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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/5130/2017

AARP/46/2023 du 15.02.2023 sur JTDP/1241/2021 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : RETRAIT(VOIE DE DROIT);DÉNONCIATION CALOMNIEUSE
Normes : CP.303; CPP.386
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/5130/2017 AARP/46/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 6 février 2023

 

Entre

A______, domicilié ______, France, comparant par Me B______, avocat,

C______, actuellement détenu au Centre pénitentiaire de D______, ______, France, comparant par Me E______, avocat,

appelants,

 

contre le jugement JTDP/1241/2021 rendu le 7 octobre 2021 par le Tribunal de police,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 7 octobre 2021, rendu par défaut, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable de vol (art. 139 ch. 1 du code pénal [CP]), de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP), de violation de domicile (art. 186 CP) et de dénonciation calomnieuse (art. 303 ch. 1 CP), l'a condamné à une peine privative de liberté de 150 jours, sous déduction de deux jours de détention avant jugement, avec sursis (délai d'épreuve : trois ans), et a ordonné son expulsion pour une durée de cinq ans.

Diverses mesures de confiscation, destruction et restitution ont en outre été prononcées et la moitié des frais de la procédure, fixés à CHF 1'994.-, ont été mis à sa charge, l'autre moitié l'étant à celle de C______, condamné dans le même jugement, pour les mêmes faits, à une peine privative de liberté ferme de 150 jours.

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à son acquittement du chef de dénonciation calomnieuse et au prononcé d'une peine pécuniaire avec sursis (délai d'épreuve : un an).

b. Selon l'acte d'accusation du 13 mai 2020, il est reproché ce qui suit à A______ :

- le 8 mars 2017, de concert avec C______, il est entré sans droit dans le bar à l'enseigne "F______", sis au G______ [GE], après que son comparse a brisé une fenêtre de l'établissement. Il a cassé la caisse enregistreuse du bar et s'est emparé de son contenu, soit CHF 80.- ;

- interrogé par le Ministère public (MP), il a déclaré avoir agi avec H______, sous l'identité duquel C______ avait admis le cambriolage, afin que la procédure pénale soit dirigée contre un tiers qu'il savait innocent.

c. Par acte du 27 octobre 2021, C______ a également formé appel contre le jugement susmentionné, concluant à son acquittement complet.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a. Le 8 mars 2017, I______, né en 1992, A______, né en 1998, et C______, né en 1991, sont venus ensemble à Genève depuis J______ [France], à bord du véhicule immatriculé au nom de ce dernier.

Vers 00h19, les deux derniers nommés ont cambriolé le bar "F______" dans les circonstances susdécrites, alors que leur ami les attendait dans la voiture. Le dommage total causé s'élève à près de CHF 3'000.-.

Tous trois ont été contrôlés, puis interpellés à 2h40 par les gardes-frontières. La fouille du véhicule a permis la découverte de gants, tournevis, burin, brise-vitre et lampes de poche.

b. À la police, puis devant le MP, C______, qui était dépourvu de papiers d'identité, s'est présenté sous celle de H______, dont il a fourni toutes les coordonnées (date de naissance, nom des parents, adresse, etc.). Il a précisé que les trois occupants de la voiture étaient voisins et se connaissaient depuis dix ans. Il a admis le cambriolage, ajoutant qu'il avait agi sans préméditation, pour obtenir l'argent nécessaire à faire le plein de la voiture et rentrer à J______. Celle-ci appartenait à un ami, C______, qui la lui avait prêtée pour aller voir des filles dans la région de ______[France].

c. Entendu par la police, A______ a contesté le cambriolage, affirmant n'avoir aucun souvenir de sa soirée en raison d'une forte consommation d'alcool. Il avait quitté J______ la veille avec "deux potes, soit H______, dont [il] ignor[ait] le nom de famille et I______". "H______" conduisait, mais il ne savait pas si la voiture lui appartenait. Il ne s'agissait pas d'un "grand pote", mais ils vivaient dans la même rue – n.r. à moins de 100 mètres l'un de l'autre – et il le connaissait depuis longtemps de vue, bien qu'il ignorât tout de lui.

Devant le MP, le lendemain, il a admis le cambriolage, tout en continuant à désigner son comparse sous l'identité de H______.

d. I______ a déclaré à la police que les autres occupants de la voiture s'appelaient "H______" et "A______", qu'ils habitaient dans le même quartier à J______ et se connaissaient depuis l'enfance. Le véhicule appartenait à un ami de "H______" dont il ignorait le nom.

e. Le 7 avril 2017, le MP a appris de l'avocat d'office de l'intéressé que "H______" était en réalité C______.

f. Interrogé par les autorités françaises par voie de commission rogatoire en avril 2019, C______ a admis que H______ était un ami de son quartier – n.r. habitant le même immeuble –, dont il avait donné l'identité pour éviter les poursuites, car il savait qu'il n'était jamais venu en Suisse et n'était pas connu des services de police.

À la même époque, A______ a déclaré aux autorités françaises ne se souvenir ni du cambriolage, ni de C______ – y compris lorsqu'une photographie de ce dernier lui a été soumise – et ignorer qui était H______. Il connaissait en effet plusieurs "H______", mais pas de ce nom de famille.

g. Bien qu'ils se soient engagés à donner suite à toute convocation des autorités judiciaires genevoises, ni C______, ni A______ ne se sont présentés aux audiences fixées par le TP les 19 avril, puis 8 septembre 2021.

C. a. La juridiction d'appel a ordonné l'instruction de la cause par la voie écrite, avec l'accord des parties.

b. C______ et A______ ont été entendus par voie de commission rogatoire sur les faits de dénonciation calomnieuse.

b.a. Le premier a confirmé avoir pris l'identité de H______, "un pote du quartier", afin de de sortir de garde à vue, et reconnu l'infraction de dénonciation calomnieuse.

b.b. Le second a affirmé ne connaître ni H______, ni C______. Il n'avait rien à dire sur les déclarations qu'il avait faites en Suisse et n'avait pas d'argent pour donner suite à une éventuelle convocation dans ce pays.

c. Selon son mémoire d'appel, A______ rappelle que ce n'est pas lui qui a indiqué à la police que son comparse s'appelait H______ et que rien dans le dossier ne permettait de retenir que lui-même connaissait ce dernier et savait que cette identité correspondait à une personne réelle. C______ n'avait d'ailleurs jamais prétendu que son ami savait que "H______" correspondait à l'identité d'une personne vivant dans la région [de] J______. Il n'était dès lors pas possible de retenir qu'il avait consciemment et volontairement dénoncé une personne qu'il savait innocente.

d. Le MP conclut à la confirmation du jugement entrepris, frais à la charge de cet appelant.

e. Le TP se réfère à son jugement.

f. Par courrier du 25 novembre 2022, peu avant l'échéance du délai imparti pour déposer son mémoire d'appel, l'avocat de C______ a informé la Chambre de céans du retrait de son appel.

D. A______, ressortissant français, célibataire et sans enfants, est né le ______ 1998 à J______. Lors de son arrestation, il a déclaré y avoir effectué sa scolarité obligatoire jusqu'à l'âge de 16 ans et n'avoir ni travaillé ni entrepris de formation depuis. Entendu par voie de commission rogatoire en mai 2019, alors qu'il avait déménagé chez son oncle et sa tante en Bretagne, il a déclaré vouloir changer de vie, n'avoir plus commis d'infraction depuis plus d'un an et travailler pour un maraîcher. Lors de son audition de mai 2022 par les autorités françaises, il a indiqué avoir débuté un stage au début du mois d'avril précédent et vivre avec son amie depuis avril 2019.

Il n'a pas d'antécédent en Suisse. En revanche, il a été condamné à 13 reprises en France, en tant que mineur, entre avril 2014 et mai 2019, pour des actes commis entre 2013 et 2016, notamment pour vol en réunion, vol avec destruction ou dégradation, recel, menaces de mort, rébellion, violence dans un établissement d'enseignement ou d'éducation ou aux abords ou sur une personne dépositaire de l'autorité publique, de violence aggravée et de détention de stupéfiants. Depuis sa majorité, il a été condamné le 9 octobre 2018 pour violence avec usage ou menace d'une arme suivie d'incapacité supérieure à huit jours, pour des faits commis en octobre 2017.

E. Me B______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 6h12 d'activité de chef d'étude, forfait de 20% pour la correspondance et les téléphones inclus, dont 3h00 pour la rédaction du mémoire d'appel.

En première instance, il a été indemnisé à hauteur de 14h20 d'activité.

EN DROIT :

1. 1.1. Selon l'art. 386 al. 2 CPP quiconque a interjeté un recours peut le retirer, s'agissant d'une procédure écrite, avant la clôture de l'échange de mémoires et le terme fixé pour apporter des compléments de preuves ou compléter le dossier (let. b).

En l'occurrence, le retrait de l'appel formé par C______ est intervenu en temps utile, de sorte qu'il lui en sera donné acte.

1.2. L'appel formé par A______ est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, il signifie qu'il incombe à l'accusation d'établir la culpabilité de l'accusé et non à ce dernier de démontrer son innocence (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 40 et les arrêts cités).

Comme principe présidant à l'appréciation des preuves, la présomption d'innocence est violée si le juge du fond se déclare convaincu de faits défavorables à l'accusé sur lesquels, compte tenu des éléments de preuve qui lui sont soumis, il aurait au contraire dû, objectivement, éprouver des doutes (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 40). Il dispose à cet égard d'un large pouvoir dans l'appréciation (ATF 120 Ia 31 consid. 4b). L'appréciation des preuves doit être examinée dans son ensemble et l'état de fait déduit du rapprochement de divers éléments ou indices. Un ou plusieurs arguments corroboratifs peuvent demeurer fragiles si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3; arrêts du Tribunal fédéral 6B_623/2012 du 6 février 2013 consid. 2.1 et 6B_642/2012 du 22 janvier 2013 consid. 1.1).

2.2. L'art. 303 ch. 1 CP réprime le comportement de celui qui aura dénoncé à l'autorité, comme auteur d'un crime ou d'un délit, une personne qu'il savait innocente, en vue de faire ouvrir contre elle une poursuite pénale (al. 1), ou qui, de toute autre manière, aura ourdi des machinations astucieuses dans le même but (al. 2).

Les deux comportements punissables se distinguent en ceci que, dans le premier cas, la personne visée est dénoncée directement, c'est-à-dire nommée par le dénonciateur, tandis que dans le second cas celui-ci recourt à des procédés indirects, qui doivent être astucieux, sans désigner par son nom la personne qu'il veut entraîner dans une poursuite pénale (ATF 95 IV 19 consid. 1 p. 20).

Sur le plan objectif, cette disposition exige une communication, écrite ou orale, visant une personne déterminée, ou à tout le moins déterminable, portant sur la commission par cette dernière d'une infraction réprimée par la loi pénale, qu'elle n'a en réalité pas commise. La forme de l'accusation n'est pas importante. Il suffit d'une dénonciation orale ou écrite, au sens le plus large du terme, qui soit susceptible de fonder un soupçon initial. Peu importe qu'elle soit anonyme, que l'auteur agisse de sa propre initiative ou qu'il fasse une déclaration en ce sens dans le cadre d'un interrogatoire ou d'un témoignage. Il n'est pas non plus nécessaire que la personne visée soit nommée expressément, du moment que la communication permettre de déterminer qui est en fin de compte visé (ATF 132 IV 20 consid. 4.2 p. 25; 85 IV 80 consid. 2 p. 83).

Le fait de se présenter sous une fausse identité lors d'une arrestation, puis d'un interrogatoire de police, réalise les éléments constitutifs objectifs de l'art. 303 ch. 1 al. 2 CP ; A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire romand, Code pénal II, vol. II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n. 16 ad art. 303).

L'élément constitutif subjectif de l'infraction exige l'intention et la connaissance de la fausseté de l'accusation. L'auteur doit savoir que la personne qu'il dénonce est innocente et que son accusation est inexacte. Le dol éventuel ne suffit pas (arrêt du Tribunal fédéral 6B_753/2016 du 24 mars 2017 consid. 2.1.2). Par ailleurs, l'auteur doit agir en vue de faire ouvrir une poursuite pénale contre la personne qu'il accuse injustement. Le dol éventuel suffit quant à cette volonté de faire ouvrir une poursuite pénale (ATF 85 IV 83). L'infraction ne peut pas être justifiée par le but de détourner sur un autre les soupçons qui pèsent sur soi (ATF 132 IV 20 consid. 4.4 p. 26).

2.3. En l'espèce, on ignore les circonstances exactes qui ont amené les trois protagonistes à désigner l'un des leurs comme s'appelant "H______", plutôt que de le désigné sous sa véritable identité, étant précisé que l'appelant, qui se trouvait dans la même situation que C______, s'agissant de ses antécédents en Suisse et en France, n'a, lui, pas jugé utile de recourir à une identité d'emprunt. Il n'en demeure pas moins que seul C______ a décliné une identité complète, comprenant un nom de famille, une date de naissance et une adresse, ses deux comparses se contentant d'un prénom et affirmant ne pas en savoir davantage.

Or, "H______" est un prénom courant en France (plus de 5'000 personnes semblent y porter ce patronyme, la région [de] J______ étant celle en comptant le plus ; cf. www.______.com/prenom/H______). L'on ne saurait dès lors affirmer que ce seul prénom fourni par l'appelant était suffisant pour provoquer l'ouverture d'une procédure pénale contre une personne déterminable.

Il n'est pas non plus possible, en dépit des mensonges manifestes de l'appelant (son défaut de souvenir du cambriolage, pourtant reconnu devant le MP, sa non-reconnaissance de C______, alors que selon ce dernier et I______, ils étaient amis d'enfance), d'affirmer qu'il savait, lorsqu'il a désigné son comparse sous le nom de "H______", que ce dernier correspondait à une personne réelle et n'était pas un prénom choisi au hasard, et de même lorsqu'il a appris le nom de famille de ce dernier, qu'il correspondait à une personne réelle. En effet, bien que l'appelant habite dans la même rue, aucun indice ne permet de retenir qu'il savait qu'un dénommé "H______" résidait dans le même immeuble que son ami C______, étant relevé que leur différence d'âge (six ans) peut soutenir qu'ils n'aient pas fréquentés les mêmes cercles et aient tout ignoré de l'identité l'un de l'autre.

Dans ces circonstances, il existe un doute suffisant sur la réalisation des éléments constitutifs de l'art. 303 CP, qui doit bénéficier à l'appelant.

Ce dernier sera dès lors acquitté de ce chef d'accusation et le jugement entrepris réformé sur ce point.

3. 3.1. Le vol (art. 139 ch. 1 CP) est puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au plus ou d'une peine pécuniaire, l'infraction de dommages à la propriété (at. 144 al. 1 CP) et la violation de domicile (art. 186 CP) d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

3.2. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

Bien que la récidive ne constitue plus un motif d'aggravation obligatoire de la peine, les antécédents, y compris ceux étrangers, continuent de jouer un rôle très important dans la fixation de celle-ci (ATF 105 IV 225 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1202/2014 du 14 avril 2016 consid. 3.5 ; M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER, Basler Kommentar Strafrecht I : 1-110 StGB, Jugendstrafgesetz, Bâle 2019, n. 130 ad art. 47). En général, la culpabilité de l'auteur est amplifiée du fait qu'il n'a pas tenu compte de l'avertissement constitué par la précédente condamnation, et sa rechute témoigne d'une énergie criminelle accrue (L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), Commentaire romand, Code pénal I, art. 1-110 CP, 2ème éd., Bâle 2021, n. 54 ad art. 47). Les antécédents judiciaires ne sauraient toutefois conduire à une augmentation massive de la peine, parce que cela reviendrait à condamner une deuxième fois pour des actes déjà jugés (ATF 120 IV 136 consid. 3b). En outre, les condamnations passées perdent de leur importance avec l'écoulement du temps et ont d'autant moins de poids que la dernière condamnation est ancienne et que l'auteur a adopté un bon comportement depuis (ATF 135 IV 87 consid. 2 p. 89 ; 123 IV 49 consid. 1.d p. 52).

3.3. Aux termes de l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine.

Pour satisfaire à cette règle, le juge, dans un premier temps, fixera la peine pour l'infraction la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou atténuantes. Dans un second temps, il doit augmenter la peine de base pour tenir compte des autres infractions en application du principe de l'aggravation (ATF 144 IV 217 consid. 3.5 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1216/2017 du 11 juin 2018 consid. 1.1.1), en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1175/2017 du 11 avril 2018 consid. 2.1 ; 6B_688/2014 du 22 décembre 2017 consid. 27.2.1).

Cela vaut également en présence d'infractions étroitement liées sur les plans matériel et temporel, le prononcé d'une peine unique dans le sens d'un examen global de tous les délits à juger n'étant pas possible (ATF 144 IV 217 consid. 3.5).

3.4. Les principes de l'art. 47 CP valent aussi pour le choix entre plusieurs sanctions possibles, et non seulement pour la détermination de la durée de celle qui est prononcée. Que ce soit par son genre ou sa quotité, la peine doit être adaptée à la culpabilité de l'auteur. Le type de peine, comme la durée de celle qui est choisie, doivent être arrêtés en tenant compte de ses effets sur l'auteur, sur sa situation personnelle et sociale ainsi que sur son avenir. L'efficacité de la sanction à prononcer est autant décisive pour la détermination de celle-ci que pour en fixer la durée (arrêt du Tribunal fédéral 6B_611/2014 du 9 mars 2015 consid. 4.2). La peine pécuniaire constitue la sanction principale dans le domaine de la petite et moyenne criminalité, les peines privatives de liberté ne devant être prononcées que lorsque l'État ne peut garantir d'une autre manière la sécurité publique. Le choix de la sanction doit être opéré en tenant compte au premier chef de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention (ATF 134 IV 97 consid. 4.2 p. 100 ss ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1249/2014 du 7 septembre 2015 consid. 1.2).

3.5. Aux termes de l'art. 42 al. 1 CP, le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire ou d'une peine privative de liberté de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits. La question de savoir si le sursis serait de nature à détourner le prévenu de commettre de nouvelles infractions doit être tranchée sur la base d'une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Le pronostic doit être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère du prévenu et ses chances d'amendement (ATF 135 IV 180 consid. 2.1).

3.6. En l'occurrence, seul doit être sanctionné le cambriolage commis le 8 mars 2017. À cet égard, la faute de l'appelant ne saurait être considérée comme négligeable. Il s'en est pris, en tant qu'auteur ou coauteur, au bien d'autrui, par pur appât du gain facile, causant des dégâts considérables pour un butin minime.

Sa collaboration ne saurait être qualifiée de bonne, puisque, hormis à une reprise devant le MP, il a persisté à nier tout souvenir de la soirée, prétextant un abus d'alcool à l'évidence inexistant.

L'appelant n'a par ailleurs manifesté aucun remord, n'a pas présenté d'excuses, et n'a donné suite à aucune des convocations qui lui ont été adressées, contrairement à ses engagements.

Il a de nombreux antécédents en tant que mineur, y compris spécifiques, et a récidivé postérieurement aux faits objets de la présente procédure, en se rendant coupable, six mois plus tard, d'actes de violence avec usage ou menace d'une arme suivie d'incapacité supérieure à huit jours.

Ces éléments commandent le prononcé d'une peine privative de liberté, ce d'autant que sa conclusion tendant au prononcé d'une peine pécuniaire n'est soutenue par aucune argumentation et qu'il reconnaît lui-même être dépourvu des moyens financiers pour en assumer, cas échéant, le paiement.

Cela étant, l'appelant paraît s'être assagi et, comme il disait alors le vouloir, "avoir changé de vie" : plus aucune infraction n'est signalée depuis son déménagement en Bretagne ; sa vie familiale semble stable ; il travaille et suit une formation, ce qui n'était pas le cas depuis trois ans lors de son arrestation. Il convient donc d'en tenir compte dans la fixation de la peine.

Le premier juge a retenu que la peine de base pour la dénonciation calomnieuse, infraction abstraitement la plus grave, devait être fixée à 60 jours, puis être aggravée de 50 jours (peine hypothétique : 60 jours) pour le vol, de 20 jours (peine hypothétique : 30 jours) pour la violation de domicile et de 20 jours (peine hypothétique : 30 jours) pour le dommage à la propriété.

Ces chiffres sont adéquats au vu des critères de l'art. 47 CP et des éléments décrits ci-dessus. L'accusation de dénonciation calomnieuse étant abandonnée, il se justifie donc d'infliger à l'appelant une peine privative de liberté de 100 jours, correspondant à 60 jours pour le vol, majorés de 40 jours pour la violation de domicile et le dommage à la propriété.

L'octroi du sursis, au demeurant acquis à l'appelant en raison de l'interdiction de la reformation in pejus, et dont les conditions sont réalisées, sera confirmé.

Il n'y a pas lieu de réduire le délai d'épreuve, fixé par le TP à trois ans.

4. 4.1. Conformément à l'art. 66a al. 1 CP, le juge expulse un étranger du territoire suisse pour une durée de cinq à quinze ans s'il est reconnu coupable de l'une des infractions énumérées aux let. a à o, notamment en cas de condamnation pour cambriolage (vol [art. 139 CP] en lien avec une violation de domicile [art. 186 CP]) (let. d).

Il peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse (al. 2).

4.2. Dans le cas présent, l'appelant ne conteste pas son expulsion, obligatoire, et rien ne s'oppose à son prononcé.

Le jugement entrepris sera donc confirmé sur ce point.

4.3. Il n'y a pas lieu d'étendre la mesure d'expulsion prononcée à l'ensemble de l'espace Schengen, le prévenu étant ressortissant d'un État membre.

5. Les frais de la procédure sont mis à la charge des parties dans la mesure où elles ont obtenu gain de cause ou succombé. La partie qui retire son appel est considérée avoir succombé (art. 428 al. 1 CPP).

Un quart des frais de la procédure d'appel, comprenant un émolument de CHF 1'000.-, sera ainsi mis à charge de C______, qui a retiré son appel, le solde étant laissé à la charge de l'État.

Pour tenir compte de l'acquittement de A______ du chef de dénonciation calomnieuse, il y a lieu de revoir la clé de répartition des frais de première instance, dont seul un quart sera mis à sa charge, l'autre quart étant laissé à celle de l'État et le solde à celle de C______.

6. 6.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique.

Cette dernière disposition prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire de CHF 200.- pour un chef d'études, débours de l'étude (let. c). En cas d'assujettissement, l'équivalent de la TVA est versé en sus.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3). Sont également inclus les documents ne nécessitant pas ou peu de motivation ou autre investissement particulier en termes de travail juridique, telle la déclaration d'appel (ordonnance de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2014.51 du 21 novembre 2014 consid. 2.1 ; décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.165 du 24 janvier 2014 consid. 4.1.3 et BB.2013.127 du 4 décembre 2013 consid. 4.2).

Des exceptions demeurent possibles pour des documents particulièrement volumineux ou nécessitant un examen poussé, charge à l'avocat de justifier l'ampleur des opérations dont la couverture ne serait pas assurée par le forfait (AARP/181/2017 du 30 mai 2017 consid. 8.2.3 ; AARP/187/2017 du 18 mai 2017 consid. 7.2 ; AARP/435/2016 du 24 octobre 2016 consid. 6.2.2).

6.2. À l'aune de ces principes, il y a lieu de retrancher de l'état de frais produit par MB______, défenseur d'office de A______, les postes liés à la prise de connaissance des décisions et documents divers, ainsi que la rédaction de la déclaration d'appel (1h10). Compte tenu de la faible ampleur du dossier et de l'absence de difficulté juridique, il convient par ailleurs de réduire le temps consacré à la rédaction du mémoire d'appel (six pages, hors page de garde) de 4h00 à 3h00.

En conclusion, sa rémunération sera arrêtée à CHF 775.45 (TTC), correspondant à 3h00 heures d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 600.-) plus la majoration forfaitaire de 20 % (CHF 120.-) et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% (CHF 55.45).

6.2. Me E______, défenseur d'office de C______, n'a pas produit d'état de frais pour la procédure d'appel.

Compte tenu de la faible ampleur de l'activité déployée (cinq courriers, dont la déclaration d'appel et une demande de prolongation de délai, tous signés par des tiers), il sera considéré qu'il y a renoncé.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Reçoit les appels formés par A______ et C______ contre le jugement JTDP/1241/2021 rendu le 7 octobre 2021 par le Tribunal de police dans la procédure P/5130/2017.

Prends acte du retrait de l'appel de C______.

Admet partiellement l'appel formé par A______.

Annule ce jugement en ce qu'il concerne A______.

Et statuant à nouveau :

Acquitte A______ du chef de dénonciation calomnieuse (art. 303 ch. 1 CP).

Déclare A______ coupable de vol (art. 139 ch. 1 CP), de dommages à la propriété (art. 144 al. 1 CP) et de violation de domicile (art. 186 CP).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 100 jours, sous déduction de deux jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Le met au bénéfice du sursis et fixe le délai d'épreuve à trois ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de cinq ans (art. 66a al. 1 let. d CP).

Dit que la peine prononcée avec sursis n'empêche pas l'exécution de l'expulsion durant le délai d'épreuve.

Condamne A______ au quart des frais de la procédure de première instance, arrêtés en totalité à CHF 1'994.-, soit CHF 498.50, l'autre quart étant laissé à charge de l'État.

Prend acte que l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseur d'office de A______, pour la procédure préliminaire et de première instance, a été fixée à CHF 3'704.90 (art. 135 CPP).

Condamne C______ au quart des frais de la procédure d'appel en CHF 1'295.-, soit CHF 323.75, et laisse le solde à charge de l'État.

Arrête à CHF 775.45 (TTC) le montant des frais et honoraires de Me B______, défenseur d'office de A______, pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, à l'Office cantonal de la population et des migrations et au Secrétariat d'État aux migrations.

 

Le greffier :

Alexandre DA COSTA

 

Le président :

Pierre BUNGENER

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

1'994.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

0.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

220.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

0.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'295.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

3'289.00