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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2962/2010

ATA/188/2011 du 22.03.2011 ( PRISON ) , REJETE

Descripteurs : ; ÉTABLISSEMENT PÉNITENTIAIRE ; MISE AU SECRET ; BAGARRE ; COMPORTEMENT ; APPAREIL DE PRISE DE VUE ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU ; INTÉRÊT ACTUEL
Normes : RRIP.52
Résumé : Décision de mise en régime de sécurité renforcée à la prison de Champ-Dollon pour une durée de six mois suite à une bagarre avec des gardiens consécutive à une tentative d'évasion. Recours rejeté. Le placement en régime de sécurité renforcée constitue une mesure d'organisation interne et est fondé sur l'art. 52 RRIP pour une personne condamnée. Malgré le fait que la mesure a pris fin au moment où la chambre statue, le recourant conserve un intérêt juridique au recours dans la mesure où il se trouve encore en prison et que la situation pourrait se présenter à nouveau. L'attitude générale adoptée par le recourant au cours de sa détention justifie son placement en régime de sécurité renforcée quand bien même l' examen de la vidéo, s'il a démontré que celui-ci n'était pas resté passif, n'a pas permis de déterminer clairement le déroulement de l'incident.
En fait
En droit

 

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2962/2010-PRISON ATA/188/2011

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

CHAMBRE ADMINISTRATIVE

du 22 mars 2011

2ème section

dans la cause

 

Monsieur X______
représenté par Me Jean-Pierre Garbade, avocat

contre

PRISON DE CHAMP-DOLLON

 



EN FAIT

1. Monsieur X______, né en 1990, de nationalité suisse, est détenu à la prison de Champ-Dollon (ci-après : la prison) depuis le 3 juin 2009, prévenu de tentative de meurtre.

2. En date du 5 juin 2009, M. X______ a été placé en cellule forte pour un jour au motif qu'il avait refusé de changer de cellule.

3. Par décision du 15 septembre 2009, M. X______ a été placé en cellule forte pour deux jours, suite à une bagarre avec un autre détenu.

Il n'a pas recouru à l'encontre de ces décisions.

4. Le 23 avril 2010, la Cour correctionnelle sans jury a reconnu M. X______ coupable de lésions corporelles graves et délit manqué de lésions corporelles graves. La libération conditionnelle octroyée à M. X______ par le Tribunal de la jeunesse avec effet au 7 mai 2008 a été révoquée et M. X______ a été condamné à une peine privative de liberté d'ensemble de trente-deux mois.

5. Par décision du 20 mai 2010, M. X______ a été privé de travail à l'atelier de menuiserie et a été changé d'atelier, vu les nombreux problèmes relationnels avec ses codétenus et les collaborateurs.

Il n'a interjeté aucun recours à l'encontre de ladite décision.

6. Durant la nuit du 2 au 3 août 2010, M. X______ a tenté de casser une vitre, avec deux codétenus, dans le but de s'évader.

Il résulte du rapport établi par la prison qu'à l'arrivée des gardiens, M. X______ était sorti de sa cellule, puis avait été maîtrisé par ces derniers. Il s'était débattu et avait été particulièrement violent avec une surveillante.

Cet incident a entraîné des arrêts de travail pour certains membres du personnel de surveillance.

7. Le 3 août 2010, M. X______ a été placé en cellule forte pour une durée de dix jours par décision de l'office pénitentiaire, après avoir été entendu au sujet des faits précités par la direction de la prison (ci-après : la direction).

8. Le même jour, M. X______ a été privé de travail et renvoyé de l'atelier de reliure.

Il n'a pas recouru à l'encontre de cette décision.

9. Par décision du 11 août 2010 déclarée exécutoire nonobstant recours, le directeur de la prison (ci-après : le directeur) a placé M. X______ en régime de sécurité renforcée pour une durée de six mois, en application de l'art. 50 du règlement sur le régime intérieur de la prison et le statut des personnes incarcérées du 30 septembre 1985 (RRIP - F 1 50.04).

M. X______ avait opposé une vive résistance au personnel de surveillance durant la nuit du 2 au 3 août 2010. Les coups portés étaient particulièrement violents et avaient entraîné des interruptions de travail.

La multiplication et la gravité de ces actes commandaient de prendre des dispositions particulières au plan sécuritaire.

Le placement en régime de sécurité renforcée isolait M. X______ des autres détenus et contribuait à contenir, dans une certaine mesure, les risques de réitération d'actes violents ou une tentative d'évasion, ceux-ci ne pouvant que difficilement être maîtrisés dans le régime ordinaire de la détention où plusieurs dizaines de détenus étaient parfois réunis.

Placé en régime de sécurité renforcée, le détenu était incarcéré en cellule individuelle. Il y dormait, y prenait ses repas, et y passait le reste de la journée, sous réserve de l'heure de promenade quotidienne effectuée en principe seul. Il pouvait recevoir de la visite, échanger de la correspondance et lire. Le droit à l'hygiène, aux soins médicaux, à l'assistance sociale et spirituelle, ainsi que les relations avec la direction et les contacts avec l'avocat n'étaient pas restreints.

Le comportement de M. X______ ferait l'objet d'une évaluation régulière pouvant éventuellement conduire à une levée de la mesure avant le terme.

10. Le 2 septembre 2010, M. X______ a recouru à l'encontre de ladite décision auprès du Tribunal administratif, devenu depuis le 1er janvier 2011 la chambre administrative de la section administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

Préalablement, le Tribunal administratif devait ordonner à la direction de communiquer à l'avocat du détenu une copie de la décision de placement en régime de sécurité renforcée, des décisions disciplinaires prises suite à la tentative d'évasion début août 2010, des rapports et procès-verbaux établis à la suite de son audition avant le prononcé des sanctions disciplinaires, des rapports établis par les surveillants à la suite des événements du 2 août 2010 et ultérieurement, et du courrier adressé par le recourant à la direction durant le mois d'août 2010.

Le Tribunal administratif devait également ordonner l'apport des enregistrements vidéo de l'intervention des surveillants devant sa cellule après la tentative d'évasion avortée du 2 août 2010, transmettre copie de cet enregistrement à son avocat et autoriser celui-ci à consulter ledit enregistrement avec son avocat.

Un délai suffisant pour compléter son recours dès réception de ces documents devait lui être accordé.

Au fond, la décision querellée devait être annulée.

11. En date du 6 septembre 2010, M. X______ a transmis au Tribunal administratif la décision, les procès-verbaux et les rapports y relatifs qu'il avait reçus dans l'intervalle. Ces documents avaient été caviardés sans raison. Le Tribunal administratif devait en obtenir des copies contenant les noms des personnes concernées. M. X______ sollicitait le témoignage des surveillants et des détenus dont les noms étaient cachés, ainsi que son audition personnelle.

Il n'avait pas été réentendu avant la décision du 11 août 2010. Son droit d'être entendu avait été violé.

12. Le 30 septembre 2010, le département de la sécurité, de la police et de l'environnement (ci-après : le DSPE) a conclu au rejet du recours.

Les copies des pièces, non caviardées, figuraient en annexe aux observations.

Une procédure pénale, à laquelle la vidéo avait été versée, et dont le Tribunal administratif pouvait solliciter une copie, avait été ouverte suite aux incidents survenus durant la nuit du 2 au 3 août 2010. Pour des raisons de sécurité, le DSPE s'opposait à une transmission directe de l'enregistrement à l'avocat.

M. X______ avait été entendu par la direction de la prison le 3 août 2010 et avait eu l'occasion de s'exprimer sur les faits pertinents pour la prise de la décision. Les faits ne s'étant pas modifiés entre le 3 et le 11 août 2010, il n'y avait aucune raison de le réentendre.

Le placement en régime de sécurité renforcée n'avait pas pour objectif de remplacer une sanction disciplinaire. Cette décision s'inscrivait dans un contexte général et reposait sur le comportement récent de M. X______. Ses agissements constituaient un risque objectif et majeur pour la sécurité de l'établissement, que la mesure de sécurité renforcée permettait de limiter.

Les conditions du régime de sécurité renforcée différaient peu des conditions normales. L'évaluation régulière du comportement de M. X______ permettrait de lever la mesure prononcée à son encontre si celle-ci devait ne plus être justifiée.

Les trois détenus qui occupaient la même cellule que M. X______ au moment de la tentative d'évasion le 2 août 2010 ne se trouvaient plus à la prison.

Le détenu qui partageait la cellule de M. X______ avait informé le personnel de surveillance que ce dernier lui avait fait part de son intention de s'évader à l'occasion d'une conduite à l'hôpital, le 17 septembre 2010.

13. En date du 22 octobre 2010, le Ministère public a transmis au juge délégué une copie de la procédure pénale P/13089/2010 ouverte à l'encontre de M. X______.

14. Le 1er novembre 2010, M. X______ a adressé un courrier au Tribunal administratif.

Son conseil avait pu prendre connaissance auprès du Tribunal administratif de la procédure pénale ouverte à son encontre, mais l'enregistrement vidéo ne s'y trouvait pas. Le Tribunal administratif devait solliciter l'apport de cette pièce.

M. X______ n'avait jamais eu l'intention de s'évader. Le détenu qui avait donné ces indications à un gardien souffrait d'une maladie psychique.

15. Le DSPE s'est déterminé le 5 novembre 2010.

L'enregistrement vidéo avait été sauvegardé et produit dans le cadre de la procédure pénale. Il ne pouvait être copié sur un support extérieur, pour des raisons techniques et ne pouvait être visionné qu'à la prison.

La direction se tenait à disposition pour recevoir le juge délégué et les parties afin de visionner cette vidéo.

Le personnel de la prison n'était pas compétent pour établir de diagnostic sur l'état de santé et de discernement du détenu qui avait fait part de l'intention d'évasion de M. X______ à un gardien. Ces propos ne pouvaient être négligés dans la mesure où ils concernaient un détenu qui avait été impliqué dans une tentative d'évasion moins de deux mois auparavant.

16. En date du 8 décembre 2010, le juge délégué a procédé à une comparution personnelle des parties qui s'est tenue à la prison.

En présence des parties, le juge délégué a visionné la vidéo relative aux incidents s'étant déroulés durant la nuit du 2 au 3 août 2010.

Il a constaté ce qui suit : M. X______, qui avait été sorti de sa cellule, avait été maintenu au mur par des gardiens, puis emmené par ces derniers, avec un autre détenu. Arrivé à la porte du couloir, ce dernier avait commencé à se débattre. Une bagarre entre les deux détenus et les gardiens s'en était suivie, mais la vidéo ne permettait pas d'identifier qui frappait qui.

A la fin de l'altercation, M. X______, immobilisé à terre, avait été relevé par les gardiens.

M. X______ a confirmé qu'il n'avait pas frappé les surveillants, étant immobilisé par ceux-ci.

Le directeur a précisé que M. X______ se débattait alors qu'il était tenu par les gardiens.

Le juge a imparti un délai au 15 janvier 2011 aux parties pour formuler d'éventuelles observations. A l'issue de ce délai, la cause serait gardée à juger.

17. Le 16 décembre 2010, M. X______ a adressé un courrier au Tribunal administratif.

La dernière partie du procès-verbal établie lors du transport sur place devait être modifiée de la manière suivante : « la vidéo ne permet pas de voir M. X______ dans la mêlée qui s'en est suivie puisqu'il est caché par des surveillants. L'on voit un surveillant donner plusieurs coups à l'horizontale en direction de l'endroit où pouvait se trouver M. X______ et, quelques temps plus tard, un surveillant donner des coups verticaux, de haut en bas, sur un homme à terre au même endroit. A la fin de la vidéo, M. X______ est longuement immobilisé à terre avant d'être relevé par les gardiens ».

18. En date du 17 janvier 2011, M. X______ a déposé ses observations.

Il ressortait de la vidéo qu'il n'avait pas violemment frappé la surveillante. Il avait tenté de se dégager de l'emprise de cette dernière en lui attrapant son bras.

Un surveillant lui avait donné plusieurs coups de poings pendant qu'il se faisait maîtriser, et il s'était défendu.

Une mesure d'isolement d'un détenu ne pouvait être ordonnée que pour les motifs énoncés à l'art. 78 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0), dont le but était de protéger les tiers. L'attitude de M. X______ n'était pas dangereuse et ne justifiait pas une telle mesure.

La mise en régime de sécurité renforcée était une sanction disciplinaire déguisée, prise afin de contourner les dispositions légales limitant l'isolement en cellule forte à dix jours.

Par ailleurs la durée de la procédure de recours violait son droit constitutionnel à ce que sa cause soit traitée dans un délai raisonnable. Le contrôle de la légalité de la mesure n'était pas garanti vu que cinq mois s'étaient déjà écoulés, alors que la mesure était prévue pour une durée de six mois.

La décision en question était illicite, dans tous les cas dès le 15 septembre 2010.

19. Dans ses observations du 10 février 2011, le DSPE a persisté dans ses conclusions.

20. Le même jour, M. X______ a retourné le procès-verbal de l'audience du 8 décembre 2010, comportant les corrections manuscrites mentionnées dans le cadre du courrier du 16 décembre 2010.

21. Il résulte de la procédure P/13089/2010 que M. X______ avait déclaré à la police le 5 août 2010 qu'il avait pris part à une tentative d'évasion avec deux codétenus.

Lors de l'intervention des gardiens, il avait tenté de se dégager de leur emprise. Tout s'était passé très vite. Ses souvenirs étaient flous concernant la surveillante avec laquelle il aurait été particulièrement violent. Il avait essayé de faire tomber un autre gardien en le tenant par ses habits, sans succès. Il n'avait insulté ou menacé aucun membre du personnel de surveillance.

EN DROIT

1. Depuis le 1er janvier 2011, suite à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), l'ensemble des compétences jusqu'alors dévolues au Tribunal administratif a échu à la chambre administrative, qui devient autorité supérieure ordinaire de recours en matière administrative (art. 131 et 132 LOJ).

Les procédures pendantes devant le Tribunal administratif au 1er janvier 2011 sont reprises par la chambre administrative (art. 143 al. 5 LOJ). Cette dernière est ainsi compétente pour statuer.

2. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de l'ancienne loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941, disposition dont la teneur a été reprise depuis le 1er janvier 2011 par l'art. 132 al. 1, 2 et 6 de la LOJ ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 dans sa teneur au 31 décembre 2010).

3. a. Le recourant sollicite le témoignage des surveillants et des détenus impliqués dans l'incident survenu durant la nuit du 2 au 3 août 2010.

b. Tel qu'il est garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, d'avoir accès au dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 132 II 485 consid. 3.2 p. 494 ; 127 I 54 consid. 2b p. 56 ; 127 III 576 consid. 2c p. 578 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C.424/2009 du 6 septembre 2010 consid. 2). Le droit de faire administrer des preuves n’empêche cependant pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 134 I 140 consid. 5.3 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2C.58/2010 du 19 mai 2010 consid. 4.3 ; ATA/432/2008 du 27 août 2008 consid. 2b). Le droit d’être entendu ne contient pas non plus d’obligation de discuter tous les griefs et moyens de preuve du recourant ; il suffit que le juge discute ceux qui sont pertinents pour l'issue du litige (ATF 133 II 235 consid 5.2 p. 248 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C.424/2009 précité).

c. En l'espèce, le dossier est suffisamment documenté et le juge a pu visionner la vidéo relative aux faits survenus au cours de la nuit du 2 août 2010. Dès lors, les témoignages requis par le recourant ne sont, par une appréciation anticipée des preuves, pas déterminants pour l'issue du litige. De plus, les détenus concernés par l'incident survenu au cours de la nuit du 2 au 3 août 2010 ne se trouvent plus à la prison. Pour ces motifs, le juge délégué renoncera à entendre les témoins aux témoignages sollicités.

4. Le recourant se plaint de la violation de son droit d'être entendu, n'ayant pas été réentendu avant la décision du 11 août 2010.

a. Tel qu’il est garanti par l'art. 29 al. 2 Cst., le droit d’être entendu comprend également le droit pour les parties de faire valoir leur point de vue avant qu’une décision ne soit prise et d’avoir accès au dossier (ATF 135 II 286 consid. 5.1. p. 293 ; 1C.104/2010 du 29 avril 2010 consid. 2).

Cela n’implique pas une audition personnelle de l’intéressé, celui-ci devant simplement disposer d’une occasion de se déterminer sur les éléments propres à influer sur l’issue de la cause (art. 41 LPA ; ATF 134 I 140 précité ; Arrêt du Tribunal fédéral 4A.15/2010 du 15 mars 2010 consid. 3.1 ; ATA/862/2010 du 7 décembre 2010 consid 2).

b. En l'espèce, le recourant a été entendu par le directeur le 3 août 2010. Il a eu l'occasion de s'exprimer sur les incidents survenus au cours de la nuit précédente. Aucun fait nouveau n'est survenu entre cette date et le 11 août 2010. Il n'y avait donc aucune raison de le réentendre.

Dès lors ce grief est infondé.

5. a. Aux termes de l'art. 60 let. b LPA, ont qualité pour recourir toutes les personnes qui sont touchées directement par une décision et ont un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée.

b. Selon la jurisprudence, le recourant doit avoir un intérêt pratique à l'admission du recours, soit que cette admission soit propre à lui procurer un avantage, de nature économique, matérielle ou idéale (ATF 121 II 39 consid. 2 c/aa p. 43 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1A.47/2002 du 16 avril 2002, consid. 3 ; ATA/146/2009 du 24 mars 2009).

c. Un intérêt digne de protection suppose un intérêt actuel à obtenir l’annulation de la décision attaquée (ATF 135 I 79 consid. 1 p. 81 ; 128 II 34 consid. 1b p. 36 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C.133/2009 du 4 juin 2009 consid. 3 ; H. SEILER, Handkommentar zum Bundesgerichtsgesetz [BGG], Berne 2007, n. 33 ad art. 89 LTF p. 365 ; K. SPUHLER/A. DOLGE/D. VOCK, Kurzkommentar zum Bundesgerichtsgesetz [BGG], Zurich/St-Gall 2006, n. 5 ad art. 89 LTF p. 167). L’existence d’un intérêt actuel s’apprécie non seulement au moment du dépôt du recours, mais aussi lors du prononcé de la décision sur recours ; s’il s’éteint pendant la procédure, le recours, devenu sans objet, doit être simplement radié du rôle (ATF 125 V 373 consid. 1 p. 374 ; 118 Ib 1 consid. 2 p. 7 ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C.76/2009 du 30 avril 2009 consid. 2 ; ATA/175/2007 du 17 avril 2007 consid. 2a ; ATA/915/2004 du 23 novembre 2004 consid. 2b) ou déclaré irrecevable (ATF 123 II 285 consid. 4 p. 286 et ss. ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C.69/2007 du 11 juin 2007 consid. 2.3 ; ATA/192/2009 du 21 avril 2009 ; ATA/640/2005 du 27 septembre 2005).

d. Il est toutefois renoncé à l’exigence d’un intérêt actuel lorsque cette condition de recours fait obstacle au contrôle de la légalité d’un acte qui pourrait se reproduire en tout temps, dans des circonstances semblables, et qui, en raison de sa brève durée ou de ses effets limités dans le temps, échapperait ainsi toujours à la censure de l’autorité de recours (ATF 135 I 79 précité ; 131 II 361 consid. 1.2 p. 365 ; 128 II 34 précité ; Arrêt du Tribunal fédéral 6B.34/2009 du 20 avril 2009 consid. 3 ; ATA/365/2009 du 28 juillet 2009). Cela étant, l’obligation d’entrer en matière sur un recours, dans certaines circonstances, nonobstant l’absence d’un intérêt actuel, ne saurait avoir pour effet de créer une voie de recours non prévue par le droit cantonal (ATF 135 I 79 précité ; 128 II 34 précité; Arrêt du Tribunal fédéral 1C.133/2009 précité).

e. Quand bien même le recourant a exécuté la mesure contestée, la situation pourrait se présenter à nouveau, dans la mesure où ce dernier se trouve encore à Champ-Dollon. Dès lors, la chambre administrative renoncera à l'exigence de l'intérêt actuel pour statuer (ATA/266/2009 du 26 mai 2009).

6. a. L'objet de la présente procédure est le placement de M. X______ en régime de sécurité renforcée pour une durée de six mois, soit du 11 août 2010 au 10 février 2011.

La détention en commun peut être interdite si elle présente des inconvénients ou des risques, notamment pour ce qui concerne la sauvegarde de la sécurité collective (art. 50 al. 1 et 52 al. 2 RRIP). La mesure de mise en régime de sécurité renforcée permet de réduire les risques de troubles au sein de la prison.

Cette mesure figure dans le titre de « règles particulières » applicables aux prévenus ou aux condamnés. Elle constitue une exception au régime normal (art. 49 RRIP) et ne figure pas dans la liste exhaustive des sanctions énoncées à l'art. 47 al. 3 RRIP.

b. Il résulte clairement de ces dispositions que le placement en régime de sécurité renforcée constitue une mesure d'organisation interne (L. HUBER, Disziplinarmassnahmen im Strafvollzug, Basler Studien zur Rechtswissenschaft, Band 46, 1995, p. 22 et 23). Il s'agit d'une décision au sens de l'art. 4 LPA, susceptible de recours auprès de la chambre administrative (ATA/533/2008 au 28 octobre 2008). Dès lors, la chambre de céans est compétente pour juger la présente affaire.

c. La décision de placement du recourant en régime de sécurité renforcée a été fondée sur l'art. 50 RRIP, disposition qui est applicable aux prévenus.

Étant donné que le recourant a été jugé par la Cour correctionnelle sans jury le 23 avril 2010, celui-ci doit désormais être considéré comme condamné. Dès lors, sa mise en régime de sécurité renforcée aurait dû être ordonnée en vertu de l'art. 52 RRIP, et non de l'art. 50 RRIP. Dans la mesure où la teneur de ces deux articles est identique et que le directeur est compétent pour ordonner un placement en régime de sécurité renforcée tant pour les prévenus que pour les condamnés, cette erreur dans la disposition visée n'est pas de nature à conduire à l'invalidation de la décision attaquée.

7. a. Le recourant se plaint d'avoir été placé en régime de sécurité renforcée à tort, n'ayant frappé aucun surveillant et par conséquent, n'ayant créé aucun risque particulier pour la collectivité publique.

Ce dernier soutient qu'il ressort de la vidéo que des surveillants lui ont asséné des coups.

b. Le visionnement de la vidéo ne permet cependant pas d'identifier le rôle de chaque protagoniste. Il n’en demeure pas moins qu’il résulte des images que le recourant n'est pas resté passif. Dans ce contexte, la question de savoir qui a frappé qui souffre de rester ouverte.

L'attitude générale adoptée par le recourant au cours de sa détention, soit son refus de changer de cellule, ses rapports tendus avec les collaborateurs de l'atelier de menuiserie et sa tentative d'évasion suffisent à justifier son placement en régime de sécurité renforcée.

La mesure litigieuse est ainsi fondée et doit être confirmée dans son principe.

8. Reste à examiner si la durée de six mois est conforme au principe de la proportionnalité.

Selon l'art. 52 al. 3 RRIP, la décision de placement en régime de sécurité renforcée peut être ordonnée pour une durée de six mois au maximum et peut être renouvelée aux mêmes conditions.

Cette disposition étant de nature potestative, son application n'est censurée par l'autorité de recours qu'en cas d'excès ou abus du pouvoir d'appréciation (ATA/240/2009 du 12 mai 2009).

La durée de six mois correspond au maximum prévu par l'art. 52 al. 3 RRIP. La décision litigieuse précise que le comportement du recourant fera l'objet d'une évaluation régulière pouvant conduire le cas échéant à une proposition de levée avant le terme.

Au vu des circonstances, la prison n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation et la décision querellée respecte le principe de proportionnalité, tant par le choix de la mesure que par celui de la durée de celle-ci. En conséquence, le recours sera rejeté.

9. Le recourant soutient que la durée de la procédure de recours viole son droit à ce que sa cause soit traitée dans un délai raisonnable.

En l'espèce, le recourant a agi le 2 septembre 2010 et a complété son recours le 6 septembre 2010. Le juge délégué a ordonné l'apport de la procédure pénale, a procédé à la mesure d'instruction requise par le recourant, a accordé à celui-ci les délais qu'il sollicitait pour présenter ses observations et produire ses pièces. Les dernières écritures déposées par les parties sont parvenues à la chambre administrative le 10 février 2011. Dès lors, la procédure a été traitée dans un délai raisonnable.

10. Vu la nature du litige et l'octroi de l'assistance juridique au recourant, aucun émolument ne sera perçu (art. 11 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 7 janvier 2009 - RFPA - E 5 10.03).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 septembre 2010 par Monsieur X______ contre la décision du 11 août 2010 de la prison de Champ-Dollon ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

dit que, conformément aux art. 78 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière pénale ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Jean-Pierre Garbade, avocat du recourant ainsi qu'à la prison de Champ-Dollon.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, Mme Hurni, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

la présidente siégeant :

 

 

L. Bovy

 

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :