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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1325/2022

JTAPI/34/2023 du 13.01.2023 ( LCI ) , REJETE

REJETE par ATA/730/2023

Descripteurs : PERMIS DE CONSTRUIRE;PRÉJUDICE SÉRIEUX;ZONE AGRICOLE
Normes : LCI.3A; LAT.16a; LCI.14; LEaux.43.al1; LEaux-GE.30.al1.letd
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1325/2022 LCI

JTAPI/34/2023

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 12 janvier 2023

 

dans la cause

 

Madame et Monsieur A______ et B______, représentés par Me Laurent HIRSCH, avocat, avec élection de domicile

contre

C______ et Messieurs D______, E______ et F______, représentés par Me Mattia DEBERTI, avocat, avec élection de domicile

DÉPARTEMENT DU TERRITOIRE

 


EN FAIT

1.             Messieurs D______, E______ et F______ sont copropriétaires de la parcelle n° 1______, feuille 2______, de la commune de G______ (ci-après : la commune), à l'adresse chemin H______ 3______.

Sur cette parcelle, située en zone agricole spéciale, des bureaux d'une superficie totale de 4______ m2 et un dépôt d'une superficie totale de 5______ m2 sont cadastrés.

2.             Ils exploitent, par l'intermédiaire de la société C______, dont ils sont administrateurs, 6______ hectares en cultures maraîchères, sur différents terrains dont ils sont propriétaires, et disposent à ce titre d'un centre d'exploitation sur la parcelle précitée.

3.             Madame et Monsieur A______ et B______ sont copropriétaires de la parcelle n° 7______ de la même commune, à l'adresse chemin H______ 8______, sur laquelle est édifiée une maison familiale qu'ils occupent.

4.             Les parcelles précitées sont situées à l'opposé l'une de l'autre du carrefour des chemins H______ et I______.

5.             Le 23 avril 2021, C______, par l'intermédiaire de son administrateur président, M. D______, a déposé auprès du département du territoire (ci-après : DT ou le département) une demande d'autorisation de construire portant sur la construction d'un puits d'irrigation sur la parcelle n° 1______ en complément de celui existant.

Elle a notamment exposé, dans son courrier d'accompagnement, que, depuis plusieurs mois, des discussions étaient intervenues avec le service de géologie, sols et déchets (ci-après : GESDEC) et l'office cantonal de l'eau (ci-après: OCEau) afin de trouver une solution en vue de « minimiser l'impact de [son] puits d'irrigation existant (au bénéfice d'une autorisation de pompage) sur le débit de l'Aire », rivière située à proximité de ce dernier. Ayant dû arrêter le pompage pendant de nombreuses semaines en été, sa capacité d'irrigation atteignait des limites dangereuses. À la suite de différents forages exploratoires de petits diamètres effectués par un bureau d'ingénieurs spécialisés, à savoir J______, un emplacement avait été trouvé permettant de fournir de l'eau en suffisance pour poursuivre son activité sans avoir d'impact sur le débit de l'Aire.

A l'appui de sa demande, elle a notamment produit un rapport d’J______ du 10 décembre 2020 relatif aux résultats des investigations portant sur la recherche d'un site pour l'implantation d'un nouveau puits de pompage des eaux souterraines pour l'irrigation des cultures maraîchères.

Il en ressort que trois forages avaient été réalisés les 19 et 20 novembre 2020, dont le choix de l'implantation avait été défini sur la base des données géologiques existantes et des contraintes d'exploitation. L'ensemble des forages avait rencontré la nappe d'eau souterraine superficielle de l'Aire. Des essais de pompage avaient été effectués le 24 novembre 2020 sur ces trois puits en tenant compte de la réaction de la nappe en cours de pompage et de sa vitesse de recharge une fois les pompages terminés. L'influence des pompages sur la nappe était vraisemblablement très limitée. Le suivi en cours de pompage du niveau d'eau au droit des piézomètres existants environnants ne relevait aucune influence significative sur les eaux souterraines s'écoulant au droit de ces points.

6.             Dans le cadre de l'instruction de cette demande, enregistrée sous la référence DD 9______, les préavis suivants ont été requis et émis :

-          le 29 avril 2021, la direction des autorisations de construire (ci-après : DAC) a requis la poursuite de l'instruction et la fourniture de pièces complémentaires ;

-          le 10 mai 2021, la direction de l'information du territoire (ci-après : DIT) a préavisé favorablement le projet sans observation ;

-          le 19 mai 2021, l'office de l'urbanisme (ci-après : OU) a émis un préavis favorable sans observation ;

-          le 26 mai 2021, la commune s'est prononcée favorablement au projet, sous conditions ;

-          le 11 juin 2021, l'office cantonal de l'agriculture et de la nature (ci-après : OCAN), constatant que la requérante exerçait la profession d'agriculteur à titre principal et exploitait à ce titre une exploitation agricole d'environ 6______ hectares en cultures maraîchères, que l'infrastructure envisagée servirait notamment à l'irrigation des cultures et que le puits projeté était nécessaire au bon fonctionnement de l'exploitation, a préavisé favorablement le projet, sous condition que l'utilisation de l'infrastructure soit exclusivement limitée à des activités agricoles ;

-          le 11 juin 2021, le GESDEC a émis un préavis favorable, sous conditions, relevant que l'autorisation d'utilisation de la nappe à des fins de pompage était subordonnée à une autorisation d'exploitation dont la demande avait été déposée auprès de son service, cette demande étant traitée en parallèle à l'autorisation de construire, et précisant que les conditions de pompage et toutes les modalités concernant un usage à des fins d'arrosage agricole de l'eau de la nappe seraient précisées à l'issue du traitement de cette requête sur la base de l'étude hydrogéologique associée ;

-          le 15 juin 2021, l'OCEau a sollicité des pièces complémentaires et demandé une modification du projet.

7.             Par courrier du 8 juin 2021, Mme A______ et M. B______ ont fait part de leurs remarques au DT, exposant notamment que, lors de la campagne vibrosismique entreprise en octobre 2018 par les Services industriels de Genève (ci-après : SIG), leur maison avait subi des dégâts ; le sous-sol s'était en particulier fragilisé et était devenu instable. Ils sollicitaient ainsi la garantie que la construction du nouveau puits et le prélèvement de l'eau de la nappe phréatique ne fragiliseraient pas leur bâtiment et que l'État de Genève s'engagerait à supporter les éventuels dommages sur le corps de ferme qui résulteraient de la variation du niveau de la nappe phréatique et à procéder au prélèvement régulier du niveau de celle-ci.

8.             Le 2 juillet 2021, en réponse aux préavis de l'OCEau et de la DAC, C______ a fourni les pièces complémentaires sollicitées.

9.             Les nouveaux préavis suivants ont été rendus :

-          le 13 juillet 2021, l'OCEau s'est prononcé favorablement, sous conditions ;

-          à la même date, la DAC a requis la poursuite de l'instruction et la fourniture de pièces complémentaires.

10.         Le 18 août 2021, en réponse au préavis de la DAC, C______ a fourni les pièces complémentaires sollicitées.

11.         Le 24 août 2021, la DAC a rendu un nouveau préavis, se prononçant favorablement au projet, sans observation.

12.         Par décision du 30 août 2021, publiée dans la Feuille d'avis officielle de la République et canton de Genève (ci-après : FAO) du même jour, le département a délivré l'autorisation de construire DD 9______.

Les conditions figurant dans les préavis de l'OCAN, du GESDEC et de l’OCEau des 11 juin et 13 juillet 2021 devaient être strictement respectées et faisaient partie intégrante de l'autorisation.

13.         Le 1er septembre 2021, le département a informé Mme A______ et M. B______ avoir procédé à un examen attentif des divers préavis recueillis ainsi que de leurs observations et, après une pesée des différents intérêts en présence, avoir autorisé le projet en cause.

14.         Le 29 septembre 2021, Mme A______ et M. B______ ont recouru à l'encontre de la décision du 30 août 2021 auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal).

15.         Le 20 janvier 2022, le département a informé C______ de sa décision d'annuler l'autorisation de construire délivrée le 30 août 2021 et de reprendre l'instruction du dossier, constatant que celle-ci n'avait pas été coordonnée avec l'autorisation de pompage délivrée ultérieurement.

16.         Le 12 janvier 2022, Mme A______ et M. B______ ont retiré leur recours et la cause, enregistrée sous le numéro de procédure A/10______, a été rayée du rôle du tribunal.

17.         Les nouveaux préavis suivants ont été rendus :

-          le 24 janvier 2022, le GESDEC a émis un préavis favorable, sous conditions ;

-          le 31 janvier 2022, le GESDEC a émis un préavis favorable, auquel était annexé un préavis liant rendu par son service le 19 janvier 2022 autorisant C______ à procéder au pompage de la nappe, sous conditions. Le débit pompé maximum autorisé était de 90 litres/minute. Un suivi du pompage et de ses impacts sur les flux d'eau souterrains et sur le débit de la rivière l'Aire, effectué par des piézomètres équipés de sondes automatiques, durant la période de juin à septembre 2022, était exigé. Ceci pour déterminer une méthode de fourniture d'eau sur la base d'une gestion des différents pompages afin qu'il n'y ait pas d'interactions entre les différents puits et le débit de la rivière l'Aire, tout en prenant en compte une partie du manque d'eau en période d'étiage en utilisant la fourniture en eau du réseau SIG. L'autorisation était conditionnée notamment à une utilisation parcimonieuse de l'eau selon l'art. 20 de la loi fédérale sur la protection des eaux du 24 janvier 1991 (LEaux - RS 814.20). Le département pouvait suspendre pour une durée indéterminée l'autorisation en cas de conditions naturelles défavorables (telles qu'un débit de l'Aire inférieur à 50  litres/seconde) de la nappe ou de sa connexion avec la rivière l'Aire. Enfin, l'autorisation était valable pour une année, une autorisation annuelle pouvant être délivrée pour l'année 2022-2023 en tenant compte des mesures et des informations collectées sur les ressources, les volumes pompés et leur interaction avec l'environnement au cours de cette période de pompage ;

-          le 9 mars 2022, l'OCEau s'est prononcé favorablement, sous conditions, pour l'utilisation temporaire du pompage en phase test, renvoyant au préavis du 31 janvier 2022 rendu par le GESDEC, son avis étant lié aux conditions émises par celui-ci.

18.         Par décision du 15 mars 2022, publiée dans la FAO du même jour, laquelle annulait et remplaçait sa décision du 30 août 2021, le département, se référant au préavis liant du GESDEC du 31 janvier 2022 pour l'autorisation de pompage dans la nappe, a délivré l’autorisation de construire DD 9______.

Les conditions figurant dans les préavis de l'OCEau du 9 mars 2022, de l'OCAN du 11 juin 2021 et du GESDEC du 31 janvier 2022 devaient être strictement respectées et faisaient partie intégrante de l'autorisation de construire. L'attention de la requérante était également attirée, pour information, sur le préavis de la commune du 26 mai 2021.

19.         A la même date, le département a informé Mme A______ et M. B______ avoir procédé à un examen attentif des divers préavis recueillis ainsi que de leurs observations et, après une pesée des différents intérêts en présence, avoir autorisé le projet.

20.         Le 8 avril 2022, Mme A______ et M. B______ ont fait part de leurs remarques au DT, expliquant avoir reçu copie de l'intégralité des pièces figurant dans le dossier d'autorisation DD 9______ et regretter que le préavis du GESDEC du 31 janvier 2022 ne mentionnait pas les échanges de correspondances avec leur conseil, lesquels faisaient état de faits nouveaux ayant une grande importance sur l'octroi de l'autorisation querellée. Ils souhaitaient ainsi obtenir une copie des rapports et analyses de risques ayant permis d'accorder l'autorisation querellée.

21.         Par acte du 28 avril 2022, agissant sous la plume de leur conseil, Mme A______ et M. B______ ont recouru auprès du tribunal contre la décision du 15 mars 2022, concluant, principalement, à son annulation ainsi qu'à l'annulation de l'autorisation de pompage délivrée le 31 janvier 2022 et, subsidiairement, au renvoi du dossier au département pour nouvelle décision, le tout sous suite de frais et dépens.

Les parcelles nos 1______ et 7______ n'étaient techniquement pas contiguës, mais étaient voisines très proches, leurs extrémités (sud pour la parcelle no 7______ et nord pour la parcelle no1______) n'étant séparées que par le carrefour des chemins H______ et I______. Leur qualité pour recourir découlait du fait qu'ils étaient voisins immédiats de la parcelle litigieuse et qu'ils possédaient à côté de leur maison un ancien puits, qu'ils n'utilisaient pas, donnant accès à la nappe phréatique de l'Aire, de sorte que le pompage dans cette nappe phréatique avait un impact direct sur leur propriété.

La maison qu'ils habitaient datait du 18e siècle, n'avait ni sous-sol ni véritables fondations, était plus fragile que les bâtiments des 20e et 21e siècle et ainsi plus exposée aux risques qu'impliquaient des vibrations ou des mouvements de terrain.

Dans le cadre du programme GEothermie 2020, les SIG avaient effectué un sondage vibrosismique du sous-sol à G______ qui avait causé des dommages à leur maison. L’important trafic de poids lourds venant charger ou décharger du matériel pour l'entreprise C______ était également source d'importantes nuisances sonores (en particulier la nuit) et de vibrations désagréables pour les habitants, susceptibles de contribuer à l'aggravation des risques d'instabilité de leur maison. M. B______ était par ailleurs sérieusement atteint dans sa santé par ces nuisances sonores, qui avaient conduit à sa mise en arrêt de travail complet depuis le 1er septembre 2019 et à l’octroi d’une rente AI complète à partir de cette date.

La décision litigieuse violait le principe de coordination prévu à l'art. 25a de la loi fédérale sur l’aménagement du territoire du 22 juin 1979 (LAT - RS 700).

Le dossier du DT ne faisait pas apparaître d'analyse attentive de la situation actuelle de la nappe phréatique de la plaine de l'Aire et de l'impact que les pompages supplémentaires pouvaient avoir sur elle. Il ressortait d'une présentation publique donnée par l'OCEau que ce service, conjointement avec les SIG, envisageait un projet visant à pomper l'eau du lac pour alimenter cette nappe. Dès lors, les pompages effectués par les maraîchers n'étaient à l'évidence pas sans conséquences sur son volume. Il n'était ainsi pas raisonnable de délivrer des autorisations de pompages supplémentaires venant réduire son volume, ce d'autant qu'il existait au moins un autre puits à proximité utilisé sans autorisation par des maraîchers. Il convenait par conséquent de procéder à des mesures d'instruction complémentaires.

En outre, l'autorisation d'exploitation délivrée par le GESDEC n'avait pas fait l'objet d'une procédure transparente. Leur recours valait également à l'encontre de cette décision. D'abord, étant donné que la production maraîchère commençait dès le printemps et que le pompage pouvait être substantiel durant cette période, le suivi de pompage et de ses impacts sur les flux d'eau souterrains et sur le débit de la rivière l'Aire devait être étendu sur la période de mars à mai. Ensuite, la nappe phréatique faisait partie du domaine privé et appartenait aux divers propriétaires de terrains et d'habitations de la région, de sorte que l'autorisation de pompage ne pouvait être accordée sans l'accord de l'ensemble des propriétaires concernés.

Enfin, la décision querellée violait le principe de la proportionnalité. Leur intérêt à éviter tout dommage à leur propriété ainsi que l'intérêt public au maintien de la nappe phréatique n'avaient pas été suffisamment pris en compte. Le GESDEC n'avait pas totalement exclu le risque d'influence du pompage sur la stabilité de leur maison, se limitant à le qualifier de « peu probable ». Or, une faible probabilité n'était à l'évidence pas acceptable.

A l'appui de leurs écritures, ils ont produit diverses pièces, dont un courrier du GESDEC du 7 juin 2021 faisant suite à une lettre adressée directement à ce service concernant notamment l'aménagement du puits d'irrigation litigieux.

Il en ressort que, depuis 2019, dans le cadre du suivi des interactions nappe-rivière, il avait été remarqué que le pompage en période d'étiage sévère par C______ influençait fortement le débit de la rivière. Des mesures spécifiques avaient alors été réalisées, dont la réduction du pompage existant en période d'été afin de ne plus influencer ce débit. Sur cette base, la société avait lancé une étude de prospection afin de trouver un autre site de pompage en complément du puits existant lorsque ce dernier devait être stoppé lors des étiages sévères de la rivière. Un site favorable avait été trouvé et choisi, lequel faisait l'objet de la requête en autorisation DD 9______. Un essai de pompage sur ce site avait été réalisé entre les 29 mars et 11 avril 2021, avec un débit de 90 litres/minute. L'analyse de l'évolution du niveau des eaux souterraines sur plusieurs points entre l'amont et l'aval montrait qu'il ne relevait pas de variation significative traduisant une influence du pompage dans le nouveau puits (moins de 5 cm de rabattement), de sorte qu'une autorisation de pompage de 90 litres/minute maximum était parfaitement acceptable, ce débit n'ayant montré pratiquement aucune influence sur les points de monitoring suivis, le point le plus proche étant à distance égale de leur maison. En outre, l'influence du pompage sur la stabilité de leur maison était peu probable car la géologie présente autour de leur parcelle montrait la présence d'un aquifère graveleux entre 1.20 et 1.80 m d'épaisseur dans lequel circulait l'eau de la nappe. Cette assise étant compacte et n'étant pas totalement saturée, une variation de niveau d'eau dans ces graviers ne pouvait engendrer d'effets de tassement sur les couches superficielles sur lesquelles leur maison était fondée. L'immeuble subissait certainement des effets de tassement dus aux variations saisonnières d'humidité des terrains de couverture (sol végétal et remblais).

22.         Le 16 mai 2022, le département a indiqué à Mme A______ et M. B______ que les échanges intervenus entre le GESDEC et leur conseil étaient connus. Il n'avait pas d'autres documents à leur communiquer que ceux figurant déjà dans le dossier qui leur avait été transmis.

23.         C______ et MM. D______, E______ et F______ ont, sous la plume de leur conseil, répondu au recours le 1er juillet 2022, concluant à son rejet, sous suite de frais et dépens. Ils ont produit un chargé de pièces.

Le grief de la violation de l'art. 25a LAT était irrecevable. Se limitant à avancer l'existence d'une faible probabilité d'atteinte à la stabilité de leur maison que pouvait avoir le pompage d'eau dans la nappe, les recourants n'avaient pas démontré de manière certaine ou avec une probabilité suffisante qu'ils étaient touchés par les prétendues immissions.

En tout état, l'ensemble de leurs griefs était infondé. Les juridictions administratives n'avaient en particulier pas à se préoccuper des rapports de droit privé, la délivrance d'une autorisation de construire n'étant, dans tous les cas, pas subordonnée à l'accord des propriétaires d'immeubles voisins du fonds de la construction autorisée.

24.         Le département s'est déterminé sur le recours le 4 juillet 2022, concluant à son rejet. Il a produit son dossier.

Il s'en rapportait à la justice s'agissant de la recevabilité du recours, précisant toutefois que les recourants n'avaient pas démontré qu'il existait sur leur propriété un puits qui serait directement relié à la nappe phréatique. Par ailleurs, ils reconnaissaient ne pas utiliser ce puits et ne prétendaient pas être au bénéfice d'une autorisation pour l'exploiter.

Au fond, le principe de coordination prévu à l'art. 25a LAT était respecté. L'autorisation d'exploiter faisait partie intégrante de l'autorisation de construire querellée. Lorsqu'une autorisation d'exploiter, telle que celle délivrée par le GESDEC le 19 janvier 2022, était liée à une autorisation de construire, c'était la voie du préavis liant qui devait être mise en œuvre. En outre, les autorisations de construire et d'exploiter étaient rendues sur la base d'une étude effectuée par des spécialistes, validée par l'instance de préavis spécialisée dans ce domaine. Contrairement aux allégations des recourants, il ressortait des études réalisées que le pompage proposé n'avait aucune incidence significative sur les eaux souterraines. S'agissant de l'absence d'accord des propriétaires voisins, les seuls propriétaires qui avaient à se prononcer sur l'autorisation de construire et d'exploiter étaient ceux sur les parcelles desquelles le puits en question allait être foré.

Le principe de proportionnalité était également respecté. Les recourants se limitaient à émettre des suppositions quant au prétendu risque pour leur propriété. Or, rien dans le dossier ne permettait de retenir que l'exploitation du puits litigieux aurait un impact négatif sur la stabilité des sols. Renseignement pris auprès du GESDEC, il apparaissait que la nappe concernée faisait l'objet d'une surveillance particulière, laquelle n'avait démontré aucun signe d'assèchement pouvant avoir pour conséquence de nuire à l'équilibre géologique ou hydrogéologique des parcelles situées dans son périmètre.

25.         Le 8 août 2022, dans le délai prolongé par le tribunal, les recourants ont répliqué, persistant dans leurs conclusions. Ils ont produit des pièces complémentaires.

Reprenant en substance l'argumentation développée dans le cadre de leur recours, ils ont ajouté que d'autres nuisances sonores liées à l'activité des intimés avaient augmenté récemment, en particulier le maintien allumé pendant de nombreuses heures du compresseur frigorifique des remorques stationnées dans l'aire d'exploitation de l'entreprise, la recharge d'un camion électrique de l'entreprise stationné dans la cour en face de leur maison et de nouvelles nuisances persistantes jour et nuit venant de l'intérieur des locaux de l'entreprise. Même s'ils n'étaient pas en mesure de déterminer dans quelle mesure l'autorisation querellée pourrait contribuer à l'augmentation de telles nuisances, ils pouvaient légitimement craindre que la construction litigieuse, par le volume d'eau supérieur qu'elle offrirait à l'exploitation des intimés, participerait au développement de celle-ci et à l'augmentation corrélative des nuisances.

