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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2834/2024

JTAPI/879/2024 du 06.09.2024 ( MC ) , CONFIRME PARTIELLEMENT

ADMIS par ATA/1120/2024

Descripteurs : DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION
Normes : LEI.76.al1.letb.ch1; LEI.75.al1.letb; LEI.75.al1.letc; LEI.75.al1.letf; LEI.75.al1.letg; LEI.75.al1.leth; LEI.76.al1.letb.ch3; LEI.76.al1.letb.ch4
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2834/2024 MC

JTAPI/879/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 6 septembre 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Joanna BÜRGISSER, avocate

 

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

 


 

EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1998, originaire de Tunisie, titulaire d'un passeport valable et d'un titre de séjour français arrivé à échéance le 20 février 2024, est défavorablement connu de la justice suisse.

2.             M. A______ compte quatre condamnations et deux procédures en cours pour, notamment, vol, recel, dommages à la propriété conformément aux art. 139 ch. 1, 160 et 144 al.1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0) et pour des infractions à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121) ainsi que pour des infractions à la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), en particulier pour violation d'une interdiction d'entrée en Suisse et non-respect d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée au sens des art. 115 al. 1 let. a et 119 LEI.

3.             M. A______ compte aussi une procédure en cours pour infraction à l'art. 90 al. 3 de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01).

4.             M. A______ a fait l'objet d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée valable du 19 mai 2022 au 18 mai 2023, décision du commissaire de police que M. A______ n'a pas respectée.

5.             M. A______ a à nouveau fait l'objet d'une interdiction d'entrée en Suisse valable jusqu'au 25 novembre 2024, décision du secrétariat d'État aux migrations (ci‑après : SEM) du 26 novembre 2021 qu'il n'a pas respectée.

6.             Le 26 mars 2024, M. A______ a été écroué à la prison de Champ-Dollon.

7.             Par ordonnance du 23 juillet 2024, le Tribunal d'application des peines et des mesures a ordonné la libération conditionnelle de M. A______ avec effet au jour de son renvoi effectif de Suisse, mais au plus tôt le 24 juillet 2024.

8.             Le 24 juillet 2024, une demande de réadmission a été introduite auprès des autorités françaises, laquelle a été refusée.

9.             Le 2 août 2024, une nouvelle demande de réadmission a été envoyée aux autorités françaises se heurtant à un nouveau refus.

10.         Le 7 août 2024, l'office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) a demandé à la Brigade Migrations et Retour de s'assurer que M. A______ ne faisait pas l'objet d'une demande d'extradition des autorités françaises sur demande de ce dernier.

11.         Par courrier du 10 août 2024, M. A______ a demandé à l'OCPM qu'un délai de
24 heures lui soit accordé à la fin de sa détention pénale afin qu'il se rende par ses propres moyens en France.

12.         Le 13 août 2024, l'OCPM a reçu la confirmation qu'aucune demande d'extradition n'avait été initiée par les autorités françaises concernant M. A______.

13.         Par décision exécutoire nonobstant recours du 15 août 2024, l'OCPM a prononcé le renvoi de Suisse ainsi que du territoire des états membres de l'Union européenne et des états associés à Schengen.

14.         Le 20 août 2024, M. A______ a formé un recours contre cette décision devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal).

15. Le 22 août 2024, M. A______ a déposé une demande d'asile devant le Secrétariat d’Etat aux migrations (« SEM »).

16.         Le 26 août 2024, l’OCPM s’est déterminé quant à ce recours en concluant à son rejet (procédure portant le no A/2695/2024 1). La procédure devant le tribunal est toujours en cours.

17.         Le 29 août 2024, à la suite du paiement d'amendes par M. A______, un nouvel ordre d'exécution a été établi par le service de l'application des peines et mesures prévoyant une fin de peine au 3 septembre 2024 en lieu et place du 25 septembre 2024.

18.         Le 3 septembre 2024, à 17h15, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de quatre mois.

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi en Tunisie, sans donner de motif et qu’il était en bonne santé. Il ne désirait aviser aucune personne domiciliée en Suisse de sa situation et ne souhaitait pas aviser le consulat.

19.         Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au le tribunal le même jour.

20.         Le 4 septembre 2024, l’OCPM a saisi le passeport tunisien de M. A______.

21.         Le 4 septembre 2024 également, le Centre de Coopération Policière et Douanière CCPD de Genève a informé le commissaire de police que la Préfecture de l’B______ (France) a clôturé le dossier de renouvellement du titre de séjour de M. A______, suite à des violences conjugales. Selon ce courriel du 4 septembre 2024, il est précisé que dans l'absolu, il y aura de nouveau un refus en cas de demande de réadmission.

 

22.         Entendu ce jour par le tribunal, M. A______ a déclaré qu'il confirmait être de nationalité tunisienne et que son titre de séjour français était arrivé à échéance le 20 février 2024. Il n'était pas d'accord de rentrer en Tunisie et s'opposait à sa mise en détention administrative pour une durée de quatre mois. En ce qui concernait la procédure pour infraction à la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01), il sera convoqué au Tribunal de police le 9 décembre 2024.

La représentante du commissaire de police a déclaré maintenir la requête de détention administrative pour les motifs indiqués dans l'ordre de mise en détention du 3 septembre 2024.

M. A______ a admis être un consommateur de crack.

Selon la représentante du commissaire de police, M. A______ aurait été condamné pour non-respect d'une assignation à résidence et interdiction de pénétrer dans une région déterminée (art. 119 LEI).

M. A______ a déclaré avoir fait appel contre cette condamnation.

La représentante du commissaire de police a déclaré ne pas avoir dans le dossier toute ordonnance pénale frappée d'opposition.

Le conseil de M. A______ a indiqué que la deuxième demande de renouvellement de son titre de séjour avait été effectuée le 2 août 2024.

La représentante du commissaire de police a déclaré que M. A______ était sous le statut de renvoi vers son pays d'origine. Une décision de renvoi du 15 août 2024 avait été notifiée à M. A______. La troisième requête pour sa réadmission en France avait été déposée le 4 septembre 2024. Cette requête a été refusée.

M. A______ a déclaré qu'il venait de recevoir une correspondance du Centre de Coopération Policière et Douanière de Genève du 4 septembre 2024 concernant la question du renouvellement de son titre de séjour. Il s'agissait de deux pièces, soit de deux courriels.

Le conseil de M. A______, en ce qui concernait la première pièce, soit le courriel du 4 septembre 2024 à 16h19, a précisé la teneur suivante du courriel : "donc dans l'absolu, ce sera de nouveau un refus en cas de demande de réadmission". Il a remis au tribunal un chargé de dix pièces.

Sur question de la représentante du commissaire de police, le conseil de M. A______ a précisé que les pièces 6 à 9 étaient nouvelles.

M. A______ a déclaré vouloir se rendre à la police française car son titre de séjour avait été bloqué car il manquait un papier, un jugement familial concernant son enfant.

La représentante du commissaire de police a indiqué être d'accord d'effectuer une quatrième requête, voire de compléter la troisième, avec l'avis d'amende.

M. A______ a précisé que selon lui, sa femme, Madame C______, avait retiré la plainte pénale à son encontre pour violences conjugales.

La représentante du commissaire de police a plaidé et conclu à la confirmation de l'ordre de mise en détention administrative pour une durée de quatre mois.

Le conseil de M. A______ a plaidé et conclu à la libération immédiate de son client et sans délai, subsidiairement, à la réduction à une semaine de la durée de sa détention administrative. Il a précisé que son client entendait retirer sa requête d'asile déposée auprès du SEM.

M. A______ a confirmé qu'il entendait rentrer en France et qu'il ne reviendrait pas en Suisse.

EN DROIT

1.            Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour examiner d'office la légalité et l’adéquation de la détention administrative en vue de renvoi ou d’expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. d de loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

Il doit y procéder dans les nonante-six heures qui suivent l'ordre de mise en détention (art. 80 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20 ; anciennement dénommée loi fédérale sur les étrangers - LEtr ; 9 al. 3 LaLEtr).

2.             En l'espèce, le tribunal a été valablement saisi et respecte le délai précité en statuant ce jour, la détention administrative ayant débuté le 3 septembre 2024 à 15h00 (cf. à cet égard arrêts du Tribunal fédéral 2C_618/2011 du 1er septembre 2011 consid. 2 ; 2C_206/2009 du 29 avril 2009 consid. 5.1.1 et les références citées).

3.             Le tribunal peut confirmer, réformer ou annuler la décision du commissaire de police; le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l’étranger (art. 9 al. 3 LaLEtr).

4.             La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l’art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; 135 II 105 consid. 2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_237/2013 du 27 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_413/2012 du 22 mai 2012 consid. 3.1) et de l’art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu’elle repose sur une base légale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_584/2012 du 29 juin 2012 consid. 5.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1). Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne peut être prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 du 10 avril 2013 consid. 4.1 ; 2C_237/2013 du 27 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1).

5.             À teneur de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI (cum art. 75 al. 1 let. c LEI), après notification d'une décision de première instance de renvoi ou d'une décision de première instance d'expulsion au sens des art. 66a ou 66abis du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), l'autorité compétente peut, afin d'en assurer l'exécution, mettre en détention la personne concernée notamment si elle a franchi la frontière malgré une interdiction d’entrer en Suisse et n'a pu être renvoyée immédiatement. Il découle de la jurisprudence qu'une décision d'expulsion pénale au sens des art. 66a ou 66abis CP vaut comme interdiction d'entrée pour la durée prononcée par le juge pénal (ATA/615/2022 du 9 juin 2022 consid. 2a ; ATA/730/2021 du 8 juillet 2021 consid. 4 ; ATA/179/2018 du 27 février 2018 consid. 4).

6.             Une mise en détention administrative peut également être ordonnée si la personne a été condamnée pour crime (art. 75 al. 1 let. h LEI), par quoi il faut entendre une infraction passible d'une peine privative de liberté de plus de trois ans (cf. art. 10 al. 2 CP ; ATA/220/2018 du 8 mars 2018 consid. 4a ; ATA/997/2016 du 23 novembre 2016 consid. 4a ; ATA/295/2011 du 12 mai 2011 consid. 4) ou si elle menace sérieusement d’autres personnes ou met gravement en danger leur vie ou leur intégrité corporelle et fait l’objet d’une poursuite pénale ou a été condamnée pour ce motif (art. 75 al. 1 let. g LEI).

7.             Une mise en détention administrative est aussi envisageable si des éléments concrets font craindre que la personne entend se soustraire au renvoi ou à l'expulsion, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer en vertu de l'art. 90 LEI (art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI), ou encore si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (art. 76 al. 1 let. b ch. 4 LEI).

Ces deux dispositions décrivent toutes deux des comportements permettant de conclure à l'existence d'un risque de fuite ou de disparition, de sorte que les deux éléments doivent être envisagés ensemble (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1 ; ATA/740/2015 du 16 juillet 2015 ; ATA/943/2014 du 28 novembre 2014 ; ATA/616/2014 du 7 août 2014).

Selon la jurisprudence, un risque de fuite - c'est-à-dire la réalisation de l'un des deux motifs précités - existe notamment lorsque l'étranger a déjà disparu une première fois dans la clandestinité, qu'il tente d'entraver les démarches en vue de l'exécution du renvoi en donnant des indications manifestement inexactes ou contradictoires ou encore s'il laisse clairement apparaître, par ses déclarations ou son comportement, qu'il n'est pas disposé à retourner dans son pays d'origine. Comme le prévoit expressément l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEtr, il faut qu'il existe des éléments concrets en ce sens (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.2 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.2 ; 2C_658/2014 du 7 août 2014 consid. 1.2).

Lorsqu'il existe un risque de fuite, le juge de la détention administrative doit établir un pronostic en déterminant s'il existe des garanties que l'étranger prêtera son concours à l'exécution du refoulement, soit qu'il se conformera aux instructions de l'autorité et regagnera son pays d'origine le moment venu, c'est-à-dire lorsque les conditions seront réunies; dans ce cadre, il dispose d'une certaine marge d'appréciation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 3.3 ; 2C_806/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 2C_400/2009 du 16 juillet 2009 consid. 3.1 ; ATA/740/2015 du 16 juillet 2015 ; ATA/739/2015 du 16 juillet 2015 ; ATA/682/2015 du 25 juin 2015 ; ATA/261/2013 du 25 avril 2013 ; ATA/40/2011 du 25 janvier 2011).

8.             L’art. 76, al. 1, let. b, ch. 1, LEI, renvoyant à l’art. 75, al. 1, let. b, LEI précise qu’une mesure de détention administrative peut être ordonnée si une décision de renvoi ou d’expulsion a été notifiée à l’intéressé et que celui-ci quitte la région qui lui est assignée ou pénètre dans une zone qui lui est interdite en vertu de l'art. 74 al. 1 let. b LEI.

L’art. 76, al. 1, let. b, ch. 1, LEI, renvoyant à l’article 75, al. 1, let. c LEI, dispose qu’une mesure de détention administrative peut être ordonnée si l'intéressé franchit la frontière malgré une interdiction d'entrée en Suisse.

Selon l’art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, en lien avec l’article 75 al. 1 let. f LEI, après notification d’une décision de première instance de renvoi, l’autorité compétente peut, afin d’en assurer l’exécution, mettre en détention administrative la personne concernée lorsqu'elle séjourne illégalement en Suisse et dépose une demande d’asile dans le but manifeste d’empêcher l’exécution d’un renvoi ou d’une expulsion; tel peut être le cas notamment lorsque le dépôt de la demande d’asile aurait été possible et raisonnablement exigible auparavant et que la demande est déposée en relation chronologique étroite avec une mesure de détention, une procédure pénale, l’exécution d’une peine ou la promulgation d’une décision de renvoi.

9.             Le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 36 Cst., se compose des règles d'aptitude - qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé -, de nécessité - qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés - et de proportionnalité au sens étroit - qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de la personne concernée et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/752/2012 du 1er novembre 2012 consid. 7).

Il convient dès lors d'examiner, en fonction des circonstances concrètes, si la détention en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi au sens de l'art. 5 par. 1 let. f CEDH est adaptée et nécessaire (ATF 135 II 105 consid. 2.2.1 ; 134 I 92 consid. 2.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_26/2013 du 29 janvier 2013 consid. 3.1 ; 2C_420/2011 du 9 juin 2011 consid. 4.1 ; 2C_974/2010 du 11 janvier 2011 consid. 3.1 ; 2C_756/2009 du 15 décembre 2009 consid. 2.1).

10.         Selon le texte de l'art. 76 al. 1 LEI, l'autorité « peut » prononcer la détention administrative lorsque les conditions légales sont réunies. L'utilisation de la forme potestative signifie qu'elle n'en a pas l'obligation et que, dans la marge d'appréciation dont elle dispose dans l'application de la loi, elle se doit d'examiner la proportionnalité de la mesure qu'elle envisage de prendre.

11.         Si l'étranger a la possibilité de se rendre légalement dans plusieurs États, l'autorité compétente peut le renvoyer ou l'expulser dans le pays de son choix (art. 69 al. 2 LEI). La possibilité de choisir le pays de destination présuppose toutefois que l'étranger a la possibilité de se rendre de manière effective et admissible dans chacun des pays concernés par son choix. Cela implique qu'il se trouve en possession des titres de voyage nécessaires et que le transport soit garanti.

12.         Le renvoi ou l'expulsion dans un pays tiers du choix de l'étranger constitue par ailleurs seulement une faculté (« peut ») de l'autorité compétente (arrêt du Tribunal fédéral 2C_285/2013 du 23 avril 2013 consid. 7 ; cf. également arrêts 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 6 ; 2C_393/2009 du 6 juillet 2009 consid. 3.4).

13. En l'espèce, M. A______ fait l'objet d'une décision de renvoi exécutoire de Suisse prononcée par l'OCPM le 15 août 2024.

M. A______ a été condamné pour des infractions à l'art 139 ch. 1 CP (vol) et 160 CP (recel), soit des crimes selon l'art. 10 al. 2 CP.

M. A______ n'a pas respecté la décision du Commissaire de police lui faisant interdiction de pénétrer sur le territoire genevois du 19 mai 2022 et celle du SEM du 26 novembre 2021 lui interdisant l'entrée en Suisse jusqu’au 25 novembre 2024, démontrant son mépris pour les injonctions données par les autorités. Son comportement laisse clairement apparaître qu'il n'est pas disposé à retourner dans son pays d'origine et qu'il refuse d'obtempérer aux instructions des autorités.

M. A______ a admis être un consommateur de crack.

 

A______ compte aussi une procédure en cours pour non-respect d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée conformément à l'art. 119 al. 1 LEI.

M. A______ a franchi la frontière à plusieurs reprises malgré l'interdiction d'entrée en Suisse dont il fait l'objet et a été condamné pour ce motif.

