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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3974/2021

ATA/11/2023 du 10.01.2023 sur JTAPI/866/2022 ( LCR ) , REJETE

Recours TF déposé le 17.02.2023, rendu le 19.12.2023, REJETE, 1C_80/2023
Descripteurs : NULLITÉ;COMPÉTENCE;EXPERTISE;LOI FÉDÉRALE SUR LA CIRCULATION ROUTIÈRE;MAXIME INQUISITOIRE;DEVOIR DE COLLABORER
Normes : LCR.14; LCR.15d.al1.letc; OAC.30; OAC.45.al1; LPA.19; LPA.20; LPA.22; CCR.41; CCR.42
Résumé : Demande de constat de la nullité d'un ordre d'expertise d'aptitude caractérielle à la conduite pour défaut de compétence territoriale pour prononcer un tel ordre, le recourant étant domicilié en France et au bénéfice d'un permis de conduire français. La convention sur la circulation routière ne prévoit pas spécifiquement la possibilité de soumettre un conducteur titulaire d'un permis étranger à une expertise. Celle-ci relève cependant de l'administration des preuves dans le cadre de la procédure d'interdiction d'usage du permis de conduire étranger. L'OCV avait donc la compétence pour ordonner l'expertise. Recours rejeté.
En fait
En droit

RÉPUBLIQUE ET

canton de genève

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3974/2021-LCR ATA/11/2023

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 10 janvier 2023

1ère section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Albert Rey-Mermet, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DES VÉHICULES

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 30 août 2022 (JTAPI/866/2022)


EN FAIT

1) Par jugement du 4 juin 2021, le Tribunal de police a déclaré Monsieur A______, ressortissant suisse né le ______ 1973, domicilié à ______, en France et titulaire d'un permis de conduire français, coupable de violation intentionnelle des règles fondamentales de la circulation routière.

2) Par décision du 6 août 2021, l'office cantonal des véhicules (ci-après : OCV) a, pour une durée indéterminée, interdit à M. A______ de faire usage de son permis de conduire étranger sur le territoire suisse, lui a retiré, pour une durée indéterminée également, le permis de conduire toutes catégories, sous-catégories et catégories spéciales à titre préventif et a ordonné une expertise visant à évaluer son aptitude caractérielle à la conduite par un psychologue du trafic.

Il avait violé intentionnellement des règles fondamentales sur la circulation en participant à une course de vitesse et avait heurté un véhicule, le 1er mai 2020 à 4h sur la route de Saint-Julien, en direction de la route de Perly, au volant d'une voiture de police, sirène et gyrophare enclenchés, lors d'un trajet non urgent.

L'examen de son dossier et notamment l'importance de l'excès de vitesse, considéré comme un délit de chauffard, impliquant un retrait et une interdiction de faire usage du permis de conduire étranger sur le territoire suisse pour une durée de deux ans, incitaient l'autorité à concevoir des doutes sérieux quant à son aptitude caractérielle à la conduite des véhicules à moteur.

3) Le 10 août 2021, M. A______ a confirmé à l'OCV ne pas être en mesure de déposer son permis de conduire suisse à l'OCV, n'en étant plus en possession depuis l'été 2010. Il l'avait échangé contre un permis de conduire français lorsqu'il s'était établi en France.

4) Le 3 novembre 2021, M. A______ a contesté auprès de l'OCV la compétence de l'autorité suisse pour ordonner une expertise en Suisse visant à évaluer l'aptitude caractérielle à la conduite d'une personne non domiciliée sur le territoire helvétique et a invoqué la nullité de l'ordre d'expertise prononcé le 6 août 2021. Le reste de la décision n'était pas contesté, sauf à confirmer la durée de l'interdiction de circuler en Suisse de deux ans.

5) Le 12 novembre 2021, l'OCV a maintenu l'intégralité de sa décision du 6 août 2021, laquelle était entrée en force.

S'agissant du titulaire d'un permis de conduire français ayant commis les faits en Suisse, la mesure prononcée à son encontre devait être prononcée en vertu de la législation suisse sur la circulation routière. Il s'agissait d'une infraction grave constitutive d'un profond manque d'égards pour les autres usagers de la route, entraînant de sérieux doutes sur son aptitude à la conduite, qui ne pourraient être levés que par une expertise visant à évaluer son aptitude caractérielle à la conduite. L'autorité n'avait aucune marge d'appréciation.

6) a Par acte du 19 novembre 2021, M. A______ a recouru auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) contre l'ordre d'expertise visant à évaluer son aptitude caractérielle à la conduite par un psychologue du trafic prononcé le 6 août 2021, concluant à la constatation de sa nullité.

Un conducteur vivant à l'étranger et au bénéfice d'un permis de conduire délivré par un État tiers ne pouvait pas être convoqué en Suisse et soumis à un examen destiné exclusivement aux résidents suisses au bénéfice de ou requérant un permis de conduire suisse. Le droit conventionnel prévoyait uniquement la possibilité de retirer le permis de conduire à un conducteur étranger et l'obligation de se soumettre à une expertise n'était pas prévue dans l'énumération limitative des mesures à disposition d'un État contractant. Les dispositions appliquées par l'OCV ne visaient pour le reste que le conducteur domicilié en Suisse.

b. Par arrêt du 1er mars 2022 (ATA/231/2022), la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a annulé le jugement du TAPI du 9 décembre 2021 (JTAPI/1249/2021) déclarant le recours irrecevable, ce dernier ayant été interjeté dans le délai légal contre la décision du 12 novembre 2021, retenant la compétence des autorités suisses et écartant le grief de nullité.

7) Par jugement du 30 août 2022, rendu à l'issue d'un double échange d'écritures suivi par une ultime écriture de M. A______, le TAPI a rejeté le recours.

M. A______ avait commis plusieurs excès de vitesse lors d'une course-poursuite à Genève. Son comportement était objectivement de nature à susciter des doutes sur son aptitude à la conduite, de sorte que, vis-à-vis d'un conducteur disposant d'un permis de conduire suisse, l'autorité aurait été légitimée à ordonner une expertise sur l'aptitude caractérielle à la conduite de véhicules à moteur. L'OCV disposait de la même compétence vis-à-vis d'un conducteur titulaire d'un permis étranger. L'examen médical avait pour but de clarifier une question dont dépendait la sécurité de la circulation routière en Suisse. Toute personne entendant conduire en Suisse était soumise, lorsque les conditions en étaient données sur le plan du droit interne, à l'obligation de se soumettre à un tel examen, sous peine de se voir privée du droit de conduire en Suisse. Le fait qu'il s'agisse d'une personne domiciliée en Suisse ou ailleurs ne changeait rien à la nécessité de pouvoir, au besoin, faire expertiser l'aptitude à la conduite, du moment que la personne prétendait conduire sur le territoire suisse. La seule différence avec le conducteur domicilié en Suisse était que l'autorité suisse n'était pas compétente pour ordonner le retrait du permis, pouvant uniquement prononcer l'interdiction d'en faire usage. La conséquence d'un refus de se soumettre à une expertise médicale était la même quel que soit le lieu de résidence de la personne en cause ou le permis national dont elle était titulaire, à savoir le maintien du retrait de permis ou de l'interdiction de faire usage du permis étranger sur le territoire suisse. L'incompétence de l'autorité suisse impliquerait qu'un conducteur domicilié à l'étranger et titulaire d'un permis étranger ne pourrait pas, en cas de doute, faire l'objet d'un constat de son inaptitude à la conduite par les autorités suisses et qu'il ne serait donc soumis qu'au risque d'une interdiction de nature admonestative, avec la possibilité de recommencer à conduire en Suisse au terme de la durée d'interdiction, malgré le danger potentiel qu'il ferait peser sur la sécurité routière en Suisse. Une telle solution, aboutissant à une situation arbitraire et dangereuse, n'était pas soutenable.

8) Par acte du 29 septembre 2022, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative contre ce jugement, concluant au constat de la nullité de l'ordre d'expertise visant à évaluer son aptitude caractérielle à la conduite par un psychologue du trafic prononcé le 6 août 2021 et à la condamnation de l'OCV aux dépens. À titre de moyens de preuve, il demandait l'édition par l'autorité pénale genevoise de l'ordonnance pénale rendue à son encontre et par l'OCV de son dossier administratif.

Il n'y avait aucune base légale permettant à l'OCV de soumettre un conducteur étranger au bénéfice d'un permis de conduire étranger à expertise. Le TAPI n'en citait d'ailleurs aucune. Le droit conventionnel réservait des compétences administratives exclusives à l'État délivrant les permis de conduire, soit le pays de résidence, en l'occurrence la France. Les considérations qui, selon le jugement attaqué, pourraient de lege ferenda justifier la compétence de l'OCV importaient peu. L'OCV avait décidé de soumettre le conducteur domicilié à l'étranger à l'expertise en Suisse alors même que la même mesure n'avait pas été prise à l'encontre du conducteur suisse impliqué dans la même procédure.

9) Le 27 octobre 2022, l'OCV a indiqué ne pas souhaiter formuler d'observations.

10) Le 1er novembre 2022, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) a. Le recours porte sur la conformité au droit de la décision du 12 novembre 2021 refusant le constat de nullité de l'ordre d'expertise sur l'aptitude caractérielle à la conduite du recourant par un psychologue du trafic prononcée le 6 août 2021 pour défaut de compétence territoriale.

b. Dans son acte de recours devant la chambre administrative, le recourant invoque un grief de violation du principe de l'égalité de traitement au motif que le conducteur de l'autre voiture impliquée dans la course-poursuite n'aurait pas été soumis à expertise. Il s'agit cependant d'un grief matériel contre la décision du 6 août 2021, entrée en force, invoqué pour la première fois devant la chambre administrative et dont le recourant n'allègue pas qu'il entraînerait la nullité de l'ordre d'expertise, de sorte qu'il est tardif, exorbitant au présent litige et, partant, irrecevable.

3) S'agissant des demandes d'instruction du recourant, il convient de constater qu'elles ont été satisfaites, l'OCV ayant versé à la procédure les pièces pertinentes, comprenant le jugement pénal du 4 juin 2021.

4) Le recourant affirme que l'autorité intimée n'aurait pas la compétence de prononcer l'ordre d'expertise concernant un conducteur au bénéfice d'un permis étranger et domicilié à l'étranger, de sorte que ledit ordre serait nul.

a. La nullité absolue d'une décision peut être invoquée en tout temps devant toute autorité et doit être constatée d'office. Elle ne frappe que les décisions affectées des vices les plus graves, manifestes ou du moins facilement reconnaissables et pour autant que sa constatation ne mette pas sérieusement en danger la sécurité du droit. Sauf dans les cas expressément prévus par la loi, il ne faut admettre la nullité qu'à titre exceptionnel, lorsque les circonstances sont telles que le système d'annulabilité n'offre manifestement pas la protection nécessaire (ATF 130 II 249 consid. 2.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_354/2015 du 21 janvier 2016 consid. 4.1). Des vices de fond d'une décision n'entraînent qu'exceptionnellement sa nullité. Entrent avant tout en considération comme motifs de nullité l'incompétence fonctionnelle et matérielle de l'autorité appelée à statuer, ainsi qu'une erreur manifeste de procédure (ATF 129 I 361 consid. 2.1 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_354/2015 du 21 janvier 2016 consid. 4.1).

b. L'art. 41 de la convention sur la circulation routière du 8 novembre 1968 (RS 0.741.10, ratifiée et entrée en vigueur tant par la France que par la Suisse ; ci-après : la convention) traite des permis de conduire nationaux, de leurs conditions de délivrance, de leur reconnaissance, de leur durée de validité et du permis de conduire international.

Les parties contractantes ou leurs subdivisions peuvent retirer à un conducteur, qui commet sur leur territoire une infraction susceptible d’entraîner le retrait du permis de conduire en vertu de leur législation, le droit de faire usage sur leur territoire du permis de conduire, national ou international, dont il est titulaire (art. 42 par. 1 1ère phr. de la convention). En pareil cas, l’autorité compétente de la partie contractante ou de celle de ses subdivisions qui a retiré le droit de faire usage du permis pourra se faire remettre le permis et le conserver jusqu’à l’expiration du délai pendant lequel le droit de faire usage du permis est retiré ou jusqu’à ce que le conducteur quitte son territoire, si ce départ intervient avant l’expiration de ce délai (let. a), aviser du retrait du droit de faire usage du permis l’autorité qui a délivré ou au nom de qui a été délivré le permis (let. b), s’il s’agit d’un permis international, porter à l’emplacement prévu à cet effet la mention que le permis n’est plus valable sur son territoire (let. c) et, dans le cas où elle n’a pas fait application de la procédure visée à la let. a, compléter la communication mentionnée à la let. b en demandant à l’autorité qui a délivré le permis ou au nom de qui le permis a été délivré, d’aviser l’intéressé de la décision prise à son encontre (let. d ; art. 42 par. 1 2ème phr. de la convention). Rien dans la convention ne saurait être interprété comme interdisant aux parties contractantes ou à une de leurs subdivisions d’empêcher un conducteur titulaire d’un permis de conduire, national ou international, de conduire s’il est évident ou prouvé que son état ne lui permet pas de conduire en sécurité ou si le droit de conduire lui a été retiré dans l’État où il a sa résidence normale (art. 42 par. 3 de la convention).

c. Tout conducteur de véhicule automobile doit posséder l’aptitude et les qualifications nécessaires à la conduite (art. 14 al. 1 loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 - LCR - RS 741.01). Est apte à la conduite celui qui a atteint l’âge minimal requis (let. a), a les aptitudes physiques et psychiques requises pour conduire un véhicule automobile en toute sécurité (let. b), ne souffre d’aucune dépendance qui l’empêche de conduire un véhicule automobile en toute sécurité (let. c) et dont les antécédents attestent qu’il respecte les règles en vigueur ainsi que les autres usagers de la route (let. d ; art. 14 al. 2 LCR).

Si l'aptitude à la conduite soulève des doutes, la personne concernée fera l'objet d'une enquête dans les cas énumérés de manière non exhaustive à l'art. 15d al. 1 let. a à e LCR (FF 2010 7755). Un examen d'aptitude est en particulier ordonné en cas d'infractions aux règles de la circulation dénotant un manque d’égards envers les autres usagers de la route (art. 15d al. 1 let. c LCR).

Le permis d’élève conducteur ou le permis de conduire peut être retiré à titre préventif en cas de doutes sérieux quant à l’aptitude à la conduite d’une personne (art. 30 de l'ordonnance réglant l’admission des personnes et des véhicules à la circulation routière du 27 octobre 1976 - OAC - RS 741.51).

Cette disposition institue une mesure provisoire destinée à protéger les intérêts menacés jusqu’à l’issue de la procédure principale portant sur un retrait de sécurité. Vu l’importance du risque inhérent à la conduite des véhicules automobiles, il s’impose qu’un conducteur puisse se voir retirer son permis, à titre préventif, dès que des indices autorisent à penser qu’il représente un risque particulier pour les autres usagers de la route et font douter sérieusement de sa capacité à conduire. Une preuve stricte n’est pas nécessaire. En effet, si une telle preuve était apportée, c’est un retrait de sécurité qu’il y aurait lieu d’ordonner sans plus attendre. Au contraire, le retrait préventif intervient, par définition, avant que tous les éclaircissements nécessaires pour juger de la nécessité d’un retrait de sécurité aient été obtenus. Pour décider d’un retrait préventif, l’autorité doit donc se fonder sur les éléments dont elle dispose en l’état. La prise en considération de tous les éléments plaidant pour ou contre l’aptitude de l’intéressé à la conduite de véhicules automobiles interviendra à l’issue de la procédure au fond (ATF 125 II 492 consid. 2b ; 125 II 396 consid. 3 ; 122 II 359 consid. 3a ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_406/2022 du 26 septembre 2022 consid. 4).

Les exigences liées à la mise en œuvre d’un examen d’aptitude ne sont pas les mêmes que celles prévalant en matière de retrait préventif, même si, en pratique, les deux mesures vont, dans un premier temps, du moins, souvent de pair. Alors que l’ouverture d’une enquête peut être ordonnée en présence d’indices suffisants pour que se pose la question de l’aptitude à conduire (art. 11b al. 1 let. a OAC), une décision de retrait préventif du permis de conduire suppose, quant à elle, l’existence de doute sérieux sur l’aptitude de conduire de l’intéressé (art. 30 OAC). À l’inverse, une clarification de l’aptitude intervient généralement sans retrait préventif lorsqu’il n’existe pas de danger immédiat pour la circulation routière (arrêt du Tribunal fédéral 1C_531/2016 du 16 janvier 2017 consid. 2.4.2 et les références citées).

Cela étant, les faits objet des hypothèses de l’art. 15d al. 1 LCR fondent un soupçon préalable que l’aptitude à la conduite pourrait être réduite. En pareil cas, le permis de conduire est généralement retiré à titre provisionnel (retrait préventif selon l’art. 30 OAC) jusqu’à ce que les clarifications soient exécutées (FF 2010 7703 ss, spéc. 7725). Ainsi, si un examen médical est ordonné, il y a en principe lieu de retirer le permis de conduire à titre provisionnel en application de l’art. 30 OAC (ATF 125 II 396 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_144/2017 du 2 juin 2017 consid. 2.3 ).

L’usage d’un permis étranger peut être interdit en vertu des dispositions qui s’appliquent au retrait du permis de conduire suisse (art. 45 al. 1 1ère phr. OAC).

d. La procédure administrative est régie par la maxime inquisitoire, selon laquelle l'autorité établit les faits d'office (art. 19 LPA), sans être limitée par les allégués et les offres de preuves des parties. Dans la mesure où l'on peut raisonnablement exiger de l'autorité qu'elle les recueille, elle réunit ainsi les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision. Elle apprécie les moyens de preuve des parties et recourt s'il y a lieu à d'autres moyens de preuve (art. 20 LPA). Mais ce principe n'est pas absolu, sa portée étant restreinte par le devoir des parties de collaborer à la constatation des faits (art. 22 LPA). Celui-ci comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 128 II 139 consid. 2b ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_524/2017 du 26 janvier 2018 consid. 4.2 ; 1C_454/2017 du 16 mai 2018 consid. 4.1 ; ATA/844/2020 du 1er septembre 2020 consid. 4a ; ATA/1679/2019 du 19 novembre 2019 consid. 4b et les références citées).

e. En l'espèce, le recourant affirme qu'il n'y aurait pas de base légale pour ordonner à un conducteur au bénéfice d'un permis de conduire étranger de se soumettre à l'expertise demandée. L'art. 42 par. 1 de la convention prévoirait uniquement la possibilité d'interdire au titulaire de faire usage de son permis de conduire étranger en Suisse, à l'exclusion de celle d'ordonner une expertise et l'art. 41 de la convention réserverait des compétences administratives exclusives à l'État délivrant le permis de conduire, en l'occurrence la France.

La convention ne prévoit effectivement pas spécifiquement la possibilité, pour un État contractant, de soumettre un conducteur titulaire d'un permis étranger à une expertise.

Néanmoins, dans sa décision du 6 août 2021, l'autorité intimée a interdit au recourant l'usage de son permis de conduire français à titre préventif, pour une durée indéterminée, et a ordonné une expertise visant à établir l'aptitude caractérielle du recourant à la conduite. La décision du 6 août 2021 est par conséquent une décision provisoire supposant une nouvelle décision à l'issue de l'expertise, en fonction de ses conclusions, l'expertise étant nécessaire pour savoir si une interdiction d'usage de sécurité du permis de conduire français s'impose. Il s'agit donc d'une mesure d'instruction dans le cadre de la procédure relative à l'interdiction d'usage du permis français en Suisse, dans la perspective de la décision finale devant être prononcée en fonction des résultats de l'expertise.

L'expertise ne constitue donc pas une mesure distincte mais relève de l'administration des preuves dans le cadre de la procédure d'interdiction d'usage du permis de conduire français. L'autorité intimée avait la compétence pour l'ordonner dans le cadre de la procédure menée en application de l'art. 42 par. 1 de la convention et de l'art. 45 al. 1 et 30 OAC.

Il sera à cet égard encore relevé que l'art. 42 par. 3 de la convention indique spécifiquement que cette dernière ne saurait être interprétée comme interdisant aux parties contractantes d'empêcher un conducteur de conduire s’il est évident ou prouvé que son état ne lui permet pas de conduire en sécurité, ce que l'expertise a précisément pour but de clarifier.

Au vu de ce qui précède, l'autorité intimée était compétente pour ordonner l'expertise litigieuse, à laquelle le recourant doit se soumettre, sous peine de violer son obligation de collaboration et de s'exposer aux conséquences en découlant. L'ordre d'expertise n'est par conséquent pas entaché de nullité.

Le recours, mal fondé, sera rejeté.

5) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 800.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA) et il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 septembre 2022 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 30 août 2022 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 800.- à la charge de Monsieur A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Albert Rey-Mermet, avocat du recourant, à l'office cantonal des véhicules, au Tribunal administratif de première instance, ainsi qu’à l’office fédéral des routes.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Verniory, Mme McGregor, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :