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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/11895/2020

AARP/225/2023 du 30.06.2023 sur JTCO/145/2022 ( PENAL ) , REJETE

Recours TF déposé le 31.07.2023, rendu le 22.02.2024, REJETE, 6B_951/2023
Descripteurs : MEURTRE;TENTATIVE(DROIT PÉNAL);LÉSION CORPORELLE;VIOLATION DU DEVOIR D'ASSISTANCE OU D'ÉDUCATION;VOIES DE FAIT;EXPULSION(DROIT PÉNAL)
Normes : CP.111; CP.22; CP.66A; CP.123.ch2; CP.180; CP.126; CP.219
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/11895/2020 AARP/225/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 23 juin 2023

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de B______, ______, comparant par Me C______, avocat,

D______, partie plaignante, représentée par sa curatrice, Me E______,

appelants,

 

contre le jugement JTCO/145/2022 rendu le 4 novembre 2022 par le Tribunal correctionnel,

 

et

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, case postale 3565, 1211 Genève 3,

F______, partie plaignante, représenté par son curateur, Me G______,

H______, partie plaignante, comparant par Me M______, avocat,

intimés.


EN FAIT :

A. a.a. En temps utile, A______ appelle du jugement JTCO/145/2022 du 4 novembre 2022, par lequel le Tribunal correctionnel (TCO) a classé les faits visés sous chiffres 1.2.3. et 1.3. de l'acte d'accusation (antérieurs au 4 novembre 2019), mais l'a reconnu coupable de tentative de meurtre (art. 111 cum 22 du code pénal [CP]), de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 et 2 al. 2 et 3 CP), de menaces (art. 180 al. 1 et 2 let. a CP), de voies de fait (art. 126 al. 1 et 2 let. a et b CP), de violation du devoir d'assistance et d'éducation (art. 219 al. 1 CP), de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b [loi fédérale sur les étrangers et l'intégration]) et d'activité lucrative sans autorisation (art. 115 al. 1 let. c LEI).

Le TCO l'a condamné à une peine privative de liberté de six ans, sous déduction de 852 jours de détention avant jugement, et à une amende de CHF 2'000.-. Il a ordonné son expulsion pour une durée de cinq ans avec signalement dans le système d'information Schengen (SIS). Le prévenu a été a été condamné à payer à titre de réparation du tort moral : CHF 35'000.- à F______ avec intérêts à 5% dès le 6 juillet 2020 ; CHF 5'000.- à H______ et CHF 1'000.- à D______, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2018.

a.b. A______ entreprend partiellement ce jugement, concluant à son acquittement des chefs d'accusation de tentative de meurtre, de lésions corporelles simples au préjudice de H______ (à l'exclusion des faits du 6 juillet 2020), de menaces et de violation du devoir d'assistance et d'éducation, à l'annulation de son expulsion et au rejet des conclusions civiles.

a.c. Dans le délai légal, la curatrice de D______ a annoncé un appel, puis, par courrier du 12 décembre 2022, y a renoncé.

b. Selon l'acte d'accusation du 1er juillet 2022, il est encore reproché ce qui suit à A______ :

Lésions corporelles simples à réitérées reprises

-          à Genève, à des dates indéterminées entre 2015 et le 5 juillet 2020, il a asséné à deux reprises, lors de deux épisodes distincts, des coups de poing au niveau du visage de H______, et, lors d'un autre incident, il lui a porté un coup de pied à la jambe, lui occasionnant plusieurs hématomes ;

-          à Genève, au domicile familial, entre mai 2016 et le 5 juillet 2020, il a frappé, a minima à deux reprises, F______, né le 1er mai 2006, au visage et lui a occasionné des saignements à la bouche ;

-          à Genève, au domicile familial, entre 2015 et le 5 juillet 2020, il a frappé a minima à trois reprises, sa fille, D______, née le ______ 2010, avec une ceinture et lui a occasionné des hématomes. Probablement en date du 8 octobre 2019, il l'a saisie par le poignet et frappée avec la boucle métallique de sa ceinture à l'arrière de la cuisse, sous la fesse, avec le même résultat.

Il l'a giflée plusieurs fois à la bouche jusqu'à la faire saigner, notamment, à une reprise, avec des bagues, au motif qu'elle n'avait pas débarrassé la table ;

-          à Genève, le 6 juillet 2020 vers minuit, sur le palier de l'appartement familial, après que H______ l'eut informé de ce qu'elle avait contacté un organisme d'aide aux victimes de violences conjugales, il est devenu très agressif et essayé de la tirer à l'intérieur. Comme elle refusait d'entrer tant qu'il était furieux, il l'a poussée au niveau de la poitrine, a fermé violemment la porte sur elle, l'atteignant à l'épaule droite. Il a ensuite tenté d'attraper le téléphone de son épouse, laquelle descendait les escaliers en courant, pour l'empêcher de joindre la police. Il lui a arraché l'appareil des mains et l'a saisie par les cheveux avant de la tirer jusqu'à leur logement. Le prévenu a occasionné à la victime des ecchymoses (omoplate droite et cuisse gauche) et deux dermabrasions (jambe droite).

Dans le même contexte, il a saisi le poignet droit de F______ pour s'emparer du couteau dont il s'était muni pour défendre sa mère, et lui a occasionné une ecchymose (six cm par quatre cm) ;

Menaces

-          à Genève, entre 2015 et le 5 juillet 2020, il a menacé, à réitérées reprises, son épouse, d'enlever D______, et l'a avertie de ce que si elle appelait la police, il ne resterait pas longtemps loin d'elle et de F______, et se vengerait, ce qui l'a effrayée ;

Voies de fait à réitérées reprises

-          à Genève, entre le 4 novembre 2019 et le 5 juillet 2020, il a asséné à réitérées reprises des coups de poing (ventre et visage) à H______ et lui a tiré les cheveux ;

Il a également, à réitérées reprises, porté des coups, poing fermé, à F______ sur le crâne, au ventre et au sternum et l'a frappé à l'aide d'une ceinture, d'un manche en fer sur le dos ou les fesses, ou d'une spatule en bois sur la paume des mains ;


 

Tentative de meurtre

-          le 6 juillet 2020, dans le prolongement des faits décrits supra, A______ a tenté d'asséner plusieurs coups de couteau à F______ que celui-ci a esquivés, puis l'a visé à l'abdomen et blessé à l'annulaire gauche. Prise de douleur, la victime a ramené ses mains contre sa poitrine, et le prévenu l'a blessée à l'avant-bras gauche. Paniqué, le garçon a couru vers le balcon et, son agresseur lui a porté un coup au niveau du cuir chevelu. F______ s'est échappé en glissant le long de la paroi extérieure de l'immeuble depuis le balcon.

De la sorte, A______ a occasionné à F______ trois plaies à bords nets au niveau : du cuir chevelu (région occipitale gauche) (trois centimètres de long pour une béance maximale d'un centimètre et une profondeur de 0.5 cm, se prolongeant en estafilade sur 0.5 cm) ; de la face postérieure du tiers moyen de l'avant-bras gauche (oblongue, en forme de goutte, mesurant 0.7 x 0.3 cm, prolongée du côté médial par une dermabrasion rougeâtre, fine, assimilable à une estafilade, oblique vers le bas et la droite du corps, mesurant 4.5 x 0.1 cm) ; et de la face postéro-médiale du quatrième doigt de la main gauche, en regard de l'articulation inter-phalangienne distale, en forme de "U", mesurant 1 x 0.6 cm, tangentielle, avec un lambeau cutané distal recouvrant la plaie ; ainsi que de fines dermabrasions, ecchymoses et érythèmes.

Le prévenu a intentionnellement tenté de tuer F______ ou, à tout le moins, envisagé et accepté cette éventualité ;

Violation du devoir d'assistance

-          à Genève, entre mai 2016 et le 6 juillet 2020, A______ a frappé, à de nombreuses reprises, F______, l'a dénigré/critiqué continuellement, et a tenté de le tuer. En sa qualité de beau-père, il a, à tout le moins, envisagé et accepté l'éventualité de mettre en danger le développement psychique et physique de son beau-fils.

Depuis septembre 2020, l'adolescent a présenté un fort absentéisme scolaire, aggravé depuis Pâques 2021, et a souffert de dépression (suivi psychothérapeutique nécessaire), d'un syndrome de stress post-traumatique avec hyper vigilance, flash-backs, cauchemars, d'un retrait social important (grande insécurité, méfiance des autres) et de symptômes psychotiques de persécution (très forte anxiété et peur de sortir et de croiser du monde). Il a été hospitalisé aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) du 26 mai à mi-août 2021 (idées suicidaires, symptômes psychotiques avec délires de persécution) et dès le 25 août 2021 après des comportements hétéro-agressifs. Il risque de présenter un état d'hyper vigilance chronique, de rencontrer des difficultés à se lier, de souffrir de dépression ou de troubles chroniques du sommeil, ou de développer d'autres troubles psychiatriques ;

Séjour illégal et activité lucrative sans autorisation

-          à Genève, entre 2014 et le 6 juillet 2020, A______ a séjourné sur le territoire suisse et travaillé sans les autorisations requises.

