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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/17491/2013

AARP/52/2023 du 20.02.2023 sur JTCO/104/2021 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Recours TF déposé le 22.03.2023, rendu le 01.12.2023, REJETE, 6B_418/2023, 7B_525/2023
Descripteurs : ABUS DE CONFIANCE;ESCROQUERIE;GESTION DÉLOYALE;FAUX DANS LES CERTIFICATS;CRÉANCE;ALLOCATION AU LÉSÉ
Normes : CP.138; CP.158; CP.251; CP.146; CP.71.al1; CP.73.al1; CPP.268.al1.leta

 

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/17491/2013 AARP/52/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 3 janvier 2023

 

Entre

A______, domiciliée ______, comparant par Me B______, avocat,

appelante,

 

C______ CORP. SA, D______ LTD, E______ CORP., F______ SA, G______ SA, H______ CORP., I______ LTD, J______ CORP., K______ LTD, L______ SA, M______ CORP., N______ TRUST, O______ LTD, P______ LTD, Q______ CORP., parties plaignantes, comparant par Me Matteo PEDRAZZINI, avocat, PMA Avocats, rue De-Candolle 11, 1205 Genève, et Me Raphaël JAKOB, avocat, SANTAMARIA & JAKOB, rue François-Versonnex 7, 1207 Genève,

appelantes,

 

contre le jugement JTCO/104/2021 rendu le 29 septembre 2021 par le Tribunal correctionnel,


 

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

R______, partie plaignante, comparant par Me Daniel TUNIK, avocat, LENZ & STAEHELIN, route de Chêne 30, case postale 615, 1211 Genève 6.

 

intimés,

S______, comparant par Me T______,

U______,

tiers saisis.

 


EN FAIT :

A. a.a. En temps utile, A______ et les sociétés C______ CORP. SA, D______ LTD, E______ CORP., F______ SA, G______ SA, H______ CORP., I______ LTD, J______ CORP., K______ LTD, L______ SA, M______ CORP., N______ TRUST, O______ LTD, P______ LTD, Q______ CORP. (les sociétés appelantes) appellent du jugement du 29 septembre 2021, par lequel le Tribunal correctionnel (TCO) a classé la procédure s'agissant des faits visés sous chiffre IV de l'acte d'accusation (art. 329 al. 5 CPP) mais a reconnu A______ coupable d'escroquerie par métier (art. 146 al. 1 et 2 CP) pour les faits visés sous chiffre II de l'acte d'accusation et de faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP) pour ceux visés sous chiffre I. Le TCO a condamné A______ à une peine privative de liberté de trois ans avec sursis partiel, la partie ferme ayant été fixée à six mois, et le délai d'épreuve à trois ans pour le solde.

Le TCO a considéré que le chiffre III de l'acte d'accusation n'avait pas de portée propre dans la mesure où il ne décrivait pas un comportement différent de celui déjà reproché au chiffre II, pour lequel A______ avait déjà été reconnue coupable d'escroquerie par métier.

Il a également considéré que les faits décrits sous chiffre IV de l'acte d'accusation ne pouvaient relever que de la gestion déloyale simple (art. 158 ch. 1 CP), faute de dessein d'enrichissement illégitime, et que, partant, ils étaient prescrits.

Pour le surplus, le TCO a :

·         statué sur les conclusions civiles des parties plaignantes, les admettant partiellement (ndr : le TCO a admis les conclusions civiles des parties plaignantes en lien avec le chiffre II de l'acte d'accusation, soit les "montants nantis" et les "montants débités" frauduleusement, mais les a rejetées en tant qu'elles concernaient les "montants investis" que les parties plaignantes avaient déduites du chiffre III de l'acte d'accusation. Selon le TCO, il n'était, à teneur de ce document, nullement reproché à l'appelante d'avoir obtenu ces montants sur la base d'un comportement coupable. Il a également rejeté les conclusions en maintien des séquestres, confiscations, créances compensatrices et allocations au lésé, dans la mesure où il n'était pas établi qu'une infraction génératrice de revenus pour A______ avait été commise) ;

·         ordonné la levée des séquestres sur :

-       les bien-fonds V______ 1______/2______, V______ 1______/3______ et V______ 4______/5______ ;

-       la cédule hypothécaire ID.6______ ;

-       la cédule hypothécaire ID.7______ et sa restitution à S______ ;

-       les biens selon inventaire du 8 décembre 2010, annexé à l'ordonnance de séquestre du 7 août 2017.

·         ordonné le versement à la procédure des documents figurant sous chiffres 1 à 4 de l'inventaire du 5 juin 2014 (PP 900'000) non restitués à teneur de l'ordonnance de levée partielle de séquestre du 23 juillet 2017 (PP 200'161), à savoir les pièces numérotées par [la banque] R______ comme suit : 163 – 174, 178 – 279, 281 – 625, 627 – 1097, 2755 – 2756, 2783 – 2800, 2826 – 2827, 2998 – 3005, 3008 – 3017, 4515 – 4595, 4682 – 4686, 4692 – 4709, 5014 et 6318 – 6791 (classeurs B.4.1 à B.4.3) ;

·         condamné A______ à verser aux sociétés parties plaignantes dont les conclusions civiles avaient été admises, en main commune, CHF 150'576.50, à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure et rejeté les conclusions à ce titre pour le surplus (art. 433 al. 1 CPP) ;

·         condamné l'Etat de Genève à verser à S______ CHF 10'633.33 à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure (art. 434 al. 1 CPP) ;

·         condamné A______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 11'264.60, y compris un émolument de jugement de CHF 3'000.- (art. 426 al. 1 CPP).

a.b. A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à une peine compatible avec le sursis complet, au rejet des conclusions civiles des parties plaignantes et à ce que celles-ci soient renvoyées à agir au civil. Elle conclut également à ce que la cédule hypothécaire ID.7______ saisie en mains de S______ lui soit restituée.

a.c. Les sociétés appelantes entreprennent partiellement ce jugement, concluant à ce que A______ soit reconnue coupable d'escroquerie par métier pour les faits visés sous chiffre III de l'acte d'accusation (cf. let. c. ci-après) et de gestion déloyale pour ceux visés sous chiffre IV.1 (cf. let. d. ci-après).

Cela fait, elles concluent à l'admission de l'intégralité de leurs conclusions civiles, soit, en sus des montants déjà alloués, au paiement des divers montants rejetés par le TCO en lien avec les "montants investis", à la confiscation des biens séquestrés, voire au prononcé d'une créance compensatrice, et à l'allocation en leurs mains communes, à concurrence du montant global requis, soit CHF 49'948'249.43, du montant de la peine pécuniaire ou de l'amende prononcée ainsi que des objets et valeurs patrimoniales confisqués ou du produit de leur réalisation, voire des créances compensatrices prononcées, elles-mêmes, cédant à l'Etat de Genève la part correspondante de leur créance en dommages-intérêts contre A______. Elles concluent également au maintien des séquestres en garantie. Enfin, elles concluent à la condamnation de A______ à payer, en leurs mains communes, CHF 775'036.50 à titre d'indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure préliminaire et de première instance, de même qu'un montant de CHF 25'591.80 pour la procédure d'appel ainsi qu'au maintien des séquestres en garantie de ces montants.

b. Selon l'acte d'accusation du 28 janvier 2021, il était reproché ce qui suit à A______ :

b.a. W______ SA, dont le but était la prestation de services et ______ dans le domaine fiduciaire et ______, a été créée en 1988 par X______, conseiller de riches familles indiennes établies en Afrique.

A______ en a été administratrice-présidente avec signature collective à deux depuis le 23 novembre 1993, puis individuelle dès le 9 novembre 2006.

Initialement, W______ SA proposait uniquement des services de type family office, consistant en la création, principalement au Panama ou aux Iles Vierges britanniques, de structures patrimoniales ainsi que la mise à disposition de leurs directeurs et leur gestion administrative – notamment la transmission d'instructions de paiement et l'établissement de contrats.

Parmi ces structures patrimoniales figuraient les sociétés suivantes : Y______ CORP., Z______ CORP., AA______ INC., AB______ CORP., C______ CORP. S.A., D______ INC., E______ CORP., de F______ S.A., AC______ LTD (précédemment AD______ LTD, ci-après : AC______), AE______ S.A., G______ S.A., AF______ CORP., H______ CORP., I______ LTD, AG______ CORP., J______ CORP., AH______ LTD, K______ LTD, AI______ CORP., AJ______ SA, de AK______ TRUST, L______ SA, M______ CORP., N______ TRUST, AL______ CORP., O______ LTD, P______ LTD, Q______ CORP. et AM______ CORP. (ci-après : les sociétés clientes ou les parties plaignantes).

A______ comptait parmi les administrateurs avec signature collective à deux avec X______ puis, dès 1995, avec AN______, de ces sociétés.

Dès la fin des années 1990, W______ SA a déployé en sus une activité de gestion en proposant notamment aux sociétés clientes précitées des investissements sous forme d'opérations de forex et d'achat/vente de devises, avec une rémunération régulière de leurs investissements sous forme de taux d'intérêt fixes.

Les investissements étaient effectués par le truchement de sociétés de trading appartenant à X______ et dont ce dernier et/ou A______ et/ou AN______ étaient administrateurs, à savoir AO______ SA, AP______ INC., AQ______ CORP., AR______ SA (ci-après : les sociétés de trading).

Dans ce cadre, les sociétés clientes, dont certaines avaient expressément conclu des mandats de gestion avec W______ SA, d'autres non, qui détenaient des avoirs sur des comptes bancaires en Suisse auprès du R______, sur lesquels A______ disposait de la signature collective à deux avec X______ puis AN______, remettaient des avoirs aux sociétés de trading, lesquelles étaient également titulaires de comptes au R______, afin qu'elles procèdent aux investissements.

A______ s'occupait seule des investissements des sociétés de trading ayant un accès direct à la salle des marchés auprès de R______. Les investissements se sont rapidement révélés déficitaires.

b.b. Afin de dissimuler les pertes essuyées par son activité de trading, de pouvoir continuer cette activité et d'éviter de perdre des clients, A______ a, à Genève, entre le 1er février 2005 et le 14 janvier 2010, alors qu'elle était organe des sociétés clientes et des sociétés de trading, avec signature collective à deux avec X______, puis AN______, et qu'elle disposait d'un pouvoir de signature à deux sur les comptes bancaires desdites sociétés ouverts auprès de R______ (I.1. à I.2.5. de l'acte d'accusation) :

- créé de faux titres en photocopiant des spécimens originaux de la signature de X______, puis en insérant, à l'insu de ce dernier et sans son autorisation, la copie de cette signature à côté de la sienne sur des contrats d'ouverture de ligne de crédit et de prêt conclus entre R______ et les sociétés clientes ou de trading, sur des contrats de nantissement conclus entre R______ et les sociétés clientes, garantissant les prêts octroyés, ainsi que sur des ordres de paiement débitant le compte bancaire des sociétés clientes en faveur des sociétés de trading ;

- abusé, à côté de la sienne, des signatures à main réelle que X______ avait préalablement apposées sur des contrats vierges d'ouverture de ligne de crédit, de prêt ou de nantissement reçus de R______ ou sur des ordres de paiement ou sur des documents en blanc comportant des signatures à main réelle qu'il avait préalablement préparés (abus de blanc-seing) et qu'elle complétait postérieurement à l'insu de X______ et sans son autorisation, pour fabriquer des titres supposés ;

- fait usage de tels faux.

Elle a établi faussement ces documents en les faisant apparaître comme des titres valablement signés et en les remettant à R______, dans le but de tromper autrui et dans le dessein de procurer un avantage illicite aux sociétés de trading concernées par les documents susmentionnés et de porter atteinte aux intérêts pécuniaires de R______ ou des sociétés clientes visées dans ces documents, afin de dissimuler les pertes essuyées par son activité de trading et de pouvoir continuer cette activité, en évitant de perdre des clients.

Ces faits ont conduit au verdict de culpabilité de faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP), non-contesté.

b.c. A______ a, dans les circonstances susdécrites et poursuivant le même but, en sa qualité d'organe, disposant d'une signature collective à deux pour les sociétés clientes et/ou d'un mandat de gestion pour certaines d'entre elles, astucieusement induit en erreur R______, par des affirmations fallacieuses ou la dissimulation de faits vrais, ou l'a astucieusement confortée dans son erreur :

- en lui remettant des titres faux mentionnés supra, soit en particulier des contrats comportant une fausse signature de X______ ou sur lesquels elle avait, pour fabriquer des titres supposés, abusé de la signature à main réelle de X______ (abus de blanc-seing), la déterminant à des actes préjudiciables à ses intérêts – soit l'octroi de prêts ou de lignes de crédit – ou à ceux des sociétés clientes – soit le nantissement de leurs comptes –, pour un montant total de CHF 50'588'382.-, étant relevé que le 2 septembre 2010, alors que les pertes sur les portefeuilles des sociétés de trading étaient trop importantes, R______ a réalisé les gages constitués par le nantissement frauduleux des avoirs de sociétés clientes (II.1 de l'acte d'accusation) ;

- en adressant, entre 2008 et 2010, à R______ des ordres de paiement comportant une fausse signature de X______ ou sur lesquels elle avait, pour fabriquer des titres supposés, abusé de la signature à main réelle de X______ (abus de blanc-seing), en la déterminant ainsi à effectuer les paiements suivants (II.2 de l'acte d'accusation) :

o   un ordre de paiement du 24 janvier 2008, instruisant R______ de transférer USD 500'000.- depuis le compte de AC______, n° 8______, en faveur du compte de AP______ INC., n° 11______, lequel a été exécuté le 28 janvier 2008 ;

o   un ordre de paiement du 6 août 2008, instruisant R______ de transférer USD 850'000.- depuis le compte de AC______, n° 8______-3, en faveur du compte de AO______ SA, n° 9______, lequel a été exécuté le 7 août 2008 ;

o   un ordre de paiement du 23 septembre 2008, instruisant R______ de transférer USD 3'000'000.- depuis le compte de I______ LTD, n° 10______, en faveur du compte de AP______ INC., n° 11______, lequel a été exécuté le 25 septembre 2008 ;

o   un ordre de paiement du 1er octobre 2008, instruisant R______ de transférer USD 4'900'000.- depuis le compte de I______ LTD, n° 10______, en faveur du compte de AO______ SA, n° 9______, lequel a été exécuté le 3 octobre 2008 ;

o   un ordre de paiement du 14 janvier 2010, instruisant R______ de transférer USD 300'000.- depuis le compte de AA______ INC., n° 12______, en faveur du compte de AO______ SA, n° 9______, lequel a été exécuté le 15 janvier 2010.

- en donnant sans droit le 30 janvier 2009 à R______ l'instruction téléphonique de transférer USD 2'500'000.- depuis le compte bancaire n°13______ de AB______ CORP. sur le compte bancaire n° 9______ de AO______ SA (II.3 de l'acte d'accusation) ;

occasionnant de la sorte un dommage de CHF 50'588'382.- à R______ ou aux sociétés clientes dont les comptes ont été nantis frauduleusement et de CHF 12'050'000.- aux sociétés clientes dont les comptes ont été débités frauduleusement.

A______ a agi dans le dessein de procurer un enrichissement illégitime dans la même proportion aux sociétés de trading bénéficiaires des lignes de crédit, des prêts et des ordres de paiement.

Ces faits ont conduit au verdict de culpabilité d'escroquerie par métier (art. 146 al. 1 et 2 CP), non-contesté.

c. Il est encore reproché ce qui suit à A______ : elle a, entre 1998 et 2010, à Genève, trompé les sociétés clientes par des affirmations fallacieuses ou la dissimulation de faits vrais ou les a astucieusement confortées dans leur erreur en leur dissimulant les pertes subies sur leurs investissements et en les confortant dans l'illusion d'une activité bénéficiaire :

- en mentant sur les profits réalisés par les opérations de trading et en continuant de faire verser par les sociétés de trading les intérêts convenus contractuellement aux sociétés clientes malgré l'absence de profits, empêchant ainsi les sociétés clientes de se rendre compte que leurs investissements étaient déficitaires et d'agir en conséquence (chiffre III.1.a de l'acte d'accusation) ;

- en poursuivant le trading malgré les pertes essuyées grâce à l'octroi de lignes de crédit ou de prêts par R______, garantis par les avoirs figurant sur les comptes des sociétés clientes et les transferts d'argent depuis les comptes des sociétés clientes à l'insu de ces dernières (chiffre III.1.b et III.1.d de l'acte d'accusation) ;

- en demandant à R______, à l'insu des sociétés clientes, l'ouverture de rubriques sur les comptes des sociétés de trading, dans lesquelles elle a regroupé les pertes et les avances à terme fixe (chiffre III.1.c de l'acte d'accusation) ;

occasionnant de la sorte un dommage total d'au moins CHF 62'638'382.- (CHF 50'588'382.- + CHF 12'050'000.-) à R______ ou aux sociétés clientes dont les comptes ont été nantis et débités frauduleusement.

A______ a agi de façon intentionnelle, dans le dessein de procurer un enrichissement illégitime aux sociétés de trading, lesquelles ont indûment bénéficié des lignes de crédit ou des prêts, afin de continuer leurs opérations, mais aussi à X______ et AS______ INC., lesquels percevaient des rétrocessions générées par les opérations de trading de la part de R______, lesquelles étaient ensuite reversées à W______ SA, mais également utilisées par A______ pour ses besoins personnels. Celle-ci a ainsi également agi dans un dessein d'enrichissement illégitime personnel.

Comme évoqué, le TCO a considéré que le chiffre III n'avait pas de portée propre dans la mesure où il ne décrivait pas un comportement autre que celui décrit sous chiffre II, ce que les sociétés appelantes contestent.

d. A______ a, à Genève, entre 2001 et 2007, en sa qualité d'organe disposant d'un pouvoir de signature collective à deux pour les sociétés clientes et AR______ SA et ayant un devoir de gérer les intérêts pécuniaires de ces dernières, procédé sans droit à des retraits en espèces d'un montant total de CHF 4'139'826.70, subsidiairement abusé du pouvoir de représentation qui lui était conféré en procédant auxdits retraits, depuis le compte n° 14______ de AR______ SA, alors que ce compte contenait les investissements des sociétés clientes, dans le but de procurer à un tiers ou de se procurer un enrichissement illégitime.

Ces faits étaient selon le MP constitutifs de gestion déloyale aggravée ou d'abus du pouvoir de représentation. Le TCO les a quant à lui qualifiés de gestion déloyale simple, au vu de l'absence de dessein d'enrichissement illégitime, ce que les sociétés appelantes contestent.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

Investissements et dissimulation des pertes

a.a. Dès la fin des années 1990, A______, alors qu'elle travaillait au sein de W______ SA, a effectué des investissements de type forex pour le compte des sociétés clientes par le biais des sociétés de trading (500'013).

L'activité des sociétés de trading devait consister à gérer les avoirs investis appartenant aux sociétés clientes en développant une activité forex dans l'optique de réaliser des gains de change et à distribuer à périodicité fixe à la fin de chaque semestre, sur les comptes des sociétés clientes une rémunération convenue, ce que les sociétés de trading ont effectivement fait.

a.b. Les opérations de forex effectuées par A______ se sont très rapidement montrées déficitaires. En effet, hormis en 2001 et 2002, années durant lesquelles l'activité de A______ a généré des résultats permettant de couvrir les intérêts payés, les pertes se sont accumulées de façon continuelle.

A______ a expliqué que depuis 2002, elle savait qu'elle ne pouvait plus honorer les conditions conclues avec les sociétés clientes (procès-verbal de l'audience de jugement, p. 7).

Grâce à la constitution de sous-comptes rubriqués pour les sociétés de trading, A______ a pu ségréguer les pertes et conserver les relevés bancaires correspondants, ne transmettant aux sociétés clientes que ceux des comptes principaux. Les sociétés clientes ne se doutaient donc aucunement des pertes puisqu'elles étaient confortées par des intérêts perçus périodiquement et des extraits de comptes transmis dont il ne pouvait être déduit qu'elles en subissaient (500'151 ; procès-verbal de l'audience de jugement, p. 6).

Aggravation des pertes, obtention frauduleuse de lignes de prêts et crédits du R______ et transferts d'argent au débit des comptes des sociétés clientes

b.a. Ne disposant plus de fonds suffisants sur les comptes des sociétés de trading pour continuer son activité et reverser aux sociétés clientes les intérêts convenus, A______ a décidé de mettre en nantissement les avoirs de certaines sociétés clientes afin d'obtenir du R______, entre le 1er février 2005 et le 9 avril 2008, des prêts à terme fixe et des crédits lombards en faveur des sociétés de trading. Afin de constituer les nantissements sur les comptes des sociétés clientes, A______ a contourné l'exigence de la signature collective à deux en falsifiant celle de X______. Elle a plus particulièrement inséré à côté de sa propre signature celle du précité, à son insu. Elle a utilisé des spécimens de signatures réalisés par ce dernier qu'elle a imprimés, puis qu'elle a découpés et collés pour obtenir, par photocopie, des documents donnant l'apparence que le précité les avait signés. Parallèlement, elle a aussi employé des signatures originales de X______ que celui-ci avait préalablement apposées sur des contrats vierges qu'elle a par la suite complétés, toujours à son insu (500'020, 500'021, 500'037, 500'151, procès-verbal audience de jugement, p. 4, 5 et 6 ; cf. l'expertise réalisée le 9 juillet 2012 par AT______ sous pièces 100'925 à 100'968). Ainsi, A______ a, à tout le moins, confectionné trente-huit contrats qu'elle a remis à R______ (100'939 à 100'947).

b.b. En utilisant des procédés identiques à la confection des contrats de prêt, d'ouverture de ligne de crédit et de nantissement (500'022) et poursuivant le même but, A______ a, entre 2008 et 2010, amené R______ à effectuer plusieurs importants transferts depuis les comptes des sociétés clientes vers ceux des sociétés de trading ainsi que décrits supra (cf. chiffre A.b.c) (3'036'968, 3'037'046, 3'013'729, 3'037'010, 3'037'087, 3'012'563, 3'008'560, 3'008'589, 3'013'736, 3'008'560, 3'008'590, 3'012'570, 3'004'987, 3'005'230, 3'012'605, procès-verbal audience de jugement, p. 5 et 6).

b.c. A______ a en outre amené R______ à exécuter le 30 janvier 2009 une instruction téléphonique de sa part ordonnant le transfert de USD 2'500'000.- du compte de AB______ CORP., n° 13______, sur le compte de AO______ SA, n° 9______, tout en sachant qu'elle ne disposait pas du pouvoir de donner des ordres de virement seule concernant la société débitrice (3'005'686, 3'005'928, 3'012'579). Elle a pour ce faire abusé de la confiance que R______ lui octroyait compte tenu du fait qu'elle était la seule interlocutrice directe pour toutes les sociétés clientes et de trading (500'151, procès-verbal de l'audience de jugement, p. 6).

b.d. A______ a ainsi obtenu, au total, pour le compte des sociétés de trading, le versement de USD 62'638'377.-, soit USD 50'588'377.-, auxquels venaient s'ajouter USD 12'050'000.- correspondant au montant versé suite aux ordres de paiement et à l'instruction téléphonique du 30 janvier 2009.

R______ n'a pas été en mesure de s'apercevoir du montage opéré par A______, malgré un contrôle des signatures effectué au sein de la banque, qui procédait à la comparaison de celles figurant sur les documents transmis avec celles se trouvant sur les formulaires d'ouverture de comptes des sociétés concernées (500'046, 500'047, 500'089).

Rétrocessions

c.a. Alors que ses investissements étaient déficitaires, A______ a, entre 2002 et 2010, reçu des rétrocessions de la part de R______ sur les opérations de trading qu'elle a effectuées pour le compte des sociétés clientes depuis les comptes des sociétés de trading, ainsi qu'elle l'a finalement reconnu en audience de jugement (100'126 et 100'127 : rapport "AU______", p. 53 et annexe 36 ; 500'134 ; procès-verbal de l'audience de jugement, p. 7).

c.b. A______ ne souhaitait pas recevoir les rétrocessions sur W______ SA, car cette société souhaitait déclarer un chiffre d'affaires d'environ CHF 1'000'000.- par an. Comptabiliser ces rétrocessions dans le bilan de la société aurait été "catastrophique au niveau fiscal" et fait "exploser le bénéfice de W______" (500'068 et 500'069). A______ a dès lors proposé l'utilisation d'autres comptes que celui de W______ SA pour le paiement des rétrocessions (500'072).

c.c. Entre 2002 et 2010, des rétrocessions d'un montant de CHF 3'270'816.- ont ainsi été versées à X______ sur son compte privé auprès de R______ et dès 2006, sur un compte bancaire appartenant à la société AS______ INC., étant relevé que cette société n'a eu aucune activité de trading ou d'investissement, sa seule activité ayant été celle de recevoir lesdites rétrocessions. Des montants de CHF 30'000.- à CHF 60'000.- étaient ainsi reçus tous les mois sur le compte de AS______ INC, lesquels faisaient systématiquement l'objet d'un retrait à la caisse dans les jours suivants (100'126 et 100'127 : rapport "AU______", p. 53 et annexe 36).

Il ressort de deux rapports internes de R______ des 17 septembre 2009 et 12 février 2010, que la banque a versé un montant total de CHF 419'586.- à A______ à titre de rétrocessions pour l'année 2009, concernant l'activité de AR______ SA. Il est spécifié que depuis le début de l'année 2009, "les volumes FX ont bien diminué, ainsi que les rétrocessions" (500'118 et 500'123).

c.d. A______ a expliqué que ces rétrocessions avaient été utilisées d'une part pour les besoins de fonctionnement de W______ SA et d'autre part pour ses besoins personnels. Elle pensait avoir effectué une répartition de 50-50 entre ces deux types de dépenses. Il arrivait aussi que X______ retire de l'argent en cash pour ses besoins personnels lorsqu'il était à Genève (500'151).

Retraits en espèces sur le compte de AR______ SA

 

d.a. Entre le 18 mai 2001 et le 28 septembre 2007, A______ a, directement ou par le biais de secrétaires de W______ SA, effectué des retraits en espèces sur le compte bancaire de AR______ SA, n° 15______, totalisant un montant de CHF 4'101'000.-, de USD 35'104 et de EUR 116'793.- (3'015'455, 3'015'508 à 3'015'511, 3'015'513 à 3'015'519, 3'015'522 à 3'015'525, 3'015'527 à 3'015'529, 3'015'531, 3'015'533, 3'015'537, 3'015'541, 3'015'543 à 3'015'547, 3'015'549 à 3'105'558, 3'015'560, 3'015'562 à 3'015'563, 3'015'565 à 3'015'566, 3'015'568 à 3'015'569, 3'015'571 à 2'015'574, 3'015'681, 3'015'689, 3'015'714, 3'015'720, 3'015'747, 3'015'754, 3'015'757, 3'015'762, 3'015'782, 500'151, procès-verbal de l'audience de jugement, p. 8).

d.b. Selon le rapport "AU______", A______ aurait déclaré avoir effectué ces retraits cash pour financer l'activité de W______ SA ("au noir"), les dépenses liées à son train de vie et à sa maison (100'124: rapport "AU______", p. 51). L'intéressée a toutefois contesté avoir livré de telles explications ; elle se souvenait avoir uniquement évoqué les transactions de trading avec l'expert AU______ mais non ces retraits (500'151).

d.c. Elle avait procédé à ces retraits pour les remettre en cash aux clients qui en faisaient la demande. Si elle les avait effectués depuis AR______ SA, elle avait dû les lui recréditer d'une façon ou d'une autre. Les montants avaient été remis à ces derniers à Genève ou à AV______ [Angleterre] (500'151, procès-verbal de l'audience de jugement, p. 8).

d.d. Les sociétés clientes n'ont fait valoir aucun dommage en lien avec ces retraits et n'ont du reste pas allégué avoir investi dans AR______S SA. Cette société ne s'est pas plainte non plus de ces retraits.

Découverte des faits, réalisation des nantissements sur les comptes des sociétés clientes par le R______

e.a. Jusqu'en 2010, les sociétés clientes ne se doutaient aucunement des agissements de A______ puisque, comme indiqué ci-dessus, elles étaient confortées dans leur vision d'une gestion prolifique au vu des intérêts perçus périodiquement et des extraits de comptes transmis, dont il ne pouvait être déduit qu'elles subissaient des pertes depuis 2002, ni que certains avoirs étaient, depuis 2005, mis en gage et débités frauduleusement.

e.b. Ses agissements n'ont pu être découverts que lorsque R______, constatant les pertes trop importantes générées par les sociétés de trading, a, le 3 septembre 2010, réalisé les gages constitués par le nantissement des avoirs des sociétés clientes en prélevant au total USD 50'588'377.- sur les comptes bancaires de ces dernières, occasionnant de la sorte dans une même proportion un dommage à celles-ci, montant qui peut être détaillé comme suit :

-       USD 2'811'775.60 du compte bancaire de Z______ CORP. sur celui de AR______ SA (3'003'275) ;

-       USD 2'754'302.20 du compte bancaire de AA______ INC. sur celui de AR______ SA (3'005'237) ;

-       USD 4'350'888.40 du compte bancaire de AB______ CORP. sur celui de AP______ INC. (3'005'939) ;

-       USD 1'471'420.19 du compte bancaire de C______ CORP. sur celui de AR______ SA (3'006'291) ;

-       USD 12'019'389.05 du compte bancaire de D______ INC. sur celui de AR______ SA (3'006'850) ;

-       USD 561'968.52 du compte bancaire de E______ CORP. sur celui de AO______ SA (3'007'235) ;

-       USD 1'952'184.38 du compte bancaire de F______ SA sur celui de AR______ SA (3'002'799) ;

-       USD 4'848'138.36 du compte bancaire de AC______ sur celui de AO______ SA (3'037'056) ;

-       USD 1'100'956.55 du compte bancaire de G______ SA sur celui de AR______ SA (3'007'652) ;

-       USD 2'447'025.39 du compte bancaire de H______ CORP. sur celui de AR______ SA (3'008'281) ;

-       USD 2'437'927.17 du compte bancaire de J______ CORP. sur celui de AR______ SA (3'008'927) ;

-       USD 652'214.73 du compte bancaire de AI______ CORP. sur celui de AP______ INC. (3'009'415) ;

-       USD 317'203.88 du compte bancaire de AJ______ SA sur celui de AR______ SA (3'016'008) ;

-       USD 1'134'795.05 du compte bancaire de L______ SA sur celui de AR______ SA (3'018'322) ;

-       USD 3'386'514.34 du compte bancaire de M______ CORP. sur celui de AR______ SA (3'016'330) ;

-       USD 517'129.19 du compte bancaire de AL______ CORP. sur celui de AR______ SA (3'016'774) ;

-       USD 4'087'402.41 du compte bancaire de O______ LTD sur celui de AR______ SA (3'017'251) ;

-       USD 2'447'373.77 du compte bancaire de P______ LTD sur celui de AO______ SA (3'017'494) ;

-       USD 84'336.77 du compte bancaire de Q______ CORP. sur celui de AR______ SA (3'017'774) ;

-       USD 1'205'431.05 du compte bancaire de AM______ CORP. sur celui de AR______ SA (3'018'166).

e.c. Seules les parties plaignantes suivantes ont pris des conclusions civiles réclamant le remboursement des montants les concernant : C______ CORP. SA, D______ LTD, E______ CORP., F______ SA, G______ SA, H______ CORP., I______ LTD, J______ CORP., L______ SA, M______ CORP., O______ LTD, P______ LTD et Q______ CORP.

e.d. Après la découverte des faits, X______ a restitué aux sociétés clientes une part des rétrocessions perçues, soit USD 2'982'925.- (6'000'002ss).

Discussion avec les sociétés clientes dès 2010, estimation du AX______ et des biens mobiliers

f.a. Début 2010, certaines sociétés clientes, désireuses de retirer leurs fonds et qui n'avaient pas pu en obtenir la restitution, ont donné un ultimatum à A______, laquelle a, en avril de cette même année, tenté de se suicider. Des discussions ont eu lieu entre A______, les sociétés clientes, et leurs conseils, déjà en mai et juin 2010 puis encore, suite à la réalisation des gages par R______, en décembre 2010, janvier et mars 2011, afin d'évoquer les pertes qu'elle avait provoquées et les possibilités de trouver un accord pour les dédommager.

A______ a expliqué qu'elle avait vraiment tout essayé pour parvenir à un accord à l'amiable durant ces discussions. Elle avait même rencontré plusieurs fois le représentant d'une des sociétés clientes, AW______, à Genève, pour essayer de proposer un montant valant solde de tous comptes. Elle avait proposé comme premier montant UDS 500'000.- et il avait alors éclaté de rire. Elle lui avait indiqué qu'elle pourrait peut-être réussir à les dédommager à hauteur de USD 1'000'000.- (500'176).

f.b. Au cours de ces discussions et sur demande du conseil des sociétés clientes, les biens de A______ ont été inventoriés et estimés.

Parmi ces biens figuraient une propriété immobilière à V______ dans le canton de Vaud, le AX______, que A______ avait acquise en 2007, soit durant la période pénale (biens-fonds V______ 1______ n° 2______ et sa parcelle n° 3______, composée de "champ, pré et pâturage" pour 4'166 m2 et d'une forêt de 317 m2 [600'041ss]), de même que les biens mobiliers localisés dans cette propriété.

f.c. A______ a expliqué avoir fait l'acquisition de cette propriété grâce à la vente d'un appartement à l'avenue Peschier qu'elle avait acquis au prix de CHF 600'000.- en 1982 puis revendu en 2010 au prix de CHF 3'600'000.-. Cette année, elle avait également vendu une œuvre de l'artiste espagnol AY______ au prix de CHF 700'000.- par l'intermédiaire de la société AZ______. Elle avait aussi retiré son deuxième pilier de l'époque (environ CHF 300'000.-). Avec ces fonds elle avait financé l'acquisition de la maison (500'152).

f.d. Au cours de ces discussions en 2010, AX______ a ainsi été estimé à CHF 4'500'000.-. Selon les sociétés clientes, A______ s'était alors engagée, par l'entremise de son conseil, à ne pas vendre ni grever de charges sa propriété immobilière, celle-ci devant garantir le remboursement partiel du dommage subi (500'162 ; 600'039). A______ a précisé que le conseil des sociétés clientes lui avait adressé un courrier lui demandant de ne pas vendre et de continuer à entretenir la propriété (500'159).

f.e. Le 8 décembre 2010, les biens mobiliers ont été inventoriés et estimés pour un montant total de CHF 448'000.-. Parmi ces objets figurait au chiffre 87 un "Lot de bibelots et bijoux divers" estimés à CHF 30'000.- (500'181).

A______ a affirmé avoir vendu, en 2012, des bijoux faisant partie de cet inventaire mais qui n'avaient à l'époque pas été estimés correctement, pour la somme de CHF 160'000.- (500'158).

Constitution de deux cédules hypothécaires sur le AX______ en 2011 et 2013

g.a. A______ a entamé une relation avec S______ au début de l'année 2011. Ce dernier a emménagé chez elle au printemps de cette année-là. Elle lui a fait part de ses difficultés financières en raison des importantes pertes qu'elle avait causées aux sociétés clientes de W______ SA mais également des travaux de rénovation qu'elle avait entamés pour AX______ en 2008, lesquels n'avaient pas été payés en raison de la faillite de l'architecte en charge de ceux-ci, et dont certains avaient été mal réalisés (500'159).

g.b. Ayant mis en vente AX______ dans le courant de l'année 2011 afin d'"honorer [s]es engagements" notamment envers les sociétés clientes, A______ a reçu, au mois de juin 2011, une offre d'achat d'un potentiel acquéreur portant sur un montant de CHF 5'500'000.-. Elle a toutefois décidé, avec S______, de ne pas procéder à cette vente, celui-ci ayant proposé de "financer des travaux ou solder des problèmes existants" (500'163).

g.c. S______ a ainsi versé au conseil de sa compagne un montant de CHF 500'000.- afin de régler les factures les plus urgentes liées aux travaux de la maison. Ce montant a été fixé par S______, lequel lui semblait correspondre aux dépenses nécessaires (500'163).

Celles-ci ont été garanties par une première cédule hypothécaire au porteur (ID.6______), inscrite le 21 novembre 2011, pour un montant de CHF 500'000.-. Un premier contrat de prêt entre A______ et S______ a été conclu dans la foulée, le 1er janvier 2012 mais daté du 18 novembre 2011, portant sur un montant équivalent.

Puis, en septembre 2012, A______ et S______ ont étendu la cédule hypothécaire d'un montant de CHF 600'000.- (500'162 ; 500'163 ; 710'407) et ont concomitamment conclu un avenant au premier contrat de prêt portant sur le même montant. S______ a expliqué que les travaux avaient dépassé l'encours du premier prêt (500'162) tandis que A______ a affirmé que les travaux de rénovation du AX______ étaient alors achevés, le but de l'avenant étant d'entamer des travaux paysagers (500'162).

Ce contrat de prêt ainsi que son avenant prévoyaient la remise de la cédule hypothécaire au conseil de A______ (500'176 ; 710'407ss).

g.d. Le 13 août 2013, A______ a établi une nouvelle cédule hypothécaire au porteur en faveur de S______, pour un montant de CHF 900'000.- (ID.7______).

S______ a établi un second contrat de prêt aussitôt après la constitution de la cédule pour le même montant (500'162 ; 710'014). Il a expliqué qu'à partir de fin 2012, il y avait encore des améliorations à apporter dans le jardin et la propriété en général, et le montant de la couverture hypothécaire était d'ores et déjà dépassé (500'162).

Ce contrat de prêt, antidaté au 1er avril 2013, avait pour objet l'extension, la rénovation et l'amélioration de la propriété mais également "le maintien du train de vie de A______ conformément à ses souhaits". Il prévoyait également la remise de la cédule hypothécaire au porteur à S______ ainsi que l'augmentation du montant du prêt à la seule initiative de ce dernier (710'014).

Selon les listes de dépenses que S______ a établies, a posteriori, figurent notamment des dépenses chez BA______, des paiements de factures de cartes de crédit de A______, des paiements pour divers travaux y compris l'aménagement du "bureau de Monsieur S______" ou la plantation d'arbres sur la propriété (500'178ss ; 600'367ss ; 600'424ss).

g.e. Selon leurs propres explications, A______ et S______ avaient conscience qu'en constituant ces cédules hypothécaires pour un montant de CHF 2'000'000.-, le bien serait entièrement grevé et qu'il ne resterait donc plus rien en cas de vente, au vu de la valeur du bien, oscillant entre CHF 4'500'000.- et CHF 5'500'000.-, d'après les différentes estimations effectuées, et de l'existence de deux cédules préexistantes d'un montant total de CHF 2'900'000.- (500'162, 500'163, 500'164, 600'042).

g.f. Entre 2015 et 2018, S______ a continué de payer "les charges" de A______ sans que ces montants ne soient plus garantis par des cédules (500'160).

g.g. Pour A______ et S______, il ne s'agissait pas de réels contrats de prêts dans la mesure où il était clair pour les deux parties qu'elle n'avait pas les moyens de les rembourser. S______ a expressément déclaré qu'il savait que, sauf miracle, elle ne pourrait pas les rembourser. Idéalement, si tout s'était passé harmonieusement, le couple y serait demeuré jusqu'à la fin de leur vie (500'159).

A______ ne devait d'ailleurs pas non plus s'acquitter d'intérêts en faveur de S______ (500'167, 500'172). Ce n'est qu'en 2019, soit au moment de leur rupture, que S______ a décidé de dénoncer les différents prêts et de réclamer l'intégralité du capital et des intérêts dus (500'160).

g.h. A______ a précisé que lorsqu'elle avait remis les cédules à S______, il connaissait les faits qui lui étaient reprochés (500'152), de même qu'il savait qu'elle risquait d'être poursuivie pénalement (500'157) et de devoir rembourser les pertes qu'elle avait causées. Il avait d'ailleurs participé aux réunions entre son conseil et celui des sociétés clientes (500'175).

S______ avait requis le système des prêts et des cédules hypothécaires, selon ce qu'il lui avait expliqué, pour des raisons fiscales d'une part, ce dernier étant taxé au forfait, soit selon ses dépenses, et, d'autre part, afin d'éviter que les bénéfices de leurs investissements dans le AX______ ne reviennent à son fils, avec lequel elle n'entretenait plus de rapport depuis des années, s'il devait lui arriver quelque chose ou en cas de séparation (500'163, 500'164).

Elle l'avait accepté car c'était la seule solution pour pouvoir payer les poursuites et les malfaçons liées aux travaux qu'elle avait entamés au AX______, sans quoi elle risquait de tout perdre de toute façon (500'174) : "C'était ça ou la vente de la maison", et la seule personne sur cette terre qui pouvait lui réclamer quelque chose en lien avec AX______, c'était X______, qui avait partagé 40 ans de sa vie et sans qui elle n'aurait jamais pu acquérir ce bien (500'177).

Elle n'avait toutefois pas accepté ce montage dans le but de léser les sociétés clientes (500'163).

g.i. S______ a réfuté avoir eu tout de suite connaissance des faits reprochés à A______, affirmant avoir initialement seulement su qu'elle avait causé des pertes aux sociétés clientes et qu'elle les aidait à récupérer leur argent auprès de R______. Il n'avait eu conscience de la problématique pénale et n'avait commencé à assister aux réunions avec les avocats qu'en 2014/2015 (500'158) ou encore en 2013 (500'159). Il avait bien mis en place ce système pour des raisons fiscales et successorales, pour éviter que ses investissements ne profitent au fils de sa compagne. Il n'avait pas acheté directement AX______ parce que A______ ne souhaitait pas vendre (500'178).

Séquestre du AX______ en 2014 et des deux cédules hypothécaires en 2017

h.a. Le 6 juin 2014, le Ministère public (MP) a ordonné le séquestre du AX______. A______ et S______ ont alors eu connaissance de l'existence d'une plainte pénale (500'175).

h.b. Interrogée sur la situation hypothécaire de sa propriété lors de l'audience du 9 juin 2015 au MP, A______ a expliqué qu'en raison de nombreuses factures impayées par l'architecte en charge des travaux, des hypothèques légales avaient été constituées. Elle avait dû pour cela "augmenter à deux reprises l'hypothèque initiale de CHF 2'900'000.- d'un montant supplémentaire de CHF 800'000.- à
CHF 900'00.-"
(500'015).

h.c. Les informations alors fournies par A______ ne correspondant pas à celles figurant sur l'extrait du Registre foncier, lequel révélait des cédules hypothécaires pour un montant total de CHF 4'900'000.-, dont deux au porteur sans plus d'information sur l'identité de celui-ci, des explications supplémentaires lui ont été requises.

Celle-ci a alors, le 19 août 2015, par le biais de son conseil, reconnu que le AX______ était en fait grevé de quatre cédules hypothécaires, précisant que "deux cédules [étaient] en mains de la banque et les deux autres en mains de Monsieur S______" (500'175 ; 600'049).

h.d. Sur insistance des parties plaignantes, lesquelles relevaient que ces titres se trouvaient en mains de Me B______ (600'093, 600'097), le MP en a, le 7 août 2017, ordonné le séquestre en mains de ce dernier.

h.e. Le 11 août 2017, Me B______ a répondu "prendre bonne note de ce séquestre en tant qu'il porte sur ce que je détiens" (600'106).

h.f. Sur insistance des parties plaignantes à nouveau, lesquelles relevaient que l'une des cédules était en réalité en mains de S______ (600'211), le MP a, le 25 février 2020, séquestré ce titre en mains de ce dernier.

h.g. A______ a expliqué que suite à ces ordonnances de séquestre en 2017, elle avait pris part à une réunion chez Me T______, le conseil de S______, lors de laquelle avait été discuté le fait qu'il "fallait attendre cinq ans depuis la constitution de la dette hypothécaire afin que celle-ci n'apparaisse pas comme fictive et dans le but de léser les clients de Me JAKOB. Concrètement, il fallait attendre 2018". Lors de cette réunion, S______ avait demandé à Me B______ de lui remettre l'autre cédule en sa possession, quitte à dire que cela s'était produit antérieurement à l'ordonnance de séquestre, ce qui avait été refusé (500'174).

h.i. S______ a confirmé avoir été présent lors de cette réunion en septembre 2017. Il a toutefois contesté avoir demandé à Me B______ de lui remettre la cédule qu'il détenait et d'indiquer que cela aurait été fait antérieurement aux séquestres. Face à la problématique des séquestres, il lui avait en revanche bien demandé de trouver une solution qui permettrait de stabiliser la situation du AX______. Il ne voulait pas continuer de payer pour une propriété qui lui coûtait trop cher et qui allait finir par être vendue dans le cadre de la procédure pénale. Ce n'était qu'à ce moment, qu'il avait indiqué à Me B______ qu'il détenait la seconde cédule. Il ne l'avait pas fait auparavant parce qu'il considérait que c'était à ce dernier d'être assez précis pour savoir qu'il n'en possédait qu'une (500'176).

Séquestre des biens mobiliers du AX______ en 2017

i.a. Le 7 août 2017, le MP a également séquestré les biens mobiliers localisés au AX______ selon l'inventaire du 8 décembre 2010 (500'182).

i.b. En 2018, A______ a invité S______ pour quelques jours au BB______ [hôtel] à BC______ [France] et organisé un repas avec des amis dans un restaurant 3 étoiles BD______, à l'occasion des 70 ans de ce dernier. Elle a pour ce faire, vendu des bijoux (710'451).

L'achat de la parcelle n° 5______ en février 2014

j. En février 2014, comme S______ craignait que ne soit construite une décharge sur le terrain adjacent au AX______, A______ a acquis, sur insistance de ce dernier, la parcelle en cause au moyen d'un prête-nom, U______. S______ a versé au notaire les CHF 120'000.- nécessaires à l'achat de ce terrain, par U______. Cette dernière a conclu, parallèlement, avec A______, un contrat de prêt portant sur le montant de CHF 120'000.- – sans amortissement – et un de bail, tous deux pour une durée de près de 30 ans, les intérêts et loyers se compensant pratiquement (500'166). Le contrat de prêt prévoyait une option d'achat prioritaire de cette parcelle en faveur de A______ (500'181).

S______ et A______ ont expliqué avoir procédé de la sorte non pas pour soustraire ce bien aux autorités de poursuite pénale mais parce que A______ n'était pas agricultrice et ne pouvait donc acheter ce bien. Ils n'avaient d'ailleurs appris l'existence d'une procédure pénale qu'ultérieurement (500'166 ; 500'181).

La parcelle n° 5______ est composée d'un "jardin" de 4'134 m2 et d'une forêt de 2'589 m2 (720'013).

Cession de créance à S______ en 2017

k.a. Par contrat daté du 30 juin 2017, A______ a cédé à S______ sa créance découlant du contrat de prêt la liant à U______.

k.b. A______ a expliqué avoir procédé à cette cession de créance sur insistance de S______, en date du 1er octobre 2017. Le but de l'opération était de rendre crédible, vis-à-vis des autorités fiscales, le paiement des intérêts dus à S______ en vertu des contrats de prêt. S______ lui avait ainsi versé la somme de CHF 120'000.-, le 9 octobre 2017, et elle-même lui avait ensuite retransféré ce montant en deux versements, de CHF 38'049.- et de CHF 58'819.-, à titre de paiement des intérêts pour les années 2013 et 2014, le solde lui ayant été remis en cash (500'166, 500'182).

Elle ne s'était pas acquittée des intérêts pour les années précédentes (500'166).

k.c. S______ a expliqué qu'il s'était rendu compte, en 2016, qu'il fallait que A______ s'acquitte des intérêts qui lui étaient dus en vertu des contrats de prêt, pour des raisons fiscales. Comme elle n'avait pas les moyens financiers pour ce faire, il avait eu l'idée de conclure avec elle, au cours de l'année 2016 et en mars 2017, des contrats de cession des objets mobiliers du AX______, lesquels devaient compenser les intérêts dus pour 2015 et 2016. À la réception de l'ordonnance de séquestre sur les biens mobiliers du AX______, il avait alors renoncé à ces contrats de cession. Aucun de ces objets n'avait d'ailleurs été vendu depuis. Il avait ensuite eu l'idée de procéder à cette cession de créance. Il était au courant des saisies pénales sur les autres bien-fonds mais la parcelle n° 5______ n'était pas encore séquestrée (500'167, 500'170).

Pour les années 2011 à 2015, les intérêts avaient été soldés par virement (500'180). S______ n'a pas produit les documents démontrant ces virements malgré le délai qui lui avait été imparti par le MP.

S'il avait renoncé aux contrats de cession des objets mobiliers en sa faveur au moment où ceux-ci avaient été saisis pénalement, il n'en avait pas fait de même s'agissant des cédules hypothécaires séquestrées, parce qu'il estimait qu'elles n'étaient pas concernées et les montants n'étaient pas les mêmes (500'177).

Séquestre de la parcelle n° 5______ en 2020

l. Le 17 novembre 2020, le MP a ordonné la mise sous séquestre de la parcelle n° 5______ (immeuble B-F V______ 4______/5______).

C. a. En appel, A______ a confirmé ses précédentes déclarations.

a.a. Les rétrocessions de R______ avaient été versées sur un compte dont X______ était bénéficiaire. Elle avait vécu en concubinage avec lui durant plus de 30 ans. Lorsqu'il lui donnait quelque chose pour son train de vie, elle ne savait pas d'où venait l'argent. C'était lui qui avait financé l'appartement à la rue Peschier ainsi que les œuvres d'art, dont la revente avait permis l'acquisition du AX______.

a.b. Elle avait procédé aux multiples retraits en espèces sur le compte de AR______ SA pour les remettre, à Genève ou en Angleterre, aux clients qui en faisaient la demande. Le cash était retiré de AR______ SA parce qu'il n'y avait pas de liquidités disponibles. En fait, elle ne savait plus. Ces retraits avaient cessé en 2007 car X______ avait décidé qu'il fallait arrêter de remettre de l'argent cash aux clients. Les secrétaires qui avaient retiré des fonds l'avaient fait sur instructions de AN______, de X______ ou d'elle-même. Ils avaient probablement remis des quittances lors de la remise d'argent aux clients mais pas lorsqu'ils se rendaient en Angleterre, afin d'éviter de voyager avec un document qui indiquait l'ayant droit économique d'une société. Les archives de W______ SA avaient été nettoyées, raison pour laquelle, probablement, aucune quittance n'avait été retrouvée. Elle n'avait pas utilisé les espèces retirées de AR______ SA à des fins personnelles, malgré ce qui était dit à l'avant dernier paragraphe du rapport "AU______", page 51 (100'124). Elle n'avait rien signé en ce sens et le rapport évoqué ne lui avait pas été soumis pour approbation.

a.c. U______ était intervenue en qualité de prête-nom pour l'acquisition de la parcelle n° 5______ à V______ et la transaction avait été simulée. Toute cette histoire avait été montée de A à Z par S______. Cette transaction avait été effectuée en 2014, avant qu'elle n'ait eu connaissance du fait qu'elle faisait l'objet d'une plainte pénale.

a.d. Elle n'avait pas non plus connaissance de la plainte pénale lors de la constitution des cédules hypothécaires grevant le AX______ en faveur de S______. En 2011, elle avait envisagé de vendre ce bien dans l'optique de trouver un accord avec les sociétés clientes par rapport à "ce qu'elle avait fait". S______ lui avait toutefois conseillé de ne pas vendre. Elle avait alors conclu avec lui un premier contrat de prêt pour remettre à flot le AX______ en raison des factures impayées laissées par son architecte, qui agissait comme entrepreneur général, à hauteur de CHF 400'000.-. Elle avait constitué et remis à S______ la première cédule parce que ce dernier l'avait convaincue de procéder de la sorte, pour des raisons successorales et fiscales. Ce dernier avait ensuite exigé l'augmentation de celle-ci, faute de quoi elle devait rembourser le premier prêt de CHF 500'000.-. Il savait parfaitement, à ce moment-là, que cela lui était impossible d'un point de vue financier. En outre, le prêt était mentionné dans sa déclaration fiscale. Il l'avait piégée. Elle n'avait toutefois pas imaginé, en constituant ces cédules, pouvoir se mettre dans une situation plus confortable vis-à-vis des créanciers. Elle considérait que si elle pouvait désormais vendre sa propriété pour CHF 4'500'000.-, ce serait exceptionnel. Elle n'était toutefois pas prête à céder le AX______ aux sociétés clientes lésées. Elle s'était battue durant sept années pour éviter d'en arriver à la Cour de justice. Toutes ses propositions avaient systématiquement été refusées.

S______ avait connaissance des faits qui lui étaient reprochés au moment de la constitution des cédules hypothécaires. Elle ne se souvenait pas de la séquence exacte de l'établissement de ces titres mais à tout le moins au moment de la création du second, il avait connaissance de la menace potentielle d'une plainte pénale pesant sur elle. Il avait agi ainsi pour s'approprier le AX______.

b. Par la voix de leurs conseils, les sociétés appelantes persistent dans leurs conclusions.

b.a.a. Pendant dix ans, A______ avait caché les pertes aux sociétés clientes. Or, au moment de la perte initiale, la situation était encore gérable. Chaque acte que l'appelante avait accompli ensuite avait empêché les sociétés clientes de prendre des mesures pour éviter des pertes supplémentaires. L'appelante avait dressé un écran de fumée devant les sociétés clientes, les trompant ainsi astucieusement et les induisant à des omissions, leur causant de la sorte un préjudice. Le chiffre III de l'acte d'accusation visait ce complexe de faits, pour lequel l'appelante devait également être reconnue coupable d'escroquerie par métier.

b.a.b. L'appelante n'avait fourni aucune explication satisfaisante en cours de procédure au sujet des retraits en espèces du compte de AR______ SA. Cette société avait été utilisée par l'appelante pour obtenir frauduleusement des prêts de R______. Elle avait agi à l'insu des sociétés clientes mais également de Peter et de X______. Personne ne savait qu'il y avait de l'argent sur ce compte. A______ l'avait utilisé comme portefeuille personnel. Or, il n'était pas crédible qu'elle eût voulu rendre le fruit de ses crimes aux sociétés clientes. Elle se serait mise en danger. Les sociétés clientes disposaient de liquidités jusqu'à la réalisation des avoirs nantis. Il y avait des dizaines de millions sur ces comptes, si bien que si les clients lui avaient demandé de retirer de l'argent de leurs comptes et de l'apporter en espèces elle aurait pu le faire depuis ceux-ci. En revanche, les explications fournies dans le cadre du rapport "AU______", soit qu'elle avait utilisé l'argent issu de ces retraits pour financer son train de vie et sa maison, étaient plus que vraisemblables. Elle s'était donc bien enrichie illégitimement. Le seul fait de retirer de l'argent sur un compte bancaire réalisait du reste, en soi, un enrichissement, sans qu'il ne fût nécessaire d'en déterminer la destination puisque les espèces étaient des choses fongibles qui se mélangeaient au patrimoine de celui qui les retirait.

b.b.a. Il fallait faire droit aux conclusions civiles des parties plaignantes en lien avec les pertes subies, ou à tout le moins déduction faites des montants initialement investis, ce qui ne présentait aucune complication particulière. Il fallait en outre revoir l'indemnisation requise fondée sur l'art. 433 du Code de procédure pénale en comptabilisant les frais alloués pour la réalisation de l'expertise "AU______". Celle-ci n'avait pas seulement pour but d'établir les manquements de R______ et n'avait donc pas été menée uniquement pour les besoins de la procédure civile opposant les parties plaignantes à cet établissement mais bien également pour permettre aux sociétés clientes de faire valoir leurs droits dans la procédure pénale. Elle avait notamment permis de chiffrer le montant des pertes invoquées dans ce cadre. L'appel ne concernait en revanche pas les montants alloués par le TCO au titre des frais d'avocat en vertu de l'art. 433 CPP.

b.b.b. Le TCO avait erré en considérant que seules les sociétés de trading avaient bénéficié du produit de l'infraction. Il fallait appliquer la théorie du Durchgriff. Les sociétés de trading étaient des BVI et des panaméennes placées sous le contrôle effectif de A______. Elle était administratrice, ayant-droit économique et titulaire d'une procuration sur leurs comptes bancaires. Elle pouvait ainsi aller se servir sur ceux-ci comme s'il s'agissait de ses comptes personnels.

Tout ce qu'elle avait acquis durant la période pénale ne pouvait provenir que de son activité délictuelle, puisqu'elle n'avait pas d'autres sources de revenu. Elle avait acheté le AX______ en juin 2007, soit durant les "belles années". Il fallait donc le confisquer à titre de valeur de remplacement résiduelle.

À considérer que ce bien n'avait pas été acquis au moyen des montants nantis et débités frauduleusement alors il fallait prononcer une créance compensatrice à hauteur du montant du dommage et maintenir les séquestres en garantie.

À tout le moins, fallait-il prononcer la confiscation ou la créance compensatrice à hauteur du montant des rétrocessions puisqu'il était établi que A______ en avait perçues et utilisées à des fins personnelles. Il s'agissait du produit indirect de l'infraction, soit des valeurs confiscables ou pouvant faire l'objet d'une créance compensatrice. Le TCO avait d'ailleurs à juste titre retenu que le dessein d'enrichissement illégitime de A______, matérialisé par les rétrocessions obtenues grâce à son activité délictuelle, étaient à mettre en lien avec les montants nantis et débités frauduleusement.

b.b.c. La constitution de contrats de prêts et de cédules hypothécaires en 2011 et 2013 et l'acquisition, en 2014, de la parcelle adjacente au AX______ au moyen d'un prête-nom, de contrats de prêt et de bail avec des intérêts censés se compenser de même que des contrats de cession de créance, étaient représentatifs du comportement de A______ durant la période pénale. Elle ne s'était jamais départie de sa mentalité et de sa tendance à mettre en place des écrans de fumée pour tromper tout le monde, tout en se présentant comme une victime de ses clients, du R______, de S______ ou encore du fisc vaudois. Elle n'avait pas restitué un seul centime. Pas une fois, elle n'avait facilité la tâche des parties plaignantes, alors que depuis les faits, elle avait dépensé des millions dans sa propriété et pour financer son train de vie. Si au début les CHF 400'000.- avaient été dépensés pour sauvegarder la propriété, très rapidement, soit dès 2013, les dépenses avaient été somptuaires, pour la plantation d'arbres, le salaire du jardinier de CHF 3'000.- à 3'800.- par mois, des dépenses chez BA______, etc.

L'opération avait comme but de frustrer les expectatives successorales du fils de A______, de mettre en œuvre une optimisation fiscale mais également de léser les sociétés clientes, lesquelles étaient déjà créancières et auxquelles elle avait donné des garanties quant au maintien de ce bien. Les listes de dépenses établies a posteriori et ayant évolué au fil du temps pour coller au montant exact des cédules, démontraient qu'il s'agissait d'un montage et non de véritables prêts. S______ n'avait d'ailleurs jamais réclamé, avant la séparation, leur remboursement ni le paiement des intérêts car ils étaient simulés depuis le début. Ce dernier avait participé à toutes les réunions chez le conseil de sa compagne dès les revendications des sociétés clientes en 2010, procédure pénale ou non. Il savait que cette dernière avait des dettes de plusieurs dizaines de millions de francs.

Le résultat de toute cette opération complexe et sophistiquée avait été de transformer la première parcelle en une dette hypothécaire envers S______ et d'enregistrer la seconde au nom d'un prête-nom, soit de les soustraire à la confiscation. Le jugement du TCO comportait une lacune à ce propos.

c. Par la voix de son conseil, S______ explique être une victime au même titre que les parties plaignantes. Il n'avait eu connaissance des faits que postérieurement à la constitution des prêts et cédules hypothécaires. Il avait prêté les montants en cause à sa compagne en raison de ses graves difficultés financières dues aux travaux de rénovation et de ses sentiments envers elle. Mais ils venaient de se rencontrer, il était donc normal qu'il requiert une garantie. Les contrats de prêts de 2011 et 2012 avaient été préparés par Me B______ pour éteindre les créances les plus urgentes et la cédule hypothécaire avait été instrumentée par notaire à BE______ [VD].

En 2013, il avait concédé un nouveau prêt, garanti par une nouvelle cédule, et avait rédigé lui-même le contrat d'apport de plus-values à la propriété, comme la bibliothèque encastrée dans le bureau, mais également financer le train de vie de A______, qui à partir de 2013 ne percevait plus d'indemnités perte de gain.

Ensuite, il avait continué à prêter des sommes d'argent mais réduit d'année en année les montants jusqu'à leur rupture en décembre 2019. Il n'avait certes pas demandé de nouvelle cédule mais le contrat du 1er avril 2013 prévoyait une clause permettant l'augmentation du montant du prêt.

Il était par ailleurs conscient que sa compagne n'avait pas les moyens de s'acquitter des intérêts, raison pour laquelle ils avaient prévu une clause selon laquelle ceux-ci s'ajouteraient au capital.

En tout, il avait dépensé CHF 2'000'000.-, dont il avait retracé le détail à la fin de chaque année civile. Il avait donc fourni une contreprestation, sans l'ombre d'un doute.

Il n'avait procédé à aucun montage dans le but de léser les parties plaignantes. D'ailleurs, la seule bénéficiaire de la transaction avec U______ était A______ puisqu'elle était la seule propriétaire de AX______.

Il n'avait pas davantage utilisé sa compagne comme un écran fiscal puisqu'il était imposé au forfait et n'avait donc aucune possibilité de procéder à des déductions en déclarant les différents prêts. L'assiette fiscale était d'ailleurs déterminée sans que ne soient requises de justifications de dépenses. La loi n'avait été modifiée en ce sens qu'en 2021.

Les parties plaignantes ne pouvaient s'en prendre qu'à elles-mêmes. Elles avaient découvert le dommage provoqué en 2010 et attendu plus de trois ans pour déposer plainte. L'engagement de A______ de ne pas aliéner le bien ne le liait pas puisqu'il était un tiers de bonne foi.

La cédule hypothécaire saisie en ses mains devait donc lui être restituée. Celle saisie en mains de Me B______ devait être restituée à ce dernier, la question de savoir à qui elle devait revenir en définitive relevant du droit civil.

d. Par la voix de son conseil, A______ persiste dans ses conclusions.

d.a. C'était à raison que le TCO avait retenu qu'il n'y avait pas lieu de la condamner pour les faits décrits sous chiffre III de l'acte d'accusation. Les sociétés clientes avaient investi de leur propre gré en connaissance de cause et les investissements leur avaient été profitables les deux premières années, avant que n'interviennent les premières pertes. En tout état, l'acte d'accusation ne comprenait aucun élément permettant d'en déterminer le montant et celles-ci n'étaient pas en lien avec un éventuel enrichissement.

d.b. Il en allait de même du chiffre IV de l'acte d'accusation. Les retraits en espèces intervenus sur le compte de AR______ SA avaient été effectués sur instructions des clients, étant relevé qu'il était à l'époque monnaie courante de cacher son argent en Suisse et de le retirer de façon tout aussi discrète. Elle n'avait jamais indiqué en cours de procédure avoir procédé de la sorte pour ses besoins personnels et l'expertise "AU______" ne lui avait jamais été soumise pour approbation. Le seul fait de retirer des sommes d'un compte bancaire ne suffisait pas pour retenir qu'elle voulait se les approprier et le dossier ne comportait aucun élément sur la destination de ces retraits, tels des avis de crédit sur son compte personnel, ni ne démontrait en quoi les sociétés clientes auraient été lésées par ces retraits.

d.c. A______ n'avait pas agi par égoïsme, par appât du gain ou pour que le produit du crime lui profite. Elle avait été prise dans une spirale infernale et ne voulait pas fragiliser l'homme qu'elle aimait. Elle espérait pouvoir se refaire et récupérer les pertes. Elle n'avait nullement attiré d'autres clients dans cette spirale. Elle avait manqué de courage et avait tenté d'en parler à X______. Elle avait agi par orgueil, par fidélité envers ce dernier et par détresse profonde.

Il fallait prendre en considération qu'elle était à la retraite et n'était plus active dans le monde de la finance depuis dix ans.

Lors de la découverte des faits, elle avait tenté de mettre fin à ses jours. Elle avait reconnu les faits immédiatement, même avant l'ouverture de la procédure pénale et avait répondu à toutes les questions. Elle ne voulait en revanche pas admettre ce qu'elle n'avait pas commis et était usée de devoir se répéter. Elle s'en voulait même si elle n'avait pas formellement présenté des excuses dans le cadre de la procédure pénale, ce qui ne signifiait d'ailleurs pas qu'elle ne l'avait pas fait au cours des discussions entre parties. Elle avait effectué de nombreuses démarches pour essayer d'indemniser les parties plaignantes. Il fallait ainsi tenir compte de son repentir sincère.

Dans tous les cas, elle ne possédait plus rien si ce n'était le AX______ et savait pertinemment qu'elle allait finir par le perdre. Lorsqu'elle indiquait qu'elle n'était pas prête à le céder aux parties plaignantes, c'était un cri de désespoir.

Elle n'était techniquement pas la seule responsable. Le rapport "AU______" avait établi les manquements de R______. L'absence de cette dernière dans la présente procédure conduisait à des zones d'ombre. L'on ignorait en effet qui était véritablement lésé, étant relevé que les parties plaignantes avaient été indemnisées par X______/AN______ et W______ SA.

Il fallait par ailleurs tenir compte de l'écoulement du temps et de la violation du principe de célérité, l'instruction ayant duré pendant plus de huit ans, alors que les faits avaient été admis très rapidement, soit lors de la première audience, qui s'était tenue le 10 mars 2015. Il y en avait d'ailleurs eu très peu, soit à une fréquence d'environ une par année ou année et demi.

d.e. Il fallait renvoyer les parties plaignantes à agir au civil. Les montants réclamés ne correspondaient pas à leur dommage réel. Elles avaient retiré des montants au fur et à mesure et l'instruction n'avait pas porté sur ces questions. Elles avaient par ailleurs conclu des accords pour solde de tout compte avec X______/AN______ et W______ SA.

Le but de la confiscation et de la créance compensatrice était que le crime ne paie pas. Or, le crime n'avait en l'occurrence pas payé. A______ avait perdu des montants sur les marchés financiers et avait obtenu des prêts du R______ pour tenter de récupérer les pertes et non pas pour détourner ceux-ci à son profit. Il n'y avait donc pas de produit du crime à neutraliser. L'instruction n'avait en tout état pas permis d'identifier quels montants du crime elle aurait personnellement perçu. Elle avait par ailleurs expliqué avoir acheté le AX______ grâce à son deuxième pilier, la vente de son appartement acquis en 1982 et d'une œuvre d'art, si bien qu'il ne pouvait être confisqué ni maintenu en séquestre en garantie d'une créance compensatrice.

La cédule hypothécaire saisie en mains de S______ devait également lui être restituée, voire à Me B______, qui la remettrait en temps voulu à son ayant droit.

e. Le MP conclut, frais d'appel à charge des appelants, au rejet des appels, à la confirmation du jugement entrepris et au bon accueil des conclusions des parties plaignantes et du tiers saisi fondées sur les art. 433 et 434 CPP.

D. A______, ressortissante française, titulaire d'un permis C, est née le ______ 1948. Elle est divorcée et à la retraite. À ce titre, elle perçoit une rente AVS annuelle de CHF 28'440.-. Selon ses dires, elle était, au moment du jugement de première instance, également aidée financièrement par des amis à hauteur de CHF 10'000.- par mois, montant lui permettant de rembourser son prêt hypothécaire, aide à laquelle elle a désormais décidé de renoncer. Elle est propriétaire de deux biens fonds à V______ (V______/2______, V______/3______), grevés tous deux de quatre cédules hypothécaires pour des montants respectivement de CHF 700'000.-, CHF 2'200'000.-, CHF 1'100'000.- et de CHF 900'000.-. Elle jouit également de la parcelle adjacente (V______/5______), officiellement en qualité de locataire pour une durée de 30 ans.

Elle n'a pas d'antécédent judiciaire en Suisse.

E. Me B______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, hors débats d'appel, lesquels ont duré huit heures et 20 minutes, 36 heures et 50 minutes, dont 15 minutes de courrier au TCO, dix minutes de courrier à la CPAR, 30 minutes de lecture du jugement du TCO, une heure et 40 minutes de rédaction de la déclaration d'appel et une heure et 45 minutes de recherches juridiques.

EN DROIT :

1. Les appels sont recevables pour avoir été interjetés et motivés selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large. En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3 ; 127 I 28 consid. 2a).

2.2.1. À teneur de l'art. 146 al. 1 CP, celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne par des affirmations fallacieuses ou par la dissimulation de faits vrais ou l'aura astucieusement confortée dans son erreur et aura de la sorte déterminé la victime à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers sera puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

Par tromperie, il faut entendre tout comportement destiné à faire naître chez autrui une représentation erronée des faits, qui divergent de la réalité (ATF 140 IV 11 consid. 2.3.2 ; 135 IV 76 consid. 5.1). La tromperie peut être réalisée non seulement par l'affirmation d'un fait faux, mais également par la dissimulation (par commission ou par omission improprement dite) d'un fait vrai (ATF 140 IV 206 consid. 6.3.1.2 ; 140 IV 11 consid. 2.3.2). La tromperie peut consister en comportement explicite ou être réalisée par actes concluants (ATF 140 IV 11 consid. 2.3.2 ; 127 IV 163 consid. 3b).

Une simple tromperie ne suffit toutefois pas. Encore faut-il qu'elle puisse être qualifiée d'astucieuse. Il y a astuce lorsque l'auteur recourt à un édifice de mensonges, à des manœuvres frauduleuses ou à une mise en scène, mais aussi lorsqu'il donne simplement de fausses informations, si leur vérification n'est pas possible, ne l'est que difficilement ou ne peut raisonnablement être exigée, de même que si l'auteur dissuade la dupe de vérifier ou prévoit, en fonction des circonstances, qu'elle renoncera à le faire en raison d'un rapport de confiance particulier (ATF
142 IV 153 consid. 2.2.2 ; 135 IV 76 consid. 5.2).

Lorsque l'escroquerie se rapporte à des investissements financiers ("Anlagebetrug"), le comportement de l'auteur consiste généralement à tromper la ou les victimes quant à l'utilisation faite des capitaux confiés, les fonds n'étant pas investis conformément au but convenu mais, en réalité, utilisés par l'auteur à des fins personnelles ou pour payer des rendements (fictifs) à d'autres investisseurs, respectivement pour satisfaire leurs demandes de remboursement. On parle alors généralement d'escroquerie "pyramidale" ("Schneeballsystem"). En outre, s'il y avait une relation préexistante entre les parties et la victime qui n'avait pas eu de raison de se plaindre du comportement de l’auteur par le passé, l'astuce peut également résulter du fait que l'auteur exploite un rapport de confiance particulier, découlant en principe d'une position de garant, ce que l’auteur sait être de nature à dissuader la dupe d'entreprendre des vérifications pour s'assurer de l'exactitude ou du caractère complet des informations qu'il lui a communiquées (arrêt du Tribunal fédéral 6b_423/2013 du 27 juin 2013 consid. 2.2 et 2.3 ; G. STOUDMANN, Commentaire romand, Code pénal II, Bâle 2017, n. 42 ad art. 146). 

L'acte de disposition peut consister en tout acte ou omission qui cause "directement" un préjudice au patrimoine de la dupe ou d'un tiers: paiement d’une somme d'argent, remise de biens à l’escroc, octroi d’un crédit, signature d’un contrat, renonciation à faire valoir une prétention, renonciation à des droits dans une succession, etc. Selon le Tribunal fédéral,"l’exigence d’une telle immédiateté résulte de la définition même de l’escroquerie", qui se caractérise en particulier par le fait que le dommage doit avoir été causé par un acte de disposition de la dupe elle-même ("Selbstbeschädigung") (G. STOUDMANN, op. cit., n. 97 ad art.146).

Pour que le crime d'escroquerie soit consommé, l'erreur dans laquelle la tromperie astucieuse a mis ou conforté la dupe doit avoir déterminé celle-ci à accomplir un acte préjudiciable à ses intérêts pécuniaires, ou à ceux d'un tiers sur le patrimoine duquel elle a un certain pouvoir de disposition (arrêt du Tribunal fédéral 6B_944/2016 du 29 août 2017 consid. 3.3). La dupe doit conserver une certaine liberté de choix (B. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, n. 28 ad art. 146 CP). L'erreur créée ou confortée par la tromperie doit motiver l'acte (ATF 119 IV 210 consid. 3d et arrêt du Tribunal fédéral 6B_552/2013 du 9 janvier 2014 consid. 2.3.2).

