université de Genève.

Siégeants : Mme Junod, présidente, MM. Thélin, Dumartheray et Pagan, juges,
M. Jordan, juge suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

la présidente siégeant :

 

 

Ch. Junod

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :