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Décisions | Tribunal pénal

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P/5196/2020

JTCO/17/2024 du 13.02.2024 ( PENAL ) , JUGE

Normes : CP.191; CP.213
En fait
En droit
Par ces motifs

république et

canton de genève

pouvoir judiciaire

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL CORRECTIONNEL

 

Chambre 12


13 février 2024

 

MINISTÈRE PUBLIC

Madame A______, partie plaignante, assistée de Me B______

contre

Monsieur X______, né le ______ 1997, domicilié ______[GE], prévenu, assisté de Me Yaël HAYAT


CONCLUSIONS FINALES DES PARTIES :

Le Ministère public conclut à la culpabilité de X______ de tous les chefs d'infraction figurant dans l'acte d'accusation, au prononcé d'une peine privative de liberté de 5 ans, sous déduction de la détention subie avant jugement ainsi que d'une imputation adéquate des mesures de substitution. Il s'en rapporte à l'annexe de l'acte d'accusation s'agissant du sort des objets séquestrés. Il conclut à ce que X______ soit condamné aux frais de la procédure et à ce qu'il soit fait un accueil favorable aux conclusions civiles.

Me B______, conseil de A______, conclut à la culpabilité de X______ de viol s'agissant des faits décrits sous chiffre 1.2.1 §2, de contrainte sexuelle s'agissant des faits décrits sous chiffre 1.2.2 §2 et d'infraction à l'art. 193 CP s'agissant des autres faits décrits sous chiffres 1.2.1 §1 et 1.2.2 §1 et à ce qu'il soit fait bon accueil aux conclusions civiles déposées.

Me Yaël HAYAT et Me Giulia BORRO, conseils de X______, concluent à l'acquittement de leur mandant. Subsidiairement, en cas de reconnaissance de culpabilité s'agissant de l'infraction de l'inceste que leur mandant soit mis au bénéfice de l'irresponsabilité.

***

EN FAIT

Dans la mesure où seule la partie plaignante a annoncé appel, le Tribunal ne motivera le jugement qu'en tant qu'elle est concernée (ch. 1.2. de l'acte d'accusation) conformément à l'art. 82 al. 3 CPP.

A.a.a. Par acte d'accusation du 13 octobre 2023, il est reproché à X______ d'avoir, à des dates indéterminées et indéterminables entre le 21 avril 2017 et le 2 mai 2019, entre Genève et Lausanne, dans un climat de peur et en usant de pression psychologique, contraint A______ à entretenir des relations sexuelles avec pénétration vaginale au moyen de son sexe, actes qu'elle ne souhaitait pas, faits qualifiés de viol au sens de l'art. 190 CP, subsidiairement d'abus de détresse au sens de l'art. 193 al. 1 CP (ch. 1.2.1. § 1 de l'acte d'accusation).

a.b. Il lui est également reproché d'avoir, à une date indéterminée du mois de février 2019, au domicile des parents de A______ sis C______[GE], alors que celle-ci lui avait signifié le fait qu'elle ne voulait pas de relation sexuelle en lui disant « non » à plusieurs reprises, introduit son pénis dans le vagin de A______ et imposé à celle-ci une pénétration de plusieurs minutes, en lui faisant peur et en insistant avec un ton agressif, notamment en lui disant qu'il s'agissait de son rôle en tant que petite amie, qu'elle ne servait qu'à ça, qu'elle savait de quoi il était capable et qu'il savait où habitaient ses amis, lui faisant craindre qu'il puisse s'en prendre à eux, A______, alors tétanisée, s'est déconnectée de son corps, s'est paralysée et n'a pu opposer aucune résistance à partir de cet instant, étant précisé que X______ savait que A______ n'était pas consentante à ce rapport sexuel dès lors qu'elle lui avait dit « non » à plusieurs reprises et qu'il avait dû user de pressions psychologiques, soit des menaces et de dénigrement, pour arriver à ses fins, faits qualifiés de viol au sens de l'art. 190 CP, subsidiairement d'abus de détresse au sens de l'art. 193 al. 1 CP (ch. 1.2.1. § 2 ss de l'acte d'accusation).

b.a. Il lui est encore reproché d'avoir, entre le 21 avril 2017 et le 2 mai 2019, à Genève, dans un climat de peur et en usant de pressions psychologiques, contraint A______ à lui prodiguer des fellations, notamment en lui disant que si elle ne le faisait pas, il ne la ramènerait pas en voiture chez elle, faits qualifiés de contrainte sexuelle au sens de l'art. 189 al. 1 CP, subsidiairement d'abus de détresse au sens de l'art. 193 al. 1 CP (ch. 1.2.2. § 1 de l'acte d'accusation).

b.b. Il lui est finalement reproché d'avoir, à une date indéterminée entre le 21 avril 2017 et le 2 mai 2019, à Genève, après avoir garé sa voiture aux abords d'une forêt, ouvert la braguette de son pantalon, sorti son sexe et exigé de A______ qu'elle lui prodigue une fellation, alors qu'elle lui avait signifié qu'elle n'en avait pas envie, s'être énervé et avoir insisté, tandis que A______, mise sous pression et pensant que cela le calmerait, lui avait fait deux ou trois bisous sur son sexe, puis au moment où elle a voulu retirer sa tête, lui avoir maintenu sa tête et son poignet sur son sexe, l'obligeant ainsi à le garder en bouche et à lui faire une fellation, étant précisé que X______ savait que A______ n'était pas consentante à cet acte dès lors qu'elle lui avait signifié son refus et qu'il a eu recours à de la force pour l'empêcher de retirer son sexe de sa bouche, faits qualifiés de contrainte sexuelle au sens de l'art. 189 al. 1 CP, subsidiairement d'abus de détresse au sens de l'art. 193 al. 1 CP (ch. 1.2.2. § 2 ss de l'acte d'accusation).

c. Il est précisé qu'il est reproché à X______ d'avoir commis les faits décrits ci-dessus (cf. supra a.a. à b.b.) après avoir instauré un climat de peur et de soumission, notamment en insultant A______, en la violentant, en la dénigrant et en exerçant un contrôle permanent sur elle, en lui imposant ce qu'elle devait manger lorsqu'ils allaient au restaurant, en lui imposant de rester mince, en lui imposant la manière dont elle devait se comporter tant dans leur relation qu'avec de tiers, en la manipulant selon ses humeurs, en la culpabilisant régulièrement, en la menaçant régulièrement de la quitter, en l'effrayant par ses accès de colère et en lui faisant du chantage sexuel (préambule du ch. 1.2. de l'acte d'accusation).

B. Les faits suivants ressortent de la procédure :

Contexte

a.a. X______ et A______ étaient en couple du 21 avril 2017 au 2 mai 2019 (C-83 ; C-84 ; C-113 ; C-22). Ils avaient une relation à distance dans la mesure où A______ faisait des études de droit à Grenoble et X______ étudiait à Lausanne (C-83 ; C-121). Le couple se voyait principalement les week-ends à Genève, chez les parents de A______, ou dans le studio de X______, à Lausanne, ainsi que durant les vacances (C-85 ; C-121 ; PV de l'audience de jugement, p. 6).

a.b. Durant leur relation amoureuse, A______ et X______ ont eu des rapports sexuels et des fellations consentis (C-86 ; C-115 ; C-132 ; PV de l'audience de jugement, p. 11).

a.c. A______ et X______ possèdent une perception discordante de leur ancienne relation, la première indiquant avoir été sous l'emprise psychologique du second, tandis que ce dernier nie avoir instauré un climat de peur et de soumission. Dans ces circonstances, ils divergent en particulier sur l'existence d'une relation sexuelle non consentie et un épisode de fellation forcée, lors desquels la plaignante affirme que le prévenu a usé de menaces et de pressions psychologiques pour arriver à ses fins.

Plainte et déclarations de la partie plaignante

b.a. Le 23 novembre 2020, A______ a déposé plainte pénale à l'encontre de X______ pour les faits détaillés dans sa main-courante du 17 janvier 2020 (cf. infra B.b.b.) et pour les faits relatés à la police lors de son audition le 29 septembre 2020 en qualité de témoin sur délégation du Ministère public (cf. infra B.b.c.).

b.b. Selon l'inscription au journal de police (C-96 ss), A______ s'est présentée au poste de police de D______ le 17 janvier 2020 afin de déposer une main courante pour le viol dont elle avait été victime. Elle a expliqué que durant les trois premiers mois de sa relation avec X______, « tout se passait bien ». Par la suite, il avait commencé à l'insulter, à la rabaisser en continu et à la taper de temps en temps tout en la menaçant si elle parlait de ces agissements à quelqu'un (C-96).

Durant le mois de février 2019, sans se souvenir de la date exacte, elle a relaté un épisode qui s'était déroulé en fin de journée/début de soirée dans sa chambre sise dans la maison familiale à C______[GE], lors duquel X______ avait eu très envie d'avoir une relation sexuelle. Elle lui avait expliqué qu'elle n'en avait pas envie, suite à quoi il avait commencé à s'énerver et à lui dire « tu es ma copine et c'est ton rôle. C'est la seule chose à laquelle tu sers ». Il s'était déjà montré violent avec elle, raison pour laquelle elle est avait eu peur. Elle s'était couchée sur le lit et était restée allongée avec ses vêtements. X______ s'était mis sur elle et avait commencé à l'embrasser. A ce moment-là, elle n'arrivait plus à bouger et était incapable de crier ou même de parler. Il lui avait enlevé son pantalon et sa culotte. Ensuite, il avait ouvert son pantalon tout en restant habillé et avait directement inséré son sexe dans son vagin avec violence. Durant cet acte, elle avait ressenti uniquement des « à-coups » sans avoir l'impression d'exister, souhaitant que cela se termine au plus vite. Le rapport terminé, X______ était parti fumer une cigarette dehors. Elle avait remis sa culotte et s'était mise à pleurer. Dès qu'elle avait réussi à bouger, elle était partie à la salle de bain, où elle avait remarqué avoir un peu de sang sur sa culotte. Elle s'était lavée et était retournée dans la chambre, toujours en pleurs. En revenant à l'intérieur, X______ s'était aperçu qu'elle pleurait et lui avait répété que c'était son rôle en tant que petite-amie. En outre, il lui avait dit que si elle voulait le quitter, il allait détruire sa vie. Le reste de la soirée, il avait joué à des jeux sur son ordinateur et elle était restée dans son coin. Elle ne se souvenait pas de la durée de ce rapport, ni si X______ était resté dormir chez elle cette nuit-là (C-96 ; C-97).

Suite à cet épisode, leur relation avait continué et ils avaient entretenu des relations sexuelles, lors desquelles elle disait qu'elle était consentante alors qu'elle n'était pas vraiment d'accord (C-98). Elle avait décidé par ailleurs de faire ce qui lui plaisait. Elle avait donc pris du temps pour voir ses amis et se concentrer sur ses études, ce que X______ n'acceptait pas. Il la rabaissait en continu en lui disant qu'elle n'allait jamais réussir ses examens. Quand il buvait de l'alcool, il lui arrivait de la taper sur le bras en lui disant qu'il n'avait pas fait exprès. Elle se souvenait avoir eu des bleus suite à cela. Elle n'était pas en mesure de quantifier ces actes (C-97).

A______ a encore déclaré que lorsqu'ils faisaient des sorties nocturnes, elle lui demandait de la raccompagner chez elle car elle ne voulait pas rentrer seule, ce à quoi X______ lui répondait qu'elle devait lui faire une fellation en échange, sinon il n'avait aucun intérêt à la conduire à son domicile. Elle avait cédé à plusieurs reprises parce qu'elle avait peur de rentrer seule. Elle ne se souvenait pas du nombre de fellations qu'elle lui avait prodigué (C-97).

Au mois d'avril 2019, elle avait décidé de mettre un terme à cette relation car elle n'arrivait plus à faire face à tout cela. Ils s'étaient retrouvés devant l'Université de Genève lorsqu'elle lui avait annoncé que « c'était fini ». Elle lui avait rendu ses affaires. Il lui avait dit qu'il ne l'avait jamais aimé et qu'elle ne valait rien. Elle avait dû le recontacter par message car il possédait un téléphone qui lui appartenait. Suite à cela, elle n'avait plus jamais eu de contact avec lui et l'avait bloqué de tous les réseaux sociaux (C-98).

Il y avait environ trois ou quatre mois, elle avait tout raconté à ses parents, son meilleur ami et sa cousine. Depuis un mois, elle était suivie par l'association AVVEC (Aide aux victimes de violences en couple). Elle a également ajouté avoir pris contact avec l'ex-copine de X______, soit E______, via le réseau social Facebook afin de lui demander si elle avait également subi les mêmes faits qu'elle. Elle lui avait répondu par l'affirmative tout en indiquant qu'elle n'avait pas le courage d'aller témoigner pour l'instant. Elles s'étaient ensuite rencontrées dans un café, où E______ lui avait dit qu'elle serait prête à témoigner une fois que A______ aurait parlé à la police (C-98).

b.c. Le 29 septembre 2020, A______ a été entendue en qualité de témoin par la police sur délégation du Ministère public dans le cadre de la présente procédure pénale (C-82 ss).

Elle a déclaré qu'en travaillant avec son éducatrice sociale, différentes choses lui étaient revenues en mémoire :

De manière générale s'agissant du comportement de X______, A______ a réitéré le fait que durant les premiers mois de leur relation, X______ se comportait comme un prince charmant. Il était attentionné, gentil et très charmant. La façon dont il se comportait semblait irréelle. Après quelques mois, les choses avaient commencé à se dégrader. Il avait commencé à l'insulter, à la traiter de « conne » et de « stupide ». Il lui disait qu'elle ne savait rien faire, précisant par la suite que ce qu'il disait « c'était pour rigoler ». Il s'agissait d'insultes cachées à répétition qu'il disait sur le ton de l'énervement ou en souriant, ce qui était très étrange. Ensuite, il ne voulait pas qu'elle voit ses amis car il considérait qu'ils avaient une mauvaise influence sur elle. Il trouvait également que ses parents avaient une mauvaise influence sur elle. Il l'avait éloigné de tous ses proches. Lorsque quelque chose n'allait pas dans la vie de X______, c'était de la faute de A______ (C-84). Quand il buvait trop d'alcool, il lui mettait des coups de poing dans les bras et lui serrait très fort les poignets parce qu'elle lui disait de boire moins. Il ne supportait pas qu'elle lui dise quoique que ce soit. Il avait toujours raison et elle devait rester à sa place. Elle avait peur de lui et n'osait rien faire (C-84). Il disait également que si elle était contre lui, il détruirait sa vie, qu'il savait comment faire et qu'il lui ferait peur jusqu'à ce qu'elle devienne folle. A d'autres moments encore, il lui disait qu'il savait où habitaient ses amis et qu'elle savait de quoi il était capable. Lorsqu'elle avait ses examens à l'Université, il trouvait toujours un moyen pour qu'ils se fâchent. Il lui demandait pourquoi elle continuait ses études quand cela ne servait à rien et que son rôle était juste d'être sa petite-amie. Il insistait pour qu'elle arrête ses études (C-85).

En particulier, s'agissant des faits relatifs au ch. 1.2.1. § 1 de l'acte d'accusation, A______ a expliqué que lorsque X______ était entré dans cette période où il se montrait agressif avec elle, il avait commencé à l'obliger à avoir des relations sexuelles avec lui. Si elle n'était pas d'accord de coucher avec lui, il s'énervait extrêmement fort contre elle. Parfois, il la menaçait de la quitter et il disait sans cesse que c'était son rôle de copine de s'exécuter (C-84). Elle a déclaré qu'elle avait été victime de viols à plusieurs reprises dans sa chambre et parfois dans son studio à Lausanne. Elle avait tellement peur de lui, peur qu'il la quitte ou peur de ce qu'il pouvait lui faire à elle ou ses amies, qu'elle s'allongeait et se laissait faire lorsqu'il voulait entretenir des relations sexuelles qu'elle ne voulait pas. Il n'avait ni douceur ni délicatesse. A ces moment-là, elle était présente sans être présente. Elle se répétait dans sa tête que la seule chose qu'elle voulait, c'était qu'il termine (C-85). Il savait qu'elle n'en avait pas envie parce qu'elle disait « non » à plusieurs reprises et il insistait jusqu'à ce qu'elle cède. D'autres fois cependant, ils avaient des relations sexuelles normales et consenties. C'était paradoxal dans la mesure où elle avait très peur de lui, tout en étant amoureuse de lui. Elle ne se souvenait pas si sa famille était présente durant les viols commis dans sa chambre. Généralement, ces viols avaient plutôt lieu la nuit, à l'exception de l'épisode visé dans sa main courante (cf. supra B.b.b.) Elle ne se rappelait pas si d'autres viols avaient eu lieu en journée (C-86).

Concernant les faits relatifs au ch. 1.2.2. § 1 de l'acte d'accusation, A______ a expliqué que X______ voulait souvent qu'ils aillent boire un verre avec ses amis à lui en prenant sa voiture. Comme A______ ne souhaitait pas rentrer seule chez elle en bus tard le soir, elle lui demandait s'il pouvait la raccompagner chez elle. Il la raccompagnait chez elle souvent sous certaines conditions, par exemple en échange d'une fellation. Comme il était tard et qu'elle ne voulait pas rentrer seule, elle finissait par accepter. Elle ne se souvenait pas du nombre de fellations qu'elle lui avait prodiguées (C-84).

S'agissant des faits relatifs au ch. 1.2.2. § 2 ss de l'acte d'accusation, elle a déclaré que lorsqu'ils se rendaient chez les parents de X______, un soir en fin de journée, ce dernier avait décidé d'arrêter la voiture, sans rien dire, dans un coin de forêt où personne ne pouvait les apercevoir. Il avait ouvert la braguette de son pantalon pour laisser apparaître son appareil masculin. Il lui avait exigé une fellation alors qu'elle n'en avait pas envie. Puisqu'il avait commencé à s'énerver, elle lui avait fait deux ou trois bisous à cet endroit pour le calmer. Lorsqu'elle avait voulu retirer sa tête, il avait maintenu son poignet et sa tête pour qu'elle lui fasse une fellation. Il avait éjaculé dans sa bouche, ce qui l'avait fait vomir, précisant qu'elle avait eu le temps d'ouvrir la portière, de tomber par terre et de vomir. Il s'était ensuite énervé et l'avait insultée parce qu'elle avait vomi. Elle était remontée dans sa voiture et ils étaient allés chez ses parents (C-84 ; C-85).

En ce qui concerne sa rupture du 2 mai 2019, elle a précisé s'être rendue avec deux amis devant l'Université de Genève, parce qu'elle « flippait » d'être seule, pour rompre et lui rendre ses affaires. Elle avait peur de ce qu'il pourrait lui faire quand il apprendrait qu'elle allait le quitter. Il n'avait pas très bien réagi. Il lui avait dit que de toute façon, cela faisait des mois qu'il ne l'aimait plus. En relation avec le téléphone prêté, elle a ajouté que X______ n'avait pas été d'accord de le lui rendre. Elle avait dû insister à plusieurs reprises pour le récupérer et le menacer en lui disant que c'était du vol s'il n'acceptait pas de le lui rendre (C-86).

Quelques semaines après sa rupture, elle avait commencé à avoir des cauchemars et des angoisses sans aucune raison. Elle n'osait plus sortir de chez elle toute seule. Elle avait des troubles alimentaires et des troubles du sommeil sans pouvoir en comprendre les raisons. Elle avait eu des idées noires et pensait à en finir. A un moment, comme elle ne se supportait plus, elle était allée voir sa cousine qui lui avait proposé d'écrire ce qui lui venait à l'esprit. C'est à ce moment-là qu'elle avait commencé à avoir des souvenirs. Cela faisait comme des « flashbacks » qui revenaient les uns après les autres. Elle avait montré à sa cousine ce qu'elle venait d'écrire, à savoir que X______ l'avait forcée à avoir des relations sexuelles. Elle avait dit à sa cousine que c'était normal puisqu'ils étaient en couple, ce à quoi sa cousine lui avait répondu que ce n'était pas normal (C-83 ; C-86 ; C-88).

Ensuite, elle avait tenté de continuer à vivre sa vie normalement en tentant d'oublier ce qu'il s'était passé. Cependant, un soir d'été durant l'année 2019, elle avait passé la nuit pour la première fois chez F______, son compagnon actuel. C'était la première fois qu'elle avait de nouveau des relations sexuelles depuis sa rupture avec X______. Lors de ce rapport sexuel, elle avait fait une énorme crise d'angoisse qui avait duré presque une heure. F______ lui avait dit qu'elle était recroquevillée sur elle, comme dans un autre monde, en répétant « il n'avait pas le droit, il n'avait pas le droit » et « je ne voulais pas ». Il avait demandé s'il pouvait faire quelque chose pour elle et elle lui avait répondu qu'il pouvait appeler ses meilleurs amis qui étaient au courant. Suite à son appel, G______ était venu avec sa copine. Ils étaient restés avec A______ pendant que F______ était parti chercher sa meilleure amie. Ils avaient réussi à la calmer et lui avaient conseillé d'aller consulter un psychologue (C-87).

Après quelques mois, A______ avait parlé à ses parents de ce qui s'était passé. Ses parents ne s'étaient pas rendus compte de l'état dans lequel elle était. Sa mère lui avait dit que ce genre de chose n'arrivait pas lorsqu'on était en couple. Son père lui avait demandé si elle souhaitait porter plainte, ce à quoi elle avait répondu par la négative. Ils lui avaient dit qu'elle devait essayer de trouver de l'aide et qu'elle pouvait en parler avec eux si elle voulait. Cela étant, à chaque fois qu'elle essayait de leur en parler, c'était comme s'ils ne voulaient pas entendre (C-87).

Elle a confirmé avoir entrepris une thérapie avec une éducatrice sociale de l'association AVVEC depuis le mois de novembre 2019. Du mois de novembre 2019 au mois de juin/juillet 2020, elle se rendait hebdomadairement en séance avec son éducatrice. Puis, elle la voyait de manière bi-hebdomadaire. On lui avait expliqué les stades par lesquels passaient normalement les victimes et le fait que la Justice pouvait aider à leur reconstruction. Pour sa part, elle ne souhaitait pas déposer plainte contre X______ parce qu'elle n'avait aucune preuve de ce qu'il lui avait fait et elle n'aurait pas supporté que la Justice ne la reconnaisse pas en tant que victime. Sur conseil d'un ami, elle a néanmoins déposé la main courante (cf. supra B.b.b.) pour se protéger en laissant une trace écrite de ce qu'elle avait vécu (C-83).

Au moment de l'audition, A______ a indiqué suivre à distance sa deuxième année à la faculté de droit de l'Université de Grenoble. Elle avait fait une demande pour pouvoir étudier à distance car elle ne pouvait plus vivre seule dans un logement et ne souhaitait plus habiter dans le studio dans lequel X______ était parfois venu lui rendre visite. Elle ne se sentait pas en sécurité à l'idée qu'il connaisse son adresse à Grenoble. Elle arrivait à rester seule parfois la journée chez son nouveau copain ou chez elle, mais c'était impossible durant la nuit. Il était difficile pour elle de se déplacer seule dans la rue et d'aller par exemple à l'arrêt de bus, ce qui était très handicapant. (C-83). Elle avait toujours des séquelles sur lesquelles elle essayait de travailler, comme le fait de ne pas pouvoir être seule la nuit. Elle se sentait tout le temps en insécurité. Parfois, elle avait du mal à avoir des relations sexuelles. Elle était mal à l'aise avec son corps, ne pouvant se voir nue devant un miroir. Elle ne mettait pas de vêtements féminins de peur d'attirer le regard des hommes. Elle avait développé une peur des hommes, ce qui était le plus handicapant. Par exemple, si elle voyait un homme dans sa voiture qui ne faisait rien, elle allait se sentir en insécurité et courir jusqu'à son arrêt de bus. Elle avait des troubles du sommeil, des insomnies et des cauchemars qui persistaient. Par ailleurs, elle a tenu a ajouté que X______ avait une fascination pour ______, ce qui la mettait très mal à l'aise. Il pouvait parler de lui pendant des heures et écoutait souvent une chanson qui avait été écrite à son sujet (C-87).

c.a. Entendue par-devant le Ministère public le 5 mars 2021 (C-111 ss), A______ a confirmé ses précédentes déclarations.

S'agissant des pressions exercées par X______ dans le dessein d'avoir des relations sexuelles, A______ a précisé que celui-ci lui disait qu'il pouvait s'en prendre à ses amies et qu'il avait des contacts avec des personnes peu fréquentables en Russie. Il lui disait qu'il pouvait lui faire peur jusqu'à ce qu'elle devienne folle. Ces propos étaient tenus tant pour obtenir des relations sexuelles que lorsqu'elle souhaitait mettre un terme à leur relation (C-113). Lorsqu'elle n'était pas consentante, il faisait des pressions sur elle pour qu'elle accepte (C-117).

S'agissant de son comportement, elle a ajouté qu'il lui arrivait de fouiller dans son téléphone pour regarder si elle avait parlé de lui à ses proches. C'était une obsession chez lui. X______ voulait toujours que tout le monde l'apprécie, raison pour laquelle il regardait si elle n'avait pas fait des remarques négatives à son sujet (C-113). Il lui arrivait de commander à sa place au restaurant. Il voulait commander toute sa vie. Parfois, elle lui disait qu'elle avait envie de manger tel plat et il en commandait un autre pour elle, en lui disant qu'il ne voulait pas d'une copine qui mangeait le plat choisi et qu'il ne voulait pas d'une « copine grosse ». Lorsqu'ils allaient voir les amies de A______, il se comportait très gentiment, puis une fois rentré, il s'énervait en disant qu'il ne voulait pas les voir. Lorsqu'il s'énervait contre elle, il mettait son téléphone dans une autre pièce, car il craignait qu'elle l'enregistre ou le filme. C'était une obsession pour lui (C-114).

Concernant les faits relatifs au ch. 1.2.1. § 2 ss de l'acte d'accusation, elle a réitéré les explications fournies lors du dépôt de sa main courante, en précisant qu'il lui avait dit qu'il pourrait s'en prendre à ses amies si elle ne faisait pas ce qu'il lui demandait. Elle avait eu peur, raison pour laquelle elle avait cédé. Elle lui avait dit « non » et lui avait rappelé qu'elle ne voulait pas (C-114). Elle était incapable de faire le moindre mouvement, son corps étant comme paralysé. Durant l'acte, elle ne se souvenait pas s'il avait été violent puisqu'elle était complètement déconnectée de ce qu'il se passait. La tâche de sang dans ses sous-vêtements l'avait marquée. Depuis, elle appréhendait d'avoir ses règles et de voir du sang dans ses sous-vêtements car cela lui rappelait ce qu'il s'était passé. (C-115). La première personne à qui elle avait parlé de cet épisode était sa cousine. Elle avait essayé de parler à X______ de son attitude, ce dernier lui ayant répliqué que si elle en parlait à quelqu'un, il ne la croirait pas. Elle était restée avec lui car elle avait peur de le quitter. Il avait une sorte d'emprise sur elle. Il l'avait coupé des autres personnes et elle avait le sentiment de n'avoir plus personne à part lui (C-116).

S'agissant des faits relatifs au ch. 1.2.2. § 2 ss de l'acte d'accusation, A______ a réitéré ses déclarations faites à la police le 29 septembre 2020, tout en précisant que X______ l'avait maintenue pour l'empêcher de s'enlever alors qu'elle avait tenté de relever sa tête lors de la fellation. Concernant la pression avec laquelle il avait maintenu sa tête, c'était un peu flou. Dans son souvenir, il maintenait l'une de ses mains avec sa main et sa tête avec son autre main, mais elle ne pouvait pas attester à cent pour cent de la manière dont elle était maintenue. Elle ne saurait dire s'il appuyait fort (C-117).

En ce qui concerne E______, cette dernière lui avait dit, lors de leur rencontre, quelque chose comme « il l'avait violé après l'avoir forcée à boire de l'alcool, qu'elle n'était pas étonnée tout cela se soit produit avec moi et m'a également dit qu'il agissait de la même manière envers elle, soit beaucoup d'insultes et qu'il y avait beaucoup de points communs entre nos deux vécus ». Elle lui avait également communiqué le fait qu'il lui faisait peur et qu'elle avait surpris X______ en train d'avoir des conversations avec lui-même devant un miroir. X______ avait dit à E______ avoir une voix dans sa tête qui s'appelait « ______ » et qui lui disait ce qu'il devait faire (C-118).

En relation avec les conséquences, A______ a ajouté qu'après la rupture, elle avait peur de dormir sans lumière, de sorte qu'elle en gardait une allumée pendant la nuit. Elle avait des flashs back qui revenaient en boucle lors desquels elle revoyait X______ s'énerver contre elle et la forcer à faire toutes ces choses (C-117 ; C-118). Elle faisait encore des crises d'angoisses, par exemple lorsqu'elle regarde un film où il y a une scène de viol ou quand elle avait des rapports sexuels avec son petit-ami (C-118). Elle ne pouvait pas rester avec un homme qu'elle ne connaissait pas. Elle avait beaucoup de mal à prendre sa douche, indiquant qu'au début elle le faisait avec son maillot de bain car elle n'arrivait pas à voir son corps nu. Elle avait le sentiment que son corps était sale et cela la dégoutait (C-119).

c.b. Lors de l'audience de confrontation du 6 mai 2021 (C-130 ss), A______ a réitéré ses précédentes déclarations.

En relation avec le comportement de X______, elle a ajouté qu'il lui faisait des remarques sur sa tenue en lui disant qu'il fallait qu'elle soit plus féminine. Il souhaitait qu'elle se coupe les cheveux et qu'elle se les teigne (C-132). Il lui disait « tu m'appartiens », qu'elle était sa propriété et que c'était son rôle d'être belle et de ne pas donner son opinion. S'agissant de ses études, il lui disait qu'elle n'avait rien pour devenir avocate et que ce n'était pas un métier de femme (C-133). Par rapport à l'alcool, il voulait absolument qu'elle en boive tout le temps. Par exemple, à plusieurs reprises elle lui avait demandé un Coca lorsqu'ils se rendaient dans un bar, et il revenait avec de l'alcool alors qu'elle ne souhaitait pas boire. Concernant la violence, X______ avait déjà été violent par rapport aux autres automobilistes. Cela lui était déjà arrivé de rayer des voitures devant elle alors qu'elle lui avait dit de ne pas le faire. Un jour, il avait cassé un rétroviseur devant elle car une personne lui avait pris sa place de parking. Il s'était déjà battu devant un bar avec des personnes qui passaient dans la rue. Il avait également une batte de base-ball dans sa voiture au cas où il fallait qu'il s'en serve dans la vie, étant précisé qu'il ne pratiquait pas le base-ball. Avec son chien, il était extrêmement violent. Il lui était déjà arrivé de lui donner des très forts coups de pieds et des coups de laisse. Il lui avait dit qu'il était très fier d'avoir dressé ce chien et que ce dernier avait peur de lui, disant que c'était comme cela qu'il fallait que ça se passe dans la vie. Tous ces éléments avaient contribué à la peur ressentie par A______ envers X______ (C-134). Elle a précisé qu'elle avait eu de la difficulté à quitter X______ car elle avait l'espoir qu'il change et qu'elle avait peur qu'il s'en prenne à elle ou ses amis si elle le quittait (C-135). Elle a également relaté un épisode s'étant déroulé dans un bar au cours duquel X______ l'avait touché la poitrine et le vagin, par-dessus ses vêtements, devant les amis masculins de X______. Les personnes présentes étaient amusées. Ces faits lui avaient inspiré beaucoup de honte et le sentiment qu'elle était sa chose, dans la mesure où il se permettait de faire cela devant d'autres personnes. Au moment des attouchements, X______ rigolait (C-136 ; C-137).

Concernant leur relation et la barrière de la langue, elle a précisé qu'ils parlaient français lorsqu'ils étaient face à face. Par message, elle lui répondait par moment en anglais. Elle arrivait à avoir une conversation même si son anglais n'était pas parfait (C-132 ; C-133).

S'agissant de E______, elle a ajouté que cette dernière lui avait expliqué que la voix dans la tête de X______ lui disait que sa mission était de faire souffrir les femmes et d'apprendre la vie aux femmes. Elle lui avait également dit qu'il choisissait des femmes qu'il pourrait manipuler pour faire ce qu'il voulait avec (C-133).

En lien avec son accident de scooter, elle a expliqué que celui-ci avait eu lieu lorsqu'elle était en seconde au lycée. L'accident lui avait provoqué une commotion cérébrale. Elle avait eu des crises d'angoisses suite à cet accident. Un psychiatre l'avait suivie pour faire de l'hypnose et régler ces crises d'angoisse. Elle était remontée par la suite sur un scooter en tant que conductrice. A ce jour, elle n'avait plus du tout de crises d'angoisse à ce sujet (C-135).

Pour ce qui concerne le dépôt de plainte, elle a précisé que cela lui avait pris du temps car elle avait peur des représailles de X______ et elle avait également un énorme sentiment de honte (C-137). Elle n'était pas partie de cette relation car elle avait le sentiment d'être sous une emprise, une partie d'elle l'aimait et l'autre partie en avait extrêmement peur (C-140). Elle n'avait pas évoqué à ses proches avoir subi des relations forcées au cours de leur relation car elle avait peur de lui, peur des représailles et avait honte. X______ lui avait dit qu'elle ne devait pas parler de tout cela à personne, et que personne ne la croirait. C'est pour cela qu'elle n'avait pas été en mesure d'en parler à ses proches (C-143).

En relation avec les faits relatifs au ch. 1.2.1. § 1 de l'acte d'accusation, elle a indiqué que c'était de plus en plus flou avec le temps qui passe. Ce n'était pas des choses dont elle voulait volontairement se souvenir. Elle ne se souvenait pas du nombre de fois où elle n'avait pas été consentante (C-132).

S'agissant des faits relatifs au ch. 1.2.1. § 2 ss de l'acte d'accusation, elle a précisé que X______ ne l'avait pas contrainte physiquement. Elle avait cédé à cause de ses paroles, ses menaces et la grande peur qu'elle avait eue (C-131). Elle avait manifesté de manière plus claire que les autres fois son non-consentement. Il y avait une différence dans son attitude lorsqu'elle était consentante, c'est-à-dire qu'elle ne disait pas « non » et ils étaient tous les deux dans l'action. Elle ne se laissait pas juste subir (C-136). Elle ne se souvenait pas si cet épisode avait changé quelque chose dans son rapport avec X______ ni si elle avait exprimé des sentiments amoureux à son encontre (C-138 ; C-139).

Confrontée à la version de X______ (cf. infra B.d.a.) concernant les faits relatifs au ch. 1.2.2. § 2 ss de l'acte d'accusation, A______ a rétorqué en ces termes : « ces dates ne me disent rien. Le 13 c'est son anniversaire. Mais pas plus que ça ». Elle a assuré qu'il l'avait forcée à faire cette fellation (C-132). Elle s'était débattue (C-136). Elle ne se souvenait plus si l'épisode de la fellation forcée avait eu lieu en 2019 (C-138).

Questionnée sur les messages envoyés à X______, elle a déclaré avoir supprimé toutes les conversations après l'avoir quitté. Lorsqu'il lui a été lu les messages dans lesquels elle lui avait écrit : « rejoins moi en haut avec ta grosse bite (smiley clin d'œil », puis : « dépêche-toi, I'm super hot (plusieurs smileys et 5 bananes) » et : « tu n'auras pas de gâterie tant que ton dossier ne sera pas terminé », elle a répondu qu'elle n'avait pas souvenir de ces messages. Elle n'avait jamais caché qu'il y avait eu des relations consenties avec X______. Elle n'avait pas non plus souvenir d'avoir harcelé X______, notamment au mois de mars 2019, en lui demandant qu'il lui dise qu'il l'aimait (C-139) ou en insistant pour qu'il vienne dormir chez elle à Grenoble (C-140). Elle ne se souvenait pas avoir exprimé à X______ ses sentiments d'insécurité qu'elle avait à Grenoble, notamment dans le tram. Elle ne saurait dire dans quelles circonstances X______ lui avait donné un spray au poivre (C-140).

Interrogée quant au fait de savoir comment elle expliquait qu'il n'y avait pas de référence aux actes qu'elle dénonce dans ces messages, elle a répondu en ces termes : « je vous réponds que quand les actes se produisaient, en voyant qu'il pouvait s'énerver, qu'il pouvait être violent, j'essayais de survivre le plus possible dans cette relation. Il me disait toujours qu'il ne fallait jamais que je parle de cela, soit de ce qu'il me faisait et des choses que j'ai dénoncées à la police, également les excès de colère qu'il avait contre moi. Monsieur X______ ne parlait pas beaucoup par message, c'était surtout moi qui en envoyait. Quand nous étions en face, il mettait les téléphones dans d'autres pièces pour être sûr que je ne l'enregistre pas ou que je ne le filme pas » (C-141). Elle n'avait pas souvenir des messages écrits durant le mois de février 2019 (C-146).

Déclarations du prévenu

d.a. Lors de l'audience de confrontation du 5 mars 2021 (C-111 ss), X______ a contesté les faits qui lui étaient reprochés.

Il a déclaré être choqué, même bouleversé par les déclarations de A______. Il était triste de voir A______ dans cet état et d'entendre ce qu'elle avait dit sur leur relation. Il ne croyait pas être la cause de ses crises d'angoisse. Il tenait à souligner qu'il n'avait violé personne. A______ était une fille très gentille mais il pensait qu'elle avait été très marquée par son accident de scooter qui avait eu lieu trois ans auparavant, où elle était tombée sur la tête. A______ parlait souvent de cet accident, à cause de cela, elle avait des crises d'angoisse. Elle avait peur des voitures et des moteurs. Avec lui, elle se sentait en sécurité lorsqu'il conduisait. S'agissant du comportement de A______ durant leur relation, elle avait des sautes d'humeur et passait d'un extrême à l'autre. Il n'était pas confortable dans la relation car il avait peur de dire quelque chose qui puisse provoquer une crise d'hystérie. Il avait également pour but de la quitter au mois de mai, précisant qu'ils avaient remarqué qu'ils n'étaient pas compatibles. Elle était très accusatrice, très intense et parfois autoritaire et hystérique. Il y avait beaucoup de disputes pendant la relation, durant lesquelles ils s'échangeaient chacun des insultes. Les fautes étaient partagées. L'image que A______ tentait de mettre sur lui, soit celle d'un tyran était fausse. Elle insultait très souvent la Russie, faisant des allusions au régime fasciste alors que ses ancêtres s'étaient battus contre. Il a précisé qu'à l'époque, il y avait eu beaucoup d'incompréhension et de disputes, car A______ ne comprenait pas ce qu'il disait, ce qui était dû au fait que son niveau de français n'était pas celui d'aujourd'hui et que le niveau d'anglais de A______ était très bas. Un jour, il lui avait envoyé une chanson avec le commentaire « listening to this », ce qui voulait dire qu'il écoutait la chanson, et elle lui avait répondu : « est-ce que tu me donnes des ordres maintenant ». Lorsqu'elle disait qu'il contrôlait sa vie, c'était plutôt un problème de barrière de langue (C-120).

A______ avait des problèmes à gérer ses émotions. Lorsqu'ils étaient ensemble, il avait tout fait pour la soutenir, notamment dans le cadre de ses études et moralement aussi. Il était allé de Lausanne à Grenoble pour l'aider à s'inscrire, car elle avait des angoisses de le faire seule. Il devait lui remonter le moral et s'occuper d'elle. Il lui avait offert un cahier pour le droit, signé par ______. Il lui dédiait ses week-ends pour l'aider à réviser ses examens au lieu de réviser les siens. S'agissant de sa consommation d'alcool, il buvait beaucoup plus à cette époque-là, où il avait 19 et 20 ans, qu'aujourd'hui. Il a tenu à préciser que A______ n'était pas un ange et qu'elle buvait très souvent avec lui ou sa famille. Il avait des photos d'elle, terminant en black-out sur la table. Elle cachait la moitié de la vérité, car souvent, elle était alcoolisée en premier. Le fait de cacher la moitié de la vérité est quelque chose de récurent chez A______ (C-121). Il avait cherché à quitter A______ pendant les deux ans de relation. Par message, il voulait qu'ils parlent du statut de leur relation. Elle avait interprété cela comme une menace de la quitter et avait commencé à paniquer. Elle lui avait envoyé beaucoup de messages et l'avait harcelé. Il avait tout essayé pour la calmer, en lui disant qu'il voulait juste avoir une discussion avec elle et qu'il ne souhaitait pas la quitter. Cela démontre que dès qu'il disait une chose qu'elle interprétait mal, cela menait à de grandes crises. Il y avait beaucoup de méchancetés dans les messages de A______. Vers le milieu de leur relation, il avait très peur de lui dire les choses, car cela pouvait mener à de grandes crises (C-122).

S'agissant de l'épisode qualifié de fellation forcée visé au ch. 1.2.2. § 2 ss de l'acte d'accusation, il a expliqué que cela s'était déroulé soit le 13 janvier, jour de son anniversaire, soit le 14 février. Comme tradition, A______ lui faisait des « cadeaux » de nature sexuelle. Ce jour-là, il conduisait la voiture pour aller chez lui à H______[GE]. Ils s'étaient arrêtés dans un champ à 5 minutes de chez ses parents. Ils savaient tous les deux ce qu'il allait se passer puisque A______ « l'avait dit avant ». Elle lui avait prodigué une fellation, et comme elle l'avait dit, il avait éjaculé dans sa bouche. C'était la première fois que cela arrivait car avant elle ne voulait pas. C'était « ça » son cadeau. C'était également la dernière fois que cela était arrivé puisque cela l'avait dégoutée. Elle n'avait pas aimé le goût. Il n'avait pas de souvenir de vomissements, mais il se souvenait qu'elle avait craché. Après, ils s'étaient rendus chez ses parents. Durant leur relation, elle lui avait prodigué une fellation dans une voiture uniquement à deux reprises. La seconde fois, c'était durant son stage à Lausanne (février à juillet 2018), lors duquel elle était venue le voir pendant la pause de midi. Ils avaient passé du temps ensemble dans la voiture et de sa propre initiative, elle lui avait fait une fellation (C-121).

En lien avec les faits reprochés au ch. 1.2.1. de l'acte d'accusation, X______ n'avait pas « grand-chose à dire », car cela ne s'était pas produit comme la plaignante l'avait décrit. Ils se voyaient uniquement les week-ends, car il était en étude à Lausanne et elle à Grenoble. Il passait chaque week-ends chez ses parents. Ils avaient très souvent des rapports sexuels, souvent de l'initiative de A______, parfois de la sienne. A aucun moment, quand elle disait « non », il continuait ou forçait. Cela arrivait à A______ de dire « non », et à lui aussi d'ailleurs cela lui était arrivé. A chaque fois, cela avait été respecté. Il n'était pas de nature violente ou agressive. Elle disait qu'il était agressif et qu'il menaçait de la quitter, mais ce n'était pas le cas. Il n'irait pas jusqu'à dire qu'elle était manipulatrice mais cela lui arrivait de le menacer de faire des crises d'hystérie s'il ne faisait pas ce qu'elle voulait. Elle pleurait et elle criait pendant des heures. Il fallait qu'il la calme (C-121).

Questionné sur le fait de savoir s'il avait une explication par rapport aux dénonciations de A______, il a répondu qu'il n'était pas dans sa tête (C-122).

d.b. Entendu par-devant le Ministère public le 6 mai 2021 (C-130 ss), X______ a maintenu ses précédentes déclarations.

S'agissant des faits reprochés au ch. 1.2.1. § 2 ss de l'acte d'accusation, il a ajouté ne pas savoir de quoi elle parlait dans le sens où ils avaient eu des relations sexuelles, y compris en février, comme cela ressortait des messages échangés. Il ne pouvait pas savoir la relation sexuelle qu'elle visait en particulier (C-148). Quand ils étaient ensemble, il n'avait rien remarqué. Elle n'en avait pas parlé ni à lui, ni à sa mère avec laquelle elle parlait souvent de lui lorsqu'elle n'était pas contente de quelque chose (C-149). Il n'avait pas senti un changement dans ses rapports sexuels avec elle durant les derniers mois de leur relation. Cela arrivait de temps en temps qu'elle ne veuille pas avoir de rapports sexuels avec lui, elle lui disait « arrête » ou « je n'ai plus envie ». Elle était très directe. Parfois, elle disait qu'elle avait mal pendant un rapport vaginal et il s'arrêtait immédiatement de sa propre volonté. Dans cette situation, il n'était pas super joyeux quand ils s'arrêtaient « au milieu du truc », mais il n'avait pas de réaction violente ou agressive dans ces cas-là (C-153).

Invité à se déterminer sur les dires de A______ selon lesquels il lui avait exigé, après le viol et la fellation dénoncés, de ne pas en parler, X______ a répondu en ces termes : « premièrement si je ne sais pas de quoi elle parle, comment j'ai pu lui dire de ne pas en parler. Selon mes souvenirs, il n'y a rien eu de tel. S'agissant des menaces dont elle a parlé, j'ai eu les yeux écarquillés lorsque j'ai entendu cela, je n'ai pas tenu de propos menaçants » (C-148).

En lien avec leur relation, X______ a précisé que le manque de compréhension dans leur couple était également dû au fait qu'ils pensaient différemment (C-148). Il n'avait jamais essayé de l'influencer sur son apparence physique. Il était amoureux d'elle comme elle était. Il avait toujours aimé les blondes avec les cheveux courts. A aucun moment, il lui avait demandé de se teindre et de se couper les cheveux. Il avait juste dit qu'il avait une préférence pour ce type de femme. Lorsqu'il était en vacances en Espagne, elle lui avait envoyé des photos d'elle avec les cheveux coupés courts et blonds. Elle voulait lui faire plaisir, ce qui avait marché, précisant qu'il n'y avait aucune influence de sa part. Elle pouvait faire ce qu'elle voulait avec ses cheveux. S'agissant de ses études, cela l'avait rendu triste d'entendre ce qu'elle avait dit. Il n'avait jamais ni dit ni pensé que les femmes ne pouvaient pas faire du droit, sinon il n'aurait pas choisi Me HAYAT pour le défendre. Il avait une grande admiration pour les femmes qui font carrière. De plus, pendant ses études, il l'avait aidée à réviser, notamment pour se souvenir de dates par des moyens mémo-techniques. Il était même allé en cours avec elle, sans s'asseoir proche d'elle pour pouvoir l'encourager à ses faire des amis (C-149). En relation avec les amis de A______, il a déclaré qu'il n'avait jamais tenté de l'isoler et ne l'avais jamais empêchée de les voir. Comme ils se voyaient uniquement les week-ends, il souhaitait passer un minimum de temps avec elle, soit deux ou trois heures. Il se pouvait qu'elle l'ait interprété comme une isolation (C-150). Il a indiqué que A______ était jalouse de manière générale. Elle boudait régulièrement et avait des émotions très fortes. Il a déclaré que « quand elle est heureuse elle est super heureuse, et quand elle est fâchée elle est très fâchée ». Elle était intense et envahissante. Par exemple, il se souvenait avoir oublié une fois son portable chez lui, et avoir reçu le lendemain 20 appels manqués et une trentaine de messages (C-151). Après leur rupture, il s'était senti « libéré d'un poids ». Il ne devait plus courir derrière elle après chaque crise et après chaque attaque de panique, indiquant qu'elle en avait beaucoup puisqu'elle avait peur du noir, peur de l'échec et peur de se balader toute seule (C-149).

Questionné sur les pressions qu'il aurait exercées sur A______, il a rétorqué : « Quelles pressions ? Les menaces ? Vous pouvez demander à n'importe qui qui me connaît, ce n'est pas mon genre. Je suis quelqu'un qui dit les choses comme je les pense. Quand Madame A______ entendait des choses qui ne lui plaisaient pas, cela amenait des conversations très intenses de sa part » (C-149).

S'agissant de E______, il a déclaré avoir eu des relations intimes avec elle lorsqu'il était mineur. Ils s'étaient quittés en mauvais termes. Il y avait des hauts et des bas (C-152).

Déclarations des témoins durant l'instruction

e.a. I______, cousine de la plaignante, a décrit cette dernière comme étant une jeune femme battante avec beaucoup d'insécurités contre lesquelles elle lutte pour grandir. Au courant de l'année 2019, après sa rupture et suite au conseil de sa cousine, A______ avait écrit ce qui n'allait pas. Dans son texte, elle décrivait notamment l'emprise psychologique que le prévenu avait sur elle et les menaces qu'il proférait contre elle ou ses proches pour obtenir des faveurs sexuelles. X______ lui aurait dit qu'il avait de quoi l'écraser si elle ne se soumettait pas à ses envies et qu'il avait tout pour la détruire. A la fin de la lecture de son texte, sa cousine lui avait fait remarquer que « menacer quelqu'un pour obtenir une faveur sexuelle, on appelle ça un viol » (C-352 ; C-357). La plaignante lui avait également mentionné avoir été forcée à prodiguer une fellation au prévenu dans une voiture. I______ a précisé que la plaignante était entre la honte que son manque de réaction lui procurait et la peur d'éventuelles représailles de la part du prévenu envers elle et ses proches. Avant sa relation avec X______, la plaignante et I______ se fréquentaient beaucoup plus souvent. Au fur et à mesure de leur relation amoureuse, cela s'était étiolé. La plaignante lui envoyait moins de messages et ne répondait presque plus aux messages que sa cousine lui envoyait (C-353 ; C-358). I______ avait rencontré X______ qui avait l'air « très gentil », sans avoir de souvenir de discussions « autre que la pluie et le beau temps avec lui » (C-354). La plaignante avait dit à I______ que lorsqu'elle sortait avec X______, elle voyait moins ses amis (C-356). Lorsqu'ils étaient ensemble, I______ n'avait pas le souvenir d'avoir vu une réaction particulière de la plaignante en présence du prévenu (C-357).

e.b. J_____, meilleure amie de la plaignante, a décrit le prévenu comme une personne « difficile à cerner », « aimable », « autant très avenant que très réservé », « très amical ou très froid ». Durant sa relation amoureuse, la plaignante ne lui avait jamais parlé de X______. C'était une époque où elles étaient moins proches car J_____ était en Espagne. Elle avait vu le couple ensemble uniquement deux ou trois fois. Suite à la rupture avec X______, elles avaient commencé à ravoir une relation (C-397 ; C-398 ; C-400 ; C-443). A______ avait fait une crise d'angoisse avec son nouveau copain, lequel avait appelé J_____. C'est à ce moment-là que la plaignante lui avait dit qu'elle avait eu un flash-back avec X______ et lui avait écrit le mot « viol » sur un papier (C-399). Elle lui avait parlé de X______ après coup en disant qu'il était violent, ne l'aidait pas dans ses projets et la rabaissait (C-400). A______ avait moins de contacts avec ses amis durant sa relation amoureuse. Elle avait peur que X______ revienne s'attaquer à elle, à sa famille et ses amis. Elle le pensait capable de passer à l'acte (C-401). La plaignante lui avait relaté avoir été forcée de prodiguer une fellation dans une voiture (C-401 ; C-402). La plaignante, en cours et fin de relation, ne se sentait pas considérée comme un être humain par X______ et trouvait qu'elle n'avait pas d'importance pour lui (C-444).

e.c. K______, amie de la plaignante, a décrit X______ comme « très froid et très difficile ». Elle voyait peu le couple ensemble. A______ était devenu plus distante à son égard. Pendant sa relation, A______ lui avait raconté que X______ lui disait qu'elle n'arriverait jamais à faire du droit. A______ lui avait rapporté, après sa rupture, que X______ l'avait forcée plusieurs fois à avoir des rapports sexuels (C-428 ; C-429 ; C-432 ; C-433). Au sujet du contexte des révélations, il est vrai qu'elles avaient arrêté de se voir et que A______ avait repris contact avec elle, notamment pour se confier (C-431).

e.d. L______, mère du prévenu, a été entendue en qualité de personne appelée à donner des renseignements. Au sujet de A______, elle a indiqué avoir entretenu avec elle une relation normale. A l'époque, A______ avait 20 ans et terminait le lycée. Elle avait besoin d'obtenir le bac avec mention et avait peur de le rater. X______ l'avait aidée à préparer ses examens en anglais et en histoire lors de la cession finale des examens, en mai/juin 2017 (C-411). Elle a relaté un épisode s'étant déroulé lors de son anniversaire de ses 45 ans. A ce propos, quelques jours avant Noël, elle avait convenu avec X______ que celui-ci pouvait se rendre à Barcelone avec A______ mais qu'il devait revenir le 30 décembre pour fêter son anniversaire le 31 décembre 2017. Le 28 ou 29 décembre, A______ lui avait envoyé un message pour lui dire qu'elle voulait que X______ reste avec elle pour la Saint-Sylvestre et que c'était très important pour elle. Elle lui avait dit qu'il n'y avait pas de bus pas cher pour rentrer, ce à quoi L______ avait répondu qu'elle pouvait payer le bus puisque c'était son anniversaire. A______ lui avait dit qu'elle voulait qu'il reste avec elle et qu'elle allait rembourser L______ en lui achetant un cadeau coûteux. L______ lui avait dit que c'était à X______ de prendre la décision. A______ avait dit à X______ que sa mère lui avait donné son accord. L______ a déclaré que son anniversaire avait été détruit puisque X______ n'était pas présent et qu'il n'avait pas donné de nouvelles. X______ était venu trois jours plus tard et avait dit à sa mère que A______ voulait qu'ils « fassent du sexe durant la nuit de la St-Sylvestre ». A______ ne s'était jamais excusée (C-412 ; C-413). S'agissant de la coupe du monde en Russie, elle a indiqué que A______ et X______ avaient parlé de se rendre à Moscou. A plusieurs reprises, lors de discussions, A______ lui disait « Si tu ne fais pas comme ça, je ne voyage pas avec toi à Moscou », ce qui s'était finalement passé (C-414). Elle n'avait jamais vu son fils avoir un comportement violent avec leur chien (C-415). Au sujet du caractère de A______, si elle avait quelque chose dans la tête, elle allait insister jusqu'à la fin. Lors de ses études à Grenoble, elle faisait des crises. Elle pleurait et disait à X______ qu'elle avait besoin de lui. Ce dernier s'était rendu auprès d'elle en voiture (C-416). C'était très dur pour X______ d'avoir été accusé de viol. Il était torturé. Son moral avait souffert depuis trois ans. Il avait l'air d'être dépressif et choqué. Il avait perdu beaucoup d'amis au ______ dû à une fuite d'informations. Des rumeurs avaient été amenées à la connaissance du club de ______ et X______ avait tout arrêté (C-417).

Attestations de suivi psychologique de la partie plaignante

f.a. Le 28 avril 2021, par le biais de son Conseil, A______ a versé à la procédure deux attestations de suivi psychologique, l'une établie par l'association AVVEC le 28 janvier 2021 et l'autre établie par l'Institut Clinique de Neurosciences le 15 avril 2021 (C-128 ; C-129).

Il ressort de l'attestation établie par l'association AVVEC que A______ avait fait appel à cet organisme en novembre 2019 et qu'elle y était toujours suivie. Lors des entretiens, celle-ci avait évoqué la violence psychologique, physique et sexuelle subie lors de sa relation avec X______. Elle décrivait avoir vécu dans un climat de domination et de contrôle, expliquant qu'il décidait de tout et relatant les insultes, les coups et les menaces de s'en prendre à ses proches si elle le quittait. Elle a également raconté qu'il l'avait forcée à subir des caresses intimes en public, à accomplir des actes d'ordres sexuels qu'elle ne désirait pas et qu'il l'avait également violée. Elle avait vécu cette relation dans un climat de grande peur, de mise sous pression et de menaces ayant conduit à ce qu'elle craigne pour sa vie à plusieurs reprises. L'éducatrice sociale ayant rédigée l'attestation a conclu que « les impacts décrits et dont certains ont été constatés lors des entretiens (anxiété, tremblements, sensation d'étouffer, peur de sortir, difficultés à dormir, cauchemars récurrents, difficulté à se concentrer, flash-backs, reviviscences, évitement, humeur dépressive, idées suicidaires) font penser aux symptômes découlant d'un stress post-traumatique pouvant résulter des violences conjugales subies. Le contenu des entretiens avec Madame A______ et son récit des évènements présentent une cohérence significative avec ce que l'expérience nous a appris de ce phénomène et de son déroulement ».

Il résulte de l'attestation de l'Institut Clinique de Neurosciences que A______ leur avait été adressée par l'Unité interdisciplinaire de médecine et de prévention de la violence des HUG pour une psychothérapie de type EMDR, le but étant de traiter les séquelles de traumatismes subis dans le cadre de violences physique, sexuelle et psychologique exercées par X______ entre 2017 et 2019. Il s'ensuit que « Madame A______ présente les symptômes d'un Etat de stress post-traumatique dont les caractéristiques remplissent les critères du DSM-5 ».

f.b. Par courrier du 8 février 2024, A______, par le biais de son Conseil, a produit une attestation psychologique établie par M______, psychologue-psychothérapeute FSP, le 7 février 2024, certifiant que A______ avait été suivie du 14 janvier au 21 octobre 2021 à fréquence hebdomadaire, puis de façon sporadique. Dernièrement, M______ avait revu A______ dans le cadre de la rédaction de ladite attestation. D'après ses observations, A______ présentait encore des séquelles de stress post-traumatiques, probablement durables. Elle faisait des cauchemars et présentait des réactions physiologiques marquées (crises de panique et tremblements) lors de déclencheurs tels que l'annonce de l'audience du 14 février 2024 ou de courriels de son avocate. M______ a observé que les altérations cognitives subsistaient sous forme d'amnésie dissociative (incapacité à se souvenir de certains évènements et de leur chronologie) et de croyances négatives à son sujet, lesquelles surgissaient de façon plus circonstanciée (se sentir sale, honteuse, etc.). En outre, A______ insistait sur un sentiment de menace latent et durable, dont principalement la crainte de rétorsions la visant elle-même ou ses proches. Elle avait dû renoncer à ses études en droit après trois années d'essai infructueux en raison des contenus qui la réactivaient trop. M______ conclut que « même si elle semble mener une vie apparemment normale en termes d'activité professionnelle, de vie de couple, d'amis, la souffrance en lien avec la violence vécue semble encore cliniquement marquée et il existe un risque qu'elle devienne chronique ».

Expertise psychiatrique du prévenu

g. Le 30 mars 2021, le Ministère public a désigné, au titre d'experts, le Dr. N______ et le Dr. O______ afin d'établir une expertise psychiatrique de X______ (C-10'021 ss).

Par expertise psychiatrique du 19 juillet 2021, les experts susmentionnés ont notamment retenu, à propos de la personnalité de X______, qu' « il n'a pas été retrouvé de labilité émotionnelle, d'intolérance à la frustration ni d'impulsivité. L'expertisé a tendance à utiliser des mécanismes défensives plutôt évolués comme, par exemple, l'intellectualisation, la rationalisation en particulier lors que les faits ont été abordés, faisant ainsi évoquer des traits narcissiques. Ces traits se retrouvent également dans la propension de l'expertisé à chercher à être au cœur de l'attention, et être apprécié. L'empathie limitée vis-à-vis des victimes, qu'il peut dévaloriser, va aussi dans ce sens ». Aucun diagnostic ne pouvait être retenu au moment des faits. X______, malgré quelques difficultés rapportés d'intégration, avait toujours réussi à s'insérer correctement dans la société, et à être entouré sur le plan affectif, dont familial. Il était tout au plus retrouvé d'une structure de la personnalité marquée par un contrôle des émotions, qui pouvait parfois se traduire par des comportements un peu détachés. Il n'avait été retrouvé aucun comportement ni conduite ou style relationnel, déviant sévèrement, de ce qui pourrait être attendu d'un individu « moyen », concluant que X______ ne souffrait d'aucun trouble sexuel, d'aucun trouble psychiatrique ni addictologique (C-10'038 ss).

Messages échangés entre A______ et X______

h. Il ressort du rapport de renseignements du 19 octobre 2021 que l'analyse des échanges Whatsapp entre X______ et A______, pour la période allant du 13 janvier 2019 au 2 mai 2019, n'a apporté aucun élément utile à l'enquête, étant précisé qu'il était, de manière générale, fait état de messages relatifs à leur vie courante et à leur vie de couple. Aucun message en lien avec une agression sexuelle durant le mois de février 2019 ne ressortait de l'analyse des messages (C-340).

C. L'audience de jugement s'est tenue le 13 février 2024.

a.a. A______ a confirmé sa plainte pénale, ainsi que ses précédentes déclarations.

S'agissant de son état, elle a indiqué que la vie de tous les jours était encore assez compliquée, même si elle allait mieux. Si elle regardait une scène de viol à la télévision, elle pouvait avoir une crise d'angoisse. Les relations sexuelles avec son partenaire étaient compliquées. Il lui était arrivé d'aller se doucher toute habillée, car à des moments elle se sentait à nouveau sale. Les crises d'angoisse lui faisant aller sous la douche toute habillée étaient apparues depuis sa relation avec X______. Elle hyper ventilait beaucoup et n'arrivait pas à être en présence d'hommes. Elle avait toujours des problèmes de sommeil et faisait des cauchemars où elle voyait X______. Elle n'arrivait pas à dormir toute seule parce qu'elle avait toujours peur que X______ revienne et cela la terrorisait. Elle avait dû mal à être féminine. Elle avait peur d'éventuelles représailles. Elle avait mis en pause son suivi psychologique (PV de l'audience de jugement, p. 10).

En ce qui concerne les actes décrits dans l'acte d'accusation, elle a réitéré en substance ses précédentes déclarations, à savoir que le comportement de X______ était un peu comme des montagnes russes, comme leurs rapports. Des fois, elle était consentante et cela se passait normalement. D'autres fois, il insistait et se montrait menaçant sur le fait de faire du mal à ses amis. Il lui mettait une forte pression en lui disant qu'elle lui appartenait et que c'était sa poupée. Il lui disait que si elle ne restait pas à sa place et qu'elle ne faisait pas ce qu'il demandait, il ferait à ses amis ce qu'il lui faisait, qu'il connaissait leur adresse et des gens pas très fréquentables, surtout en Russie. Elle le croyait et continuait toujours de le croire, ce qui expliquait sa peur actuelle (PV de l'audience de jugement, p. 11).

Elle a précisé que lors des rapports non-consentis où elle disait « non », elle restait stoïque. Elle ne se souvenait pas du fait si elle avait pu le confronter après un épisode de ce genre. Elle ne se rappelait pas des messages à connotation sexuelle figurant à la procédure (PV de l'audience de jugement, p. 11). S'agissant de l'épisode de février 2019, elle s'en souvenait parce qu'elle avait encore plus dit « non » et qu'il avait été plus menaçant que d'habitude. Concernant les fellations forcées, elle ne se souvenait pas du nombre de fois où cela s'était produit (PV de l'audience de jugement, p. 12).

Questionnée sur le fait de savoir si elle se souvenait d'un message envoyé le 30 avril 2019 à X______ dans lequel elle lui dit « j'ai besoin d'entendre des je t'aime et qu'on me prenne par la main », elle a répondu par la négative, précisant qu'elle avait voulu oublier toute la relation. Elle n'avait pas transmis ces messages à sa psychologue et n'avait rien gardé de cette relation (PV de l'audience de jugement, p. 12). Concernant l'anniversaire de la mère à X______, elle ne se souvenait plus de cet épisode et ne pouvait pas donner d'explication à ce sujet (PV de l'audience de jugement, p. 13).

a.b. A______, par le biais de son Conseil, a déposé un état de frais complémentaire et des conclusions civiles, aux termes desquelles elle conclut à la condamnation de X______ à lui verser la somme de CHF 20'000.-, avec intérêts moyens à 5% dès le 1er janvier 2018, à titre de réparation du tort moral.

b.a. X______ a contesté les faits qui lui étaient reprochés et a réitéré ses précédentes déclarations. S'agissant de la pénétration vaginale sous la menace, il a ajouté qu'à ses yeux, ce rapport n'avait jamais eu lieu (PV de l'audience de jugement, p. 6). A______ était très vocale et lui disait ce qu'elle voulait qu'il fasse. Questionné sur le fait de savoir si A______ ne participait pas des fois lors des rapports, il a répondu par la négative (PV de l'audience de jugement, p. 7).

En relation avec le ch. 1.2.2. § 1 de l'acte d'accusation, il a contesté lui avoir dit qu'il ne la ramènerait pas. Il a déclaré à ce sujet : « je rappelle que nous passions tous nos week-ends chez elle. Où aurais-je pu rentrer dormir ? ». Quant à l'épisode de la fellation dans la voiture, ils avaient passé ensuite une soirée positive (PV de l'audience de jugement, p. 9).

Il n'avait jamais menacé les amis de A______, précisant qu'il n'avait jamais tenu des propos selon lesquels il connaissait des gens en Russie qui pouvaient s'en prendre à A______ ou ses amis. Il n'avait pas non plus tenu des propos du type « je sais où habitent tes amis » (PV de l'audience de jugement, p. 6-7). Sur sa tenue, elle le consultait mais l'initiative venait d'elle (PV de l'audience de jugement, p. 78).

En lien avec les crises d'anxiété, il avait l'impression que quelque chose de son passé la troublait. Elle n'en avait pas parlé et elle avait le droit de ne pas en parler (PV de l'audience de jugement, p. 7). Il savait que la mort de sa grand-mère avait eu un grand impact sur elle. La dynamique avec ses parents n'était pas parfaite. Il lui avait acheté un spray au poivre pour qu'elle puisse se sentir en sécurité et se défendre. Concernant les 45 ans de sa mère, il savait que s'il partait, la réaction de A______ pouvait être disproportionnée. Il voulait éviter qu'elle fasse une crise de panique (PV de l'audience de jugement, p. 8).

Concernant E______, il avait 15 ou 16 ans. Il était plus explosif ou impulsif, mais il ne l'avait jamais menacée ou avait été violent. A______ mentait par rapport au viol dont elle l'accusait (PV de l'audience de jugement, p. 6).

b.b. X______, par le biais de son Conseil, a déposé un chargé de pièces complémentaire comportant une copie des messages échangés entre A______ et X______ sur l'application « Messenger » du 28 février 2019 au 7 juin 2019.

c. G______, meilleur ami de la plaignante, a été entendu en qualité de témoin. Il a déclaré que A______ ne lui avait pas parlé de sa relation pendant que celle-ci était en cours. Ils s'étaient rencontrés après sa relation et elle lui avait expliqué ce qu'elle avait vécu. Elle avait eu très peur de X______ pendant sa relation. En particulier, elle avait peur d'être battue si elle refusait des demandes, étant précisé qu'il ne l'avait jamais battue. Une fois, ils étaient dans la voiture de X______ vers Lausanne lorsque ce dernier lui avait demandé de lui faire une fellation si elle voulait rentrer chez lui ce-soir. X______ lui faisait du chantage pour avoir des rapports sexuels en disant que soit elle le faisait, soit il dénonçait le fait qu'il avait vu des armes chez elle. Elle avait également peur qu'il s'en prenne à ses amis (PV de l'audience de jugement, p. 17).

D. X______ est né le ______ 1997 à Vienne, en Autriche. De nationalité suisse, il est célibataire et sans enfant. Il travaille pour Q______ en tant que coordinateur de programme. Il réalise un salaire mensuel net de CHF 4'800.-. Son contrat a été conclu pour une durée déterminée de trois mois, mais il est renouvelable. Dans le cadre des mesures de substitution, il a entrepris un traitement psychothérapeutique qui lui a apporté du soulagement. L'interdiction de contact avec sa famille a été difficile à vivre, notamment suite à l'arrivée du COVID.

Selon l'extrait de son casier judiciaire suisse, X______ n'a pas d'antécédent judiciaire.

EN DROIT

Culpabilité

1.1.1. L'art. 9 CPP consacre la maxime d'accusation. Selon cette disposition, une infraction ne peut faire l'objet d'un jugement que si le ministère public a déposé, auprès du tribunal compétent, un acte d'accusation dirigé contre une personne déterminée sur la base de faits précisément décrits. Le tribunal est lié par l'état de fait décrit dans l'acte d'accusation (principe de l'immutabilité de l'acte d'accusation), mais peut s'écarter de l'appréciation juridique qu'en fait le ministère public (art. 350 al. 1 CPP). Le principe de l'accusation découle également des articles 29 al. 2 Cst (droit d'être entendu), 32 al. 2 Cst (droit d'être informé, dans les plus brefs délais et de manière détaillée des accusations portées contre soi) et 6 par. 3 let. a et b CEDH (droit d'être informé de la nature et de la cause de l'accusation).

1.1.2. Les art. 324 ss CPP règlent la mise en accusation, en particulier le contenu strict de l'acte d'accusation. En d'autres termes, l'acte d'accusation définit l'objet du procès (fonction de délimitation). Une infraction ne peut faire l'objet d'un jugement que si le ministère public a déposé auprès du tribunal compétent un acte d'accusation dirigé contre une personne déterminée sur la base de faits précisément décrits. Il doit décrire les infractions qui sont imputées au prévenu de façon suffisamment précise pour lui permettre d'apprécier, sur les plans subjectif et objectif, les reproches qui lui sont faits. En effet, le prévenu doit connaître exactement les faits qui lui sont imputés et quelles sont les peines et mesures auxquelles il est exposé, afin qu'il puisse s'expliquer et préparer efficacement sa défense (ATF 143 IV 63, consid. 2.2 ; ATF 141 IV 132, consid. 3.4.1 ; ATF 140 IV 188 consid. 1.3 ; ATF 133 IV 235, consid. 6.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_1335/2016 du 5 septembre 2017, consid. 2.1 ; 6B_419/2016 du 10 avril 2017 consid. 1.1 ; 6B_476/2016 du 23 février 2017, consid. 1.1).

Conformément à l’art. 325 al. 1 let. f CPP, l’acte d’accusation du ministère public doit désigner le plus brièvement possible, mais avec précision, les actes reprochés au prévenu, le lieu, la date et l’heure de leur commission ainsi que leurs conséquences et le mode de procéder de l’auteur. Dans ce contexte, la mention de la date exacte n’est pas nécessaire ; la description du temps, qui doit normalement résulter de l’indication d’une date, est suffisante. La question de savoir si un laps de temps relativement long peut encore être considéré comme suffisamment déterminé au sens de l’art. 325 al. 1 let. f CPP dépend essentiellement de l’état des preuves et de la garantie au prévenu de possibilités effectives de se défendre, soit en définitive du caractère équitable de la procédure. De jurisprudence constante, des imprécisions mineures concernant les indications de lieu et de temps n’emportent pas que l’accusation devrait être ignorée, dès lors qu’il n’existe aucun doute pour le prévenu quant au comportement qui lui est reproché. En matière d’infractions contre l’intégrité sexuelle, le Tribunal fédéral considère comme suffisantes la limitation temporelle des faits poursuivis à une période de trois mois, la mention d’une saison déterminée ainsi que la restriction à peu de mois ou à un moment indéterminé au sein d’un unique mois (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1273/2021 du 14 mars 2023, consid. 1.3.3).

1.2. En l'espèce, s'agissant des faits décrits aux ch. 1.2.1. § 1 et 1.2.2. § 1 de l'acte d'accusation, le Tribunal relève qu'il est douteux que ceux-ci soient conformes aux exigences de la maxime d'accusation. En effet, les accusations sont décrites de manière très larges, sans indication précise de lieu, de temps ou encore de fréquence – même dans les grandes lignes sur ce dernier point – des actes reprochés au prévenu. S'agissant la limitation temporelle, elle s'étale sur une période de plus de deux ans, ce qui est insuffisant d'après la jurisprudence du Tribunal fédéral en matière d'infractions contre l'intégrité sexuelle. Ces actes étant insuffisamment décrits, il est impossible pour le prévenu de préparer efficacement sa défense, tel que le requiert pourtant la maxime d'accusation.

Le Tribunal est conscient qu'il est difficile pour la partie plaignante d'apporter des précisions sur ces actes puisqu'elle n'a pas gardé de souvenirs de cette époque, sa thérapeute attribuant ces altérations cognitives à une forme d'amnésie dissociative (Attestation de Madame M______ du 7 février 2024, produite le 8 février 2024). Toutefois, le Tribunal est contraint de constater cette situation, puisqu'il paraît difficilement concevable de condamner un prévenu et de fixer sa peine, sans qu'il soit informé de manière suffisamment précise des éléments essentiels et pertinents de l'accusation. Il est d'ailleurs également difficile pour le Tribunal de se forger une intime conviction en l'absence des informations susmentionnées.

Pour le surplus, quand bien même le principe d'accusation aurait été respecté, la culpabilité du prévenu n'est pas établie pour les raisons exposées ci-après (cf. infra 2.2. ss).

2.1.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence garantie par l'art. 6 § 2 CEDH et, sur le plan interne, par l'art. 32 al. 1 Cst. et l'art. 10 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves. En tant que règle sur le fardeau de la preuve, ce principe signifie qu'il incombe à l'accusation d'établir la culpabilité de l'accusé, et non à ce dernier de démontrer son innocence. Il est violé lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que l'accusé n'a pas prouvé son innocence (ATF 127 I 38 consid. 2a ; 120 Ia 31 consid. 2c et 2d). Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe in dubio pro reo signifie que le juge ne peut se déclarer convaincu d'un état de fait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence de cet état de fait (ATF 127 I 38 consid. 2a ; 124 IV 86 consid. 2a; 120 Ia 31 consid. 2c).

L'autorité de condamnation dispose, en matière d'appréciation des preuves, d'une grande latitude (arrêt du Tribunal fédéral 1P.120/2007 du 25 septembre 2007 consid. 3.1). Lorsqu'elle est confrontée à des versions contradictoires, elle forge sa conviction quant aux faits sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents. En pareil cas, il ne suffit pas que l'un ou l'autre de ceux-ci, ou même chacun d'eux pris isolément, soit à lui seul insuffisant (arrêt du Tribunal fédéral 6B_921/2010 du 25 janvier 2011 consid. 1.1 et l'arrêt cité). L'appréciation des preuves doit être examinée dans son ensemble et il n'y a pas arbitraire si l'état de fait retenu peut être déduit de manière soutenable du rapprochement de divers éléments ou indices. De même, il n'y a pas arbitraire du seul fait qu'un ou plusieurs arguments corroboratifs soient fragiles, si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (ACAS/25/10 du 11 juin 2010 consid. 3.4 et les arrêts cités).

2.1.2. A teneur de l'art. 190 al. 1 CP, celui qui, notamment en usant de menace ou de violence, en exerçant sur sa victime des pressions d’ordre psychique ou en la mettant hors d’état de résister, aura contraint une personne de sexe féminin à subir l’acte sexuel, sera puni d’une peine privative de liberté d'un à dix ans.

Le comportement réprimé par cette disposition consiste dans le fait, pour l'homme, de contraindre volontairement la femme à subir l'acte sexuel proprement dit (Corboz, Les infractions en droit suisse, n° 7 ad art. 190). Par acte sexuel, il faut entendre l'introduction, même partielle et momentanée, du pénis dans le vagin, l'éjaculation n'étant pas nécessaire (ATF 123 IV 49 consid. 2).

2.1.3. Selon l'art. 189 al. 1 CP, celui qui, notamment en usant de menace ou de violence envers une personne, en exerçant sur elle des pressions d'ordre psychique ou en la mettant hors d'état de résister l'aura contrainte à subir un acte analogue à l'acte sexuel ou un autre acte d'ordre sexuel, sera puni d'une peine privative de liberté de dix ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

Constitue un acte d'ordre sexuel une activité corporelle sur soi-même ou sur autrui qui tend à l'excitation ou à la jouissance sexuelle de l'un des participants au moins (arrêts du Tribunal fédéral 6B_732/2018 du 18 septembre 2018, consid. 3.1.3 ; 6B_180/2018 du 12 juin 2018, consid. 3.1).

2.1.4. Pour déterminer si l'on se trouve en présence d'une contrainte sexuelle au sens des articles 189 et 190 CP, il faut procéder à une appréciation globale des circonstances concrètes. La loi confère un poids identique aux moyens de contrainte. L'exercice d'une pression psychologique n'est en principe pas moins grave que la violence physique ou le fait de proférer des menaces (ATF 128 IV 97 consid. 3a, in JdT 2004 IV 123).

Les articles 189 al. 1 et 190 al. 1 CP prévoient que l'auteur, « notamment en usant de menaces ou de violence envers une personne, en exerçant sur elle des pressions d'ordre psychique ou en la mettant hors d'état de résister », la contraint à subir l'acte. Ces dispositions tendent à protéger la libre détermination en matière sexuelle, en réprimant de manière générale la contrainte dans ce domaine, ayant pour objet d'amener une personne, sans son consentement, à faire ou subir l'acte sexuel ou un autre acte d'ordre sexuel. Pour qu'il y ait contrainte en matière sexuelle, il faut que la victime ne soit pas consentante, que l'auteur le sache ou accepte cette éventualité, et qu'il passe outre en profitant de la situation ou en employant un moyen efficace (ATF 122 IV 97 consid. 2b et les références citées). A défaut d'une telle contrainte, de l'intensité exigée par la loi et la jurisprudence, il n'y a pas viol, même si la victime ne souhaitait pas entretenir une relation sexuelle (arrêt du Tribunal fédéral 6B_159/2020 du 20 avril 2020, consid. 2.4.1) S'agissant plus précisément des moyens employés pour contraindre la victime, les dispositions citées mentionnent « notamment » la menace, la violence, les pressions d'ordre psychique et la mise hors d'état de résister. Par menace, il faut entendre que l'auteur, par ses paroles ou son comportement, fait volontairement redouter à la victime la survenance d'un préjudice, à l'effet de l'amener à céder. La menace doit faire craindre un préjudice sérieux. Par violence, il faut entendre, comme dans le cas du brigandage (art. 140 ch. 1 al. 1 CP), l'emploi volontaire de la force physique sur la personne de la victime, dans le but de la faire céder. A l'initiative du Conseil national, la liste des moyens a été complétée en ajoutant les pressions d'ordre psychique, pour inclure également les cas où la victime est mise hors d'état de résister par la surprise, la frayeur ou une situation sans espoir (ATF 122 IV 97 consid. 2b et les références citées).

