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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/6502/2021

AARP/37/2023 du 09.02.2023 sur JTDP/408/2022 ( PENAL ) , ADMIS

Descripteurs : INTERPRÉTATION(PROCÉDURE);DISPOSITIONS PÉNALES DE LA LEI;DISPOSITIONS PÉNALES DE LA LAMAL;FAUX DANS LES CERTIFICATS
Normes : CP.251.ch1; LEI.118; LAMal.92.al1.leta
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/6502/2021 AARP/37/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 31 janvier 2023

 

Entre

A______, domicilié c/o B______, ______ [GE], comparant par Me C______, avocat,

appelant,

 

contre le jugement JTDP/408/2022 rendu le 21 avril 2022 par le Tribunal de police,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A.           a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 21 avril 2022, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a reconnu coupable de séjour illégal (pour les périodes de juin 2015 au 3 octobre 2020 et du 29 janvier au 22 mars 2021 ; art. 115 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration [LEI]), d'exercice d'une activité lucrative sans autorisation (pour les périodes de juin 2015 au 3 octobre 2020 et du 29 janvier au 22 mars 2021 ; art. 115 al. 1 let. c LEI), de faux dans les titres (art. 251 ch. 1 du Code pénal suisse [CP]), de tentative de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 22 al. 1 CP cum art. 118 al. 1 LEI) et d'infraction à l'art. 92 al. 1 let. a de la loi sur l'assurance-maladie (LAMal), tout en l'acquittant de pornographie (art. 197 al. 4 et al. 4 2ème phrase CP), de séjour illégal (s'agissant de la période du 4 octobre 2020 au 28 janvier 2021 ; art. 115 al. 1 let. b LEI) et d'exercice d'une activité lucrative sans autorisation (s'agissant de la période du 4 octobre 2020 au 28 janvier 2021 ; art. 115 al. 1 let. c LEI).

Le TP a condamné l'intéressé à une peine pécuniaire de 180 jours-amende, à CHF 30.- le jour, sous déduction de deux jours-amende correspondant à deux jours de détention avant jugement, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans, à une amende de CHF 3'000.-, ainsi qu'aux trois-quarts des frais de la procédure fixés à CHF 1'385.-, y compris un émolument de jugement de CHF 300.-. Il a renoncé à prononcer son expulsion de Suisse. Diverses mesures de restitution et compensation ont en outre été ordonnées.

b. A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant, sous suite de frais, à son acquittement de faux dans les titres, de tentative de comportement frauduleux à l'égard des autorités et d'infraction à l'art. 92 al. 1 let. a LAMal, au prononcé d'une peine clémente ne devant pas dépasser 60 jours-amende à CHF 30.- l'unité avec sursis, ainsi qu'à l'annulation de sa condamnation au trois-quarts des frais de la procédure de première instance.

c. Selon l'acte d'accusation du 8 novembre 2021, il est encore reproché à A______ d'avoir séjourné et travaillé à Genève de juin 2015 au 3 octobre 2020 et du 29 janvier au 22 mars 2021, de ne pas s'être assuré pour le risque maladie auprès d'une assurance LAMal durant cette même période et d'avoir fourni des informations incorrectes à l'Office cantonal de la population et des migrations (OCPM) dans le but de favoriser sa demande de permis de séjour, celle-ci n'ayant toutefois pas abouti.

B. Les faits encore pertinents au stade de la procédure d'appel sont les suivants :

a. A______ est arrivé à Genève, en provenance du Kosovo, en 2011 dans le but d'y exercer une activité lucrative. Il réside de façon permanente en Suisse depuis 2015. Durant cette période il a notamment travaillé pour l'entreprise individuelle "D______", qui tenait alors la buvette dite "E______" située quai 1______ à Genève, puis pour les sociétés F______ Sàrl et G______ SA.

b. À l'époque où A______ a travaillé à la buvette "E______", D______ était titulaire du pouvoir de signature individuelle depuis le 22 juillet 2009 et H______ au bénéfice d'une procuration avec signature collective à deux depuis le 4 novembre 2010. L'entreprise individuelle "D______" a été radiée du registre du commerce au 21 novembre 2017 suite à une cessation d'exploitation.

H______ a poursuivi l'exploitation d'un stand de glace situé à proximité de 2______ en entreprise individuelle sous la raison de commerce "H______, E______ DE 2______", avec pouvoir de signature individuelle depuis le 11 mars 2015.

c. Le 16 octobre 2020, A______ a déposé auprès de l'OCPM une demande de permis (cas individuel d'extrême gravité) dans le cadre du programme de régularisation dit "PAPYRUS" lancé par le canton de Genève et le Secrétariat d'État aux migrations [ci-après : SEM].

À cette fin, l'intéressé a produit différents documents, dont notamment une attestation datée du 4 octobre 2020 signée par H______, selon laquelle il avait travaillé à "E______" pendant les Fêtes de Genève au cours des années 2011 à 2014, rédigée en ces termes : "Avec la présente lettre, j'atteste que Monsieur A______ (né le ______ 1993) a travaillé à E______ [au quai] 1______ de 2011 à 2014 pendant les fêtes de Genève. En tant que responsable de la Buvette de E______ j'ai travaillé avec M. A______ que j'ai connu comme un employé très sérieux et responsable qui travaille beaucoup et très bien. C'était un employé sur lequel j'ai toujours pu compter et je n'ai jamais eu des soucis avec lui.". En haut à gauche de la lettre est écrit "H______" et en-dessous "Buvette E______". En bas de la lettre figure le nom de H______ en caractères d'imprimerie suivi de sa signature manuscrite. L'intéressé a également produit à l'OCPM une attestation rédigée par B______ selon laquelle il résidait chez celui-ci à la rue 4______ no. ______ [code postal] I______ [GE] depuis le 18 mai 2020. Il a enfin produit divers documents mentionnant à titre d'adresse "A______, c/o J______, chemin 3______ no. ______ [code postal] Genève".

d. Par décision datée du 18 novembre 2020, la demande de permis de séjour de A______ a été rejetée par l'OCPM, qui lui a en outre annoncé qu'il comptait prononcer à son encontre une décision de renvoi et qu'il envisageait de transmettre son dossier au SEM afin que celui-ci juge de l'opportunité de prononcer une interdiction administrative d'entrée en Suisse. L'intéressé n'a pas contesté cette décision en justice.

e. Entre le mois de juin 2015 et le 22 mars 2021, A______ n'a pas été affilié à une assurance-maladie sociale suisse obligatoire.

f. Dans le cadre d'un contrôle, la police est intervenue le 22 mars 2021 dans l'appartement sis à la rue 4______ no. ______ où elle s'est trouvée en présence de A______ et de ses deux frères, K______ et L______, lesquels ont été immédiatement arrêtés.

g. À la police le 22 mars 2021, A______ a déclaré être venu en Suisse en 2011 pour y travailler, tout en retournant régulièrement au Kosovo. Depuis 2015, il avait vécu sans interruption à Genève, bien qu'il ait changé plusieurs fois de domicile. Depuis son arrivée à Genève, il avait notamment travaillé à E______ [au quai] 1______, dans une crêperie à M______ [VD], à N______, dans une pizzeria et, enfin, en tant qu'aide-cuisinier au restaurant G______. Il a confirmé ces déclarations au Ministère public (MP) le 23 mars 2021 et devant le TP le 22 mars 2022. À cette date, il a aussi précisé qu'il avait à plusieurs reprises tenté de conclure une assurance-maladie LAMal, mais que le courtier contacté lui avait dit qu'il ne pouvait pas s'affilier à une telle assurance sans permis de séjour.

h. Entendu par le TP le 22 mars 2022, H______ a affirmé que c'était bien lui qui avait signé l'attestation datée du 4 octobre 2020 portant son nom et que son contenu était conforme à la réalité. La patronne de la buvette dite "E______" était D______, mais il figurait au registre du commerce car c'était lui qui détenait la patente. Il a en outre précisé que c'était en tant que collègue, et non en tant que chef de la buvette, que A______ lui avait demandé de signer une telle attestation.

C. a. Entendu par la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR), A______ a notamment déclaré qu'il avait contacté les syndicats et appris qu'il fallait justifier d'un séjour de dix ans en Suisse pour obtenir une autorisation de séjour "PAPYRUS". On lui avait déconseillé d'agir en ce sens car il ne possédait pas assez de preuves. Il avait toutefois estimé que, s'il arrivait à démontrer qu'il était en Suisse depuis 2011, il pourrait justifier des années nécessaires une fois la procédure arrivée à son terme. Contrairement à ce qu'avait indiqué son frère K______, également prévenu dans le cadre de la procédure, il avait habité chez son cousin à la rue 4______ aux I______ dès le mois de mai 2020. Auparavant, il avait vécu en colocation à divers endroits. Il avait demandé une attestation à H______ car il s'agissait de son ami et de la seule personne de contact à "E______". De plus, ce dernier avait été le responsable de la buvette et pouvait dès lors attester de son emploi aux dates mentionnées.

b.a. Par la voix de son conseil, A______ fait valoir que les éléments constitutifs des art. 251 ch. 1 et art. 22 cum 118 al. 1 LEI ne sont pas réalisés. En effet, il n'avait pas voulu produire un faux document afin de tromper l'OCPM, mais uniquement prouver qu'il était bien établi sur le territoire suisse. Le contenu de l'attestation rédigée par H______ pour "E______" était en outre conforme à la vérité et lui-même ignorait que le prénommé n'avait pas la qualité pour signer une telle attestation au nom de cet établissement. De plus, il avait essayé de s'assurer à la LaMal en contactant pour ce faire des courtiers en assurances, mais il était impossible d'y parvenir sans attestation de domicile, et ce alors même que lorsqu'il travaillait, il avait payé ses charges sociales. L'intention de ne pas s'affilier faisait donc défaut.

b.b. Le MP conclut à la confirmation du jugement attaqué. Il n'a pas déposé d'appel joint.

D. A______ est né le ______ 1993 en Macédoine, pays dont il est ressortissant et où vit toute sa famille, à l'exception de son frère K______, qui tente lui aussi d'obtenir un titre de séjour en Suisse. Sans enfant, il vit avec O______, Suissesse avec laquelle il s'est marié le ______ 2022. Il dispose depuis lors d'une attestation temporaire, valable six mois, lui permettant de séjourner en Suisse et d'effectuer les démarches pour obtenir un permis de séjour durable. Actuellement, il est étudiant en troisième année dans le cadre d'une formation suivie à distance avec une école en Macédoine pour obtenir un titre de physiothérapeute. Sans emploi, il vit grâce aux revenus réalisés par son épouse, assistante sociale.

L'extrait de son casier judiciaire suisse est vierge.

E. MC______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, cinq heures et cinquante-cinq minutes d'activité d'avocat collaborateur hors débats d'appel, lesquels ont duré une heure et quinze minutes.

En première instance, MC______ a été indemnisée à hauteur de 19 heures et 50 minutes d'activité.

EN DROIT :

1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CEDH) et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse (Cst.) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves (ATF 145 IV 154 consid. 1.1 ; 127 I 38 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_86/2019 du 8 février 2019 consid. 1.1).

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation ; le principe est violé lorsqu'il résulte du jugement que, pour être parti de la fausse prémisse qu'il incombait à l'accusé de prouver son innocence, le juge l'a condamné parce qu'il n'avait pas apporté cette preuve (ATF 127 I 38 consid. 2a ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_47/2018 du 20 septembre 2018 consid. 1.1 ; 6B_61/2015 du 14 mars 2016 consid. 3).

Le principe de la libre-appréciation des preuves implique qu'il revient au juge de décider ce qui doit être retenu comme résultat de l'administration des preuves en se fondant sur l'aptitude des éléments de preuve à prouver un fait au vu de principes scientifiques, du rapprochement des divers éléments de preuve ou indices disponibles à la procédure, et sa propre expérience (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1295/2021 du 16 juin 2022 consid. 1.2) ; lorsque les éléments de preuve sont contradictoires, le tribunal ne se fonde pas automatiquement sur celui qui est le plus favorable au prévenu (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1295/2021 du 16 juin 2022 consid. 1.2 ; 6B_477/2021 du 14 février 2022 consid. 3.1 ; 6B_1363/2019 du 19 novembre 2020 consid. 1.2.3). Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe de la présomption d'innocence interdit cependant au juge de se déclarer convaincu d'un fait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective de l'ensemble des éléments de preuve recueillis laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence d'un tel fait ; des doutes abstraits ou théoriques, qui sont toujours possibles, ne suffisent en revanche pas à exclure une condamnation (ATF 145 IV 154 consid. 1.1 ; 144 IV 345 consid. 2.2.3.2 et 2.2.3.3 ; 138 V 74 consid. 7 ; 127 I 38 consid. 2a). Lorsque dans le cadre du complexe de faits établi suite à l'appréciation des preuves faite par le juge, il existe plusieurs hypothèses également probables, le juge pénal doit choisir la plus favorable au prévenu (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_477/2021 du 14 février 2022 consid. 3.1).

3. 3.1. L'art. 251 ch. 1 CP punit celui qui, dans le dessein de se procurer un avantage illicite, aura fait usage d'un titre faux pour tromper autrui.

L'art. 251 CP vise tant le faux matériel, lorsque l'auteur réel d'un document ne correspond pas à l'auteur apparent, que le faux intellectuel, qui consiste dans la constatation d'un fait inexact, en ce sens que la déclaration contenue dans le titre ne correspond pas à la réalité (ATF 146 IV 258 consid. 1.1 ; 142 IV 119 consid. 2.1 ; 138 IV 130 consid. 2.1 ; 132 IV 57 consid. 5.1). Le document faux doit constituer un titre au sens de l'art. 110 ch. 4 CP, à savoir un écrit, signe ou enregistrement destiné et propre à prouver un fait ayant une portée juridique. Cette aptitude peut résulter de la loi ou des usages commerciaux (ATF 142 IV 119 consid. 2.2 ; 132 IV 57 consid. 5.1). Dans le cas d'un faux matériel, le faussaire crée ainsi un titre qui trompe sur l'identité de celui dont il émane en réalité (ATF 132 IV 57 consid. 5.1.1 ;
128 IV 265 consid. 1.1.1). Lorsqu'une personne utilise son propre nom pour créer un titre en se prévalant d'une qualité d'organe d'une société, laquelle est fictive, il en résulte une divergence entre auteur apparent et auteur réel du titre et il existe donc un faux matériel (arrêt du Tribunal fédéral 6B_473/2016, du 22 juin 2017 consid. 4.2.2).

Sur le plan subjectif, le faux dans les titres est une infraction intentionnelle. L'intention doit porter sur tous les éléments constitutifs ; le dol éventuel suffit (ATF 141 IV 369 consid. 7.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_261/2020, 6B_270/2020 du 10 juin 2020 consid. 4.2 ; 6B_891/2018 du 31 octobre 2018 consid. 3.5.1). Ainsi, l'auteur doit être conscient que le contenu du titre concerné ne correspond pas à la vérité. En outre, il doit avoir voulu utiliser le titre en le faisant passer pour véridique, ce qui présuppose l'intention de tromper autrui (ATF 141 IV 369 consid. 7.4 ;
138 IV 130 consid. 3.2.4 ; 135 IV 12 consid. 2.2). L'art. 251 CP exige de surcroît un dessein spécial, qui peut se présenter sous deux formes, soit le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui ou le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite (ATF 138 IV 130 consid. 3.2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_223/2012 du 14 décembre 2012 consid. 2.4).

3.2. En l'espèce, il est reproché à l'appelant d'avoir joint à sa demande d'autorisation de séjour auprès de l'OCPM une attestation écrite datée du 4 octobre 2020 et signée par H______, alors que celui-ci ne disposait pas d'un pouvoir de signature individuelle.

Ce document visait notamment à attester de la réalité du travail de l'appelant au stand de glace dit "E______", fait susceptible d'avoir une portée juridique. Une telle attestation, rédigée par un responsable, ayant ou non la qualité d'organe, apparaît propre à prouver un tel fait selon les usages de la vie juridique. Il peut donc être qualifié de titre (cf. art. 110 al. 4 CP). On peut en revanche douter qu'un tel document dispose de la crédibilité accrue nécessaire à la commission d'un faux intellectuel.

Il ressort de l'instruction de la cause qu'à l'époque où l'appelant y a travaillé, le stand de glace dit "E______" était exploité par D______, titulaire de l'entreprise individuelle dont la raison de commerce était "D______". Contrairement à ce qu'a retenu le TP, l'attestation du 4 octobre 2020 ne laisse pas indûment croire qu'elle est rédigée au nom de cette entreprise puisqu'elle n'est pas signée au nom de celle-ci. Cela alors même que l'art. 954a du Code des obligations (CO) impose en principe un tel usage pour la correspondance d'une entreprise individuelle. Au contraire, le contenu et la signature de cette attestation permettent de retenir que son auteur est H______, qui l'a signée en son nom propre. Or, en tant qu'employé détenteur de la patente responsable de "E______", il était loisible à H______ de rédiger une telle attestation en son nom propre en précisant qu'elle concernait ladite buvette.

En outre, les éléments de preuve au dossier ne permettent pas de conclure que l'appelant aurait intentionnellement cherché à tromper l'OCPM, ni même qu'il avait connaissance du fait que H______ n'avait pas qualité pour représenter l'entreprise seul, mais disposait uniquement d'un pouvoir de cosignature. Cela vaut d'autant plus que cette entité a coexisté, entre le 11 mars 2015 et le 21 novembre 2017, avec l'entreprise individuelle "H______, E______ DE 2______" pour laquelle H______ disposait d'un pouvoir de signature individuelle et que seule la seconde existait encore au moment où l'attestation a été signée.

En conséquence, les conditions d'une infraction de faux matériel dans les titres ne sont pas remplies. Rien ne laisse par ailleurs penser que le contenu de cette attestation serait contraire à la vérité. L'accusation ne prétend d'ailleurs pas le contraire. L'existence d'un faux intellectuel est donc également exclue.

Les éléments constitutifs de l'infraction de faux dans les titres font donc défaut. L'appelant sera ainsi acquitté de ce chef d'accusation et le jugement entrepris réformé sur ce point.

4. 4.1.1. Selon l'art. 118 al. 1 LEI, quiconque induit en erreur les autorités chargées de l'application de la présente loi en leur donnant de fausses indications ou en dissimulant des faits essentiels et obtient, de ce fait, frauduleusement une autorisation pour lui ou pour un tiers, ou évite le retrait d'une autorisation, est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire.

L'auteur doit avoir un comportement frauduleux qui induit l'autorité en erreur relativement à un fait essentiel, ce qui amène celle-ci à accorder ou à ne pas retirer une autorisation ; il doit ainsi exister un lien de causalité adéquate entre la tromperie et l'octroi de l'autorisation de séjour au sens que si l'autorité avait eu connaissance de la vérité, elle n'aurait pas délivré ladite autorisation (AARP/327/2021 du 19 octobre 2021 consid. 2.2.1). Lorsqu'une personne fournit des informations incorrectes à l'autorité mais que celles-ci ne sont d'emblée pas de nature à avoir une influence sur l'octroi d'une autorisation, la condition de fait essentiel n'est pas remplie et l'infraction de l'art. 118 al. 1 LEI n'est pas réalisée (arrêts du Tribunal fédéral 6B_838/2018 du 13 janvier 2022 consid. 5.1 ; 6B_833/2018 du 11 février 2019 consid. 1.5.2 ; 6B_72/2015 du 27 mai 2015 consid. 2.2 ; 6B_497/2010 du 25 octobre 2010 consid. 1.1). Le résultat de l'infraction se produit lorsque l'autorisation de séjour est accordée ; à défaut, il s'agit d'une tentative (AARP/309/2022 du 6 octobre 2022 consid. 2.3.2 ; AARP/179/2022 du 15 juin 2022 consid. 2.1.1).

L'infraction de comportement frauduleux à l'égard des autorités est une infraction intentionnelle ; le dol éventuel suffit (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2018 du janvier 2022 consid. 5.1 ; voir également : AARP/309/2022 du 6 octobre 2022 consid. 2.3.2 ; AARP/179/2022 du 15 juin 2022 consid. 2.1.2).

4.1.2. L'opération dite "PAPYRUS", qui a pris fin au 31 décembre 2018, a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes d'un pays de l'UE/AELE, bien intégrées et répondant à différents critères, à savoir : avoir un emploi, être indépendant financièrement, ne pas avoir de dettes, avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum pour les familles avec enfants scolarisés ou sinon dix ans minimum, faire preuve d'une intégration réussie, et ne pas avoir de condamnation pénale autre que celle pour séjour illégal (ATA/1255/2022 du 13 décembre 2022 consid. 5 ; ATA/1153/2022 du 15 novembre consid. 7 ; ATA/878/2022 du 30 août 2022 consid. 7 ; ATA/679/2022 du 28 juin 2022 consid. 6).

4.2. En l'espèce, l'autorité précédente a retenu que la production par l'appelant tant de l'attestation de H______ du 4 octobre 2020 discutée plus haut, que de la lettre rédigée par B______ et de différentes pièces mentionnant pour adresse "A______, c/o J______, Chemin 3______ no. ______ [code postal] Genève", afin de soutenir sa demande de permis de séjour exceptionnel en lien avec l'opération de régularisation "PAPYRUS", était constitutive d'un comportement frauduleux. En effet, la première constituait un faux matériel et les autres contenaient des informations erronées.

Le fait qu'une personne potentiellement non-autorisée relate un fait exact n'est toutefois pas punissable au titre de l'art. 118 al. 1 LEI. Cette norme punit en effet le fait de fournir de fausses informations factuelles visant à tromper l'autorité en charge de l'octroi ou de la révocation des permis de séjour. Or, le fait qu'un titulaire d'une signature à deux, au lieu d'une signature individuelle, atteste de l'exercice d'une activité lucrative au cours d'une période donnée n'est pas de nature à avoir une influence sur l'octroi ou non d'un permis de séjour. Il en irait autrement si le contenu de cette attestation était mensonger. Comme mentionné plus haut, rien ne laisse penser que tel serait en l'occurrence le cas.

Le lieu de résidence exact à Genève de l'appelant du 1er janvier 2011 au 11 juin 2020 (date figurant sur la demande de permis de séjour adressée à l'OCPM) n'est par ailleurs pas déterminant eu égard à l'infraction de l'art. 118 LEI. En effet, ce lieu de domiciliation exact n'était pas susceptible de modifier la situation juridique de l'appelant s'agissant de sa demande d'octroi d'un permis de séjour dans le cadre du programme dit "PAPYRUS". À cet égard, seule était en effet pertinente la durée de son séjour à Genève, voire sur le territoire suisse.

Selon les déclarations faites à la police par l'appelant, celui-ci est venu travailler en Suisse en 2011, tout en retournant régulièrement au Kosovo. Depuis 2015, il a vécu sans interruption à Genève, bien qu'il ait changé plusieurs fois d'adresse. Interrogé par le TP, l'appelant a maintenu qu'il se trouvait principalement à Genève pendant la période pertinente. Il a réitéré cette version devant la Chambre de céans. Aucun élément au dossier ne laisse penser que ces affirmations seraient mensongères. Or, le fardeau de la preuve d'un fait défavorable au prévenu repose sur l'accusation. En conséquence, il n'est pas établi que l'appelant ait menti en affirmant à l'OCPM que Genève constituait le centre de sa vie privée et professionnelle depuis 2011. L'adresse exacte de sa résidence est dans ce cadre sans importance.

Sa condamnation pour séjour illégal en Suisse depuis juin 2015, atteste au demeurant qu'il demeurait dans ce pays durant cette période, conformément à ce qu'il a déclaré à l'OCPM.

L'élément constitutif objectif de comportement trompeur sur un fait essentiel fait donc défaut. L'appelant sera ainsi acquitté du chef de tentative de comportement frauduleux à l'égard des autorités, et le jugement entrepris réformé sur ce point également.

5. 5.1.1. Selon l'art. 92 al. 1 let. a LAMal, quiconque se dérobe, partiellement ou totalement, à l'obligation de s'assurer, par des indications fausses ou incomplètes ou de toute autre manière, commet un délit passible des peines de droit.

En l'occurrence, il est uniquement reproché à l'appelant de ne pas avoir effectivement cherché à s'assurer à une assurance LAMal. Savoir si cette disposition réprime également un comportement purement passif, soit une omission, n'a apparemment jusqu'alors pas été tranché par la jurisprudence.

5.1.2. Une norme de droit suisse doit être interprétée en premier lieu sur la base de sa lettre (interprétation littérale). Si celle-ci n'est pas absolument claire, soit si plusieurs interprétations de son texte sont possibles ou lorsque l'application d'autres méthodes d'interprétations font apparaître des éléments significatifs qui laissent penser que le vrai sens de la norme en cause diffère de celui de sa lettre claire, le juge recherchera la véritable portée de la norme en la dégageant de sa relation avec d'autres dispositions, de son contexte (interprétation systématique), du but poursuivi, singulièrement de l'intérêt protégé (interprétation téléologique), ainsi que de la volonté de son auteur telle qu'elle ressort notamment des travaux préparatoires (interprétation historique) (ATF 148 V 334 consid. 4 ; 148 IV 265 consid. 1.4 ; 148 IV 247 consid. 3 ; 148 IV 148 consid. 7.3.1).

5.1.2.1. La lettre de l'art. 92 al. 1 let. a LAMal précise que le comportement punissable est constitué par le fait de se dérober, partiellement ou totalement, à l'obligation de s'assurer, par des indications fausses ou incomplètes ou de toute autre manière ("wer sich durch unwahre oder unvollständige Angaben oder in anderer Weise der Versicherungspflicht ganz oder teilweise entzieht" ; "chiunque mediante indicazioni false o incomplete, oppure altrimenti, si sottrae in tutto o in parte all'obbligo di assicurarsi."). La lettre de cette norme semble donc exiger un comportement actif, soit le fait d'induire en erreur l'autorité afin de se soustraire à son obligation d'assurance. En effet, si la seule omission de s'assurer était punissable, la précision "par des indications fausses ou incomplètes ou de toute autre manière", ne serait pas nécessaire. On ne peut toutefois retenir que la lettre de l'art. 92 al. 1 let. a LAMal est absolument claire.

5.1.2.2. Selon le message du conseil fédéral relatif à la LAMal, le futur art. 92 LAMal (alors l'art. 83 du projet) a été modelé sur l'art. 112 de la loi fédérale sur l'assurance-accidents [LAA] (FF 1992 I 77, p. 190), lequel est lui-même une reprise de l'art. 87 de la Loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants [LAVS] (FF 1976 III 143, p. 231), qui contient une formulation semblable. La lettre de l'art. 92 al. 1 let. a LAMal correspond par ailleurs à celle du projet du Conseil fédéral.

Le droit social suisse contient plusieurs normes de droit pénal accessoire analogues à l'art. 92 al. 1 let. a LAMal. L'art. 31 al. 1 de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI [LPC] est particulièrement intéressant à cet égard car l'Assemblée fédérale a jugé utile d'expressément rajouter que la violation de son obligation de renseigner par un assuré était punissable (cf. art. 31 al. 1 let. d LPC), en sus de la tromperie de l'autorité par "des indications fausses ou incomplètes, ou de toute autre manière" (cf. art. 31 al. 1 let. a LPC), considérant comme insatisfaisante la situation qui prévalait jusqu'alors où "l'oubli délibéré d'annoncer un décès, un mariage ou un changement majeur de situation personnelle, économique ou autre" n'était pas punissable en tant que délit. Eu égard à l'art. 31 al. 1 LPC, l'omission est donc punie par l'art. 31 al. 1 let. d LPC, et la tromperie active par l'art. 31 al. 1 let. a LPC (ATAS/754/2022 du 29 août 2022 consid. 6.3.2). Une règle comparable à l'art. 31 al. 1 let. d LPC n'existe pas à l'art. 92 LAMal. De même, l'art. 87 LAVS ne rend pas punissable la seule omission de payer des cotisations ; la fourniture d'informations inexactes à l'autorité ne constituant qu'un exemple particulier de la tromperie de l'autorité que cette norme visait à réprimer (ATF 89 IV 167 consid. 1 ; Obergericht Zürich, SB180351 du 22 novembre 2018 consid. 3.4.1 ; U. KIESER, Rechtsprechung des Bundesgerichts zum AHVG (RBS), 4ème éd., Zurich 2020, n. 2 ad art. 87 LAVS ; F. FREY / HJ. MOSIMANN / S. BOLLINGER, OFK-AHVG/IVG Kommentar, Zurich 2018, n. 2 ad art. 87 LAVS). Enfin, l'art. 92 al. 1 let. a LAMal est particulièrement susceptible d'entrer en concours idéal avec l'infraction d'escroquerie de l'art. 146 CP dont il est particulièrement proche s'agissant de ses éléments constitutifs (en ce sens : S. DE VITO BIERI / M. DANNACHER, Basler Kommentar KVG, Bâle 2020, n. 5 et 7 ad art. 92 LAMal). Or, l'art. 146 CP ne punit pas la simple omission par l'administré d'informer l'autorité sociale (ATF 140 IV 206 consid. 6.3.2.2).

Les conséquences pécuniaires pour l'autorité d'une affiliation tardive à l'assurance font l'objet des art. 5 al. 2 LAMal et 8 de l'ordonnance sur l'assurance-maladie (OAMal), qui prévoient d'une part une absence de prise en charge (jusqu'à son affiliation) des frais médicaux de l'administré qui ne s'est pas assuré dans le délai légal, et, d'autre part, un supplément de prime d'un montant de 30 à 50% dès l'affiliation, et ce sur une durée équivalant au double de la durée du retard d'affiliation, mais au maximum de cinq ans (art. 8 al. 1 OAMal). Vu la sévérité de ces règles, il semble incohérent de conclure que le législateur fédéral aurait en outre voulu punir la simple omission de s'assurer en tant que délit pénal. La menace d'une telle sanction risquerait même d'avoir l'effet inverse de celui recherché, qui est que l'administré s'affilie et comble la perte financière potentielle engendrée par son affiliation tardive en payant un supplément de prime. Le but de l'art. 92 al. 1 let. a LAMal est donc de protéger l'obligation de vérité due par l'administré à l'autorité sociale (S. DE VITO BIERI / M. DANNACHER, op.cit., Bâle 2020, n. 6 ad art. 92 LAMal), et pas les intérêts financiers des assureurs LAMal.

5.1.2.3. Au vu ce qui précède, l'art. 92 al. 1 let. a LAMal doit être compris en ce sens que cette norme punit uniquement les actes actifs de tromperie, et en particulier le recours à des indications fausses ou incomplètes, menant à une absence d'affiliation. La simple omission de s'affilier à une assurance LAMal dans le délai légal fixé par les art. 3 al. 1 LAMal et 7 OAMal n'est en revanche pas réprimée par cette norme.

5.2. En l'espèce, dans la mesure où il est uniquement reproché à l'appelant de n'avoir pas effectué de démarches actives pour obtenir une assurance LAMal, soit une simple omission de s'affilier, il ne saurait être reconnu coupable de l'infraction visée à l'art. 92 al. 1 let. a LAMal. L'appelant sera dès lors acquitté de ce chef d'accusation, et le jugement entrepris réformé sur ce point.

6. 6.1.1. Lorsque différents types de peines peuvent être prononcés par le juge pénal, le choix de la sanction doit être opéré en tenant compte au premier chef de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention ; la faute de l'auteur n'est en revanche pas déterminante (ATF 147 IV 241 consid. 3.2 ; 144 IV 313 consid. 1.1.1). La peine pécuniaire constitue la sanction principale dans le domaine de la petite et moyenne criminalité, les peines privatives de liberté ne devant être prononcées que lorsque l'État ne peut garantir d'une autre manière la sécurité publique. Lorsque tant une peine pécuniaire qu'une peine privative de liberté entrent en considération et que toutes deux apparaissent sanctionner de manière équivalente la faute commise, il y a en règle générale lieu, conformément au principe de la proportionnalité, d'accorder la priorité à la première (ATF 144 IV 217 consid. 3.3.3 ; 135 IV 188 consid. 3.4.3).

6.1.2. S'agissant d'une peine pécuniaire selon l'art. 34 CP, sa fixation intervient en deux phases différentes. Le tribunal détermine d'abord le nombre des jours-amende en fonction de la culpabilité de l'auteur (al. 1). Il doit ensuite arrêter le montant du jour-amende en fonction de la situation personnelle et économique de l'auteur (al. 2). Le montant total de la peine pécuniaire résulte de la seule multiplication du nombre par le montant des jours-amende, les deux facteurs devant être fixés séparément dans le jugement (al. 4).

Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Celle-ci doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1 ; 136 IV 55 consid. 5.5, 5.6 et 5.7), ainsi que l'effet de la peine sur son avenir. L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2 ; 135 IV 130 consid. 5.3.1). L'absence d'antécédent a un effet neutre sur la fixation de la peine (ATF 141 IV 61 consid. 6.3.2 ; 136 IV 1 consid. 2.6.4).

6.1.3. Lorsque l'auteur est condamné au titre de plusieurs chefs d'accusation et que les peines envisagées pour chaque infraction prise concrètement sont de même genre (ATF 147 IV 225 consid. 1.3 ; 144 IV 313 consid. 1.1.1), l'art. 49 al. 1 CP impose au juge, dans un premier temps, de fixer la peine pour l'infraction abstraitement – d'après le cadre légal fixé pour chaque infraction à sanctionner – la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou atténuantes, et, dans un second temps, d'augmenter cette peine pour sanctionner chacune des autres infractions, en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.2 ; 144 IV 217 consid. 3.5.1). Si les sanctions envisagées concrètement ne sont pas du même genre, elles doivent être prononcées cumulativement (ATF 145 IV 1 consid. 1.2). La peine privative de liberté et la peine pécuniaire ne sont pas des sanctions du même genre (ATF
144 IV 313 consid. 1.1.1). De même, la peine pécuniaire est d'un genre différent de celui de l'amende (ATF 147 IV 471 consid. 5.2.5).

6.2. En l'occurrence, la faute de l'appelant n'est ni singulièrement faible, ni particulièrement importante. Elle peut être qualifiée de moyenne. La durée de son séjour illégal en Suisse a été longue. Ce séjour n'est pas fondé sur un mobile particulièrement honorable, puisque l'intéressé a recherché avant tout un bénéfice économique, au mépris des règles du droit des étrangers en vigueur.

En outre, il y a concours d'infractions entre l'infraction de séjour illégal et celle de travail illégal, facteur d'aggravation de la peine.

La situation personnelle de l'appelant correspond à celle d'une personne sans enfant vivant en Suisse sans permis de séjour et de travail, sans particularité notable. Il n'a pas d'antécédent et sa collaboration à la procédure a été bonne. Il en va de même de sa prise de conscience puisqu'il a cherché et cherche toujours à régulariser sa situation.

Compte tenu de ce qui précède et bien que les deux infractions à la LEI commises par l'appelant soient, abstraitement, d'égale gravité, il sera considéré que l'infraction la plus grave est celle de séjour illégal – celle-ci ayant nécessairement entraîné l'autre – (cf. AARP/381/2022 du 19 décembre 2022 consid. 3.7.2). Cette dernière infraction est adéquatement sanctionnée par une peine de base de 40 jours-amende et doit se voir accrue de 20 jours-amende pour tenir compte de l'infraction de travail illégal (peine hypothétique 40 jours-amende).

Il convient donc de réduire sa peine à 60 jours-amende à CHF 30.-, montant dont la quotité n'est pas contestée.

Le sursis accordé par le premier juge, dont les conditions sont réalisées, est acquis à l'appelant (cf. art. 391 al. 2 CPP et ATF 142 IV 89 consid. 2.1).

Il convient par ailleurs de renoncer à prononcer une peine accessoire sous la forme d'une amende au sens de l'art. 42 al. 4 CP. Une telle sanction vise en particulier à prévenir la récidive en joignant à une peine prononcée avec sursis une peine ferme à titre d'avertissement (ATF 146 IV 145 consid. 2.2 ; 134 IV 60 consid. 7.3.1). En l'espèce, au vu de la faible probabilité de récidive s'agissant d'un prévenu sans antécédent et en cours de régularisation auprès de l'OCPM suite à son mariage avec une Suissesse, ainsi que du temps écoulé depuis la commission de l'infraction, il n'apparaît pas nécessaire de prononcer une sanction ferme immédiate en sus de la peine pécuniaire prononcée à titre principal.

7. L'absence du prononcé d'une mesure d'expulsion pénale par l'autorité précédente est acquise à l'appelant (cf. art. 391 al. 2 CPP).

8. 8.1. L'appel ayant été admis, il ne sera pas perçu de frais (art. 428 al. 1 et 2 CPP a contrario).

8.2. Vu l'issue de la procédure d'appel, la part de l'appelant aux frais de la procédure préliminaire et de première instance sera réduite à CHF 346.25, et le solde de CHF 692.50 qui lui avait été imputé par le TP, laissé à charge de l'État (art. 428 al. 3 CPP). Cette réduction de deux tiers correspond à sa culpabilité et à la diminution de sa peine en comparaison avec celle qui lui avait été infligée en première instance.

9. En l'occurrence, l'état de frais produit par MC______, défenseur d'office de l'appelant, satisfait les exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale.

Sa rémunération pour la procédure d'appel sera partant arrêtée à CHF 1'470.11 correspondant à sept heures et dix minutes d'activité au tarif de CHF 150.-/heure (CHF 1'075.-), plus la majoration forfaitaire de 20% (CHF 215.-), le déplacement au Palais de justice de CHF 75.-, et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% (CHF 105.11).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTDP/408/2022 rendu le 21 avril 2022 par le Tribunal de police dans la procédure P/6502/2021.

L'admet.

Annule ce jugement en tant qu'il concerne A______.


Et statuant à nouveau
:

Acquitte A______ de faux dans les titres (art. 251 ch. 1 CP), de tentative de comportement frauduleux à l'égard des autorités en matière de permis de séjour (art. 22 al. 1 CP cum 118 al. 1 LEI) et de comportement frauduleux à l'égard des autorités en matière d'affiliation à la LAMal (art. 92 al. 1 let. a LAMal).

Prend acte de ce que le Tribunal de police a acquitté A______ de pornographie (art. 197 al. 4 et al. 4 2ème phrase CP), de séjour illégal (s'agissant de la période du 4 octobre 2020 au 28 janvier 2021 ; art. 115 al. 1 let. b LEI) et d'exercice d'une activité lucrative sans autorisation (s'agissant de la période du 4 octobre 2020 au 28 janvier 2021 ; art. 115 al. 1 let. c LEI).

Déclare A______ coupable de séjour illégal (pour les périodes de juin 2015 au 3 octobre 2020 et du 29 janvier 2021 au 22 mars 2021 ; art. 115 al. 1 let. b LEI) et d'exercice d'une activité lucrative sans autorisation (pour les périodes de juin 2015 au 3 octobre 2020 et du 29 janvier 2021 au 22 mars 2021 ; art. 115 al. 1 let. c LEI).

Condamne A______ à une peine pécuniaire de 60 jours-amende, sous déduction de deux jours-amende correspondant à deux jours de détention avant jugement.

Fixe le montant du jour-amende à CHF 30.-.

Met A______ au bénéfice du sursis et fixe la durée du délai d'épreuve à trois ans (art. 42 et 44 CP).

Avertit A______ que s'il devait commettre de nouvelles infractions durant le délai d'épreuve, le sursis pourrait être révoqué et la peine suspendue exécutée, cela sans préjudice d'une nouvelle peine (art. 44 al. 3 CP).

Renonce à ordonner l'expulsion de Suisse de A______.

Ordonne la restitution à A______ du téléphone portable figurant sous chiffre 2 de l'inventaire n° 5______ au nom de A______.

Condamne A______ au paiement de CHF 346.25 au titre des frais de la procédure préliminaire et de première instance.

Compense à due concurrence la créance de l'État portant sur les frais de la procédure avec les valeurs patrimoniales séquestrées figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 5______ au nom de A______.

Prend acte de ce que le Tribunal de police a arrêté à CHF 4'332.80, TVA comprise, l'indemnité de procédure due à MC______, défenseur d'office de A______, pour la procédure préliminaire et de première instance.

Laisse les frais de la procédure d'appel à la charge de l'État.

Arrête à CHF 1'470.11, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de MC______, défenseur d'office de A______, pour la procédure d'appel.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police, au Secrétariat d'État aux migrations et à l'Office cantonal de la population et des migrations.

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

Le président :

Vincent FOURNIER

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).