L'escroquerie n'est consommée que s'il y a un dommage (arrêts du Tribunal fédéral 6B_130/2016 du 21 novembre 2016 consid. 2.1 et 6B_552/2013 du 9 janvier 2014 consid. 2.3.2 ; CORBOZ, op.cit., N 32 ad art. 146 CP). Celui-ci est réalisé lorsque l'on se trouve en présence d'une lésion du patrimoine sous la forme d'une diminution de l'actif, d'une augmentation du passif, d'une non-augmentation de l'actif ou d'une non-diminution du passif. Un dommage temporaire ou provisoire est suffisant (ATF 122 IV 279 consid. 2a p. 281; arrêt 6B_1054/2010 du 16 juin 2011 consid. 2.2.1). Un dommage peut être concrétisé au moment de la signature de l'acte préjudiciable aux intérêts pécuniaires même si celui-ci est par la suite compensé (ATF 122 II 422 consid. 3b/aa p. 430). Le dommage ne suppose pas toujours la perte, sans contrepartie suffisante, d'un bien ; une mise en danger constitue déjà un dommage si elle entraîne une diminution de valeur du point de vue économique (arrêt du Tribunal fédéral 6B_530/2008 du 8 janvier 2009 consid 3.3 avec référence aux ATF
122 IV 279 consid. 2a p. 281 et 121 IV 104 consid. 2c). Dans un arrêt récent le Tribunal fédéral a ainsi jugé, dans le cas d'un emprunteur ayant donné à la banque de fausses informations sur sa situation financière, que le dommage était intervenu au moment de l'octroi du prêt et cela même si le prêt avait en définitive été remboursé conformément au contrat (arrêt du Tribunal fédéral 6B_112/2018 du 4 mars 2019 consid 6.2.2).

Il n'est ainsi pas nécessaire que le dommage soit chiffré ni d'ailleurs qu'il corresponde à l'enrichissement de l'auteur (arrêt 6B_597/2010 du Tribunal fédéral du 22 décembre 2010 consid. 2.5, et les références citées). L'enrichissement de l'auteur ou d'un tiers n'est en effet pas une condition objective de punissabilité (arrêt du Tribunal fédéral 6B_541/2011 du 18 octobre 2011 consid. 5.1). Ainsi l'infraction d'escroquerie est consommée ("vollendet") avec la survenance du dommage patrimonial chez le lésé et achevée ("beendet") avec l'enrichissement illégitime de l'auteur (arrêt du Tribunal fédéral 6B_97/2019 du 6 novembre 2019 consid 2.1.2).

Sur le plan subjectif, l'escroquerie est une infraction intentionnelle, l'intention devant porter sur tous les éléments constitutifs de l'infraction. L'auteur doit en outre agir dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime (ATF 134 IV 210 consid. 5.3). Il n’est pas nécessaire que l’enrichissement soit le seul mobile de l'auteur. Il faut cependant que l'enrichissement ait été voulu par ce dernier, à tout le moins par dol éventuel, même si sa survenance était incertaine. Aussi, l'élément subjectif de l'escroquerie fait défaut lorsque l'enrichissement obtenu par l’auteur apparaît comme la conséquence indifférente, voire même indésirable (quoique nécessaire) de son comportement, appelé à produire un tout autre résultat (G. STOUDMANN, Commentaire romand, Code pénal II, Bâle 2017, ad art. 146 n. 125 ; ATF 101 IV 177 consid. II.8).

L'auteur agit par métier lorsqu'il résulte du temps et des moyens qu'il consacre à ses agissements délictueux, de la fréquence des actes pendant une période déterminée, ainsi que des revenus envisagés ou obtenus, qu'il exerce son activité coupable à la manière d'une profession, même accessoire. Il faut que l'auteur aspire à obtenir des revenus relativement réguliers représentant un apport notable au financement de son genre de vie et qu'il se soit ainsi, d'une certaine façon, installé dans la délinquance (ATF 129 IV 253 consid. 2.1 ; 123 IV 113 consid. 2c).

2.2.2. Les sociétés appelantes concluent à ce que A______ soit reconnue coupable d'escroquerie par métier, en lien avec le chiffre III de l'acte d'accusation et réclament, sur cette base, le remboursement des montants initialement investis.

Il faut admettre que l'appelante a bien astucieusement trompé les sociétés clientes, avec lesquelles elle était en relation depuis plusieurs années et qui n'avaient jamais eu à se plaindre de son comportement, en leur faisant croire à une gestion prolifique, en continuant à leur verser les intérêts convenus et en leur dissimulant les pertes, notamment en parquant les pertes sur des sous-comptes (comptes rubriques) dont elle s'abstenait de transmettre les relevés, les empêchant ainsi de prendre les mesures adéquates, et cela à tout le moins depuis 2002 (chiffres III.1.a. et c. de l'acte d'accusation), ainsi qu'elle l'a elle-même admis.

Les pertes s'accumulant toujours davantage et les comptes des sociétés de trading ne disposant plus suffisamment de fonds pour pouvoir continuer le trading et verser les intérêts sans éveiller les soupçons, l'appelante a, en outre, dès 2005, obtenu de manière illicite de R______ des lignes de crédit et des prêts garantis par des nantissements sur les comptes des sociétés clientes ainsi que des transferts d'argent depuis les comptes de celles-ci. Ce procédé frauduleux, dont les dupes étaient, dès 2005, à la fois R______ et les sociétés clientes, décrit dans l'acte d'accusation sous chiffres II et III.1.b et d, pour des raisons de compréhension, a lésé tant l'établissement bancaire, fût-ce temporairement, que les sociétés clientes.

Celles-ci ont ainsi, en raison des faits décrits tant sous chiffres II et III, été en définitive lésées à hauteur des montants nantis et de ceux débités frauduleusement, soit CHF 62'638'382.-, le dommage des parties plaignantes ayant déposé des conclusions civiles se montant à CHF 42'294'041.-.

L'appelante a agi, dès 2002, avec conscience et volonté, dans un dessein d'enrichissement personnel, soit celui de continuer à percevoir les rétrocessions de R______ sur les opérations de trading. Entre 2002 et 2010, alors que les investissements étaient déficitaires, l'appelante a en effet perçu des rétrocessions sur les opérations de trading d'un montant minimum de CHF 3'200'000.-. Elle a accordé un soin tout particulier à dissimuler au maximum la perception de ces rétrocessions, en requérant spécifiquement de R______ qu'il verse ces montants sur le compte privé de X______ puis sur le compte d'une société utilisée exclusivement à cet effet. Elle a reconnu qu'elle avait utilisé cet argent en partie pour le fonctionnement de W______ SA et en partie pour ses besoins personnels.

L'acte d'accusation décrit à satisfaction le dessein d'enrichissement personnel illégitime de l'appelante, concrétisé par les rétrocessions, lesquelles sont à mettre en lien tant avec les actes ayant consisté à dissimuler, dès 2002 à tout le moins, les pertes aux sociétés clientes, soit avec les chiffres III.1.a. et c de l'acte d'accusation, qu'avec les lignes de crédit, les nantissements et les transferts d'argent obtenus de façon frauduleuse dès 2005 (chiffres II et III.1.b et d de l'acte d'accusation), lui permettant la poursuite indue du trading.

En outre, à compter de 2005, et ainsi que l'a retenu le TCO sans que ce point ne soit contesté, il faut considérer que l'appelante a également agi dans le dessein de procurer un enrichissement illégitime aux sociétés de trading, permettant ainsi à ces dernières de poursuivre l'activité de trading et de tenter de réaliser des investissements fructueux, dans l'espoir à tout le moins de récupérer les pertes et de continuer de verser les intérêts dus aux sociétés clientes, ce qu'elle n'aurait pas pu faire sans le système frauduleux mis en place. L'on ne saurait en effet considérer que l'enrichissement des sociétés de trading représentait un résultat indésirable. Il était au contraire recherché et voulu, mais ne s'est en définitive pas concrétisé, les montants ayant été intégralement perdus sur les marchés financiers et rien ne permettant d'établir que les sociétés de trading ou l'appelante auraient bénéficié d'une quelconque autre façon de ces montants. Il n'est en particulier pas établi que cette dernière aurait transféré ou retiré des montants des comptes des sociétés de trading pour ses besoins personnels. En tout état, l'enrichissement de l'auteur ou du tiers n'est pas une condition de réalisation de l'infraction d'escroquerie, celle-ci étant réalisée par la survenance d'un dommage, ce qui est le cas in casu.

En conclusion, il convient de considérer, contrairement à ce qu'a retenu le TCO, que le chiffre III de l'acte d'accusation vient en réalité compléter le chiffre II, tout en apportant des éléments de faits supplémentaires.

Ainsi donc, le verdict de culpabilité d'escroquerie par métier, non contesté, prononcé par le TCO pour les faits décrits sous chiffre II, concerne également les faits décrits sous chiffres III.1.b et d de l'acte d'accusation, sans que cela ne conduise à la réforme du dispositif.

L'appelante doit également être reconnue coupable d'escroquerie par métier pour les faits dépeints sous chiffres III.1.a. et c, étant relevé que l'appelante n'a cessé ces agissements coupables qu'en 2010, si bien que ceux-ci ne sont pas atteints par la prescription (art. 98 let. b et c CP ; art. 71 let. b et c aCP).

L'appel des sociétés appelantes est admis sur ce point.

En revanche, et sans préjudice de ce qui précède, aucun comportement en lien avec les montants initialement investis n'est reproché à l'appelante à teneur de l'acte d'accusation, si bien que le remboursement de ces montants réclamé par les sociétés clientes sur cette base, ne saurait être admis, comme développé infra.

2.3.1. Selon l'art. 158 ch. 1 CP, celui qui, en vertu de la loi, d'un mandat officiel ou d'un acte juridique, est tenu de gérer les intérêts pécuniaires d'autrui ou de veiller sur leur gestion et qui, en violation de ses devoirs, aura porté atteinte à ces intérêts ou aura permis qu'ils soient lésés sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

Le gérant d'affaires qui, sans mandat, aura agi de même encourra la même peine.

Si l'auteur a agi dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, le juge pourra prononcer une peine privative de liberté d'un à cinq ans.

2.3.2. Celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura abusé du pouvoir de représentation que lui confère la loi, un mandat officiel ou un acte juridique et aura ainsi porté atteinte aux intérêts pécuniaires du représenté sera puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d’une peine pécuniaire (art. 158 ch. 2 CP).

2.3.3. Les sociétés appelantes concluent à ce que la prévenue soit reconnue coupable de gestion déloyale aggravée, en lien avec les retraits cash intervenus entre 2001 et 2007 sur le compte de AR______ SA (cf. chiffre IV de l'acte d'accusation).

L'acte d'accusation ne précise toutefois pas en quoi ces retraits seraient intervenus sans droit et le dossier ne contient aucun élément objectif permettant d'en établir les circonstances exactes. L'appelante a quant à elle expliqué avoir procédé à l'intégralité de ces retraits sur instructions de clients qui souhaitaient se faire remettre de l'argent cash et a contesté avoir déclaré, dans le cadre de l'établissement du rapport "AU______", qu'elle avait effectué ces retraits à des fins personnelles.

En l'absence d'éléments contraires au dossier, et en application du principe in dubio pro reo, la version de l'appelante ne saurait ainsi être exclue. Il est établi que l'appelante procédait aux opérations de trading pour le compte des sociétés clientes notamment par le biais de AR______ SA. Il est dès lors probable que certains clients préféraient que les fruits de leurs investissements leur soient remis en cash et qu'ils ont effectivement bénéficié de ces retraits au débit du compte de AR______ SA, ce qui a pu permettre de ne pas éveiller les soupçons, étant précisé que ni cette dernière société ni les sociétés clientes n'ont fait valoir de dommage en lien avec ces retraits dans le cadre de la présente procédure.

Il est d'ailleurs révélateur qu'à partir de 2005, AR______ SA a perçu une partie des prêts et lignes de crédit obtenus frauduleusement de R______.

Rien ne permet donc de retenir un comportement pénal supplémentaire en lien avec ces retraits et l'appelante doit être acquittée des chefs de gestion déloyale aggravée et/ou d'abus du pouvoir de représentation, pour lesquels elle a été mise en accusation, l'appel des sociétés appelantes étant rejeté sur ce point.

Le jugement sera néanmoins modifié puisqu'un acquittement doit intervenir en lieu et place du classement prononcé par le TCO (cf. art. 404 al. 2 CPP).

3. 3.1.1. L'escroquerie (art. 146 CP) est passible d'une peine privative de liberté maximale de cinq ans ou d'une peine pécuniaire (al. 1), et d'une peine privative de liberté de dix ans au plus ou d'une peine pécuniaire de 90 jours-amende au moins avec le métier (al. 2).

3.1.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Celle-ci doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle, ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1), ainsi que l'effet de la peine sur son avenir. L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

3.1.3. L'art. 48 CP prévoit que le juge doit atténuer la peine lorsque l'une ou l'autre des circonstances évoquées dans cette disposition est réunie. Parmi celles-ci figurent une détresse profonde (let. a ch. 2).

Il y a détresse profonde lorsque l'auteur est poussé à transgresser la loi pénale par une situation proche de l'état de nécessité, c'est-à-dire que, sous la pression d'une détresse particulièrement grave, il croit ne pouvoir trouver d'autre issue que la commission de l'infraction (ATF 147 IV 249 consid. 2.1 p. 251 ; 107 IV 94 consid. 4a p. 96). Le fait qu'elle résulte d'une faute ou d'une négligence de l'auteur de l'infraction ne suffit pas à exclure l'application de l'art. 48 let. a ch. 2 CP. Le bénéfice de cette circonstance atténuante ne peut être accordé que si l'auteur a respecté une certaine proportionnalité entre les motifs qui le poussent et l'importance du bien qu'il lèse (ATF 147 IV 249 consid. 2.1 p. 251).

3.1.4. L'art. 48 let. d CP prévoit que le juge atténue la peine si l'auteur a manifesté par des actes un repentir sincère. Cette circonstance n'est réalisée que si l'auteur a adopté un comportement particulier, désintéressé et méritoire, qui constitue la preuve concrète d'un repentir sincère. L'auteur doit avoir agi de son propre mouvement dans un esprit de repentir, dont il doit avoir fait la preuve en tentant, au prix de sacrifices, de réparer le tort qu'il a causé (ATF 107 IV 98 consid. 1 et les références citées). Le seul fait qu'un délinquant ait passé des aveux ou manifesté des remords ne suffit pas ; il n'est en effet pas rare que, confronté à des moyens de preuve ou constatant qu'il ne pourra échapper à une sanction, un accusé choisisse de dire la vérité ou d'exprimer des regrets ; un tel comportement n'est pas particulièrement méritoire (ATF
117 IV 112 consid. 1 ; 116 IV 288 consid. 2a). De même, la seule réparation du dommage ne témoigne pas nécessairement d'un repentir sincère ; un geste isolé ou dicté par l'approche du procès pénal ne suffit pas ; l'effort particulier exigé implique qu'il soit fourni librement et durablement (ATF 107 IV 98 consid. 1). Celui qui ne consent à faire un effort particulier que sous la menace de la sanction à venir ne manifeste pas un repentir sincère, il s'inspire de considérations tactiques et ne mérite donc pas d'indulgence particulière (arrêt du Tribunal fédéral 1054/2019 du 27 janvier 2020 consid. 1.1).

3.1.5. Selon l'art. 48 let. e CP, le juge atténue la peine si l'intérêt à punir a sensiblement diminué en raison du temps écoulé depuis l'infraction et que l'auteur s'est bien comporté dans l'intervalle. Cette atténuation procède de la même idée que la prescription. L'effet guérisseur du temps écoulé, qui rend moindre la nécessité de punir, doit aussi pouvoir être pris en considération lorsque la prescription n'est pas encore acquise, si l'infraction est ancienne et si le délinquant s'est bien comporté dans l'intervalle. Cela suppose qu'un temps relativement long se soit écoulé depuis l'infraction et que la prescription de l'action pénale est près d'être acquise. Cette condition est en tout cas réalisée lorsque les deux tiers du délai de prescription de l'action pénale sont écoulés. Le juge doit se référer à la date à laquelle les faits ont été souverainement établis, et non au jugement de premier instance. Ainsi, lorsque le condamné a fait appel, il faut prendre en considération le moment où le jugement de seconde instance a été rendu dès lors que ce recours a un effet dévolutif (ATF
140 IV 145 consid. 3.1).

3.1.6. La culpabilité de l'auteur se détermine aussi selon d'autres critères, comme le principe de célérité (art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale [Cst.]) ou d'autres motifs d'atténuation de la peine indépendants de la faute tels que l'écoulement du temps depuis la commission de l'infraction (ATF 135 IV 130 consid. 5.3.2, 5.3.3 et 5.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_718/2020 du 25 novembre 2020 consid. 2.2).

Le caractère raisonnable de la durée de la procédure (art. 5 CPP) s'apprécie selon les circonstances particulières de la cause, eu égard notamment à la complexité de l'affaire, à l'enjeu du litige pour l'intéressé, à son comportement ainsi qu'à celui des autorités compétentes. On ne saurait reprocher à l'autorité quelques temps morts, qui sont inévitables dans une procédure (ATF 135 I 265 consid. 4.4 ; 130 I 312 consid. 5.1). Apparaissent comme des carences choquantes une inactivité de treize ou quatorze mois au stade de l'instruction (ATF 124 I 139 consid. 2c p. 144 ;
119 IV 107 consid. 1c).

L'autorité judiciaire doit mentionner expressément la violation du principe de célérité dans le dispositif du jugement et, le cas échéant, indiquer dans quelle mesure elle a tenu compte de cette violation (arrêt du Tribunal fédéral 6B_790/2017 du 18 décembre 2017 consid. 2.3.2 et les références citées, en particulier ATF 136 I 274 consid. 2.3 p. 278).

Les conséquences de la constatation de cette violation sont en cascade : une violation du principe de célérité conduit, le plus souvent, à une réduction de peine, parfois à l'exemption de toute peine et en ultima ratio, dans les cas extrêmes, au classement de la procédure (ATF 143 IV 373 consid. 1.4.1). Ce n'est qu'en cas de classement, qu'une renonciation aux frais de procédure ou qu'une réduction de ceux-ci peut entrer en ligne de compte (principe du caractère accessoire des coûts), respectivement une réparation financière au sens d'un tort moral (consid. 1.4.2).

3.1.7. Le 1er janvier 2018, sont entrées en vigueur de nouvelles dispositions sur le droit des sanctions à l'aune de l'art. 2 CP (lex mitior), cette réforme est en règle générale moins favorable à la personne condamnée, qui pourra ainsi revendiquer l'application du droit en vigueur au 31 décembre 2017 si les actes qu'elle a commis l'ont été sous l'empire de ce droit (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI [éds], Code pénal – Petit commentaire, 2e éd., Bâle 2017, n. 6 des remarques préliminaires ad art. 34 à 41).

3.1.8. La durée de la peine privative de liberté est en principe de trois jours au moins et de vingt ans au plus (art. 40 CP).

3.1.9. Selon l'art. 43 CP, le juge peut suspendre partiellement l'exécution d'une peine privative de liberté d'un an au moins et de trois ans au plus afin de tenir compte de façon appropriée de la faute de l'auteur (al. 1). La partie à exécuter ne peut excéder la moitié de la peine (al. 2). Tant la partie suspendue que la partie à exécuter doivent être de six mois au moins. Les règles d'octroi de la libération conditionnelle (art. 86) ne s'appliquent pas à la partie à exécuter (al. 3).

Les conditions subjectives de l'art. 42 CP sont également valables pour l'application de l'art. 43 CP (ATF 134 IV I consid. 5.3.1).

Pour fixer la partie ferme et avec sursis de la peine, le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation. A titre de critère de cette appréciation, il y a lieu de tenir compte de façon appropriée de la faute de l'auteur. Le rapport entre ces deux parties de la peine doit être fixé de telle manière que, d'une part, la probabilité d'un comportement futur de l'auteur conforme à la loi mais aussi sa culpabilité soient équitablement prises en compte. Ainsi, plus le pronostic est favorable et moins l'acte apparaît blâmable, plus la partie de la peine assortie du sursis doit être importante (arrêt du Tribunal fédéral 6B_604/2008 du 26 décembre 2008 consid. 2.1).

Sur le plan subjectif, le juge doit poser, pour l'octroi du sursis, un pronostic quant au comportement futur de l'auteur (ATF 134 IV 5 consid. 4.2.1; 128 IV 193 consid. 3a; 118 IV 97 consid. 2b). Auparavant, il fallait que le pronostic soit favorable. Le sursis est désormais la règle dont on ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable. Il prime en cas d'incertitude (ATF 134 IV 5 consid. 4.4.2).

Si le juge suspend totalement ou partiellement l'exécution d'une peine, il impartit au condamné un délai d'épreuve de deux à cinq ans (art. 44 al. 1 CP).

3.1.10. Aux termes de l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine.

3.2.1. En l'espèce, les comportements dont l'appelante a été reconnue coupable sont intervenus sous l'égide de l'ancien droit des sanctions. Cela étant, ainsi qu'il sera développé infra, au vu de la peine entrant en considération et des conditions du sursis inchangées in concreto, l'application de l'ancien ou du nouveau droit ne conduit pas à un résultat différent. La peine sera dès lors déterminée en application du nouveau droit.

3.2.2. La faute de l'appelante est très importante. Elle s'en est prise au patrimoine de clients qui lui faisaient confiance depuis de nombreuses années, leur faisant prendre, à leur insu, des risques insensés. Elle a agi au préjudice de nombreux clients, sur une période pénale de cinq ans, et les montants détournés sont très élevés. Son enrichissement personnel est également important puisqu'il porte sur plusieurs millions de francs. L'appelante a agi à de nombreuses reprises et de manière répétitive. La Cour relèvera également la subtilité du montage mis en place par l'appelante, avec l'utilisation de nombreuses sociétés et l'ouverture de nombreux comptes et sous comptes bancaires sur lesquels elle avait un pouvoir de disposition. De plus, elle n'a pas hésité à falsifier de nombreux documents pour parvenir à ses fins. Elle a également apporté un soin particulier à dissimuler toute trace de son enrichissement personnel. L'ensemble de ces éléments dénote ainsi une volonté délictuelle intense.

À plusieurs reprises, l'appelante avait la possibilité de mettre un terme à ses agissements coupables, mais elle a choisi, librement, de continuer ses activités criminelles, qui n'ont pris fin que lorsque R______ a réalisé les nantissements sur les comptes des sociétés clientes. Sa situation personnelle au moment des faits était bonne, ce qui aurait dû la dissuader de se livrer à des activités criminelles à réitérées reprises. En effet, l'appelante disposait d'une bonne formation, travaillait dans une société financière et gagnait un très bon salaire. Elle disposait par ailleurs de capacités intellectuelles indéniables, ce qui aurait dû l'inciter à agir conformément à la loi.

Ses mobiles sont égoïstes et fondés par l'appât du gain. Si elle a agi dans le but premier de recouvrer les pertes subies et continuer de verser aux sociétés clientes les intérêts dus, elle a en effet également agi dans le but de continuer à percevoir, à titre personnel, les larges rétrocessions octroyées par R______ afin de maintenir son train de vie.

Ces circonstances ne remplissent nullement les conditions d'une détresse profonde. C'est ainsi vainement que la prévenue s'en prévaut.

Il y a concours d'infractions, ce qui est un facteur aggravant.

La collaboration de l'appelante à l'enquête a été relativement bonne. Elle a admis l'essentiel des faits mais a fourni des explications nébuleuses au sujet des cédules hypothécaires grevant son bien, comme développé infra. Elle a pris conscience de la gravité de ses actes ainsi qu'en témoigne sa tentative de suicide. Elle n'a toutefois jamais présenté d'excuses aux sociétés clientes dans le cadre de la présente procédure et n'a rien entrepris pour les dédommager, déclarant encore en appel ne pas être prête à leur céder le AX______, ce qui ne dénote pas une prise de conscience aboutie. L'appelante n'est pas crédible lorsqu'elle prétend avoir tout essayé pour tenter de trouver un accord avec les sociétés clientes. Son attitude depuis 2010 plaide en sens inverse. Sans avoir procédé au moindre remboursement, elle a en effet toujours vécu selon un train de vie élevé, en procédant à des travaux somptuaires dans sa propriété, en achetant la parcelle adjacente, ou encore en payant un jardinier à hauteur d'environ CHF 4'000.- par mois. Elle a affirmé avoir vendu des bijoux à raison de CHF 160'000.- alors que ces objets pouvaient servir à indemniser les sociétés clientes. Elle a par ailleurs déclaré que certains de ces biens avaient largement été sous-estimés par le conseil de l'époque des sociétés clientes, ce qu'elle n'avait alors pas fait savoir. Il ressort également du dossier qu'elle a offert à S______, en 2018, un séjour de trois jours au BB______ [hôtel] à BC______ [France], en vendant pour ce faire des bijoux. Elle ne semble ainsi pas avoir éprouvé un quelconque remord à maintenir un train de vie élevé, cela alors qu'elle se savait débitrice de dizaines de millions envers les sociétés clientes. Une atténuation de peine au sens de l'art. 48 let. d CP ne se justifie dès lors aucunement.

L'appelante, qui n'a aucun antécédent, est aujourd'hui âgée de 74 ans et à la retraite.

Sur la base des éléments qui précèdent, une peine privative de liberté de 30 mois devrait être fixée pour les deux occurrences d'escroquerie retenues. Cette peine devrait être aggravée de 12 mois (peine hypothétique de 18 mois) pour les différentes occurrences de faux dans les titres. C'est donc une peine de 42 mois qui devrait être prononcée.

La Cour fera toutefois application de l'art. 48 let. e CP dont les conditions sont remplies en l'espèce, les deux tiers du délai de prescription étant atteint et l'appelante s'étant bien comporté depuis.

La Cour constatera également la violation du principe de célérité dans la mesure où la durée de la procédure a été très longue par rapport aux actes d'instruction effectués, étant précisé qu'il y a eu de très longues périodes durant lesquelles le MP est resté inactif, ce qui n'est pas acceptable au regard de l'art. 5 CPP. La Cour réduira la peine en conséquence.

La peine sera ainsi réduite à 36 mois s'agissant de l'écoulement du temps, puis devra encore l'être à 30 mois en raison de la violation procédurale constatée.

L'appelante sera ainsi en définitive condamnée à une peine privative de liberté de 30 mois.

Malgré une prise de conscience non aboutie, le pronostic n'apparaît pas défavorable, étant relevé que l'appelante est désormais à la retraite. La peine privative de liberté de 30 mois sera assortie du sursis partiel, la part ferme à exécuter étant arrêtée à six mois. Une telle peine apparaît propre à sanctionner la faute de l'appelante. Un délai d'épreuve de trois ans sera fixé pour la partie de peine suspendue.

4. 4.1. À teneur de l'art. 122 al. 1 CPP, en qualité de partie plaignante, le lésé peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure pénale. Conformément à l'art. 126 al. 1 let. a et b CPP, le Tribunal statue sur les conclusions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu.

Chacun est tenu de réparer le dommage qu'il cause à autrui d'une manière illicite, soit intentionnellement, soit par négligence ou imprudence (art. 41 al. 1 CO). La preuve du dommage incombe au demandeur (art. 42 al. 1 CO).

La responsabilité délictuelle instituée par l'art. 41 CO requiert que soient réalisées cumulativement quatre conditions, soit un acte illicite, une faute de l'auteur, un dommage et un rapport de causalité naturelle et adéquat entre l'acte fautif et le dommage (ATF 132 III 122).

4.2. En l'espèce, certaines parties plaignantes ont déposé des conclusions civiles tendant au paiement par la prévenue du préjudice subi en lien avec les montants débités et nantis frauduleusement mais également en lien avec les montants initialement investis, qu'elles déduisent du chiffre III de l'acte d'accusation.

L'appelante, qui a été reconnue coupable d'escroquerie et de faux dans les titres, a commis un acte illicite au sens de lart. 41 CO. Ses agissements ont causé un dommage aux sociétés clientes, qui ont vu leur patrimoine diminuer contre leur volonté. Son comportement entre en outre en relation de causalité directe avec le dommage, dès lors que celui-ci ne serait pas survenu si la prévenue sétait abstenue d'instruire des transferts d'argent sans droit depuis les comptes de ses clients de même que de contracter des crédits en nantissant les avoirs de ces derniers, contre leur volonté.

Les conditions dune responsabilité de l'appelante au sens de lart. 41 CO sont ainsi réunies, ce qui nest au demeurant pas, en tant que tel, contesté.

Le montant du dommage correspond aux montants débités et prélevés par les banques sur les comptes bancaires des sociétés appelantes contre leur gré et doit être supporté par l'appelante, étant relevé que l'accord conclu entre les sociétés clientes, d'une part, ainsi que X______/AN______ et W______ SA, d'autre part, nest pas déterminant pour juger de la responsabilité de l'appelante, qui répond de lentier du dommage en vertu de lacte illicite commis quand bien même il existerait un responsable solidaire (cf. art. 50 CO).

Il sera en conséquence donné une suite favorable aux conclusions civiles des parties plaignantes en tant qu'elles portent sur les montants nantis et débités frauduleusement, lesquels totalisent CHF 42'294'041.-.

Ainsi, la Cour confirmera la condamnation de l'appelante à verser les montants suivants :

-       CHF 3'285'180.-, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 23 septembre 2008, à I______ LTD ;

-       CHF 5'400'143.-, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 1er octobre 2008, à I______ LTD ;

-       CHF 1'492'623.16, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à C______ CORP. ;

-       CHF 12'192'588.40, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à D______ INC ;

-       CHF 570'066.97, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à E______ CORP. ;

-       CHF 1'980'315.99, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à F______ SA ;

-       CHF 1'116'281.79, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à G______S SA ;

-       CHF 2'482'286.63, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à H______ CORP. ;

-       CHF 2'473'057.53, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à J______ CORP. ;

-       CHF 1'151'147.40, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à L______ SA ;

-       CHF 3'435'314.68, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à M______ CORP. ;

-       CHF 4'146'302.48, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à O______ LTD ;

-       CHF 2'482'640.66, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à P______ LTD ;

-       CHF 85'552.30, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à Q______ CORP.

En revanche, les conclusions civiles de D______ LTD, G______ SA, K______ CORP., L______ SA, M______ CORP., O______ LTD, N______ TRUST, P______ LTD et Q______ CORP., en lien avec les montants initialement investis, totalisant CHF 7'654'208.40, ne sauraient être admises. Il ne ressort en effet nullement du dossier ni de l'acte d'accusation d'ailleurs que ces montants auraient initialement été obtenus sur la base d'un comportement coupable.

Tant l'appel de la prévenue que celui des sociétés appelantes seront rejetés sur ces points.

5. 5.1.1. L'art. 70 al. 1 CP autorise le juge à confisquer des valeurs patrimoniales qui sont le résultat d'une infraction ou qui étaient destinés à récompenser l'auteur d'une infraction, si elles ne doivent pas être restituées au lésé en rétablissement de ses droits.

5.1.2. L'esprit et le but de l'art. 70 CP est d’empêcher que l'auteur profite du produit de ses infractions, en leur ôtant toute rentabilité. Dans le cadre de cette disposition, il convient de supprimer tous les avantages financiers obtenus par l’activité illicite, afin que le crime ne paie pas. La loi pénale ne remplirait pas sa fonction si ceux qui commettent des infractions, au détriment de ceux que les normes pénales sont censées protéger, pouvaient garder le produit de leur infraction (L. MOREILLON / N. QUELOZ / A. MACALUSO / N. DONGOIS [éds], Commentaire romand, Code pénal I, 2ème éd., 2021, n. 5 ad art. 70).

La notion de valeurs patrimoniales contenue à l'art. 70 CP s'interprète de façon très large. Les valeurs patrimoniales assujetties à la confiscation sont ainsi constituées de tous les avantages économiques illicites obtenus directement ou indirectement au moyen d'une infraction, appréciables en argent, pouvant être déterminés de façon comptable, susceptibles cas échéant d'être chiffrés dans le cadre d’une décision de créance compensatrice.

Les valeurs patrimoniales qui se présentent sous la forme de billets de banque, de devises, des chèques, d'avoir en compte ou d'autres créances, sont confiscables aussi longtemps que les mouvements sont identifiables ou retraçables (principe de la trace documentaire ou paper trail). Ce principe est valable non seulement en cas de remploi improprement dit, à savoir que le produit de l'infraction est une valeur destinée à circuler et qu'elle est réinvestie dans un support du même genre mais également en cas de remploi proprement dit, à savoir lorsque le produit du crime sert à acquérir un objet de remplacement, tel qu'un immeuble (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI [éds], Code pénal – Petit commentaire, 2e éd., Bâle 2017, n. 7 et 8 ad art. 70).

5.2.1. Lorsque l'avantage illicite doit être confisqué, mais que les valeurs patrimoniales en résultant ne sont plus disponibles – parce qu'elles ont été consommées, dissimulées ou aliénées –, le juge ordonne le remplacement par une créance compensatrice de l'Etat d'un montant équivalent (art. 71 al. 1 CP).

Le but de cette mesure est d'éviter que celui qui a disposé des objets ou valeurs à confisquer soit privilégié par rapport à celui qui les a conservées. Elle est subsidiaire à la confiscation de valeurs patrimoniales, de sorte qu'elle n'engendre ni avantage ni inconvénient par rapport à celle-ci. La créance compensatrice vise à empêcher que l'auteur d’une infraction demeure en possession d'avantages qu'il s'est procurés au moyen de ses agissements délictueux. S'il s'est déjà débarrassé de ses actifs, la dévolution à l'Etat du montant correspondant à l'avantage économique au moment de l'infraction enlèvera toute rentabilité à l'infraction.

Les causes à l'origine de l'indisponibilité des valeurs illicites sont sans importance, qu'elles aient été dissimulées, aliénées, consommées, perdues, voire mélangées s'agissant de choses fongibles.

5.2.2. Pour prononcer une créance compensatrice, encore faut-il que les valeurs (produit de l'infraction) soient confiscables. Les conditions de la confiscation doivent être réunies à la différence près que les valeurs qui devraient être confisquées (produit de l'infraction) ne sont plus disponibles. En raison de son caractère subsidiaire, la créance compensatrice ne peut en effet être ordonnée que si, dans l'hypothèse où les valeurs patrimoniales auraient été disponibles, la confiscation eût été prononcée ; elle est alors soumise aux mêmes conditions que cette mesure.

Il en découle que la créance compensatrice non seulement dépend de la confiscation, mais encore s'y substitue. Le juge devra prononcer une créance compensatrice aux conditions suivantes :

-       les conditions de la confiscation de valeurs patrimoniales illicitement acquises auprès de l'auteur, respectivement de tiers, doivent être remplies au regard de l'art. 70 CP ;

-       les valeurs patrimoniales à confisquer ne sont plus disponibles ;

-       l'auteur n'a pas entièrement dédommagé le lésé ou ce dernier ne se sera pas vu restituer directement les valeurs patrimoniales en rétablissement de ses droits.

5.2.3. En principe, le montant de la créance compensatrice est de la même valeur que le produit de l'activité délictueuse. Cela résulte de l'art. 71 al. 1 CP qui prévoit que la créance compensatrice doit être "d'un montant équivalent" à l'avantage illicite.

L'étendue et l'importance des actifs qui peuvent être confisqués sont déterminées à partir du résultat économique de l'infraction perpétrée. On entend par résultat de l'infraction tant le produit immédiat de celle-ci que tout avantage économique obtenu grâce à l'infraction, ainsi que les revenus et gains générés par le produit de l'infraction ; en revanche, il n'y a pas lieu de tenir compte d'éventuels intérêts moratoires, compensatoires ou autres.

La créance compensatrice, pas plus que la confiscation, ne constituent une forme de réparation du dommage, et cela quand bien même les participants à un acte illicite sont tenus de réparer le dommage qui en découle ; elle ne doit pas être confondue avec l'action acquilienne prévue par l'art. 41 CO (L. MOREILLON / N. QUELOZ / A. MACALUSO / N. DONGOIS [éds], Commentaire romand, Code pénal I, 2ème éd., 2021, n. 1 à 7a ad art.73).

5.2.4. L'art. 71 al. 2 CP prévoit que le juge peut renoncer totalement ou partiellement à la créance compensatrice s'il est à prévoir qu'elle ne sera pas recouvrable ou qu'elle entravera sérieusement la réinsertion de la personne concernée.

En premier lieu, il ne se justifie de prononcer une créance compensatrice que si cette mesure est susceptible d'absorber effectivement un avantage illicite. Le juge doit renoncer ou réduire la créance compensatrice si la personne concernée est sans fortune ou même insolvable ou que ses ressources ou situation personnelle ne laisse pas présager des mesures d'exécution forcée prometteuses dans un proche avenir (arrêts du Tribunal fédéral 6P_138/2006 du 22 septembre 2006 consid. 5.2 ; 6S_59/2003 du 6 juin 2003 consid. 5.2).

En second lieu, le droit pénal n'a pas seulement pour but la répression des infractions, mais aussi la réinsertion sociale des auteurs condamnés. Or, cette dernière pourrait être sérieusement entravée, surtout après une période de détention, par une lourde dette supplémentaire à la charge de l'intéressé, d'autant plus que le juge aura déjà tenu compte, lors de la fixation de la peine de l'importance des profits délictueux réalisés. Une réduction, voire une suppression de la créance compensatrice n'est cependant admissible que dans la mesure où l'on peut réellement penser que celle-ci mettrait concrètement en danger la situation sociale de l'intéressé sans que des facilités de paiement permettent d'y remédier (ATF 119 IV 17 consid. 2a/bb ;
106 IV 9 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6P_138/2006 du 22 septembre 2006 consid. 5.2 ; 6S_59/2003 du 6 juin 2003 consid. 5.2).

5.3. Au sens de lart. 70 al. 2 CP, la confiscation nest pas prononcée lorsquun tiers a acquis les valeurs dans lignorance des faits qui lauraient justifiée, et cela dans la mesure où il a fourni une contre-prestation adéquate ou si la confiscation se révèle dune rigueur excessive. Selon lart. 71 al. 1 CP, la créance compensatrice ne peut être prononcée contre un tiers que dans la mesure où les conditions prévues à lart. 70 al. 2 ne sont pas réalisées.

Les conditions posées à l'art. 70 al. 2 CP – d'une part la bonne foi du tiers et, d'autre part, la contre-prestation adéquate ou la rigueur excessive d'une éventuelle confiscation ultérieure – sont cumulatives. Si elles ne sont pas réalisées, la confiscation peut être prononcée alors même que le tiers a conclu une transaction en soi légitime, mais a été payé avec le produit d'une infraction. La notion de bonne foi pénale du tiers porte sur l'ignorance des faits qui justifieraient la confiscation, soit de son caractère de récompense ou de produit d'une infraction. Il faut que le tiers ait une connaissance certaine des faits qui auraient justifié la confiscation ou, à tout le moins, considère leur existence comme sérieusement possible, soit qu'il connaisse les infractions d'où provenaient les valeurs ou, du moins, ait eu des indices sérieux que les valeurs provenaient d'une infraction. En d'autres termes, la confiscation à l'égard d'un tiers ne sera possible que si celui-ci a une connaissance – correspondant au dol éventuel – des faits justifiant la confiscation. La violation d'un devoir de diligence ou d'un devoir de se renseigner ne suffit pas pour exclure la bonne foi du tiers. La contre-prestation doit avoir été fournie avant que le tiers ne reçoive les valeurs d'origine illégale. C'est en tenant compte de toutes les circonstances du cas d'espèce qu'il faut décider si une contre-prestation adéquate existe, sans se limiter à une appréciation de pur droit civil. En particulier, elle n'est pas adéquate lorsque les valeurs patrimoniales ont été remises à titre gratuit (arrêts du Tribunal fédéral 1B_343/2019 du 23 janvier 2020 consid. 4.1 et 1B_607/2019 du 5 mai 2020 consid. 3.3).

5.4. Selon l'art. 71 al. 3 CP, l'autorité d'instruction peut placer sous séquestre, en vue de l'exécution d'une créance compensatrice, des éléments du patrimoine de la personne concernée. Le séquestre ne donne pas de droit de préférence en faveur de l'Etat lors de l'exécution forcée de la créance compensatrice.

Par "personne concernée" au sens de cette disposition, on entend non seulement l'auteur, mais aussi, à certaines conditions, un tiers favorisé, d'une manière ou d'une autre, par l'infraction (cf. art. 71 al. 1 CP renvoyant à l'art. 70 al. 2 CP). La jurisprudence a aussi admis qu'un séquestre ordonné sur la base de l'art. 71 al. 3 CP puisse viser les biens d'une société tierce, dans les cas où il convient de faire abstraction de la distinction entre l'actionnaire – auteur présumé de l'infraction – et la société qu'il détient (théorie dite de la transparence ["Durchgriff"]). Il en va de même dans l'hypothèse où le prévenu serait – dans les faits et malgré les apparences – le véritable bénéficiaire des valeurs cédées à un "homme de paille" ("Strohmann") sur la base d'un contrat simulé ("Scheingeschäft" ; ATF 140 IV 57 consid. 4.1.2 p. 64 et les références cités).

5.5. Enfin, l'art. 73 al. 1 CP autorise le juge à allouer au lésé, jusqu'à concurrence des dommages-intérêts fixés judiciairement, le montant de l'amende payée par le condamné, les objets et valeurs confisqués et les créances compensatrices. Le juge ne pourra ordonner cette mesure que si le lésé cède à l'État une part correspondante de sa créance (art. 73 al. 2 CP).

5.6.1. En l'espèce, l'appelante a obtenu, en faveur des sociétés de trading, des prêts, lignes de crédit, de même que des transferts d'argent intervenus au débit des sociétés clientes. À teneur des éléments au dossier, l'appelante a investi l'intégralité de ces montants sur les marchés financiers, afin de tenter d'obtenir des bénéfices permettant à tout le moins de récupérer les pertes et continuer de verser les intérêts dus, mais ceux-ci ont été perdus, ce qui a en définitive causé un dommage dans la même proportion aux sociétés clientes dont les comptes ont été nantis frauduleusement puis débités. Rien ne permet d'établir que les sociétés de trading ou l'appelante auraient d'une quelconque façon profité directement de ces montants. En l'absence d'avantage financier à neutraliser, la question de la levée du voile social des sociétés de trading, afin de déterminer si une confiscation sur les biens de l'appelante voire le prononcé d'une créance compensatrice à son encontre à hauteur des montants nantis frauduleusement et débités, ne se pose pas, étant relevé que cette institution ne doit pas être confondue avec la responsabilité acquilienne découlant de l'art. 41 CO.

En revanche, comme retenu supra, l'appelante a perçu, pendant huit ans et alors que les investissements étaient déficitaires, d'importantes rétrocessions sur les opérations de trading, qu'elle n'aurait pas pu poursuivre sans les différentes mesures frauduleuses mises en place. Ces rétrocessions constituent ainsi un avantage financier illicite, en lien de causalité naturelle et adéquate avec les infractions commises, qu'il convient de supprimer.

L'appelante n'ayant pas conservé ces valeurs mais les ayant dépensées, selon ses propres dires, en partie pour le fonctionnement de W______ SA et en partie pour ses besoins personnels, celles-ci ne sont plus disponibles et donc plus confiscables.

Se pose la question de savoir si le AX______, que l'appelante a acquis durant la période pénale, peut être confisqué en tant que bien de remplacement. Il n'est toutefois pas possible d'établir avec certitude que l'appelante a utilisé l'avantage illicite découlant des infractions commises, soit les montants perçus à titre de rétrocessions, pour acquérir ce bien, celle-ci ayant expliqué avoir notamment utilisé son deuxième pilier ainsi que le produit de la vente de son appartement à la rue Peschier et d'une œuvre d'art pour ce faire. Il est tout de même relevé que l'appelante a situé ces transactions en 2010, ce qui n'est pas cohérent puisqu'elle a acquis sa propriété en 2007. Un doute subsiste néanmoins sur le financement de cet achat immobilier, en l'absence d'autres éléments d'appréciation au dossier. Le même raisonnement s'impose s'agissant des biens mobiliers de l'appelante, dont il n'est nullement établi qu'ils auraient été acquis au moyen du produit des infractions commises.

Dès lors, il y a lieu de prononcer une créance compensatrice d'un montant équivalent à l'avantage illicite, c'est-à-dire au montant des rétrocessions perçues par l'appelante, soit CHF 3'270'816.-, afin que, selon l'adage, le crime ne paie pas. Cette créance doit être allouée aux parties plaignantes à concurrence des prétentions civiles admises.

Aucune réduction du montant de la créance compensatrice, au sens de l'art. 71 al. 2 CP, ne se justifie en l'espèce. En effet, la valeur des biens dont est propriétaire l'appelante est largement supérieure au montant de la créance compensatrice et il n'apparaît pas que le prononcé de cette mesure mettrait concrètement en danger sa situation sociale. Elle ne le plaide en tout état pas.

Le jugement sera donc modifié dans le sens qui précède, l'appel de A______ étant rejeté, tandis que celui des sociétés appelantes est partiellement admis.

5.7. Justifiés, les séquestres prononcés par le MP seront maintenus en garantie de la créance compensatrice prononcée (art. 71 al. 3 CP), y compris ceux concernant la parcelle n° 5______ et les cédules hypothécaires.

Il ressort en effet des éléments suivants que l'appelante et S______ ont mis en place un système en vue de soustraire le AX______ et la parcelle adjacente aux autorités de poursuite.

5.7.1. L'appelante a constitué des cédules hypothécaires en faveur de S______, alors qu'elle était en pourparlers avec les sociétés clientes en raison des importantes pertes qu'elle leur avait causées et qu'elle s'était engagée à ne pas aliéner ou grever le AX______, lequel pouvait servir à indemniser les victimes, ce que S______ savait. Tous deux connaissaient la valeur de ce bien et savaient qu'en établissant des cédules hypothécaires à hauteur des montants en cause, ils le grevaient entièrement, au vu des cédules préexistantes, si bien qu'en cas de vente, il n'en resterait plus rien.

De ses propres aveux, A______ savait pertinemment qu'une procédure pénale risquait fort d'être engagée. Il en allait, selon elle, de même de S______. Ce dernier avait du reste participé aux réunions entre avocats dès 2011. S______ prétend de son côté avoir été dans l'ignorance des faits concrètement reprochés à sa compagne et du risque de l'ouverture d'une procédure pénale. Il ressort toutefois du dossier que c'est suite à une discussion avec S______ que l'appelante a renoncé à vendre le AX______ pour indemniser les sociétés clientes, ce dernier ayant eu l'idée d'établir des cédules hypothécaires en sa faveur. Il en va de même des opérations dont il sera question infra, soit l'acquisition de la parcelle adjacente au moyen d'un prête-nom et la cession de créance en sa faveur réalisée en 2017, immédiatement après le prononcé par le MP des séquestres pénaux sur les cédules hypothécaires. Il semble ainsi que S______ était au contraire bien au courant des affaires de sa compagne, voire même aux commandes de celles-ci, et cela depuis le début de leur relation. Le fait qu'il a varié sur les dates auxquelles il avait commencé à participer aux réunions entre avocats des différentes parties, soit 2014/2015, puis 2013, le décrédibilise encore. Tant l'appelante que S______ connaissait ainsi parfaitement le risque qu'une procédure pénale soit engagée, et donc que le AX______ soit saisi par les autorités pénales, à des fins de confiscation ou de créance compensatrice, en faveur des sociétés clientes.

Les intéressés arguent vainement n'avoir pas agi de la sorte pour léser les expectatives des sociétés clientes – civiles ou pénales – sur le AX______, mais pour régler les factures urgentes découlant des travaux de rénovation impayés et pour entretenir le AX______, comme requis par les sociétés clientes. Si telle était la raison du premier prêt et de la première cédule hypothécaire de novembre 2011, S______ a très rapidement, soit en septembre 2012, augmenté celle-ci d'un montant de CHF 600'000.-, avec l'établissement d'un avenant au contrat de prêt, l'appelante ayant précisé qu'il ne s'agissait alors non plus de régler les dettes liées aux travaux de rénovation du AX______ mais d'en entamer de nouveaux, somptuaires, pour le jardin. En avril 2013, ils ont constitué une nouvelle cédule hypothécaire ainsi qu'établi un second contrat portant sur CHF 900'000.- pour, selon les propres termes de S______, apporter des "améliorations" au AX______ et maintenir le train de vie de sa compagne. Il n'était ainsi nullement question d'entretenir le AX______ et encore moins de sauvegarder les droits des sociétés clientes, ce que l'appelante a en quelque sorte admis puisqu'elle a indiqué que la vente du AX______ en 2011 lui aurait permis de respecter ses engagements envers les sociétés clientes mais qu'elle avait finalement décidé de ne pas procéder à celle-ci, la seule personne pouvant lui réclamer quelque chose en lien avec le AX______ étant X______. S______ a par ailleurs confirmé que l'appelante n'avait jamais eu l'intention de vendre le AX______.

S'ajoute le fait que l'appelante a donné des informations fausses et lacunaires sur la situation hypothécaire de son bien lors des premières auditions au MP avant de devoir, confrontée aux éléments du dossier, s'expliquer davantage et qu'elle n'a, par la suite, jamais informé la justice que l'une des cédules hypothécaires ne se trouvait pas en mains de son conseil mais en celles de S______. Elle cherchait manifestement à entraver la découverte de la vérité à cet égard. S______ n'a du reste pas davantage informé la justice qu'il détenait l'une des cédules. Par leurs explications nébuleuses, l'appelante et S______ ont perdu toute crédibilité s'agissant de leur bonne foi eu égard à la constitution des cédules hypothécaires.

Par ailleurs, aucun remboursement n'était en réalité attendu de la part de l'appelante, ainsi que S______ l'a lui-même admis, précisant n'avoir décidé de dénoncer les prêts et réclamer le paiement des intérêts qu'en 2019, c'est-à-dire au moment de leur rupture. L'on ne saurait dans ces conditions considérer que les montants dépensés dans le cadre de sa relation avec l'appelante constituaient une contreprestation aux titres établis en sa faveur. Les prêts, établis après les cédules hypothécaires, étaient fictifs. Ils n'avaient pas un but fiscal dans la mesure où, comme S______ l'a expliqué lui-même, il était imposé au forfait, si bien qu'il n'avait pas la possibilité de déduire de son assiette fiscale les "prêts" accordés à l'appelante, ni le devoir de justifier ses dépenses. Les explications complémentaires de l'appelante et de S______ selon lesquelles ils avaient garanti ces dépenses par des cédules pour des raisons successorales, ne convainquent pas davantage dans la mesure où ce dernier a continué à entretenir le AX______ et sa compagne entre 2015 et la fin de leur relation en 2019, sans exiger de nouvelles garanties.

L'idée était donc bien, principalement, de grever entièrement le AX______ et d'établir, a posteriori, des prêts fictifs et des listes de dépenses pour les justifier, stratagème permettant de soustraire ce bien à la mainmise – civile ou pénale – des sociétés clientes.

5.7.3. Il est également établi qu'en 2014, alors que les discussions avec les sociétés clientes n'avaient pas abouti et que le risque d'une procédure pénale planait toujours, l'appelante a acheté la parcelle n° 5______, au moyen d'un prête-nom, U______, avec l'aide de S______. Les contrats de prêt et de bail avec la précitée étaient simulés et l'appelante était la réelle bénéficiaire économique de la parcelle. L'appelante argue toutefois n'avoir pas procédé de la sorte dans le but de soustraire cette parcelle à la justice pénale mais uniquement parce que, n'étant pas agricultrice, elle ne pouvait pas l'acheter en son nom. Elle n'a toutefois pas démontré dans la présente procédure que tel était le cas, ce d'autant qu'elle a pu acquérir, en 2007, la parcelle n° 3______, adjacente à la parcelle n° 2______ sur laquelle se trouve sa maison, qui est composée de "champ, pré et pâturage" pour 4'166 m2 et d'une forêt de 317 m2. La parcelle n° 5______ est, quant à elle, composée d'un "jardin" de 4'134 m2 et d'une forêt de 2'589 m2. Les parties avaient du reste convenu d'une option d'achat prioritaire de cette parcelle n° 5______ en faveur de l'appelante, ce qui dément sa thèse. Il apparaît donc bien qu'elle a simulé cette transaction en raison des procédures pénales imminentes.

5.7.4. En octobre 2017, soit après la réception de l'ordonnance de séquestre portant sur les cédules hypothécaires et les biens mobiliers du AX______ au mois d'août 2017, l'appelante a cédé à S______ sa créance envers U______ concernant la parcelle n° 5______. Les explications des intéressés au sujet des raisons fiscales de cette transaction, dont ils ont admis qu'elle était simulée, n'emportent à nouveau pas conviction. Les parties se sont en effet contredites quant aux années pour lesquelles les intérêts avaient été réglés au moyen de cette cession de créances. L'appelante a précisé que les intérêts pour les autres années n'avaient pas été soldés et S______ que ceux-ci l'avaient été par virement, sans toutefois produire de justificatifs. Ce dernier a par ailleurs reconnu avoir eu l'idée de procéder à cette cession de créances suite aux séquestres pénaux visant les cédules hypothécaires et avoir participé à une réunion avec son conseil et celui de l'appelante afin de trouver une solution face à cette problématique, dès lors qu'il ne souhaitait pas continuer à payer pour une propriété qui lui coûtait cher et qui allait être vendue dans le cadre de la procédure pénale. Le fait que les parties ont antidaté le contrat de cession de créance au mois de juin 2017, soit aussitôt avant les séquestres en cause, plaide encore en faveur de l'accusation, soit que, par cette transaction simulée, les intéressés souhaitaient placer un obstacle supplémentaire à des mesures pénales qui pourraient viser la parcelle n° 5______, laquelle n'était pas encore séquestrée. S______ n'a en tous les cas fourni aucune prestation équivalente à cette cession de créance dans la mesure où il a versé CHF 120'000.- que l'appelante lui a ensuite reversés, selon leurs propres explications.

5.7.5. Aucun motif ne s'oppose donc, au sens des art. 70 al. 2, 71 al. 1 et al. 3 CP, au maintien des séquestres en garantie de la créance compensatrice prononcée.

Les séquestres prononcés sur les biens selon inventaire du 8 décembre 2010, annexé à l'ordonnance de séquestre du 7 août 2017 visant les bien-fonds V______ 1______ /2______, V______ 1______/3______, V______ 4______/5______, de même que sur les cédules hypothécaires ID.6______ et ID.7______ seront dès lors maintenus en garantie de la créance compensatrice prononcée.

Le jugement entrepris sera modifié dans le sens qui précède, les conclusions des sociétés appelantes étant admises sur ce point, tandis que celles de l'appelante et de S______ seront rejetées.

6. 6.1.1. Le prévenu supporte les frais de procédure s'il est condamné (art. 426 al. 1 CPP).

Selon l'art. 426 al. 2 CPP, lorsque la procédure fait l'objet d'une ordonnance de classement ou que le prévenu est acquitté, tout ou partie des frais de procédure peuvent être mis à sa charge s'il a, de manière illicite et fautive, provoqué l'ouverture de la procédure ou rendu plus difficile la conduite de celle-ci.

La répartition des frais de procédure de première instance repose sur le principe selon lequel celui qui a causé les frais doit les supporter. Ainsi, le prévenu doit supporter les frais en cas de condamnation, car il a occasionné, par son comportement, l'ouverture et la mise en œuvre de l'enquête pénale (ATF 138 IV 248 consid. 4.4.1 p. 254). Lorsque la condamnation n'est que partielle, les frais ne doivent être mis à sa charge que de manière proportionnelle, en considération des frais liés à l'instruction des infractions pour lesquelles un verdict de culpabilité a été prononcé. Toutefois, si les faits reprochés à l'accusé sont étroitement et directement liés et que tous les actes d'instruction relatifs à chaque chef d'accusation étaient nécessaires, il peut être condamné à payer l'intégralité des frais de la procédure d'instruction et de la procédure en première instance (arrêt du Tribunal fédéral 6B_460/2020 du 10 mars 2021 consid. 10.3.1).

6.1.2. Le TCO a condamné la prévenue à l'intégralité des frais de la procédure préliminaire et de première instance, ce qui répond aux principes applicables en la matière et ce que l'appelante n'a du reste pas contesté.

Elle sera donc condamnée à l'intégralité des frais de la procédure préliminaire et de première instance, lesquels ont été arrêtés à CHF 11'264.60, y compris un émolument de jugement de CHF 3'000.-.

6.2.1. À teneur de l'art. 436 al. 1 CPP, les prétentions en indemnités et en réparation du tort moral dans la procédure de recours ("Rechtsmittelverfahren", i.e. appel et recours) sont régies par les art. 429 à 434 CPP.

La question de l'indemnisation du prévenu et de la partie plaignante (art. 429 à 434 CPP) doit être traitée en relation avec celle des frais. Dans cette mesure, la décision sur les frais préjuge de la question de l'indemnisation (ATF 137 IV 352 consid. 2.4.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_385/2017 du 5 décembre 2017 consid. 2.1 ; 6B_620/2016 du 17 mai 2017 consid. 2.2.2 et les références ; 6B_792/2016 du 18 avril 2017 consid. 3.3).

6.2.2. L'art. 433 al. 1 CPP permet à la partie plaignante de demander au prévenu une juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure lorsqu'elle obtient gain de cause (let. a) ou lorsque le prévenu est astreint au paiement des frais conformément à l'art. 426 al. 2 CPP (let. b). L'al. 2 prévoit que la partie plaignante adresse ses prétentions à l'autorité pénale ; elle doit les chiffrer et les justifier. Si elle ne s'acquitte pas de cette obligation, l'autorité pénale n'entre pas en matière sur la demande.

La partie plaignante obtient gain de cause au sens de l'art. 433 al. 1 CPP si les prétentions civiles sont admises et/ou lorsque le prévenu est condamné. Dans ce dernier cas, la partie plaignante peut être indemnisée pour les frais de défense privée en relation avec la plainte pénale (ATF 139 IV 102 consid. 4.1 et 4.3).

La juste indemnité, notion qui laisse un large pouvoir d'appréciation au juge, couvre ainsi les dépenses et les frais nécessaires pour faire valoir le point de vue de la partie plaignante dans la procédure pénale. Il s'agit en premier lieu des frais d'avocat (ATF 139 IV 102 consid. 4.1). En particulier, les démarches doivent apparaître nécessaires et adéquates pour la défense raisonnable du point de vue de la partie plaignante (ATF 139 IV 102 consid. 4.3 ; arrêts 6B_524/2017 du 22 novembre 2017 consid. 2.1 ; 6B_864/2015 du 1er novembre 2016 consid. 3.2 ; 6B_159/2012 du 22 juin 2012 consid. 2.3).

Plus particulièrement, comme pour l'indemnisation du prévenu acquitté, des frais d'expertise privée, voire de contrôles médicaux privés destinés à ménager une preuve liés à une infraction (p.ex. un viol), peuvent entrer en considération, dans la mesure de leur caractère nécessaire, voire simplement utile (C. MIZEL / V. RETORNAZ, CR CPP, éd. HELBING LICHTENHAHN 2019, n°11 ad art. 433).

Les honoraires d'avocat se calculent selon le tarif usuel du barreau applicable dans le canton où la procédure se déroule (arrêt 6B_392/2013 du 4 novembre 2013 consid. 2.3). Bien que le canton de Genève ne connaisse pas de tarif officiel des avocats, il n'en a pas moins posé, à l'art. 34 LPAv, les principes généraux devant présider à la fixation des honoraires, qui doivent en particulier être arrêtés compte tenu du travail effectué, de la complexité et de l'importance de l'affaire, de la responsabilité assumée, du résultat obtenu et de la situation du client. Sur cette base, la Cour de justice retient en principe un tarif horaire entre CHF 400.- et CHF 450.- pour un chef d'étude, de CHF 350.- pour les collaborateurs et de CHF 150.- pour les stagiaires (arrêt de la Cour de justice AARP/38/2018 du 26 janvier 2018 consid. 7).

La maxime de disposition s’applique toutefois s’agissant de sommes incombant au prévenu en vertu de l'art. 433 CPP, l'autorité pénale n'ayant pas à les examiner d'office (arrêt du Tribunal fédéral 6B_965/2013 du 3 décembre 2013 consid. 3.3.3 ; arrêt de la Cour de justice AARP/291/2021 du 13 septembre 2021 consid. 8.1.3).

6.2.3. En l'espèce, le TCO a accordé une indemnisation aux parties plaignantes correspondant, ex aequo et bono, à un total de 250 heures d'activité d'avocat à un tarif horaire de CHF 450.- (CHF 112'500.-), sans TVA, vu le domicile étranger des parties plaignantes, frais en lien avec l'expertise de AT______ en sus (CHF 38'076.50), montants que ni l'appelante ni les sociétés appelantes ne contestent.

Les sociétés appelantes requièrent en revanche en sus, la prise en compte des frais relatifs à l'établissement du rapport d'expertise diligentée par AU______ et BF______.

Avec les sociétés appelantes, il faut admettre que, contrairement à ce qu'a retenu le TCO, cette expertise a bien été nécessaire à la présente procédure, celle-ci ne visant pas uniquement à déterminer les éventuelles violations de normes bancaires de la part de R______ mais bien également le mécanisme des agissements de la prévenue de même que le montant des pertes et donc du dommage subi par les sociétés clientes.

Les frais de cette expertise s'élevant à CHF 236'960.-, non discutés en soi par l'appelante, seront ainsi pris en compte.

La Cour octroiera donc aux sociétés appelantes, à charge de l'appelante, un montant de CHF 387'536.50 à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure préliminaire et de première instance.

7. 7.1. En appel, l'appelante obtient gain de cause sur ses conclusions en lien avec la peine mais succombe s'agissant du rejet des conclusions civiles des parties plaignantes et de leur renvoi à agir au civil, de même qu'au sujet de la créance compensatrice, de la levée des séquestres et de la restitution en ses mains ou en celles de son conseil des cédules hypothécaires. Les sociétés appelantes obtiennent quant à elles gain de cause s'agissant du maintien des séquestres et partiellement s'agissant de leurs conclusions civiles et des montants de la créance compensatrice et de l'allocation au lésé prononcées. Elles succombent s'agissant du verdict de culpabilité qu'elles réclamaient en lien avec le chiffre IV de l'acte d'accusation et des confiscations requises.

Les frais de la procédure envers l'État, lesquels comprennent un émolument de CHF 5'000.-, seront ainsi mis à charge de l'appelante à hauteur de la moitié et à celle des sociétés appelantes pour l'autre moitié (art. 428 CPP).

7.2. Les frais d'appel ayant été mis à charge de l'appelante à hauteur de la moitié, les sociétés appelantes peuvent lui demander une indemnité dans la même proportion.

L'appelante sera condamnée à payer aux sociétés appelantes CHF 14'461.90, correspondant à la moitié des honoraires facturés par leurs conseils (CHF 25'591.80), dont elle n'a discuté aucun poste, et de la durée des débats d'appel, soit huit heures et 20 minutes, au taux de CHF 400.-/h appliqué (CHF 3'332.-).

8. Les prétentions en indemnisation de S______ fondées sur l'art. 434 CPP seront rejetées, tant celles déposées en première instance qu'en appel, les séquestres sur les cédules hypothécaires ayant été maintenus pour les motifs évoqués supra aux consid. 5.7.1 à 5.7.6.

9. 9.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique.

Cette dernière disposition prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire suivant, débours de l'étude inclus : avocat stagiaire CHF 110.- (let. a) ; collaborateur CHF 150.- (let. b) ; chef d'étude CHF 200.- (let. c). En cas d'assujettissement, l'équivalent de la TVA est versé en sus.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

On exige de l'avocat qu'il soit expéditif et efficace dans son travail et qu'il concentre son attention sur les points essentiels. Des démarches superflues ou excessives n'ont pas à être indemnisées (M. VALTICOS / C. REISER / B. CHAPPUIS (éds), Commentaire romand, Loi fédérale sur la libre circulation des avocats, Bâle 2010, n. 257 ad art. 12). Dans le cadre des mandats d'office, l'État n'indemnise ainsi que les démarches nécessaires à la bonne conduite de la procédure pour la partie qui jouit d'une défense d'office ou de l'assistance judiciaire. Il ne saurait être question d'indemniser toutes les démarches souhaitables ou envisageables. Le mandataire d'office doit en effet gérer son mandat conformément au principe d'économie de procédure (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.22 du 31 octobre 2013 consid. 5.2.3). Par voie de conséquence, le temps consacré à la rédaction d'écritures inutiles ou reprenant une argumentation déjà développée, fût-ce devant une autorité précédente, ne saurait donner lieu à indemnisation ou à indemnisation supplémentaire (AARP/295/2015 du 12 juillet 2015 consid. 8.2.2.3, 8.2.2.6, 8.3.1.1 et 8.3.2.1).

Le travail consistant en des recherches juridiques, sauf questions particulièrement pointues, n'est pas indemnisé, l'État ne devant pas assumer la charge financière de la formation continue de l'avocat breveté (AARP/147/2016 du 17 mars 2016 consid. 7.3 ; AARP/302/2013 du 14 juin 2013).

9.2. L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, et de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3). Des exceptions demeurent possibles, charge à l'avocat de justifier l'ampleur d'opérations dont la couverture ne serait pas assurée par le forfait.

9.3. Le temps de déplacement de l'avocat est considéré comme nécessaire pour la défense d'office au sens de l'art. 135 CPP (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2015.33 du 28 juillet 2015 consid. 4.3 et les références). La rémunération forfaitaire de la vacation aller/retour au et du Palais de justice ou au et du bâtiment du Ministère public est arrêtée à CHF 55.- / CHF 75.- / CHF 100.- pour les stagiaires / collaborateurs / chefs d'étude, dite rémunération étant allouée d'office par la juridiction d'appel pour les débats devant elle.

9.4. En l'occurrence, de l'état de frais de Me B______, seront retranchées les 25 minutes consacrées à la rédaction de courriers, les 30 minutes de lecture du jugement du TCO de même qu'une heure et 40 minutes pour la rédaction de la déclaration d'appel, ces activités étant couvertes par le forfait. Il en va de même du temps consacré aux recherches juridiques, soit une heure et 45 minutes activité qui n'a pas à être indemnisée par l'État.

Pour le surplus, l'état de frais, pris globalement, paraît adéquat eu égard à la complexité de l'affaire.

Il convient d'ajouter la durée des débats d'appel au tarif de chef d'Etude, de même qu'une vacation à CHF 100.-.

En conclusion, la rémunération sera arrêtée à CHF 8'035.35 correspondant à 21 heures et 50 minutes d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 4'366.70), 15 heures et 30 minutes au tarif de CHF 150.-/heure (CHF 2'325.-), plus la majoration forfaitaire de 10% (CHF 669.20), une vacation au tarif de CHF 100.- et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 574.50.

* * * * *


 


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit les appels formés par A______ et les sociétés appelantes contre le jugement JTCO/104/2021 rendu le 29 septembre 2021 par le Tribunal correctionnel dans la procédure P/17491/2013.

Les admet partiellement.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Acquitte A______ du chef de gestion déloyale aggravée (art. 158 ch. 1 et 2 CP).

Déclare A______ coupable d'escroquerie par métier (art. 146 al. 1 et 2 CP) et de faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP).

Constate que le principe de célérité a été violé dans la présente procédure.

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 30 mois.

Dit que la peine est prononcée sans sursis à raison de six mois.

Met pour le surplus A______ au bénéfice du sursis partiel et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans.

Avertit A______ que si elle devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine.

Condamne A______ à payer CHF 3'285'180.-, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 23 septembre 2008, à I______ LTD.

Condamne A______ à payer CHF 5'400'143.-, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 1er octobre 2008, à I______ LTD.

Condamne A______ à payer CHF 1'492'623.16, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à C______ CORP..

Condamne A______ à payer CHF 12'192'588.40, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à D______ INC.

Condamne A______ à payer CHF 570'066.97, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à E______ CORP..

Condamne A______ à payer CHF 1'980'315.99, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à F______ SA.

Condamne A______ à payer CHF 1'116'281.79, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à G______S SA.

Condamne A______ à payer CHF 2'482'286.63, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à H______ CORP..

Condamne A______ à payer CHF 2'473'057.53, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à J______ CORP..

Condamne A______ à payer CHF 1'151'147.40, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à L______ SA.

Condamne A______ à payer CHF 3'435'314.68, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à M______ CORP..

Condamne A______ à payer CHF 4'146'302.48, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à O______ LTD.

Condamne A______ à payer CHF 2'482'640.66, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à P______ LTD.

Condamne A______ à payer CHF 85'552.30, avec intérêts à 5 % l'an à compter du 2 septembre 2010, à Q______ CORP..

Condamne A______ à verser à C______ CORP. SA, D______ LTD, E______ CORP., F______ SA, G______ SA, H______ CORP., I______ LTD, J______ CORP., L______ SA, M______ CORP., O______ LTD, P______ LTD. et Q______ CORP., en main commune, CHF 387'536.50, à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure préliminaire et de première instance (art. 433 al. 1 CPP).

Condamne A______ à verser à C______ CORP. SA, D______ LTD, E______ CORP., F______ SA, G______ SA, H______ CORP., I______ LTD, J______ CORP., L______ SA, M______ CORP., O______ LTD, P______ LTD et Q______ CORP., en main commune, CHF 14'461.90, à titre de juste indemnité pour les dépenses obligatoires occasionnées par la procédure d'appel (art. 433 al. 1 CPP).

Rejette pour le surplus les conclusions civiles formées par C______ CORP. SA, D______ LTD, E______ CORP., F______ SA, G______ SA, H______ CORP., I______ LTD, J______ CORP., L______ SA, M______ CORP., O______ LTD, P______ LTD, Q______ CORP., K______ LTD et N______ TRUST.

Prononce à l'encontre de A______, en faveur de l'État de Genève, une créance compensatrice d'un montant de CHF 3'200'000.- (art. 71 al. 1 CP).

Alloue la créance compensatrice précitée à C______ CORP. SA, D______ LTD, E______ CORP., F______ SA, G______ SA, H______ CORP., I______ LTD, J______ CORP., L______ SA, M______ CORP., O______ LTD, P______ LTD et Q______ CORP. jusqu'à concurrence des dommages-intérêts fixés par le présent arrêt (art. 73 al. 1 CP).

Ordonne le maintien, en vue de l'exécution de la créance compensatrice (art. 71 al. 3 CP), subsidiairement en garantie du paiement des indemnités dues aux parties plaignantes précitées (art. 268 al. 1 let. a CPP), des séquestres sur les biens selon inventaire du 8 décembre 2010, annexé à l'ordonnance de séquestre du 7 août 2017, sur les bien-fonds V______ 1______/2______, V______ 1______/3______ et V______ 4______/5______ de même que sur les cédules ID.6______ et ID.7______ en garantie de la créance compensatrice prononcée.

Rejette les conclusions civiles de S______.

Dit que la créance compensatrice s'éteindra automatiquement dans la mesure du paiement par A______ de la somme de CHF 3'200'000.- aux parties plaignantes précitées (art. 71 al. 1 CP).

Ordonne le versement à la procédure des documents figurant sous chiffres 1 à 4 de l'inventaire du 5 juin 2014 (PP 900'000) non restitués à teneur de l'ordonnance de levée partielle de séquestre du 23 juillet 2017 (PP 200'161), à savoir les pièces numérotées par [la banque] R______ 163 – 174, 178 – 279, 281 – 625, 627 – 1097, 2755 – 2756, 2783 – 2800, 2826 – 2827, 2998 – 3005, 3008 – 3017, 4515 – 4595, 4682 – 4686, 4692 – 4709, 5014 et 6318 – 6791 (classeurs B.4.1 à B.4.3).

Condamne A______ aux frais de la procédure préliminaire et de première instance, qui s'élèvent à CHF 11'264.60, y compris un émolument de jugement de CHF 3'000.- (art. 426 al. 1 CPP).

Prend acte de ce que la rémunération de Me B______, défenseur d'office de A______, pour la procédure préliminaire et de première instance a été arrêtée à CHF 15'884.90.

Arrête les frais de la procédure d'appel à 6'385.- , lesquels comprennent un émolument de CHF 5'000.-.

Met la moitié de ces frais, soit CHF 3'192.50 , à la charge de A______ et l'autre moitié, soit CHF 3'192.50 , à celle des sociétés appelantes.

Arrête à CHF 8'035.35, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me B______, défenseur d'office de A______, pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal correctionnel, au Service de l'application des peines et mesures ainsi qu'à l'Office cantonal de la population et des migrations.

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

Le président :

Gregory ORCI

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal correctionnel :

CHF

11'264.60

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

1'200.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

110.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

5'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

6'385.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

17'649.60