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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/3700/2023

JTAPI/762/2024 du 07.08.2024 ( OCPM ) , REJETE

Descripteurs : RECONSIDÉRATION;DIVORCE;ATTEINTE À LA SANTÉ
Normes : LPA.48.al1.letb; LEI.50
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3700/2023

JTAPI/762/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 7 août 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Hassan BARBIR, avocat, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1985, est ressortissant du Nigeria.

2.             Arrivé en Suisse le 14 mai 2009, il a sollicité l’asile. Attribué au canton de Genève, il a été mis au bénéfice d'un permis N le 19 mai suivant, renouvelé en dernier lieu jusqu'au 6 mai 2011.

3.             Par décision du 12 janvier 2011, confirmé le 22 mars 2011 par le Tribunal administratif fédéral (ci-après: TAF), l'office fédéral des migrations (actuellement secrétariat d'État aux migrations; ci-après : SEM) a rejeté la demande d'asile de M. A______. Il a également prononcé son renvoi, lui impartissant un délai au 9 mars 2011 pour quitter la Suisse, et a chargé le canton de Genève d’exécuter cette mesure.

4.             Le 29 mars 2011, le SEM a imparti à M. A______ un nouveau délai au 30 avril 2011 pour quitter le territoire suisse.

5.             Par arrêt du 31 mai 2011, le TAF a rejeté la demande de révision déposée par M. A______ contre son arrêt du 22 mars 2011.

6.             Le 21 octobre 2011, M. A______ a épousé Madame B______, ressortissante suisse née le ______ 1973, mère de trois enfants nés d'une précédente union. Le mariage a été célébré à C______.

7.             Le 24 février 2012, M. A______ a été mis au bénéfice d'une autorisation de séjour au titre de regroupement familial. Ce titre de séjour a été régulièrement renouvelé jusqu'au 21 octobre 2020.

8.             Par jugement du 25 février 2014, entré en force, le Tribunal de police a condamné M. A______ à une peine privative de liberté de vingt mois pour blanchiment d'argent en relation avec une infraction à la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.12) et faux dans les titres, avec sursis et délai d'épreuve de trois ans.

9.             Le 17 octobre 2015, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de Justice a condamné M. A______ à une peine pécuniaire de dix jours-amende à CHF 30.- pour lésions corporelles simples (cas de peu de de gravité) avec sursis et délai d'épreuve de deux ans.

10.         Le 16 mars 2016, l'OCPM a adressé à M. A______ un avertissement en application de l'art. 96 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20 ; anciennement dénommée loi fédérale sur les étrangers - LEtr), compte tenu de ses deux condamnations pénales et de sa dépendance à l'aide sociale, les montants perçus de l'Hospice général s'élevant à plus de CHF 80'500.- pour la dernière période, soit depuis le 1er mai 2013.

11.         Par courrier du 17 mars 2017, M. A______ a sollicité auprès de l'OCPM la délivrance d'une autorisation d'établissement.

12.         Par décision du 25 janvier 2018, l'OCPM a refusé de faire droit à cette demande.

M. A______ et son épouse se trouvaient largement et durablement soutenus par les services sociaux genevois depuis mai 2013, pour un montant supérieur à CHF 200'000.-. De plus, l'intéressé était défavorablement connu des services de police et avait fait l'objet de deux condamnations pénales. Enfin, sa situation financière était d'autant plus précaire qu'il faisait encore l'objet de poursuites et actes de défaut de biens pour un montant supérieur à CHF 20'000.-. Dans ces conditions, force était de constater que des motifs de révocation d'autorisation d'établissement étaient remplis.

13.         Par courrier du 21 juillet 2020, l’épouse de l’intéressé a informé l'OCPM de la séparation du couple survenue le 6 juin 2020, précisant qu’elle comptait entreprendre des démarches en vue de divorcer.

14.         Par requête du 14 avril 2021, M. A______ a sollicité l’octroi d'une autorisation d'établissement, subsidiairement d'une autorisation de séjour au sens de l'art. 50 LEI et, encore plus subsidiairement d’une autorisation de séjour pour cas individuel d’une extrême gravité.

15.         Par décision du 23 septembre 2021, l'OCPM a refusé de faire droit à cette requête et a prononcé le renvoi de M. A______, lui impartissant un délai au 30 octobre 2021 pour quitter la Suisse, ainsi que le territoire des États membres de l’Union européenne et des États associés à Schengen.

Son intégration faisait défaut au sens de l'art. 50 al. 1 let. a LEI et la poursuite de son séjour ne s'imposait pas pour des raisons personnelles majeures au sens des art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI. Par conséquent, il n'y avait pas non plus lieu d'admettre l'existence d'un cas individuel d'une extrême gravité au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI. Par ailleurs, aucun élément du dossier ne permettait de constater qu'un renvoi au Nigeria le placerait dans une situation de rigueur, étant rappelé qu'il était arrivé en Suisse à l'âge de 24 ans et qu'il avait passé toute sa jeunesse et le début de sa vie d'adulte dans son pays d'origine. De surcroit, il remplissait un motif de révocation de son autorisation de séjour du fait de sa dépendance à l'aide sociale. Enfin, concernant sa demande d'autorisation d'établissement, il ne satisfaisait pas aux critères de l'art. 34 al. 1 let. c LEI du fait de sa très longue dépendance à l'aide sociale. En outre, en 2018, déjà, il remplissait les conditions de révocation de son autorisation de séjour, raison pour laquelle l'OCPM avait refusé, le 25 janvier 2018, de lui délivrer une autorisation d'établissement. Les conditions de l'art. 50 al. 1 et 2 LEI n'étaient ainsi pas remplies.

16.         Par acte du 22 octobre 2021, M. A______, sous la plume de son conseil, a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et au renouvellement de son autorisation de séjour en application de l'art. 50 al. 1 let. a LEI; subsidiairement, à la délivrance d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI.

Il avait suivi des cours de français avant 2021, notamment en 2014, 2017 et 2020. En outre, l'OCPM avait passé sous silence les diverses missions professionnelles et nombreuses recherches d'emploi qu'il avait effectuées durant ces dernières années, ainsi que le fait qu'il était désormais au bénéfice d'un contrat de travail, de durée indéterminée. Enfin, l'OCPM n'avait pas pris en compte l'impact de la crise sanitaire due à l'épidémie de Covid-19 sur le marché de l'emploi. Au regard de ces inexactitudes, il était erroné d'affirmer qu'il ne participait pas à la vie économique du canton.

Il avait certes recouru à l'aide financière de l'Hospice général mais seulement depuis le 1er août 2020, pour un montant « somme toute modeste » de CHF 24'192.-. Il avait par ailleurs eu droit au chômage courant décembre 2020. Or, l'OCPM avait pris en compte la dette sociale imputable au ménage qu'il formait à l'époque avec son épouse et les enfants de cette dernière, pour une somme par définition plus conséquente que sa dette individuelle. L'OCPM avait donc violé le principe de proportionnalité et l'art. 58a let. d LEI, en omettant de prendre en compte sa situation financière à long terme, ainsi que les nombreuses missions temporaires qu'il avait effectuées ces dernières années.

De plus, son renvoi au Nigeria le placerait dans une situation de rigueur, notamment au vu de la vétusté des infrastructures hospitalières nigériennes et du risque encouru s'il devait être contaminé par le virus SARS-COV2. Enfin, il résidait en Suisse depuis plus de douze ans et n'avait pas eu le temps d'introduire une procédure de divorce.

17.         Par jugement JTAPI/516/2022 du 17 mai 2022, le tribunal a rejeté ce recours et confirmé la décision attaquée.

M. A______ ne pouvait plus déduire de droit de séjour fondé sur son mariage, la séparation des époux étant survenue le 6 juin 2020. En outre, même si leur vie commune avait duré plus de trois ans, il ne pouvait pas se prévaloir d’une intégration réussie. En effet, il avait fait l'objet de deux condamnations pénales et était défavorablement connu des services de police. Il ne pouvait donc pas se prévaloir d'un comportement irréprochable depuis son arrivée en Suisse. Pour le surplus, il avait recours à l'aide sociale depuis de nombreuses années et faisait l'objet de plusieurs poursuites et actes de défaut de biens. En dépit de sa récente prise d'emploi de durée déterminée, à temps partiel, pour un salaire brut de CHF 1'815.-, et de son autre activité exercée à raison de huit heures par semaine, il n'avait nullement démontré qu'il se serait définitivement affranchi de l'aide sociale. Enfin, il n'avait produit aucune pièce probante démontrant qu'il maitrisait la langue française.