S'agissant des pressions psychiques, le législateur a voulu viser les cas où la victime se trouve dans une situation sans espoir, sans pour autant que l'auteur ait recouru à la force physique ou à la violence (ATF 131 IV 107 consid. 2.2 p. 109). En cas de pressions d'ordre psychique, il n'est pas nécessaire que la victime ait été mise hors d'état de résister (ATF 124 IV 154 consid. 3b p. 158). La pression exercée doit néanmoins revêtir une intensité particulière, comparable à celle d'un acte de violence ou d'une menace (ATF 133 IV 49 consid. 6.2 p. 55). Une situation d'infériorité physique ou cognitive ou de dépendance sociale et émotionnelle peut suffire (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1150/2014 du 19 novembre 2015 consid. 2.4 ; 6B_71/2015 du 19 novembre 2015 consid. 2.1.2). L'infériorité cognitive et la dépendance émotionnelle et sociale peuvent – en particulier chez les enfants et les adolescents – induire une pression psychique extraordinaire et, partant, une soumission comparable à la contrainte physique, les rendant incapables de s'opposer à des atteintes sexuelles (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1084/2015 du 18 avril 2016 consid. 2.1). En revanche, l'exploitation de rapports généraux de dépendance ou d'amitié, ou même la subordination en tant que telle de l'enfant à l'adulte, ne suffisent en règle générale pas pour admettre une pression psychologique au sens des articles 189 al. 1 et 190 al. 1 CP (ATF 131 IV 107 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6S.450/2006 du 20 février 2007, consid. 7.1.). Peut éventuellement également entrer en ligne de compte une situation de harcèlement continu (ATF 126 IV 124 consid. 3b). La jurisprudence parle de « violence structurelle », pour désigner cette forme de contrainte d'ordre psychique commise par l'instrumentalisation de liens sociaux (arrêt du Tribunal fédéral 6B_116/2019 du 11 mars 2019 consid. 2.2.1). En outre, l'auteur doit utiliser les relations sociales comme moyen de pression pour obtenir des faveurs sexuelles. Ainsi, la considération selon laquelle la subordination cognitive et la dépendance émotionnelle et sociale peuvent produire une pression psychique doit être vue sous l'angle du délinquant sexuel, qui transforme cette pression en un moyen de contrainte pour parvenir à ses fins. Il ne suffit pas que l'auteur exploite une relation de pouvoir, privée ou sociale, préexistante. Il doit créer concrètement une situation de contrainte (tatsituative Zwangssituation). Il suffit, lorsque la victime résiste dans la mesure de ses possibilités, que l'auteur actualise sa pression pour qu'il puisse être admis que chacun des actes sexuels n'a pu être commis qu'en raison de cette violence structurelle réactualisée (ATF 131 IV 107 consid. 2.2 et 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_583/2017 du 20 décembre 2017 consid. 3.1). On peut attendre d'adultes en pleine possession de leurs facultés une résistance à de telles pressions supérieure à celle que des enfants sont en mesure d'opposer (ATF 131 IV 167 consid. 3.1 p. 171). Le Tribunal fédéral a considéré qu'un climat de psycho-terreur entre époux pouvait, même sans violence, exercer une telle influence sur la volonté que la victime considère, de manière compréhensible, qu'elle n'a pas de possibilité réelle de résister (ATF 126 IV 124 consid. 3d).

2.1.5. Sur le plan subjectif, la contrainte sexuelle et le viol sont des infractions intentionnelles. L'auteur doit savoir que la victime n'est pas consentante ou en accepter l'éventualité (arrêt du Tribunal fédéral 6B_780/2022 du 1er mai 2023, consid. 2.3. ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1317/2022 du 27 avril 2023, consid. 8.2.). L'élément subjectif se déduit d'une analyse des circonstances permettant de tirer, sur la base des éléments extérieurs, des déductions sur les dispositions intérieures de l'auteur (arrêt du Tribunal fédéral 6B_780/2022 du 1er mai 2023 consid. 2.3; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1317/2022 du 27 avril 2023, consid. 8.2.). S'agissant du viol, l'élément subjectif est réalisé lorsque la victime donne des signes évidents et déchiffrables de son opposition, reconnaissables pour l'auteur, tels des pleurs, des demandes d'être laissée tranquille, le fait de se débattre, de refuser des tentatives d'amadouement ou d'essayer de fuir (ATF 148 IV 234 consid. 3.4. ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_780/2022 du 1er mai 2023, consid. 2.3. ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1317/2022 du 27 avril 2023, consid. 8.2.).  

2.1.6. Dans plusieurs arrêts rendus en matière d'agression sexuelle, le Tribunal fédéral a confirmé qu'il était raisonnable de se baser sur un faisceau d'indices convergents et que, dans les cas où aucun témoignage n'était à disposition, il fallait notamment examiner les versions opposées des parties et les éventuels indices venant les corroborer, cela sans préjudice du principe in dubio pro reo (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1088/2009 du 25 janvier 2010; 6B_307/2008 du 24 octobre 2008; 6P.91/2004 - 6S.255/2004 du 29 septembre 2004). Un ou plusieurs arguments corroboratifs peuvent demeurer fragiles si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_109/2014 du 25 septembre 2014 consid. 2.1 ; 6B_398/2013 du 11 juillet 2013 consid. 2.1 et 6B_642/2012 du 22 janvier 2013 consid. 1.1).

2.2.1. En l'espèce, les déclarations du prévenu et de la plaignante sont pour l'essentiel divergentes. Si elles concordent sur le fait qu'ils ont eu des relations sexuelles et fellations consenties, ils divergent en particulier sur l'existence d'une relation sexuelle non consentie et un épisode de fellation forcée, lors desquels la plaignante affirme que le prévenu a usé de menaces et de pressions psychologiques pour arriver à ses fins. Ces faits se sont déroulés à huis-clos et sans témoin.

Objectivement, il n'existe aucune trace matérielle des faits dénoncés par la plaignante. On est ainsi confrontés à la parole de l'un contre celle de l'autre, si bien qu'il convient d'apprécier la crédibilité de leurs déclarations au regard des autres éléments de la procédure, constitués en substance des témoignages, des messages, des attestations psychologiques et de l'expertise psychiatrique. Il convient aussi d'examiner les circonstances du dévoilement et l'éventuel bénéfice secondaire à la dénonciation.

2.2.2. Les déclarations de la plaignante sont constantes sur le déroulement des faits visés aux ch. 1.2.1. § 2 ss et 1.2.2. § 2 ss de l'acte d'accusation. La plaignante a été mesurée puisqu'elle n'a pas chargé le prévenu outre mesure, admettant qu'il n'avait pas usé de contrainte physique et déclarant ne pas se souvenir de la pression exercée par ses mains lors de l'épisode de la fellation forcée.

Il convient néanmoins de souligner que la mémoire des faits de A______ est très altérée, en particulier en lien avec les actes reprochés aux ch. 1.2.1. § 1 et 1.2.2. § 1 de l'acte d'accusation. Sa thérapeute a attribué cette situation à une amnésie dissociative et une volonté d'oublier ces faits, sans y parvenir s'agissant des évènements les plus graves. Le Tribunal ne conteste aucunement que tel puisse effectivement être le cas. Il constate toutefois que cette amnésie importante rend nettement plus difficile l'établissement de la chronologie et du déroulement précis des faits, ce qui est problématique non seulement du point de vue de la maxime d'accusation (cf. supra 1.1.1. ss) mais aussi pour l'appréciation des preuves. Moins le récit des faits est précis, plus le Tribunal devra déterminer s'il existe d'autres éléments objectifs permettant d'asseoir une culpabilité au-delà de tout doute insurmontable.

2.2.3. Le Tribunal constate que les déclarations de X______ ont également été claires et constantes tout au long de la procédure. Il a donné des explications détaillées et crédibles, notamment s'agissant de l'épisode qualifié de fellation forcée visé au ch. 1.2.2. § 2 ss de l'acte d'accusation. Il sied de relever que X______ a manifesté plus d'assurance et de clarté lors de ses explications relatives au complexe de fait concernant A______ que dans celles qu'il a pu fournir s'agissant des faits commis au détriment de P______.

2.2.4. S'agissant les différents témoignages recueillis, ils rapportent tous en substance les déclarations de la plaignante. En effet, il résulte des différents témoignages recueillis que la plaignante a relaté à ses proches, après sa rupture, les pressions psychologiques subies, les menaces proférées par X______ ainsi que des rapports sexuels ou des fellations forcés. Ce sont donc des témoignages indirects, qui résultent de discussions avec la plaignante postérieurement aux faits dénoncés. S'agissant de ces faits, les témoignages sont relativement vagues, se résumant à énoncer des fellations forcées et des rapports sexuels non consentis, sans donner plus de détails quant au déroulement des faits et à leur chronologie, à l'exception du témoignage de G______ qui relate sommairement un épisode de fellation forcée à Lausanne. Il est toutefois compréhensible que les récits d'une victime ne s'épanchent pas dans les détails, au vu des évènements traumatisants, et rapportent les faits dans les grandes lignes.

Quant à E______, elle n'a pas été entendue durant l'instruction. Ses propos ayant été rapportés par A______, elle ne constitue pas ainsi à proprement parler un « témoin à charge ».

2.2.5. S'agissant du contexte du dévoilement, il s'est fait progressivement. Il n'est pas rare que le processus de dévoilement s'étale sur plusieurs mois, voire années, de sorte que le dépôt de la main courante, le 17 janvier 2020, soit 9 mois après leur rupture, et le dépôt de la plainte pénale le 23 novembre 2020, s'inscrivent dans une évolution logique du comportement de la plaignante. En effet, quelques semaines après sa rupture, la plaignante avait commencé à avoir notamment des crises d'angoisses, des troubles alimentaires et des troubles du sommeil (C-86), suite à quoi elle s'était confiée pour la première fois à sa cousine qui lui avait conseillé d'écrire ce qu'elle avait sur le cœur (C-86 ; C-116 ; C-118 ; C-352). Sa cousine lui avait fait remarquer que le fait de menacer quelqu'un pour obtenir des faveurs sexuelles était considéré comme un viol (C-352). A______ avait pris ensuite la décision d'en parler à ses parents avant de prendre un rendez-vous avec l'Association AVVEC (C-87). Le processus de dévoilement tel que décrit par la plaignante ne présente pas de particularité qui permettrait de décrédibiliser sa démarche. Au contraire, les circonstances du dévoilement ne mettent pas en évidence la recherche d'un quelconque bénéfice secondaire ni d'idée de vengeance de la part de A______, ce qui constitue des indices en faveur de sa version.

2.2.6. La souffrance de la partie plaignante, attestée par les attestations psychologiques produites, constatée par ses proches et même visible tout au long de l'instruction ainsi qu'à l'audience de jugement, est indéniable (C-128 ; C-129 ; C-398 ; C-429). Ces symptômes sont compatibles avec sa version des faits, ce qui constitue un argument corroboratif, mais pas une preuve absolue. En d'autres termes, l'état de la plaignante après sa dénonciation des faits ne saurait à lui seul prouver la matérialité de faits antérieurs, sans autres indices convergents basés sur les éléments objectifs du dossier. Pour le reste, aucune pièce médicale du dossier ne fait état d'une emprise du prévenu sur la plaignante ou d'une dépendance de cette dernière par rapport à X______.

2.2.7. Le dossier ne comporte pas de témoignage direct des faits, ni de témoins auxquels les faits auraient été rapportés par la plaignante au moment où ils se déroulaient. Il ressort des déclarations de la partie plaignante que cette dernière situation est due à l'emprise psychologique qu'exerçait le prévenu sur elle ainsi qu'à l'isolement dans lequel il l'avait enfermée.

Pour apprécier l'emprise psychologique décrite par la plaignante, il convient de se référer au seul élément du dossier concomitant aux faits dénoncés, à savoir les très nombreux messages échangés entre les protagonistes. Ces messages permettent de suivre le couple dans leur quotidien de manière détaillée, étant rappelé que le couple menait une relation à distance. Cela signifie que ces messages reflètent tout particulièrement leur communication au sein de leur relation puisque le prévenu n'appréciait pas le fait de discuter au téléphone (PV de l'audience de jugement, p. 14).

Il s'avère que la lecture des très nombreux messages échangés entre les protagonistes n'a mis en évidence aucun élément permettant de corroborer la version de la partie plaignante. On ne retrouve ainsi aucune allusion directe ou indirecte, de part ou d'autre, à des rapports sexuels non consentis ou qui auraient été mal vécus, ni à des fellations forcées. On ne retrouve pas de message véhiculant de la violence psychologique, que cela soit sous la forme d'insulte, de dénigrement ou de menace. On ne retrouve pas non plus de trace d'un quelconque chantage sexuel. Aucun message ne permet de laisser penser que le prévenu exerçait un contrôle permanent sur la plaignante.

A l'inverse, dans leur correspondance datant du mois de février 2019 au mois de mai 2019, on retrouve des discussions sur des sujets divers et variés, notamment sur des chansons (C-214 ; Messages "Messenger", p. 290), les études (C-309 ; C-280 ; C-230), des projets de voyage (C-302), la mode (Messages "Messenger", p. 251 ss) ainsi que la vie quotidienne en général (C-269 ; C-261 ; C-170). On retrouve également des mots tendres de la part du prévenu tels que « dear » (C-296) ; « i think of u all the time xx » (C-289), « love u too dear » (C-228), « miss u to dear x » (C-192), « dear i love u the way u are ;) » (C-176), « thinking of you dear J (…) and thinking about you makes my day better xx» (Messages "Messenger", p. 237), « dear youre a sweetheart xx » (Messages "Messenger", p. 228) ainsi que de la part de la plaignante tels que « miss you already » (C-296), « mon amour » (C-287), « love you dear » (C-268), « you are the best » (C-268) et « juste un petit mot pour te dire que j'ai de la chance de t'avoir J » (Messages "Messenger", p. 133).

Le prévenu lui envoyait des mots d'encouragement, notamment en vue de ses examens, comme « proud of u » (C-263), « but now youre experienced J stay motivated and use your new experience and maturity, youre going to roll like a tank » (C-263) ; «Youll do fine dear ;) youve made the right conclusions » (Messages "Messenger", p. 86). La plaignante l'encourageait également avec des messages comme « X______, I'm very proud of you and of all the things you did » (C-230) ; « you are an incredible person dear juste believe in you J » (C-194).

A noter que certains messages de la plaignante laissent transparaître son sentiment d'insécurité en milieu urbain tel que « Yes I'll Put your spray in my poche Marcher vite clefs dans l'autre Vérifier s'il y a personne derrière moi Et m'asseoir vers le conducteur dans le tram » (C-287) ou « C'est plus possible de sentiment que j'ai "d'insécurité" (…) il y a eu un mec bourré dans le tram il n'a rien fait mais il était vraiment à cracher partout et toutes les filles étaient pas bien Et je me suis rendue compte que j'étais vraiment flippé Et j'en ai mars d'avoir constamment ce sentiment C'est pas possible Personne ne peut vivre comme ça » (Messages "Messenger", p. 144 et 143), mais également ses insécurités dans sa relation de couple comme lorsqu'elle envoie plusieurs messages d'affilée au prévenu en s'inquiétant que ce dernier ne réponde pas immédiatement alors qu'il est simplement occupé (C-185 ; C-184 ; C-173 ; Messages "Messenger", p. 236, 235, 104, 103, 61 et 60) ou ceux exprimant sa jalousie (C-255 ; Messages "Messenger", p. 210). A cela s'ajoute les messages exprimant son stress face à ses études (C-286 ; Messages "Messenger", p. 218, 80, 71 et 43). Face à tous ces messages, le prévenu tente de la rassurer (Messages "Messenger", p. 79, 70 et 65). Il est donc difficile de concilier le contenu matériel de ces messages avec le climat de peur décrit par la plaignante.

Par ailleurs, on retrouve également vers la fin du mois de février 2019, soit de manière contemporaine au fait de viol dénoncé par la plaignante, des messages à caractère sexuel à l'initiative de celle-ci (C-165) comme « tu n'auras pas de gâterie tant que ton dossier ne sera pas terminé ! » (C-182) ou « rejoins moi en haut avec ta grosse bite ;) » (C-178). Les messages échangés pendant le mois de février ne vont pas dans le sens du récit de la plaignante. En effet, cette dernière n'y évoque jamais de près ou de loin un besoin d'explication sur un viol, sur de la violence, ou un autre reproche plus général quant au déroulement des faits. Au contraire, elle lui adresse des mots d'amour explicites et échange sur le quotidien.

S'il est vrai que vers la fin de la relation A______ s'est plaint à quelques reprises de la manière dont le prévenu lui avait parlé (Messages "Messenger", p. 23, 15, 14, 13 et 10), et que les messages laissent entrevoir des disputes (Messages "Messenger", p. 16, 13, 11 et 5), ils ne sont pas indicatifs d'une emprise de l'un sur l'autre ou d'une soumission de l'une à l'autre. Ces derniers échanges démontrent d'ailleurs que A______ était tout à fait capable de tenir tête au prévenu puisqu'elle lui a fait part de sa mésentente sur sa manière de lui parler.

2.2.8. Au vu de ce qui précède, les messages entre A______ et X______ ne permettent pas de confirmer la version de la plaignante quant aux faits qu'elle dénonce et à l'emprise qu'elle décrit. En d'autres termes, le Tribunal n'a pas été en mesure de concilier les éléments du dossier en sa possession avec l'état de souffrance manifeste de la plaignante. En effet, leur correspondance révèle une relation de couple ordinaire, dans laquelle X______ adopte un comportement soutenant vis-à-vis des insécurités ressenties par A______. Il l'encourage dans ses études, la rassure lorsqu'elle exprime ses peurs et partage ses opinions sur la mode sans lui imposer une manière de se vêtir. Aucun message ne permet d'établir que le prévenu aurait usé de violence psychique à l'encontre de A______. Dans la mesure où ces messages sont un réel indicateur de leur relation, le Tribunal constate que ceux-ci viennent corroborer les déclarations cohérentes et constantes de X______.

Cela ne signifie pas que le récit de la plaignante soit mensonger ou que les faits décrits aux ch. 1.2.1. § 2 ss et 1.2.2. § 2 ss n'ont pas eu lieu. Cependant, la possibilité qu'un fait se soit déroulé comme décrit par l'accusation, de même qu'à un degré supérieur la vraisemblance prépondérante ou la forte probabilité sont insuffisantes en droit pénal. L'absence de doute insurmontable basée sur des preuves, à tout le moins sous la forme d'un faisceau d'indices convergents, est exigée. Or, en l'espèce, le Tribunal n'a pas été en mesure sur la base des éléments objectifs en sa possession d'écarter ce doute et de se forger une intime conviction de culpabilité. Il en va de même pour les faits décrits sous les ch. 1.2.1. § 1 et 1.2.2. § 1 de l'acte d'accusation, pour lesquels il n'est pas établi que A______ se soit trouvé dans un cas de violence structurelle, où elle aurait été sous l'emprise psychologique de X______. Le Tribunal retient ainsi qu'il n'est pas établi que A______ se soit trouvée dans une situation de pression psychologique d'une intensité comparable à l'usage de la violence ou de la menace qui rendrait une éventuelle soumission compréhensible et diminuerait considérablement sa liberté de décision. Il n'est également pas établi que X______ ait proféré des menaces envers A______ ou ses proches.

2.2.9. Il faut encore se demander si le verdict de culpabilité s'agissant du cas de P______ ne constitue pas en lui-même un indice de culpabilité s'agissant de celui de A______. Il convient cependant de répondre à cette interrogation par la négative. En effet, il sied de se référer à l'expertise psychiatrique (C-10'027 ss), concluant que le prévenu « ne souffre d'aucun trouble sexuel, d'aucun trouble psychiatrique ni addictologique, qu'il n'a aucun antécédent judiciaire, qu'il est correctement inséré sur le plan socio-professionnel » (C-10'042). Les psychiatres en charge de l'expertise n'ont diagnostiqué aucune perversion sexuelle ni aucun trouble de la personnalité de type antisocial ou sadique qui conduirait le prévenu à s'en prendre de façon répétée à des jeunes filles en situation d'infériorité. En l'absence de toute conclusion allant dans ce sens, le Tribunal ne saurait extrapoler de la condamnation du prévenu pour les faits visés sous le ch. 1.1. de l'acte d'accusation, lesquels représentent un événement isolé, une culpabilité pour le complexe de faits relatif à A______.

2.2.10. En conclusion, au vu de toutes les constatations qui précèdent, soit la position antagoniste des parties à la procédure, l'absence d'éléments matériels, les témoignages indirects et postérieurs aux faits, les conclusions de l'expertise psychiatrique et les messages échangés entre les parties concomitamment aux faits, le Tribunal n'a pas été en mesure de se forger une intime conviction de culpabilité au-delà de tout doute insurmontable.

Le doute devant profiter à l'accusé, le prévenu sera dès lors acquitté des faits décrits sous ch. 1.2 de l'acte d'accusation.

Conclusions civiles, frais et indemnités

3.1. La partie plaignante peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure pénale (art. 122 al. 1 CPP), l'autorité judiciaire saisie de la cause pénale jugeant les conclusions civiles indépendamment de leur valeur litigieuse (art. 124 al. 1 CPP).

En vertu de l'art. 126 al. 1 let. a CPP, le tribunal statue sur les prétentions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu.

3.2. En l'espèce, la plaignante sera déboutée de ses conclusions civiles vu l'acquittement prononcé.

4. Vu le verdict de condamnation partielle, le prévenu sera condamné à payer la moitié des frais de la procédure (art. 426 CPP).

5. Le conseil juridique gratuit sera indemnisé (art. 135 CPP et art. 138 CPP).

 

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL

statuant contradictoirement :

Acquitte X______ des faits décrits sous chiffre 1.2 de l'acte d'accusation.

Déclare X______ coupable d'actes d'ordre sexuel commis sur une personne incapable de discernement ou de résistance (art. 191 CP) et d'inceste (art. 213 al. 1 CP).

Condamne X______ à une peine privative de liberté de 2 ans, sous déduction de 2 jours de détention avant jugement et de 178 jours à titre d'imputation des mesures de substitution (art. 40 CP).

Met X______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à 3 ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit X______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Déboute A______ de ses conclusions civiles.

Ordonne la restitution à X______ du téléphone figurant sous chiffre 1 de l'inventaire no 26665020200312 du 12 mars 2020 (art. 267 al. 1 et 3 CPP).

Condamne X______ à la moitié des frais de la procédure qui s'élèvent au total à CHF 13'103.50, y compris un émolument de jugement de CHF 1'500.- et laisse le solde des frais de la procédure à la charge de l'Etat (art. 426 al. 1 CPP).

Fixe à CHF 17'033.75 l'indemnité de procédure due à Me B______, conseil juridique gratuit de A______ (art. 138 CPP).

Ordonne la communication du présent jugement aux autorités suivantes : Casier judiciaire suisse, Service des contraventions (art. 81 al. 4 let. f CPP).

Informe les parties que, dans l'hypothèse où elles forment un recours à l'encontre du présent jugement ou en demandent la motivation écrite dans les dix jours qui suivent la notification du dispositif (art. 82 al. 2 CPP), l'émolument de jugement fixé sera en principe triplé, conformément à l'art. 10 al. 2 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale (RTFMP; E 4.10.03).

 

La Greffière

Séverine CLAUDET

Le Président

Antoine HAMDAN

 

 

Voies de recours

Les parties peuvent annoncer un appel contre le présent jugement, oralement pour mention au procès-verbal, ou par écrit au Tribunal pénal, rue des Chaudronniers 9, case postale 3715, CH-1211 Genève 3, dans le délai de 10 jours à compter de la communication du dispositif écrit du jugement (art. 398, 399 al. 1 et 384 let. a CPP).

Selon l'art. 399 al. 3 et 4 CPP, la partie qui annonce un appel adresse une déclaration écrite respectant les conditions légales à la Chambre pénale d'appel et de révision, Place du Bourg-de-Four 1, case postale 3108, CH-1211 Genève 3, dans les 20 jours à compter de la notification du jugement motivé.

Le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit peut également contester son indemnisation en usant du moyen de droit permettant d'attaquer la décision finale (art. 135 al. 3 et 138 al. 1 CPP).

L'appel ou le recours doit être remis au plus tard le dernier jour du délai à la juridiction compétente, à la Poste suisse, à une représentation consulaire ou diplomatique suisse ou, s'agissant de personnes détenues, à la direction de l'établissement carcéral (art. 91 al. 2 CPP).

 

 

 

Etat de frais

Frais du Ministère public

CHF

11377.50

Convocations devant le Tribunal

CHF

120.00

Frais postaux (convocation)

CHF

56.00

Emolument de jugement

CHF

1500.00

Etat de frais

CHF

50.00

Total

CHF

13103.50

==========

 

Indemnisation du conseil juridique gratuit

Bénéficiaire :  

A______

Avocate :  

B______

Etat de frais reçu le :  

7 février 2024

 

Indemnité :

Fr.

13'300.00

Forfait 10 % :

Fr.

1'330.00

Déplacements :

Fr.

1'165.00

Sous-total :

Fr.

15'795.00

TVA :

Fr.

1'238.75

Débours :

Fr.

Total :

Fr.

17'033.75

Observations :

- 37h15 admises* à Fr. 200.00/h = Fr. 7'450.–.
- 6h40 à Fr. 110.00/h = Fr. 733.35.
- 16h15 à Fr. 200.00/h = Fr. 3'250.–.
- 9h20 Audience jugement + verdict à Fr. 200.00/h = Fr. 1'866.65.

- Total : Fr. 13'300.– + forfait courriers/téléphones arrêté à 10 % vu l'importance de l'activité déployée (art 16 al 2 RAJ) = Fr. 14'630.–

- 3 déplacements A/R (admis*) à Fr. 55.– = Fr. 165.–
- 10 déplacements A/R à Fr. 100.– = Fr. 1'000.–

- TVA 7.7 % Fr. 782.85

- TVA 8.1 % Fr. 455.90

* En application de l'art. 16 al. 2 RAJ réduction de :
- 1h30 pour entretien du 16 janvier 2020 trop antérieur à l'octroi.
- 1 vacation stagiaire pour aller chercher le dossier, cette activité n'étant pas prise en charge par l'AJ

NB nous vous informons que nous ne pouvons taxer que par tranches de 5 min, en conséquence le temps consacré aux audiences a été arrondi.

 

Restitution de valeurs patrimoniales et/ou d'objets

Lorsque le présent jugement sera devenu définitif et exécutoire, il appartiendra à l'ayant-droit de s'adresser aux Services financiers du pouvoir judiciaire (finances.palais@justice.ge.ch et +41 22 327 63 20) afin d'obtenir la restitution de valeurs patrimoniales ou le paiement de l'indemnité allouée, ainsi que, sur rendez-vous, au Greffe des pièces à conviction (gpc@justice.ge.ch et +41 22 327 60 75) pour la restitution d'objets.