Un puits existait bel et bien sur leur terrain et était connu du GESDEC. S'ils ne l'utilisaient pas pour pomper l'eau de la nappe phréatique, une autorisation d'exploiter n'était nécessaire que pour une utilisation excédant l'usage commun. Ainsi, ils étaient libres de puiser l'eau sans devoir bénéficier d'une telle autorisation. Le pompage de l'eau par le puits litigieux les touchait directement puisque c'était la même nappe phréatique qui affleurait dans leur sous-sol et qui serait pompée par les intimés, de sorte qu'ils étaient touchés plus que n'importe qui.

Au fond, les conditions de l'art. 16a LAT n'étaient pas remplies. L'usage de l'installation litigieuse n'était pas conforme à la zone agricole dans la mesure où l'eau ne servirait pas à une exploitation tributaire du sol, à savoir une agriculture traditionnelle en pleine terre, mais à des cultures maraîchères hors sol.

Les essais de pompages effectués, établissant que le pompage n'avait pas d'influence significative, étaient insuffisants. Les périodes durant lesquelles ces essais (mars et avril 2021) avaient été menés ne correspondaient pas à la période (été) durant laquelle le pompage aurait effectivement lieu. Les données précises et complètes sur ces essais de pompage n'avaient par ailleurs pas été fournies.

L'art. 43 al. 1 LEaux n'était pas garanti. Les indications quant aux quantités d'eau alimentant la nappe phréatique de la plaine de l'Aire faisaient défaut. Il n'était ainsi pas possible d'affirmer que les prélèvements opérés ne seraient pas supérieurs aux apports d'eau qui alimentaient cette nappe, ni qu'ils ne porteraient pas préjudice à la qualité des eaux souterraines et à la végétation.

Enfin, le DT n'avait pas procédé à une vérification de la condition de la stabilité des terrains garantie par l'art. 30 al. 1 let. d de la loi sur les eaux du 5 juillet 1961 (LEaux-GE - L 2 05). Ils ignoraient en tout état dans quelle mesure ces aspects étaient traités dans l'étude hydrogéologique « complète ».

26.         C______ et MM. D______, E______ et F______ ont dupliqué, en date du 30 août 2022, maintenant leurs conclusions.

L'exploitation maraîchère était conforme à l'affectation de la zone agricole. Pour le surplus, les essais de pompages et les études réalisés avant la délivrance de l'autorisation litigieuse suffisaient à éviter toute atteinte à la nappe phréatique et au débit de la rivière, l'autorisation de pompage délivrée étant conditionnée à l'absence d'effet sur ces derniers.

27.         Le département a également dupliqué le 31 août 2022, maintenant ses conclusions.

Ne faisant pas l'objet de la décision querellée, le grief relatif à la conformité à la zone agricole était irrecevable. En tous les cas, l'OCAN avait retenu que la partie intimée exerçait l'activé d'agriculteur et ne l'avait à aucun moment remise en cause. S'agissant des prétendues nuisances sonores liées au trafic de poids lourds, les recourants se contentaient d'émettre des hypothèses et reconnaissaient ne pas être en mesure de déterminer dans quelle mesure l'autorisation querellée pourrait contribuer à l'augmentation de telles nuisances. Concernant les effets du pompage autorisé sur la nappe phréatique, son exploitation était soumise à un essai d'une année, avec l'obligation de mettre en place un système de suivi pour vérifier l'incidence de ce captage sur le flux d'eau concerné. Enfin, à propos de l'accord des propriétaires, les recourants ne démontraient pas un droit objectif à pouvoir utiliser leur terrain dans leur profondeur, notamment pour ce qui concernait le pompage de l'eau.

28.         Le détail des écritures sera repris dans la partie « En droit » en tant que de besoin.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions prises par le département en application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05) (art. 115 al. 2 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 143 et 145 al. 1 LCI).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             La recevabilité du recours suppose encore que ses auteurs disposent de la qualité pour recourir.

4.             La qualité pour recourir est reconnue à toute personne atteinte par la décision attaquée et qui dispose d’un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (art. 60 let. b LPA).

5.             Le recourant doit se trouver dans une relation spéciale, étroite et digne d’être prise en considération avec l’objet de la contestation et retirer un avantage pratique de l’annulation ou de la modification de la décision en cause, qui permette d’admettre qu’il est touché dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l’intérêt général, de manière à exclure l’action populaire. Cet intérêt digne de protection ne doit pas nécessairement être de nature juridique, un intérêt de fait étant suffisant (ATF 144 I 43 consid. 2.1 ; 143 II 506 consid. 5.1 ; 137 II 30 consid. 2.2.3 et 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_206/2019 du 6 août 2019 consid. 3.1).

6.             En matière de droit des constructions, le voisin direct de la construction ou de l’installation litigieuse a en principe la qualité pour recourir (ATF 139 II 499 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_164/2019 du 20 janvier 2021 consid. 1). La qualité pour recourir peut également être donnée en l’absence de voisinage direct, quand une distance relativement faible sépare l’immeuble des recourants de l’installation litigieuse (ATF 121 II 171 consid. 2b ; ATA/790/2012 du 20  novembre 2012). La qualité pour recourir a ainsi été admise pour des distances variant entre 25 et 150 m (ATA/66/2012 du 31 janvier 2012 ; ATA/793/2005 du 22 novembre 2005 consid. 2c et la jurisprudence citée). Elle a en revanche été déniée dans des cas où cette distance était de 800, respectivement 600, 220, 200, voire 150 m (arrêt du Tribunal Fédéral 1A.47/2002 du 16 avril 2002 consid. 3.1 ; ATA/25/2007 du 23 janvier 2007 et les références citées).

7.             La proximité avec l’objet du litige ne suffit cependant pas à elle seule à conférer au voisin la qualité pour recourir contre la délivrance d’une autorisation de construire. Les tiers doivent en outre retirer un avantage pratique de l’annulation ou de la modification de la décision contestée, qui permette d’admettre qu’ils sont touchés dans un intérêt personnel se distinguant nettement de l’intérêt général des autres habitants de la collectivité concernée (ATF 139 II 499 consid. 2.2 arrêts du Tribunal fédéral 2C_727/2016 du 17 juillet 2017 consid. 4.2.3 ; 1C_226/2016 du 28 juin 2017 consid. 1.1). Le recourant doit ainsi rendre vraisemblables les nuisances qu’il allègue et sur la réalisation desquelles il fonde une relation spéciale et étroite avec l’objet de la contestation (cf. ATF 125 I 173 consid. 1b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_469/ 2014 du 24 avril 2015 consid. 2.2 ; 1C_453/2014 du 23 février 2015 consid. 4.2 et 4.3).

8.             En l'espèce, comme cela ressort de la consultation du système d'information du territoire à Genève (SITG), la parcelle des recourants se situe à quelques mètres de celle destinée à accueillir le projet litigieux. Ces derniers font par ailleurs valoir des griefs liés au droit de la construction, dans la mesure où ils se plaignent de nuisances engendrées par le projet litigieux qui impacteraient notamment leur maison. Leur qualité pour recourir contre l'autorisation de construire sera donc admise.

9.             L’admission de la qualité pour recourir ne signifie pas encore que toutes les conclusions respectivement griefs formulés par un recourant soient recevables.

10.         En effet, le voisin ne peut pas présenter n’importe quel grief ; il ne se prévaut d’un intérêt digne de protection, lorsqu’il invoque des dispositions édictées dans l’intérêt général ou dans l’intérêt de tiers, que si ces normes peuvent avoir une influence sur sa situation de fait ou de droit. Tel est souvent le cas lorsqu’il est certain ou très vraisemblable que l’installation ou la construction litigieuse sera à l’origine d’immissions - bruit, poussières, vibrations, lumière, fumée - atteignant spécialement les voisins. À défaut, il n’y a pas lieu d’entrer en matière sur le grief soulevé (ATA/85/2022 du 1er février 2022 consid. 5b).

11.         De plus, il n’appartient pas à l’administration de s’immiscer dans les conflits de droit privé pouvant s’élever entre un requérant et un opposant, la législation genevoise en matière de police des constructions ayant pour seul but d’assurer la conformité du projet présenté avec les prescriptions en matière de construction et d’aménagement intérieurs et extérieurs des bâtiments et des installations. Elle réserve expressément le droit des tiers (art. 3 al. 6 LCI ; ATA/439/2021 du 20  avril 2021 consid. 8c ; ATA/307/2021 du 9 mars 2021 consid. 4a).

12.         Enfin, sous peine d’être irrecevable, une conclusion ne peut être exorbitante à l’objet du litige (ATA/195/2022 du 22 février 2022 consid. 3). Cet objet est défini principalement par l’objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu’il invoque. L’objet du litige correspond objectivement à l’objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible. La contestation ne peut excéder l’objet de la décision attaquée, c’est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l’autorité inférieure s’est prononcée ou aurait dû se prononcer (ATA/85/2022 du 1er février 2022 consid. 3a).

13.         En l’espèce, les recourants invoquent divers griefs à l'appui de leur recours. Ils font d'abord valoir que l'usage de l'installation litigieuse ne serait pas conforme à la zone agricole dans la mesure où elle ne servirait pas à une exploitation tributaire du sol. Ils soutiennent également que la décision querellée viole le principe de proportionnalité, avançant notamment que leur intérêt privé à éviter tout dommage à leur propriété dont la stabilité serait péjorée par l'exploitation du puits n’avait pas suffisamment été pris en compte. En outre, ils invoquent une violation des art. 43 al. 1 LEaux et 30 al. 1 let. d LEaux-GE.

Les recourants se prévalent ainsi de griefs liés au droit des constructions ayant trait dans les grandes lignes à l'implantation et à la réalisation du projet. L'admission de ceux-ci est donc susceptible d’avoir une incidence concrète sur leur situation de fait. Ces griefs sont donc recevables.

Tel n'est en revanche pas le cas des autres griefs invoqués. En effet, s'agissant du grief relatif à l'existence d'un ancien puits donnant accès à la nappe phréatique de l'Aire, les recourants se contentent d'une argumentation générale, soutenant que le pompage de cette nappe aurait un impact direct sur leur propriété, sans toutefois expliquer quels seraient les inconvénients concrets les touchant plus que quiconque dans leur situation factuelle ou juridique. Concernant l'absence d'accord des propriétaires de terrains et d'habitations de la région pour pomper l'eau de la nappe phréatique, il s'agit d'une problématique qui ressort du droit privé, échappant à la cognition du tribunal. Quant aux nuisances liées aux vibrations et aux mouvements de terrain ainsi qu'aux nuisances sonores émanant du trafic de poids lourds venant charger et décharger du matériel de la société intimée, les recourants ne démontrent pas dans quelle mesure l'autorisation querellée serait susceptible de contribuer à l'augmentation de celles-ci, ce que d’ailleurs ils admettent. Faute d'éléments probants, ces risques demeurent purement hypothétiques. Ainsi, les recourants n'ont pas d'intérêt digne de protection à soulever ces griefs, lesquels doivent par conséquent être déclarés irrecevables.

Concernant enfin la violation du principe de coordination et l'absence de transparence de la procédure d'autorisation d'exploitation, on peut douter de la recevabilité de ces griefs en tant que les recourants ne démontrent pas en quoi ils seraient directement affectés par ces problématiques. Or, le recours ayant pour seul but de garantir l'application correcte du droit sans que les recourants ne puissent tirer aucune conséquence à titre personnel de ses arguments, assimilable à une action populaire, est irrecevable. Cette question pourra toutefois demeurer ouverte, les griefs en question devant de toute manière être rejetés pour les motifs développés ci-après.

14.         Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire, l’égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9).

15.         A titre préalable, les recourants sollicitent divers actes d’instruction, dont la communication par les intimés de leur consommation d'eau totale, de 2012 à 2021, mois par mois, en distinguant le cas échéant le pompage dans la nappe phréatique et le pompage dans la rivière de l'Aire (et sans tenir compte de leur consommation d'eau auprès des SIG) ainsi que l'apport à la procédure des analyses de l'essai de pompage intervenu entre le 29 mars et le 11 avril 2021, du rapport hydrogéologique réalisé et de l'étude hydrogéologique du GESDEC visant à déterminer les conditions d'utilisation de l'eau souterraine sans impact pour le voisinage.

16.         Le droit d’être entendu garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit, pour l’intéressé, de s’exprimer sur les éléments pertinents avant qu’une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d’avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités).

17.         Toutefois, le droit d’être entendu ne peut être exercé que sur les éléments qui sont déterminants pour décider de l’issue du litige. Il est ainsi possible de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l’authenticité n’est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsque le juge parvient à la conclusion qu’elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu’elles ne pourraient l’amener à modifier son opinion. Ce refus d’instruire ne viole le droit d’être entendu des parties que si l’appréciation anticipée de la pertinence du moyen de preuve offert, à laquelle le juge a ainsi procédé, est entachée d’arbitraire (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_ 576/2021 du 1er avril 2021 consid. 3.1 ; 2C_946/2020 du 18 février 2021 consid.  3.1).

18.         En l'espèce, le tribunal estime disposer d’un dossier complet lui permettant de trancher le présent litige en toute connaissance de cause. En effet, le projet litigieux a été soumis à l'examen minutieux de plusieurs instances spécialisées, notamment le GESDEC, l'OCAN et l'OCEau, lesquelles ont rendu des préavis détaillés après analyse des éléments du projet. En outre, concernant l'autorisation de pompage dans la nappe phréatique, le GESDEC a fourni les explications complémentaires sollicitées par les recourants par courrier du 7 juin 2021. Dans ces circonstances, le tribunal, procédant à une appréciation anticipée des preuves, considère que les actes d'instruction complémentaires ainsi que la production des documents sollicités par les recourants ne seraient pas de nature à changer sa conviction. En conséquence, les demandes de mesures d'instruction, non obligatoires, seront rejetées.

19.         Les recourants font grief au département d'avoir violé le principe de coordination dans la mesure où l'autorisation d'exploiter les eaux souterraines n'avait pas fait l'objet d'une procédure distincte de l'autorisation querellée.

20.         Selon l’art. 25a al. 1 LAT, une autorité chargée de la coordination est désignée lorsque l’implantation ou la transformation d’une construction ou d’une installation nécessite des décisions émanant de plusieurs autorités.

21.         Le principe de coordination formelle et matérielle ancré à l’art. 25a LAT garantit que tous les aspects d’un projet de construction soient traités de manière coordonnée pour que les autorisations ne fassent l’objet que d’une seule procédure de recours (ATF 122 I 120 consid. 4 ; 120 Ib 400 consid. 5 ; 116 Ib 50 consid. 4). De même, le département est tenu de coordonner les procédures lorsque plusieurs législations ayant entre elles un lien matériel étroit sont applicables (art. 12A LPA).

22.         Le Tribunal fédéral a dégagé les principes imposant une coordination matérielle et formelle des décisions fondées, en tout ou partie, sur le droit fédéral de l’environnement ou de l’aménagement du territoire. Ainsi, lorsque pour la réalisation d’un projet différentes dispositions légales sont simultanément applicables et qu’il existe entre elles une imbrication telle qu’elles ne sauraient être appliquées indépendamment les unes des autres, il y a lieu d’assurer leur coordination matérielle (ATF 118 Ib 381 consid. 4 ; 118 Ib 326 consid. 2 ; 117 Ib 35 consid. 3 ; 116 Ib 175 consid. 2). L’exigence de coordination n’exclut pas la prise de décisions préalable en droit des constructions (ATA/384/2011 du 21 juin 2011 consid. 10 ; ATA/80/2009 du 17 février 2009 consid. 3).

23.         Le principe de coordination formelle et matérielle est également expressément consacré par le droit cantonal.

24.         Selon l’art. 3A LCI, lorsque plusieurs législations ayant entre elles un lien matériel étroit sont applicables à un projet de construction, la procédure directrice est celle relative aux autorisations de construire, à moins qu’une loi n’en dispose autrement ou sauf disposition contraire du Conseil d’État (al. 1). En sa qualité d’autorité directrice, le DT coordonne les diverses procédures relatives aux différentes autorisations et approbations requises. Sauf exception expressément prévue par la loi, celles-ci sont émises par les autorités compétentes sous la forme d'un préavis liant le DT et font partie intégrante de la décision globale d'autorisation de construire. La publication de l'autorisation de construire vaut publication des préavis liants qui l'accompagnent. Seule la décision globale est sujette à recours (al. 2).

25.         L'art. 12A LPA rappelle également le principe général selon lequel les procédures doivent être coordonnées lorsque plusieurs législations ayant entre elles un lien matériel étroit sont applicables à un projet.

26.         A teneur de l'art. 28 LEaux, toute utilisation de l’eau et de son lit qui excède l’usage commun, notamment par pompage, captage ou dérivation à des fins hydrauliques, hydrothermiques, industrielles ou agricoles, est subordonnée à autorisation ou à concession.

27.         Selon l'art. 3 du règlement d'exécution de la loi sur les eaux du 15 mars 2006 (REaux-GE - L 2 05.01), une autorisation particulière du département, indépendamment d'une procédure d'octroi d'une autorisation de construire relevant de la LCI est notamment nécessaire dans les cas suivants : le prélèvement et l’utilisation de l’eau superficielle ou souterraine (let. b).

28.         L'art. 5 al. 4 REaux prévoit que lorsqu'une autorisation est liée à une demande d'autorisation de construire, l'art. 3A LCI s'applique.

29.         En l'espèce, l'autorisation de construire ainsi que l'autorisation de pompage concernent le même objet, à savoir la construction, respectivement l'exploitation d'un puits d'irrigation en complément du puits existant sur la parcelle litigieuse. Il apparaît ainsi que la délivrance de la première a une incidence directe sur la seconde dans la mesure où l'exploitation du puits litigieux dépend de la délivrance de l'autorisation de construire. Un traitement simultané des deux demandes s'imposait donc au regard du principe général de coordination, de sorte que le département pouvait ainsi associer leur traitement. Partant, l'autorité intimée a respecté son devoir de coordination matérielle et formelle en délivrant l'autorisation de construire DD 9______.

Il est en outre rappelé que les conditions émises par les préavis, dont celui du GESDEC, font partie intégrante de l'autorisation querellée, un recours contre cette dernière vaut également pour les préavis qui l'accompagnent.

Mal fondé, le grief sera rejeté.

30.         Les recourants invoquent une violation de l'art. 16a LAT. L'installation litigieuse n'était pas conforme à la zone agricole dans la mesure où elle ne servirait pas à une exploitation tributaire du sol.

31.         Les zones agricoles servent à garantir la base d'approvisionnement du pays à long terme, à sauvegarder le paysage et les espaces de délassement et à assurer l'équilibre écologique ; elles devraient être maintenues autant que possible libres de toute construction en raison des différentes fonctions de la zone agricole et comprennent, d'une part, les terrains qui se prêtent à l'exploitation agricole ou à l'horticulture productrice et sont nécessaires à l'accomplissement des différentes tâches dévolues à l'agriculture et, d'autre part, les terrains qui, dans l'intérêt général, doivent être exploités par l'agriculture (art. 16 al. 1 LAT). Il importe, dans la mesure du possible, de délimiter des surfaces continues d'une certaine étendue (art. 16 al. 2 LAT). Dans leurs plans d'aménagement, les cantons tiennent compte de façon adéquate des différentes fonctions des zones agricoles (art. 16 al. 3 LAT).

32.         L'art. 16a LAT fixe les conditions générales auxquelles des constructions et des installations peuvent être considérées comme conformes à l'affectation de la zone agricole.

En droit genevois, selon l'art. 20 al. 1 LaLAT, la zone agricole est destinée à l’exploitation agricole ou horticole. Ne sont autorisées en zone agricole que les constructions et installations qui sont destinées durablement à cette activité et aux personnes l’exerçant à titre principal (let. a), respectent la nature et le paysage (let.  b) et respectent les conditions fixées par les art. 34 ss de l'ordonnance sur l’aménagement du territoire du 28 juin 2000 (OAT - RS 700.1) (let. c).

33.         L'art. 34 OAT précise ces conditions, en disposant en particulier que l'autorisation de construire ne peut être délivrée que si la construction ou l'installation est nécessaire à l'exploitation (art. 34 al. 4 let. a OAT), si aucun intérêt prépondérant ne s'oppose à leur implantation à l'endroit prévu (let. b) et s'il est prévisible que l'exploitation pourra subsister à long terme (let. c).

En exigeant que la construction soit nécessaire à l'exploitation en cause, l'art. 34 al. 4 let. a OAT (qui reprend la condition posée à l'art. 16a al. 1 LAT) entend limiter les constructions nouvelles à celles qui sont réellement indispensables à l'exploitation agricole ou viticole afin de garantir que la zone agricole demeure une zone non constructible. La nécessité de nouvelles constructions s'apprécie en fonction de critères objectifs. Elle dépend notamment de la surface cultivée, du genre de cultures et de production (dépendante ou indépendante du sol), ainsi que de la structure, de la taille et des nécessités de l'exploitation (arrêts du Tribunal fédéral 1C_266/2013 du 9 octobre 2013 consid. 3.1.1 ; 1C_22/2012 du 30 août 2012 consid. 3.2 et les références). En définitive, ces constructions doivent être adaptées, notamment par leur importance et leur implantation, aux besoins objectifs de l'exploitation en cause (ATF 133 II 370 consid. 4.2 ; 129 II 413 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_266/2013 du 9 octobre 2013 consid.  3.1.1). Le fait qu'une construction ou une installation soit nécessaire à l'exploitation agricole s'entend comme le fait qu'elle lui soit indispensable (Alexander RUCH, Commentaire de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire, 2010, ad art 16a n° 15).

34.         La jurisprudence a ainsi eu l'occasion de préciser que les bâtiments d’exploitation agricoles – par exemple les étables, les granges, les silos ou les remises – sont considérés comme conformes à l’affectation de la zone si leur implantation à l’endroit choisi est indispensable à l’exploitation rationnelle du sol et s’ils ne sont pas surdimensionnés (ATF 132 II 10 consid. 2.4 p. 17; 118 Ib 335 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_74/2016 du 12 septembre 2016, consid. 2.1; 1C_892/2013 du 1er avril 2015 consid. 3.1; 1C_647/2012 du 3 septembre 2014 consid 11 ; 1C_266/2013 du 9 octobre 2013 consid. 3.1). En d'autres termes, les constructions et installations qui n’ont pas de lien fonctionnel direct avec une exploitation agricole ou horticole tributaire du sol de façon prépondérante ne sont en principe pas autorisées en zone agricole (Message du Conseil fédéral relatif à une révision partielle de la loi fédérale sur l'aménagement du territoire du 22 mai 1996, p. 4 ; ATF 120 Ib 266).

35.         En l'espèce, toutes les instances de préavis consultées, notamment l'OCAN et la commune, ont émis des préavis favorables. Dans son préavis du 11 juin 2021, l'OCAN, instance spécialiste en matière agricole, considère en effet que le projet est conforme à la zone agricole. Elle se fonde sur le fait que les intimés exercent une activité d'agriculteur à titre principal et exploitent dans ce cadre une exploitation agricole d'environ 6______ hectares en cultures maraîchères, que le puits projeté servira notamment à l'irrigation des cultures et qu'il est nécessaire au bon fonctionnement de l'exploitation, étant également précisé que cette instance a soumis son préavis à la condition que l'utilisation de l'infrastructure litigieuse soit exclusivement limitée à des activités agricoles. En l'état, rien ne permet de retenir que le puits litigieux ne serait pas utilisé conformément à sa destination autorisée. Cela est d'ailleurs corroboré par les indications fournies par les parties intimées et ressort expressément de l'objet des investigations menées par J______, lesquelles portaient sur la recherche d'un site pour l'implantation d'un nouveau puits de pompage pour l'irrigation des cultures maraîchères. La conformité du projet litigieux à la zone agricole doit ainsi être admise.

Partant, le grief sera rejeté.

36.         Les recourants font valoir que l'exploitation du puits péjorerait la stabilité de leur maison déjà mise à mal par les sondages vibrosismiques des SIG. Cet aspect n’ayant pas été pris en compte par le département, sa décision violait le principe de proportionnalité. Il convient d'examiner la question sous l'angle de l'art. 14 LCI qui institue une protection contre les dangers ou les inconvénients graves pouvant découler d'un projet de construction. Les recourants invoquent en outre une violation de l'art. 43 al. 1 LEaux dès lors qu’il ne pouvait être exclu que les prélèvements opérés dans la nappe d'eau souterraine soient supérieurs aux apports d'eau l'alimentant. Enfin, le DT n'avait pas procédé à une vérification de la stabilité des sols, de sorte que la décision entreprise violait l'art. 30 al. 1 let. d LEaux-GE.

37.         Selon l’art. 14 LCI, le département peut refuser une autorisation lorsqu’une construction ou une installation peut être la cause d’inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public (let. a), ne remplit pas les conditions de sécurité et de salubrité qu’exige son exploitation ou son utilisation (let. b), ne remplit pas des conditions de sécurité et de salubrité suffisantes à l’égard des voisins ou du public (let. c), offre des dangers particuliers (notamment incendie, émanations nocives ou explosions), si la surface de la parcelle sur laquelle elle est établie est insuffisante pour constituer une zone de protection (let. d) ou peut créer, par sa nature, sa situation ou le trafic que provoque sa destination ou son exploitation, un danger ou une gêne durable pour la circulation (let. e).

38.         Cette disposition appartient aux normes de protection qui sont destinées à sauvegarder les particularités de chaque zone, en prohibant les inconvénients incompatibles avec le caractère d’une zone déterminée. Elle n’a toutefois pas pour but d’empêcher toute construction dans une zone à bâtir, qui aurait des effets sur la situation ou le bien-être des voisins (ATA/448/2021 du 27 avril 2021 consid. 8a ; ATA/259/2020 du 3 mars 2020 consid. 7a ; ATA/1273/2017 du 12 septembre 2017 consid. 16c).

39.         La législation en matière de construction appréhende les inconvénients qu’une construction peut apporter au voisinage en fixant des règles précises en matière de gabarit de hauteur, de constructions à la limite de propriétés, de distances aux limites, sur la rue et entre constructions, ainsi que de calcul des vues droites (ATA/752/2014 du 23 septembre 2014 ; ATA/99/2012 du 21 février 2012). La construction d’un bâtiment conforme aux normes ordinaires applicables au régime de la zone ne peut en principe pas être source d’inconvénients graves, notamment s’il n’y a pas d’abus de la part du constructeur. Le problème doit être examiné par rapport aux caractéristiques du quartier ou des rues en cause (ATA/448/2021 du 27 avril 2021 consid. 8a ; ATA/285/2021 du 2 mars 2021 consid. 8b ; ATA/758/2016 du 6 septembre 2016). L’accroissement du trafic routier, s’il est raisonnable, ne crée pas une gêne durable au sens de l’art. 14 LCI ; de fait, l’accroissement du trafic engendré par de nouvelles constructions conformes à la destination de la zone ne constitue pas un inconvénient grave au sens de cette disposition (ATA/285/2021 du 2 mars 2021 consid. 8c ; ATA/259/2020 du 3 mars 2020 consid. 7a).

40.         La notion d’inconvénients graves est une norme juridique indéterminée, qui doit s’examiner en fonction de la nature de l’activité en cause et qui laisse à l’autorité une liberté d’appréciation. Celle-ci n’est limitée que par l’excès ou l’abus du pouvoir d’appréciation. Le pouvoir d’examen du tribunal s’exerce dans les limites précitées, sous réserve du respect du principe de proportionnalité en cas de refus malgré un préavis favorable et de l’intérêt public en cas d’octroi d’une autorisation (cf. not. ATA/811/2021 du 10 août 2021 consid. 6 ; ATA/448/2021 du 27 avril 2021 consid. 8a ; ATA/165/2018 du 20 février 2018 consid. 4b).

41.         Lorsqu’elle estime que l’autorité inférieure est mieux en mesure d’attribuer à une notion juridique indéterminée un sens approprié au cas à juger, l’autorité de recours s’impose donc une certaine retenue. Il en va ainsi lorsque l’interprétation de la norme juridique indéterminée fait appel à des connaissances spécialisées ou particulières en matière de comportement, de technique, économique, de subventions et d’utilisation du sol (ATA/896/2021 du 31 août 2021 consid. 4b ; ATA/155/2021 du 9 février 2021 consid. 6b).

42.         Selon une jurisprudence bien établie, la juridiction de recours observe une certaine retenue pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des commissions de préavis, pour autant que l’autorité inférieure suive l’avis de celles-ci. Elles se limite à examiner si le département ne s’est pas écarté sans motif prépondérant et dûment établi du préavis de l’autorité technique consultative, composée de spécialistes capables d’émettre un jugement dépourvu de subjectivisme et de considérations étrangères aux buts de protection fixés par la loi (ATA/896/ 2021 du 31 août 2021 consid. 4d ; ATA/155/2021 du 9 février 2021 consid. 7c et 10e).

43.         Dans l’exercice de ses compétences, l’autorité administrative doit respecter le principe de la proportionnalité. Exprimé à l’art. 5 al. 2 Cst et, en tant que la mesure entre dans le champ d'application d'un droit fondamental, à l'art. 36 al. 3 Cst., il commande que la mesure étatique soit nécessaire et apte à atteindre le but prévu et raisonnablement exigible de la part de la personne concernée (ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 140 II 194 consid. 5.8.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1013/2015 du 28 avril 2016 consid. 4.1). Traditionnellement, le principe de proportionnalité se compose des règles d’aptitude, qui exige que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé, de nécessité, qui impose qu’entre plusieurs moyens adaptés, celui portant l’atteinte la moins grave aux intérêts privés soit privilégié, et de la proportionnalité au sens étroit, selon lequel les effets de la mesure choisie sur la situation de l’administré et le résultat escompté du point de vue de l’intérêt public soient mis en balance (ATA/1094/2020 du 3 novembre 2020 ; ATA/309/2016 du 12 avril 2016).

44.         A teneur de l'art. 43 al. 1 LEaux, les cantons veillent à ce que les prélèvements opérés dans une nappe souterraine ne soient pas supérieurs à la quantité d’eau qui l’alimente. Les prélèvements peuvent toutefois excéder temporairement les apports, à condition qu’ils ne portent préjudice ni à la qualité des eaux souterraines, ni à la végétation.

45.         Selon l'art. 30 al. 1 let. d LEaux-GE, l’octroi d’une autorisation peut être refusé, ajourné ou soumis à des garanties ou à des conditions, notamment lorsqu’elle est de nature à porter atteinte à la stabilité des terrains.

46.         Les ouvrages et installations doivent être exécutés conformément aux conditions de l’autorisation ou de la concession (art. 31 al. 1 LEaux-GE).

47.         En l'espèce, il ressort des divers préavis que les questions des risques potentiels induits par la construction litigieuse ont été dûment examinées par les spécialistes en la matière. Le tribunal constate en particulier que le GESDEC, instance spécialisée dans le domaine concerné, a examiné avec soin le projet à plusieurs reprises. Au terme de son analyse, il a émis un préavis favorable sans relever de danger particulier au vu des particularités du sous-sol (présence de la nappe phréatique superficielle de la plaine de l'Aire). Il a formulé des exigences afin de garantir l'absence d'interactions entre les différents puits et le débit de la rivière et imposé le respect des diverses conditions de façon à ce que le projet ne péjore pas la situation. Il a en particulier estimé nécessaire et suffisant de soumettre l'autorisation de pompage à une durée limitée d'un an avec la mise en place d'un suivi du pompage et de ses impacts sur les flux d'eau souterrains et sur le débit de la rivière de l'Aire de juin à septembre, correspondant la période d'étiage sévère. Il a en outre réservé la possibilité au DT de suspendre l'autorisation de pompage en cas de conditions naturelles défavorables de la nappe ou de sa connexion avec la rivière. L'autorisation délivrée à la requérante contient donc des réserves et conditions quant à la mise en œuvre concrète du projet, prenant en compte les craintes des recourants et susceptibles d'y apporter une réponse.

Ainsi, il n'apparaît pas qu'en suivant le préavis favorable du GESDEC, le DT se serait fondé sur des critères et considérations dénués de pertinence et étrangers au but visé par la réglementation en vigueur, étant précisé que toutes les autres instances spécialisées qui ont été consultées ont émis un préavis favorable au projet, le cas échéant sous conditions.

Les allégations des recourants au sujet des risques d'aggravation de la stabilité de leur maison que la construction litigieuse serait susceptible de causer ainsi que l'accroissement de nuisances sonores liées à une potentielle augmentation corrélative de l'activité des requérantes reposent sur des simples hypothèses et ne sont pas démontrées. Les recourants se contentent à ce titre d’une argumentation générale, se référant notamment à des présentations publiques portant sur de projets futurs possibles, sans toutefois démontrer en quoi la construction en elle-même serait de nature à endommager leur maison, que ce soit par fissuration, inondation ou de toute autre manière. Au contraire, selon le courrier du 7 juin 2021, ce risque a été examiné et exclu par le DT. En effet, il ressort des analyses effectuées que le pompage dans le nouveau puits n'a pas démontré de variation significative du niveau des eaux souterraines et qu’en raison de la géologie présente autour de la parcelle des recourants, l'influence du pompage sur la stabilité de leur maison est peu probable.

Dans ces conditions, le tribunal, qui doit faire preuve de retenue et respecter la latitude de jugement conférée à l'autorité de décision, s'agissant d'un domaine faisant appel à des connaissances techniques, ne saurait en corriger le résultat en fonction d'une autre conception, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdit de faire. Eu égard au lien direct que ces questions entretiennent avec des aspects techniques, il convient ainsi de s'en remettre à l'avis de l'instance spécialisée, qui a préavisé favorablement le projet.

Au surplus, quand bien même la maison des recourants risquerait d’être gravement endommagée, cela ne justifierait pas d’interdire à la société d’utiliser les parcelles en cause conformément à leur affectation, étant souligné que les dispositions de la police des constructions n’ont pas pour but de pallier aux défauts de construction d’un immeuble voisin. Il reviendrait plutôt aux recourants d’entreprendre des travaux sur leur maison pour la consolider. La question d’éventuels dommages sur les immeubles voisins découlant de la réalisation de la construction autorisée relève en tout état de questions de droit privé pour lesquelles le tribunal de céans n’est pas compétent.

Partant, il ressort de ce qui précède que l'autorité intimée n'a pas ignoré l'existence d'un danger ou d'un inconvénient grave au sens de l'art. 14 LCI mais au contraire que des mesures nécessaires à la préservation de la nappe phréatique et de la rivière de l'Aire ont été valablement prises, ces conditions, faisant partie intégrante de l'autorisation de construire, devront être respectées par les intimés.

Les mêmes constats peuvent être opérés s'agissant des principes posés par la LEaux et de la LEaux-GE, étant précisé que l'OCEau et l'OCAN ont préavisé favorablement le projet litigieux. L'autorisation délivrée contient des réserves et conditions quant à la mise en œuvre concrète du projet, en limitant notamment le débit maximum à 90 litres/minute, étant précisé qu'aucune variation significative traduisant une influence du pompage dans le nouveau puits n'a été relevée à ce volume. En outre, contrairement aux allégués des recourants, comme exposé ci-dessus, la stabilité des sols a fait l'objet de vérifications par le DT et les instances spécialisées dans le cadre de l'instruction du dossier. Les griefs reposant sur une violation de la LEaux et de la LEaux-GE apparaissent ainsi également infondés.

48.         En tous points mal fondé, le recours est rejeté et la décision entreprise confirmée.

49.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), les recourants, pris conjointement et solidairement, qui succombent, sont condamnés au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 900.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

Vu l'issue du litige, une indemnité de procédure de CHF 1'500.-, à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, sera allouée à C______ et MM. D______, E______ et F______ (art. 87 al.  2 à 4 LPA et 6 RFPA).

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 28 avril 2022 par Madame et Monsieur A______ et B______ contre la décision du département du territoire du 15 mars 2022 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 900.-, lequel est couvert par leur avance de frais ;

4.             condamne les recourants, pris conjointement et solidairement, à verser à C______ et MM. D______, E______ et F______ une indemnité de procédure de CHF 1'500.- ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Siégeant : Marielle TONOSSI, présidente, Aurèle MULLER et Carmelo STENDARDO, juges assesseurs.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Marielle TONOSSI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’à l’office fédéral de l’environnement.

Genève, le

 

Le greffier