Décisions | Tribunal administratif de première instance
JTAPI/372/2025 du 08.04.2025 ( LCR ) , REJETE
ATTAQUE
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
POUVOIR JUDICIAIRE
JUGEMENT DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PREMIÈRE INSTANCE du 8 avril 2025
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dans la cause
Monsieur A______, représenté par Me Fanny ROULET, avocate, avec élection de domicile
contre
OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES
1. Monsieur A______, né le ______ 1976, est titulaire du permis de conduire notamment pour véhicule de la catégorie B, obtenu le 26 janvier 1995.
2. Il ressort du rapport de saisie établi par la police le 30 mai 2024 que le même jour, à 17h48, M. A______ a été interpellé alors qu'il circulait au volant de sa voiture sur la route de l'Usine-à-Gaz à Aïre, en état d'ébriété qualifié, soit avec une concentration d'alcool de 0.49 mg/l à l'éthylomètre [éthylotest].
3. Le même jour également, la police a notifié à M. A______ la saisie provisoire de son permis de conduire avec effet immédiat.
4. Il ressort du rapport de police du 12 août 2024, qu'une intervention a été demandée le 30 mai 2024 à 17h48 afin de suppléer leurs collègues de la police judiciaire, témoin d'un conflit entre deux usagers de la route.
Les images des caméra CVP avaient été saisies et il en ressortait que, au volant de sa voiture, M. A______ avait barré la route à un motocycliste à trois reprises, qu'un conflit était en cours, que M. A______ avait accéléré excessivement et circulé à une vitesse inadaptée aux conditions de la route.
M. A______ était accompagné d'une passagère.
Entendu le même jour par la police, M. A______ a déclaré avoir consommé de l'alcool. Il avait pris part à un repas d'affaire qui avait débuté à 12h30 et s'était terminé à 16h00, lors duquel, 4 bouteilles de vins avaient été consommées et sa dernière consommation avait eu lieu vers 15h30. Avec le motocycliste, ils s'étaient invectivés à plusieurs reprises et avaient également échangé des injures. Il avait entendu un bruit dans son pare-chocs et compris que le motocycliste avait donné un coup dans son véhicule. Il s'était alors énervé et avait suivi le deux-roues, l'avait serré sur la gauche et avait tenté de lui saisir le bras, reconnaissant que cette action aurait pu causer un grave accident. En circulant derrière le motard, il n'avait pas respecté les distances de sécurité.
5. Le 7 juin 2024, l'Office cantonal des véhicule (ci-après: l'OCV ou l'autorité) a restitué à M. A______ son permis de conduire, dont il était en droit de faire usage dès le 9 juin 2024.
6. Par décision du 2 octobre 2024, l'OCV a ordonné qu'une expertise visant à évaluer l'aptitude caractérielle de M. A______ à la conduite soit réalisée par un psychologue du trafic. A défaut de donner suite aux requêtes et convocations des experts, le permis de conduire serait retiré pour une durée indéterminée. Une décision serait prise lorsque les questions relatives à son aptitude auraient été élucidées ou en cas de non soumission à l'examen imposé, dans un délai de trois mois et/ou à réception de l'issue pénale. Les frais d'expertise étaient mis à sa charge.
L'examen de son dossier incitait l'autorité à concevoir des doutes quant à son aptitude caractérielle à la conduite des véhicules à moteur.
Le 30 mai 2024 à 17h48, alors que M. A______ circulait dans un état d'ébriété qualifié, soit avec une concentration d'alcool dans l'air expiré de 0,49 mg/l à l'éthylomètre, depuis la route de l'Usine-à-Gaz, à Dardagny, en direction du Pont-Butin, au volant d'une voiture, un conflit routier avait éclaté avec un motocycliste.
Il ressortait des images qui avaient enregistré une partie des faits, que lors de sa course, M. A______ avait circulé sur deux voies de circulation, avant de suivre volontairement le motocycliste, auquel il avait barré la route à trois reprises, tout en circulant à une vitesse inadaptée aux conditions. Il avait également tenté de lui saisir le bras.
Ensuite, il avait circulé sur une piste cyclable afin de dépasser le motocycliste par la droite en effectuant des freinages intempestifs après l'avoir dépassé.
M. A______ avait volontairement forcé le motocycliste contre une séparation des voies en béton avant que la course ne soit interrompue par la police.
En agissant de la sorte, il avait mis en danger non seulement le motocycliste, mais également les autres usagers de la route.
M. A______ ne faisait pas l'objet d'antécédent.
7. Par acte du 15 octobre 2024, M. A______, sous la plume de son conseil, a formé recours auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après: le tribunal) contre cette décision, concluant principalement à son annulation, subsidiairement, au renvoi de la cause à l'OCV pour nouvelle décision, sous suite de frais et dépens. Préalablement, il a demandé le constat de l'effet suspensif du recours.
La décision lui avait été notifiée directement et par courrier A+ alors qu'il avait fait élection de domicile en l'étude de son conseil.
Il n'avait pas eu connaissance de la vidéo présente au dossier et sur la base de laquelle l'OCV avait pris sa décision.
L'OCV avait pris sa décision exclusivement sur la base de celle-ci, à l'exclusion des pièces, quand bien même seule la toute fin du conflit avait été filmée. Ainsi, de nombreux éléments figurant au dossier avaient été ignorés.
La décision ne tenait notamment pas compte des déclarations des parties, soit notamment du fait que le motocycliste était à l'origine de son énervement. Elle ne tenait pas plus compte de l'absence d'antécédent, malgré une utilisation quotidienne de son véhicule depuis 1995, qui démontrait pourtant qu'il n'était ni dans ses habitudes ni dans son caractère de s'énerver.
Dans un cas similaire, le Tribunal fédéral avait conclu qu'une expertise n'était pas justifiée lorsque le recourant bénéficiait d'un passé irréprochable en matière de circulation routière et que les faits retenus découlaient d'une décision pénale non encore entrée en force.
Enfin, le recourant doutait du caractère urgent de la décision prise, dès lors que l'OCV avait attendu quatre mois pour la rendre et aurait ainsi pu attendre l'issue de la procédure pénale.
D'ailleurs, les faits reprochés étant contestés, le recourant avait sollicité la suspension de la procédure administrative jusqu'à droit jugé au pénal.
Injustifiée, la décision devait être annulée.
8. Par ordonnance de non-entrée en matière partielle du 9 décembre 2024, le Ministère public a décidé de ne pas entrer en matière sur les faits se rapportant à l'infraction de mise en danger de la vie d'autrui.
9. Par ordonnance pénale du 12 décembre 2024, M. A______ a été condamné par le Ministère public à une peine de 30 jours-amende, à CHF 160.- le jour, avec sursis, et à une amende de CHF 960.- à titre de sanction immédiate, pour conduite en état d'ébriété avec un taux d'alcool qualifié, à une amende de CHF 1'200.- pour violation simple des règles de la circulation routière (art. 90 al. 1 LCR).
10. Dans ses observations du 12 décembre 2024, l'OCV a conclu au rejet du recours, sous suite de frais et dépens.
Il ressortait du rapport d'information de la police du 12 septembre 2024 que dans le cadre d'un conflit routier, M. A______ avait suivi un motocycliste, lui avait obstrué la route à trois reprises, avait également circulé à une vitesse inadaptée aux conditions de la route alors qu'il était accompagné d'une passagère et emprunté brièvement la piste cyclable, contraignant un autre automobiliste à freiner, créant ainsi une mise en danger des autres usagers de la route. Soumis à un contrôle d'alcoolémie, le résultat de l'éthylomètre avait révélé un taux de 0,49mg/l.
En agissant de la sorte, M. A______ avait accepté de causer des lésions corporelles graves et de mettre en danger les autres usagers de la route.
Pour ces raisons, l'autorité émettait des doutes sur l'aptitude caractérielle de
M. A______ à la conduite de véhicules à moteurs auxquels seule une expertise établie par un psychologue du trafic pouvait répondre.
11. Dans sa réplique du 23 janvier 2025, le recourant a persisté dans ses conclusions et produit une copie de l'ordonnance de non entrée en matière partielle du 9 décembre 2024 ainsi que de l'ordonnance pénale du 12 décembre 2024.
Il ne ressortait pas de la vidéo qu'il avait attrapé le motocycliste par le bras, ni que ce dernier ou les autres usagers de la route auraient été mis en danger.
Dans son ordonnance de non-entrée en matière partielle, le Ministère public avait d'ailleurs conclut que la tentative de saisie de bras n'était pas observable sur les images et qu'il n'était pas établi que le motocycliste s'était trouvé en danger de mort imminente au moment des faits.
Ainsi, selon le Ministère public, les éléments retenus par l'OCV pour considérer qu'il avait mis en danger les autres usages de la route et ordonner une expertise, soit les prétendues vitesses excessive et proximité des véhicules, ne sont pas des éléments de faits pouvant être considérés comme établis.
La mesure prononcée était ainsi invasive et non justifiée, dès lors qu'il n'avait pas mis gravement en danger les autres usagers de la route et qu'il ne roulait pas à une vitesse largement excessive.
12. Par courriel du 6 février 2025, le Ministère public a confirmé à l'OCV que l'ordonnance pénale rendue le 12 décembre 2024 avait l'objet d'une opposition si bien qu'une instruction était en cours.
13. Dans sa duplique du 11 février 2025, l'OCV a conclu au rejet du recours, sous suite de frais et dépens et transmis au tribunal la réponse du Ministère public du 6 février 2025.
Bien que les images étaient suffisantes pour établir le déroulement des faits, il avait tenu compte des circonstances du cas d'espèce, et notamment d'une inégalité manifeste de rapport de force entre le véhicule de M. A______ et celui du motocycliste.
14. Par courrier du 13 février 2025, le tribunal a invité les parties à se déterminer sur une suspension de l'instruction de la procédure jusqu'à droit jugé dans la procédure pénale.
15. Le 21 février 2025, M. A______ a indiqué qu'il ne sollicitait pas la suspension de l'instruction.
Il n'avait jamais contesté la question de l'ébriété et l'ordonnance pénale portait uniquement sur des violations simples des règles de la circulation routière. Celles-ci étaient sans influence sur la procédure administrative. En effet, elles ne permettaient pas de remettre en doute son aptitude à la conduite, ce que la procédure pénale avait par ailleurs déjà exclu.
16. Par courrier du 20 février 2025, l'OCV a indiqué qu'il ne s'opposait pas à la suspension.
1. Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'OCV (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 17 de la loi d'application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 - LaLCR - H 1 05).
Interjeté en temps utile, c’est-à-dire dans le délai de dix jours, s’agissant d’une décision incidente (art. 4 al. 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10), car prise pendant le cours de la procédure et ne représentant qu’une étape vers la décision finale (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1 ; cf. aussi ATA/765/2021 du 15 juillet 2021 consid. 1 et l'arrêt cité ; Cédric MIZEL, La preuve de l'aptitude à la conduite et les motifs autorisant une expertise, Circulation routière 3/2019, p. 35 ; cf. encore, par analogie, ATF 122 II 359 consid. 1b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_212/2021 du 16 juin 2021 consid. 1.1 ; 1C_154/2018 du 4 juillet 2018 consid. 1.1 et 1C_514/2016 du 16 janvier 2017 consid. 1.1, portant sur le retrait à titre préventif du permis de conduire), et devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ces points de vue (art. 115 et 116 LOJ ; art. 17 LaLCR ; art. 17 al. 1, 3 et 4, 57 let. c, 62 al. 1 let. b, 62 al. 3 1ère phr. et 63 al. 1 let. c LPA).
Selon l’art. 66 al. 1 LPA, le recours a effet suspensif à moins que l'autorité qui a pris la décision attaquée n'ait ordonné l'exécution nonobstant recours. Le tribunal peut restituer l'effet suspensif à la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, lorsqu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose (art. 66 al. 3 LPA).
En l'espèce, la décision querellée indique précisément qu'un éventuel recours a effet suspensif.
2. À teneur de l'art. 57 let. c LPA, les décisions incidentes sont susceptibles de recours si elles peuvent causer un préjudice irréparable ou si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.
Lorsqu’il n’est pas évident que le recourant soit exposé à un préjudice irréparable, il lui incombe d’expliquer dans son recours en quoi il serait exposé à un tel préjudice et de démontrer ainsi que les conditions de recevabilité de son recours sont réunies (ATF 136 IV 92 consid. 4 ; 133 II 353 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1 ; ATA/765/2021 du 15 juillet 2021 consid. 2).
Selon la jurisprudence, une décision est susceptible de causer un préjudice irréparable si le recourant encourt un retrait provisoire du permis de conduire et doit avancer les frais de l'examen médical auquel il doit se soumettre et qui ne lui seront peut-être pas restitués (arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 1 ; 1C_248/2011 du 30 janvier 2012 consid. 1 et les références ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1 ; cf. également arrêt 1C_328/2011 du 8 mars 2012 consid. 1).
3. En l'espèce, la décision querellée stipule que bien que saisi le 30 mai 2024, le permis du recourant lui a été restitué provisoirement le 9 juin 2024. Par contre, les frais d'expertise seront mis à sa charge si bien que la condition du préjudice irréparable est réalisée, ce que le recourant a par ailleurs expliqué dans son recours.
Partant, les conditions de l'art. 57 let. c LPA sont réalisées, si bien qu'il convient d'entrer en matière (cf. arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 1 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 1).
4. Le recourant se plaint de la forme de notification de la décision.
5. Selon le Tribunal fédéral (arrêt 2C_1021/2018 du 26 juin 2019 consid. 4.2), une décision irrégulièrement notifiée n'est pas nulle, mais simplement inopposable à ceux qui auraient dû en être les destinataires ; une telle décision ne peut donc pas les lier, mais la protection des parties est suffisamment garantie lorsque la notification irrégulière atteint son but malgré cette irrégularité. Il y a lieu d'examiner, d'après les circonstances du cas concret, si les parties intéressées ont réellement été induites en erreur par l'irrégularité de la notification et ont, de ce fait, subi un préjudice. Il convient à cet égard de s'en tenir aux règles de la bonne foi qui imposent une limite à l'invocation du vice de forme. Ainsi, l'intéressé doit agir dans un délai raisonnable dès qu'il a connaissance de quelque manière que ce soit de l'existence de la décision qu'il entend contester.
Dans l'hypothèse particulière où la partie représentée par un avocat reçoit seule l'acte, il lui appartient de se renseigner auprès de son mandataire de la suite donnée à son affaire, au plus tard le dernier jour du délai de recours depuis la notification (irrégulière) de la décision litigieuse; le délai de recours lui-même court dès cette date (arrêts 5D_212/2016 du 7 février 2017 consid. 3.1; 1C_15/2016 du 1er septembre 2016 consid. 2.2).
6. En l'espèce, la décision aurait dû être notifiée au mandataire du recourant. Toutefois, cette notification irrégulière a atteint son but et le recourant n'a subi aucun préjudice, de sorte que ce grief doit être écarté.
7. Le recourant se plaint d’une violation de son droit d’être entendu, sous l’angle du droit à l’accès au dossier : alors qu’il avait sollicité un accès complet au dossier, il n'avait pas pu prendre connaissance des images de vidéosurveillance nonobstant plusieurs demandes explicites.
8. Le droit d’être entendu garanti par l’art. 29 al. 2 Cst. comprend notamment le droit, pour l’intéressé, de s’exprimer sur les éléments pertinents avant qu’une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d’avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités).
9. La réparation d’un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d’être entendu, n’est possible que lorsque l’autorité dispose du même pouvoir d’examen que l’autorité inférieure (ATF 145 I 167 consid. 4.4 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_240/2017 du 11 décembre 2018 consid. 3.2). Elle dépend toutefois de la gravité et de l’étendue de l’atteinte portée au droit d’être entendu et doit rester l’exception. Elle peut cependant se justifier en présence d’un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 142 II 218 consid. 2.8.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1B_556/2017 du 5 juin 2018 consid. 2.1). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu’elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/802/2020 du 25 août 2020 consid. 4c et les références cités).
10. Le recours au tribunal ayant un effet dévolutif complet, celui‑ci dispose d’un libre pouvoir d’examen en fait et en droit qui implique la possibilité de guérir une violation du droit d’être entendu, même s’il n’a pas la compétence d’apprécier l’opportunité de la décision attaquée (ATF 145 I 167 consid. 4.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_257/2019 du 12 mai 2020 consid. 2.5 ; ATA/321/2024 du 5 mars 2024 consid. 4.7).
11. En l'espèce, le recourant fait grief à l'autorité intimée d'avoir prononcé la décision querellée sans lui avoir offert l'opportunité de se prononcer sur les images de vidéosurveillance versées au dossier.
Force est de constater que le recourant a pu accéder au dossier complet à partir du 12 décembre 2024, suite à la transmission au tribunal, par l'autorité intimée, de ses observations au recours, accompagnées de son dossier, il n'a toutefois pas pu prendre connaissance des images préalablement.
Si l'on doit admettre qu'il s'agit là d'une violation de son droit d'être entendu, celle-ci ne saurait toutefois emporter l'annulation de la décision querellée. En effet, outre le fait que le recourant a très bien saisi le sens et la portée de ladite décision, preuve en est de son recours, il a eu également la possibilité, en cours de procédure, de développer ses arguments aussi efficacement qu'il aurait pu le faire dans son recours, après avoir pu prendre connaissance des images de vidéosurveillance. Ainsi, en toute état, la violation de son droit d'être entendu a été réparée dans le cadre de l'instruction de son recours, à savoir durant la phase des échanges d'écritures intervenus entre les parties, vu le plein pouvoir de cognition du tribunal. Dans ces circonstances, le renvoi de la cause au département pour violation dudit droit ne constituerait qu'une vaine formalité.
Au vu de ce qui précède, le grief relatif au droit d'être entendu sera écarté.
12. Selon l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.
13. Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire, l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; 123 V 150 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_107/2016 du 28 juillet 2016 consid. 9).
14. En procédure administrative, tant fédérale que cantonale, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 2ème phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_668/2011 du 12 avril 2011 consid. 3.3 ; ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n'est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b et les arrêts cités).
15. Selon l'art. 14 al. 1 LCR, tout conducteur de véhicule automobile doit posséder l’aptitude et les qualifications nécessaires à la conduite. Est apte à la conduite, aux termes de l'art. 14 al. 2 LCR, celui qui a atteint l’âge minimal requis (let. a), a les aptitudes physiques et psychiques requises pour conduire un véhicule automobile en toute sécurité (let. b), ne souffre d’aucune dépendance qui l’empêche de conduire un véhicule automobile en toute sécurité (let. c) et dont les antécédents attestent qu’il respecte les règles en vigueur ainsi que les autres usagers de la route (let. d).
16. Si l'aptitude à la conduite soulève des doutes, la personne concernée fera l'objet d'une enquête dans les cas énumérés de manière non exhaustive à l'art. 15d al. 1 let. a à e LCR (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.1), notamment en cas d'infractions aux règles de la circulation dénotant un manque d'égards envers les autres usagers de la route (art. 15d al. 1 let. c LCR).
17. Les faits objet des hypothèses de l’art. 15d al. 1 LCR fondent un soupçon préalable que l'aptitude à la conduite pourrait être réduite (arrêt du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.1 ; ATA/11/2023 du 10 janvier 2023 et les références citées). Si des indices concrets soulèvent des doutes quant à l'aptitude à la conduite de la personne concernée, un examen d'évaluation de l'aptitude à la conduite par un médecin et/ou un examen d'évaluation de l'aptitude à la conduite par un psychologue du trafic doivent être ordonnés (art. 28a al. 1 OAC ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_41/2019 du 4 avril 2019 consid. 2.1 ; 1C_76/2017 du 19 mai 2017 consid. 5 ; cf. aussi ATF 139 II 95 consid. 3.5 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.4.2 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1).
18. L'art. 28a al. 1 OAC précise que, si l'aptitude à la conduite d'une personne soulève des doutes (art. 15d al. 1 LCR), l'autorité cantonale ordonne : a) en cas de questions relevant de la médecine du trafic: un examen d'évaluation de l'aptitude à la conduite par un médecin selon l'art. 5abis ; b) en cas de questions relevant de la psychologie du trafic, notamment dans les cas visés à l'art. 15d al. 1 let. c LCR: un examen d'évaluation de l'aptitude à la conduite par un psychologue du trafic selon l'art. 5c.
19. Aux termes de l'art. 16d al. 1 let. a LCR, le permis d'élève conducteur ou le permis de conduire est retiré pour une durée indéterminée à la personne dont les aptitudes physiques et psychiques ne lui permettent pas ou plus de conduire avec sûreté un véhicule automobile.
20. Ces mesures constituent un retrait de sécurité (cf. ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; 122 II 359 consid. 1a ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 22 février 2017 consid. 2.1.2 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1 ; 1C_384/2011 du 7 février 2012 consid. 2.3.1), en ce sens qu'elles ne tendent pas à réprimer et ne supposent pas la commission d'une infraction fautive à une règle de la circulation, mais sont destinées à protéger la sécurité du trafic contre les conducteurs inaptes (cf. not. ATF 133 II 331 consid. 9.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_819/2013 du 25 novembre 2013 consid. 2 ; 6A.33/2001 et 35/2001 du 30 mai 2001
consid. 3a ; 6A.114/2000 du 20 février 2001 consid. 2).
21. La décision de retrait de sécurité du permis de conduire constitue une atteinte grave à la sphère privée de l'intéressé ; elle doit donc reposer sur une instruction précise des circonstances déterminantes (ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; 133 II 284 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_557/2014du 9 décembre 2014 consid. 3 ; 1C_819 du 25 novembre 2013 consid. 2 ; 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1 ; 6A.33/2001 et 35/2001 du 30 mai 2001 consid. 3a), le pronostic devant être posé sur la base des antécédents du conducteur et de sa situation personnelle (ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; 125 II 492 consid. 2a). En cas de doute, il y a lieu d'ordonner un examen médical (art. 11b al. 1 let. b de l'ordonnance du 27 octobre 1976 réglant l'admission des personnes et des véhicules à la circulation routière [OAC; RS 741.51]; ATF 139 II 95 consid. 3.4.1 ; arrêt 1C_307/2007 du 17 décembre 2007 consid. 3.2), l'intérêt public lié à la sécurité routière commandant en effet que l'on procède à un examen approfondi à chaque fois qu'il existe suffisamment d'éléments pour faire naître un doute au sujet de l'aptitude à la conduite (arrêts du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.3 ; 1C_282/2007 du 13 février 2008 consid. 2.4).
22. Un tel doute peut reposer sur de simples indices (cf. arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1). En revanche, lorsqu'il est question de retrait du permis à titre préventif, il doit exister des doutes sérieux quant à l'aptitude à conduire de l'intéressé (art. 40 OAC) arrêt du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1).
23. La jurisprudence considère que les mesures appropriées à cet effet, notamment l'opportunité d'une expertise médicale, varient en fonction des circonstances et relèvent du pouvoir d'appréciation de l'autorité cantonale appelée à se prononcer sur le retrait (ATF 129 II 82 consid. 2.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_593/2012 du 28 mars 2013 consid. 3.1 ; 1C_248/2011 du 30 janvier 2012 consid. 3.1 ; 1C_282/2007 du 13 février 2008 consid. 2.2 ; 6A.33/2001 et 35/2001 du 30 mai 2001 consid. 3a).
24. En l'espèce, la question à trancher est celle de savoir s'il existe des doutes suffisants quant à l'aptitude à la conduite du recourant, susceptibles de justifier la mise en œuvre d'une expertise.
Pour fonder sa décision, l’autorité intimée s'appuie sur le fait qu'il ressort des images de caméra ayant enregistré une partie des faits que le recourant avait circulé sur deux voies de circulation avant de suivre volontairement le motocycliste auquel il avait barré à trois reprises la route, tout en circulant à une vitesse inadaptée aux conditions. Il avait également tenté de lui saisir le bras.
Sur la base des autres pièces du dossier, et notamment du rapport de police, l'autorité intimée a également retenu que le recourant avait ensuite circulé sur une piste cyclable afin de dépasser le motocycle par la droite en effectuant des freinages intempestifs après l'avoir dépassé. Il avait également forcé le motocycle contre une séparation des voies en béton avant que la course ne soit interrompue par l'intervention des forces de l'ordre.
En agissant ainsi, il avait mis en danger non seulement le motocycliste mais également les autres usagers de la route.
De plus, ces faits avaient été commis alors qu'il circulait en état d'ébriété en présentant un taux d'alcool qualifié, soit une concentration d'alcool dans l'air expiré de 0,49 mg/l à l'éthylomètre.
Le tribunal de céans constate que dans le cadre de la procédure pénale, à ce stade, seule l'infraction de mise en danger de la vie d'autrui a été écartée mais que certains faits sont aujourd'hui établis.
En effet, M A______ a confirmé lors de son audition par la police, avoir consommé de l'alcool, avoir pris part à un conflit routier, ne pas avoir respecté les distances de sécurité et avoir tenté de saisir le bras du motocycliste.
Dans le cadre de la présente procédure, il a encore admis qu'il s'était énervé, qu'il avait pris part à un conflit routier tout en étant sous l'emprise de l'alcool.
Quant aux images de vidéosurveillances, elles suffisent à démontrer que le recourant a mis en danger la sécurité des autres usagers de la route, en ne respectant pas les distances de sécurité, en barrant la route au motocycliste et en empruntant deux voies de circulation.
Ainsi, c’est à juste titre que l’OCV conçoit des doutes sérieux sur son aptitude à la conduite et a ordonné une expertise auprès d'un psychologue du trafic, étant rappelé que de simples indices suffisent et que l'absence d'antécédent ne permet pas, dans le cas d'espèce, d'attester qu’il respectera les règles en vigueur ainsi que les autres usagers de la route en l'absence d'une expertise. Ce d'autant plus que le recourant n'a démontré, devant le tribunal de céans, aucune prise de conscience des conséquences que le comportement qu'il a adopté aurait pu entrainer.
Dans l'arrêt cité par le recourant, le Tribunal fédéral a constaté que la procédure pénale n'avait pas encore pu établir comment l'incident contesté s'était déroulé et quel était le rôle du recourant. Tel n'est pas le cas en l'espèce, dès lors que le recourant a admis une partie des faits qui lui sont reprochés et que le visionnement des images de vidéosurveillance versées au dossier apparaît suffisant à justifier le bienfondé de la décision querellée.
Mal fondé, le recours sera rejeté. En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.
25. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA)
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF
DE PREMIÈRE INSTANCE
1. déclare recevable le recours interjeté le 14 octobre 2024 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal des véhicules du 2 octobre 2024 ;
2. le rejette ;
3. met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;
4. dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
5. dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.
Au nom du Tribunal :
La présidente
Kristina DE LUCIA
Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties.
Genève, le |
| Le greffier |