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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3167/2021

ATAS/754/2022 du 29.08.2022 ( PC ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3167/2021 ATAS/754/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 29 août 2022

6ème Chambre

 

En la cause

 

Madame A______, domiciliée à GENÈVE

 

recourante

 

contre

 

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

 

intimé

 


EN FAIT

A. a. Madame A______ (ci-après : la bénéficiaire ou la recourante), est née en 1957 et réside dans le canton de Genève depuis le 16 juillet 1981.

Le fils de la bénéficiaire, Monsieur B______ (ci-après également : le fils de la bénéficiaire ou le fils de la recourante), né en 1985, réside à la même adresse que sa mère depuis sa naissance. Entre 2011 et 2017 il vivait toutefois en alternance chez sa mère et chez sa grand-mère et participait au paiement du loyer, dans la mesure de ses moyens, dans les deux cas. En effet, l’appartement de sa grand-mère était moins bruyant, ce qui constituait pour lui un atout important au regard de ses problèmes de santé.

b. La bénéficiaire est bénéficiaire d’une rente partielle de l’assurance-invalidité depuis le 1er décembre 2002. Elle bénéficie de prestations complémentaires AVS/AI depuis le 15 mai 2006.

c. Par courrier du 8 décembre 2011, le Service des prestations complémentaires genevois (ci-après : le SPC ou l’intimé) a transmis à la bénéficiaire une notice intitulée « communication importante » qui mentionnait l’obligation d’informer l’intimé de toute donation.

d. Le 5 juin 2012, la bénéficiaire a reçu sur son compte-épargne numéro 1______sis auprès de la banque C______ un virement de sa mère, Madame D______, d’un montant de CHF 50'000.-.

e. Par courrier du 6 décembre 2012, le SPC a transmis à la bénéficiaire une notice intitulée « communication importante » qui, comme celle de l’année précédente, mentionnait l’obligation d’informer l’intimé de toute donation.

f. La somme susmentionnée a fait l’objet de divers retraits au distributeur entre le 3 juillet 2013 et le 26 août 2013, à chaque reprise pour une somme ronde d’au moins CHF 1'000.-, et pour un montant total retiré de CHF 24'000.-. Entre le 17 février 2014 et le 31 décembre 2014, de nouveaux retraits ont été effectués, pour un total de CHF 26'000.-.

g. Dès l’année 2014, la bénéficiaire a été informée annuellement au mois de décembre par le SPC qu’elle devait lui annoncer tout changement de sa situation financière ou personnelle, et en particulier une éventuelle cohabitation avec un tiers.

B. a. Le fils de la bénéficiaire perçoit également une rente complète de l’assurance-invalidité depuis le mois de novembre 2016.

b. En date du 19 mai 2017, le SPC a reçu une demande de prestations complémentaires du fils de l’assurée. Sur la première page de ce formulaire, ce dernier a mentionné qu’il résidait rue E______ à Genève, et, en page cinq du même formulaire, il a précisé qu’il partageait son logement avec la bénéficiaire.

c. Par décision du 30 août 2018, le SPC a accepté la demande du fils de la bénéficiaire relative aux prestations complémentaires fédérales (ci-après : PCF) et aux prestations complémentaires cantonales (ci-après : PCC), mais uniquement avec effet dès le 1er juin 2018. Cette décision a été confirmée le 19 décembre 2019 après que M. B______ y a fait opposition.

d. Par arrêt ATAS/1264/2020 du 22 décembre 2020 la chambre de céans a réformé la décision susmentionnée et a retenu que le fils de la bénéficiaire avait droit à des prestations complémentaires à partir du 1er novembre 2016.

C. a. Au cours du mois d’août 2018, le SPC a procédé à la révision périodique du dossier de la bénéficiaire. Dans ce cadre, la base de données de l’Office cantonal de la population et des migrations (ci-après OCPM) a été consultée et les décisions d’imposition concernant la bénéficiaire pour les années 2010 à 2017 examinées. Par courrier du 21 août 2018, le SPC a en outre requis de la bénéficiaire qu’elle remplisse un formulaire de révision périodique et qu’elle y joigne diverses pièces.

b. En date du 26 octobre 2018, le SPC a reçu de la bénéficiaire le formulaire de révision complété. La bénéficiaire y indiquait que son fils partageait son logement. La bénéficiaire faisait également mention de divers comptes bancaires, y compris de son compte-épargne numéro 1______auprès de la C______. Divers documents étaient joints à ce formulaire, et en particulier un extrait de compte sur lequel figurait le versement de CHF 50'000.- mentionné plus haut.

c. Par courrier daté du 17 janvier 2019, le SPC a requis la production de diverses pièces complémentaires par la bénéficiaire, et en particulier de divers documents bancaires. Il a en outre demandé à la bénéficiaire si son fils avait habité avec elle entre 2012 et 2018, et si tel n’était pas le cas, qu’elle lui fournisse tous les justificatifs dont elle disposait en ce sens. Le SPC a enfin requis de la bénéficiaire qu’elle s’explique s’agissant du versement de CHF 50'000.- reçu sur son compte-épargne.

d. Suite à cette demande, la bénéficiaire a envoyé au SPC divers documents. Elle a en outre précisé que son fils avait résidé au Boulevard F______, chez sa grand-mère, au cours des années 2012 à 2017, et qu’il habitait depuis lors avec elle. S’agissant du montant de CHF 50'000.-, la bénéficiaire a précisé qu’il avait été utilisé, d’une part, pour subvenir aux besoins de base de son fils et pour financer des besoins quotidiens et, d’autre part, pour rembourser des créanciers de celui-ci.

e. Par courrier daté du 5 mars 2019, le SPC a requis la production de pièces complémentaires.

f. Par décision du 21 juin 2019, jointe à un courrier du 2 juillet 2019, le SPC a ordonné la restitution par la bénéficiaire d’un trop-perçu d’un montant total de CHF 41'422.- relatif à la période du 1er juillet 2012 au 30 juin 2019 inclus. Ce trop-perçu résultait, d’une part, d’une réduction du montant du loyer pris en considération à titre de dépenses reconnues, vu le partage de son logement avec son fils, et, d’autre part, de la prise en compte de la somme de CHF 50'000.- mentionnée plus haut, d’abord comme fortune, puis comme fortune dessaisie.

g. La bénéficiaire a fait opposition à cette décision le 1er août 2019. Elle a insisté sur le fait que son fils ne vivait pas avec elle mais chez sa grand-mère entre 2012 et 2017, et que la somme de CHF 50'000.- était destinée à son fils, et non à elle-même, et visait en particulier à rembourser des dettes de celui-ci. Elle a en outre soulevé que le montant du loyer retenu était incorrect, le montant réel étant plus élevé.

h. Par décision sur opposition du 19 juillet 2021, le SPC a réduit la somme à restituer pour la période du 1er novembre 2018 au 30 juin 2019 et a maintenu sa décision initiale pour le surplus, en retenant que la bénéficiaire devait lui restituer la somme de CHF 39'026.-.

D. a. Le 14 septembre 2021, la bénéficiaire a recouru contre la décision sur opposition du SPC en concluant en substance à l’absence de restitution, en particulier pour la période antérieure à 2016.

b. Le 6 octobre 2021, le SPC s’est brièvement déterminé en concluant au maintien intégral de sa décision sur opposition.

c. Le 5 novembre 2021, le fils de la recourante a déposé auprès de la chambre de céans des explications complémentaires.

d. Le 12 novembre 2021, la recourante a répliqué aux déterminations de l’intimé.

e. Le 12 janvier 2022, la chambre de céans a requis de la recourante qu’elle produise des documents complémentaires, et en particulier des relevés de compte relatifs au compte bancaire n. 1______pour la période du 1er juin 2012 au 30 juin 2019 inclus. Ces documents ont été produits à la procédure en date du 7 février 2022.

f. Une audience de comparution personnelle des parties s’est tenue le 14 mars 2022. Dans le cadre de celle-ci, le fils de la recourante a également été entendu et une pièce complémentaire a été produite. À la fin de l’audience, la chambre de céans a fixé un délai au 28 mars 2022 à celui-ci pour produire les justificatifs des dépenses de la somme de CHF 50'000.- qu’il avait évoqués lors de son audition.

g. Sur requête de la chambre de céans, l’intimé a produit le 15 mars 2022 le formulaire de requête de prestations complémentaires du fils de la recourante.

h. Le délai fixé au fils de la recourante a été prolongé à deux reprises. Il a échu au 13 mai 2022 sans avoir été utilisé.

 

 

 

 

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC -RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

Interjeté dans les formes prévues par la loi (cf. art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA-GE - E 5 10]) et compte tenu de la suspension du 15 juillet au 15 août inclus (cf. art. 60 LPGA et art. 63 al. 1 LPA-GE), le recours est recevable.

2.             Le litige porte sur le bienfondé de la demande de restitution de CHF 39'026.-.

2.1 La recourante conteste, d’une part, la prise en compte par l’intimé d’un montant de CHF 50'000.- reçu de sa mère sur son compte bancaire auprès de la C______ en date du 5 juin 2012. Selon la recourante, cet argent constitue un don de sa mère à son petit-fils, M. B______. S’il a été versé sur son compte en banque, c’est uniquement parce que son fils ne possédait, à cette époque, pas de compte bancaire en son nom propre. L’argent a d’ailleurs été dépensé pour les paiements courants de M. B______, ainsi que pour rembourser des prêts contractés par celui-ci auprès d’amis ainsi que de son père. La recourante conteste, d’autre part, la réduction du montant pris en compte au titre de loyer en raison de l’existence d’une cohabitation avec son fils. Selon la recourante, ce dernier a en effet résidé chez sa grand-mère depuis la fin de l’année 2011 et l’année 2017.

2.2 Du point de vue du SPC, dès lors que l’argent a été versé sur un compte bancaire appartenant à la recourante, celle-ci en était la bénéficiaire, ce d’autant qu’aucun élément ne permet d’établir que l’argent a été utilisé à l’entretien de son fils. La recourante aurait donc dû l’annoncer au SPC dès 2012. La prescription pénale de sept ans trouvant application, la restitution peut ainsi porter sur une période rétroagissant au 1er juillet 2012. S’agissant de la cohabitation de M. B______ avec sa mère, elle ressort des données de l’OCPM. Les déclarations de la recourante et de son fils ne sont pas de nature à remettre ces informations en cause. Dans ce cas également, la prescription pénale trouve application.

3.             Le juge doit appliquer le droit matériel qui était en vigueur au jour où les faits déterminants pour trancher le litige en cause se sont produits (ATF 148 V 21 consid. 5.3 ; ATF 144 V 210 consid. 4.3.1).

En l’occurrence, la période déterminante dans le cas d’espèce court du mois de juillet 2012 au mois de juin 2019. La réforme des prestations complémentaires du 22 mars 2019, en vigueur dès le 1er janvier 2021, n’est donc pas applicable.

Les dispositions de la LPC et de l’OPC-AVS/AI seront en conséquence citées dans leur teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020.

4.             Selon l’art. 25 al. 1 LPGA, applicables aux prestations complémentaires fédérales, les prestations sociales touchées indûment doivent être restituées. L’art. 24 al. 1 LPCC prévoit une règle similaire pour les prestations complémentaires cantonales.

4.1 Selon l’art. 11 al. 1 LPC, les revenus déterminants comprennent notamment
le produit de la fortune mobilière et immobilière (let. b) et un quinzième de la fortune nette dans la mesure où elle dépasse CHF 37’500.- pour les personnes seules (let. c).

Par fortune au sens de cette disposition, il faut comprendre toutes les choses mobilières et immobilières ainsi que les droits personnels et réels qui sont la propriété de l’assuré et qui peuvent être transformés en argent liquide (par le biais d’une vente ou d’un nantissement par exemple) pour être utilisés ; font ainsi notamment partie de la fortune : les gains à la loterie, la valeur de rachat d’une assurance-vie, l’épargne, les actions, les obligations, les parts à des successions, les versements en capital d’assurances, l’argent liquide, ou encore les prêts accordés (ATAS/442/2022 du 18 mai 2022 consid. 6.2 ; ATAS/359/2022 du 21 avril 2022 consid. 8.2 ; ATAS/314/2022 du 7 avril 2022 consid. 5.2). Il suffit que l’assuré puisse effectivement disposer de l’élément de fortune en cause (ATF 146 V 331 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_831/2016 du 11 juillet 2017 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_333/2016 du 3 novembre 2016 consid. 4.3.1). L’origine d’un élément de fortune n’a en revanche pas d’importance (arrêt du Tribunal fédéral 9C_612/2012 du 28 novembre 2012 consid. 3.2). L’art. 11 al. 1 let. b LPC englobe tous les revenus de la fortune mobilière et immobilière, y compris le produit transférable en Suisse d’une fortune qui se trouve à l’étranger (ATAS/437/2022 du 17 mai 2022 consid. 8.1.1 ; ATAS/368/2018 du 30 avril 2018 consid. 6b).

4.2  

4.2.1 Selon l’art. 11 al. 1 let. g LPC, les revenus déterminants comprennent les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s’est dessaisi.

Selon l’art. 17a OPC-AVS/AI, la part de fortune dessaisie à prendre en compte (art. 11, al. 1, let. g, LPC) est réduite chaque année de 10 000 francs (al. 1) ; La valeur de la fortune au moment du dessaisissement doit être reportée telle quelle au 1er janvier de l’année suivant celle du dessaisissement, pour être ensuite réduite chaque année (al. 2) ; Est déterminant pour le calcul de la prestation complémentaire annuelle le montant réduit de la fortune au 1er janvier de l’année pour laquelle la prestation est servie (al. 3).

Selon la jurisprudence, il faut entendre par dessaisissement en particulier, la renonciation à des éléments de revenu ou de fortune sans obligation juridique ou sans contre-prestation équivalente (ATF 140 V 267 consid. 2.2 ; ATF 134 I 65 consid. 3.2 ; ATF 131 V 329 consid. 4.2 ; ATF 123 V 35 consid. 1), ces deux conditions étant alternatives (ATF 134 I 65 consid. 3.2 ; ATF 131 V 329 consid. 4.4). En présence d’une contre-prestation adéquate, il n’y a pas lieu de tenir compte d’une fortune (hypothétique) dans le calcul de la prestation complémentaire, même si l’assuré a pu vivre au-dessus de ses moyens avant de requérir une telle prestation ; en effet il n’appartient pas aux organes compétents en matière de prestations complémentaires de procéder à un contrôle du mode de vie antérieur des assurés, ni d’examiner si l’intéressé s’est écarté d’une ligne que l’on pourrait qualifier de « normale » et qu’il faudrait au demeurant préciser (ATF 121 V 204 consid. 4b ; ATF 115 V 352 consid. 5c et 5d ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_180/2010 du 15 juin 2010 consid. 6).

4.2.2 La part de fortune dont un assuré s'est dessaisi est censée produire un revenu qui doit aussi être porté en compte lors du calcul du revenu déterminant (ATF 123 V 35 consid. 2a ; ATF 110 V 17 consid. 4b). Ce rendement hypothétique équivaut au taux d'intérêt moyen sur les dépôts d'épargne servi par l'ensemble des banques au cours de l'année précédant celle de l'octroi de la prestation complémentaire ; pour déterminer ce taux, il faut se fonder sur les données figurant dans l'annuaire statistique de la Suisse qui prend pour base le taux appliqué dans chaque banque (ATF 123 V 35 consid. 2a ; ATF 110 V 17 consid. 5b).

4.3  

4.3.1 L’art. 9 al. 2 LPC prévoit le principe du calcul des dépenses et revenus déterminants par foyer : les dépenses et revenus déterminants des conjoints et des personnes qui ont des enfants ayant droit à une rente d’orphelin ou donnant droit à une rente pour enfant de l’AVS ou de l’AI sont additionnés ; il en va de même pour des orphelins faisant ménage commun. Cette liste est exhaustive (ATF 147 V 441 consid. 3.2). Elle exclut en particulier les enfants d’un assuré lorsque ceux-ci n'ont pas droit à une rente d'orphelin ou ne donnent pas droit à des rentes pour enfant (supplément de rente) de l'AVS ou de l'AI (ATF 139 V 307 consid. 6.2).

Selon l’art. 16c al. 1 OPC-AVS/AI, intitulé « partage obligatoire du loyer », lorsque des appartements ou des maisons familiales sont aussi occupés par des personnes non comprises dans le calcul des prestations complémentaires d’un assuré, le loyer doit être réparti entre toutes les personnes ; les parts de loyer des personnes non comprises dans le calcul des prestations complémentaires ne sont pas prises en compte lors du calcul de la prestation complémentaire annuelle.

L'art. 16c al. 1 OPC-AVS/AI ne fait pas directement référence à la notion de domicile au sens du droit civil. Selon la jurisprudence fédérale, le critère déterminant est l’habitation commune; en effet, il convient d’empêcher le financement indirect de personnes non comprises dans le calcul des prestations complémentaires (ATF 142 V 299 consid. 5.2.2 ; ATF 127 V 10 consid. 6b ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_519/2019 du 14 janvier 2020 consid. 3.3.2). Par l'emploi du terme « occupés » (en allemand : « bewohnt » (habité) ; en italien : « occupati »), le Conseil fédéral a voulu se fonder sur la situation concrète de la personne concernée ; dans les faits, cela implique que cette dernière habite effectivement à la même adresse que la personne bénéficiaire des prestations complémentaires (ATF 127 V 10 consid. 6b ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_807/2009 du 24 mars 2010 consid. 3.4 ; ATAS/410/2021 du 4 mai 2021 consid. 13). Le critère déterminant est ainsi le logement commun, indépendamment du fait de savoir s'il y a bail commun ou si l'un des occupants paie seul le loyer (ATF 142 V 299 consid. 3.2 ; ATF 127 V 10 consid. 6b).

Le dépôt de papiers ou le domicile fiscal ne crée qu'une présomption de fait que d'autres éléments peuvent permettre de renverser (arrêt du Tribunal fédéral 5A_680/2020 du 8 décembre 2020 consid. 5.1.1 ; ATAS/410/2021 du 4 mai 2021 consid. 13).

4.3.2 Selon l'art. 16c al. 2 OPC-AVS/AI de même disposition, le montant du loyer est en principe réparti à parts égales entre toutes les personnes concernées. Des exceptions sont possibles pour autant que cela respecte le sens de l’art. 16c OPC-AVS/AI, respectivement que cela ne dénature par le principe posé par cette norme (ATF 142 V 299 consid. 5.2.1 ; voir également : ATF 130 V 263 consid. 5.3 ; ATF 127 V 10 consid. 6c). Il peut notamment se justifier de s’écarter de la règle du partage par tête lorsqu’une personne occupe majoritairement un lieu d’habitation (ATF 127 V 10 consid. 6c ; ATF 105 V 271 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_242/2018 du 21 février 2019 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_698/2015 du 17 juin 2016 consid. 3.2.1 ; Directives concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI (DPC) de l’Office fédéral des assurances sociales, version du 1er janvier 2022, §3231.04 p. 81 ; Michel VALTERIO, Commentaire de la Loi fédérale sur les prestations à l’AVS et à l’AI, 2015, n. 23 ad. art. 10 LPC). De l’opinion de Ralph JÖHL et Partricia USINGER-EGGER, la règle du partage par tête devrait d’ailleurs être comprise uniquement comme une présomption de fait et un partage selon l’utilisation effective serait à favoriser si l’instruction de la cause permet d’établir clairement une différence d’intensité dans l’utilisation d’un logement selon le colocataire (Ralph JÖHL et Partricia USINGER-EGGER, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV, in : Soziale Sicherheit/Sécurité sociale, Meyer éd., 3ème éd. 2016, n. 71 p. 1760).

5.              

5.1 Aux termes de l’art. 5 LPCC, le revenu déterminant est calculé conformément aux règles fixées dans la LPC et ses dispositions d’exécution moyennant certaines adaptations prévues par le droit cantonal. Les prestations complémentaires fédérales sont ainsi ajoutées au revenu déterminant (art. 5 let. a LPCC) et, en dérogation à l’art. 11 a. 1 let. c LPC, la part de la fortune nette prise en compte dans le calcul du revenu déterminant est dans le cas général de 1/8ème après déduction des franchises prévues par cette disposition (1) et du montant des éventuelles indemnités en capital obtenues à titre de dommages et intérêts en réparation d’un préjudice corporel (2) (art. 5 let. c LPCC).

5.2 Selon l’art. 6 LPCC, les dépenses reconnues par le droit cantonal sont celles énumérées par la loi fédérale et ses dispositions d'exécution, à l'exclusion du montant destiné à la couverture des besoins vitaux, remplacé par le montant destiné à garantir le revenu minimum cantonal d'aide sociale tel que défini à l'art. 3 LPCC.

6.             Pour des motifs de sécurité du droit, le droit à la restitution est limité dans le temps (ATF 147 V 417 consid. 7.3.2). 

6.1 Selon l’art. 25 al. 2 LPGA dans sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2020, le droit d’une autorité sociale de demander la restitution d’une prestation versée à tort s’éteint un an après le moment où l’institution d’assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation. Si la créance naît d’un acte punissable pour lequel le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est déterminant.

Selon l’art. 28 LPCC, le droit de l’État à la restitution des prestations complémentaires cantonales versées en trop se prescrit dans un délai d'une année à compter de la connaissance du fait qui ouvre le droit à la restitution, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation. L’art. 24 LPCC correspond à l’art. 25 al. 2 1ère phr. LPGA (ATAS/307/2022 du 28 mars 2022 consid. 5.1).

6.2  

6.2.1 Le délai relatif de l'art. 25 al. 2 LPGA ne commence à courir que lorsque l'autorité savait ou dès le moment où elle aurait dû s’apercevoir d’un tel fait en faisant preuve de l’attention que les circonstances permettaient raisonnablement d’exiger d’elle (ATF 146 V 217 consid. 2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_32/2021 [destiné à la publication aux ATF] du 5 avril 2022 consid. 5.1.1). Tel peut notamment être le cas à l’occasion d’un contrôle réalisé par l’autorité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_405/2020 du 3 février 2021 consid. 3.2.2). Si les éléments à disposition de l’autorité ne suffisent pas à eux-seuls à établir la portée d’un droit à la restitution mais qu’ils contiennent suffisamment d’indices en ce sens, l’autorité doit agir dans un délai raisonnable pour clarifier la situation après quoi, le délai relatif commence à courir (arrêt du Tribunal fédéral 8C_6/2021 du 14 avril 2021 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_648/2020 du 4 mars 2021 consid. 3.3).

6.2.2 Le point de départ du délai absolu de cinq ans correspond au versement effectif de la prestation et non à la date à laquelle il aurait dû être fait (ATF 112 V 180 consid. 4a ; ATAS/307/2022 du 28 mars 2022 consid. 5.3).

6.3 L’art. 25 al. 2 2ème phr. LPGA prévoit que « si la créance naît d’un acte punissable pour lequel le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est déterminant. ».

L’art. 28 LPCC ne prévoit pas de règle comparable à l’art. 25 al. 2 2ème phr. LPGA. Toutefois, la jurisprudence de la chambre de céans considère que celui-ci doit être complété en vertu de l’art. 1A al. 1 let. c LPCC en ce sens que l’art. 25 al. 2 2ème phr. LPGA s’applique par analogie en droit cantonal (ATAS/772/2021 du 21 juillet 2021 consid. 12.1 ; ATAS/428/2021 du 3 mai 2021 consid. 13a). L’art. 25 al. 2 2ème phr. LPGA trouve donc application en droit cantonal par le truchement du renvoi de l’art. 1A al. 1 let. c LPCC.

6.3.1 Selon le Tribunal fédéral, le délai pénal plus long remplace tant le délai relatif que le délai absolu (ATF 140 IV 206 consid. 6.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_97/2020 du 10 juin 2020 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_592/2007 du 20 août 2008 consid. 5.3). Cette jurisprudence correspond par ailleurs à la règle comparable de l’art. 60 al. 2 CO relative à la responsabilité civile (cf. FF 2014 221, p. 240).

Pour que le délai de péremption plus long prévu par le droit pénal s’applique, il n’est pas nécessaire que l’auteur de l’infraction ait été condamné (ATF 140 IV 206 consid. 6.2).

En l’absence d’une procédure pénale concrète, il appartient au juge de droit public d’examiner à titre préjudiciel si les conditions objectives et subjectives correspondant à une infraction pénale sont réunies (ATF 140 IV 206 consid. 6.2 ; ATF 138 V 74 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_718/2016 du 21 août 2017 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_213/2016 du 4 novembre 2016 consid. 5.2) ; ce faisant, ce sont les exigences en matière de preuve dans la procédure pénale qui sont applicables, de sorte que le degré de vraisemblance prépondérante applicable en assurances sociales ne suffit pas (ATF 148 V 195 consid. 4.3 ; ATF 138 V 74 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_321/2020 du 2 juillet 2021 consid. 4.2.2 [considérant non-publié à l’ATF 147 V 417]; arrêt du Tribunal fédéral 9C_240/2020 du 11 décembre 2020 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_580/2018 du 9 janvier 2019 consid. 4.3.3).

L’autorité qui invoque le délai plus long de droit pénal doit en tous les cas produire des éléments démontrant le comportement punissable (ATF 148 V 195 consid. 4.3 ; ATF 138 V 74 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_321/2020 du 2 juillet 2021 consid. 4.2.2 [considérant non-publié à l’ATF 147 V 417] ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_240/2020 du 11 décembre 2020 consid. 2.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_580/2018 du 9 janvier 2019 consid. 4.3.3).

6.3.2 Les infractions susceptibles d’entrer en ligne de compte dans le cas concret sont celles prévues par l’art 148a CP (obtention illicite de prestations d’une assurance sociale ou de l’aide sociale), et l’art. 31 al. 1 let. a et d LPC. Selon l’art. 97 al. 1 let. d CP, ces infractions se prescrivent par sept ans.

Les éléments constitutifs objectifs de l’infraction d’obtention illicite de prestations d’une assurance sociale ou de l’aide sociale sont une erreur de l’autorité engendrée par un acte de tromperie de l’administré (1) et un résultat d’obtention sans droit de prestations sociales fédérales ou cantonales (2) (FF 2013 5373, p. 5432 s. ; Michel DUPUIS et all., Petit commentaire du Code pénal, 2ème éd. 2017, n. 4 et 6 ad. 148 CP ; Andrew GARBARSKI / Benjamin BORSODI, Commentaire romand CP-II, 2017, n. 8 ad. art. 148a CP). Sur le plan subjectif, leur réalisation doit être intentionnelle (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1246/2020 du 16 juillet 2021 consid. 3.4 ; FF 2013 5373, p. 5433) ; le dol éventuel au sens de l’art 12 al. 3 CP suffit (FF 2013 5373, p. 5433 ; GARBARSKI / BORSODI, op. cit., n. 25 ad. art. 148a CP ; DUPUIS et all., op. cit., n. 7 ad. 148 CP).

Pour déterminer si un cas est « de faible gravité » au sens de l’art. 148a al. 2 CP, il faut examiner l’importance du montant indument perçu et la culpabilité (« Verschulden ») de l’auteur, et notamment son énergie criminelle, ses motifs, et la manière dont l’infraction a été réalisée (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1246/2020 du 16 juillet 2021 consid. 4.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1030/2020 du 30 novembre 2020 consid. 1.1.3).

Les éléments constitutifs objectifs des infractions des art. 31 al. 1 let. a et d LPC sont (1) la réalisation d’un acte de tromperie, soit activement (lettre a) soit par omission (lettre d) (voir également : Gunther ARTZT, Basler Kommentar StGB II, 3ème éd. 2013, n. 101 ad. art 146 CP) et (2) un résultat d’obtention de prestations sociales fédérales ou cantonales sans droit. Ces éléments constitutifs objectifs doivent être commis intentionnellement (ATAS/414/2021 du 5 mai 2021 consid. 16b ; ATAS/428/2021 du 3 mai 2021 consid. 14a ; ATAS/325/2021 du 12 avril 2021 consid. 15b ; ATAS/35/2021 du 25 janvier 2021 consid. 6c).

6.3.3 Selon l’art. 31 LPGA, l’ayant droit, ses proches ou les tiers auxquels une prestation est versée sont tenus de communiquer à l’assureur ou à l’organe compétent toute modification importante des circonstances déterminantes pour l’octroi d’une prestation. L'art. 31 al. 1 LPGA est une expression du devoir de bonne foi de l'administré envers l'administration (ATF 140 IV 206 consid. 6.3.1.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_364/2019 du 9 juillet 2020 consid. 4.3).

En matière de prestations complémentaires fédérales, cette règle est reprise par l’art. 24 de l’ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 (OPC-AVS/AI - RS 831.301). Faute de règle spéciale cantonale, les mêmes principes trouvent application aux prestations complémentaires cantonales (art. 1A al. 1 LPCC).

6.4 Les délais prévus par l’art. 25 al. 2 LPGA sont des délais de péremption (ATF 146 V 217 consid. 2.1). Il en va de même des délais de l’art. 28 LPCC (ATAS/307/2022 du 28 mars 2022 consid. 5.4). Le respect de ces délais doit en conséquence être examiné d’office (arrêt du Tribunal fédéral 9C_907/2013, 9C_37/2014 du 29 août 2014 consid. 4.1 ; ATAS/307/2022 du 28 mars 2022 consid. 5.4).

Ces délais sont interrompus déjà par la décision initiale, et non par la décision sur opposition (ATF 146 V 217 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_152/2013 du 28 octobre 2013 consid. 2.3), respectivement par la réception de cette décision initiale par l’intéressé (ATF 138 V 74 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_843/2018 du 22 janvier 2019 consid. 4.2.1). Cette interruption est définitive (arrêt du Tribunal fédéral 8C_213/2016 du 4 novembre 2016 consid. 4.2).

7.             Dans le domaine des assurances sociales, la procédure est régie par la maxime inquisitoire selon laquelle les faits pertinents de la cause doivent être constatés d'office par l'autorité (art. 43 LPGA; ATF 145 V 90 consid. 3.2; ATF 138 V 218 consid. 6). Cette règle n'est toutefois pas absolue car sa portée est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire. Celle-ci comporte en particulier l'obligation d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi la partie concernée s'expose à devoir supporter les conséquences de l'absence de preuve (ATF 145 V 90 consid. 3.2; ATF 138 V 218 consid. 6; ATF 115 V 133 consid. 8a). A cet égard, il est possible de s’inspirer du principe général consacré à l’art. 8 CC selon lequel chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit (ATF 138 V 218 consid. 6; ATAS/71/2022 du 31 janvier 2022 consid. 6.1).

Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible ; la vraisemblance prépondérante suppose que, d'un point de vue objectif, des motifs importants plaident pour l'exactitude d'une allégation, sans que d'autres possibilités revêtent une importance significative ou entrent raisonnablement en considération (ATF 144 V 427 consid. 3.2 ; ATF 139 V 176 consid. 5.3 ; ATF 138 V 218 consid. 6).

8.             Il convient en premier lieu d’examiner si la créance en restitution dont se prévaut l’intimé est fondée en droit, soit si la recourante a reçu des prestations sociales indues.

8.1  

8.1.1 Il est établi que la recourante a reçu sur son compte bancaire un virement de CHF 50'000.- de sa mère en date du 5 juin 2012. Ce montant a ensuite été dépensé par des retraits de montants s’élevant pour la plupart à plusieurs milliers de francs sur deux périodes, d’une part, du 3 juillet 2013 au 26 août 2013 (-CHF 24'000.-) et, d’autre part, du 2 février 2014 au 31 décembre 2014 (-CHF 26'000.-).

La recourante explique que ce montant constituait un don de sa mère en faveur de son fils et qu’il a été utilisé exclusivement dans son intérêt pour payer des frais courants et des dettes contractées auprès de tiers. Si ces déclarations n’apparaissent pas en tant que telle invraisemblables, elles ne sauraient à elles seules suffire à établir l’existence d’un don en faveur du fils de la recourante. Au contraire, la recourante a déclaré lors de son audition le 14 mars 2022 que c’est elle qui procédait aux retraits et remettait l’argent à son fils pour rembourser ses créanciers ou qui l’utilisait pour des achats courants, ce qui laisse plutôt penser que la recourante était titulaire de la somme de CHF 50'000.-, à charge pour elle de l’utiliser dans l’intérêt de son fils.

Ces déclarations ne suffisent pas non plus à établir que des contre-prestations équivalentes ont été obtenues lors de l’utilisation de cette somme. Malgré deux prolongations de délai, la liste de l’usage qui aurait été fait de ladite somme n’a pas été remise à la chambre de céans, la recourante ayant par ailleurs admis lors de son audition qu’elle n’avait pour sa part pas gardé de trace de cette usage. Une telle absence de traçabilité résulte du fait que l’argent reçu de Mme D______ a été entièrement retiré en liquide et non par des paiements par carte ou des versements bancaires.

Au vu de ce qui précède, il convient de retenir que ni l’existence d’un don de Mme D______ en faveur de son petit-fils, ni l’existence d’une contre-prestation équivalente ne sont établis avec le degré de la preuve de la vraisemblance prépondérante. Le montant de CHF 50'000.- doit ainsi être considéré comme un élément de fortune de la recourante et les retraits au distributeur de celui-ci comme un dessaisissement de fortune.

8.1.2 En application de 11 al. 1 let. c LPC, 1/15ème de la fortune totale de la recourante dépassant CHF 37'500.- doit être pris en compte en tant que revenu déterminant pour le calcul de son droit aux PCF. De même, en vertu de l’art. 5 let. c LPCC, 1/8ème de la fortune totale de la recourante dépassant CHF 37'500.- doit être pris en compte en tant que revenu déterminant pour le calcul de son droit aux PCC.

En vertu de l’art. 17a OPC-AVS/AI, le montant dessaisi au cours de l’année 2013 doit être pris en compte à titre de fortune dans le calcul de la prestation annuelle pour l’année 2014. Le montant dessaisi au cours de l’année 2014 doit quant à lui être pris en compte à titre de fortune dans le calcul de la prestation annuelle pour l’année 2015, sous déduction d’un abattement de CHF 10'000.-. Un abattement supplémentaire de CHF 10'000.- doit ensuite être déduit chaque année du montant retenu au titre de dessaisissement jusqu’à que celui-ci soit réduit à zéro.

Sur le montant total retenu à titre de fortune doit en outre être calculés des intérêts (hypothétiques après dessaisissement), en tant que produit de ladite fortune.

La décision du 21 janvier 2019 mentionne un montant de CHF 67'525.20 à titre d’épargne pour la période de juillet à décembre 2012, et de CHF 62'952.60 pour l’année 2013. Dès 2014, un montant de CHF 37'794.25 est retenu comme épargne, et un montant de CHF 25'158.35 (62'952.60-37'794.25) comme biens dessaisis. En 2015, le montant retenu au titre des biens dessaisis s’élève à CHF 46'624.- ; il est ensuite diminué de CHF 10'000.- chaque année, soit en 2016, en 2017, en 2018 et en 2019.

À la lecture des décisions de l’intimé, il n’est pas clair sur quelle base les montants de CHF 67'525.20 pour la période de juillet à décembre 2012 et de CHF 62'952.60 pour l’année 2013 ont été retenus. Surtout, le montant de CHF 25'158.35 retenu à titre de fortune dessaisie au cours de l’année 2013 et comptabilisé dans la fortune (totale) 2014 ne correspond pas à la fortune effectivement dessaisie par la recourante en 2013 qui s’élève à CHF 24'000.-. De même, le montant de CHF 46'684.- (soit 62'952.60 – 6'268.60 - 10'000) retenu à titre de bien dessaisis (en 2013 et 2014) pour l’année 2015 ne correspond pas au montant de CHF 40'000.- qui aurait normalement dû être retenu (CHF 50'000 dessaisis moins le montant de CHF 10'000.- prévu par l’art. 17a al. 1 OPC-AVS/AI). Il semble qu’à partir du plan de calcul 2013, la recourante se voit vue imputer chaque année la somme fixe de CHF 62'952.60 à titre de fortune. Toute diminution de fortune n’est cependant pas automatiquement assimilable à un dessaisissement. Ainsi, le montant retenu à titre de fortune par l’intimé pour les années 2012 et 2013 diffère sans qu’un dessaisissement ait pour autant été retenu par celui-ci.

Bien que l’existence d’un trop-perçu fondé sur la perception par la recourante d’un montant de CHF 50'000.- ne fasse aucun doute au vu de ce qui précède, il apparait que ni la décision querellée, ni les pièces produites par les parties et les explications données par celles-ci ne permettent de comprendre clairement dans quelle mesure il a été tenu compte de celui-ci dans la fortune de la recourante.

Dans ces circonstances, il convient de renvoyer la cause à l’intimé pour qu’il motive ou corrige les divergences susmentionnées et, le cas échéant, calcule à nouveau les montants retenus à titre de fortune à partir de l’année 2012, et en particulier ceux retenus à titre de dessaisissement, et, en conséquence, les montants arrêtés au titre de revenu déterminant issu de la fortune et du produit de la fortune.

8.2  

8.2.1 Il n’est pas contesté que le fils de la recourante ait vécu avec celle-ci depuis le 1er janvier 2018.

S’agissant de la période du 1er juillet 2012 au 31 décembre 2017, le fils de la recourante a déclaré, lors de son audition le 14 mars 2022, qu’il avait en particulier résidé chez sa grand-mère depuis fin 2011 (cf. procès-verbal du 14 mars 2022, p. 2). Jusqu’à la fin de l’année 2017, il passait environ la moitié de son temps chez elle, en lien notamment avec ses problèmes de sommeil. Le fils de la recourante a également précisé que, de son sentiment il n’était qu’hébergé par sa grand-mère, ce pourquoi il n’avait pas pensé qu’il devait annoncer un changement de domicile à l’OCPM. Lorsqu’il se rendait chez sa grand-mère, la plupart de ses affaires restaient chez la recourante. Il payait un loyer à sa grand-mère, mais pas à sa mère dès lors que celle-ci bénéficiait notamment à cette fin du montant de CHF 50'000.- versé par sa grand-mère.

Dans ces circonstances, il apparait certes que le fils de la recourante habitait notamment avec celle-ci à partir du 1er juillet 2012. L’instruction de la cause a permis toutefois d’établir que le fils de la recourante passait un temps très important chez sa grand-mère au court des années 2012 à 2017 et qu’il contribuait au paiement du loyer de cette dernière. Il faut donc considérer pour établi que le fils de la recourante a logé la moitié du temps chez sa grand-mère. En conséquence, il convient d’adapter la répartition du loyer à l’utilisation effective du logement situé rue E______ à Genève en ce sens que ¾ des frais de loyers doivent être supportés par la recourante et ¼ par son fils.

8.2.2 Au vu de ce qui précède, il apparait que le montant retenu à titre de loyer pour calculer les dépenses déterminantes de la recourante aurait dû être réparti entre elle et son fils dès le 1er juillet 2012 et jusqu’à la fin de l’année 2017 à raison de ¾ pour la recourante et d’un ¼ pour son fils. C’est donc à juste titre que le SPC a retenu qu’il existait un trop-perçu et qu’il en a demandé la restitution à la recourante. En revanche, c’est à tort que le SPC a réduit de moitié le montant retenu à titre de frais de loyer pour la recourante. Il aurait en effet dû procéder à une réduction d’uniquement ¼ du montant correspondant.

9.             Il convient encore de vérifier si la créance en restitution de la recourante n’est pas périmée en tout ou en partie.

9.1 En ce qui concerne le versement de CHF 50'000.- reçu par la recourante en 2012, il ne fait pas de doute qu’il aurait dû être déclaré à l’intimé. Même si celle-avait eu un doute sur la nécessité de déclarer cette somme à l’intimé, il lui revenait à tout le moins de prendre contact avec l’autorité pour clarifier la situation (dans le même sens : arrêt du Tribunal fédéral 1C_15/2016, du 1er septembre 2016 consid 2.2 ; ATAS/307/2022 du 28 mars 2022 consid. 6.1). Sur la base des éléments présents au dossier de la cause, il faut donc considérer que la recourante a violé son devoir de renseigner, respectivement a commis une omission punissable selon les art. 148a CP et 31 let. d LPC.

Cette violation a causé un dommage à l’autorité. Celui-ci s’élève à plusieurs milliers de francs, de sorte que l’existence d’un cas de faible gravité au sens de l’art. 148a al. 2 CP doit être exclue.

L’omission de la recourante a été commise intentionnellement et elle a à tout le moins accepté le dommage qui en résultait pour l’autorité (dol éventuel). En effet, le fait qu’elle ait bien déclaré le compte bancaire en cause aux autorités fiscales mais ait expressément mentionné un solde bien inférieur à la réalité permet d’écarter l’existence d’une simple négligence. Cela vaut d’autant plus que cette absence de déclaration concerne une période relativement longue. Enfin, les notices intitulées « communications importantes » reçue en décembre 2011 et 2012 mentionnaient expressément l’obligation d’informer l’intimé de toute donation.

Dans ces circonstances, il faut retenir qu’un délai de prescription de sept ans doit être appliquée à la créance en restitution de l’autorité. Le trop-perçu obtenu par la recourante en lien avec le versement de CHF 50'000.- réalisé le 5 juin 2012 est donc sujet à restitution depuis le mois de juillet 2012, comme l’a retenu à juste titre l’intimé.

Vu que le délai de péremption repris du droit pénal est supérieur tant au délai relatif, qu’au délai absolu prévu par l’art. 25 al. 2 LPGA, la question de savoir si ceux-ci ont été respectés peut rester ouverte, le SPC ayant dans tous les cas eu connaissance d’un potentiel trop-perçu au plus tôt aux alentours du 5 mars 2019.

9.2 En ce qui concerne le trop-perçu fondé sur le partage du loyer jusqu’au 31 décembre 2017, l’intimé s’est contenté d’invoquer l’existence d’une infraction pénale selon l’art. 148a CP ou 31 LPC, sans autre motivation. Or, il ressort de l’instruction menée par la chambre de céans que le fils de la recourante alternait entre une résidence chez sa grand-mère et une résidence chez sa mère sur de longues périodes. Il apparait donc que le lieu de résidence exact de M. B______, et donc l’ampleur du loyer à assumer par celui-ci, pouvait à première vue apparaitre douteux pour une personne tierce ne disposant pas de connaissances juridiques particulière, ce qui est le cas de la recourante. Cela vaut d’autant plus que le fils de la recourante contribuait au paiement du loyer de sa grand-mère, mais pas de celui de sa mère, et que celle-ci ne tirait donc aucun bénéfice économique effectif de sa présence.

Dans ces circonstances, et dès lors que le principe de la présomption d’innocence (cf. ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1) et le degré de la preuve stricte trouvent application, il revenait à l’intimé de procéder à une instruction complémentaire permettant de lever tout doute raisonnable quant au caractère intentionnel du dommage porté au SPC par la recourante si celui-ci désirait se prévaloir du délai plus long de droit pénal. En absence d’éléments de preuve laissant clairement penser que la recourante avait conscience du dommage qu’elle n’engendrait en ne communiquant pas à l’intimé que son fils désargenté logeait une partie du temps dans son appartement, et qu’elle s’en accommodait, il y a lieu de retenir que tel n’était pas le cas, et que c’est par négligence que la recourante n’a pas annoncé cette cohabitation à l’intimé, hypothèse qui est également la plus vraisemblable au vu de l’instruction de la cause. Or, les infractions de l’art. 148a CP et de l’art. 31 LPC sont des infractions intentionnelles.

Faute d’infraction, le délai de prescription pénale ne peut trouver application à l’encontre de la recourante en ce qui concerne la réduction d’un tiers du montant retenu à titre de loyer pour la période courant jusqu’au 31 décembre 2017.

9.2.1 Le délai absolu de cinq ans court rétroactivement dès la notification de la décision de restitution en date du 3 juillet 2019. Les prétentions de l’intimé antérieures au mois de juillet 2014 sont donc périmées.

9.2.2 S’agissant du délai relatif d’un an, l’instruction de la cause a permis d’établir que fils de la recourante a annoncé à cette dernière par formulaire daté du 24 avril 2017 qu’il résidait « rue E______ 1207 à Genève ». En page cinq du même formulaire, sous la catégorie « liste des personnes partageant le logement », il a indiqué le nom de sa mère :

L’intimé a reçu ces informations en date du 19 mai 2017 selon son tampon figurant en première page du formulaire.

Dans son récent arrêt 9C_32/2021, le Tribunal fédéral a insisté sur le fait que lorsque l’autorité sociale peut raisonnablement supposer qu’il existe un trop-perçu vu les éléments à sa disposition, elle doit uniquement disposer d’un délai raisonnable pour clarifier la question avant que le délai de péremption relatif ne commence à courir ; lorsque l’autorité sociale peut raisonnablement savoir qu’il existe un trop-perçu vu les éléments à sa disposition, le délai commence à courir immédiatement, sans qu’il faille faire bénéficier ladite autorité d’un délai complémentaire (arrêt du Tribunal fédéral 9C_32/2021 [destiné à la publication aux ATF] du 5 avril 2022 consid. 5.2.2).

Dans ces circonstances, il faut considérer que l’intimé aurait dû se rendre compte de l’existence d’une cohabitation entre la recourante et son fils au moment où il a traité le dossier de celui-ci et rendu une décision, soit le 30 août 2018. Le délai relatif de péremption a donc commencé à courir à ce moment-là. En revanche, la seule réception du formulaire contenant la mention d’une cohabitation au 19 mai 2017 n’apparait pas de nature à faire courir un tel délai s’agissant d’une administration de masse comme celle des prestations complémentaires. Un croisement des données peut certes être exigé du SPC, mais uniquement au moment de l’analyse et du traitement d’un dossier et pas à la seule réception d’un courrier externe.

Les délais de péremption relatifs d’un an de l’art. 25 al. 2 LPGA et de l’art. 28 LPCC couraient ainsi jusqu’au 30 août 2019. La notification décision de restitution au 3 juillet 2019 les a donc validement interrompus.

9.2.3 Il ressort des considérations qui précèdent que, s’agissant du partage du loyer, les prétentions en restitution de l’intimé courant jusqu’au mois de juin 2014 sont périmées, au contraire des prestations postérieures dont celui-ci pouvait réclamer la restitution à la recourante.

10.         En conclusion, le recours doit être partiellement admis en ce sens que les prétentions en restitution de l’intimé antérieure au 1er juillet 2014 sont périmées en ce qui concerne le trop-perçu fondé sur l’absence de partage selon l’art. 16c OPC-AVS/AI. La décision sur opposition doit être réformée dans cette mesure. Pour la période du 1er juillet 2014 au 31 décembre 2017, la recourante doit se voir imputer ¾ du loyer de son domicile de la rue E______ à titre de charges, au lieu de la moitié comme retenu par l’intimé.

En revanche, l’autorité a retenu à raison l’existence d’un trop-perçu en lien avec la somme de CHF 50'000.- reçue par la recourante pour la période courant dès le mois de juillet 2012. Il convient toutefois de renvoyer la cause à l’intimé afin qu’il motive ou corrige le montant pris en compte à titre de fortune et de produit de la fortune depuis le 1er juillet 2012.

11.         Selon l’art. 89H al. 3 LPA, une indemnité est allouée au recourant qui obtient gain de cause.

En l’espèce toutefois, et bien qu’elle obtienne partiellement gain de cause, la recourante, non représentée, n’a pas droit à des dépens (ATAS/333/2022 du 11 avril 2022 consid. 9 ; ATAS/1320/2021 du 16 décembre 2021 consid. 9).

Pour le surplus, en l’absence de loi spéciale prévoyant des frais judiciaires, la procédure est gratuite (art. 61 let fbis LPGA et art. 89H al. 1 LPA).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable

Au fond :

2.        L’admet partiellement.

3.        Dit que la prestation en restitution du Service des prestations complémentaires d’un montant de CHF 39'026.- est partiellement périmée et renvoie la cause à celui-ci pour qu’il rende une nouvelle décision au sens des considérants.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Adriana MALANGA

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le