B. Les faits suivants, encore pertinents au stade de l'appel, ressortent de la procédure :

a.a. Le 6 juillet 2020, vers minuit, la police est intervenue au domicile des parties à la suite de plusieurs appels à la CECAL, notamment de voisins ainsi que de H______. Sur un enregistrement de huit minutes, on entend cette dernière expliquer qu'elle a été frappée par son conjoint, lequel est armé d'un couteau. Elle est manifestement terrorisée, hurle "non, non non !" et sanglote, sans parvenir à se calmer, et implore, à plusieurs reprises, la police d'intervenir vite. Après deux minutes et 32 secondes, une voix masculine crie "il m'a coupé la tête".

a.b. F______, qui présentait les blessures mentionnées dans l'acte d'accusation (cf. supra chiffre 1.4.), a été pris en charge par une ambulance et hospitalisé. Les plaies concordaient avec l'utilisation d'un couteau, sans mise en danger de la vie du point de vue médico-légal (C-335 et ss.).

a.c. A______, interpellé aux alentours du domicile vers 01h30 (taux d'alcoolémie 0.8 mg/litre à 02h11), était vêtu d'un débardeur taché du sang de F______ (C-24 et C-61) et souffrait d'une plaie superficielle à la main gauche causé par un objet tranchant et piquant (C-173).

b. Deux jours plus tard, H______ a trouvé dans un placard de la cuisine le couteau, habituellement rangé dans un tiroir, et l'a remis à la police (C-21). La lame de 20 centimètres et le manche présentaient du sang de F______ (C-23 et C-60), tandis que les empreintes digitales sur le manche étaient celles du prévenu et suggéraient qu'il l'avait saisi (C-23 et C-286).

c. Entendu par la méthode EVIG, F______ a expliqué que, le 6 juillet 2020, prêt à dormir, il n'avait pas souhaité intervenir dans la dispute, mais avait voulu défendre sa mère contre son beau-père, lequel avait "pris le feu [et] la rage" après l'appel à la police. Les adultes étaient revenus dans l'appartement, et A______ avait fermé la porte à clefs. À l'intérieur, il se trouvait entre sa mère et celui-ci de manière à la protéger. Il avait repoussé A______ à plusieurs reprises dont une fois "très fort". L'homme avait alors pris à la cuisine le couteau et était revenu vers lui. Ils avaient tourné autour de la table. A______ avait manqué son premier coup, puis, en visant son estomac, l'avait atteint à l'annulaire gauche, alors qu'il se protégeait avec ses mains. Il avait ramené sa main blessée contre lui pour soulager la douleur et avait été touché à l'avant-bras gauche. Très apeuré, il s'était dirigé vers le balcon où se trouvait sa mère, et son beau-père l'avait atteint à l'arrière du crâne. Il avait alors crié "il m'a coupé le crâne". Dehors, il avait préféré s’enfuir par le balcon, quitte à se casser une jambe, puisqu'il ne pouvait plus aider sa mère. Il était descendu du deuxième au premier étage, d'où il avait sauté. Au sol, il avait demandé de l'aide aux voisins pour sa mère et été accueilli chez eux.

Lors de sa seconde audition, cinq mois plus tard, le garçon a rectifié ses déclarations et expliqué que, très énervé par le fait que son beau-père battait sa mère, il avait pris le couteau à la cuisine, s'était placé derrière lui et l'avait mis en garde. Son beau-père avait demandé de lui rendre le couteau, ce qu'il s'était refusé à faire. Le prévenu s'en était emparé et l'avait attaqué. Après sa correction, l'adolescent a manifesté sa crainte d'être tenu pour responsable des faits.

d. Entendu par la police, le MP et le TCO, A______ a contesté les faits reprochés. Alors qu'il poursuivait sa femme dans les escaliers, F______ était arrivé dans son dos et avait essayé de lui porter un coup vertical avec un couteau. Il l'avait repoussé à deux mains et demandé qu'il lâche la lame. Ils étaient allés dans le salon où le jeune homme avait menacé de le tuer en faisant de grands mouvements avec le couteau, à un mètre de distance. Alors qu'il essayait de le désarmer, F______, tenant l'objet tranchant dans sa main droite, pointe vers le haut, avait tenté de lui porter un coup et de l'atteindre au ventre/thorax. Il lui avait saisi les deux mains, de manière à ce qu'il cesse de le menacer et de le frapper de ses poings et les avait maintenues en l'air pour éloigner la lame, puis avait poussé F______ contre la porte du balcon. Le jeune homme n'avait jamais lâché le couteau. Devant le MP, il a ajouté que F______ lui avait également assené deux coups de genou dans l'estomac.

Le garçon s'était ensuite réfugié sur le balcon derrière sa mère, laquelle avait appelé la police et criait. Lui-même était brièvement sorti pour récupérer le téléphone de son épouse, en vain, et était parti de peur pour sa procédure de régularisation. Il s'était rendu à une station-service en attendant que les choses se calment et avait été interpellé. Plus tard, il a soutenu ne jamais être allé sur le balcon et ne pas avoir dit le contraire devant la police (C-51). Il ne pouvait pas expliquer les blessures de son beau-fils et émettait l'hypothèse qu'il avait été atteint dans la mêlée ou en heurtant le mur. Lui-même avait peut-être touché le manche du couteau par hasard, sans le saisir, mais ignorait où il se trouvait puisque l'adolescent l'avait gardé. Confronté à la présence de ses empreintes digitales, le prévenu n'a rien répondu.

Ayant craint pour sa vie, il se considérait comme la victime. Il s'était défendu fortement, sans intention homicide, de sorte que F______, protégé par sa mère, mentait. Ce n'était pas la première fois que l'adolescent se comportait ainsi, ses problèmes de violence étant antérieurs aux faits. Le prévenu a, d'abord, indiqué que le jeune homme avait déjà feint de saisir un couteau lorsque lui-même le grondait, sans passer à l'acte, avant de dire qu'il l'avait souvent menacé ainsi, de même que sa petite sœur, à deux reprises.

e.a. Entendue par la police, le MP et le TCO, H______ a déclaré que A______ l'avait battue et menacée comme décrit dans l'acte d'accusation (chiffres 1.1.1. et s. ainsi que 1.2.1. et s). Elle l'avait également vu corriger physiquement son fils, F______, et, à plusieurs reprises, ils étaient convenus de ce qu'il ne s'occuperait plus de son éducation, source de disputes.

e.b. Sur le pallier, F______ s'était interposé et avait poussé son beau-père dans le dos pour qu'il lâche ses cheveux. Ils s'étaient bagarrés à coups de poing. Pendant ce temps, elle avait cherché son téléphone, jeté par le prévenu dans le salon, pour joindre la police et réalisé qu'un gendarme était en ligne. Elle avait vu le couteau sur la table de la salle à manger, puis dans la main droite de son conjoint. Le 4 août 2020, elle a précisé que son fils lui avait raconté avoir pris le couteau pour les défendre, mais elle ne l'avait pas vu saisir l'objet (C-38). F______ et son conjoint se trouvaient face à face, de chaque côté de la table, et elle-même derrière l'agresseur. A______ avait donné un coup et touché son fils à l'arrière de l'oreille. Elle avait vu beaucoup de sang, pensé que c'était grave et hurlé. Elle avait pris son fils contre elle, tandis que son mari fermait la porte. F______ était allé sur le balcon, où elle et le prévenu, toujours armé, l'avaient suivi. Son fils avait fui par le balcon alors qu'elle parlait à A______. Celui-ci était rentré avec le couteau et avait quitté le logement. Elle avait vérifié dans la chambre de D______, qu'il ne l'avait pas emmenée.

f. Entendue par la méthode EVIG, D______ a déclaré être allée se coucher au début de la dispute entre ses parents, de sorte qu'il fallait supposer que les faits restitués par l'enfant, commis au préjudice de sa mère et son frère, lui avaient été racontés par ceux-ci. Depuis sa chambre, elle avait entendu du bruit, dont les pleurs et cris de sa mère, ce qui l'avait empêchée de dormir. Quand ses parents se disputaient, son père prenait systématiquement une "arme", tel un couteau, contre sa mère.

g. Lors de la reconstitution, certaines plaies de F______ étaient difficilement explicables dans les versions du prévenu, alors qu'elles étaient compatibles avec celle de la victime. Les lésions, y compris défensives (bras et main gauche), étaient "superficielles et peu profondes", ce qui pouvait résulter de la faible intensité de l'attaque ou de l'attitude de la victime (notamment de ses mouvements ou esquives).

h. Les témoins I______ et J______ ont indiqué avoir entendu crier depuis l'immeuble d'en face "il veut me couper la tête" et une femme sur un balcon hurler "il lui a coupé la tête". I______ avait aidé F______ à descendre du balcon, et l'adolescent, blessé et paniqué, avait expliqué que son beau-père avait tenté de le tuer. Il avait dit craindre pour sa mère et sa sœur, toujours dans l'appartement, et avoir été blessé au doigt ainsi qu'à la tête en se protégeant. Ils avaient appelé les secours et accueilli l'enfant en les attendant.

i. Entendus par le TCO, des proches de l'appelant ont déclaré, en substance, n'avoir jamais assisté à de la violence au sein de la famille A______/H______, mais avoir eu des échos d'agressions de la part de H______ sur le prévenu.

j.a. Selon les différents intervenants en protection de l'enfance, l'état de F______ s'était dégradé dès la rentrée scolaire 2020 jusqu'à sa déscolarisation complète en 2021. L'adolescent avait rapporté redouter, de même que sa mère, la libération de son beau-père. Jusqu'à la fin de l'année scolaire 2020, il se sentait "heureux", "joyeux", "plein d'énergie" et intégré, alors qu'à présent il manquait d'énergie, d'estime de soi et avait peur de sortir (audition de K______ C-538). Auparavant, il aimait chanter et danser, puis, à force d'être critiqué, il "s'était éteint" (idem C-540).

j.b. Selon l'attestation de l'Office médico-pédagogique (OMP) du 14 février 2022, F______ était suivi depuis janvier 2021 par une psychiatre et un psychologue en raison de "stress post-traumatique (hyper vigilance, réviviscences du trauma, cauchemars, évitement de certaines situations) lié avec l'événement avec son beau-père". Il avait été hospitalisé en mai et août 2021 (cf. supra chiffre 1.5 de l'acte d'accusation). Son état était désormais plus stable, les symptômes anxieux-dépressifs subsistant toutefois.

Devant le MP, la Dre. L______ a ajouté avoir constaté des symptômes "très inquiétants" chez le jeune homme, notamment psychotiques de persécution, des flash-backs et une très forte anxiété (peur de sortir et croiser du monde) et avoir introduit une médication. Le stress post-traumatique résultait de l'agression, alors que l'état du patient était également dû à d'autres problématiques. Lors du premier suivi, F______ avait une légère tendance à sur-interpréter la réalité. Les troubles étaient très prononcés depuis janvier 2021 et pouvaient devenir chroniques, sans préjudice du fait qu'il pouvait en développer d'autres (cf. supra chiffre 1.5 de l'acte d'accusation).

C. a.a. Lors des débats, A______ a nié les violences à l'égard de D______ (il avait parfois trop élevé la voix contre elle) et son ex-femme. Il avait maltraité verbalement cette dernière, ce qui était mutuel, de même que F______, constamment. Il aurait dû être plus attentionné à l'égard du jeune homme qui avait été exposé à des événements traumatisants durant l'enfance et n'allait pas bien. Il avait essayé, en demandant de l'aide à sa famille, mais c'était difficile. La peur de son ex-épouse, exprimée dans l'échange avec la CECAL, s'expliquait par le saut de F______ dans le vide et sa consommation d'alcool. Il regrettait ses gestes violents et présentait des excuses aux intimés.

a.b. Par la voix de son conseil, l'appelant persiste dans ses conclusions, précisant requérir une peine privative de liberté n'excédant pas trois ans.

Les déclarations du prévenu avaient été constantes, contrairement à celles de F______, lequel avait menti, et de D______, manipulée par son frère et sa mère. Le garçon violent avait attaqué son beau-père par haine, et l'appelant s'était défendu en excédant la légitime défense, sans intention homicide. Il n'avait pas visé d'organe vital, ni donné de coups avec force, les plaies étant superficielles (estafilades).

Les lésions corporelles simples ou les menaces contre son ex-épouse n'étaient pas établies, D______ et les témoins confirmant ne jamais avoir assisté à un épisode violent, ni constaté de marques sur la victime (chiffres 1.1.1 et s., 1.2. de l'acte d'accusation).

Aucun devoir de garant n'incombait à l'appelant, dès lors que la mère de F______ avait demandé qu'il cesse de s'occuper de son éducation. L'état du garçon ne résultait pas exclusivement des agissements du prévenu (chiffre 1.5. de l'acte d'accusation).

Les intimés devaient être renvoyés à agir devant le juge civil, leurs prétentions ne résultant pas exclusivement d'actes incriminés.

L'expulsion de l'appelant était contraire au droit international et à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme (CourEDH).

a.c. L'appelant a produit la demande de permis des époux A______/H______ (2019) et une dénonciation pénale déposé au Salvador (2014). Le couple avait exposé que la mère de l'intimée avait été tuée en 2013 par des membres de "las maras", qu'eux-mêmes avaient fait l'objet d'un racket de cette même organisation, ce qu'ils avaient dénoncé à la police, puis avaient été menacés de mort. Sans appui étatique, ils avaient été contraints de quitter leur domicile, ainsi que leur pays, dès que cela avait été possible. Le frère de l'intimée s'était refusé à faire de même, afin de ne pas laisser leur père seul, et avait disparu, sans explication, en mai 2016.

b. Le MP persiste dans ses conclusions.

Les déclarations de F______ et sa mère étaient crédibles contrairement à celles de l'appelant. La légitime défense se limitait au désarmement de son beau-fils, lequel avait été mis dans cet état par le prévenu. L'expulsion vers le Salvador était proportionnelle et conforme à la jurisprudence de la CourEDH citée par la défense.

c. Le curateur de la partie plaignante persiste dans ses conclusions.

Il était établi que l'appelant avait désarmé F______, puis retourné l'arme contre l'adolescent. Le mensonge de l'enfant, à mettre sur le compte de son âge, ne le décrédibilisait pas, dès lors qu'il avait rapidement révélé la vérité à sa mère. En fuyant par le balcon, il n'avait ni pu cacher le couteau, ni se concerter avec sa mère pour manipuler sa sœur (chiffre 1.4. de l'acte d'accusation). Le lien entre les agissements de l'appelant et les symptômes du jeune homme était établi, de même que le devoir de garant du beau-père (chiffre 1.5. de l'acte d'accusation).

d. Par la voix de son conseil, H______ persiste dans ses conclusions.

Les événements du 6 juillet 2020 avaient démontré que l'appelant pouvait s'en prendre à l'intimée dont les dires étaient crédibles. Le montant du tort moral était adéquat avec ses souffrances, la défense n'en ayant pas discuté la quotité.

D. A______, ressortissant salvadorien, né le ______ 1985, est divorcé et père de deux enfants : D______, mineure, ainsi qu'une fille majeure résidant au Salvador. Il est arrivé en 2014 en Suisse, où vivaient sa mère et sa fratrie (seule une sœur de manière régulière), et a été rejoint en 2015 par son épouse, leur fille ainsi que son beau-fils. Il affirme avoir quitté son pays où la situation était mauvaise et fui la délinquance, en particulier, les intimidations résumées dans sa demande de permis (cf. supra a.c). Lors des débats d'appel, de même que dans sa lettre à la Cour de céans du 28 avril 2023, il a soutenu que les menaces de mort demeuraient actuelles et concrètes au Salvador, lui-même ayant reçu des menaces sur un réseau social peu avant son interpellation.

L'appelant n'a pas revu sa fille, D______, depuis sa mise en détention et dit avoir déposé une demande pour la reprise du droit de visite.

En détention, il travaille et suit des formations, mais n'a entrepris aucun suivi psychologique, expliquant ne pas avoir obtenu de place depuis son arrestation.

Il n'a pas d'antécédents judiciaires en Suisse, mais a purgé une peine de prison de 2010 à 2014 dans son pays natal.

E. a. Le défenseur d'office de A______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, sous des libellés divers, 20 heures et 30 minutes d'activité de chef d'étude hors débats d'appel (trois heures et trente minutes), dont une conférence avec l'appelant en détention d'une heure 40, deux conférences avec la famille de l'appelant (55 minutes), la déclaration d'appel (une heure et cinq minutes), l'étude du dossier (six heures), la préparation de la plaidoirie (dix heures et 30 minutes) et des recherches juridiques (une heure et dix minutes).

Il a été rémunéré pour 26 heures et 35 minutes d'activité en première instance.

b. Le conseil juridique gratuit de H______, dépose un état de frais pour la procédure d'appel, facturant, cinq heures d'activité de stagiaire hors débats d'appel. Il a été taxé pour 35 heures et 40 minutes en première instance.

EN DROIT :

1. 1.1. L'appel est recevable pour avoir été interjeté et motivé selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 du Code de procédure pénale [CPP]).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

1.2. Le retrait de l'appel de l'intimée D______ est intervenu en temps utile et dans la forme requise (art. 386 al. 2 CPP).

2. 2.1. En tant que règle sur le fardeau de la preuve, la présomption d'innocence signifie, au stade du jugement, que ce fardeau incombe à l'accusation et que le doute doit profiter au prévenu. La présomption d'innocence est violée lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que le prévenu n'a pas prouvé son innocence (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 40) ou encore lorsque le juge condamne le prévenu au seul motif que sa culpabilité est plus vraisemblable que son innocence. En revanche, l'absence de doute à l'issue de l'appréciation des preuves exclut la violation de la présomption d'innocence en tant que règle sur le fardeau de la preuve. Comme règle d'appréciation des preuves, la présomption d'innocence signifie que le juge ne doit pas se déclarer convaincu de l'existence d'un fait défavorable à l'accusé si, d'un point de vue objectif, il existe des doutes quant à l'existence de ce fait. Il importe peu qu'il subsiste des doutes seulement abstraits et théoriques, qui sont toujours possibles, une certitude absolue ne pouvant être exigée. Il doit s'agir de doutes sérieux et irréductibles, c'est-à-dire de doutes qui s'imposent à l'esprit en fonction de la situation objective (ATF 144 IV 345 consid. 2.2.3 p. 248 s.).

2.2. Le juge du fait dispose d'un large pouvoir dans l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 4b p. 40). Confronté à des versions contradictoires, il forge sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents. L'appréciation des preuves doit être examinée dans son ensemble et l'état de fait déduit du rapprochement de divers éléments ou indices. Un ou plusieurs arguments corroboratifs peuvent demeurer fragiles si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (arrêts du Tribunal fédéral 6B_623/2012 du 6 février 2013 consid. 2.1 et 6B_642/2012 du 22 janvier 2013 consid. 1.1). Rien ne s'oppose à ce que le juge ne retienne qu'une partie des déclarations d'un témoin globalement crédible (ATF
120 Ia 31 consid. 3 p. 39 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_637/2012 du 21 janvier 2013 consid. 5.4). Faute d'aveux de l'auteur, le juge ne peut, en règle générale, déduire la volonté interne de l'intéressé qu'en se fondant sur des indices extérieurs et des règles d'expérience. Font partie de ces circonstances l'importance, connue de l'auteur, de la réalisation du risque, la gravité de sa violation du devoir de diligence, ses mobiles et sa façon d'agir (arrêt du Tribunal fédéral 6B_38/2021 du 14 février 2022 consid. 3.3).

2.3.1. L'art. 111 CP réprime le comportement de celui qui aura intentionnellement tué une personne, en tant que les conditions prévues aux articles 112 à 117 CP ne seront pas réalisées.

2.3.2.1. Les éléments constitutifs de l’infraction sont, au plan objectif, un comportement homicide, la mort d’un être humain autre que l’auteur, un rapport de causalité entre ces deux éléments, et au plan subjectif, l'intention (M. DUPUIS / L. MOREILLON / C. PIGUET / S. BERGER / M. MAZOU / V. RODIGARI [éds], Code pénal - Petit commentaire, 2e éd., Bâle 2017, n. 3 ad art. 111).

2.3.2.2. Sur le plan subjectif, le dol éventuel suffit (M. DUPUIS et al., op. cit., n. 18 ad art. 111). On retiendra le meurtre par dol éventuel lorsque l'on se trouve en mesure d'affirmer que, compte tenu de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce, l'auteur "s'est décidé contre le bien juridique" (ATF 133 IV 9 consid. 4.4 p. 20).

2.3.3. Il y a tentative lorsque l'auteur a réalisé tous les éléments subjectifs de l'infraction et manifesté sa décision de la commettre, alors que les éléments objectifs font, en tout ou en partie, défaut (ATF 140 IV 150 consid. 3.4 p. 152). Il y a en particulier tentative de meurtre, lorsque l'auteur, agissant intentionnellement, commence l'exécution de cette infraction, manifestant ainsi sa décision de la commettre, sans que le résultat ne se produise (arrêts du Tribunal fédéral 6B_1142/2020 et 6B_1155/2020 consid. 3.1.2 et 6B_157/2017 du 25 octobre 2017 consid. 3.1). Il n'est pas nécessaire que l'auteur ait souhaité la mort de la victime, ni que la vie de celle-ci ait été concrètement mise en danger, ni même qu'elle ait été blessée pour qu'une tentative d'homicide soit retenue, dans la mesure où la condition subjective de l'infraction est remplie (arrêt du Tribunal fédéral 6B_246/2012 du 10 juillet 2012 consid. 1.2 et 1.3). Il n'est pas non plus nécessaire que plusieurs coups aient été assénés (arrêt du Tribunal fédéral 6B_829/2010 du 28 février 2011).

La nature de la lésion subie par la victime et sa qualification d'un point de vue objectif sont également sans pertinence (ATF 137 IV 113 consid. 1.4.2 p. 115 s. ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_924/2017 du 14 mars 2018 consid. 1.4.5). L'auteur ne peut ainsi valablement contester la réalisation d'une tentative de meurtre au motif que la victime n'a subi que des lésions corporelles simples. Il importe cependant que les coups portés aient objectivement exposé la victime à un risque de mort (arrêt du Tribunal fédéral 6B_86/2019 du 8 février 2019 consid. 2.1).

Celui qui porte un coup de couteau dans la région des épaules et du buste lors d'une altercation dynamique doit s'attendre à causer des blessures graves. L'issue fatale d'un coup de couteau porté dans la région thoracique doit être qualifiée d'élevée et est notoire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_230/2012 du 18 septembre 2012), y compris avec une lame plutôt courte (arrêt du Tribunal fédéral 6B_239/2009 du 13 juillet 2009 consid. 1 et 2.4) – meurtre par dol éventuel retenu avec un couteau dont la lame mesurait 41 millimètres – même si, l'utilisation d'un couteau, muni d'une lame de 34 millimètres ne permet pas de conclure, sans autre examen, que l'auteur a accepté une blessure mortelle (arrêt du Tribunal fédéral 6B_775/2011 du 4 juin 2012 consid. 2.5 ; AARP/380/2017 du 21 novembre 2017 consid. 3.1.3). De même, celui qui assène un violent coup de couteau, au niveau de l'abdomen, dans le foie de sa victime, à proximité d'organes vitaux et/ou avec le risque de provoquer une hémorragie interne ne peut qu'envisager et accepter une possible issue mortelle (arrêts du Tribunal fédéral 6B_619/2013 du 2 septembre 2013 consid. 1.2 ; 6B_1015/2014 du 1er juillet 2015 consid. 2.1). Selon sa nature, un seul coup porté peut suffire pour retenir l'infraction de tentative d'homicide par dol éventuel (arrêts du Tribunal fédéral 6B_924/2017 du 14 mars 2018 consid. 1.4.2 ; 6B_246/2012 du 10 juillet 2012 consid. 1.3 ; 6B_829/2010 du 28 février 2011 consid. 3.2).

2.4.1. Celui qui, par une menace grave, aura alarmé ou effrayé une personne sera, sur plainte, puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (art. 180 al. 1 CP).

Pour que l'infraction soit consommée, il faut que la victime ait été effectivement alarmée ou effrayée. Elle doit craindre que le préjudice annoncé se réalise. Cela implique, d'une part, qu'elle le considère comme possible et, d'autre part, que ce préjudice soit d'une telle gravité qu'il suscite de la peur (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1428/2016 du 3 octobre 2017 consid. 2.1 et les références). Peu importe que les menaces aient été rapportées de manière indirecte à la victime (arrêt du Tribunal fédéral 6B_617/2022 du 14 décembre 2022 consid. 2.2.1).

2.4.2. Subjectivement, l'auteur doit avoir l'intention non seulement de proférer des menaces graves, mais aussi d'alarmer ou d'effrayer le destinataire. Le dol éventuel suffit (arrêt du Tribunal fédéral 6B_508/2021 du 14 janvier 2022 consid. 2.1).

2.5. L'art. 123 CP punit celui qui, intentionnellement, aura fait subir à une personne une autre atteinte à l'intégrité corporelle ou à la santé. Sont visées les lésions du corps humain ou de la santé qui ne peuvent être qualifiées de graves au sens de l'art. 122 CP. Cette disposition protège l'intégrité corporelle et la santé tant physique que psychique. Elle implique une atteinte importante aux biens juridiques ainsi protégés (ATF 134 IV 189 consid. 1.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1283/2018 du 14 février 2019 consid. 2.1). Il s'agit d'une infraction intentionnelle, le dol éventuel étant suffisant (ATF 119 IV 1 consid. 5a).

L'infraction est poursuivie d'office, notamment si l'auteur est le partenaire de la victime, pour autant qu'ils fassent ménage commun pour une durée indéterminée et que l'atteinte ait été commise durant cette période ou dans l'année qui a suivi la séparation (art. 123 ch. 2 al. 6 CP).

2.6.1. Celui qui aura violé son devoir d'assister ou d'élever une personne mineure dont il aura ainsi mis en danger le développement physique ou psychique, ou qui aura manqué à ce devoir, sera puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire (art. 219 CP).

L'auteur doit avoir envers le mineur un devoir d'assistance, soit de protection, ou un devoir d'éducation, c'est-à-dire d'assurer son développement, sur le plan corporel, spirituel et psychique ; cette obligation et, partant, la position de garant de l'auteur peut être fondée sur la loi, une décision de l'autorité ou un contrat, voire sur une situation de fait. Sont notamment des garants les parents naturels ou adoptifs, le tuteur, le maître d'école, le responsable d'une institution, le directeur d'un home ou d'un internat, etc. (ATF 125 IV 64 consid. 1a p. 68 s).

Sur le plan objectif, la violation ou le manquement doit mettre en danger le développement physique ou psychique du mineur. L'infraction, n'exige pas une atteinte à l'intégrité corporelle ou psychique du mineur, une mise en danger suffit si elle est concrète, soit qu'elle apparait vraisemblable dans le cas concret. Des séquelles durables (physique ou psychique) doivent apparaître vraisemblables de manière à mettre le développement du mineur en danger (arrêt du Tribunal fédéral 6B_782/2022 du 17 avril 2023 consid. 2.2.)

Dans un arrêt 6B_539/2010 du 20 mai 2011, le Tribunal fédéral a confirmé la condamnation d'un beau-père ayant maltraité son beau-fils durant des années, alors qu'ils vivaient ensemble. Même si les troubles de l'enfant n'étaient pas exclusivement imputables au comportement du prévenu, ce dernier avait réalisé l'infraction, dès lors qu'une simple mise en danger concrète du développement suffisait (consid. 4.4).

2.6.2. L'infraction peut être commise intentionnellement, le dol éventuel étant suffisant, ou par négligence (ATF 125 IV 64 consid. 1a p. 70).

2.7. Quiconque, de manière contraire au droit, est attaqué ou menacé d’une attaque imminente a le droit de repousser l’attaque par des moyens proportionnés aux circonstances (art. 15 CP). Si l'excès des limites de la légitime défense provient d’un état excusable d’excitation ou de saisissement causé par l’attaque, l’auteur n’agit pas de manière coupable (art. 16 al. 2 CP).

2.8.1. Il est établi que, dans la nuit du 5 au 6 juillet 2020, l'intimé est intervenu, muni d'un couteau de cuisine, au secours de sa mère, contre l'appelant qui la violentait, et a été blessé à trois reprises par la lame.

L'appelant conteste avoir saisi ledit couteau et, par conséquent, être l'auteur des plaies, mais un faisceau d'indices sérieux démontre le contraire.

2.8.2. La victime a livré des déclarations détaillées et corroborées par les éléments objectifs du dossier. Le tableau lésionnel et la reconstitution, de même que les empreintes sur le manche du couteau sont compatibles avec ses dires. Son discours est resté globalement constant et conforté par les déclarations des voisins. La variation quant à la prise du couteau résulte avant tout de son jeune âge et de sa crainte d'être tenu pour responsable, de sorte qu'elle ne le décrédibilise aucunement. Plaide encore en ce sens qu'il a révélé la vérité à sa mère avant l'audience du 4 août 2020 (C-38), soit très rapidement après les faits.

La mère du jeune homme, témoin oculaire, confirme la version des faits de son fils, aucun élément ne permettant de retenir qu'elle le protégerait. Au contraire, elle a rapporté, au MP, que l'enfant s'était armé et a remis le couteau intact à la police.

Une partie du récit de F______ et de sa mère est de surcroît objectivée par l'enregistrement, soit, en particulier, le fait que l'appelant portait ledit couteau et la terreur manifeste de l'intimée, ainsi que le cri du jeune homme "il m'a coupé la tête". Cette restitution en temps réels des faits est incompatible avec la version de l'appelant, et exclut toute manipulation des enfants par leur mère.

2.8.3. À l'inverse, les explications de l'appelant ne permettent pas d'expliquer les lésions de la victime ou la présence de ses empreintes digitales sur le manche, et encore moins la fuite de l'intimé par le balcon. Il n'a cessé de varier en évoquant les prétendues menaces qu'il subissait de son beau-fils avant l'attaque. Or, aucun élément ne permet d'établir que le jeune homme fut violent auparavant. La victimisation du prévenu n'est ainsi qu'une tentative de blâmer l'intimé pour ses propres agissements, ce qui sera retenu à charge.

2.8.4. Sur le plan subjectif, le prévenu a visé des régions comportant des organes vitaux et vaisseaux sanguins importants (thorax, estomac et arrière du crâne). Pris de boisson, il ne pouvait exclure qu'un mouvement brusque entrainât une issue fatale, d'autant moins que la victime était mobile, contrainte d'esquiver les coups. Vu la localisation des blessures, il n'est pas décisif qu'elles eurent, par chance, été superficielles, étant rappelé que les experts n'ont pas exclu que cela résulte des mouvements de la victime. À cela s'ajoute le fait que l'attaque a été longue (plus de huit minutes selon l'enregistrement), que l'auteur a utilisé un couteau tranchant (lame de plus de 20 centimètres) et qu'il éprouvait des sentiments négatifs envers la victime, autant d'éléments montrant sa détermination.

Dans le prolongement de ce qui précède, si la vie de la victime n'a pas été concrètement mise en danger, l'appelant ne peut qu'avoir envisagé la mort et, ainsi accepté cette issue, cela dès le premier coup de couteau. Le fait que le garçon eût préféré fuir par le balcon, malgré le danger, ne fait que convaincre de l'intention qui animait son agresseur de manière reconnaissable pour la victime.

2.8.5. La défense n'a, à raison, pas plaidé la thèse de l'appelant, se limitant à soutenir qu'il avait excédé les limites de la légitime défense. Relevons qu'il apparaît déjà douteux, sans que cela ne puisse être revu, que l'auteur eût agi dans un tel état en tordant le bras de son beau-fils, celui-ci n'ayant fait que prendre la défense de sa mère. Une fois désarmé, le garçon ne représentait plus une menace, et la suite d'évènements dépendait exclusivement de l'adulte, de sorte que l'attaque subséquente n'a pas été commise en état de légitime défense, ce qui exclut également tout excès.

2.8.6. Les faits décrits sous chiffre 1.4 de l'acte d'accusation sont donc établis et constitutifs d'une tentative de meurtre (art. 22 cum 111 CP). L'appel sera rejeté.

2.9.1. Aucun élément ne permet de douter des déclarations de l'intimée H______, laquelle a livré des déclarations constantes et modérées en dépit des années de violences endurées. Il n'y a pas de raison de penser que l'appelant, capable de battre sa fille de 11 ans jusqu'à la faire saigner ou lui occasionner un hématome, se fut comporté différemment avec la mère de celle-ci.

Les déclarations des témoins n'infirment pas ce qui précède et démontrent seulement que le prévenu se comportait licitement en public, attitude fréquente dans ce type d'affaire, ou que les marques étaient dissimulées par la victime.

2.9.2. Le fait que l'intimée a vérifié que leur fille se trouvait dans sa chambre, après le départ précipité de l'appelant et avant de rejoindre son fils, blessé, en bas de l'immeuble, atteste de ce qu’elle avait des raisons de craindre que l'auteur ne mette une de ses menaces à exécution, soit que de telles menaces avaient été proférées par le passé et, qu'elle en avait peur.

2.9.3. Les faits décrits sous chiffres 1.1.1., 1.1.2, 1.2.1 et 1.2.2. sont établis et constitutifs des infractions aux articles 180 ou 123 CP, et l'appel sera rejeté.

2.10.1. Le devoir de garant de l'appelant à l'égard de son beau-fils ne fait aucun doute. Il était son unique figure paternelle, faisait ménage commun avec l'enfant et s'en occupait au quotidien, en l'absence de sa mère. La demande de celle-ci qu'il cesse de se charger de son éducation, soit, en réalité, qu'il s'abstienne de le punir violemment, ne fait que confirmer qu'il avait un devoir de protection envers lui.

Le lien effectif entre les maltraitances de l'appelant et, à tout le moins, une partie des symptômes du jeune homme est établi, ce que confirment les professionnels de la santé et de l'enfance. Il n'est pas décisif que les troubles ne sont pas exclusivement imputables au comportement du prévenu, puisqu'une mise en danger concrète, largement atteinte en l'occurrence, suffit à réaliser l'infraction.

De son propre aveu, l'appelant était conscient des fragilités du garçon, de sorte qu'il a, à tout le moins, envisagé et accepté, de porter atteinte à son développement, en aggravant son état.

Les faits décrits sous chiffre 1.5. sont établis et constitutifs de l'infraction de l'art. 219 CP. L'appel sera rejeté.

3. 3.1. Selon l'art. 47 CP, le juge fixe la peine d'après la culpabilité de l'auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l'effet de la peine sur son avenir (al. 1). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l'acte, par les motivations et les buts de l'auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

3.2. La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution. Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle ainsi que les motivations et les buts de l'auteur. À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même, à savoir les antécédents (judiciaires et non judiciaires), la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 142 IV 137 consid. 9.1 p. 147 ; 141 IV 61 consid. 6.1.1 p. 66 s.).

3.3. Si, en raison d’un ou de plusieurs actes, l’auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l’infraction la plus grave et l’augmente dans une juste proportion. Il ne peut toutefois excéder de plus de la moitié le maximum de la peine prévue pour cette infraction. Il est en outre lié par le maximum légal de chaque genre de peine (art. 49 al. 1 CP).

3.4. La faute de l'appelant est très importante. Durant une longue période pénale, il a régulièrement violenté de diverses manières son ex-épouse, sa fille et son beau-fils, jusqu’au jour où il s'en est pris à la vie de ce dernier. Conscient des fragilités de l'adolescent, il a volontairement porté atteinte à son développement physique et psychique. Ses mobiles sont égoïstes, relevant de sa soif d'autorité et de contrôle.

Sa collaboration a été extrêmement mauvaise. Il persiste, en appel, à nier les faits reprochés, y compris ceux qu'il ne conteste plus judiciairement.

Sa prise de conscience est inexistante et ses excuses circonstancielles. Il évoque des regrets et présente des excuses en minimisant ses torts. Il dit se repentir de ses actes violents, mais n'entreprend aucune démarche thérapeutique pour y remédier.

Sa situation personnelle, soit l'irrégularité de sa situation en Suisse, n'explique pas ses gestes, d'autant moins que les intimés faisaient face à la même instabilité.

Aucun motif d'atténuation de la peine n'entre en considération, les conditions de la défense excusable faisant en particulier défaut.

L'appelant n'a pas d'antécédent en Suisse. Il a été condamné en 2010 au Salvador.

Il y a plusieurs infractions passibles du même type de peine, d'où le bénéfice du principe d'aggravation.

Vu la gravité des faits, l'absence de prise de conscience et le risque de récidive, la peine privative de liberté de six ans est adéquate (elle eût peut être de six ans et un mois), soit deux ans et six mois pour la tentative de meurtre, infraction objectivement la plus grave, aggravée d'un an et six mois pour les lésions corporelles simples à réitérées reprises (peine théorique : 20 mois), d'un an pour la violation du devoir d'assistance et d'éducation (peine théorique : 14 mois), de six mois pour les menaces à réitérées reprises (peine théorique : huit mois), et trois mois pour chacune des infractions à la LEI (peine théorique : quatre mois par infraction). Les voies de fait n'étant pas contestées, l'amende de CHF 2'000.- sera en sus confirmée.

4. 4.1. En tant que partie plaignante, le lésé peut faire valoir des conclusions civiles déduites de l'infraction par adhésion à la procédure pénale (art. 122 al. 1 CP).

Aux termes de l'art. 47 CO, le juge peut, en tenant compte de circonstances particulières, allouer à la victime de lésions corporelles une indemnité équitable à titre de réparation morale. Les circonstances particulières évoquées dans la norme consistent dans l'importance de l'atteinte à la personnalité du lésé, l'art. 47 CO étant un cas d'application de l'art. 49 CO. Les lésions corporelles, qui englobent tant les atteintes physiques que psychiques, doivent donc en principe impliquer une importante douleur physique ou morale ou avoir causé une atteinte durable à la santé. Parmi les circonstances qui peuvent, selon les cas, justifier l'application de l'art. 47 CO, figurent avant tout le genre et la gravité de la lésion, l'intensité et la durée des répercussions sur la personnalité de la personne concernée, le degré de la faute de l'auteur ainsi que l'éventuelle faute concomitante du lésé (ATF 141 III 97 consid. 11.2 p. 98 ; ATF 132 II 117 consid. 2.2.2 p. 119 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1292/2016 du 2 octobre 2017 consid. 2.2).

4.2. Vu la confirmation de l'intégralité des verdicts de culpabilité, il n'y a pas lieu de revenir sur les indemnités pour tort moral accordées en première instance. Leur quotité est en adéquation avec la longue souffrance des intimés ainsi que les conséquences, sur le plan physique et psychique, des actes incriminés, et n'est du reste pas contestée.

5. 5.1.1. Conformément à l'art. 66a al. 1 let. a CP, applicable aux infractions commises à partir du 1er octobre 2016, le juge expulse un étranger du territoire suisse pour une durée de cinq à quinze ans notamment s'il est reconnu coupable de meurtre (art. 111 CP). L'expulsion obligatoire doit également être prononcée lorsque l'acte délictueux est resté au stade de la tentative (ATF 144 IV 168 consid. 1.4.1 p. 171 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_612/2018 du 22 août 2018 consid. 2.4).

5.1.2. L'art. 66a al. 2 CP prévoit que le juge peut exceptionnellement renoncer à une expulsion lorsque celle-ci mettrait l'étranger dans une situation personnelle grave (première condition cumulative) et que les intérêts publics à l'expulsion ne l'emportent pas sur l'intérêt privé de l'étranger à demeurer en Suisse (deuxième condition cumulative) (ATF 144 IV 332 consid. 3.3 p. 339).

La clause de rigueur permet de garantir le principe de la proportionnalité (art. 5 al. 2 Cst.). Elle doit être appliquée de manière restrictive (ATF 146 IV 105 consid. 3.4.2 p. 108 ; 144 IV 332 consid. 3.3.1 p. 340). En règle générale, il convient d'admettre l'existence d'un cas de rigueur au sens de l'art. 66a al. 2 CP lorsque l'expulsion constituerait, pour l'intéressé, une ingérence d'une certaine importance dans son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par la Constitution fédérale (art. 13 Cst.) et par le droit international, en particulier l'art. 8 CEDH (arrêt du Tribunal fédéral 6B_379/2021 du 30 juin 2021 consid. 1.2).

Pour se prévaloir du droit au respect de sa vie privée au sens de l'art. 8 par. 1 CEDH, l'étranger doit établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire. Le Tribunal fédéral n'adopte pas une approche schématique qui consisterait à présumer, à partir d'une certaine durée de séjour en Suisse, que l'étranger y est enraciné et dispose de ce fait d'un droit de présence dans notre pays. Il procède bien plutôt à une pesée des intérêts en présence, en considérant la durée du séjour en Suisse comme un élément parmi d'autres et en n'accordant qu'un faible poids aux années passées en Suisse dans l'illégalité, en prison ou au bénéfice d'une simple tolérance (ATF 134 II 10 consid. 4.3 p. 24 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1142/2020 précité consid. 6.2.3). Un séjour légal de dix années suppose en principe une bonne intégration de l'étranger (ATF 144 I 266 consid. 3.9 p. 278).

Un étranger peut se prévaloir de l'art. 8 par. 1 CEDH (et de l'art. 13 Cst.), qui garantit notamment le droit au respect de la vie familiale, pour s'opposer à l'éventuelle séparation de sa famille, pour autant qu'il entretienne une relation étroite et effective avec une personne de sa famille ayant le droit de résider durablement. Les relations familiales visées sont avant tout celles qui concernent la famille dite nucléaire, soit celles qui existent entre époux ainsi qu'entre parents et enfants mineurs vivant en ménage commun (arrêt du Tribunal fédéral 6B_38/2021 consid. 5.1.2.).

5.1.3.1. Le juge de l'expulsion ne peut non plus ignorer, dans l'examen du cas de rigueur, qui suppose une pesée globale des circonstances, celles qui s'opposeraient à l'expulsion parce qu'il en résulterait une violation des garanties du droit international, notamment le principe de non-refoulement, lors même que ces garanties sont encore expressément réservées par l'art. 66d al. 1 CP. Le juge de l'expulsion est tenu d'examiner lui-même, au stade du prononcé de l'expulsion déjà, si les conditions de l'art. 66a al. 2 CP sont réalisées et de renoncer à ordonner l'expulsion dans cette hypothèse (arrêt du Tribunal fédéral 6B_38/2021 consid. 5.2.3.).

L'exécution de l'expulsion obligatoire ne peut être reportée que : lorsque la vie ou la liberté de la personne concernée dont le statut de réfugié a été reconnu par la Suisse serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ; cette disposition ne s'applique pas au réfugié qui ne peut pas invoquer l'interdiction de refoulement prévue à l'art. 5 al. 2 LAsi (let. a) ; lorsque d'autres règles impératives du droit international s'opposent à l'expulsion (let. b) (art. 66d al. 1 CP).

5.1.3.2. Une situation générale de violence dans un État ne suffit pas à démontrer que le renvoi d'une personne dans cet État entraînerait une violation de l'art. 3 CEDH, sous réserve que cette situation de violence atteigne un niveau d'intensité si extrême que le seul retour d'une personne à cet endroit l'exposerait à un risque réel de mauvais traitements. Il incombe alors à celui qui invoque la violation de l'art. 3 CEDH d'établir qu'il existe de sérieuses raisons de croire à l'existence de pratiques de mauvais traitements et qu'il appartient bien à un groupe exposé à de telles pratiques (arrêt CourEDH NA. c. Royaume-Uni du 17 juillet 2008, Requête no 25904/07, § 115 s. ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_422/2021 consid. 4.1).

Le Salvador présente une situation politique stable, mais fait face à un taux élevé de criminalité, auquel le gouvernement répond par une politique répressive. Les affrontements quotidiens entre les forces de l'ordre et les membres des "maras" entrainent des décès. Cela étant, le pays n'est ni en guerre, ni dans une situation de violence généralisée, de sorte que le renvoi vers cet État est en principe raisonnable ("zumutbar") (arrêt du Tribunal administratif fédéral du 10 juin 2022 D-2110/2021 consid. 8.3.).

5.2. L'inscription de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS) est régie par règlement (UE) 2018/1861 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du SIS dans le domaine des vérifications aux frontières, modifiant la convention d'application de l'accord de Schengen, entré en vigueur pour la Suisse le 11 mai 2021 (arrêts du Tribunal fédéral 6B_403/2022 du 31 août 2022 consid. 3.1 ; 6B_628/2021 du 14 juillet 2022 consid. 2.2.1 et 6B_834/2021 du 5 mai 2022 consid. 2.2.1).

L'art. 21 ch. 1 de ce règlement prescrit qu’avant d'introduire un signalement, l'État membre vérifie si le cas est suffisamment approprié, pertinent et important pour justifier l'introduction du signalement dans le SIS. Le signalement dans le SIS suppose que la présence du ressortissant d'un pays tiers, sur le territoire d'un État membre, constitue une menace pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale. L'art. 24 ch. 2 précise que tel est le cas lorsque l'intéressé a été condamné dans un État membre pour une infraction passible d'une peine privative de liberté d'au moins un an (let. a) ou qu'un ressortissant de pays tiers a contourné ou tenté de contourner le droit national ou de l'Union relatif à l'entrée et au séjour sur le territoire des États membres (let. c). La décision d'inscription doit être prise dans le respect du principe de proportionnalité (individuelle) (art. 21 du règlement et arrêt du Tribunal fédéral 6B_932/2021 du 7 septembre 2022 consid. 1.8.1).

5.3. L'appelant tombe sous le coup d'une expulsion obligatoire et ne saurait se prévaloir de la clause de rigueur. Il a certes résidé en Suisse, pays dont il ne maîtrise aucune des langues, depuis 2014, et y a travaillé, mais sans autorisation. Une partie de sa famille se trouve également dans le pays, toutefois de manière irrégulière, à l'exception d'une sœur. Il ne prétend du reste pas entretenir avec elle une relation si proche qu'elle remplirait, et cela de manière exceptionnelle, les exigences précitées.

Selon ses dires, il n'a pas vu sa fille mineure depuis son arrestation et, vu la gravité des faits commis à son encontre, il apparaît peu probable qu'un droit de visite soit instauré avec la jeune fille. Même dans une telle hypothèse, l'intérêt public à l'expulsion continuerait à primer.

Le caractère actuel des menaces dont il s'affirme victime au Salvador de la part de groupes privés n'est pas démontré près de dix ans après son départ, sans compter la durée de la peine qu'il va encore purger. Son ex-femme n'a d'ailleurs jamais mentionné de tels risques pour la famille, étant rappelé qu'elle ne l'a rejoint qu'un an après et était également visée. L'appelant n'explique au demeurant pas en quoi l'État, menant manifestement une politique très répressive à l'égard des gangs, ne serait à même de fournir une protection appropriée, ce qui est décisif en l'espèce.

La jurisprudence citée par la défense (arrêt CourEDH HLR c. France du 29 avril 1997) n'infirme pas ce qui précède, l'expulsion vers la Colombie ayant été jugée prononçable au bénéfice d'une motivation semblable.

5.4. Au vu de ce qui précède, l'expulsion de cinq ans, durée adéquate, sera confirmée, de même que son signalement, celui-ci étant conforme aux conditions précitées.

6 Les motifs ayant conduit les premiers juges à prononcer, par ordonnance séparée du 4 novembre 2022, le maintien de l'appelant, en détention pour des motifs de sûreté sont toujours d'actualité, ce que celui-ci ne conteste au demeurant pas, de sorte que la mesure sera reconduite mutatis mutandis (ATF 139 IV 277 consid. 2.2 à 2.3).

7. L'appelant, qui succombe, supportera les neuf dixièmes des frais de la procédure envers l'État (art. 428 CPP), y compris un émolument de jugement de CHF 1'800.-, de manière à tenir compte du retrait de l'appel de l'intimée D______. Le solde sera laissé à la charge de l'État, vu la qualité de la jeune intimée.

Vu l'issue de l'appel, la répartition des frais de première instance ne sera pas revue.

8. 8.1. Selon l'art. 135 al. 1 CPP, le défenseur d'office ou le conseil juridique gratuit (art. 138 al. 1 CPP) est indemnisé conformément au tarif des avocats de la Confédération ou du canton du for du procès. S'agissant d'une affaire soumise à la juridiction cantonale genevoise, l'art. 16 du règlement sur l'assistance juridique (RAJ) s'applique. Cette dernière disposition prescrit que l'indemnité, en matière pénale, est calculée selon le tarif horaire suivant, débours de l'étude inclus : avocat stagiaire CHF 110.- (let. a) et chef d'étude CHF 200.- (let. c).

Conformément à l'art. 16 al. 2 RAJ, seules les heures nécessaires sont retenues. Elles sont appréciées en fonction notamment de la nature, de l'importance et des difficultés de la cause, de la valeur litigieuse, de la qualité du travail fourni et du résultat obtenu.

On exige de l'avocat qu'il soit expéditif et efficace dans son travail et qu'il concentre son attention sur les points essentiels. Des démarches superflues ou excessives n'ont pas à être indemnisées (M. VALTICOS / C. M. REISER / B. CHAPPUIS / F. BOHNET (éds), Commentaire romand, Loi sur les avocats : commentaire de la loi fédérale sur la libre circulation des avocats (Loi sur les avocats, LLCA), 2ème éd. Bâle 2022, n. 257 ad art. 12). Dans le cadre des mandats d'office, l'État n'indemnise ainsi que les démarches nécessaires à la bonne conduite de la procédure pour la partie qui jouit d'une défense d'office ou de l'assistance judiciaire. Il ne saurait être question d'indemniser toutes les démarches souhaitables ou envisageables. Le mandataire d'office doit en effet gérer son mandat conformément au principe d'économie de procédure (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2013.22 du 31 octobre 2013 consid. 5.2.3). Par voie de conséquence, le temps consacré à la rédaction d'écritures inutiles ou reprenant une argumentation déjà développée, fût-ce devant une autorité précédente, ne saurait donner lieu à indemnisation ou à indemnisation supplémentaire (AARP/295/2015 du 12 juillet 2015 consid. 8.2.2.3, 8.2.2.6, 8.3.1.1 et 8.3.2.1).

8.2. L'activité consacrée aux conférences, audiences et autres actes de la procédure est majorée de 20% jusqu'à 30 heures de travail, décomptées depuis l'ouverture de la procédure, et de 10% lorsque l'état de frais porte sur plus de 30 heures, pour couvrir les démarches diverses, telles la rédaction de courriers ou notes, les entretiens téléphoniques et la lecture de communications, pièces et décisions (arrêt du Tribunal fédéral 6B_838/2015 du 25 juillet 2016 consid. 3.5.2 ; voir aussi les décisions de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.34 du 21 octobre 2016 consid. 4.1 et 4.2 et BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.5.2 et 3.5.3). Des exceptions demeurent possibles, charge à l'avocat de justifier l'ampleur d'opérations dont la couverture ne serait pas assurée par le forfait.

8.3. Le temps de déplacement de l'avocat est considéré comme nécessaire pour la défense d'office au sens de l'art. 135 CPP (décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2015.33 du 28 juillet 2015 consid. 4.3 et les références). La rémunération forfaitaire de la vacation aller/retour au et du Palais de justice ou au et du bâtiment du Ministère public est arrêtée à CHF 55.- / CHF 100.- pour les stagiaires / chefs d'étude, dite rémunération étant allouée d'office.

Le temps considéré admissible pour les visites dans les établissements du canton est d'une heure et 30 minutes quel que soit le statut de l'avocat concerné, ce qui comprend le temps de déplacement (AARP/181/2017 du 30 mai 2017 consid. 8.2.2.2 et 8.3.5 ; cf. également Ordonnance de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2016.369 du 12 juillet 2017 consid. 4.2.4). Les entretiens avec la famille du prévenu ne sont en principe pas indemnisés par l'assistance juridique, ne relevant pas de la défense (AARP/295/2015 du 12 juillet 2015 consid. 8.1.4.4 et 8.2.2.2 confirmé sur ce point par la décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral BB.2015.85 du 12 avril 2016 consid. 3.4 ; AARP/500/2013 du 28 octobre 2013).

8.4.1. Doit être retranché de l'état de frais du défenseur d'office le temps consacré : à la rédaction de la déclaration d'appel, l'activité adéquate à ce titre étant couverte par le forfait, aux entretiens avec la famille, ceux-ci ne relevant pas de la défense, et aux recherches juridiques, l'assistance judiciaire ne rémunérant pas la formation continue de l'avocat breveté. Le temps de la visite du client en détention sera réduit à une heure et 30 minutes. Une durée de sept heures était suffisante pour préparer les débats d'appel, étude du dossier comprise, dans la mesure où l'avocat suivait la procédure depuis la première instance et la connaissait donc bien.

La rémunération sera arrêtée à CHF 3'729.20 correspondant à 14,83 heures d'activité au tarif de CHF 200.-/heure (CHF 2'966.-) plus la majoration forfaitaire de 10%, vu l'activité déjà indemnisée (CHF 296.60), deux déplacements (CHF 200.-) et la TVA au taux de 7.7% (CHF 266.60).

8.4.2. L'état de frais du conseil juridique gratuit de l'intimée satisfait globalement les exigences rappelées supra. Il sera cependant complété de la durée de l'audience d'appel et du déplacement à celle-ci.

La rémunération sera donc arrêtée à CHF 1’166.90, soit 8 heures et 30 minutes d'activité au tarif de CHF 110.-/heure (CHF 935.-) plus la majoration forfaitaire de 10% (CHF 93,50), une vacation (CHF 55.-) ainsi que la TVA au taux de 7.7% (CHF 83.40).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Prend acte du retrait de l'appel de D______.

Reçoit l'appel formé par A______ contre le jugement JTCO/145/2022 rendu le 4 novembre 2022 par le Tribunal correctionnel dans la procédure P/11895/2020.

Le rejette.

Ordonne le maintien de A______ en détention pour motifs de sûreté.

Arrête les frais de procédure d'appel à CHF 2'335.-, y compris un émolument de jugement de CHF 1'800.-.

Met le 9/10 de ces frais, soit CHF 2'101.50, à la charge de A______ et laisse le solde de ces frais à la charge de l'État.

Arrête à CHF 3'729.20, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me C______, défenseur d'office de A______.

Arrête à CHF 1’166.90, TVA comprise, le montant des frais et honoraires de Me M______, conseil juridique gratuit de H______.

Confirme le jugement entrepris, dont le dispositif est le suivant :

"Déclare A______ coupable de tentative de meurtre (art. 111 cum 22 CP), de lésions corporelles simples (art. 123 ch. 1 et 2 al. 2 et 3 CP), de menaces (art. 180 al. 1 et 2 let. a CP), de voies de fait (art. 126 al. 1 et 2 let. a et b CP), de violation du devoir d'assistance et d'éducation (art. 219 al. 1 CP), de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b LEI) et d'activité lucrative sans autorisation (art. 115 al. 1 let. c LEI).

Classe les faits visés sous chiffre 1.2.3. (art. 180 al. 1 CP et art. 329 al. 1 et 5 CPP) et sous chiffre 1.3. de l'acte d'accusation antérieurs au 4 novembre 2019 (art. 126 CP et art. 329 al. 1 et 5 CPP).

Condamne A______ à une peine privative de liberté de 6 ans, sous déduction de 852 jours de détention avant jugement (art. 40 CP).

Condamne A______ à une amende de CHF 2'000.- (art. 106 et 126 CP).

Prononce une peine privative de liberté de substitution de 20 jours.

Dit que la peine privative de liberté de substitution sera mise à exécution si, de manière fautive, l'amende n'est pas payée.

Ordonne l'expulsion de Suisse de A______ pour une durée de 5 ans (art. 66a al. 1 let. a CP).

Dit que l'exécution de la peine prime celle de l'expulsion (art. 66c al. 2 CP).

Ordonne le signalement de l'expulsion dans le système d'information Schengen (SIS) (art. 20 de l'ordonnance N-SIS; RS 362.0).

Ordonne, par prononcé séparé, le maintien en détention pour des motifs de sûreté de A______ (art. 231 al. 1 CPP).

Condamne A______ à payer à F______ CHF 35'000.-, avec intérêts à 5% dès le 6 juillet 2020, à titre de réparation du tort moral (art. 47 CO).

Condamne A______ à payer à H______ CHF 5'000.-, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2018, à titre de réparation du tort moral (art. 47 CO).

Condamne A______ à payer à D______ CHF 1'000.-, avec intérêts à 5% dès le 1er janvier 2018, à titre de réparation du tort moral (art. 47 CO).

Ordonne la restitution à A______ du téléphone figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 1______.

Ordonne la confiscation et la destruction du débardeur figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 2______ et du couteau figurant sous chiffre 1 de l'inventaire n° 3______ (art. 69 CP).

Condamne A______ aux frais de la procédure, qui s'élèvent à CHF 13'821.05, y compris un émolument de jugement de CHF 1'500.- (art. 426 al. 1 CPP).

Fixe à CHF 6'871.25 l'indemnité de procédure due à Me C______, défenseur d'office de A______ (art. 135 CPP).

Fixe à CHF 7'594.45 l'indemnité de procédure due à Me M______, conseil juridique gratuit de H______ (art. 138 CPP)."


 

Notifie le présent arrêt aux parties.

Le communique, pour information, au Tribunal correctionnel, au Secrétariat d'État aux migrations (SEM), à l'Office cantonal de la population et des migrations (OCPM), au Service de l'application des peines et mesures (SAPEM) ainsi qu'à la prison de B______.

 

La greffière :

Melina CHODYNIECKI

 

La présidente :

Alessandra CAMBI FAVRE-BULLE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral (LTF), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF), par-devant le Tribunal fédéral (1000 Lausanne 14), par la voie du recours en matière pénale, sous la réserve qui suit.

 

Dans la mesure où il a trait à l'indemnité de l'avocat désigné d'office ou du conseil juridique gratuit pour la procédure d'appel, et conformément aux art. 135 al. 3 let. b CPP et 37 al. 1 de la loi fédérale sur l'organisation des autorités pénales de la Confédération (LOAP), le présent arrêt peut être porté dans les dix jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 39 al. 1 LOAP, art. 396 al. 1 CPP) par-devant la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral (6501 Bellinzone).


 

 

ETAT DE FRAIS

 

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon les art. 4 et 14 du règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

 

Total des frais de procédure du Tribunal correctionnel :

CHF

13'821.05

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

00.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

400.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

60.00

Etat de frais

CHF

75.00

Emolument de décision

CHF

1'800.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

2'335.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

16'156.05