Skip to main content

Décisions | Tribunal administratif de première instance

1 resultats
A/4058/2024

JTAPI/721/2025 du 27.06.2025 ( OCPM ) , REJETE

Descripteurs : CAS DE RIGUEUR;DURÉE MINIMALE DE SÉJOUR;DÉCISION DE RENVOI;RESPECT DE LA VIE PRIVÉE
Normes : LEI.30.al1.letb; OASA.31; CEDH.8.par1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4058/2024

JTAPI/721/2025

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 30 juin 2025

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Stéphanie FULD, avocate, avec élection de domicile

 

contre

 

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1974, est ressortissant du Kosovo.

2.             Le 20 septembre 2018, M. A______ a saisi l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) d’une demande de régularisation de ses conditions de séjour pour cas individuel d’une extrême gravité, en application de l'« opération Papyrus », indiquant exercer une activité lucrative sur le territoire genevois dans le domaine du bâtiment depuis 2010 et séjourner en Suisse depuis huit ans.

À l’appui de sa requête, il a notamment fourni un extrait de son casier judiciaire suisse, une attestation de l’office des poursuites et de l’Hospice général (ci-après : HG), un certificat de travail de l’entreprise B______, non daté, indiquant qu’il y avait travaillé deux mois en 2013, deux mois en 2014 et deux mois en 2015, un extrait de compte individuel de la caisse de compensation mentionnant des cotisations en 2016 (trois mois) et 2017 (trois mois), une fiche de salaire pour le mois de mai 2017 établie par la société C______ Sàrl (salaire versé de CHF 232.30), une attestation d’achat d’abonnements des Transports publics genevois (ci-après : TPG) indiquant qu’il avait acheté divers abonnements mensuels, soit : deux en 2010, un en 2011, sept en 2012, un en 2017 et un en 2018, ainsi qu'un formulaire M dûment complété par la société D______ Sàrl.

3.             Le 22 juillet 2019, l’OCPM a invité M. A______ à lui transmettre les formulaires OCIRT, une déclaration par laquelle il attestait n’avoir pas déposé de demande d’autorisation de séjour dans un pays de l’UE/AELE, une attestation récente de non-poursuite, une attestation récente de non-assistance de l’HG, une attestation de niveau A2 du cadre européen commun de référence (CECR), ainsi que des justificatifs de résidence pour les années 2009, 2013, 2014 et 2015.

4.             Le 30 août 2019, relevant qu’aucune suite n’avait été donnée à sa demande de renseignements du 24 mai 2023, l’OCPM a fait part à M. A______ de son intention de ne pas donner une suite favorable à sa demande de régularisation, lui impartissant un délai de 30 jours pour faire valoir, par écrit, son droit d’être entendu.

5.             Par publication du 11 septembre 2019 dans la Feuille d’avis officielle, l’OCPM a informé M. A______ de son intention de refuser sa demande de régularisation. Il lui était loisible de retirer un courrier explicatif dans les locaux de l’OCPM.

6.             Le 5 novembre 2021, M. A______ a fait l’objet d’une dénonciation de l’OCPM auprès du Ministère public genevois suite à des soupçons se rapportant à des pièces produites, notamment le décompte de salaire établi par la société C______ Sàrl et le certificat de travail établi par l'entreprise B______, laquelle apparaissait dans de nombreux dossiers « Papyrus ».

7.             Une procédure pénale a été ouverte à l’encontre de l’intéressé des chefs de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 118 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et faux dans les titres (art. 251 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP – RS 311.0).

8.             Le 5 octobre 2022, lors de son audition par les services de police, M. A______ a déclaré qu’il avait complété sa demande par le biais de Monsieur E______, auquel il avait versé CHF 1’500.- pour ce travail. Le changement d’adresse du 24 septembre 2019 avait été effectué à son insu. Il en allait de même s'agissant de sa demande de régularisation du 20 septembre 2018. Il a affirmé avoir travaillé pour l'entreprise B______ entre 2013 et 2015 ; les pièces litigieuses lui avaient été remises gratuitement par Monsieur F______, titulaire de l’entreprise précitée. Il a également soutenu avoir travaillé pour C______ SÀRL durant une journée, mais ne pouvait expliquer l’absence de cotisations. Il était marié et père de huit enfants vivant au Kosovo, l’aînée ayant 22 ans et le benjamin 6 ans. Il était rentré au Kosovo de fin 2012 à février 2013, puis y était retourné en 2015 jusqu’à fin 2016, soit environ resté 6-7mois selon ses dires.

9.             Le 29 novembre 2023, le Ministère public a rendu une ordonnance de classement en faveur de M. A______. Lors de l'audience du 9 novembre 2023, tant Monsieur G______ que Monsieur F______ avaient confirmé l'authenticité des documents versés dans le dossier du précité.  A cette occasion, E______ avait confirmé s'être borné à remettre à l'OCPM les documents que lui avait remis A______. Aussi, aucun soupçon qui aurait justifié une mise en accusation n'était établi.

10.         Le 14 mai 2024, l’OCPM a requis de M. A______ un formulaire M dûment rempli, copies de son contrat de travail, de son bail à loyer, de son passeport et de son test FIDE en langue française. Il lui a également demandé d’indiquer la date à laquelle il était parti au Kosovo en 2015 et revenu en Suisse en 2016, ainsi que des justificatifs de son séjour sur le territoire helvétique pour les années 2010, 2011, 2013, 2014 et 2015. L’OCPM a imparti à l’intéressé un délai de 30 jours pour lui faire parvenir les documents requis.

11.         Le 1er juin 2024, M. A______ a transmis les documents requis à l’OCPM et a indiqué être parti de Suisse à la fin de l’année 2015, pour y revenir en septembre 2016. Cette absence du territoire helvétique s’expliquait par l’impossibilité de trouver un moyen de transport pour rentrer en Suisse, ainsi que par sa volonté de rester quelque temps au Kosovo afin de s’occuper de son épouse et de ses enfants.

12.         Le 15 juillet 2024, l’OCPM a fait part à M. A______ de son intention de ne pas donner une suite favorable à sa demande de régularisation, lui impartissant un délai de 30 jours pour faire valoir, par écrit, son droit d’être entendu.

13.         Le 8 août 2024, sous la plume de son conseil, M. A______ a sollicité une prolongation de délai de 30 jours, laquelle lui a été octroyée et le délai prolongé au 15 septembre 2024. Ce délai a été une nouvelle fois prolongé au 16 octobre 2024 à la demande de l'intéressé.

14.         Dans ses déterminations du 16 octobre 2024, M. A______ a fait valoir qu’il était arrivé en Suisse en 2010, mais que peu de documents subsistaient s'agissant de la période antérieure à 2017, notamment parce qu’il avait été employé au noir et que certains de ses employeurs ne voulaient pas attester de sa présence, craignant d’être condamnés par la justice. Il avait dû s’absenter de Suisse entre 2015 et 2016 en raison d’obligations familiales. Rappelant sa bonne collaboration, la durée de son séjour en Suisse et son excellente intégration, il a persisté dans sa requête d’octroi d’une autorisation de séjour au titre de l’« opération Papyrus » ou pour cas de rigueur, dès lors qu’il en remplissait toutes les conditions.

Il a joint diverses pièces, notamment des lettres de soutien de personnes qu’il a connues dès 2010, son contrat de bail, son contrat de travail, ses factures de téléphone et une attestation d’achat d’abonnements TPG.

15.         Par décision du 28 octobre 2024, l’OCPM a refusé de donner une suite favorable à la demande d’autorisation de séjour de M. A______ et, par conséquent, de soumettre son dossier avec préavis positif auprès du secrétariat d’État aux migrations (ci-après : SEM) et a, en conséquence, prononcé son renvoi de Suisse, lui impartissant un délai au 28 janvier 2025 pour quitter le territoire helvétique et le territoire des Etats membres de l’Union européenne et des Etats associés à Schengen, conformément à l’art. 64 al. 1 let. c LEI.

Sa situation ne répondait pas aux critères de l’« opération Papyrus », ni aux critères relatifs à un cas individuel d’extrême gravité, s’agissant, en particulier, de la condition du séjour prouvé et continu de dix ans minimum à Genève. À la lumière des documents fournis par M. A______, celui-ci semblait avoir séjourné sur le territoire suisse de manière saisonnière et non continue, tout du moins pour les années 2010 à 2016. Les lettres de soutien ou de recommandation fournies n’avaient pas de valeur probante dans le cadre de la justification d’un séjour continu.

Par ailleurs, le fait de ne faire l’objet d’aucune poursuite, de ne pas percevoir d’aide sociale et de s’efforcer d’apprendre le français constituait un comportement ordinaire pouvant être attendu de tout étranger désireux d’obtenir la régularisation de ses conditions de séjour et n’était pas constitutif de circonstances exceptionnelles permettant, à elles seules, de retenir l’existence d’une intégration particulièrement marquée susceptible de justifier la reconnaissance d’un cas de rigueur. Il n’avait par ailleurs pas acquis le niveau requis en langue française, soit A1 oral au minimum, selon le résultat du test FIDE du 10 septembre 2024.

Finalement, il n’avait pas démontré qu’une réintégration dans son pays d’origine, où vivaient sa femme et ses enfants, aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle, indépendamment des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires ou scolaires) affectant l’ensemble de la population restée sur place. Le fait que sa famille dépende financièrement de lui pour vivre au Kosovo n’était pas un élément suffisant pour estimer que son retour dans son pays d’origine ne serait pas raisonnablement exigible. Bien qu’en raison de son âge, ses possibilités de réinsertions professionnelles apparaissaient limitées, il avait acquis une solide expérience lors de son séjour sur le territoire suisse.

16.         Par acte du 29 novembre 2024, sous la plume de son conseil, M. A______ a interjeté recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) contre cette décision, concluant, principalement, sous suite de frais et dépens, à son annulation et à ce qu’il soit ordonné à l’OCPM de lui délivrer une autorisation de séjour, subsidiairement, à ce que la cause soit renvoyée à l’OCPM pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Préalablement, il a requis la confirmation de l’effet suspensif du recours, son audition et celles de Monsieur H______ et I______, ses cousins, domiciliés et travaillant à Genève et constituant pour lui un soutien infaillible.

L’OCPM avait procédé à une constatation inexacte des faits et à une appréciation arbitraire des preuves. L’autorité intimée n’avait pas tenu compte des faits qu’il avait dûment allégués et prouvés, notamment les déclarations écrites de l’un de ses anciens employeurs, ainsi que celles de deux anciens collègues attestant de sa présence continue depuis 2010. Elle n’avait pas davantage pris en considération les déclarations de M. F______, ancien employeur, confirmant sa présence entre 2013 et 2015. Si ces éléments avaient été examinés, elle aurait nécessairement conclu à une résidence ininterrompue en Suisse depuis 2010. Par ailleurs, l’OCPM n’avait pas examiné les déclarations relatives aux conséquences particulièrement graves qu’un renvoi entraînerait pour sa personne, ni pris position sur les photographies produites, illustrant la précarité extrême dans laquelle se trouvait sa famille restée au Kosovo. L’état de santé de sa sœur, handicapée, n’avait pas non plus été évoqué. Ces éléments constituaient pourtant de véritables motifs empêchant son renvoi.

La décision violait en outre son droit d’être entendu dans la mesure où l’autorité intimée n’avait pas motivé les raisons pour lesquelles elle avait écarté les déclarations produites ni expliqué pourquoi elle n’avait pas pris en compte les obstacles invoqués à son retour dans son pays d’origine.

À tort, l’OCPM, en ayant mal apprécié les pièces au dossier et celles produites, considérait que son séjour en Suisse avait été interrompu. En tout état, sous l’angle de l’« opération Papyrus », il convenait de retenir qu’il vivait à Genève depuis quatorze ans, à tout le moins huit ans au moment du dépôt de sa demande de régularisation, ne dépendait pas de l’aide sociale et n’avait pas de dettes. En appliquant de manière trop schématique une durée minimale de dix ans à son cas, l’autorité intimée avait violé le droit et les réquisits jurisprudentiels applicables en la matière. Il remplissait aussi les critères relatifs à un cas individuel d’extrême gravité, vu en particulier la durée de son séjour à Genève et sa parfaite intégration tant professionnelle et - sans métier et profession à son arrivée à Genève, il avait acquis d’excellentes connaissances lui ayant permis d’œuvrer en qualité de plâtrier-charpentier à la grande satisfaction de ses employeurs - que sociale, ayant un casier judiciaire vierge et une bonne maîtrise de la langue française. Un retour dans son pays natal constituerait une grave atteinte à ses intérêts, vu l’impossibilité d’y trouver un emploi et le fait qu’il avait à sa charge douze personnes, soit son épouse, leurs huit enfants, son père âgé de 81 ans et sa sœur handicapée. Une telle atteinte n’était par ailleurs justifiée par aucun intérêt prépondérant.

Enfin, il s’est prévalu du droit au respect de la vie privée et familiale, garanti par l’art. 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), exposant qu’il bénéficiait de la présomption d’enracinement. Il a noté que si sa sœur n’était plus traitée, sa famille et lui-même ne pourraient plus avoir une vie normale au Kosovo où les maladies psychiques étaient très stigmatisées.

17.         Dans ses observations du 5 février 2025, l’OCPM a conclu au rejet du recours. Il a transmis son dossier.

Le recourant n’avait pas été en mesure de prouver une durée de séjour continue suffisante sur le territoire suisse. Il ne pouvait se prévaloir d’une intégration professionnelle exceptionnelle ni d’une ascension professionnelle ou l’acquisition de qualifications qu’il ne pourrait mettre en pratique dans son pays d’origine. Sa réintégration dans son pays d’origine, où il était né, avait passé une grande partie de sa vie d’adulte et fondé une famille, n’était dès lors pas fortement compromise.

Pour le surplus, il se référait à la décision querellée.

18.         Le 4 mars 2025, le recourant a informé le tribunal qu’il renonçait à répliquer.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l’office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d’étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d’application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

Il y a en particulier abus du pouvoir d’appréciation lorsque l’autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu’elle viole des principes généraux du droit tels que l’interdiction de l’arbitraire, l’égalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_712/2020 du 21 juillet 2021 consid. 4.3 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

4.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office et que s’il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, il n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (ATA/53/2025 du 14 janvier 2025 consid. 4).

5.             Les griefs et arguments formulés par les parties ainsi que les éléments résultant des pièces figurant au dossier seront repris et discutés, en tant que besoin, dans la partie « en droit » ci-dessous (ATF 147 IV 249 consid. 2.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_300/ 2024 du 13 janvier 2025 consid. 3.2 ; 1C_622/2023 du 6 janvier 2025 consid. 2.1).

6.             À titre préalable, le recourant requiert son audition, ainsi que celles de deux témoins, à savoir ses cousins.

7.             Tel que garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d’être entendu comprend notamment le droit pour l’intéressé d’offrir des preuves pertinentes, de prendre connaissance du dossier, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou à tout le moins de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre. Toutefois, le juge peut renoncer à l’administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l’authenticité n’est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsqu’il parvient à la conclusion qu’elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu’elles ne pourraient l’amener à modifier son opinion (ATF 148 II 73 consid. 7.3.1 ; 145 I 167 consid. 4.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_576/2021 du 1er avril 2021 consid. 3.1 ; 2C_946/2020 du 18 février 2021 consid. 3.1 ; 1C_355/2019 du 29 janvier 2020 consid. 3.1).

Ce droit ne confère par ailleurs pas le droit d’être entendu oralement, ni celui d’obtenir l’audition de témoins (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_483/2023 du 13 août 2024 consid. 2.1 ; cf. aussi art. 41 in fine LPA)

8.             En l’espèce, le recourant a eu l’occasion de s’exprimer à plusieurs reprises, par écrit, durant la présente procédure, exposant ainsi son point de vue, et de produire toutes les pièces qu’il estimait utiles à l’appui de ses allégués. L’OCPM a aussi répondu à son recours, se prononçant sur les griefs qu’il estimait pertinents pour l’issue du litige et il s’est vu octroyer la possibilité de répliquer, ce qu’il a d’ailleurs refusé. Dans ces circonstances, le tribunal estime que sa comparution personnelle n’est pas nécessaire. De même, l’audition des témoins cités n’apparait pas utile ni surtout à même de modifier l’issue du litige, leur attestation écrite ayant par ailleurs été produite. Enfin, et en tout état, force est de constater que le tribunal dispose d’un dossier complet et des éléments utiles lui permettant de se forger une opinion et de statuer en connaissance de cause sur le recours.

Il ne sera donc pas donné suite aux demandes d’audition sollicitées, ces actes d’instruction n’étant au demeurant pas obligatoires.

9.             Le 1er janvier 2019, une révision de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr - RO 2007 5437), intitulée depuis lors LEI, est entrée en vigueur.

Selon l’art. 126 al. 1 LEI, les demandes déposées avant l’entrée en vigueur de la présente loi sont régies par l’ancien droit (cf. not. arrêts du Tribunal fédéral 2C_94/ 2020 du 4 juin 2020 consid. 3.1 ; 2C_1075/2019 du 21 avril 2020 consid. 1 ; ATA/1331/2020 du 22 décembre 2020 consid. 3a).

10.         En l’occurrence, le recourant a déposé sa requête le 20 septembre 2018. La loi dans sa teneur antérieure au 1er janvier 2019 reste donc applicable au présent litige.

11.         La LEI et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (cf. art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Kosovo.

Selon l’art. 30 al. 1 let. b LEI, dont la teneur n’a pas changé le 1er janvier 2019, il est possible de déroger aux conditions d’admission d’un étranger en Suisse pour tenir compte d’un cas individuel d’extrême gravité.

L’art. 31 al. 1 OASA, dans sa teneur avant le 1er janvier 2019 - étant précisé que le nouveau droit n’est pas plus favorable et que la jurisprudence développée sous l’ancien droit reste applicable (ATA/344/2021 du 23 mars 2021 consid. 7a) -, prévoit que pour apprécier l’existence d’un cas individuel d’extrême gravité, il convient de tenir compte notamment de l’intégration du requérant (let. a), du respect de l’ordre juridique suisse (let. b), de sa situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de sa situation financière ainsi que de sa volonté de prendre part à la vie économique et d’acquérir une formation (let. d), de la durée de sa présence en Suisse (let. e), de son état de santé (let. f) ainsi que des possibilités de réintégration dans l’État de provenance (let. g).

Ces critères, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3986/2015 du 22 mai 2017 consid. 9.3), d’autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (ATA/545/2022 du 24 mai 2022 consid. 3e).

12.         Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance de la situation qu’ils visent doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l’obtention d’une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; ATA/122/2023 du 7 février 2023 consid. 4b ; cf. aussi arrêt du Tribunal fédéral 2C_602/2019 du 25 juin 2019 consid. 3.3).

13.         Lors de l’appréciation d’un cas de rigueur, il y a lieu de tenir compte de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce, étant relevé que l’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d’origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu’on ne saurait exiger d’eux qu’ils tentent de se réadapter à leur existence passée. On ne saurait tenir compte des circonstances générales (économiques, sociales, sanitaires) affectant l’ensemble de la population restée sur place, auxquelles les personnes concernées pourraient être également exposées à leur retour, sauf si celles-ci allèguent d’importantes difficultés concrètes propres à leur cas particulier (arrêts du Tribunal administratif fédéral F-5341/2020 du 7 février 2022 consid. 6.7 ; F-6616/2017 du 26 novembre 2019 consid. 6.5 et les références citées). En particulier, les éventuels inconvénients liés à la recherche d’un logement ou d’un emploi sont des aspects qui touchent la majeure partie des étrangers qui retournent dans leur pays après une absence prolongée à l’étranger (arrêt du Tribunal fédéral 2C_491/2024 du 4 novembre 2024 consid. 5.2.3).

La question n’est donc pas de savoir s’il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d’examiner si, en cas de retour dans le pays d’origine, les conditions de sa réintégration sociale, au regard de sa situation personnelle, professionnelle et familiale, seraient gravement compromises (ATA/ 122/2023 du 7 février 2023 consid. 4d et les références citées).

14.         La reconnaissance de l’existence d’un cas d’extrême gravité implique que l’étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’un cas d’extrême gravité, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remar-quable, l’intéressé possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’il ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse, la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4206/2021 du 24 novembre 2022 consid. 5.4).

15.         S’agissant de la condition de la durée totale du séjour, elle constitue un critère important de reconnaissance d’un cas de rigueur. Il importe cependant de rappeler que selon la jurisprudence applicable en la matière, le simple fait pour un étranger de séjourner en Suisse pendant de longues années ne permet pas d’admettre un cas personnel d’une extrême gravité. Il s’agit d’un critère nécessaire, mais pas suffisant, à lui seul (ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 7e). En outre, la durée d’un séjour illégal, ainsi qu’un séjour précaire ne doivent normalement pas être pris en considération ou alors seulement dans une mesure très restreinte, sous peine de récompenser l’obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-4206/2021 du 24 novembre 2022 consid. 9.1 et les références citées ; ATA/122/2023 du 7 février 2023 consid. 4f). Par durée assez longue, on entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-7330/2010 du 19 mars 2012 ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017).

Ainsi, le simple fait, pour un étranger, de séjourner en Suisse pendant de longues années, y compris à titre légal, ne permet pas d’admettre un cas personnel d’extrême gravité sans que n’existent d’autres circonstances tout à fait exceptionnelles (ATF 124 II 110 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.540/2005 du 11 novembre 2005 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral E-643/2016 du 24 juillet 2017 consid. 5.1).

16.         En ce qui concerne la condition de l’intégration au milieu socioculturel suisse, la jurisprudence considère que, d’une manière générale, lorsqu’une personne a passé toute son enfance, son adolescence et le début de sa vie d’adulte dans son pays d’origine, il y reste encore attaché dans une large mesure. Son intégration n’est alors pas si profonde et irréversible qu’un retour dans sa patrie constituerait un déracinement complet. Il convient de tenir compte de l’âge du recourant lors de son arrivée en Suisse, et au moment où se pose la question du retour, des efforts consentis, de la durée, de la situation professionnelle, ainsi que de la possibilité de poursuivre ou d’exploiter ses connaissances professionnelles dans le pays d’origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-646/2015 du 20 décembre 2016 consid. 5.3).

Il est parfaitement normal qu’une personne, ayant effectué un séjour prolongé dans un pays tiers, s’y soit créé des attaches, se soit familiarisée avec le mode de vie de ce pays et maîtrise au moins l’une des langues nationales. Aussi, les relations d’amitié ou de voisinage, de même que les relations de travail que l’étranger a nouées durant son séjour sur le territoire helvétique, si elles sont certes prises en considération, ne sauraient constituer des éléments déterminants pour la reconnaissance d’une situation d’extrême gravité (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.3 ; F-1714/2016 du 24 février 2017 consid. 5.3).

L’intégration socio-culturelle n’est donc en principe pas susceptible de justifier à elle seule l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Néanmoins, cet aspect peut revêtir une importance dans la pesée générale des intérêts (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-541/2015 du 5 octobre 2015 consid. 7.3 et 7.6 ; C-384/2013 du 15 juillet 2015 consid. 6.2 et 7), les lettres de soutien, la participation à des associations locales ou l’engagement bénévole pouvant représenter des éléments en faveur d’une intégration réussie, voire remarquable (arrêts du Tribunal administratif fédéral C-74672014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/ 2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine).

17.         L’ « opération Papyrus » est un processus de régularisation des personnes séjournant à Genève sans titre de séjour, lancé publiquement en février 2017, pour une période de deux ans, par les autorités exécutives cantonales genevoises « dans le strict respect du cadre légal en vigueur (art. 30 al.1 let. b LEI et 31 OASA) » (cf. communiqué de presse du 21 février 2017 accessible sur Internet à l’adresse suivante : https://www.ge.ch/actualite/operation-« Papyrus »-presentee-aux-medias-21 -02-2017).

Elle a pris fin le 31 décembre 2018 (« Point de situation intermédiaire relatif à la clôture du projet « Papyrus » » publié par le Conseil d’État en date du 4 mars 2019, cf. https://www.ge.ch/dossier/operation-« Papyrus »).

Les critères objectifs et cumulatifs permettant aux personnes concernées de demander la légalisation de leur séjour selon ce programme étaient les suivants : une intégration réussie (niveau A2 de français du cadre européen commun de référence pour les langues et scolarisation des enfants notamment) ; une absence de condamnation pénale ; une indépendance financière complète ; un séjour continu de cinq ans (pour les familles avec enfants scolarisés) ou de dix ans pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires.

S’agissant des justificatifs de séjour à Genève, un document par année de séjour était exigé pour les preuves de catégories A (à savoir, extraits AVS, attestations de l’administration fiscale, de scolarité ou de suivi d’un cours de langue à Genève, fiches de salaire, contrats de travail ou de bail, polices d’assurance, abonnements TPG nominatifs, extraits de compte bancaires ou postaux, factures nominatives de médecin, de téléphone ou des SIG). Pour les preuves de catégories B (à savoir, abonnements de fitness, témoignages « engageants » notamment d’enseignants, d’anciens employeurs ou de médecins ou des documents attestant de différentes démarches) trois à cinq documents par année de séjour étaient exigés.

18.         La durée prise en considération doit correspondre à un séjour continu. Si une ou deux courtes interruptions annuelles, correspondant par exemple à la durée usuelle de quatre semaines de vacances, sont admissibles, la continuité du séjour en Suisse n’est par contre pas compatible avec des absences répétées ou des allers-retours avec le pays d’origine, notamment lorsqu’aucun emploi ne peut être trouvé en Suisse, ou encore avec des séjours répétés dans d’autres pays pour des motifs familiaux ou professionnels. Dans ces cas, en effet, même lorsque la personne vit la majeure partie du temps en Suisse, cela dénote un mode de vie fondé sur des déplacements selon les opportunités et, quand bien même elle parvient à établir un réseau social en Suisse, on ne peut considérer qu’elle y a vraiment installé son centre de vie et que son départ au bout de plusieurs années constituerait pour elle un véritable déracinement (JTAPI/984/2021 du 27 septembre 2021 consid. 18, confirmé par ATA/191/2022 du 22 février 2022).

19.         Ces conditions devaient être remplies au moment du dépôt de la demande d’autorisation de séjour (cf. ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 8b). Le Tribunal administratif fédéral a précisé, en s’écartant sur ce point de la jurisprudence de la chambre administrative de la Cour de justice, qu’il se justifiait de restreindre l’application de l’opération « Papyrus » aux personnes étrangères qui en remplissaient la condition temporelle au moment où ce programme était encore en cours (arrêt F-4206/2021 du 24 novembre 2022 consid. 6.3).

Enfin, il convient de préciser que les critères appliqués dans le cadre de l’opération « Papyrus » étaient les critères prévus dans les dispositions légales en matière de régularisation des cas de rigueur (cf. ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 10b).

20.         Celui qui place l’autorité devant le fait accompli doit s’attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d’éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (ATF 123 II 248 consid. 4a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_33/2014 du 18 septembre 2014 consid. 4.1 et les références citées ; ATA/543/2022 du 24 mai 2022 consid. 4c).

21.         Dans le cadre de l’exercice de leur pouvoir d’appréciation, les autorités doivent tenir compte des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son degré d’intégration (art. 96 al. 1 LEI).

Lorsque les conditions légales pour se prévaloir d’un droit à l’autorisation de séjour ne sont pas remplies, les autorités ne jouissent pas d’un pouvoir d’appréciation dans le cadre duquel il y aurait lieu de procéder, conformément à cette disposition, à un examen de la proportionnalité. Admettre l’inverse aurait pour effet de déduire de l’art. 96 LEI un droit à l’obtention ou au renouvellement de l’autorisation, ce qui ne correspond pas à la lettre de cette disposition, qui prévoit uniquement que les autorités compétentes tiennent compte, en exerçant leur pouvoir d’appréciation, des intérêts publics, de la situation personnelle de l’étranger, ainsi que de son intégration (arrêt du Tribunal fédéral 2C_30/2020 du 14 janvier 2020 consid. 3.2).

22.         En l’espèce, après un examen circonstancié du dossier et des pièces versées à la procédure, le tribunal retiendra que l’autorité intimée n’a pas mésusé de son pouvoir d’appréciation en considérant que le recourant ne satisfaisait pas aux conditions strictes requises pour la reconnaissance d’un cas de rigueur, y compris sous l’angle particulier de l’« opération Papyrus », étant rappelé que le seul fait de séjourner en Suisse pendant plusieurs années n’est à cet égard pas suffisant, sans que n’existent d’autres circonstances tout à fait exceptionnelles, lesquelles font ici défaut.

La demande de régularisation et d’autorisation de séjour pour cas de rigueur ayant été déposée le 20 septembre 2018, c’est à juste titre que l’OCPM l’a examinée sous l’angle des critères de l’« opération Papyrus ». Afin de bénéficier de ce programme, le recourant devait notamment pouvoir démontrer, au jour du dépôt de sa requête, un séjour continu d’une durée de dix ans et un niveau A2 de français. Or, même dans l’hypothèse la plus favorable au recourant d’une arrivée en Suisse en 2010, celui-ci n’y séjournait que depuis huit ans au moment du dépôt de sa demande, et cela sans tenir compte de la longue interruption de séjour en 2015 et 2016, admise. De plus, il ne maîtrisait pas suffisamment le français, n’ayant pas atteint le niveau A2 ; le tribunal en veut pour preuve que, selon le résultat du test FIDE du 10 septembre 2024, soit plusieurs années plus tard, qui aurait dû lui permettre d’améliorer ses connaissances linguistiques, le recourant n’avait toujours pas acquis le niveau A1. Partant, force est de constater que la condition de dix ans de séjour continu en Suisse et celle d’une intégration réussie n’étaient pas remplies au jour du dépôt de sa demande de régularisation. Pour ce motif, le recourant ne peut pas obtenir une autorisation de séjour sur la base des critères cumulatifs - stricts et sans dérogation possible - retenus dans le cadre de l’« opération Papyrus ».

Sous l’angle des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA, la question de savoir si le recourant a séjourné de manière continue ou saisonnière en Suisse depuis son arrivée peut demeurer ouverte. En effet, il résulte des dires du recourant que celui-ci a interrompu son séjour pendant une année, de 2015 jusqu’à fin 2016 (et non septembre 2016, étant à ce sujet noté qu’en présence de déclarations contradictoires, la préférence doit en principe être accordée à celles que l’intéressé a données en premier lieu, alors qu’il en ignorait les conséquences juridiques, les explications nouvelles pouvant être, consciemment ou non, le produit de réflexions ultérieures (ATA/462/2025 du 29 avril 2025 consid. 2.3 et les références citées). Il doit également être relevé que le recourant n’a jamais bénéficié d’un quelconque titre de séjour et que depuis le dépôt de sa demande de régularisation, le 20 septembre 2018, son séjour se poursuit au bénéfice d’une simple tolérance. Il ne peut dès lors tirer parti de la seule durée de son séjour en Suisse, qui doit en outre être fortement relativisée, pour bénéficier d’une dérogation aux conditions d’admission. Il doit de plus être relevé qu’arrivé en Suisse à l’âge de 36 ans, le recourant a vécu la majeure partie de son existence dans son pays d’origine, notamment son enfance, son adolescence, périodes essentielles pour la formation de la personnalité, et une partie non négligeable de sa vie d’adulte. Il a par ailleurs manifestement gardé des attaches avec sa patrie, dont il connait parfaitement les us et coutumes, puisqu’y vit sa famille proche, notamment son épouse, ses huit enfants, son père et sa sœur.

Compte tenu de ce qui précède, il n’est pas nécessaire de détailler la question de l’intégration socio-professionnelle du recourant. Le tribunal se contentera d’insister sur le fait, qu’au sens de la jurisprudence rappelée plus haut, seule une intégration exceptionnelle, et non pas le simple fait d’avoir déployé une activité lucrative sans dépendre de l’aide sociale ni accumuler de dettes, peut permettre, dans certains cas, d’admettre un cas individuel d’extrême gravité malgré que la personne concernée ne séjourne pas en Suisse de manière continue depuis une longue durée. Dans le cas du recourant, quand bien même son intégration serait qualifiée de moyenne sous l’angle professionnel, elle demeure tout au plus ordinaire dans la mesure où il ne maîtrise pas suffisamment le français et ne correspond à l’évidence pas au caractère exceptionnel rappelé plus haut.

Bien que l’on puisse imaginer que la réintégration du recourant dans son pays d’origine ne sera pas simple, cette circonstance n’apparaît pas, à teneur du recours, liée à des circonstances personnelles, mais bien davantage aux conditions socio-économiques prévalant au Kosovo. Le recourant a de plus toujours des attaches au Kosovo, puisqu’y vivent notamment sa femme et ses huit enfants, son père et sa sœur. Partant, il n’apparaît pas que sa réintégration dans son pays d’origine soit fortement compromise ni qu’un départ de Suisse constituerait un déracinement. S’il se heurtera sans doute à quelques difficultés de réadaptation, il ne démontre pas que celles-ci seraient plus graves pour lui que pour n’importe lequel de ses concitoyens qui se trouverait dans une situation similaire, étant rappelé que l’art. 30 al. 1 let. b LEI n’a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d’origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu’on ne saurait exiger d’eux qu’ils tentent de se réadapter à leur existence passée, ce que le recourant n’a pas établi. Il faut aussi souligner que l’examen d’un cas de rigueur concerne l’étranger en cause et non un tiers, de sorte que la situation de la sœur du recourant n’a pas à être prise en compte dans ce cadre. Enfin, il faut rappeler que celui qui place l’autorité devant le fait accompli doit s’attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d’éviter les inconvénients qui en découlent pour lui. Ainsi, au vu de son statut précaire en Suisse, le recourant ne pouvait à aucun moment ignorer qu’il risquait d’être renvoyé dans son pays d’origine.

Au vu de ce qui précède, l’OCPM n’a pas violé la LEI ni excédé ou abusé de son pouvoir d’appréciation en rejetant la demande de régularisation des conditions de séjour du recourant. Dans ces conditions, le tribunal, qui doit respecter la latitude de jugement conférée à l’OCPM, ne saurait en corriger le résultat en fonction d’une autre conception, sauf à statuer en opportunité, ce que la loi lui interdit de faire (art. 61 al. 2 LPA).

23.         Le recourant se prévaut de l’art. 8 CEDH, sous l’angle de sa vie privée.

24.         Sous l’angle étroit de la protection de la vie privée, l’art. 8 CEDH ouvre le droit à une autorisation de séjour, mais à des conditions restrictives, l’étranger devant établir l’existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d’une intégration ordinaire (arrêt du Tribunal fédéral 6B_255/2020 du 6 mai 2020 consid. 1.2.2).

Selon la jurisprudence, lorsqu’une personne étrangère réside légalement en Suisse depuis plus de dix ans, il y a lieu de présumer que les liens sociaux développés avec notre pays sont à ce point étroits qu’un refus de renouveler l’autorisation de séjour ou la révocation de celle-ci ne peuvent être prononcés que pour des motifs sérieux (ATF 149 I 207 consid. 5.3.2 ; 144 I 206 consid. 3.9).

Ce « séjour légal » n’inclut pas les années de clandestinité dans le pays. Il convient du reste de ne pas encourager les personnes étrangères à vivre dans notre pays sans titre de séjour et de ne pas valider indirectement des comportements tendant à mettre l’Etat devant le fait accompli (ATF 149 I 207 consid. 5.6). Ainsi, la présomption qu’il existe un droit de demeurer en Suisse après un séjour légal de dix ans ne s’applique pas dans le cas d’une première demande d’autorisation après un séjour illégal (ATF 149 I 207 consid. 5.3.3 ; 149 I 72 consid. 2.1.3). Cela étant, une personne ayant résidé en Suisse sans autorisation de séjour peut, à titre exceptionnel, se prévaloir d’un droit au respect de la vie privée découlant de l’art. 8 CEDH pour demeurer en Suisse, à condition qu’elle fasse état de manière défendable d’une intégration hors du commun (ATF 149 I 207 consid. 5.3.1 et 5.3.4 ; arrêt 2C_604/2023 du 9 janvier 2024 consid. 1.3.1).

25.         Sous l’angle de l’art. 8 CEDH, lorsque l’étranger réside légalement depuis plus de dix ans en Suisse, il y a lieu de partir de l’idée que les liens sociaux qu’il y a développés sont suffisamment étroits pour qu’il bénéficie d’un droit au respect de sa vie privée ; lorsque la durée de la résidence est inférieure à dix ans, mais que l’étranger fait preuve d’une forte intégration en Suisse, le refus de prolonger ou la révocation de l’autorisation de rester en Suisse peut également porter atteinte au droit au respect de la vie privée (ATF 144 I 266). Les années passées en Suisse dans l’illégalité ou au bénéfice d’une simple tolérance - par exemple en raison de l’effet suspensif attaché à des procédures de recours - ne sont en revanche pas déterminantes (ATF 137 II 1 consid. 4.3).

26.         En l’espèce, le recourant n’ayant jamais résidé légalement en Suisse, il ne peut pas se prévaloir de la présomption découlant de l’ATF 144 I 266.

Pour qu’un droit de séjour issu de l’art. 8 CEDH puisse entrer en considération, il faut que le recourant allègue de manière défendable une intégration hors du commun. Or, ainsi que vu ci-dessus, tel n’est pas le cas.

Dans ces circonstances, il ne peut être mis au bénéfice d’une autorisation de séjour en vertu de l’art. 8 CEDH.

27.         Selon l’art. 64 al. 1 let. c LEI, l’autorité compétente rend une décision de renvoi ordinaire à l’encontre d’un étranger auquel l’autorisation de séjour est refusée ou dont l’autorisation n’est pas prolongée.

Elles ne disposent à ce titre d’aucun pouvoir d’appréciation, le renvoi constituant la conséquence logique et inéluctable du rejet d’une demande d’autorisation (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-4183/2011 du 16 janvier 2012 consid. 3.1 ; ATA/ 122/2023 du 7 février 2023 consid. 8a).

28.         Dès lors qu’il a refusé de soumettre le dossier du recourant au SEM en vue de la délivrance d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur et de lui octroyer une autorisation de séjour à un autre titre, l’OCPM devait ordonner son renvoi de Suisse en application de l’art. 64 al. 1 let. c LEI, ne disposant, dans ce cadre, d’aucun pouvoir d’appréciation.

29.         Infondé, le recours sera rejeté et la décision contestée confirmée.

30.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s’élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

31.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 29 novembre 2024 par Monsieur A______ contre la décision de l’office cantonal de la population et des migrations du 28 octobre 2024 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l’avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l’objet d’un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L’acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d’irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Laetitia MEIER DROZ

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d’État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière