Skip to main content

Décisions | Tribunal administratif de première instance

1 resultats
A/81/2024

JTAPI/682/2024 du 08.07.2024 ( OCPM ) , REJETE

Descripteurs : DROIT D'ÊTRE ENTENDU;AUTORISATION DE SÉJOUR;CAS DE RIGUEUR;VIOLENCE DOMESTIQUE;MAXIME INQUISITOIRE;FARDEAU DE LA PREUVE
Normes : Cst; OLCP.23.al1; LEI.50.al1; LEI.50.al2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/81/2024

JTAPI/682/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 8 juillet 2024

 

dans la cause

 

Madame A______, représentée par Me Michel CELI VEGAS, avocat, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Madame A______, née le ______ 1986, est ressortissante de Bolivie.

2.             Elle est arrivée en Suisse le 15 octobre 2019 pour rejoindre son époux, Monsieur B______, ressortissant espagnol titulaire d’une autorisation de séjour à Genève, avec lequel elle s’était mariée le ______ 2014 en Bolivie, et a été mise au bénéfice d’une autorisation de séjour au titre du regroupement familial, valable jusqu’au 23 août 2023.

3.             Son époux a quitté la Suisse le 1er novembre 2021 pour se rendre en Bolivie.

4.             Par courriel du 30 septembre 2022, l’office cantonal de la population et des migrations (ci‑après : OCPM) a demandé à Mme A______ les raisons de cette séparation de domicile.

5.             Par courrier du 12 octobre 2022, co-signé par son époux, Mme A______ a indiqué à l’OCPM qu’elle formait toujours un couple avec M. B______ mais que ce dernier avait dû s’absenter pour des motifs familiaux et qu’il était revenu en Suisse à la fin du mois de mars 2022. Elle a fourni un contrat de mission temporaire au nom de son époux signé le 12 avril 2022 pour le démontrer.

6.             À teneur du registre Calvin de l’OCPM, M. B______ est domicilié depuis le 19 septembre 2022, date officielle de son retour à Genève, à l’avenue ______[GE].

7.             Par courriel du 21 mars 2023, l’OCPM a demandé à Mme A______ des explications quant au fait qu’elle ne faisait pas ménage commun avec son époux.

8.             Par courrier du 11 avril 2023, Mme A______ a indiqué à l’OCPM qu’elle était séparée de son époux et qu’ils avaient décidé de divorcer.

9.             Le 26 mai 2023, elle a informé l’OCPM avoir mandaté une avocate pour déposer une requête en divorce à Genève.

10.         En juin 2023, Mme A______ a demandé le renouvellement de son autorisation de séjour.

11.         Faisant suite à une demande de renseignements de l’OCPM, M. B______ a confirmé, par courriel du 4 juillet 2023, qu’il était séparé de son épouse depuis son départ de Suisse le 1er novembre 2021 et n’avait plus refait ménage commun avec elle depuis cette date. Il était domicilié à une autre adresse depuis son retour en Suisse le 19 septembre 2022 et leur divorce avait été prononcé en Bolivie par jugement du ______ 2022. Il a transmis une copie du jugement de divorce duquel il ressortait que la séparation du couple remontait à février 2020.

12.         Par courrier du même jour, l’OCPM a informé Mme A______ de son intention de révoquer son autorisation de séjour accordée dans le cadre du regroupement familial et de prononcer son renvoi de Suisse. Un délai de 30 jours lui était accordé pour exercer, par écrit, son droit d’être entendu.

13.         Dans le délai prolongé par l’OCPM au 15 septembre 2023, Mme A______, sous la plume de son conseil, a fait usage de son droit.

Elle s’était établie en Suisse en octobre 2019 et résidait ainsi à Genève depuis presque quatre ans. Elle était financièrement indépendante, n’avait jamais eu de poursuite, ni de condamnations pénales en Suisse et n’avait jamais perçu l’aide sociale. Elle parlait bien le français et avait passé avec succès l’examen FIDE. Son intégration en Suisse était remarquable.

Elle avait été victime de violences conjugales physiques et psychologiques de la part de son ex-époux, lequel avait initié la procédure de divorce en Bolivie sans l’en informer. Ce n’était qu’en entamant les démarches de divorce en Suisse en mars 2023 qu’elle avait appris qu’elle était divorcée. Sa situation devait ainsi s’analyser sous l’angle des raisons personnelles majeures de l’art. 50 al. 1 let. b de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20) et du cas de rigueur de l’art. 30 al. 1 let. b LEI.

Un retour dans son pays d’origine, avec lequel elle n’avait que peu de lien, la placerait dans une situation de précarité, mais également d’injustice, dès lors qu’elle avait fait preuve d’une excellente intégration en Suisse. Après quatre années passées à Genève, elle ne s’identifiait plus à son pays d’origine et sa réintégration y serait impossible.