Enfin, M. A______ a déposé une demande d'asile le 22 août 2024, quelques jours après la notification de la décision de renvoi de l'OCPM, alors qu'il avait tout le loisir de le faire avant, lors de sa détention pénale. Ainsi, on peut en conclure que cette demande n'a d'autre but que d'éviter l'exécution du renvoi en direction de son pays d'origine.

Au vu de ce qui précède, les conditions de la mise en détention administrative de M. A______ selon l’article 76, al. 1, let. b, ch. 1, LEI, renvoyant à l’article 75, al. 1, let. b, c, f, g et h LEI, ainsi que selon l'art 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI sont réalisées.

14.         Quant au principe de proportionnalité, la mesure de détention est évidemment adéquate pour permettre la bonne exécution de son renvoi de Suisse et elle est également nécessaire dès lors qu'aucune autre mesure moins incisive, telle une assignation a un lieu de résidence fondée sur l'article 74 LEI, ne peut garantir sa disponibilité à l'endroit des autorités chargées de la mise en œuvre de son renvoi de Suisse le jour et heure précis de la réalisation de son refoulement. M. A______ a déclaré lui-même que s'il devait être remis en liberté, il se rendrait en France, pays dont les autorités ont refusé sa venue.

Pour ce qui est de la proportionnalité au sens étroit, la situation de l'intéressé, criminel récidiviste, ne se pliant pas aux injonctions des autorités, établit que l'intérêt public à sa mise en détention administrative aux fins de mettre en œuvre son renvoi de Suisse prime son intérêt personnel à ne pas être momentanément privé de sa liberté.

15.         Les démarches nécessaires à l’exécution du renvoi doivent être entreprises sans tarder (art. 76 al. 4 LEI). Il s’agit, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, d’une condition à laquelle la détention est subordonnée (arrêt 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; cf. aussi ATA/315/2010 du 6 mai 2010 ; ATA/88/2010 du 9 février 2010 ; ATA/644/2009 du 8 décembre 2009 et les références citées).

16.         Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention en vue du renvoi ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l’accord de l’autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus, lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l’autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l’obtention des documents nécessaires au départ auprès d’un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI).

En outre, la durée de la détention administrative doit respecter le principe de la proportionnalité (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/752/2012 du 1er novembre 2012 consid. 7).

17.         En l’espèce, les autorités ont agi avec célérité, puisqu’elles ont fait deux demandes de réadmissions infructueuses aux autorités françaises et elles réserveront un vol en direction de la Tunisie, une fois droit connu sur la demande d'asile de l'intéressé.

18.         S'agissant de la durée de la détention, celle-ci prend en considération le temps nécessaire pour l'examen de la demande d'asile par le SEM et pour permettre le refoulement de l'intéressé au moyen tout d'abord d'un vol sans escorte policière. Si l'intéressé devait refuser d'embarquer sur le premier vol possible, l'autorité devrait bénéficier du temps nécessaire à l'organisation d'un vol avec escorte. A cet égard, il sera rappelé qu'à teneur de la jurisprudence du Tribunal fédéral, le principe de proportionnalité interdit que la durée de la mesure soit insuffisante pour atteindre son objectif, soit en l'espèce l'exécution du renvoi. (ATF 2C_497/2017 du 5 mars 2018, consid. 4.2.2, in fine, ATF 2C_431/2017 du 5 mars 2018, consid. 4.3.3, in fine, et CACJ ATA/787/2018).

19.        Au vu de ce qui précède, il y a lieu de confirmer l'ordre de mise en détention administrative de M. A______, mais pour une durée de deux mois. En effet, M. A______ pourra, le cas échéant, redéposer une requête de réadmission en France. En l'état, son renvoi en Tunisie paraît justifié. Le tribunal précise que le courriel du Centre de Coopération Policière et Douanière du 4 septembre 2024 est convaincant en ce qui concerne un refus en cas de demande de réadmission en France. En tout état, le droit d'être entendu de M. A______ est respecté à ce jour. M. A______ ayant pu s'exprimer précédemment devant le commissaire de police et largement lors de l'audience du 6 septembre 2024 devant le tribunal.

20.         Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au SEM.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             confirme l’ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police le 3 septembre 2024 à 17h15 à l’encontre de Monsieur A______, mais pour une durée de deux mois, soit jusqu'au 2 novembre 2024 inclus ;

2.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président suppléant

André MALEK-ASGHAR

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, au commissaire de police et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le 6 septembre 2024

 

Le greffier