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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/109/2019

AARP/319/2022 du 13.10.2022 sur JTDP/1602/2021 ( PENAL ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : VIOLENCE DOMESTIQUE;IN DUBIO PRO REO
Normes : CP.123.ch2; CP.304
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/109/2019 AARP/319/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 13 octobre 2022

Entre

A______, domicilié ______[VD], comparant par Me B______, avocat, ______, Genève,

appelant,

intimé sur appel joint,

 

contre le jugement JTDP/1602/2021 rendu le 14 décembre 2021 par le Tribunal de police,

 

et

C______, partie plaignante, comparant par Me D______, avocate, E______, ______, Genève

intimée,

appelante sur appel joint,

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


EN FAIT :

A. a. En temps utile, A______ appelle du jugement du 14 décembre 2021, par lequel le Tribunal de police (TP) l'a acquitté de menaces (art. 180 du Code pénal [CP]), de violation du devoir d'assistance ou d'éducation (art. 219 CP) et de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 2 CP) s'agissant des faits visés sous point 1.1.a, 1.1.b, 1.1.d et 1.1.f de l’acte d’accusation mais l’a reconnu coupable de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 2 CP), de voies de faits (art. 126 al. 2 CP), de vol (art. 139 ch. 1 CP), d'utilisation frauduleuse d'un ordinateur (art. 147 CP), d'injures (art. 177 CP), d'induction de la justice en erreur (art. 304 CP), d'infraction grave à la loi sur la circulation routière (art. 90 al. 2 de la de la loi fédérale sur la circulation routière [LCR]), de conduite d'un véhicule automobile dans l'incapacité de conduire pour d'autres raisons que l'alcool (art. 91 al. 2 let. b LCR), de tentative d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire (art. 91a al. 1 cum 22 CP) et de violation des obligations en cas d'accident (art. 92 al. 1 LCR).

Le TP a condamné A______ à une peine privative de liberté de six mois, sous déduction de quatre jours de détention avant jugement (art. 40 CP), partiellement complémentaire à celle prononcée le 19 septembre 2019 par le Tribunal de police de Genève (art. 49 al. 2 CP) ainsi qu’à une amende de CHF 1'500.- (art. 106 CP) assortie d’une peine privative de liberté de substitution de 15 jours. Il l’a également condamné à verser une indemnité de CHF 1'000.- à la partie plaignante au titre du tort moral.

A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à son acquittement des infractions de lésions corporelles simples, de voies de faits, de vol, d'utilisation frauduleuse d'un ordinateur, d'injures et d'induction de la justice en erreur, à son exemption de peine pour les faits constitutifs de tentative d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire et au prononcé d’une peine n’excédant pas 90 jours-amende à CHF 10.- pour les infractions restantes.

b. Dans le délai légal, C______ forme un appel joint, concluant à ce que A______ soit reconnu coupable de menaces et de lésions corporelles simples s'agissant des faits visés sous point 1.1.a, 1.1.b, 1.1.d et 1.1.f et condamné à lui verser une indemnité pour tort moral de CHF 3'000.-.

c. Selon l'acte d'accusation du 11 mai 2021, il est encore reproché les faits suivants à A______, qui seraient survenus au domicile conjugal (chemin du 2______, à N______) :

À des dates indéterminées en 2018 ou 2019, il a régulièrement frappé son épouse, C______, ainsi que ses enfants O______ et P______ (ch. 1.1.a). À une date indéterminée en 2018 ou 2019, il a frappé et étranglé son épouse (ch. 1.1.b). Dans la nuit du 23 au 24 août 2019, il a violenté C______, notamment en la poussant afin de la mettre à terre et en se couchant sur elle pour la maintenir au sol, lui occasionnant de la sorte une contusion occipitale constatée médicalement le 24 août 2019 et a placé fermement sa main sur la bouche de son épouse pour l'empêcher de crier (ch. 1.1.c). Le 5 décembre 2019, il a violenté C______, notamment en lui assénant plusieurs coups au niveau du dos (ch. 1.1.d). Le 20 août 2020, il a violenté C______, notamment en lui assénant deux coups de poings sur la tête et un autre coup au niveau du poignet (ch. 1.1.f). Dans la nuit du 23 au 24 août 2019, il a tenu un petit couteau en direction de son épouse et lui a dit qu'il allait lui détruire sa vie et qu'il pouvait la renvoyer au Kosovo, l'effrayant de la sorte (ch. 1.4.a).

Il lui est également reproché d’avoir, le 11 décembre 2019, au n° 1______, violenté C______, en la poussant au niveau du visage (ch. 1.1.e) et, le 8 décembre 2019, dans un tram, porté atteinte à l'honneur de celle-ci en la traitant de "pute" en albanais et lui avoir dit qu'il allait la tuer, l’effrayant de la sorte (ch. 1.3 et ch. 1.4.b).

L’acte d’accusation reproche encore à A______ d’avoir, le 26 octobre 2019, au sein de l'Hôtel G______, dérobé des affaires appartenant à F______, dont sa carte bancaire, dans le dessein de se les approprier et de s'enrichir illégitimement à concurrence de leur valeur. Le 26 octobre 2019, il a fait usage de ladite carte, contre la volonté de son propriétaire, auprès de différents distributeurs automatiques et a ainsi retiré un montant de CHF 3'800.-, de CHF 50.- et de CHF 1000.- (ch. 1.2). Enfin, le 19 octobre 2018 (recte : 18 octobre 2018, pièce B-16), A______ a déposé une plainte pénale contre inconnu, dénonçant le vol de son véhicule automobile immatriculé GE 3______/Suisse, alors qu'il savait que cette infraction n'avait pas été commise, puisqu'il avait remis ledit véhicule à I______ deux ou trois mois auparavant (ch. 1.6).

d. A______ ne conteste pas en appel sa culpabilité pour les infractions à la LCR retenues par le premier juge, qui sont fondées sur les complexes de faits suivants. Le 10 janvier 2019, à 17h22, il a circulé à Meyrin à la vitesse de 104 km/h, alors que la vitesse était limitée à 60 km/h, d'où un dépassement de 38 km/h (marge de sécurité déduite). Le 15 septembre 2019, sur l'Autoroute A1, à hauteur de Coppet-Nyon, A______ a circulé en état d'incapacité de conduire en raison d'une fatigue excessive, au point de s'assoupir au volant, perdre la maitrise de son véhicule, lequel a quitté la chaussée et dévalé un talus avant de continuer sa route sur un chemin en herbe et de venir percuter une clôture métallique. Il a ensuite abandonné le véhicule, sans prévenir la police et alors qu'il ne pouvait ignorer, au vu des circonstances et de la manière dont il conduisait, que des mesures visant à déterminer son incapacité de conduire seraient ordonnées par la police. Les examens propres à déterminer son taux d'alcoolémie ont pu être accomplis le soir même.

B. Les faits pertinents suivants ressortent de la procédure :

a.    A______ et C______ sont mariés et parents de quatre filles nées entre 2012 et 2018. Ils vivent séparés depuis le 17 avril 2019. En mai 2019, la garde des enfants leur a été retirée et elles ont été placées en foyer. La garde en a été progressivement restituée à leur mère dans le courant de l’année 2022.

b.    Le 8 octobre 2018, A______ a annoncé au Service des automobiles le vol des plaques d’immatriculation de son véhicule H______ (cf. pièce B-13). Le 18 octobre 2018, il a déposé plainte à la police de N______ pour le vol de ce véhicule, qu’il avait, selon cette plainte, stationné à proximité de son domicile et qui avait disparu entre les 4 et 6 octobre 2018. Selon la plainte, il détenait encore les deux jeux de clés.

Le 6 octobre 2018 vers 23h50, I______ a été interpellé au volant de ce véhicule à l’occasion d’un cambriolage commis à Q______ (BE). Selon lui, A______ lui avait prêté sa voiture depuis plusieurs mois, en échange du paiement des frais d’immatriculation. Contacté téléphoniquement le 11octobre 2018 puis convoqué par les autorités bernoises, A______ a maintenu, lors de son audition du 24 octobre 2018, que sa voiture lui avait été volée et qu’il soupçonnait I______, lequel lui avait demandé de l’aider à trouver une voiture à acheter. Il avait annoncé le vol des plaques pour éviter de devoir payer des amendes d’excès de vitesse et parce que I______ commettait des infractions avec le véhicule. Celui-ci avait pu voler la voiture car elle n’était pas fermée et qu’il laissait les clés dedans. Ultérieurement, il a expliqué que I______ lui avait subtilisé les clés à l’occasion d’une visite quelques jours avant le vol.

Devant le MP, il a indiqué avoir déposé une plainte parce que I______, à qui il avait vendu le véhicule, ne voulait pas s’acquitter des frais liés aux assurances et à l’immatriculation (pièce C-124). Devant le premier juge, il a en revanche affirmé avoir prêté son véhicule à l’intéressé et déposé plainte parce qu’il savait que celui-ci commettait des vols au moyen du véhicule et ne voulait pas y être associé.

c.     Le 26 octobre 2019, F______ a déposé plainte contre inconnu suite à l’utilisation frauduleuse de sa carte bancaire le jour même à 01:07 et 01:09, pour deux retraits de CHF 1'000.- et CHF 3'800.-. Il avait rencontré la veille un inconnu albanais qui lui avait demandé s’il pouvait le loger dans sa chambre d’hôtel. Cet inconnu avait vu le code PIN de sa carte lorsqu’il l’avait utilisée devant lui pour retirer CHF 50.- et avait vraisemblablement profité de son sommeil pour la subtiliser, ainsi que les CHF 50.-, retirer de l’argent avec la carte et la remettre dans son porte-monnaie. Le 24 novembre suivant, F______ a reconnu A______ dans un bus comme étant son voleur et a fait appel à la police.

A______, qui s’est reconnu sur les images de vidéo-surveillance des retraits contestés, a expliqué qu’il avait effectué ceux-ci mais à la demande et avec l’accord du plaignant, qui lui avait remis CHF 1'500.- pour un rapport sexuel et auquel il avait restitué le solde, version qu’il a maintenue tout au long de la procédure.

F______ a retiré sa constitution de partie plaignante lors de sa première audition par le MP, par manque de moyen pour s’investir dans la procédure (pièce C-4). Il a néanmoins répondu à une convocation ultérieure et maintenu à cette occasion, en confrontation avec A______, ne jamais lui avoir confié sa carte bancaire ni n’avoir convenu avec lui d’une relation sexuelle tarifée. Le soir des faits il était fortement alcoolisé et s’était endormi (pièces C-138-140).

d.    Le 27 mars 2019, le Service de protection des mineurs (SPMi) a dénoncé au Ministère public (MP) les propos de l’une des filles du couple aux éducateurs de sa crèche, aux termes desquels son père maltraiterait ses sœurs. Interpellée, C______ aurait indiqué au téléphone avoir été frappée par son époux qui ne la laissait pas le quitter. Ce courrier précise que ce service avait déjà dénoncé des faits de violence au sein de cette famille en 2017, ce qui avait conduit à une séparation prononcée en novembre 2017. A______ avait toutefois réintégré le domicile conjugal en décembre 2017 (pièces B-45-46).

Suite à cette dénonciation (transmise près d’un an plus tard à la police pour enquête), deux des filles du couple ont été entendues, sans faire de déclaration sur les faits de la cause (pièce C-128), expliquant l’une comme l’autre que leurs parents étaient gentils avec elles et ignorer les raisons de leur présence à la police.

e.     Le 24 août 2019, Police-Secours est intervenue au domicile des époux A/C______ suite à un appel du voisinage (pièce B-62). A son arrivée, A______ n’était pas présent et C______ a exposé qu’il l’avait menacée avec un couteau, l’avait poussée à terre et l’y avait maintenue en lui apposant une main sur la bouche. Elle a déposé plainte pour ces faits et se plaignait de douleurs à la tête ; les policiers ont fait appel à J______, qui a constaté une contusion de 4x4 cm en région occipitale (pièce A-10). A______, auditionné le lendemain, a expliqué qu’il avait quitté le domicile conjugal sept mois auparavant mais s’y était présenté pour prendre son courrier. Il a nié avoir porté la main sur son épouse, qui l’avait, elle, menacé et tapé avec le couteau tout en l’injuriant (pièce B-69). Selon le constat médical établi le lendemain, il présentait des douleurs à la palpation du 5ème métacarpe droit et une plaie superficielle au cinquième doigt de la main droite au niveau d’interphalange proximale externe (pièce B-74). Il avait exprimé de la tristesse d’avoir été agressé par son épouse.

Au MP, le 5 mai 2020 (pièce C-124), A______ a nié toute altercation puis, le 15 juin 2020, il a expliqué que la plaie lui avait été occasionnée par K______, ami de son épouse présent le soir des faits et qui l’avait « planté avec un couteau » (pièce C-140).

f.     Le 9 décembre 2019, C______ a déposé une nouvelle plainte à l’encontre de son époux, exposant que depuis deux semaines celui-ci lui faisait vivre un enfer ; il avait endommagé sa porte d’entrée le 2 décembre car elle refusait de le laisser entrer. Le 5 décembre, elle l’avait laissé entrer et il l’avait violée sous la menace d’un couteau placé sur sa gorge et lui avait également porté plusieurs coups au dos, puis avait quitté l’appartement. Le 8 décembre, ils s’étaient croisés et il l’avait traitée de « pute » en albanais et avait menacé de la tuer (pièce A-24).

Le 11 mai 2021, le MP a classé la plainte pour viol susmentionnée, décision qui est entrée en force.

g.    Les 2, 8, 11 et 17 décembre 2019, la police est intervenue en raison de conflits entre les époux. Le 2 décembre, la police s’est rendue à deux reprises au domicile de C______. La première fois, A______ se trouvait au pied de l’immeuble où il avait fait appel à une ambulance pour son épouse ; selon les explications de celle-ci, il avait donné des coups de pied dans la porte de l’appartement et l’avait endommagée. Les ambulanciers, une fois sur place, ont examiné C______ et ont quitté les lieux sans la prendre en charge. Plus tard dans la journée, les policiers ont dû aider C______ à entrer dans son domicile car elle n’arrivait pas à ouvrir la porte endommagée. Le 8 décembre, Police-Secours est intervenue à la gare de Cornavin à la suite d’un appel pour un conflit entre les époux, et a, en concertation avec le foyer accueillant les filles du couple, trouvé une solution au litige qui les opposait au sujet de leurs droits de visite respectifs avec leurs enfants. Le 11 décembre 2019, la police est intervenue à la rue 1______, suite à un appel pour un conflit dans la rue ; les protagonistes, soit les époux A/C______ et L______ (frère de A______) ont été invités à se séparer. Le 17 décembre 2019, c’est une patrouille pédestre qui a constaté que C______ était en pleurs dans la rue de la Mairie, tandis que A______ se trouvait à proximité. Les conjoints ont été acheminés à un poste de police où leur conflit a été dénoué par les policiers.

Entendu sur la plainte déposée le 9 décembre 2019 par son épouse, A______ a nié s’être rendu dans l’appartement le 5 décembre précédent, affirmant être resté au pied de l’immeuble (pièce C-82). Il avait filmé leur rencontre du 8 décembre 2019 dans le tram et s’est engagé à en verser les images à la procédure, ce qu’il n’a toutefois jamais fait (pièce C-84).

h.    Le 21 mai 2020, C______ a déposé plainte en lien avec les événements du 11 décembre précédent. Son époux lui avait donné deux gifles et l’avait injuriée sans qu’elle se souvienne des mots employés (pièce A-31). A______ a nié toute violence physique ou verbale à cette occasion ; il s’était disputé avec son épouse en raison de la présence de K______ (pièce C-210).

Selon L______, une dispute avait débuté entre les époux dans un établissement public, qu’ils avaient dû quitter. Dans la rue, son frère n’avait pas vraiment giflé son épouse mais l’avait « poussée au niveau du visage avec sa main gauche sur la joue droite » (pièce C-216) ; celle-ci avait crié, ce qui avait conduit un passant à appeler les secours. Les policiers étaient arrivés peu après. K______ n’était pas présent.

i.      Le 21 août 2020, une patrouille de police est intervenue au domicile de C______, en raison de cris provenant de l’intérieur. Celle-ci leur a indiqué qu’elle hurlait au téléphone avec son époux, qui l’avait violentée la veille. Elle a ainsi déposé plainte à l’encontre de A______, expliquant qu’elle lui avait ouvert la porte la veille au soir parce qu’il frappait avec insistance, en présence de leurs filles, et qu’il avait ainsi pu manger avec elles. Il avait refusé de quitter les lieux après le repas et exigé de pouvoir regarder son téléphone, ce qu’elle avait refusé et il l’avait alors frappée à la tête et au poing gauche. Elle n’a pas souhaité consulter un médecin (pièce A-38).

Interrogé par la police, A______ a nié s’être rendu chez son épouse le jour en question, affirmant s’être trouvé chez sa sœur, laquelle l’a toutefois contesté (pièce C-190).

C. a. A la demande de A______, le MP ne s’y étant pas opposé alors qu’il l’avait fait auparavant, la Chambre pénale d'appel et de révision (CPAR) a ordonné l’apport à la procédure d’une copie d’une procédure liée à une plainte déposée par A______ à l’encontre de K______ en septembre 2020. Il en ressort que A______ a dénoncé celui-ci en affirmant qu’il le menaçait régulièrement, sans toutefois avoir produit les messages de menaces allégués, ce qui a conduit le MP à refuser d’entrer en matière sur la plainte.

La CPAR a invité la police à lui transmettre les inscriptions figurant à la main courante concernant les époux A/C______ pour la période du 1er janvier 2018 au 20 août 2020. Selon les extraits transmis par courriel du 13 septembre 2022, la police est intervenue à 20 reprises dans la période concernée, essentiellement en 2019 ; à sept reprises, l’intervention a été sollicitée par un voisin, et à trois reprises par des passants pour une altercation sur la voie publique.

b. Aux débats d’appel, A______ a persisté dans ses déclarations précédentes et nié toute violence. Tout ce que C______ avait dit de mauvais à son égard lui avait été soufflé par K______ ; depuis le dépôt de plainte à l’égard de ce dernier, il n’y avait plus eu d’incident.

Il lui arrivait de se disputer avec son épouse ; les nombreuses interventions de la police étaient dues au fait que celle-ci ne voulait pas lui confier les enfants.

Lors des faits de la nuit du 23 au 24 août 2019, il logeait au foyer. Il s’était disputé et son épouse l’avait planté vers 20h et non 1h du matin. Il a contesté avoir dit que l’auteur du coup était K______ ; celui-ci était néanmoins présent, comme il l’avait d’ailleurs mentionné au médecin (pièce B-74). Il ignorait comment son épouse avait subi la lésion occipitale constatée par le médecin, dont il n’était en tout cas pas responsable.

Il avait effectivement abimé la porte dans un accès de colère le 5 décembre 2019 ; en fait il n’était pas énervé mais fâché. Il n’avait pas frappé son épouse à cette occasion : en réalité il n’était pas fâché mais « galère, triste ».

Il avait envoyé la vidéo du 8 décembre 2019 à la police, qui ne l’avait pas fait suivre ; il avait égaré les codes et ne pouvait plus la récupérer.

Le 11 décembre 2019, K______ était bel et bien présent, nonobstant les déclarations de son frère : il avait une famille mais ils ne l'aidaient plus.

Il n’exagérait pas le rôle de K______, qui l’avait blessé pour beaucoup de choses et avait gâché sa vie.

Il se trouvait bel et bien chez sa sœur le 20 août 2020 ; celle-ci avait menti à la police de peur de se voir reprocher par l’Hospice général d’avoir logé une personne dans son appartement subventionné par cette institution.

Il avait déposé plainte car I______ ne voulait pas payer l'assurance ; I______ lui-même lui avait conseillé de le faire, car il ne voulait pas payer l'assurance. Il ne connaissait pas son nom, raison pour laquelle la plainte avait été déposée contre inconnu.

c. C______ a également confirmé ses précédentes déclarations. K______ n'avait rien à voir avec elle. Elle n’avait pas porté plainte à chaque fois que son époux était violent envers elle car il n'y avait pas de suite ; la police n’avait rien fait pour elle. Elle n’était pas allée faire constater ses lésions à chaque fois car personne ne payait ses factures médicales et elle était très mal et n'avait pas la force d'y aller. Elle laissait le courrier de A______ dans la boîte aux lettres au rez-de-chaussée de l'immeuble.

d. Par la voix de son conseil, C______ persiste dans les conclusions de son appel joint. Elle était victime de violences conjugales et devait être entendue. Son traumatisme était important et justifiait l’octroi d’une indemnité de CHF 3'000.-.

e. Par la voix de son conseil, A______ persiste dans ses conclusions. Le conflit conjugal n’avait jamais dépassé les éclats de voix et était en lien avec des questions de droit de garde et de visite sur les enfants ; dès que ce droit avait été rétabli, il n’y avait plus eu de difficulté. Rien ne permettait de tenir les faits pour établis et il fallait l’acquitter intégralement.

Il n’avait pas menti à la police lors de la plainte pour le vol de sa voiture. Il souffrait d’un retard mental avéré, pour lequel il percevait des prestations de l’assurance invalidité : dans son esprit, la voiture avait bien été volée, même si juridiquement il pouvait s’agir plutôt d’un abus de confiance. Matériellement il n’y avait donc pas de dénonciation calomnieuse. Les faits en lien avec F______ ne s’étaient pas produits de la manière décrite par celui-ci, qui manifestement voulait cacher l’existence d’une relation sexuelle tarifée. En tout état il n’y avait pas eu de vol puisque la carte bancaire n’avait été utilisée que quelques instants puis restituée.

D. A______, ressortissant suisse, est né le ______ 1988. Il est marié et père de quatre enfants. Il n'exerce pas d'activité lucrative et bénéficie de prestations de l'assurance-invalidité (AI) d'un montant mensuel de CHF 3'425.-, comprenant des rentes complémentaires d'un montant individuel de CHF 472.- pour chaque enfant, depuis le 1er août 2020, en raison de problèmes de santé. Son assurance maladie est prise en charge, en collaboration avec l’assurance invalidité, par l'Hospice général qui a également mis un logement à sa disposition jusqu'au mois de janvier 2022 ; il a ensuite emménagé dans un foyer dépendant de cette institution, dans lequel il ne peut pas recevoir ses enfants. Il n'a aucune fortune et a des dettes à hauteur de CHF 50'000.-. Il ne verse aucune contribution d'entretien à son épouse et ses enfants. Il voit ses enfants chaque mardi, ainsi que le dimanche, une semaine sur deux.

Selon les pièces qu’il a produites, A______ souffre d’un retard mental moyen, de troubles envahissants du développement, d’un trouble dépressif récurrent et d’un trouble de la personnalité (sans précision).

A teneur de l'extrait de son casier judiciaire suisse, A______ a été condamné à trois reprises :

·      le 13 février 2015, par le MP, à une peine pécuniaire de 100 jours-amende à CHF 60.- pour dénonciation calomnieuse et violation grave des règles de la circulation routière ;

·      le 26 janvier 2016, par le Tribunal criminel de Lausanne, à une peine privative de liberté de deux ans assortie du sursis et d'un délai d'épreuve de cinq ans, pour vol en bande, dommages à la propriété, violation de domicile, infraction grave à la loi sur les stupéfiants (art. 19 al. 2 let. a et b) ;

·      le 19 septembre 2019, par le TP, à une peine pécuniaire de 90 jours-amende à CHF 30.- pour lésions corporelles par négligence.

E. Me B______, défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, neuf heures d'activité de chef d'étude hors débats d'appel, lesquels ont duré deux heures et demie, l’audience ayant débuté en retard en raison d’un problème d’interprète.

Me D______, conseil juridique gratuit de C______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, hors débats d'appel (auxquels le stagiaire a assisté la plaignante), sous des libellés divers, deux heures et demie d'activité de cheffe d'étude et huit heures et dix minutes d'activité de stagiaire (dont 2h10 pour la consultation du dossier, laquelle a en réalité duré 1h35 selon le relevé du greffe).

EN DROIT :

1. L’appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

Il en va de même de l'appel joint (art. 400 al. 3 let. b et 401 CPP).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2. 2.1. L'art. 10 al. 2 CPP consacre le principe de la libre appréciation des preuves, en application duquel le juge donne aux moyens de preuve produits tout au long de la procédure la valeur qu'il estime devoir leur attacher pour se forger une intime conviction sur la réalité d'un fait (arrêt du Tribunal fédéral 6B_348/2012 du 24 octobre 2012 consid. 1.3). Le juge du fait dispose d'un large pouvoir dans l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 4b p. 40). Confronté à des versions contradictoires, il forge sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents. Les preuves doivent être examinées dans leur ensemble et l'état de fait déduit du rapprochement de divers éléments ou indices. Un ou plusieurs arguments corroboratifs peuvent demeurer fragiles si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (ATF 129 I 8 consid. 2.1 p. 9 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_324/2017 du 8 mars 2018 consid. 1.1 ; 6B_1183/2016 du 24 août 2017 consid. 1.1 ; 6B_445/2016 du 5 juillet 2017 consid. 5.1).

Les cas de "parole contre parole", dans lesquels les déclarations de la victime en tant que principal élément à charge et les déclarations contradictoires de la personne accusée s'opposent, ne doivent pas nécessairement conduire à un acquittement sur la base du principe in dubio pro reo. L'appréciation définitive de ces déclarations incombe au tribunal du fond (ATF 137 IV 122 consid. 3.3).

L'appréciation des preuves implique donc une appréciation d'ensemble. Le juge doit forger sa conviction sur la base de tous les éléments et indices du dossier. Le fait que l'un ou l'autre de ceux-ci ou même chacun d'eux pris isolément soit insuffisant ne doit ainsi pas conduire systématiquement à un acquittement. La libre appréciation des preuves implique que l'état de fait retenu pour construire la solution doit être déduit des divers éléments et indices, qui doivent être examinés et évalués dans leur ensemble (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1169/2017 du 15 juin 2018 consid. 1.1 ; 6B_608/2017 du 12 avril 2018 consid. 3.1 et les références).

2.2. Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves au sens large (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.1 ; ATF 127 I 28 consid. 2a).

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. L'absence de doute à l'issue de l'appréciation des preuves exclut la violation de la présomption d'innocence en tant que règle sur le fardeau de la preuve (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3). Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3.3).

2.3. L'art. 123 CP réprime les lésions du corps humain ou de la santé qui ne peuvent être qualifiées de graves au sens de l'art. 122 CP. Cette disposition protège l'intégrité corporelle et la santé tant physique que psychique. La distinction entre lésions corporelles et voies de fait peut s'avérer délicate, notamment lorsque l'atteinte s'est limitée à des meurtrissures, des écorchures, des griffures ou des contusions. Dans les cas limites, il faut tenir compte de l'importance de la douleur provoquée, afin de déterminer s'il s'agit de lésions corporelles simples ou de voies de fait. Les contusions meurtrissures, écorchures ou griffures constituent des lésions corporelles simples si le trouble qu'elles apportent, même passager, équivaut à un état maladif, notamment si viennent s'ajouter au trouble du bien-être de la victime un choc nerveux, des douleurs importantes, des difficultés respiratoires ou une perte de connaissance. Par contre, si les contusions, meurtrissures, écorchures ou griffures en cause ne portent qu'une atteinte inoffensive et passagère au bien-être du lésé, les coups, pressions ou heurts dont elles résultent ne constituent que des voies de fait (ATF 119 IV 25 consid. 2a p. 26 ; 107 IV 40 consid. 5c p. 42 ; 103 IV 65 consid. II 2c p. 70 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 6S.474/2005 du 27 février 2006 consid. 7.1.).

2.4. Les voies de fait, réprimées par l'art. 126 CP, se définissent comme des atteintes physiques qui excèdent ce qui est socialement toléré et qui ne causent ni lésions corporelles, ni dommage à la santé. Une telle atteinte peut exister même si elle n'a causé aucune douleur physique. Une éraflure au nez avec contusion a été considérée comme une voie de fait ; de même une meurtrissure au bras et une douleur à la mâchoire sans contusion (ATF 134 IV 189 consid. 1.2 et 1.3). Ont également été qualifiés de voies de fait : une gifle, un coup de poing ou de pied, de fortes bourrades avec les mains ou les coudes (arrêts du Tribunal fédéral 6B_693/2017 du 24 août 2017 consid. 2.1 ; 6B_1009/2014 du 2 avril 2015 consid. 4.2), l'arrosage d'une personne au moyen d'un liquide ou le renversement d'un liquide ou solide (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1009/2014 du 2 avril 2015 consid. 4.4), l'ébouriffage d'une coiffure soigneusement élaborée ou encore un "entartage" et la projection d'objets durs d'un certain poids (ATF 117 IV 14 consid. 2a/cc ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_163/2008 du 15 avril 2008 consid. 2 et 6P.99/2001 du 8 octobre 2001 consid. 2b et 2c).

Les voies de fait ne sont en principe punissables que sur plainte (cf. art. 126 al. 1 CP). Elles se poursuivent toutefois d'office dans les cas énumérés à l'art. 126 al. 2 CP, qui, pour chacune des hypothèses prévues, implique que l'auteur ait agi à réitérées reprises. Tel est le cas lorsque les voies de fait sont commises plusieurs fois sur la même victime et dénotent une certaine habitude (ATF 134 IV 189 consid. 1.2. p. 191 ; ATF 129 IV 216 consid. 3.1 p. 222).

La distinction entre lésions corporelles et voies de fait peut s'avérer délicate, notamment lorsque l'atteinte s'est limitée à des meurtrissures, des écorchures, des griffures ou des contusions. Dans les cas limites, il faut tenir compte de l'importance de la douleur provoquée, afin de déterminer s'il s'agit de lésions corporelles simples ou de voies de fait. Les contusions meurtrissures, écorchures ou griffures constituent des lésions corporelles simples si le trouble qu'elles apportent, même passager, équivaut à un état maladif, notamment si viennent s'ajouter au trouble du bien-être de la victime un choc nerveux, des douleurs importantes, des difficultés respiratoires ou une perte de connaissance. Par contre, si les contusions, meurtrissures, écorchures ou griffures en cause ne portent qu'une atteinte inoffensive et passagère au bien-être du lésé, les coups, pressions ou heurts dont elles résultent ne constituent que des voies de fait (ATF 119 IV 25 consid. 2a p. 26 ; 107 IV 40 consid. 5c p. 42 ; 103 IV 65 consid. II 2c p. 70 et les références ; arrêt du Tribunal fédéral 6S.474/2005 du 27 février 2006 consid. 7.1).

2.5. Se rend coupable d'injure celui qui aura, par la parole, l'écriture, l'image, le geste ou par des voies de fait, attaqué autrui dans son honneur (art. 177 al. 1 CP). Cette infraction est subsidiaire par rapport à la diffamation (art. 173 CP) ou à la calomnie (art. 174 CP).

L'art. 177 al. 2 CP permet au juge d'exempter l'auteur d'une injure de toute peine si l'injurié a directement provoqué l'injure par une conduite répréhensible. Il s'agit d'une faculté, non d'une obligation (ATF 109 IV 39 consid. 4b in fine p. 43). Le juge ne peut faire usage de la faculté que lui réserve l'art. 177 al. 2 CP que si l'injure a consisté en une réaction immédiate à un comportement répréhensible de l'injurié, lequel peut consister en une provocation ou en tout autre comportement blâmable (arrêt du Tribunal fédéral 6B_602/2009 du 29 septembre 2009 consid. 2.2).

2.6. Selon l'art. 180 al. 1 CP, celui qui, par une menace grave, aura alarmé ou effrayé une personne sera, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire. La poursuite a lieu d'office si l'auteur est le conjoint de la victime et que la menace a été commise durant le mariage ou dans l'année qui a suivi le divorce (art. 180 al. 2 let. a CP).

Sur le plan objectif, l'art. 180 al. 1 CP suppose la réalisation de deux conditions. Premièrement, il faut que l'auteur ait émis une menace grave, soit une menace objectivement de nature à alarmer ou à effrayer la victime. On tient compte de la réaction qu'aurait une personne raisonnable, dotée d'une résistance psychologique plus ou moins normale, face à une situation identique (ATF 122 IV 97 consid. 2b p. 100 ; ATF 99 IV 212 consid. 1a p. 215 ss ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_578/2016 du 19 août 2016 consid. 2.1). En second lieu, il faut que la victime ait été effectivement alarmée ou effrayée, peu importe que les menaces lui aient été rapportées de manière indirecte par un tiers. L'infraction est intentionnelle, le dol éventuel étant suffisant (arrêts du Tribunal fédéral 6B_578/2016 du 19 août 2016 consid. 2.1 ; 6B_871/2014 du 24 août 2015 consid. 2.2.2 ; 6B_820/2011 du 5 mars 2012 consid. 3).

2.7. L'art. 139 ch. 1 CP réprime le comportement de celui qui, pour se procurer ou procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura soustrait une chose mobilière appartenant à autrui dans le but de se l'approprier.

L'auteur du vol doit soustraire la chose dans le but de se l'approprier. Ainsi, il ne suffirait pas quil ait le dessein d'utiliser temporairement la chose ou de la détruire ; il faut qu'il veuille l'incorporer à son patrimoine en vue de la conserver ou de l'aliéner (ATF 85 IV 17 ; B. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. I, 3e éd., Berne 2010, N 9 ad art. 139). Le dessein de soustraire la chose implique la volonté de dépouiller durablement l’ayant droit pour incorporer l’objet volé à son patrimoine (A. MACALUSO et al. (éds), Commentaire romand, Code pénal II, vol. II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, N 48 et 51 ad art. 139).

2.8. L'art. 147 al. 1 CP réprime le comportement de celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura, en utilisant des données de manière incorrecte, incomplète ou indue ou en recourant à un procédé analogue, influé sur un processus électronique ou similaire de traitement ou de transmission de données et aura, par le biais du résultat inexact obtenu, provoqué un transfert d'actifs au préjudice d'autrui ou l'aura dissimulé aussitôt après.

L'auteur qui dérobe une carte bancaire et lutilise ensuite frauduleusement commet, en concours réel, un vol au sens de lart. 139 CP, portant sur la carte elle-même et une utilisation frauduleuse dun ordinateur portant sur les valeurs obtenues (M. DUPUIS et al., Petit commentaire du Code pénal, 2ème éd., Bâle 2017, N 1 ss et 30 ad art. 147).

2.9. L'art. 304 al. 1 CP punit celui qui aura dénoncé à l'autorité une infraction qu'il savait n'avoir pas été commise ou celui qui se sera faussement accusé auprès de l'autorité d'avoir commis une infraction. Cette disposition réprime ainsi la dénonciation d'une infraction fictive.

Il se peut que le récit de l'auteur soit empreint de vrai et de faux. La seule communication de faux renseignements à propos d'une infraction réellement commise ne suffit pas à violer CP 304 CP (STETTLER, in A. MACALUSO / L. MOREILLON / N. QUELOZ (éds), Commentaire romand, Code pénal II, vol. II, Partie spéciale : art. 111-392 CP, Bâle 2017, n. 8 ad art. 304 CP). Fournir de fausses informations sur les circonstances d'un crime effectivement commis ne réalise pas les conditions de l’infraction (arrêt du Tribunal fédéral 6B_852/2015 du 10 février 2016, considérant 2.1).

2.10. L'art. 9 CPP consacre la maxime d'accusation, laquelle découle également des art. 29 al. 2 Cst. (droit d'être entendu), 32 al. 2 Cst. (droit d'être informé, dans les plus brefs délais et de manière détaillée, des accusations portées contre soi) et 6 par. 3 let. a CEDH (droit d'être informé de la nature et de la cause de l'accusation).

Selon ce principe, l'acte d'accusation définit l'objet du procès (fonction de délimitation). Une infraction ne peut faire l'objet d'un jugement que si le ministère public a déposé auprès du tribunal compétent un acte d'accusation dirigé contre une personne déterminée sur la base de faits précisément décrits. Il doit décrire les infractions qui sont imputées au prévenu de façon suffisamment précise pour lui permettre d'apprécier, sur les plans subjectif et objectif, les reproches qui lui sont faits (cf. art. 325 CPP). En effet, le prévenu doit connaître exactement les faits qui lui sont imputés et quelles sont les peines et mesures auxquelles il est exposé, afin qu'il puisse s'expliquer et préparer efficacement sa défense (fonction de délimitation et d'information ; ATF 143 IV 63 consid. 2.2 p. 65 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_834/2018 du 5 février 2019 consid. 1.1).

3. 3.1. En l’espèce, il ressort de la procédure que les relations entre l’appelant et son épouse sont empreintes de disputes et d’altercations, au point que les services sociaux leur ont retiré la garde de leurs quatre enfants. L’appelant ne peut dès lors sérieusement soutenir qu’il n’a jamais eu le moindre geste de violence à l’égard de son épouse, tout en admettant avoir pu être fâché à quelques occasions. Les nombreuses interventions policières sur appels de tiers confirment l’existence d’un sérieux conflit et d’épisodes répétés, et mettent en lumière un comportement harcelant à l’égard de sa conjointe.

Cette constatation générale ne permet toutefois pas encore à elle seule de le reconnaître coupable de l’ensemble des infractions retenues dans l’acte d’accusation. En effet, il ressort de la procédure que l’épouse de l’appelant a participé à l’escalade, à tout le moins verbale, et qu’à quelques reprises c’est son comportement à elle qui a suscité l’intervention de la police ou l’appel de tiers. A cela s’ajoutent la barrière linguistique de l’épouse ainsi que le retard mental de l’appelant, qui n’ont pas facilité la récolte d’informations précises et l’établissement des faits.

Enfin, l’appelant semble nourrir une jalousie irrationnelle et hors de toute proportion envers un tiers, qu’il accuse de tous les maux, alors que plusieurs personnes, y-compris son épouse et son propre frère, mettent cette personne hors de cause. Cette obsession aberrante altère parfois sa manière de décrire le déroulement des faits.

Il faut dès lors examiner les faits avec retenue et se fonder sur les quelques éléments objectifs au dossier et notamment les constatations médicales ou de tiers.

Ainsi, les faits décrits de façon toute générale dans l’acte d’accusation, sous chiffre 1.1 aux lettres a. et b., qui ne sont pas circonscrits dans le temps ni décrits de façon circonstanciée, ne peuvent conduire à un verdict de culpabilité, faute de précision suffisante de l’acte d’accusation. L’acquittement doit dès lors être confirmé.

3.2. Les parties divergent au sujet des faits survenus la nuit du 23 au 24 août 2019 (ch. 1.1 let. c de l’acte d’accusation). Tant l’appelant que son épouse présentaient des lésions constatées médicalement. La version de l’appelant a varié, puisqu’il a imputé sa lésion à la main tantôt à son épouse, tantôt à celui qu’il soupçonne d’être l’amant de celle-ci dont la présence sur place n’est pas établie et n’a en tout cas pas été constatée par les intervenants. Il a par ailleurs varié sur l’heure des événements, alors qu’il ressort clairement de la procédure (pièces B-84 ss) que les faits se sont produits en pleine nuit, après 1h du matin. Cette heure nocturne n’est pas sans pertinence, dans la mesure où elle accrédite les propos de l’épouse quant à la venue de l’appelant à une heure indue sous un prétexte peu clair, les époux vivant alors séparés.

L’épouse a pour sa part fait des déclarations relativement succinctes mais constantes. L’ecchymose occipitale a été constatée par un médecin au poste de police, ce qui confirme le lien temporel avec l’épisode qui a opposé les époux cette nuit-là. Une appréciation globale des déclarations des protagonistes et des constatations policières conduit à retenir que les faits décrits par C______ et l’acte d’accusation se sont bien produits, et que l’appelant est à l’origine de la contusion constatée.

Cette contusion doit être qualifiée de lésion corporelle au sens de l’art. 123 CP. En effet, d’une part, son emplacement confirme le mécanisme de chute au sol, qui entraîne une certaine violence. D’autre part, la plaignante a présenté des douleurs persistantes suite à cette lésion (qui ont justement conduit les gendarmes à faire appel à un médecin), ce qui est la marque d’une lésion dépassant le seuil de la simple voie de fait. Les faits tombant sous le coup de l’art. 123 ch. 2 CP, il n’y a pas lieu d’examiner l’application de l’art. 123 ch. 1 in fine CP.

En revanche, nonobstant la crédibilité globale de l’épouse, rien ne permet d’établir l’existence des menaces alléguées par l’épouse en lien avec cet épisode (ch. 1.4. let. a de l’acte d’accusation). L’acquittement pour ces faits sera confirmé, au bénéfice du doute.

3.3. Les faits survenus le 5 décembre 2019 (ch. 1.1 let. d de l’acte d’accusation) sont décrits de façon extrêmement succincte et sont concomitants aux accusations de viol qui ont été définitivement écartées par le MP. Ils sont intrinsèquement liés à cette accusation, ces faits de violence pouvant s’inscrire dans la contrainte liée à l’agression sexuelle. Celle-ci n’étant pas retenue et en l’absence de tout autre élément objectif, les coups ne peuvent pas être établis et l’acquittement sera confirmé.

3.4. Les faits du 11 décembre 2019 (ch. 1.1. let. e de l’acte d’accusation) sont décrits par le propre frère de l’appelant, étant relevé que ce qu’il qualifie de « poussée » est décrit comme une gifle par la partie plaignante, qui n’a toutefois fourni aucun constat de lésion, les policiers arrivés sur place n’ayant d’ailleurs rien constaté et renoncé à intervenir immédiatement. En tout état de cause, un tel geste excède manifestement ce qui est socialement toléré et doit être qualifié de voie de fait (art. 126 ch. 2 CP). Le verdict de culpabilité sera donc confirmé.

3.5. Les parties divergent au sujet des faits survenus le 20 août 2020 (ch. 1.1 let. f de l’acte d’accusation). La version de l’appelant est clairement mensongère puisqu’il a affirmé se trouver chez sa sœur le soir des faits, ce que celle-ci a contesté, sans qu’il n’y ait lieu de mettre sa parole en doute. La seule intervention de police en lien avec ces faits a eu lieu le lendemain, alors que l’épouse était seule à son domicile. Aucun élément objectif ne permet ainsi de retenir que les faits décrits par la plaignante se sont effectivement produits. Au bénéfice du doute, et nonobstant ses mensonges, l’appelant sera donc acquitté de ces faits.

3.6. L’appelant conteste avoir injurié son épouse le 8 décembre 2019 (ch. 1.3 de l’acte d’accusation), tout en se prévalant du fait qu’elle aurait répondu sur le même ton. Il a ensuite nié devant le premier juge toute injure entre les conjoints. Il s’est abstenu de fournir la vidéo qu’il affirmait détenir à ce sujet, les explications fournies sur ce point en appel étant manifestement dépourvues de tout fondement. Il ressort des faits de la cause qu’une altercation a opposé les époux à la gare de Cornavin, au cours de laquelle un témoin a appelé la police. A l’issue de cette altercation, l’épouse a manifestement décompensé en s’adressant à des passants, ce qui ressort de la main-courante en lien avec ces faits. Dans ces conditions, il est très vraisemblable, comme l’a retenu le premier juge, que l’appelant a réagi à son tour par des injures lorsqu’il s’est retrouvé avec son épouse dans le tram. Le défaut de production de la vidéo du jour des faits est d’ailleurs un indice en ce sens.

Par ailleurs, comme relevé ci-dessus, seul celui qui répond immédiatement à une injure peut se prévaloir du droit à la riposte, au sens de l’art. 177 al. 2 CP. Or, les conditions de cette disposition ne sont pas réalisées puisque les injures ont été proférées alors que les faits ne sont pas concomitants.

Le verdict de culpabilité doit dès lors être confirmé.

En revanche, rien ne permet d’établir l’existence des menaces alléguées par l’épouse en lien avec cet épisode (ch. 1.4. let. b de l’acte d’accusation). L’acquittement pour ces faits sera confirmé, au bénéfice du doute.

3.7. L’appelant conteste tout vol ou abus de carte bancaire le 26 octobre 2019, affirmant avoir retiré de l’argent à la demande et au su du lésé. Cette version ne résiste toutefois pas à l’examen. D’une part, la somme en cause (CHF 3'800.- et CHF 1'000.-) apparaît hors de toute proportion avec la prestation sexuelle qu’il prétend avoir fournie – et qui n’est pas établie. D’autre part, sa version des faits défie toute logique, dans la mesure où l’on ne comprend pas pourquoi le lésé l’aurait envoyé retirer de l’argent en pleine nuit, après avoir lui-même retiré de l’argent au distributeur peu avant et n’avait donc pas de raison d’en retirer à nouveau.

Le retrait de plainte du lésé n’a d’autre portée que celle d’un acte de procédure et il n’y a pas lieu d’y lire un quelconque lien avec les faits dénoncés, étant relevé que le lésé a comparu à l’audience de confrontation convoquée par le MP nonobstant ce retrait de plainte et confirmé les faits dénoncés.

Le montant du préjudice doit toutefois être arrêté à CHF 3'800.-, les CHF 50.- décrits dans l’acte d’accusation ayant été retirés par le lésé lui-même le soir des faits. Si le lésé décrit certes le vol de cette somme dans son porte-monnaie, cette version ne figure pas dans l’acte d’accusation et n’a dès lors pas à être examinée.

Sous cette réserve, qu’il n’y a pas lieu de transcrire dans le dispositif du présent arrêt puisqu’il s’agit uniquement d’une appréciation différente de l’ampleur du préjudice dans un état de fait formant une seule infraction, le verdict de culpabilité pour utilisation frauduleuse d’un ordinateur sera donc confirmé.

L’appelant sera en revanche acquitté de linfraction de vol relative à la soustraction de la carte bancaire. Lélément constitutif du dessein dappropriation nest pas rempli en lespèce, dès lors qu’il l’a immédiatement replacée dans les affaires du lésé après usage : il ne peut ainsi être retenu quil avait lintention de len priver de manière durable et dincorporer cet objet à son patrimoine, lutilisation de la carte nayant été que très temporaire.

3.8. L’appelant a dénoncé dans sa plainte du 18 octobre 2018 le vol de sa voiture, alors qu’il savait pertinemment que cette voiture se trouvait en possession d’un tiers auquel il l’avait remise en prêt voire, selon les versions qu’il a fournies, vendue. Il n’est pas établi que ce tiers ait effectivement refusé de s’acquitter des frais ou du prix convenu ; au contraire, celui-ci a expliqué s’être acquitté des taxes d’immatriculation du véhicule. Aucun autre élément ne permet de retenir que l’intéressé a effectivement refusé de s’acquitter du prix convenu ou de charges en lien avec la voiture. L’appelant a initialement expliqué en détail comment et pourquoi il soupçonnait ce tiers du vol de sa voiture, commis à son insu ; il a répété ces explications à la police tant à Berne qu’à Genève.

Il ressort par ailleurs de la procédure que l’appelant n’a annoncé le soi-disant vol des plaques d’immatriculation qu’après l’arrestation de ce tiers en flagrant délit de cambriolage, et qu’il n’a formellement déposé la plainte susmentionnée qu’après avoir reçu un appel de la police bernoise à ce sujet. Force est de constater qu’il a dû apprendre, par des proches de l’intéressé, l’arrestation du tiers au volant de sa voiture ; c’est d’ailleurs ce qu’il explique indirectement lors de son audition à Genève (pièces B-6-7). Dès lors, il a manifestement agi dans le but, maladroit, de se dédouaner de toute responsabilité pour les infractions commises par ce tiers avec sa voiture, et non parce que celle-ci faisait l’objet d’une appropriation, d’un vol ou d’un abus de confiance. Le fait de commettre des cambriolages en se servant du véhicule de l’appelant ne constitue en rien une infraction à son détriment ; en inventant une atteinte à son patrimoine, pour se distancer de l’auteur de ces cambriolages, l’appelant a sans hésitation aggravé le sort pénal de celui-ci, puisqu’il l’a accusé d’une infraction contre le patrimoine qu’il n’avait pas commise. Les faits ne sont pas constitutifs d’une dénonciation calomnieuse, puisque la plainte a été formée contre inconnu ; il n’en demeure pas moins que le jour où l’appelant l’a déposée, il savait parfaitement que sa voiture n’avait pas été volée, puisqu’il l’avait lui-même remise à ce tiers, et savait de surcroît où se trouvait sa voiture et qui avait été interpellé à son volant, puisqu’il avait déjà eu un contact avec la police bernoise à ce sujet.

L’appelant a donc bel et bien dénoncé une infraction qu’il savait ne pas avoir été commise en déposant plainte pour le vol de sa voiture le 18 octobre 2018. Sa condamnation pour induction de la justice en erreur sera confirmée.

4. 4.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1). L'art. 47 CP confère un large pouvoir d'appréciation au juge (ATF 144 IV 313 consid. 1.2).

4.2. Aux termes de l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion.

Lorsque les peines envisagées concrètement sont de même genre, l'art. 49 al. 1 CP impose au juge, dans un premier temps, de fixer la peine pour l'infraction abstraitement - d'après le cadre légal fixé pour chaque infraction à sanctionner - la plus grave, en tenant compte de tous les éléments pertinents, parmi lesquels les circonstances aggravantes ou atténuantes. Dans un second temps, il augmentera cette peine pour sanctionner chacune des autres infractions, en tenant là aussi compte de toutes les circonstances y relatives (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.2).

L'exigence, pour appliquer l'art. 49 al. 1 CP, que les peines soient de même genre, implique que le juge examine, pour chaque infraction commise, la nature de la peine à prononcer pour chacune d'elle. Le prononcé d'une peine d'ensemble en application du principe de l'aggravation contenu à l'art. 49 CP n'est ensuite possible que si le juge choisit, dans le cas concret, le même genre de peine pour sanctionner chaque infraction commise. Que les dispositions pénales applicables prévoient abstraitement des peines de même genre ne suffit pas. Si les sanctions envisagées concrètement ne sont pas du même genre, elles doivent être prononcées cumulativement. La peine privative de liberté et la peine pécuniaire ne sont pas des sanctions du même genre (ATF 144 IV 313 consid. 1.1.1 p. 316).

4.3. Les principes de l'art. 47 CP valent aussi pour le choix entre plusieurs sanctions possibles, et non seulement pour la détermination de la durée de celle qui est prononcée. Que ce soit par son genre ou sa quotité, la peine doit être adaptée à la culpabilité de l'auteur. Le type de peine, comme la durée de celle qui est choisie, doivent être arrêtés en tenant compte de ses effets sur l'auteur, sur sa situation personnelle et sociale ainsi que sur son avenir. L'efficacité de la sanction à prononcer est autant décisive pour la détermination de celle-ci que pour en fixer la durée (arrêt du Tribunal fédéral 6B_611/2014 du 9 mars 2015 consid. 4.2). Les peines privatives de liberté ne doivent être prononcées que lorsque l'État ne peut garantir d'une autre manière la sécurité publique. Le choix de la sanction doit être opéré en tenant compte au premier chef de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention (ATF 134 IV 97 consid. 4.2 p. 100 ss ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1249/2014 du 7 septembre 2015 consid. 1.2).

La peine pécuniaire constitue la sanction principale dans le domaine de la petite et moyenne criminalité, les peines privatives de liberté ne devant être prononcées que lorsque l'État ne peut garantir d'une autre manière la sécurité publique. Lorsque tant une peine pécuniaire qu'une peine privative de liberté entrent en considération et que toutes deux apparaissent sanctionner de manière équivalente la faute commise, il y a en règle générale lieu, conformément au principe de la proportionnalité, d'accorder la priorité à la première, qui porte atteinte au patrimoine de l'intéressé et constitue donc une sanction plus clémente qu'une peine privative de liberté, qui l'atteint dans sa liberté personnelle. Le choix de la sanction doit être opéré en tenant compte au premier chef de l'adéquation de la peine, de ses effets sur l'auteur et sur sa situation sociale ainsi que de son efficacité du point de vue de la prévention. La faute de l'auteur n'est en revanche pas déterminante (ATF 137 II 297 consid. 2.3.4 p. 301 ; ATF 134 IV 97 consid. 4.2 p. 100 s. ; ATF 144 IV 313 consid. 1.1.1 ; 6B_420/2017 du 15 novembre 2017 consid. 2.1), pas plus que sa situation économique ou le fait que son insolvabilité apparaisse prévisible (ATF 134 IV 97 consid. 5.2.3 p. 104).

4.4. La CPAR doit rendre un nouveau jugement, qui se substitue au jugement entrepris, et donc fixer à nouveau la peine en fonction des critères des art. 47 ss CP (art. 408 al. 1 CPP ; cf. arrêts du Tribunal fédéral 6B_25/2021 du 20 juillet 2022 consid. 4.4 ; 6B_848/2020 du 3 décembre 2020 consid. 2.2).

4.5. En l’espèce, le prévenu est reconnu coupable de contraventions (art. 126 CP et 92 al. 1 LCR), passibles d’une amende, de plusieurs délits et d’un crime (art. 123 ch. 2, 147, 304 CP, art. 90 al. 2, 91 al. 2, 91a LCR), passibles d’une peine pécuniaire ou privative de liberté. Les injures (art. 177 CP) sont sanctionnées exclusivement par une peine pécuniaire.

Le prévenu a commis ces infractions alors qu’il se trouvait encore dans le délai d’épreuve d’une peine privative de liberté de deux ans, prononcée à son encontre le 26 janvier 2016. Il a par ailleurs fait l’objet de deux peines pécuniaires fermes, avant et après cette condamnation, qui ne l’ont manifestement pas ramené sur le droit chemin. Il bénéficie certes d’un revenu régulier, mais cela ne l’a pas dissuadé de s’en prendre au patrimoine d’autrui. Il n’a manifestement pas compris le message, de clémence mais aussi d’avertissement, des autorités qui avaient jusqu’à présent renoncé à lui infliger une peine privative de liberté ferme. Il s’en est pris à divers biens juridiques (intégrité corporelle, honneur, patrimoine, administration de la justice et sécurité routière) avec désinvolture et sans aucune prise de conscience, ce qui démontre un complet mépris de l’autorité et des usages de la vie en société. Dans ces circonstances, le prononcé d’une peine privative de liberté s’impose, pour l’ensemble des infractions pour lesquelles une telle sanction est possible. En effet, seule l’exécution d’une peine privative de liberté est de nature, à ce jour, à pouvoir lui faire comprendre l’importance du respect des règles.

4.6. L’appelant a commis les différentes infractions retenues à son encontre dans des contextes variés. Il a été motivé par l’appât du gain pour l’utilisation frauduleuse d’une carte bancaire, qui lui a procuré une somme considérable en regard de ses moyens limités. La colère et la perte de contrôle sont les principales motivations des infractions commises au détriment de son épouse. Les infractions (répétées) en matière de circulation routière ont été commises par manque d’égard pour la sécurité d’autrui. Il a souvent réagi par emportement et défoulement colériques. Enfin, l’ensemble des infractions retenues reflète une indubitable lâcheté, l’appelant ayant été motivé par la crainte d’assumer ses responsabilités, qui l’a parfois conduit à commettre des infractions pour éviter d’avoir à rendre compte de son comportement (induction de la justice en erreur, violation des devoirs en cas d’accident), et s’en prenant à plus faible que lui. Cette lâcheté se retrouve dans son comportement en procédure, par lequel il refuse toute responsabilité pour ses débordements et rejette la faute sur autrui, notamment son épouse ou le supposé amant de celle-ci dont il semble avoir fait l’exécutoire de ses frustrations, critiquant ses frère et sœur quand leur version d’un événement ne corroborait pas la sienne plutôt que d’assumer ses gestes, voire accusant la police de dissimulation de preuves.

Sa situation personnelle, sans doute compliquée pendant la période de séparation conjugale, n’explique ni ne justifie son comportement. Il bénéficie de prestations de l’assurance invalidité, complétées par les services sociaux, qui l’aident notamment dans la gestion de la vie quotidienne (logement en foyer), et qui lui permettent en principe de subvenir à ses besoins. Il n’a pas su comprendre la gravité de la mesure de retrait de garde de ses enfants, pourtant singulièrement incisive, et persévéré dans un comportement inadéquat de harcèlement de son épouse.

Ses antécédents sont mauvais et, en grande partie, spécifiques, puisqu’il a déjà été condamné pour des infractions contre le patrimoine, l’intégrité corporelle, l’administration de la justice ainsi qu’en matière de sécurité routière, sans en tirer les conséquences en termes de comportement.

L’infraction objectivement la plus grave est l’utilisation frauduleuse d'un ordinateur (art. 147 CP), qui entraîne le prononcé d’une peine privative de liberté de trois mois, laquelle constitue la peine de base. Elle sera aggravée d’un mois pour tenir compte de l’infraction grave à la loi sur la circulation routière (art. 90 al. 2 LCR) et de la conduite d'un véhicule automobile dans l'incapacité de conduire pour d'autres raisons que l'alcool (art. 91 al. 2 let. b LCR), qui encourent chacune une peine privative de liberté théorique de 20 jours. Cette peine doit encore être aggravée d’un mois et demi pour l’induction de la justice en erreur (art. 304 CP ; peine théorique de deux mois) et devrait encore être aggravée d’un mois pour tenir compte des lésions corporelles simples (art. 123 ch. 2 CP) et de dix jours pour tenir compte de la tentative d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire (art. 91a al. 1 cum 22 CP). Compte tenu de l’interdiction de la reformatio in peius la peine d’ensemble doit toutefois être arrêtée à six mois (art. 391 al. 2 CPP).

Pour les mêmes motifs, il n’y a pas de place pour le prononcé d’une peine pécuniaire pour les injures, dans la mesure où le premier juge a omis d’en fixer une, l’appel de la partie plaignante ne remédiant pas à ce vice (art. 382 al. 2 CPP).

L’appelant ne conteste au surplus à raison pas le prononcé d’une peine ferme, les conditions du prononcé du sursis n’étant pas réalisées (cf. art. 42 al. 2 CP).

La présente peine privative de liberté étant d’un autre genre que la peine pécuniaire prononcée le 19 septembre 2019, elle ne lui est pas complémentaire ; le jugement entrepris sera réformé en ce sens.

Au surplus, la non-révocation du sursis accordé le 26 janvier 2016 est acquise à l’appelant.

4.7. L’appelant n’a pas formellement conclu à l’annulation de l’amende prononcée par le premier juge. Il concluait néanmoins à son acquittement pour l’une des contraventions (art. 126 CP), ce qui commande d’examiner cette sanction.

L’infraction la plus grave est celle à l’art. 126 CP, pour laquelle une peine de base de CHF 1'000.- est appropriée. Cette peine doit être aggravée pour tenir compte de la violation des devoirs en cas d’accident, qui entraîne une peine du même ordre. Dès lors, l’amende globale de CHF 1'500.- prononcée par le premier juge apparait adéquate et sera confirmée, tout comme la peine privative de liberté de substitution.

5. 5.1. En vertu de l'art. 126 al. 1 let. a. CPP, le tribunal statue sur les prétentions civiles présentées lorsqu'il rend un verdict de culpabilité à l'encontre du prévenu.

En qualité de partie plaignante, le lésé peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l’infraction par adhésion à la procédure pénale (art. 122 al. 1 CPP). Dans la mesure du possible, la partie plaignante chiffre ses conclusions civiles dans sa déclaration en vertu de l'art. 119 CPP et les motive par écrit. Elle cite également les moyens de preuves qu'elle entend invoquer (art. 123 al. 1 CPP).

5.2. En vertu de l'art. 47 CO, le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles une indemnité équitable à titre de réparation morale. Les circonstances particulières évoquées dans la norme consistent dans l'importance de l'atteinte à la personnalité du lésé, l'art. 47 CO étant un cas d'application de l'art. 49 CO. Les lésions corporelles, qui englobent tant les atteintes physiques que psychiques, doivent donc en principe impliquer une importante douleur physique ou morale ou avoir causé une atteinte durable à la santé.

En raison de sa nature, l'indemnité pour tort moral, qui est destinée à réparer un dommage ne pouvant que difficilement être réduit à une simple somme d'argent, échappe à toute fixation selon les critères mathématiques, de sorte que son évaluation en chiffres ne saurait excéder certaines limites. L'indemnité allouée doit toutefois être équitable (ATF 141 III 97 consid. 11.2 ; 130 III 699 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_267/2016 du 15 février 2017 consid. 8.1).

5.3. En l’espèce, l’appelant ne critique pas le montant alloué par le premier juge à son épouse au-delà de l’acquittement plaidé. Or, la procédure démontre indubitablement un comportement harcelant et violent de sa part à l’encontre de la partie plaignante, même si nombre d’acquittements sont confirmés. Dès lors, le montant de CHF 1’000.- alloué au titre de tort moral apparaît adéquat et proportionné à la gravité des faits et de la souffrance subie. Il sera dès lors confirmé sans qu’il n’y ait lieu de l’augmenter.

6. L'appel principal doit ainsi être très partiellement admis et l'appel joint rejeté.

L’appelant supportera en conséquence les trois quarts des frais de la procédure, le solde étant laissé à la charge de l’Etat (art. 428 et 136 al. 2 let. b CPP).

7. 7.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit (cf. art. 138 al. 1 CPP) est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique.

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

7.2. Le temps de déplacement de l'avocat est considéré comme nécessaire pour la défense d'office au sens de l'art. 135 CPP (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2015.33 du 28 juillet 2015 consid. 4.3 et les références). La rémunération forfaitaire de la vacation aller/retour au et du Palais de justice ou au et du bâtiment du Ministère public est arrêtée à CHF 55.- / CHF 75.- / CHF 100.- pour les stagiaires / collaborateurs / chefs d’étude, dite rémunération étant allouée d'office par la juridiction d'appel pour les débats devant elle.

7.3. Considéré globalement, l'état de frais produit par Me B______, défenseur d'office de A______, satisfait les exigences légales et jurisprudentielles régissant l'assistance judiciaire gratuite en matière pénale. Il convient de le compléter de la durée effective de l’audience ainsi que d’une vacation et du forfait de 10%, l’activité totale ayant durée plus de 30 heures.

La rémunération de Me B______ sera partant arrêtée à CHF 2'832.50 correspondant à 11h30 heures d'activité au tarif de CHF 200.-/heure plus la majoration forfaitaire de 10%, une vacation à CHF 100.- et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 202.50.

7.4. L'état de frais produit par Me M______, conseil juridique gratuit défenseure d'office de C______, correspond aux exigences légales, sous réserve de la consultation qui sera ramenée à sa durée effective. Il convient de le compléter de la durée effective de l’audience ainsi que d’une vacation et du forfait de 20%, l’activité totale ayant durée moins de 30 heures.

En conclusion, la rémunération de Me M______ sera arrêtée à CHF 2’127.10 correspondant à 2h30 heures d'activité au tarif de CHF 200.-/heure et 9h35 d’activité au tarif de CHF 110.-/heure plus la majoration forfaitaire de 20%, deux vacations à CHF 55.- et l'équivalent de la TVA au taux de 7.7% en CHF 152.10.

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit l'appel formé par A______ et l'appel joint formé par C______ contre le jugement JTDP/1602/2021 rendu le 14 décembre 2021 par le Tribunal de police dans la procédure P/109/2019.

Admet très partiellement l’appel principal et rejette l’appel joint.

Annule ce jugement.

Et statuant à nouveau :

Déclare A______ coupable de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 2 CP), de voies de faits (art. 126 al. 2 CP), d'utilisation frauduleuse d'un ordinateur (art. 147 CP), d'injures (art. 177 CP), d'induction de la justice en erreur (art. 304 CP), d'infraction grave à la loi sur la circulation routière (art. 90 al. 2 LCR), de conduite d'un véhicule automobile dans l'incapacité de conduire pour d'autres raisons que l'alcool (art. 91 al. 2 let. b LCR), de tentative d'entrave aux mesures de constatation de l'incapacité de conduire (art. 91a al. 1 cum 22 CP) et de violation des obligations en cas d'accident (art. 92 al. 1 LCR).

Acquitte A______ de vol (art. 139 CP), de menaces (art. 180 CP), de violation du devoir d'assistance ou d'éducation (art. 219 CP) et de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 2 CP) s'agissant des faits visés sous point 1.1.a, 1.1.b, 1.1.d et 1.1.f.

Condamne A______ à une peine privative de liberté de six mois, sous déduction de quatre jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Condamne A______ à une amende de CHF 1'500.- (art. 106 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 15 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Renonce à révoquer le sursis octroyé le 26 janvier 2016 par le Tribunal criminel de Lausanne, mais adresse un avertissement à A______ et prolonge le délai d'épreuve d’un an (art. 46 al. 2 CP).

Condamne A______ à payer à C______ CHF 1'000.-, avec intérêts à 5% dès le 23 août 2019, à titre de réparation du tort moral (art. 49 CO).

Prend acte de ce que le Tribunal de police a arrêté à CHF 8'706.70 l'indemnité de procédure due à Me B______, défenseur d'office de A______ pour la procédure préliminaire et de première instance et arrête à CHF 2'832.50 celle qui lui est due pour la procédure d’appel (art. 135 CPP).

Prend acte de ce que le Tribunal de police a arrêté à CHF 2'089.40 l'indemnité de procédure due à Me D______, conseil juridique gratuit de C______ pour la procédure préliminaire et de première instance et arrête à CHF 2’127.10 celle qui lui est due pour la procédure d’appel (art. 138 CPP).

Condamne A______ aux frais de la procédure préliminaire et de première instance en CHF 3’100.-, émolument complémentaire de jugement compris (art. 426 al. 1 CPP).

Arrête les frais de la procédure d'appel à CHF 1'945.-, comprenant un émolument de jugement de CHF 1'500.-.

Met les trois-quarts de ces frais, soit CHF 1'458.75 à la charge de A______ et laisse le solde de ces frais à la charge de l'État.

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal de police.

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

La présidente :

Gaëlle VAN HOVE

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

3'100.00

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

280.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

90.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'500.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

1'945.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

5'045.00