À l’appui de son courrier, elle a produit plusieurs documents, dont notamment une copie du certificat de mariage avec l’indication du divorce du ______ 2022 délivré par les autorités boliviennes, un extrait du registre des poursuites du 7 juin 2023 attestant qu’elle ne faisait l’objet d’aucune poursuite ni acte de défaut de biens, un extrait vierge de son casier judiciaire, une attestation d’absence d’aide financière de l’Hospice général du 20 juillet 2023, ses contrats de travail et décomptes de salaire, une liste des transferts d’argent effectués depuis la Suisse à destination de la Bolivie entre 2017 et 2023, une attestation des transports publics genevois (ci-après : TPG) du 18 juillet 2023 attestant de l’achat d’abonnements mensuels pour les années 2017 à 2022, une attestation de langues niveau B1 à l’oral de français, ainsi que quatre photographies d’elle présentant un hématome à l’œil gauche.

14.         Par courriel du 9 octobre 2023, l’OCPM a demandé à Mme A______ de transmettre tout justificatif permettant d’étayer les allégations de violences conjugales, tels que la copie de rapports médicaux ou le justificatif de dépôt d’une plainte pénale.

15.         Par courrier du 30 octobre 2023, Mme A______ a indiqué à l’OCPM n’avoir jamais déposé plainte à l’encontre de son époux, par peur.

Elle a transmis la transcription d’une conversation téléphonique qu’elle avait eue avec la police genevoise le 27 mai 2018 vers 1h52, ainsi qu’un résumé de l’histoire de son mariage avec son ex-époux, relatant la situation de souffrance qu’elle avait vécue pendant la vie de couple.

Selon ce document, elle avait épousé son mari en Bolivie le ______ 2014. Ils avaient quitté ce pays en 2016 pour immigrer en Espagne, puis avaient pris la décision de partir à nouveau pour s'installer définitivement à Genève. Avec le temps, leur cohabitation s'était dégradée peu à peu jusqu'à devenir insupportable. Son époux avait envers elle un comportement méprisant, au point qu'elle avait perdu toute confiance en elle. Il se montrait désagréable, cruel, manipulateur et agressif verbalement et physiquement. La toxicité, la jalousie extrême, le chantage émotionnel et la violence faisaient partie de son quotidien et elle vivait dans la menace constante du fait que son mari quitte le foyer familial, car il laissait toujours des valises prêtes. Il lui reprochait, lorsqu'il perdait la raison, d'en être la responsable. Elle était tombée en dépression et avait vécu dans l'anxiété au point d'aller chercher l'aide d'un psychologue. Cependant, son mari n'était pas d'accord avec cette démarche, considérant que le couple ne trouverait pas de solution de cette manière. Malgré la menace d'une dénonciation à la police suite à la première agression physique dont elle avait fait l'objet, le comportement violent de son mari n'avait pas cessé. Elle avait ainsi reçu une deuxième fois des coups au visage et avait été bousculée jusqu'à se retrouver par terre et traînée par les cheveux. Ensuite, elle s'était rendue au poste de police le plus proche pour le dénoncer. Le 27 mai 2018, elle avait ainsi appelé la police au milieu de la nuit. Cependant, la honte d'avoir était battue, la peur de se retrouver seule en Suisse et son absence de titre de séjour l'avait paralysée. Le 11 septembre 2020, elle avait perdu son frère cadet de 28 ans lors d'un accident d'avion. Elle avait été en deuil et son mari ne l'avait pas soutenue, ne montrant ni compassion ni empathie pour elle. Il était d'ailleurs parti du logement commun durant plus de cinq mois, car il ne supportait pas le chagrin de sa femme. À son retour, il lui avait dit qu'il avait changé et qu'elle lui manquait. Malheureusement, cela n'avait pas été le cas, le comportement de son mari ayant empiré. Précipitamment, il avait pris la décision de quitter la Suisse, de rendre son autorisation de séjour et d'annoncer son départ à l'OCPM, pour retourner en Bolivie, son pays d'origine, le 5 novembre 2021. Durant son séjour là-bas, il n'arrêtait pas de lui téléphoner en état d'ébriété, très tard le soir. Cependant, elle ne souhaitait pas parler avec son époux, car elle travaillait au le matin. Il n'avait pas apprécié ces refus et l'avait menacée en lui disant qu'il demanderait le divorce. En mars 2022, il était revenu à Genève sans en informer son épouse. Il était devenu très distant avec elle, au point que la situation ne pouvait plus tenir. Elle avait alors pris la décision d'entamer des démarches pour formaliser la séparation ou le divorce.

16.         Par décision du 21 novembre 2023, l’OCPM a refusé de prolonger l’autorisation de séjour de Mme A______ et prononcé son renvoi de Suisse, lui impartissant un délai au 20 février 2024 pour quitter le territoire.

Divorcée de son époux, l’intéressée ne pouvait plus invoquer les dispositions sur le regroupement familial au sens de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse d'une part, et la Communauté européenne et ses Etats membres, d'autre part, sur la libre circulation des personnes (ALCP - RS 0.142.112.681). De plus, ayant vécu moins de trois années en ménage commun en Suisse, elle ne remplissait pas les conditions relatives à la poursuite de son séjour en Suisse au sens de l’art. 77 al. 1 let. a de l’ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), ceci quand bien même elle avait justifié avoir déployé des efforts en vue de son intégration en Suisse.

Elle n’avait pas non plus démontré avoir été victime de violences conjugales revêtant l’intensité et le caractère systématique détaillés dans la jurisprudence et permettant la reconnaissance de ces faits au sens de l’art. 77 al. 1 le.t b OASA.

Enfin, ayant démontré une résidence usuelle en Suisse depuis le mois de mars 2017, elle ne pouvait se prévaloir que d’un peu plus de six ans et demi de séjour en Suisse et n’avait par conséquent pas démontré remplir les conditions de reconnaissance d’un cas personnel d’extrême gravité.

17.         Par acte du 8 janvier 2024, Mme A______, sous la plume de son conseil, a formé recours contre la décision précitée auprès du Tribunal administratif de première instance (ci‑après : le tribunal), concluant, principalement, à son annulation et à l’octroi d’une autorisation de séjour pour cas de rigueur, subsidiairement, au renvoi du dossier à l’OCPM pour nouvelle décision, sous suite de frais et dépens. Préalablement, elle sollicitait son audition.

Elle était arrivée en Suisse en octobre 2019, suite à son mariage avec son ex-époux, avec lequel elle avait été mariée du ______ 2014 au ______ 2022. Avec le temps, leur union avait viré au cauchemar : elle avait été victime de violences physiques et psychologiques de sa part et manipulée par ce dernier. Celui-ci avait quitté la Suisse le 1er novembre 2021 pour la Bolivie, où il avait déposé une demande de divorce. Elle n’était pas au courant de cette procédure et le divorce avait été prononcé le ______ 2022.

Elle remplissait les conditions de l’art. 50 al. 1 LEI pour le renouvellement de son autorisation de séjour, compte tenu de la situation de détresse et de violences qu’elle avait vécue. Elle avait par ailleurs été mariée plus de trois ans et remplissait les critères d’intégration mentionnés à l’art. 58a LEI.

Elle remplissait également toutes les conditions du cas de rigueur. Elle n’avait jamais commis d’infraction, ne faisait l’objet d’aucune poursuite, maitrisait le français et était très bien intégrée, tant professionnellement que socialement. Travaillant dans l’économie domestique et en bonne santé, elle était indépendante financièrement et n’avait jamais bénéficié de l’aide sociale. Après presque quatre ans passés à Genève, elle ne s’identifiait plus à son pays d’origine et sa réintégration en Bolivie, pays avec lequel elle n’avait que peu de lien, serait impossible. En cas de renvoi, elle se retrouverait complétement coupée du nouveau lieu de vie qu’elle s’était créé à Genève et en situation de précarité.

18.         Le 8 mars 2024, l’OCPM a produit son dossier, accompagné de ses observations. Il a conclu au rejet du recours.

La recourante ne semblait pas contester que les conditions qui avaient prévalu à la délivrance de son autorisation de séjour délivrée dans le cadre du regroupement familial avec son ex-époux n’étaient plus réalisées.

Elle était arrivée en Suisse le 15 octobre 2019 afin de rejoindre son ex-époux, mais ce dernier avait quitté le territoire le 1er novembre 2021 pour se rendre en Bolivie. Depuis cette date, il n’avait plus repris domicile avec la recourante. La durée des trois ans de vie commune en Suisse n’était donc pas réalisée. S’agissaient des allégations de violences conjugales, elles n’étaient accompagnées d’aucune pièce déterminante et ne pouvaient dont être retenues en l’état, étant relevé que ces violences se devaient d’atteindre un certain seuil en intensité.

Enfin, s’agissant de la reconnaissance d’un cas de rigueur, la durée de séjour de la recourante, d’un peu plus de six ans, et son intégration en Suisse ne sauraient être considérées comme suffisantes à cette fin, l’intéressée n’ayant en outre pas démontré qu’un retour en Bolivie aurait pour conséquence de l’exposer à des conditions socioéconomiques ou sanitaires autrement plus difficiles que celles auxquelles étaient confrontés la plupart de ses compatriotes restés au pays, ce d’autant qu’elle était encore jeune et en bonne santé.

19.         La recourante n’a pas fait usage de la possibilité de répliquer qui lui a été offerte par le tribunal.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'office cantonal de la population et des migrations relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

4.             Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

5.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

6.             Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l'autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l'établissement des faits ; il incombe à celles-ci d'étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu'il s'agit d'élucider des faits qu'elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1 ; 2C_1156/2018 du 12 juillet 2019 consid. 3.3 et les arrêts cités). En matière de droit des étrangers, l'art. 90 LEI met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l'étranger ou des tiers participants (ATF 142 II 265 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1 ; 2C_323/2018 du 21 septembre 2018 consid. 8.3.3 ; 2C_767/2015 du 19 février 2016 consid. 5.3.1).

Lorsque les preuves font défaut ou s'il ne peut être raisonnablement exigé de l'autorité qu'elle les recueille pour les faits constitutifs d'un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit (cf. ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_27/2018 du 10 septembre 2018 consid. 2.2 ; 1C_170/2011 du 18 août 2011 consid. 3.2 et les références citées ; ATA/99/2020 du 28 janvier 2020 consid. 5b). Il appartient ainsi à l'administré d'établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage et à l'administration de démontrer l'existence de ceux qui imposent une obligation en sa faveur (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4a ; ATA/1155/2018 du 30 octobre 2018 consid. 3b et les références citées).

7.             Par ailleurs, en procédure administrative, tant fédérale que cantonale, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 2ème phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; 130 II 482 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_668/2011 du 12 avril 2011 consid. 3.3 ; ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n'est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/978/2019 du 4 juin 2019 consid. 4b et les arrêts cités).

8.             À titre préalable, la recourante a sollicité son audition.

9.             Le droit d’être entendu garanti par l’art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) comprend notamment le droit, pour l’intéressé, de s’exprimer sur les éléments pertinents avant qu’une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d’avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d’obtenir qu’il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l’administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s’exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités). Ce droit ne s’étend toutefois qu’aux éléments pertinents pour décider de l’issue du litige et le droit de faire administrer des preuves n’empêche pas le juge de renoncer à l’administration de certaines preuves offertes et de procéder à une appréciation anticipée de ces dernières, en particulier s’il acquiert la certitude que celles-ci ne l’amèneront pas à modifier son opinion ou si le fait à établir résulte déjà des constatations ressortant du dossier (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; 138 III 374 consid. 4.3.2 ; 134 I 140 consid. 5.3).

Le droit d'être entendu ne comprend pas celui d'être entendu oralement (cf. not. art. 41 in fine LPA ; ATF 140 I 68 consid. 9.6.1 ; 134 I 140 consid. 5.3 ; 130 II 425 consid. 2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_668/2020 du 22 janvier 2021 consid. 3.3 ; 2C_339/2020 du 5 janvier 2021 consid. 4.2.2 ; ATA/672/2021 du 29 juin 2021 consid. 3b).

10.         En l’espèce, le tribunal estime que le dossier contient les éléments suffisants et nécessaires, tels qu’ils ressortent des écritures des parties, des pièces produites et du dossier de l’autorité intimée, pour statuer sur le litige sans qu’il soit utile de procéder à l’audition de la recourante. Cette dernière a d’ailleurs a eu la possibilité de faire valoir ses arguments dans le cadre de la procédure de recours, de répondre aux arguments de l’autorité intimée et de produire tout moyen de preuve utile en annexe de ses écritures, sans expliquer en quoi son audition s'avérerait plus utile.

Parant, il n’y a pas lieu de procéder à son audition, cette mesure d’instruction n’étant au demeurant pas obligatoire.

11.         La LEI et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’OASA, règlent l’entrée, le séjour et la sortie de Suisse des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), dont l’ALCP.

L’ALCP et l’ordonnance sur l’introduction progressive de la libre circulation des personnes entre, d’une part, la Confédération suisse et, d’autre part, la Communauté européenne et ses États membres, ainsi qu’entre les États membres de l’Association européenne de libre-échange du 22 mai 2002 (OLCP - RS 142.203) s’appliquent en premier lieu aux ressortissants des pays membres de l’Union européenne et aux membres de leur famille, la LEI ne s’appliquant à eux que pour autant que ses dispositions soient plus favorables que celles de l’ALCP et si ce dernier ne contient pas de dispositions dérogatoires (art. 12 ALCP et 2 al. 2 LEI).

12.         Le conjoint d’une personne ressortissant d’une partie contractante ayant un droit de séjour a le droit de s’installer avec elle (art. 7 let. d ALCP et art. 3 par. 1 et 2 de l’annexe I ALCP).

13.         Selon l’art. 23 al. 1 OLCP, les autorisations de séjour de courte durée, de séjour et frontalières UE/AELE peuvent être révoquées ou ne pas être prolongées si les conditions requises pour leur délivrance ne sont plus remplies (ATF 139 II 393 consid. 2.1).

14.         En vertu de leur caractère dérivé, les droits liés au regroupement familial n’ont pas d’existence propre mais dépendent des droits originaires dont ils sont issus. Le droit de séjour du conjoint du ressortissant UE/AELE détenteur du droit originaire n’existe par conséquent qu’autant et aussi longtemps que les époux sont mariés et que le détenteur du droit originaire séjourne en Suisse au titre de l’ALCP. Ainsi, le droit de séjour du conjoint du ressortissant UE/AELE s’éteint en cas de dissolution du mariage (Directives et commentaires concernant l’ordonnance sur la libre circulation des personnes, janvier 2024 [ci-après : Directives OLCP], ch. 7.4.2 et 7.4.3).

La poursuite du séjour après la dissolution du mariage (décès ou divorce) du conjoint ressortissant d’un État non-membre de l’UE ou de l’AELE est régie par les dispositions de la LEI et ses ordonnances d’exécution (ATF 144 II 1 cons. 4.7 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_649/2022 du 14 février 2023 consid. 5.1 ; directives OLCP, ch. 7.4.3).

15.         En l’occurrence, la recourante ne peut plus se prévaloir de l’ALCP, dès lors qu’elle est divorcée de M. B______, ressortissant espagnol, depuis le ______ 2022. La question de son séjour en Suisse est ainsi réglée par la LEI et ses ordonnances d’exécution.

16.         Selon l’art. 50 al. 1 LEI, après dissolution de la famille, le droit du conjoint et des enfants à l’octroi d’une autorisation de séjour et à la prolongation de sa durée de validité en vertu des art. 42 et 43 LEI subsiste lorsque l’union conjugale a duré au moins trois ans et l’intégration est réussie (let. a) ou lorsque la poursuite du séjour en Suisse s’impose pour des raisons personnelles majeures (let. b).

Cette disposition concerne les étrangers qui sont séparés de ressortissants suisses ou d’étrangers au bénéfice d’une autorisation d’établissement. Elle peut toutefois également être invoquée par l’ex-conjoint d’un ressortissant de l’Union européenne titulaire d’une autorisation de séjour UE/AELE (et non d’une autorisation d’établissement), pour autant que celui-ci puisse encore se prévaloir d’un droit de séjour en Suisse (ATF 144 II 1 consid. 4.7 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_649/2022 du 14 février 2023 consid. 5.1).

17.         Les deux conditions posées par l’art. 50 al. 1 let. a LEI sont cumulatives (ATF 140 II 345 consid. 4). De jurisprudence constante, le calcul de la période minimale de trois ans commence à courir dès le début de la cohabitation effective des époux en Suisse et s’achève au moment où ceux-ci cessent de faire ménage commun (ATF 140 II 345 consid. 4.1) ; peu importe combien de temps le mariage perdure encore formellement par la suite (ATF 136 II 113 consid. 3.2 et 3.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_980/2014 du 2 juin 2015 consid. 3.1). Cette durée minimale est une limite absolue en-deçà de laquelle l’art. 50 al. 1 let. a LEI ne saurait être appliqué (ATF 137 II 345 consid. 3.1.3).

18.         En l’espèce, il est manifeste que la période de l’union conjugale pendant laquelle la recourante a fait ménage commune en Suisse, en prenant en considération la date de son arrivée en Suisse le 15 octobre 2019 pour y rejoindre son ex-époux et celle où celui-ci a quitté le pays pour se rendre en Bolivie le 1er novembre 2021, a duré moins de trois ans.

Ainsi, dans la mesure où les deux conditions posées par l’art. 50 al. 1 let. a LEI sont cumulatives et que la première d’entre elles n’est pas remplie, il n’y a pas lieu d’examiner si l’intégration de la recourante est réussie. Cette dernière ne peut ainsi déduire aucun droit de l’art. 50 al. 1 let. a LEI.

19.         La recourante ne pouvant déduire aucun droit de l’art. 50 al. 1 let. a LEI, il convient d’examiner si la poursuite de son séjour en Suisse s'imposerait pour des raisons personnelles majeures.

20.         L’art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI permet au conjoint étranger de demeurer en Suisse après la dissolution de l’union conjugale, lorsque la poursuite de son séjour s’impose pour des raisons personnelles majeures. Les raisons personnelles majeures, visées à l’al. 1 let. b, sont notamment données lorsque le conjoint est victime de violence conjugale, que le mariage a été conclu en violation de la libre volonté d’un des époux ou que la réintégration sociale dans le pays de provenance semble fortement compromise (art. 77 OASA, qui reprend la teneur de l’art. 50 al. 2 LEI).

Cette disposition vise à régler les situations qui échappent aux dispositions de l’art. 50 al. 1 let. a LEI, soit parce que le séjour en Suisse durant le mariage n’a pas duré trois ans ou parce que l’intégration n’est pas suffisamment accomplie ou encore parce que ces deux aspects font défaut, mais que - eu égard à l’ensemble des circonstances - l’étranger se trouve dans un cas de rigueur après la dissolution de la famille. À cet égard, c’est la situation personnelle de l’intéressé qui est décisive et non l’intérêt public que revêt une politique migratoire restrictive. Il s’agit par conséquent uniquement de décider du contenu de la notion juridique indéterminée « raisons personnelles majeures » et de l’appliquer au cas d’espèce, en gardant à l’esprit que l’art. 50 al. 1 let. b LEI confère un droit à la poursuite du séjour en Suisse (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_112/2020 du 9 juin 2020 consid. 4.1 et les références ; ATA/1333/2021 du 7 décembre 2021 consid. 6c).

Comme il s’agit de cas de rigueur survenant à la suite de la dissolution de la famille, en relation avec l’autorisation de séjour découlant du mariage, les raisons qui ont conduit à sa dissolution revêtent de l’importance. L’admission d’un cas de rigueur personnel survenant après la dissolution de la communauté conjugale suppose que, sur la base des circonstances d’espèce, les conséquences pour la vie privée et familiale de la personne étrangère liées à ses conditions de vie après la perte du droit de séjour découlant de la communauté conjugale soient d’une intensité considérable (cf. ATF 138 II 393 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1111/2015 du 9 mai 2016 consid. 5.2).

21.         Si la violence conjugale au sens de l’al. 1 let. b et de l’art. 50 al. 2 LEI, est invoquée, les autorités compétentes peuvent demander des preuves. Sont notamment considérés comme indices de violence conjugale : a) les certificats médicaux, b) les rapports de police, c) les plaintes pénales, d) les mesures au sens de l’art. 28b du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) et e) les jugements pénaux prononcés à ce sujet (art. 77 al. 5 et 6 OASA). Les autorités compétentes tiennent aussi compte des indications et des renseignements fournis par des services spécialisés (art. 77 al. 6bis OASA).

22.         L’octroi d’un droit de séjour en faveur de victimes de violences conjugales a pour but d’empêcher qu’une personne faisant l’objet de violences conjugales poursuive la communauté conjugale pour des motifs liés uniquement au droit des migrations, quand bien même le maintien de celle-ci n’est objectivement plus tolérable de sa part, dès lors que la vie commune met sérieusement en péril sa santé physique ou psychique (ATF 138 II 229 consid. 3.1 et 3.2). Lorsqu’une séparation se produit dans une telle constellation, le droit de séjour qui était originairement dérivé de la relation conjugale se transforme en un droit de séjour propre (ATA/1333/2021 du 7 décembre 2021 consid. 7b).

23.         Selon la jurisprudence, il convient de prendre au sérieux toute forme de violence conjugale, qu’elle soit physique ou psychique. La violence conjugale, qui doit revêtir une certaine intensité, constitue une maltraitance systématique ayant pour but d’exercer pouvoir et contrôle sur celui qui la subit (ATF 138 II 229 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1085/2017 du 22 mai 2018 consid. 3.1). À l’instar de violences physiques, seuls des actes de violence psychique d’une intensité particulière peuvent justifier l’application de l’art. 50 al. 1 let. b LEI (ATF 138 II 229 consid. 3.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_201/2019 du 16 avril 2019 consid. 4.1). Lorsque des contraintes psychiques sont invoquées, il incombe à la personne d’illustrer de façon concrète et objective, ainsi que d’établir par preuves le caractère systématique de la maltraitance, respectivement sa durée, ainsi que les pressions subjectives qui en résultent. Des affirmations d’ordre général ou des indices faisant état de tensions ponctuelles sont insuffisants (ATF 138 II 229 consid. 3.2.3 ; ATA/1333/2021 du 7 décembre 2021 consid. 7d).

24.         Des insultes proférées à l’occasion d’une dispute, une gifle assénée, le fait pour un époux étranger d’avoir été enfermé une fois dehors par son conjoint ne sont pas assimilés à la violence conjugale au sens de l’art. 50 al. 2 LEI. En effet, sans que cela ne légitime en rien la violence conjugale, n’importe quel conflit ou maltraitance ne saurait justifier la prolongation du séjour en Suisse, car telle n’était pas la volonté du législateur, ce dernier ayant voulu réserver l’octroi d’une autorisation de séjour aux cas de violences conjugales atteignant une certaine gravité ou intensité (ATA/1333/2021 du 7 décembre 2021 consid. 7e et les références citées). La jalousie d’un conjoint ou la menace de dénonciation ne constituent pas non plus une oppression psychique au sens de l’art. 50 al. 2 LEI (ATF 140 II 289 consid. 4).

25.         La personne étrangère qui soutient, en relation avec l’art. 50 al. 1 let. b et al. 2 LEI, avoir été victime de violences conjugales est soumise à un devoir de coopération accru. Il lui appartient de rendre vraisemblable, par des moyens appropriés, la violence conjugale, respectivement l’oppression domestique alléguée. En particulier, il lui incombe d’illustrer de façon concrète et objective, ainsi que d’établir par preuves le caractère systématique de la maltraitance, respectivement sa durée, ainsi que les pressions subjectives qui en résultent (art. 77 al. 6 et al. 6 bis OASA ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_68/2017 du 29 novembre 2017 consid. 5.4.1). L’art. 50 al. 2 LEI n’exige toutefois pas la preuve stricte de la maltraitance, mais se contente d’un faisceau d’indices suffisants (arrêts du Tribunal fédéral 2C_593/2019 du 11 juillet 2019 consid. 5.2 ; 2C_196/2014 du 19 mai 2014 consid. 3.4) respectivement d’un degré de vraisemblance, sur la base d’une appréciation globale de tous les éléments en présence (ATF 142 I 152 consid. 6.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_671/2017 du 29 mars 2018 consid. 2.3). Ainsi, selon le degré de preuve de la vraisemblance, il suffit que l’autorité estime comme plus probable la réalisation des faits allégués que la thèse contraire (ATA/1333/2021 du 7 décembre 2021 consid. 7f).

26.         Lors de l’examen des raisons personnelles majeures au sens de l’art. 50 al. 1 let. b LEI, les critères énumérés à l’art. 31 al. 1 OASA peuvent entrer en ligne de compte, même si, considérés individuellement, ils ne sauraient fonder un cas individuel d’une extrême gravité (ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_822/2013 du 25 janvier 2014 consid. 5.2 ; ATA/1333/2021 du 7 décembre 2021 consid. 7g).

27.         S’agissant de la réintégration sociale dans le pays de provenance, la question n’est pas de savoir s’il est plus facile pour la personne concernée de vivre en Suisse, mais uniquement d’examiner si, en cas de retour dans le pays d’origine, les conditions de la réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l’étranger, seraient gravement compromises (cf. ATF 138 II 229 consid. 3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_112/2020 du 9 juin 2020 consid. 5.1). Le simple fait que l’étranger doive retrouver des conditions de vie qui sont usuelles dans son pays de provenance ne constitue pas une raison personnelle majeure au sens de l’art. 50 LEI, même si ces conditions de vie sont moins avantageuses que celles dont cette personne bénéficie en Suisse (arrêt du Tribunal fédéral 2C_112/2020 du 9 juin 2020 consid. 5.1 et les références).

Par ailleurs, la personne qui fait valoir que sa réintégration sociale risque d’être fortement compromise en cas de retour dans son pays est tenue de collaborer à l’établissement des faits. De simples déclarations d’ordre général ne suffisent pas ; les craintes doivent se fonder sur des circonstances concrètes (ATF 138 II 229 consid. 3.2.3).

La question de l’intégration de la personne concernée en Suisse n’est pas déterminante au regard des conditions de l’art. 50 al. 1 let. b LEI, qui ne s’attache qu’à l’intégration - qui doit être fortement compromise - qui aura lieu dans le pays d’origine (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_145/2019 du 24 juin 2019 consid. 3.7 et les arrêts cités ; 2C_1003/2015 du 7 janvier 2016 consid. 4.4).

28.         En l’espèce, la recourante fait valoir qu’elle a été victime de violences physiques et psychologiques de la part de son ex-époux. À l’appui de ses allégués, elle a produit des photographies en noir et blanc de son visage présentant un hématome à l’œil gauche, étant précisé que ces photographies sont de piètre qualité et non datée. Elle a également produit la transcription d’une conversation téléphonique qu’elle a eue avec la police genevoise le 27 mai 2018 à 1h52 où elle expose avoir été frappée à deux reprises par son époux, ainsi qu’un résumé de l’histoire de son mariage où elle évoque les éléments constituant selon elle une situation de violence conjugale. Indépendamment de la force probante qu'il convient d'accorder à un document rédigé par la propre main de la recourante, il en découle que l'épisode de violence qui l'a amenée à s'adresser à la police s'est déroulé en 2018. Selon le récit qu'en fait la recourante, cet épisode apparaît comme le point d'orgue d'une violence qui durant déjà depuis un certain temps, mais il n'apparaît pas clairement que celle-ci se serait poursuivie au-delà. En effet, le récit passe ensuite directement au moment du décès du frère de la recourante en septembre 2020, sans aucune mention des violences qu'elle aurait éventuellement encore endurées dans cet intervalle de deux ans. Il apparaît plutôt que le grief qu'elle a à adresser à son ex-époux à cette époque de leur vie conjugale est son manque d'empathie et de soutien durant le deuil qu'elle a alors traversé, abandon qui se traduit même physiquement par le départ de l'intéressé hors du domicile du couple durant cinq mois. L'allusion au fait que le comportement de son mari aurait empiré lors de son retour est extrêmement vague et ne saurait en tout état permettre de retenir à satisfaction de droit un exercice de la violence correspondant aux exigences de la jurisprudence.

Enfin, le tribunal relèvera qu'en tout état, le ménage commun de la recourante avec son époux a pris fin non pas parce qu'elle-même ne pouvait plus supporter la violence dont elle dit avoir été victime, mais par l'abandon de son ex-époux, parti en Bolivie en novembre 2021 et revenu à Genève en mars 2022 sans en informer la recourante. Toujours selon son récit, c'est au motif que son ex-époux était alors devenu très distant avec elle qu'elle avait pris la décision de se séparer. Il n'y a par conséquent pas de lien de cause à effet entre cette décision et les violences alléguées par la recourante, qui n'a apparemment décidé de mettre fin à son union conjugale qu'en raison du comportement distant de son époux.

Quoi qu'il en soit, sur le plan strict des preuves ou indices de l'existence de la violence, les éléments du dossier ne font pas apparaître que les atteintes subies revêtiraient le degré de gravité exigé par la loi et la jurisprudence pour que la poursuite de son séjour en Suisse s’impose.

Pour le surplus, aucun élément ne permet de démontrer que la réintégration sociale de la recourante dans son pays d’origine serait fortement compromise. Arrivée en Suisse à l’âge de 33 ans, elle a passé en Bolivie toute son enfance et son adolescence, périodes déterminantes pour la formation de la personnalité, ainsi qu’une partie de sa vie d’adulte. Elle en connaît les us et les coutumes, en maîtrise la langue et y a certainement conservé des attaches, tant socioculturelles que familiales, susceptibles de faciliter sa réintégration. D’ailleurs, au vu des transferts réguliers d’argent qu’elle a effectué depuis la Suisse à destination de la Bolivie, notamment en faveur de personnes portant les noms de C______, A______ et D______, il est manifeste qu’elle a gardé des liens avec des membres de sa famille et/ou des connaissances vivant dans ce pays. Âgée de 38 ans – et donc encore jeune – et en bonne santé, elle pourra en outre mettre à profit dans son pays l'expérience professionnelle et les connaissances linguistiques qu'elle a acquises en Suisse, ce qui devrait également faciliter sa réintégration socio-professionnelle dans sa patrie. Le fait qu’elle ne retrouvera sans doute pas le même niveau de vie dans son pays d’origine que celui dont elle bénéficie actuellement en Suisse n’est pas pertinent au regard des critères rappelés ci-dessus. Enfin, la recourante n’a pas démontré qu’elle se serait créée des attaches profondes avec la Suisse.

29.         Au vu de ce qui précède et étant rappelé que la question n'est pas de savoir s'il est plus facile pour la recourante de vivre en Suisse mais uniquement d'examiner si sa réintégration sociale serait gravement compromise en cas de retour dans son pays d’origine, le tribunal constate que ladite réintégration n’apparait pas compromise au point de nécessiter la délivrance d'une autorisation de séjour pour raisons personnelles majeures.

Par conséquent, c'est à juste titre que l’OCPM a refusé de renouveler l’autorisation de séjour de la recourante sur la base de l'art. 50 al. 1 let. b LEI.

30.         Dans ces conditions, et pour le surplus, on ne saurait non plus parvenir à la conclusion que la recourante se trouverait dans un cas individuel d'une extrême gravité au sens des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-6778/2011 du 13 janvier 2014 consid. 10.4 ; C-6133/2008 du 15 juillet 2011 consid. 8.3), qu'elle ne peut de toute façon pas invoquer, du fait qu'elle a déjà été exemptée des mesures de limitation suite à son mariage (cf. ATA/81/2018 du 30 janvier 2018).

31.         Selon l’art. 64 al. 1 let. c LEI, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l’encontre d’un étranger auquel une autorisation est refusée ou dont l’autorisation, bien que requise, est révoquée ou n’est pas prolongée après un séjour autorisé.

32.         Le renvoi constitue la conséquence logique et inéluctable du rejet d’une demande tendant à la délivrance ou la prolongation d’une autorisation de séjour, l’autorité ne disposant à ce titre d’aucun pouvoir d’appréciation (ATA/1118/2020 du 10 novembre 2020 consid. 11a).

33.         La recourante n’obtenant pas la prolongation de son autorisation de séjour, c’est également à bon droit que l’autorité intimée a prononcé son renvoi de Suisse. Il n’apparaît en outre pas que l’exécution de cette mesure ne serait pas possible, serait illicite ou qu’elle ne pourrait être raisonnablement exigée au sens de l’art. 83 LEI.

34.         Mal fondé, le recours sera rejeté.

35.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais du même montant versée à la suite du dépôt du recours. Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

36.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.

 


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 8 janvier 2024 par Madame A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 21 novembre 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

Le président

Olivier BINDSCHEDLER TORNARE

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière