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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3274/2021

JTAPI/894/2022 du 01.09.2022 ( LCI ) , REJETE

Descripteurs : PRISE DE POSITION DE L'AUTORITÉ;CONFORMITÉ À LA ZONE;ACCÈS(EN GÉNÉRAL);PLAN D'AFFECTATION SPÉCIAL;5E ZONE;ÉQUIPEMENT(CONSTRUCTION);INDICE D'UTILISATION;AUTORISATION DÉROGATOIRE(EN GÉNÉRAL);IMMISSION;BRUIT;PROCÉDURE DE PLANIFICATION;SOUS-SOL(ÉLÉMENT DE LA CONSTRUCTION)
Normes : LCI.145.al2; LCI.59.al4; LCI.59.al8; LCI.59.al9; LaLAT.10.al1; LCI.156; LCI.15
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3274/2021 LCI

JTAPI/894/2022

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 1er septembre 2022

 

dans la cause

 

COMMUNE DE A______, représentée par Me Lucien LAZZAROTTO, avocat, avec élection de domicile

 

contre

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE-OAC

Monsieur B______, représenté par Me Sidonie MORVAN, avocate, avec élection de domicile

 


EN FAIT

1.             Monsieur B______ est propriétaire de la parcelle n° 1______ de la commune de A______ (ci-après : la commune), d'une surface de 1468 m2, située en zone 5, sur laquelle est cadastrée une habitation d'un logement, sis au chemin C______ 2______, d'une surface totale de 219 m2.

2.             Par requête enregistrée auprès du département du territoire (ci-après : DT ou le département) le 10 mai 2019, M. B______, par l'intermédiaire de son mandataire architecte, a sollicité une autorisation de construire ayant pour description : « agrandissement et transformation d’une habitation et du sous-sol, aménagement d’habitats groupés (44 % HPE), construction d’un garage, pool house – installation de sondes géothermiques - piscine chauffée - abattage d’arbres », sur la parcelle susmentionnée.

Le projet consistait, d'une part, dans la reprise du sous-sol et du rez-de-chaussée de la villa existante, avec agrandissement et modification de la typologie des espaces existants, et d’autre part, dans la création d’un premier étage et d’un attique. En sus étaient construits une piscine, un pool house, un garage et un couvert à voitures. Le futur bâtiment comprendrait trois logements, un appartement de 9 pièces en triplex, un appartement de 5 pièces au 1er étage et un appartement de 4 pièces en attique.

3.             Dans le cadre de l’instruction de cette requête, enregistrée sous la référence DD 3______, les préavis suivants ont notamment été délivrés :

-          favorable sans observation et avec dérogation selon l’art. 59 al. 4 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05 ; 42,95 % HPE), le 13 avril 2021, de la commission d'architecture (ci-après : CA), le projet répondant aux remarques émises dans les divers préavis précédents. Ce préavis faisait suite à un premier préavis du 18 juin 2019 demandant une modification de projet tout en validant le principe de surélévation qui préservait les espaces "vides" et la surface végétale, ainsi qu’à un deuxième préavis du 5 novembre 2019, favorable à l'application de la dérogation selon l'art. 59 al. 4 LCI (43,95 %).

-          favorables au projet et à l'application de la dérogation prévue à l'art. 59 LCI, les 24 mai, 17 octobre 2019, 25 novembre 2020 et 23 mars 2021, de la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC). Selon cette instance, la densité du projet hors sol était de 43,95 %, le taux en sous-sol étant de 21,30 % ;

-          favorables sous conditions, les 31 octobre 2019, 1er décembre 2020 et 8 avril 2021, de l'office cantonal des transports (ci-après : OCT), après un premier préavis du 13 juin 2019 demandant des modifications du projet  ;

-          favorable sans observation, le 10 décembre 2020, de l'office de l'urbanisme (ci-après : SPI) dès lors que les éléments présentés dans le formulaire ad hoc intégraient ses demandes concernant la végétalisation du projet (haies bocagères à prolonger le long du chemin C______). Ce préavis faisait suite à une demande de complément du 25 juin 2019, rappelant l’existence du [Les nouveaux quartiers jardins du XXIème siècle] Guide pour une densification de qualité de la zone 5 sans modification de zone à Genève (ci-après : le Guide) et la stratégie pour la densification de sa zone 5 élaborée par la commune dans le cadre de la mise à jour de son plan directeur communal (PDCom), puis à un préavis favorable sous conditions du 16 décembre 2019 ;

-          défavorables les 26 juin, 13 novembre 2019, 12 janvier et 26 avril 2021, de la commune. Il était notamment relevé le caractère très massif de la nouvelle construction, contrastant avec le quartier. La nouvelle version du projet n’avait apporté aucune amélioration significative. Le calcul des surfaces pleine terre fourni par l’architecte paraissait inexact puisqu’étaient comptés dans ces surfaces : les deux patios, les surfaces pour le stationnement des véhicules et des vélos ainsi que les surfaces de circulation recouvertes de dallettes ;

-          favorable le 25 mai 2021, de l’office cantonal de l'agriculture et de la nature (ci-après : OCAN), sous conditions de replanter des arbres pour un montant de CHF 7'000.- et de respecter intégralement le plan d’aménagement paysager (PAP) du 23 février 2021. Ce préavis faisait suite à des demandes de complément des 3 juillet, 15 novembre 2019 et 7 décembre 2020.

L'ensemble des autres instances de préavis consultées était favorable, avec ou sans réserves, au projet.

4.             Le 25 mai 2020, le Conseil d'Etat a approuvé le PDCom de la commune, incluant une stratégie d'évolution de la zone 5 et le plan directeur des chemins pour piétons de génération, adopté par cette dernière le 9 décembre 2019.

S’agissant de cette stratégie, le PDCom indique en particulier (PDCom 5.1.2 Principes, pp. 37 et 38) :

« Préservation et reconstitution des composantes paysagères majeures

La trame paysagère formée de haies bocagères, d'alignements de chênes, de cordons boisés et de bosquets doit être préservées sur tout le territoire communal. Différentes mesures visent ce but :

-          ( ) le regroupement des accès routiers, pour éviter de multiplier les accès privés et préserver les alignements d'arbres et les haies le long des chemins ( ).

Traitement qualitatif des limites

Le long des chemins possédant un caractère paysager affirmé par la présence de rideaux d'arbres majeurs, la limite entre les parcelles privées et le domaine public doit être traitée de façon à préserver leur caractère paysager et à garantir une transition de qualité entre l'espace privé et l'espace public ( ).

Limitation de l'occupation du sol

Pour éviter une trop forte imperméabilisation du sol et préserver des espaces ouverts libres de construction, l’occupation du sol doit être limitée. Dans ce but, diverses mesures sont prévues :

-          la mutualisation du stationnement, afin d'optimiser l'occupation du sol et de préserver les espaces verts ;

-          le regroupement des accès, pour éviter les trouées dans les haies et préserver les alignements d'arbres ;

-          la limitation des constructions en sous-sol ».

Ainsi, afin d’éviter une multiplication des accès privés pour préserver les haies bocagères et les cordons boisés ainsi que pour limiter l'imperméabilisation du sol, un seul accès était autorisé par parcelle (B5.2), pour préserver des surfaces de pleine terre et minimiser l'imperméabilisation des sols, en complément à l'art. 59 § 8 et 9 LCI, il était demandé que, pour tout projet situé sur une parcelle de moins de 2'000 m2 les constructions en sous-sol ne dépassent pas la projection des bâtiments hors-sol, à l'exception d'éléments ponctuels nécessités par les contraintes techniques ou de fonctionnement (B7.1), pour assurer que les constructions participent à préserver le caractère harmonieux du quartier, les bâtiments devaient respecter par leur volumétrie et leur implantation sur la parcelle, le caractère du quartier, notamment en termes de longueur de façade et de gabarit exposés à la vue (B10.1) et, lorsque de nouvelles constructions étaient de nature à porter atteinte au caractère ou à l'harmonie du quartier par leur volume ou implantation, la commune pouvait exiger la pose de gabarits (B10.3).

5.             Par décision du 23 août 2021, le département a délivré l'autorisation de construire DD 3______ sollicitée laquelle a été publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du même jour.

6.             Par courrier du même jour, le département a exposé à la commune les motifs pour lesquelles le projet était autorisé, nonobstant ses préavis défavorables.

Il se référait en particulier aux préavis favorables du SPI et de la CA.

7.             Par acte du 22 septembre 2021, agissant sous la plume d’un conseil, la commune a formé recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre l’autorisation précitée, concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation.

Elle avait achevé la révision de son PDCom en avril 2018, laquelle avait abouti à l'élaboration d'une stratégie précise quant à l'évolution souhaitée de sa zone 5. Cette dernière avait fait l'objet d'un contrôle technique auprès des différents services de l'Etat, notamment auprès de la CA et de l'office de l'urbanisme, lesquels n’avaient pas émis de remarques. Le Conseiller d'Etat en charge du département lui avait en outre confirmé l'ouverture d'une période de test de l'application de cette stratégie dans le cadre de l'instruction des requêtes en autorisation de construire de la zone 5.

Le PDCom fixait des conditions à la densification de type A, devant obligatoirement être respectées, et de type B, devant être respectées dans leur principe mais dont le détail pouvait exceptionnellement être négocié en raison du contexte particulier.

En l’espèce, les conditions B5.2, B7.1, B10.1 et B10.3 n’avaient, en particulier, pas été prises en compte par le département. Pareillement, ce dernier n’avait pas analysé le projet à la lumière des critères posés par le Guide. L’autorisation devait dès lors être annulée, les autorités étant tenues de respecter les PDCom chaque fois que la loi leur accordait une marge d'appréciation, comme en l’espèce, s’agissant de l'octroi d’une autorisation dérogatoire. En substance, le projet posait les problématiques suivantes, qui se recoupaient partiellement :

-          Le sous-sol projeté avait une emprise démesurée et contenait des pièces éclairées par de nombreuses fenêtres et baies vitrées, avec des fonctions à la fois sportives (salle de sport, salle de massage), artistiques (atelier brico, atelier peinture) et de loisir (cinéma, salle de jeux). Une telle surabondance de locaux paraissait peu justifiée pour le logement desservi. Cette suroccupation du sous-sol avait pour conséquences un débordement du sous-sol de 36 m2 hors projection du bâtiment en surface (cf. point B7.1 du PDCom) et un étalement des aires de stationnement et de circulation en surface, ce qui péjorait la qualité des extérieurs et influait considérablement sur l’indice de verdure (IVER). Enfin, la réalisation d'un parking souterrain (au moins partiellement) aurait permis d'économiser des nombreuses surfaces en pleine terre.

-          Le projet querellé prévoyait la présence de deux accès, situés aux deux extrémités de la parcelle, alors même que le point B5.2 du PDCom en préconisait un seul par parcelle, dans le but de regrouper les accès et de mutualiser le stationnement. Cela engendrerait une « stérilisation » du rapport à la rue, non conforme au principe de traitement qualitatif des limites.

-          D'une manière plus générale, l'implantation, le volume et le gabarit des constructions projetées nuisaient au caractère harmonieux du quartier. L'étalement du projet impliquait en outre la création de couverts à garage, d'une piscine, d'une terrasse et d'un pool-house, avec pour conséquence une réduction importante des surfaces en pleine terre mettant à mal l'objectif communal d'éviter une trop forte imperméabilisation du sol et de préserver des espaces libres de construction.

Ces divers points avaient été développés dans ses préavis, complets et motivés contrairement à ceux des autres instances consultées. Dans le cadre de l'octroi d'une dérogation, il convenait de ne pas minimiser son préavis, lequel était obligatoire.

La décision violait également l'art. 59 al. 4 LCI étant rappelé qu’il convenait de se référait au Guide pour examiner si l'octroi d'une dérogation au sens de cette disposition était justifiée. En l'espèce, la problématique du stationnement avait été totalement éludée du préavis de la CA, et, plus généralement, des diverses instances de préavis. La CA s'était limitée à constater que le principe de surélévation préserverait les espaces vides et la surface végétale, sans autre précision. Or, le projet impliquait également une extension souterraine et latérale du bâtiment, de même que de nombreuses aires de circulation, stationnement, patios, piscine, etc. Il en résultait un IVER sensiblement réduit à l'échelle de la parcelle, lequel faisait partie intégrante des objectifs de densification qualitative en zone 5.

Le calcul de l'IVER effectué par l'architecte du requérant était erroné. L'erreur était manifeste et importante, puisque l'IVER du projet n'était pas de 56,80 % mais de 47 %. Elle touchait en outre des espaces qui auraient pu rester libres de toute construction avec un projet modifié (réalisation d'un parking souterrain et diminution de la taille des patios notamment).

Le projet litigieux avait été déposé à une époque où le Guide et le PDCom en devenir empêchaient logiquement la délivrance de l'autorisation querellée. Au stade de la décision, le PDCom était entré en force.

8.             Dans ses observations du 26 novembre 2022, le département a conclu au rejet du recours sous suite de frais et dépens.

En préambule, la requête ayant été déposée le 10 mai 2019, c'était l'art. 59 LCI dans sa teneur d'avant la modification entrée en vigueur le 28 novembre 2020, qui s'appliquait au cas d'espèce (ci-après : aLCI).

La recourante lui faisait grief d'avoir violé l’art. 59 al. 4 aLCI pour avoir, d’une part, ignoré, lors de la pesée globale des intérêts auquel il avait procédé, sa stratégie de planification territoriale, et, d’autre part, considéré à tort, que le projet respectait le Guide et que la dérogation de l'art. 59 al. 4 aLCI se justifiait.

Elle ne saurait être suivie. La stratégie de planification communale avait été prise en compte, comme cela ressortait d’ailleurs de son courrier du 23 août 2021 à son intention. Cela étant, les PDCom ne pouvaient, à eux seuls, faire opposition à l'application du droit cantonal, respectivement à un projet de construction conforme, comme en l'espèce, aux normes de la zone 5. Cela valait à fortiori pour sa stratégie précitée. Dans le cadre de la pesée globale des intérêts, il fallait en effet non seulement tenir compte du plan directeur, considéré comme le résultat obligatoire du processus de coordination spatiale (« räumlichen Abstimmungsprozesses ») du point de vue de la collectivité publique, mais aussi des intérêts publics ne relevant pas de l'aménagement du territoire et des intérêts privés. Au niveau cantonal, le respect des plans directeurs était assuré par le SPI, lequel, en l’espèce, avait préavisé favorablement le projet, le 16 décembre 2019, constatant que les éléments exposés dans le formulaire de demande d’application de l’art. 59 al. 4 aLCI étaient conformes à l'objectif de densification qualitative, tout en assortissant son préavis de conditions, qu’il avait considéré comme remplies, en rendant un nouveau préavis favorable le 20 décembre 2020.

Dans son courrier, il avait pour le surplus expliqué les raisons pour lesquelles il avait choisi de donner la prépondérance aux préavis des autres instances consultées (notamment la CA et le SPI) ainsi qu'à l'intérêt privé du requérant à réaliser le projet au détriment de la position de la recourante. Au surplus, les critères du PDCom que la recourante énumérait dans son recours étaient de type B, soit des critères qui devaient être respectés dans leur principe mais pouvaient être adaptés au contexte particulier et négociés.

S'agissant tout d'abord de l'emprise du terrain par le projet, elle n'était en réalité que faible puisque le débordement ne représentait que 36 m2, soit 11,50 % de la surface totale du sous-sol (36m2 / 312.50m2 = 11.50 %), ou encore 2,45 % de la surface totale de la parcelle (36m2 / 1’468m2 = 2.45 %). Par ailleurs, les conditions de l'art. 59 al. 9 LCI étaient respectées, puisque la surface du sous-sol correspondait à 21.30 % de la surface totale de la parcelle, comme confirmé par les préavis favorables de la DAC.

La recourante prétendait que l'emprise du sous-sol aurait pour conséquence un étalement des aires de stationnement et de circulation en surface, ce qui péjorerait la qualité des extérieurs et influerait considérablement sur IVER, sans préciser en quoi le projet nuirait au traitement qualitatif des limites selon son PDCom. A cet égard, le projet prévoyait la plantation de haie indigène et d'une végétation basse de vivaces et graminées en limite de propriété, notamment le long du chemin C______, ce qui répondait d'ailleurs à l'une des demandes du SPI. Par ailleurs, l'exploitation en hauteur des bâtiments, pour éviter un étalement des constructions et préserver des espaces non-bâtis, faisait également partie des principes énoncés par le PDCom au titre de limitation de l'occupation du sol (cf. p. 38 du rapport explicatif). La CA soulignait en outre, dans son préavis du 18 juin 2019, que la surélévation projetée permettait de préserver les espaces "vides" et les surfaces végétales. Les reproches de la recourante étaient ainsi contredits par pas moins de deux instances spécialisées. Le fait que d'autres choix auraient été possibles, tel que la réalisation d'un parking souterrain, relevait enfin de l'opportunité, que les autorités judicaires ne revoyaient pas.

S’agissant des deux accès prévus à la parcelle depuis le chemin C______, qui contrediraient le point B5.2 du PDCom, l’objectif visé par ce dernier (regroupement / optimisation des accès, cf. p. 46 du rapport explicatif) était d'éviter une multiplication des accès privés pour préserver les haies bocagères et les cordons boisés ainsi que pour limiter l'imperméabilisation du sol. Or, ces deux accès étaient précisément prévus afin de maintenir l'allée de chênes. En outre, l'espace voué à la circulation situé entre la construction et la rue était nécessaire puisque l'OCT avait requis, dans son préavis du 13 juin 2019, un dimensionnement suffisant des espaces de circulation permettant d'accéder aux places de stationnement pour permettre les manœuvres demi-tour des véhicules sur la propriété privée.

La recourante affirmait enfin que le projet irait à l'encontre de l'objectif poursuivi par les mesures énoncées sous chiffre B10 de son PDCom (cf. p. 48 du rapport explicatif) en tant qu'il nuirait au caractère harmonieux du quartier. Son propos, non étayé, était contredit par les préavis favorables des 5 novembre 2019 et 13 avril 2021 de la CA qui avait considéré que le projet était conforme au caractère et à l'harmonie du quartier, après modifications. Cette instance avait en outre validé le principe de surélévation du projet qui permettait de préserver les espaces "vides" et la surface végétale, étant rappelé que ses préavis favorables n’avaient, sauf exception non réalisée en l'espèce, pas besoin d'être motivés.

Tant le SPI que la CA avaient ainsi procédé à une analyse approfondie du projet et de sa conformité à la planification territoriale, respectivement au caractère, à l'harmonie et à l'aménagement du quartier. A cet égard, la CA s'appuyait sur la méthode transversale par critères définie dans le Guide (cf. pp. 20ss).

Dans un second grief, la recourante soutenait qu’il aurait violé l'art. 59 al. 4 aLCI au motif qu'il n'aurait pas suivi les lignes directrices proposées par le Guide. Les places de stationnement autorisées selon le projet ne suivraient pas les pistes de réflexion proposées dans ce dernier et la CA n'aurait en particulier pas examiné la question de l'IVER.

Elle ne pouvait être suivie. Tout d’abord, comme rappelé ci-dessus, le projet prévoyait deux accès afin de maintenir l'allée de chênes. Le dédoublement des accès poursuivait ainsi un intérêt public, soit la préservation de la végétation, défendu tant par le PDCom que par le Guide.

Pour le surplus, si le Guide préconisait d'optimiser l'implantation des espaces de stationnement par rapport au projet (p. 38), il ne recommandait pas de favoriser le stationnement souterrain pour une parcelle ayant une surface inférieure à 1500 m2, comme en l’espèce. La lecture du plan du rez-de-chaussée visé ne varietur permettait au demeurant de voir que l'implantation des places de stationnement avait été optimisée puisqu'elles se situaient le long du bâtiment ainsi que sur ses côtés, ce qui permettait de préserver de grands espaces de verdure à l'arrière du bâtiment ainsi qu'à l'avant. Les aires de circulation étaient en outre mutualisées entre, d’une part, les places P1, P2 et P7, et d'autre part, les places P6, P5, P3 et P4, et limités aux angles Nord et Nord-Ouest de la parcelle. La surface de la desserte était d'environ 150 m2, soit 10 % de la surface totale de la parcelle, ce qui ne pouvait être considéré comme excessif, sachant qu'il s'agissait de surfaces perméables.

Quant au stationnement en barrière que le guide préconisait d'éviter, ce critère visait à décourager l'aménagement de places de stationnement contre l'espace public, afin de permettre le rebroussement sur la parcelle et d'éviter ainsi les sorties en marche arrière sur les voies de dessertes. Or, en l’espèce, les places de stationnement prévues par le projet étaient précisément placées en retrait du domaine public, ce qui permettait également de préserver l'aspect visuel depuis ce dernier. Le projet prévoyait en outre, conformément à la remarque émise par l'OCT dans son préavis favorable du 13 juin 2019, un espace de circulation suffisant pour que les manœuvres de demi-tour puissent être exécutées à l'intérieur du périmètre de la parcelle.

Le grief relatif au calcul de l’IVER était infondé. Dans la mesure où la surface des patios serait engazonnée et composée de pleine terre, sans construction en sous-sol, c'était à juste titre que le mandataire l'avait comptée dans les surfaces vertes en pleine terre. Les surfaces de circulation n’avaient pas, à la lecture des plans, été comptées comme telles. Quant aux places de stationnement n° P6 et P7 et places pour vélos, leur surface totale n'était que d'environ 37.75 m2 (soit respectivement 14.15 et 23.60 m2 pour les places de stationnement P 7 et P6). A supposer que leur surface doive être supprimée du calcul de la surface en pleine terre, cette dernière s'élèverait alors à un total de 763.25 m2, qui correspondrait à environ 52 % de la parcelle, soit toujours plus de la moitié de la surface totale de celle-ci. La différence minime par rapport au calcul du mandataire du projet (56.80 %) ne saurait dès lors remettre en cause l'évaluation de la CA, cette dernière préconisant d'ailleurs, de manière générale, une densité de la végétation de plus ou moins 40 % en zone 5.

Le projet autorisé suivait ainsi parfaitement les lignes directrices prévues par le Guide. Il avait pour le surplus procédé à une pesée globale des intérêts en cause sans excéder, ni abuser de son pouvoir d'appréciation dans l'application de l'art. 59 al. 4 aLCI.

9.             Dans ses observations du même jour, sous la plume de son conseil, M. B______ a conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision du 23 août 2021, sous suite de frais et dépens.

Le projet avait fait l'objet d'une réflexion architecturale approfondie afin de l'intégrer dans le quartier et de garantir une surface verte maximale. Il respectait les gabarits de la zone 5. Le choix de l'habitat groupé permettait la réalisation de deux logements supplémentaires – afin de loger des membres de sa famille - tout en limitant l'emprise du bâtiment sur la parcelle et évitait également un morcellement de cette dernière. L'implantation du bâtiment conservait la logique d'implantation de la majorité des habitations du quartier, lesquelles se situaient en retrait des limites parcellaires. L'attique était prévu en retrait des façades pour diminuer l'impact visuel global. Il serait au demeurant caché par la végétation (couronne des arbres), de sorte qu'il n'aurait pas d'incidence sur l'harmonie du quartier. Le garage était séparé du bâti pour alléger la façade. Le sous-sol, à l'exception du local technique de la piscine (environ 35 m2), se situait entièrement sous l'emprise du bâtiment.

S’agissant des aménagements extérieurs, une surface en pleine terre conséquente, soit plus de 50 % était maintenue et l'actuel revêtement en goudron étanche permettant l'accès à la villa serait remplacé par un matériau perméable. Ainsi, seul 28 % de la surface de la parcelle était imperméable. L'allée de chênes en bordure du chemin C______ était préservée. Seuls trois arbres seraient abattus et sept arbres indigènes seraient replantés sur la parcelle pour une valeur compensatoire de CHF 7'000.-. En outre, conformément aux exigences de l'OCAN, des mesures seraient prises pour préserver les arbres, respectivement les protéger pendant le chantier. Les toitures du garage et du pool house ainsi qu'une partie du toit de l'habitat groupés seraient végétalisées. Le projet préservait ainsi l'identité visuelle du quartier et le caractère arboré du chemin.

La création d’un deuxième accès à la parcelle depuis le chemin privé voisin s'était imposée compte tenu de la nécessité de maintenir l'allée de chêne et l'implantation de la villa existante. Il permettait aussi d'éviter que les voitures ne circulent devant le bâtiment ou un stationnement en barrière sur l'espace public, l'espace entre la rue et le bâti étant occupé principalement par l'allée de chênes accompagnée d'une haie vive indigène de basse hauteur, d'un espace de verdure en pleine terre et d'un accès piéton au bâtiment. Dès lors que le nouvel accès utilisait le chemin privé d'accès à la villa voisine, l'emprise de l'espace dédié à la circulation sur la parcelle était limitée et cela évitait de créer un deuxième débouché direct sur le chemin C______. Seules sept places de stationnement, soit le nombre minimum exigé, étaient prévues.

Au fond, s’agissant tout d’abord du PDCom, il n’avait pas force obligatoire à son encontre. En tout état, concernant le sous-sol, le débordement hors projection du bâtiment n'était que d'environ 35 m2, soit une faible surface, et cette solution s'était imposée du fait qu'il s'agissait du local technique de la piscine qui devait se situer à proximité de celle-ci. Il avait en outre modifié son projet et réduit la taille du sous-sol de 10 m2 pour répondre aux exigences de la commune en la matière. Une importante surface en pleine terre était par ailleurs conservée. Il s’étonnait que la commune exige un stationnement souterrain alors même qu’elle estimait que la surface du sous-sol était trop importante. Sa volonté allait de surcroit à l'encontre de son PDCom qui indiquait qu'un parking sous-terrain ne devait être prévu qu'à partir de dix places.

Concernant les accès, le projet reprenait celui existant sur le chemin C______ qui constituait le seul accès direct sur ledit chemin. Le second accès débouchait sur le chemin privé voisin qui avait été mutualisé d'entente entre les propriétaires (création d'une servitude de passage). Le portail serait en retrait de 4 m par rapport au chemin C______. Cette solution avait été choisie de manière à préserver la végétation existante sur la parcelle et des solutions constructives élaborées en collaboration avec l'OCAN seraient mises en œuvre à cette fin. La construction d'un parking en sous-sol, si tant était qu’il fut techniquement réalisable, aurait eu un impact nettement plus important sur la végétation, en condamnant l'allée de chênes et en augmentant les surfaces de circulation. La réalisation de la rampe aurait également considérablement imperméabilisé la parcelle puisqu'un revêtement filtrant n’aurait pu être apposé. Ainsi, le choix effectué évitait que l'espace entre la construction et le chemin C______ soit voué à la circulation et au stationnement et permettait de le maintenir en pleine terre avec un cheminement piéton bordé par l'allée de chênes accompagnée d'une haie vive indigène de basse hauteur.

Il contestait la prétendue "stérilisation" du rapport à la rue. Alors que l'ensemble des propriétaires du quartier avaient cloisonné leur parcelle par des clôtures ou des barrières végétales opaques, il avait au contraire choisi de ne pas dénaturer le rapport entre rue et propriété le long du chemin C______ en conservant une clôture légère et basse habillée de plantations permettant le passage de la petite faune, conformément au plan guide.

Enfin, contrairement à ce que prétendait la commune, le projet s'intégrait parfaitement dans le quartier, ce que confirmaient les préavis de la CA, étant relevé que rien dans le dossier ne laissait supposer qu’elle ou les autres instances de préavis n'auraient pas pris en considération la stratégie communale à l'échelle du quartier. A cet égard, le SPI, chargé du respect des plans directeurs, avait d’ailleurs expressément requis une modification du projet (prolongement des haies bocagères le long du chemin) afin qu'il respecte la stratégie de densification de la commune. La préservation des alignements de chênes, le renouvellement des haies bocagères et une transition de qualité entre le domaine public et le domaine privé répondaient précisément à la volonté de la commune ressortant de son PDCom et de sa stratégie d'évolution de la zone 5.

En réalité, la commune s'opposait à la création d'un habitat groupé sur sa parcelle et à la densification du secteur, pourtant déjà fortement développé, alors même que le projet respectait les gabarits de la zone 5 et s'inscrivait pleinement dans l'objectif de densification de la zone villa sans modification prévu par la fiche A04 du PDCn, en favorisant l'habitat individuel groupé. Dans le cadre de la pesée des intérêts qu'il devait effectuer, le département se devait dès lors d’écarter le préavis de la commune pour tenir compte de l'intérêt public à la construction de nouveaux logements et son intérêt privé à développer son projet familial conformément à la législation en vigueur vu sa compatibilité avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier et n’avait en conséquence pas abusé de son pouvoir d'appréciation en délivrant l'autorisation de construire sollicitée qui devait être confirmée.

10.         La commune a répliqué en date du 5 janvier 2022, persistant intégralement dans ses conclusions.

Sa stratégie de densification qualitative de sa zone 5 était quasi systématiquement ignorée par le département et ses instances de préavis, lors de la délivrance des autorisations de construire.

Ainsi, en l’espèce et malgré ses affirmations, le DT-OAC n'était aucunement en mesure d'indiquer quand et comment la stratégie communale aurait été examinée, en particulier par le SPI, dans le cadre de l'instruction de la DD litigieuse, en violation crasse de l'art. 59 al. 4 aLCI. Pour rappel, le préavis du SPI du 16 décembre 2019 était favorable sous condition de la prise en compte des orientations de la stratégie de densification de la zone villa en vigueur sur la commune. Cela étant, il s’en était remis à la CA pour analyser la conformité du projet aux éléments pertinents de la stratégie communale à l'échelle du quartier, ce qui démontrait que dite conformité n'avait pas fait l'objet d'un examen de sa part. Or, le seul préavis rendu par la CA (qui n’était pas chargée de s'assurer du respect des plans directeurs), postérieurement au 16 décembre 2019, indiquait « le projet répond aux remarques émises dans les divers précédents préavis ». A la suite de ce préavis, le SPI s'était déclaré favorable au projet, sans autre examen. Elle avait pour le surplus détaillé en quoi le projet litigieux n'était pas compatible avec la Guide (p. 12-13 et 18-21) et la stratégie de planification communale (p. 8-12 et 14-18), étant précisé qu’elle n’était pas opposée, par principe, à l'octroi d'une autorisation dérogatoire. C'était enfin précisément la suroccupation du sous-sol à des fins d'agrément qui entraînait un étalement des aires de stationnement et de circulation en surface au détriment de l'aménagement d'un garage souterrain.

11.         Dans sa duplique du 7 février 2022, le département a réitéré avoir fourni toutes les explications nécessaires s’agissant de la prise en compte de la stratégie de planification communale. La délivrance d’autorisation de construire en application de l’art. 59 al. 4 aLCI demeurait de sa compétence exclusive et il lui appartenait de statuer en tenant compte de tous les intérêts en présence. L’examen de l’opportunité de créer un parking en sous-sol n’était pas du ressort du tribunal.

12.         Par duplique du 21 février 2022, sous la plume de son conseil, M. B______ a déploré se retrouver victime d’un conflit entre la commune et le département alors que son projet était conforme à la législation applicable. Il avait adapté son projet afin de répondre aux demandes des instances de préavis et en particulier de la commune.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la LCI (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l'art. 145 al. 2 LCI, la commune du lieu de situation peut recourir contre la délivrance d'une autorisation. La commune a donc la qualité pour recourir contre la décision du département du 23 août 2021 (DD 3______).

4.             Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9).

Commet un excès positif de son pouvoir d'appréciation l'autorité qui exerce son appréciation alors que la loi l'exclut, ou qui, au lieu de choisir entre les deux solutions possibles, en adopte une troisième. Il y a également excès du pouvoir d'appréciation dans le cas où l'excès de pouvoir est négatif, soit lorsque l'autorité considère être liée, alors que la loi l'autorise à statuer selon son appréciation, ou qu'elle renonce d'emblée, en tout ou partie, à exercer son pouvoir d'appréciation (ATF 137 V 71 consid. 5.1 ; 116 V 307 consid. 2 et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 5A_472/2016 du 14 février 2017 consid. 5.1.2 ; 1C_263/2013 du 14 mai 2013 consid. 3.1), par exemple en appliquant des solutions trop schématiques ne tenant pas compte des particularités des cas d'espèce, que l'octroi du pouvoir d'appréciation avait justement pour but de prendre en considération ; on peut alors estimer qu'en refusant d'appliquer les critères de décision prévus explicitement ou implicitement par la loi, l'autorité viole directement celle-ci (cf. Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 514 p. 179).

5.             Les arguments formulés par les parties à l'appui de leurs conclusions respectives seront repris et discutés dans la mesure utile (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_72/2017 du 14 septembre 2017 consid. 4.1 ; 1D_2/2017 du 22 mars 2017 consid. 5.1 ; 1C_304/2016 du 5 décembre 2016 consid. 3.1 ; 1C_592/2015 du 27 juillet 2016 consid. 4.1 ; 1C_229/2016 du 25 juillet 2016 consid. 3.1 et les arrêts cités), étant rappelé que, saisi d'un recours, le tribunal applique le droit d'office et que s'il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, il n'est pas lié par les motifs qu'elles invoquent (art. 69 al. 1 LPA ; cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

6.             Selon l'art. 22 al. 2 let. a de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 juin l979 (LAT - RS 700), une autorisation de construire est délivrée si la construction ou l'installation est conforme à l'affectation de la zone.

7.             La 5ème zone genevoise est une zone résidentielle destinée aux villas (art. 19 al. 3 LaLAT).

8.             Dès que les conditions légales sont réunies, le département est tenu de délivrer l'autorisation sollicitée (art. 1 al. 6 LCI).

9.             A teneur de l'art. 10 al. 1 LaLAT, les PDCom fixent les orientations futures de l'aménagement de tout ou partie du territoire d'une ou plusieurs communes. Le plan directeur localisé adopté par une commune et approuvé par le Conseil d'Etat a force obligatoire pour ces autorités. Il ne produit aucun effet juridique à l’égard des particuliers, lesquels ne peuvent former aucun recours à son encontre, ni à titre principal, ni à titre préjudiciel (art. 10 al. 8 ab initio LaLAT).

10.         Selon la jurisprudence, un projet de construction conforme au droit cantonal ne peut être refusé au seul motif qu’il contreviendrait à un PDCom (arrêt du Tribunal fédéral 1C_257/2013 du 13 janvier 2014 consid. 5.3 ; 1A.154/2002 du 22 janvier 2003). Par « conforme au droit cantonal », il faut entendre conforme au plan d’affectation (« nutzungskonformes Bauvorhaben »). En effet, le refus d’une autorisation au seul motif que le projet de construction contreviendrait au PDCom reviendrait à donner à ce plan directeur un effet anticipé inadmissible et à aboutir à une modification du plan d’affectation en vigueur (arrêt du Tribunal fédéral 1A.154/2002 du 22 janvier 2003 consid. 4.1). Toutefois, il ne faut pas en tirer la conclusion que le plan directeur ne serait d’aucune importance dans le cadre d’une autorisation de construire. L’effet obligatoire d’un tel plan se déploie là où l’ordre juridique confère un pouvoir d’appréciation ou introduit des concepts juridiques indéterminés ménageant de la sorte une marge de manœuvre. Si le droit applicable exige une pesée globale des intérêts, alors le contenu du plan directeur doit être considéré, dans la pesée des intérêts, comme le résultat obligatoire du processus de coordination spatiale (« räumlichen Abstimmungsprozesses »), étant précisé que le plan directeur n’exprime les besoins spatiaux que du point de vue de la collectivité publique. Reste réservée la pesée des intérêts qui doit être faite dans un cas particulier en prenant aussi en compte les intérêts publics qui ne relèvent pas de l’aménagement du territoire, ainsi que les intérêts privés. Le plan directeur s’impose aux seules autorités chargées des tâches dont l’accomplissement a des effets sur l’organisation du territoire, et non aux autorités judiciaires, qui ont pour fonction d’examiner la légalité des actes étatiques (arrêt du Tribunal fédéral 1A.154/2002 du 22 janvier 2003 consid. 4.2 ; ATA/639/2020 du 30 juin 2020 consid. 5c ; ATA/1038/2019 du 18 juin 2019 consid. 9).

11.         Les al. 1, 4 et 5 de l’art. 59 LCI ont été modifiés le 1er octobre 2020 ; par ailleurs des al. 3bis, 4bis, 4ter ont été introduits à la même date. Ces modifications sont entrées en vigueur le 28 novembre 2020.

12.         Selon l’art. 156 LCI qui traite des dispositions transitoires, l’art. 59 al. 3bis, 4 et 5, dans leur teneur du 1er octobre 2020, s’appliquent aux demandes d’autorisation déposées après leur entrée en vigueur.

13.         En l’espèce, la demande d'autorisation de construire a été déposée le 10 mai 2019. Ce sont donc les dispositions dans leurs anciennes teneurs qui s’appliquent.

14.         L’art. 59 LCI, dans sa version applicable en l’espèce (ci-après : aLCI), relatif au rapport des surfaces, dispose qu'en cinquième zone, la surface de la construction, exprimée en m2 de plancher (soit la surface brute de plancher de la totalité de la construction hors sol ; cf. art. 59 al. 2 aLCI), ne doit pas excéder 25% de la surface de la parcelle ; cette surface peut être portée à 27,5% lorsque la construction est conforme à un standard de haute performance énergétique, respectivement à 30% lorsque la construction est conforme à un standard de très haute performance énergétique, reconnue comme telle par le service compétent (al. 1). Lorsque les circonstances le justifient et que cette mesure est compatible avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier, le département peut autoriser, après consultation de la commune et de la CA, un projet de construction en ordre contigu ou sous forme d'habitat groupé dont la surface de plancher habitable n'excède pas 40% de la surface du terrain, 44% lorsque la construction est conforme à un standard de haute performance énergétique, et 48% lorsque la construction est conforme à un standard de très haute performance énergétique, reconnue comme telle par le service compétent (al. 4 let. a).

15.         Selon l’art. 59 al. 8 LCI, la surface des constructions en sous-sol, exprimée en m2 de plancher brut, ne doit pas excéder la surface de plancher hors sol qui peut être autorisée en application de l’al 1.

16.         En vertu de l’art. 59 al. 9 LCI, dans tous les cas, la surface du sous-sol, y compris celle du sous-sol des constructions de peu d’importance, ne peut excéder le 20% de la surface de la parcelle. Cette surface peut être portée à 22% lorsque la construction est conforme à un standard de haute performance énergétique, respectivement à 24% lorsque la construction est conforme à un standard de THPE, reconnue comme telle par le service compétent.

17.         L'art. 59 al. 4 let. a aLCI est issu d'une modification législative qui visait à promouvoir une utilisation plus intensive du sol en cinquième zone à bâtir, de façon à répondre à la crise du logement sévissant à Genève (cf. ATA/1273/2017 du 12 septembre 2017 consid. 11c ; ATA/1460/2017 du 31 octobre 2017 consid. 2d). Le législateur a eu conscience de cette évolution et a souhaité encourager la réalisation de ces nouvelles formes d'habitat (groupé ou en ordre contigu), lorsqu'il a augmenté les indices d'utilisation du sol dérogatoires susceptibles d'être appliqués dans cette zone. Il a considéré cette évolution comme une réponse utile et nécessaire par rapport aux problèmes de l'exiguïté du territoire et de la pénurie de logements, manifestant sa volonté d'appliquer l'art. 59 al. 4 let. a aLCI partout où les dérogations prescrites pourraient avoir lieu (cf. ATA/1485/2017 du 14 novembre 2017 consid. 8d ; ATA/828/2015 du 11 août 2015 consid. 8b, confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_476/2015 du 3 août 2016).

18.         La première condition imposée par l'art. 59 al. 4 let. a aLCI, soit le caractère justifié des circonstances, relève de l'opportunité, que le tribunal ne peut pas contrôler, alors que la seconde, relative à la compatibilité du projet, pose des critères relatifs à l'esthétique et à l'aménagement du territoire, conférant un large pouvoir d'appréciation à l'autorité compétente, qui doit s'exercer dans le cadre légal. Cette deuxième condition relevant ainsi non pas de l'opportunité, mais de l'exercice d'un pouvoir d'appréciation, le tribunal est habilité, selon l'art. 61 al. 1 let. a LPA, à en sanctionner l'excès ou l'abus (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1P.50/2003 du 27 mars 2003 consid. 2.2 et les références citées ; ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3c).

19.         La compatibilité du projet avec le caractère, l'harmonie et l'aménagement du quartier exigée par l'art. 59 al. 4 aLCI est une clause d'esthétique, analogue à celle contenue à l'art. 15 LCI. Une telle clause fait appel à des notions juridiques imprécises ou indéterminées, dont le contenu varie selon les conceptions subjectives de celui qui les interprète et selon les circonstances de chaque cas d'espèce ; ces notions laissent à l'autorité une certaine latitude de jugement. Lorsqu'elle estime que l'autorité inférieure est mieux en mesure d'attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, l'autorité de recours s'impose une certaine retenue. Il en va ainsi lorsque l'interprétation de la norme juridique indéterminée fait appel à des connaissances spécialisées ou particulières en matière de comportement, de technique, en matière économique, de subventions et d'utilisation du sol, notamment en ce qui concerne l'esthétique des constructions (ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3d ; ATA/639/2020 du 30 juin 2020 consid. 4c ; ATA/45/2019 du 15 janvier 2019 consid. 5b).

20.         Il convient de relever en outre que l'art. 59 al. 4 aLCI trouve un écho dans l'actuelle planification cantonale.

21.         Le PDCn 2030, adopté le 20 septembre 2013 par le Grand Conseil et approuvé par le Conseil fédéral le 29 avril 2015, veille notamment à la mise à disposition des surfaces nécessaires pour répondre aux besoins de logement. Sa fiche A04, intitulée « Favoriser une utilisation diversifiée de la zone villas », a pour objectif la poursuite de la densification sans modification de zone de la zone villas en favorisant l'habitat individuel groupé. Elle préconise, aux abords de l'agglomération dense, de maintenir la majeure partie de la zone villas, tout en accentuant sa densification, afin de mieux répondre aux besoins pour ce type d'habitat. Ainsi, en excluant les secteurs relevant de la protection du patrimoine et des sites, où une faible densité doit être maintenue, la densification de la 5ème zone villas sans modification de zone doit se faire par application d'indices d'utilisation du sol plus élevés, de façon différenciée en fonction des caractéristiques du site et du contexte urbain. Ladite fiche précise qu'il s'agit d'une diversification des types de logements et des morphologies urbaines au moyen d'une meilleure utilisation des zones villas et du sol.

22.         Sous le chapitre "densité et règles de construction" cette fiche indique : "En zone villas, l'indice d'utilisation du sol peut aujourd'hui légalement et moyennant certaines conditions monter jusqu'à 0,4 (0,48 en cas de très haute performance énergétique) et 0,5 pour une parcelle supérieure à 5'000 m2 (0,6 en cas de très haute performance énergétique). Il s'agit de viser plus systématiquement une telle densité, voire une densité plus élevée dans les parcelles de grande taille, sous certaines conditions. L'indice d'emprise au sol pourrait être substitué à la notion de densité, afin de favoriser la perméabilité du sol et le maintien du maillage vert".

23.         Avant d'autoriser un projet de construction en cinquième zone, dont la densité correspond à celle prévue par l'art. 59 al. 4 let. a aLCI, le département doit cependant recueillir les préavis de la CA et de la commune du lieu de situation.

24.         Il ressort des travaux préparatoires que le législateur a été confronté à la question de soumettre également la densification prévue par la lettre a de l'art. 59 al. 4 aLCI à l'accord de la commune, exprimé sous forme de délibération municipale, comme cela est prévu pour le cas de figure de la lettre b de cette norme. Il y a répondu négativement considérant que dans l'hypothèse de l'art. 59 al. 4 let. a aLCI, la nécessité d'obtenir un tel accord de la commune compromettrait l'objectif de densification poursuivi par cette disposition (ATA/1301/2019 du 27 août 2019 consid. 8 et les références citées).

25.         Dans le système de la LCI, les avis ou préavis des communes, des départements et organismes intéressés ne lient pas les autorités (art. 3 al. 3 LCI). Ils n'ont qu'un caractère consultatif, sauf dispositions contraires et expresses de la loi ; l'autorité reste ainsi libre de s'en écarter pour des motifs pertinents et en raison d'un intérêt public supérieur. Toutefois, lorsqu'un préavis est obligatoire, il convient de ne pas le minimiser. Dans le système prévu par l'art. 59 al. 4 let. a aLCI, tant le préavis de la commune - exprimé sous forme de préavis rendu par l'exécutif municipal (art. 48 let. h et 30 al. 1 let. s a contrario de la loi sur l'administration des communes du 13 avril 1984 - LAC - B 6 05) - que celui de la CA ont cette caractéristique (ATA/498/2020 du 19 mai 2020 consid. 4b). Il n'en demeure pas moins que la délivrance de telles autorisations de construire demeure de la compétence exclusive du DT, à qui il appartient de statuer en tenant compte de tous les intérêts en présence (ATA/259/2020 du 3 mars 2020 consid. 4b).

26.         C'est le lieu de rappeler, s'agissant de la motivation d'un préavis, que la règle générale veut qu'un préavis sans observation équivaille à un préavis favorable (ATA/778/2014 du 30 septembre 2014 consid. 3c et jurispr. cit.). Il arrive que des exigences de motivations plus élevées soient posées pour des préavis positifs, mais il s'agit de situations spéciales où l'application de la loi requiert une pesée particulièrement soignée des intérêts en présence (ATA/718/2012 du 30 octobre 2012 consid. 8). La jurisprudence a aussi précisé qu'il importe peu qu'un préavis soit succinctement motivé, dans la mesure où la position de l'autorité de préavis et les arguments de caractère architectural et esthétique qui la motivent peuvent être établis lors de l'instruction du recours (ATA/72/2007 du 20 février 2007, consid. 5b), ce qui vaut à plus forte raison lorsque cette position et ces arguments découlent des demandes de modification du projet formulées par l'autorité de préavis.

27.         Selon une jurisprudence bien établie, chaque fois que l'autorité inférieure suit les préavis requis, la juridiction de recours doit s'imposer une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des entités ayant formulé un préavis dans le cadre de l'instruction de la demande d'autorisation, pour autant que l'autorité inférieure ait suivi l'avis de celles-ci. Elle se limite à examiner si le département ne s'est pas écarté sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l'autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d'émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3e ; ATA/639/2020 du 30 juin 2020 consid. 4d ; ATA/875/2018 du 28 août 2018 consid. 5b; ATA/1274/2017 du 12 septembre 2017 consid. 5).

28.         Ainsi, en particulier, lorsque la consultation de la CA est imposée par la loi, l'autorité de recours observe une certaine retenue dans son pouvoir d'examen lorsque le DT a suivi son préavis ; en effet, la CA, composée essentiellement de spécialistes, est plus à même de prendre position sur des questions qui font appel aux connaissances de ces derniers qu'une instance composée de magistrats (cf. not. ATA/1186/2017 du 22 août 2017 consid. 6c ; ATA/521/2017 du 9 mai 2017 consid. 5e et les références citées ; ATA/442/2015 du 12 mai 2015 consid. 5c ; ATA/634/2014 du 19 août 2014 consid. 6 ; ATA/720/2012 du 30 octobre 2012 consid. 10, confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_635/2012 du 5 décembre 2013 ; ATA/385/2011 du 21 juin 2011 consid. 4b, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 1C_362/2011 du 14 février 2012).

29.         L'autorité administrative jouit d'un large pouvoir d'appréciation dans l'octroi de dérogations. Cependant, celles-ci ne peuvent être accordées ni refusées d'une manière arbitraire. Tel est le cas lorsque la décision repose sur une appréciation insoutenable des circonstances et inconciliable avec les règles du droit et de l'équité et se fonde sur des éléments dépourvus de pertinence ou néglige des facteurs décisifs. Quant aux autorités de recours, elles doivent examiner avec retenue les décisions par lesquelles l'administration accorde ou refuse une dérogation. L'intervention des autorités de recours n'est admissible que dans les cas où le département s'est laissé guider par des considérations non fondées objectivement, étrangères au but prévu par la loi ou en contradiction avec elle. Les autorités de recours sont toutefois tenues de contrôler si une situation exceptionnelle justifie l'octroi de ladite dérogation, notamment si celle-ci répond aux buts généraux poursuivis par la loi, qu'elle est commandée par l'intérêt public ou d'autres intérêts privés prépondérants ou encore lorsqu'elle est exigée par le principe de l'égalité de traitement, sans être contraire à un intérêt public (ATA/1600/2019 du 29 octobre 2019 consid 6a).

30.         Selon une jurisprudence constante, s'ils sont favorables, les préavis de la CA n'ont, en principe, pas besoin d'être motivés (ATA/285/2021 du 2 mars 2021 consid. 6, confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_204/2021 du 28 octobre 2021 ; ATA/1075/2020 du 27 octobre 2020 consid. 5 ; ATA/724/2020 du 4 août 2020 consid. 3g ; ATA/37/2020 du 14 janvier 2020 consid. 5e ; ATA/1299/2019 du 27 août 2019 consid. 4 ; ATA/414/2017 du 11 avril 2017, confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 1C_297/2017 du 6 décembre 2017, spéc. consid. 3.4.2).

À ce sujet, le tribunal retient que l’art. 59 al. 4 LCI n'oblige pas la CA à motiver ses préavis sous l’angle des multiples critères d’après lesquels il est possible d’analyser l’intégration d’un projet dans son environnement, sauf à rendre son travail excessivement lourd, voire à paralyser son fonctionnement. Cela n’aboutit pas pour autant à l’opacité du dossier, puisque, d’une part, la motivation des préavis peut découler de manière plus ou moins explicite des demandes et remarques émises par l’instance concernée en vue de modification du projet et que, d’autre part, si les circonstances paraissent le justifier, cette instance peut être invitée à donner des explications détaillées en procédure contentieuse (cf. not. JTAPI/302/2021 du 25 mars 2021, confirmé par ATA/896/2021 du 31 août 2021 ; JTAPI/920/2020 du 28 octobre 2020 ; JTAPI/604/2019 du 26 juin 2019).

31.         En juin 2017, la direction de la planification cantonale et régionale du département a adopté le Guide, destiné « simultanément au canton, qui planifie, aux instances cantonales, qui préavisent et autorisent, aux communes, qui planifient et préavisent aussi, et, enfin, aux requérants (propriétaires, architectes, promoteurs) qui conçoivent et réalisent les projets conformément aux planifications validées et en vertu de l'autorisation de construire qui leur est délivrée » (p. 5 ; cf. aussi p. 12 s.), afin, notamment, de « préciser quelles sont les conditions à remplir pour envisager l'obtention de la dérogation porteuse de droits à bâtir supplémentaires » prévue par l'art. 59 al. 4 aLCI (p. 5).

32.         Conformément au préambule de ce guide, ce dernier a notamment pour but de « proposer une méthode permettant de formuler et partager des règles du jeu, afin d'optimiser la densification actuellement à l'œuvre dans la zone 5, formuler des recommandations de planification à l'attention des communes, spécifiques à l'évolution de leur zone 5, en complément aux directives pour l'élaboration des plans directeurs communaux 2ème génération de mars 2016 en amont des demandes de renseignements et demandes définitives (autorisations de construire) [...] » (p. 6).

33.         D'après la jurisprudence, l'administration peut adopter un tel guide afin d'assurer l'application uniforme de certaines dispositions légales en explicitant l'interprétation qu'il leur donne, sans qu'il n'ait force de loi et ne lie ni les administrés, ni les tribunaux, ni même l'administration. Il ne dispense pas cette dernière de se prononcer à la lumière des circonstances du cas d'espèce. Par ailleurs, il ne peut sortir du cadre fixé par la norme supérieure qu'il est censé concrétiser. En d'autres termes, à défaut de lacune, il ne peut prévoir autre chose que ce qui découle de la législation ou de la jurisprudence (ATF 141 II 338 consid. 6.1 ; 140 V 343 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_522/2012 du 28 décembre 2012 consid. 2.3 ; ATA/1244/2017 du 29 août 2017 ; ATA/265/2016 du 22 mars 2016 ; ATA/54/2016 du 19 janvier 2016).

34.         En premier lieu, la recourante fait grief au département d'avoir mal exercé son pouvoir d'appréciation en délivrant une autorisation de construire contraire aux objectifs de son PDCom. Ainsi, le sous-sol projeté avait une emprise démesurée et contenait une surabondance de locaux peu justifiée pour le logement desservi. Cette suroccupation du sous-sol avait pour conséquences un débordement du sous-sol de 36 m2 hors projection du bâtiment en surface (cf. point B7.1 du PDCom) et un étalement des aires de stationnement et de circulation en surface, ce qui péjorait la qualité des extérieurs et influait considérablement sur l’IVER. Enfin, la réalisation d'un parking souterrain (au moins partiellement) aurait permis d'économiser des nombreuses surfaces en pleine terre.

Le projet querellé prévoyait par ailleurs la présence de deux accès, situés aux deux extrémités de la parcelle, alors même que le point B5.2 du PDCom préconisait un seul accès par parcelle, dans le but de regrouper les accès et de mutualiser le stationnement. Cela engendrerait une « stérilisation » du rapport à la rue, non conforme au principe de traitement qualitatif des limites.

D'une manière plus générale, l'implantation, le volume et le gabarit des constructions projetées nuisaient au caractère harmonieux du quartier. L'étalement du projet impliquait en outre la création de couverts à garage, d'une piscine, d'une terrasse et d'un pool-house, avec pour conséquence une réduction importante des surfaces en pleine terre mettant à mal l'objectif communal d'éviter une trop forte imperméabilisation du sol et de préserver des espaces libres de construction.

35.         En l'occurrence, le PDCom ayant été approuvé par le Conseil d’État en mai 2020, le département devait en tenir compte lorsqu’il a prononcé la décision litigieuse le 3 décembre 2020.

Cela étant, il doit être rappelé que les PDCom ne peuvent, à eux seuls, faire opposition à l'application du droit cantonal, respectivement à un projet de construction conforme aux normes de la zone 5. Cela vaut à fortiori pour la stratégie de densification de la commune.

De même, il ne faut pas perdre de vue que le système légal prévalant dans le canton de Genève ne confère aucun pouvoir décisionnel à la commune s'agissant de l'octroi des autorisations de construire, quelles qu'elles soient ; cette dernière ne dispose en outre d'aucune autonomie ou compétence propre dans l'octroi d'une dérogation au rapport de surfaces fondée sur l'art. 59 al. 4 let. a aLCI (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_535/2019 du 4 novembre 2019 consid. 2.4), seul son préavis, mais non son accord, étant requis (cf. ATA/639/2020 du 30 juin 2020 consid. 6b). Par voie de conséquence, la commune n'est pas non plus habilitée à exiger des adaptations ou des modifications du projet susceptibles de mieux lui convenir. La délivrance de l’autorisation de construire demeure ici de la compétence exclusive du DT, même s'il lui appartient de statuer en tenant compte de tous les intérêts en présence, mis en évidence, en particulier, dans les différents préavis des instances spécialisées qu'il a requis.

S’agissant du projet querellé, il faut constater avec le département qu’il respecte le PDCom, les critères de ce dernier mis en exergue par la recourante étant au demeurant de type B, soit des critères qui doivent être respectés dans leur principe mais peuvent être adaptés au contexte particulier et négociés.

Tout d’abord, en ce qui concerne l’emprise du projet et en particulier de son sous-sol, celle-ci est faible puisque le débordement représente 36 m2, soit 11,50 % de la surface totale du sous-sol (36m2 / 312.50m2 = 11.50 %), ou 2,45 % de la surface totale de la parcelle (36m2 / 1’468m2 = 2.45 %). La surface du sous-sol correspond pour le surplus à 21.30 % de la surface de la parcelle (312.50m2 / 1’468m2 = 21.30 %). Le projet est donc conforme au droit cantonal et en particulier à l’art. 59 al. 9 LCI (21.30 % < 22 %). Le débordement correspond au demeurant au local technique de la piscine, dont l’emplacement était, comme l’explique l’intimé sans être contredit, imposé par sa destination, celui-ci devant se situer à proximité de celle-là. Une emprise « hors bâtiment », d'ailleurs prévue par le PDCom dans ce genre de situation (p. 47 par. B7.2), paraît dès lors justifiée en l'espèce. Concernant l’impact du projet sur les extérieurs et l’IVER, le choix de l’habitat groupé permet précisément de limiter l’emprise sur la parcelle. Il ressort pour le surplus du dossier qu’une surface en pleine terre conséquente, soit plus de 50 % de la parcelle est maintenue. L'allée de chênes en bordure du chemin C______ sera préservée et seuls trois arbres seront abattus alors que sept arbres indigènes devront être replantés sur la parcelle, comme exigé par l’OCAN. Les toitures du garage et du pool house ainsi qu'une partie du toit de l'habitat groupés seront végétalisées ce qui préservera non seulement l'identité visuelle du quartier mais aussi le caractère arboré dudit chemin. La CA souligne ainsi, dans son préavis du 18 juin 2019, que la surélévation projetée permet de préserver les espaces "vides" et les surfaces végétales, étant rappelé que l'exploitation en hauteur des bâtiments, pour éviter un étalement des constructions et préserver des espaces non-bâtis, fait partie des principes énoncés par le PDCom au titre de limitation de l'occupation du sol (cf. p. 38 du rapport explicatif). Quant au SPI, il retient, dans son préavis favorable sans observation du 10 décembre 2020, que le projet intègre ses demandes concernant la végétalisation (haies bocagères à prolonger le long du chemin C______). L’appréciation de la commune est ainsi contredite par les deux instances spécialisées précitées. Le fait qu’une autre solution paraisse concevable, voire préférable, telle que la réalisation d'un parking souterrain, relève enfin de l'opportunité, que les autorités judicaires ne revoient pas. Il convient également de prendre en compte le fait que l’OCAN, instance spécialisée chargée de veiller à la protection de la nature et du paysage, a lui aussi préavisé favorablement le projet, moyennant le respect de conditions ayant été reprises et faisant partie intégrante de l'autorisation querellée.

S’agissant des deux accès prévus à la parcelle depuis le chemin C______, qui contrediraient le point B5.2 du PDCom, l’objectif visé par ce dernier (regroupement / optimisation des accès (cf. p. 46 du rapport explicatif) est d'éviter une multiplication des accès privés pour préserver les haies bocagères et les cordons boisés ainsi que pour limiter l'imperméabilisation du sol. Or, ces deux accès sont précisément prévus afin de maintenir l'allée de chênes étant relevé que l'actuel revêtement en goudron étanche permettant l'accès à la villa sera remplacé par un matériau perméable, limitant la partie imperméable de la parcelle à 28 %. En outre, l'espace voué à la circulation, situé entre la construction et la rue, répond à la requête de l’OCT, dans son préavis du 13 juin 2019, d’avoir des espaces de circulation de dimension suffisante pour accéder aux places de stationnement et permettre les manœuvres demi-tour des véhicules sur la propriété privée. Ainsi, le choix effectué évite que l'espace entre la construction et le chemin C______ soit voué à la circulation et au stationnement et permet de le maintenir en pleine terre avec un cheminement piéton bordé par l'allée de chênes accompagnée d'une haie vive indigène de basse hauteur. Le choix d’une clôture légère et basse habillée de plantations permettant le passage de la petite faune entre le chemin C______ et la propriété ne « stérilise » ainsi par le rapport à la rue mais va au contraire dans le sens de ce que préconise le PDCom.

Le projet apparait pour le surplus parfaitement conforme à l'objectif poursuivi par les mesures énoncées sous chiffre B10 (cf. p. 48 du rapport explicatif), la CA ayant à cet égard rappelé, dans ses préavis favorables des 5 novembre 2019 et 13 avril 2021 qu’il était conforme au caractère et à l'harmonie du quartier, après modifications. Cette instance a en outre validé le principe de surélévation du projet qui permet de préserver les espaces "vides" et la surface végétale, étant rappelé que le projet respecte les gabarits de la zone 5.

Il doit enfin être retenu que l’ensemble des instances de préavis consultées et en particulier le SPI que la CA ont procédé à une analyse complète et approfondie du projet, dans le cadre de leurs divers préavis, et de sa conformité à la planification territoriale, respectivement au caractère, à l'harmonie et à l'aménagement du quartier. En tout état de cause, quand bien même les revendications de la commune seraient en soi légitimes, l'analyse des autres instances n’apparaît en aucune mesure indéfendable, s’agissant de critères qui doivent être respectés dans leur principe mais peuvent être adaptés au contexte particulier et négociés. On rappellera aussi qu'au niveau cantonal, le respect des plans directeurs est actuellement assuré par le SPI, qui, selon la jurisprudence, est le plus à même de répondre à cette question Or, cette instance a expressément rappelé l’existence du Guide et du PDCom dans sa demande de complément avant d’émettre deux préavis favorables au projet, tel qu’il lui était alors présenté, l’un sous conditions.

36.         Dans un second grief, la recourante soutient que le département a violé l'art. 59 al. 4 aLCI au motif qu'il n'a pas suivi les lignes directrices proposées par le Guide, en particulier s’agissant des places de stationnement. La question de l'IVER n’avait, au surplus, pas été examinée par la CA. Ce grief se recoupant en partie avec celui examiné ci-dessous, il sera renvoyé au considérant 35 tout en précisant ce qui suit.

37.         La problématique du stationnement est abordée aux pp. 38 ss du Guide. Ce dernier préconise d'optimiser l'implantation des espaces de stationnement par rapport au projet. S’agissant des parcelles inférieures à 1500m2, comme en l’espèce, il préconise les stationnements de surface regroupés, le stationnement souterrain étant recommandé pour des parcelles de surfaces supérieures.

Concernant le projet litigieux, la lecture des plans permet de voir que l'implantation des places de stationnement a été optimisée puisqu'elles se situent le long du bâtiment ainsi que sur ses côtés, ce qui permet de préserver de grands espaces de verdure à l'arrière du bâtiment ainsi qu'à l'avant. Les aires de circulation sont en outre mutualisés entre, d’une part, les places P1, P2 et P7, et d'autre part, les places P6, P5, P3 et P4, et limités aux angles Nord et Nord-Ouest de la parcelle. La surface de circulation et stationnement, d’environ 200 m2, ne représente enfin que 13,6 % de la surface totale de la parcelle, étant rappelé que les surfaces de stationnement sont considérées comme perméables (cf. Guide p. 40). Le recourant explique que la réalisation de deux accès est prévue afin de maintenir l'allée de chênes, ce qui répond à l’intérêt public à la préservation de la végétation, défendu tant par le PDCom que par le Guide. Quant à l’emplacement des places de stationnement, en retrait du domaine public, l’intimé le justifie par la volonté de préserver l'aspect visuel depuis ce dernier. Un espace de circulation suffisant est enfin prévu pour que les manœuvres de demi-tour puissent être exécutées à l'intérieur du périmètre de la parcelle, comme demandé par l’OCT. Il en résulte que les objectifs poursuivis par le Guide ont été parfaitement pris en compte.

Il n’en va pas différemment de l’IVER qui doit, à tout le moins, être confirmé à hauteur de 763.25 m2, la surface des patios pouvant effectivement être comptée dans les surfaces vertes en pleine terre dès lors qu’elle sera engazonnée et composée de pleine terre, sans construction en sous-sol. Cela correspond ainsi à environ 52 % de la parcelle, soit plus de la moitié de la surface totale de celle-ci, alors que le département indique, sans être contredit, que la CA préconise, de manière générale, une densité de la végétation de plus ou moins 40 % en zone 5. Le fait que le mandataire du projet ait indiqué un pourcentage plus important (56.80 %) ne saurait dès lors remettre en cause le projet.

Partant, au vu de ce qui précède, force est d’admettre que le projet autorisé non seulement suit les lignes directrices prévues par le Guide mais il est en outre conforme au droit cantonal. Dans le cadre de la pesée globale des intérêts à laquelle il a procédé, le département n’a ainsi ni excéder ni abuser de son pouvoir d'appréciation dans l'application de l'art. 59 al. 4 aLCI, étant rappelé qu’il doit non seulement tenir compte des plans directeurs, mais aussi des intérêts publics ne relevant pas de l'aménagement du territoire et des intérêts privés. Ces derniers sont ici la mise sur le marché de nouveaux logements et la possibilité pour l’intimé de loger sa famille sur sa parcelle.

38.         La commune reproche au département d’avoir écarté ses préavis complets et motivés au profit de ceux des autres instances consultées qui ne l’étaient pas.

39.         Comme rappelé ci-dessus, la CA a examiné de manière complète et circonstanciée les critères d'octroi de l'autorisation et en particulier l'intégration de la réalisation projetée dans le quartier. Bien que ses préavis soient brefs, son analyse du projet n'apparaît pas contestable et rien n'indique qu'elle n'aurait pas tenu compte de la méthode préconisée par le guide précité et de la stratégie communale. Conformément à son pouvoir d'appréciation, le DT pouvait se fonder sur ce préavis imposé par la loi, malgré celui défavorable de la commune. Il n’en va pas différemment du SPI qui a expressément rappelé l’existence du Guide et du PDCom au mandataire de l’intimé, dans sa demande de complément, avant d’émettre deux préavis favorables au projet - tel qu’il lui était alors présenté -, l’un sous conditions. Rien ne permet ainsi de considérer que le département, qui a dûment expliqué les raisons pour lesquelles il avait choisi de donner la prépondérance aux préavis des autres instances consultées ainsi qu'à l'intérêt privé du requérant à réaliser le projet et public à la création de logements au détriment de la position de la recourante, aurait mésusé ou abusé de son pouvoir d'appréciation.

En définitive, la commune entend en réalité substituer sa propre appréciation à celle de l'autorité intimée et des instances de préavis consultées, soit en particulier le SPI et la CA. Or, le tribunal, qui doit faire preuve de retenue et respecter la latitude de jugement conférée au DT, ne saurait en corriger le résultat en fonction d'une autre conception, même si celle-ci n'est pas dénuée de pertinence, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdit de faire (art. 61 al. 2 LPA).

40.         Le recours, mal fondé, sera donc rejeté et la décision contestée confirmée.

41.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante qui succombe est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 900.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

42.         Vu l'issue du litige, une indemnité de procédure de CHF 1’500.-, à la charge de la commune, sera allouée à M. B______ (art. 87 al. 2 à 4 LPA et 6 RFPA).


 

 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 22 septembre 2021 par la commune de A______ contre la décision du département du territoire du 23 août 2021 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la commune de A______ un émolument de CHF 900.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             ordonne la restitution à la recourante du solde de l’avance de frais de CHF 300.- ;

5.             condamne la commune de A______ à verser à Monsieur B______ une indemnité de procédure de CHF 1'500.- ;

6.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Marielle TONOSSI, présidente, Damien BLANC et Carmelo STENDARDO, juges assesseurs.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.

Genève, le

 

La greffière