Une des conditions cumulatives de l'art. 50 al. 1 let. a LEI, à savoir l'intégration du recourant n'étant pas réalisée, il ne pouvait donc pas se prévaloir de cette disposition pour obtenir le renouvellement de son autorisation de séjour.

Il ne pouvait pas non plus se prévaloir de raisons personnelles majeures, au sens de l’art. 50 al. 1 let. b LEI, justifiant la poursuite de son séjour.

Il n’avait en effet pas prouvé que sa réintégration dans son pays d'origine serait fortement compromise. Arrivé en Suisse à l'âge de 24 ans, il avait passé au Nigéria toute son enfance et son adolescence, périodes déterminantes pour la formation de la personnalité, ainsi que le début de sa vie d'adulte. Même si un retour au Nigéria exigerait un certain effort d'adaptation, cette perspective ne constituait pas un déracinement insurmontable au regard de ses connaissances des us et coutumes de son pays. De plus, il avait certainement conservé de fortes attaches tant socio-culturelles que familiales avec son pays, susceptibles de faciliter sa réintégration.

Âgé de 37 ans et en bonne santé, le recourant pourrait en outre mettre à profit, au Nigéria, les connaissances professionnelles acquises en Suisse, ce qui devrait également faciliter sa réintégration professionnelle. Par ailleurs, et même si la situation sur le marché du travail nigérien était plus incertaine qu'en Suisse, il n'était pas établi qu'il n'aurait aucune possibilité d'y retrouver un emploi. Le fait qu'il ne retrouverait sans doute pas le même niveau de vie dans son pays d'origine que celui dont il bénéficiait actuellement en Suisse n'était pas pertinent. Il n'avait par ailleurs pas démontré qu'il se serait créé des attaches profondes avec la Suisse.

En tout état, dans la mesure où il existait des motifs de révocation du droit au séjour ou à la poursuite du séjour, le droit fondé sur l'art. 50 LEI se serait éteint (art. 51 al. 2 let. b LEI).

Il émargeait à l’assistance sociale depuis 2012 de manière ininterrompue et avait bénéficié de prestations de l’Hospice général pour un montant de plus de CHF 344'000.-. Que cette aide ait d'abord été perçue par le groupe familial, puis individuellement, dès le 1er août 2020, n'était pas relevant. Il faisait également l'objet de plusieurs poursuites et actes de défaut de biens non éteints après saisie, s'élevant, respectivement, à CHF 11'445.50 et à CHF 5'825.97 (état au 1er avril 2021). Le motif de révocation prévu par les art. 62 al. 1 let. e LEI et 63 al. 1 let. c LEI était ainsi rempli.

Il réalisait également le motif de révocation de l’art. 62 al. 1 let. b et c LEI, dès lors qu’il avait fait l'objet de deux condamnations pénales, dont une peine de longue durée de vingt mois pour blanchiment.

Dans ces circonstances, la situation du recourant ne relevait pas non plus du cas de rigueur, qu’il ne pouvait de toute façon pas invoquer, ayant déjà été exempté des mesures de limitation suite à son mariage.

Enfin, en l’absence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultaient d'une intégration ordinaire, il ne pouvait pas se prévaloir de l’art. de la 8 Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101), sous l’angle étroit de la protection de la vie privée, malgré la durée de son séjour.

Au surplus, aucun élément ne faisait obstacle à l’exécution de son renvoi.

18.         Par arrêt ATA/875/2002 du 30 août 2022, la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a confirmé le jugement précité.

En substance, aucun des critères de l'art. 31 al. 1 OASA n’étaient favorables à M. A______, hormis la durée de séjour en Suisse de plus de dix ans. Au vu du dossier, l'OCPM était en droit de considérer que l’intéressé ne pouvait se prévaloir d’une intégration telle que requise par l'art. 50 al. 1 let. a LEI, que la poursuite de son séjour ne s'imposait pas pour des raisons personnelles majeures au sens des art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI, respectivement qu'un tel droit serait éteint (art. 51 al. 2 let. b LEI).

Sous l’angle de l’exécution du renvoi, ses problèmes de santé ne faisaient pas obstacles à l’exécution de cette mesure. Même s’il avait consulté les Hôpitaux universitaires genevois (ci-après : HUG) en 2009, en lien avec des traumatismes physiques et psychologiques qu'il aurait vécus au Nigéria, il n’en demeurait pas moins que sa demande d’asile avait été rejetée et qu’il n’avait pas établi avoir eu besoin de soins par la suite ni que tel serait encore le cas à ce jour. Il n’avait ainsi pas démontré que son état de santé se dégraderait très rapidement en cas de renvoi au Nigéria, au point de conduire, d’une manière certaine, à la mise en danger concrète de sa vie ou à une atteinte sérieuse, durable, et notablement plus grave de son intégrité physique.

Quant à la procédure de divorce qu'il comptait engager, elle serait conduite par un conseil, comme il l’avait lui-même indiqué, et ne constituait pas non plus un obstacle à son renvoi.

19.         Suite à la requête unilatérale de divorce déposée le 3 octobre 2022 par M. A______, le divorce du couple a été prononcé le ______ 2023.

20.         Par décision du 27 octobre 2022, exécutoire nonobstant recours, l’OCPM a refusé d’entrer en matière sur la demande de reconsidération déposée par le précité, le 14 octobre 2022, relevant que les circonstances ne s’étaient pas modifiées de manière notable depuis la décision du 23 septembre 2021 qui était désormais définitive et exécutoire. Un délai au 27 novembre 2022 lui était imparti pour quitter la Suisse et l’espace Schengen.

Non contestée, cette décision est entrée en force.

21.         Par décision du 23 mai 2022, exécutoire nonobstant recours, l’OCPM a refusé d’entrer en matière sur la nouvelle demande en reconsidération déposée le 22 novembre 2022 par le précité.

Les éléments invoqués par M. A______ à l’appui de cette demande, soit les diverses promesses d’embauche, son indépendance de l’Hospice général et ses problèmes de santé, qu’il avait justifiés par des documents datant de 2011, avaient déjà été pris en compte, dans le cadre des précédentes procédures, tant par l’OCPM que par les instances judiciaires qui avaient statué.

Les circonstances ne s’étant pas modifiées de manière notable depuis la décision exécutoire du 23 septembre 2021, l’intéressé était tenu de se conformer à la décision de renvoi prononcé à son encontre et de quitter la Suisse et l’espace Schengen.

Non contestée, cette décision est entrée en force.

22.         Par décision du 4 octobre 2023, exécutoire nonobstant recours, l'OCPM a refusé d'entrer en matière sur la nouvelle demande de reconsidération formée par M. A______ le 11 juillet 2023, sa situation ne s’étant pas notablement modifiée depuis la décision du 23 septembre 2021 qui était en force.

Cette troisième demande de reconsidération reposait sur l'état de santé de l’intéressé. À cet égard, il avait produit une attestation d'un consultant obstétricien-gynécologue de l’D______ (ci-après : D______) au Nigéria indiquant que la prise en charge médicale des problèmes de santé respiratoire et du « glucose intolerance » n’était pas optimale en raison du standard des infrastructures, de même qu’un rapport médical établi le 26 mai 2023 par un médecin d’un centre médical à Genève, suite à un examen médical effectué le 2 mars 2023. À teneur de ce document, l’intéressé souffrait de douleurs consécutives à une blessure par balle, de pré-diabète et du syndrome d'apnées du sommeil. Il devait effectuer des changements hygiéno-diététiques pour ne pas développer un diabète et utiliser un CPAP (Continuous Positive Airway Pressure) pour ses problèmes d'apnées du sommeil. Il était suivi pour ces pathologies depuis le mois de décembre 2020. Le CPAP nécessitait de l'électricité, dont l'approvisionnement connaissait parfois des coupures au Nigéria.

Or, certains de ces éléments, notamment les douleurs consécutives à la blessure par balle, avaient déjà été pris en compte lors des précédentes procédures auprès de l'OCPM et des juridictions cantonales. D'autres éléments, comme le régime qu'il devait suivre et ses problèmes d'apnée du sommeil, quoique nouveaux, auraient pu - et dû - être invoqués plus tôt dans les procédures administratives. En tout état, ils ne justifiaient pas d’entrer en matière sur la demande de reconsidération et l'exécution de son renvoi paraissait possible, licite et exigible. Quand bien même le Nigéria connaissait des coupures de courant qui pourraient être problématiques pour le fonctionnement du CPAP, elles étaient temporaires et n'étaient pas de nature à mettre la vie de l’intéressé en danger à court terme.

23.         Par acte du 3 novembre 2023, M. A______ (ci-après : le recourant), sous la plume de son conseil, a recouru contre cette décision auprès du tribunal, concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et à l’octroi d’une autorisation de séjour à titre humanitaire, subsidiairement à son admission provisoire pour motifs de santé. Il a préalablement sollicité l’octroi de l’effet suspensif.

Il convient de préciser que cet acte de recours comporte trois parties, soit les conclusions (partie I), les faits « sur la requête d’effet suspensif » (partie II.A) et finalement l’effet suspensif (partie III). La teneur de cette dernière partie est la suivante : « Dans le cas présent, au-delà du rapport médical du Dr. E______ il se trouve que le neurologue qui suit mon mandant a préconisé des examens pour établir un lien entre les atteintes subies par Monsieur A______ au Nigéria son pays de provenance et les douleurs ressentis au bras et la jambe. Dès lors il était clair qu'un renvoi du recourant sans qu'il puisse établir les dommages neurologiques dont il fait et se savoir délivrer un traitement adapté qu'il ne peut obtenir dans son pays, faute d'infrastructures médicales spécialisées constituerait une situation irréversible qui mettrait un terme à sa demande de permis humanitaire, voir d'admission provisoire pour motif de santé. Par conséquent, le recourant persiste intégralement dans ses conclusions ».

24.         Dans ses observations du 22 novembre 2023, l’OCPM s’est opposé à la restitution de l’effet suspensif et à l’octroi de mesures provisionnelles et a conclu au rejet du recours.

À teneur des pièces fournies, le recourant était traité pour son apnée du sommeil depuis 2011. Quant aux examens neurologiques qui avaient eu lieu le 16 octobre 2023, en vue de déterminer un lien entre les atteintes subies au Nigéria et les douleurs ressenties au bras et à la jambe, cette question avait dû être discutée avec son médecin traitant, lors de la consultation du 24 octobre suivant.

Par ailleurs, le recourant ne semblait pas « discuter le fond de la décision querellée ». Cela étant, le seul élément nouveau invoqué dans le cadre de cette troisième demande de reconsidération était son apnée du sommeil qu’il aurait pu et dû faire valoir dans les procédures précédentes.

Enfin, l’exécution de son renvoi était raisonnablement exigible pour les motifs exposés dans la décision litigieuse, étant précisé qu’il existait des batteries portatives pouvant être connectées en permanence pour maintenir le fonctionnement du CPAP en cas de panne électrique, ce qui permettrait d’assurer un relai en cas de rupture du courant.

25.         Par courrier du 24 novembre 2023, le tribunal a imparti au recourant un délai au 29 novembre et au 14 décembre 2023 pour répliquer, sur la question de la restitution de l’effet suspensif, respectivement sur le fond.

Le recourant ne s’est pas manifesté.

26.         Par décision DITAI/536/2023 du 4 décembre 2023, le tribunal a rejeté la demande d’effet suspensif et de mesures provisionnelles au recours.

27.         Par décision du 18 mars 2024, la commission du barreau a désigné un nouveau conseil en qualité de suppléant du conseil du recourant.

28.         Le détail des pièces et des arguments des parties sera discuté ci-après, dans la mesure utile.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

4.             L’objet du litige porte sur la décision de l’OCPM du 4 octobre 2023 refusant d’entrer en matière sur la demande du recourant du 11 juillet 2023 invitant l’OCPM à reconsidérer sa décision du 23 septembre 2021.

5.             Selon l'art. 48 al. 1 LPA, les demandes en reconsidération de décisions prises par les autorités administratives sont recevables lorsque (let. a) un motif de révision au sens de l’article 80, lettres a et b, existe ou (let. b) les circonstances se sont modifiées dans une mesure notable depuis la première décision.

Selon l'art. 80 LPA, il y a lieu à révision lorsque, dans une affaire réglée par une décision définitive, il apparaît (let. a) qu’un crime ou un délit, établi par une procédure pénale ou d’une autre manière, a influencé la décision ou (let. b) que des faits ou des moyens de preuve nouveaux et importants existent, que le recourant ne pouvait connaître ou invoquer dans la procédure précédente;

6.             En vertu de l’art. 48 al. 1 let. b LPA, dont l’application est seule envisageable en l’espèce, il faut que la situation du destinataire de la décision se soit notablement modifiée depuis la première décision. Il faut entendre par là des « faits nouveaux nouveaux » (vrais nova), c'est-à-dire survenus après la prise de la décision litigieuse, qui modifient de manière importante l'état de fait ou les bases juridiques sur lesquels l'autorité a fondé sa décision, justifiant par là sa remise en cause (ATA/1620/2019 du 5 novembre 2019 consid. 3a ; ATA/159/2018 du 20 février 2018 consid. 3a). Pour qu'une telle condition soit réalisée, il faut que survienne une modification importante de l'état de fait ou des bases juridiques, ayant pour conséquence, malgré l'autorité de la chose jugée rattachée à la décision en force, que cette dernière doit être remise en question (ATA/1239/2020 du 8 décembre 2020 consid. 3b ; ATA/539/2020 du 29 mai 2020 consid. 4b ; ATA/1244/2019 du 13 août 2019 consid. 5 ; ATA/159/2018 du 20 février 2018 consid. 3a).

L'existence d'une modification notable des circonstances au sens de l'art. 48 al. 1 let. b LPA doit être suffisamment motivée, en ce sens que l'intéressé ne peut pas se contenter d'alléguer l'existence d'un changement notable de circonstances, mais doit expliquer en quoi les faits dont il se prévaut représenteraient un changement notable des circonstances depuis la décision entrée en force ; à défaut, l'autorité de première instance n'entre pas en matière et déclare la demande irrecevable (ATA/573/2013 du 28 août 2013 consid. 4). De plus, la charge de la preuve relative à l'existence d'une situation de réexamen obligatoire d'une décision en force incombe à celui qui en fait la demande, ce qui implique qu'il produise d'emblée devant l'autorité qu'il saisit les moyens de preuve destinés à établir les faits qu'il allègue (ATA/291/2017 du 14 mars 2017 consid. 4).

7.             Saisie d'une demande de réexamen, l'autorité doit procéder en deux étapes : elle examine d'abord la pertinence du fait nouveau invoqué, sans ouvrir d'instruction sur le fond du litige, et décide ou non d'entrer en matière. Un recours contre cette décision est ouvert, le contentieux étant limité uniquement à la question de savoir si le fait nouveau allégué doit contraindre l'autorité à réexaminer la situation (ATF 117 V 8 consid. 2a ; 109 Ib 246 consid. 4a ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_172/2013 du 21 juin 2013 consid. 1.4 ; 2C_504/2013 du 5 juin 2013 consid. 3 ; 2C_349/2012 du 18 mars 2013 consid. 5.1 ; ATA/1239/2020 du 8 décembre 2020 consid. 3d). Ainsi, dans la mesure où la décision attaquée ne porte que sur la question de la recevabilité de la demande de réexamen, le recourant ne peut que contester le refus d'entrer en matière que l'autorité intimée lui a opposé, mais non invoquer le fond, à savoir l'existence des conditions justifiant l'octroi d'une autorisation de séjour, des conclusions prises à cet égard n'étant pas recevables (cf. ATF 126 II 377 consid. 8d ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_115/2016 du 31 mars 2016 consid. 5 ; 2C_172/2013 du 21 juin 2013 consid. 1.4 ; 2C_504/2013 du 5 juin 2013 consid. 3).

Si la juridiction de recours retient la survenance d'une modification des circonstances, elle doit renvoyer le dossier à l'autorité intimée, afin que celle-ci le reconsidère (cf. Jacques DUBEY/Jean-Baptiste ZUFFEREY, Droit administratif général, 2014, n. 2148), ce qui n'impliquera pas nécessairement que la décision d'origine sera modifiée (cf. Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 1429 p. 493).

Ainsi, ce n'est pas parce qu'il existe un droit à un nouvel examen de la cause que l'étranger peut d'emblée prétendre à l'octroi d'une nouvelle autorisation. Les raisons qui ont conduit l'autorité à révoquer, à ne pas prolonger ou à ne pas octroyer d'autorisation lors d'une procédure précédente ne perdent pas leur pertinence. L'autorité doit toutefois procéder à une nouvelle pesée complète des intérêts en présence, dans laquelle elle prendra notamment en compte l'écoulement du temps. Il ne s'agit cependant pas d'examiner librement les conditions posées à l'octroi d'une autorisation, comme cela serait le cas lors d'une première demande d'autorisation, mais de déterminer si les circonstances se sont modifiées dans une mesure juridiquement pertinente depuis la révocation de l'autorisation, respectivement depuis le refus de son octroi ou de sa prolongation (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_203/2020 du 8 mai 2020 consid. 4.3 ; 2C_176/2019 du 31 juillet 2019 consid. 7.2 ; 2C_883/2018 du 21 mars 2019 consid. 4.4 ; 2C_556/2018 du 14 novembre 2018 consid. 3 ; 2C_198/2018 du 25 juin 2018 consid. 3.3).

8.             Selon la jurisprudence rendue en matière de police des étrangers, le simple écoulement du temps entre les décisions des autorités ne constitue pas un motif justifiant une reconsidération (arrêts du Tribunal fédéral 2C_38/2008 du 2 mai 2008 consid. 3.4 ; 2A.180/2000 du 14 août 2000 consid. 4c ; cf. aussi arrêt 2A.271/2004 du 7 octobre 2004 consid. 5 et 6; arrêts du Tribunal administratif fédéral C-1545/2008 du 8 juillet 2008 consid. 5 ; C-7483/2006 du 19 juin 2007 consid. 6 ; C-1798/2006 du 15 juin 2007 consid. 6 ; C-273/2006 du 25 avril 2007 consid. 5.3). Autrement dit, on ne saurait voir dans le simple écoulement du temps et dans une évolution normale de l’intégration en Suisse une modification des circonstances susceptibles d’entraîner une reconsidération de la décision incriminée (cf. not. arrêts du Tribunal administratif fédéral F-5003/2019 du 6 avril 2020 consid. 4.3 ; F-2581/2017 du 3 septembre 2018 consid. 3.4 ; F-2638/2017 du 9 novembre 2017 consid. 5.3). Le fait d'invoquer des faits nouveaux résultant pour l'essentiel de l'écoulement du temps, que le recourant a largement favorisé, peut d'ailleurs être reconnu comme un procédé dilatoire (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2A.271/2004 du 7 octobre 2004 consid. 3.3).

Ainsi, bien que l'écoulement du temps et la poursuite d'une intégration socio-professionnelle constituent des modifications des circonstances, ces éléments ne peuvent pas être qualifiés de notables au sens de l'art. 48 al. 1 let. b LPA, lorsqu'ils résultent uniquement du fait que l'étranger ne s'est pas conformé à une décision initiale malgré son entrée en force (ATA/1239/2020 du 8 décembre 2020 consid. 3b ; ATA/539/2020 précité consid. 4b ; ATA/1244/2019 13 août 2019 consid. 5b).

9.             En l'espèce, il convient de déterminer si les circonstances dont le recourant a fait état dans sa demande du 11 juillet 2023 peuvent être considérées, d'une part, comme nouvelles depuis que la décision du 23 septembre 2021 est entrée en force, suite à l’arrêt ATA/875/2002 rendu par la chambre administrative le 30 août 2022 et, d'autre part, comme importantes, une éventuelle réponse positive sur ces deux questions devant amener à l'admission du recours. Le point de comparaison pour en juger est la situation prise en considération dans l’arrêt précité, dès lors que la chambre administrative s'est fondée sur les faits existants au moment de trancher le litige (ATA/1001/2021 du 28 septembre 2021 et réf. cit.).

À cet égard, les seuls éléments invoqués par le recourant dans son recours, sont en lien avec son état de santé. Le recourant a notamment produit un rapport médical établi le 26 mai 2023 par la Dre E______ qui le suit depuis décembre 2020. Selon ce document, le recourant souffre d’une douleur dans le bras droit suite à une blessure par balle subie en 2009 au Nigéria et pour laquelle il avait été suivi aux HUG en 2011. Depuis 2013, il traite son apnée du sommeil au moyen d’un CPAP. Il doit enfin opérer des changements hygiéno-diététiques pour soigner un pré-diabète et contrôler régulièrement sa glycémie. Le pronostic avec ces traitements est bon et rien ne s’oppose à leur poursuite dans son pays d’origine, la seule réserve étant que l’utilisation du CPAP nécessite de l’électricité en continu.

S’agissant des problèmes de santé consécutifs à la blessure par balle, dont le recourant aurait été victime au Nigéria, ils ont déjà été pris en compte dans le cadre des précédentes procédures et la chambre administrative a jugé en dernier lieu (ATA/875/2002 op. cit.) qu’ils ne faisaient pas obstacle à l’exécution de son renvoi. Il n’y a ainsi pas à revenir sur cette question.

Quant aux problèmes d’apnée du sommeil dont souffre le recourant, à tout le moins depuis 2011 (cf. rapport médical des HUG du 21 avril 2011), et qu’il n’invoque pour la première fois que dans le cadre de la présente procédure, il ne s’agit manifestement pas d’un fait nouveau survenu après l’entrée en force de la décision du 23 septembre 2021. En tout état, le recourant traite cette affection au moyen d’un CPAP et il pourra, au besoin, s’équiper d’une batterie portable pour parer à d’éventuelles coupures d’électricité au Nigéria.

Concernant enfin son pré-diabète, même à admettre qu’il s’agisse d’un fait nouveau, il ne peut de toute façon pas être qualifié d’important et le recourant pourra poursuivre, dans son pays d’origine, les seules mesures préconisées à cet égard par la Dre E______, à savoir un changement hygiéno-diététique et des contrôles de la glycémie.

En tout état, ni l’apnée du sommeil ni le pré-diabète dont souffre le recourant ne permettent de retenir une modification notable des circonstances depuis l’entrée en vigueur de la décision du 23 septembre 2021. Il en résulte que, sauf à aboutir à un résultat qu'il s'agit d'éviter, soit permettre au recourant de remettre sans cesse en cause ladite décision, l’autorité intimée était fondée à refuser d’entrer en matière sur cette troisième demande de reconsidération formée le 11 juillet 2023.

10.         Pour le surplus, il n’y a pas lieu de revenir sur les conditions d’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Cette question a également été examinée en dernier lieu par la chambre administrative (ATA/875/2002 op. cit.), étant rappelé qu’elle a retenu à cet égard qu’aucun des critères de l'art. 31 al. 1 OASA n’étaient favorables au recourant.

11.         À toutes fins utiles, le tribunal relèvera qu’une éventuelle amélioration dans la situation socio-professionnelle ou financière du recourant ne serait due qu’à son obstination à violer les décisions de refus et de renvoi prononcées à son encontre, comportement qui ne saurait en aucun cas être récompensé.

Enfin, le recourant a versé à la procédure deux lettre de soutien établies en sa faveur par l’ambassade du Nigéria à Berne, les 29 janvier 2023 et 7 mai 2024, qui ne sont d’aucune aide dans le cadre de la présente procédure.

12.         Entièrement infondé, le recours sera rejeté.

13.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant, qui succombe, est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

14.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 3 novembre 2023 par Monsieur A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 4 octobre 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière