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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2722/2023

JTAPI/588/2024 du 18.06.2024 ( OCPM ) , REJETE

ATTAQUE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2722/2023

JTAPI/588/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 18 juin 2024

 

dans la cause

 

Madame A______, représentée par Me Roxane SHEYBANI, avocate, avec élection de domicile

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS

 


EN FAIT

1.             Madame A______, née B______ le ______ 1985, est ressortissante brésilienne.

2.             Entrée en Suisse le 5 septembre 2005, elle a été mise au bénéfice d’une autorisation de séjour pour études.

3.             Le 1er octobre 2010 elle a épousé à Genève Monsieur C______, ressortissant d’Argentine et d’Italie né le ______ 1984, au bénéfice d’une autorisation de séjour. Trois enfants sont issus de leur union : D______, E______ et F______, nés respectivement les ______ 2014, ______ 2016 et ______ 2019, à Genève.

4.             Suite à son mariage, Mme A______ a été mise au bénéfice d’une autorisation de séjour au titre du regroupement familial. M. C______, quant à lui, a obtenu une autorisation d’établissement à compter du 25 octobre 2014, dont la validité a été prolongée pour une période de cinq ans le 25 octobre 2019.

5.             Le 28 janvier 2021, l’employeur de M. C______, une banque privée genevoise, a déposé en sa faveur une demande pour frontalier, indiquant qu’il était domicilié G______ 1______, à H______, en France voisine.

6.             Par lettre du 4 février 2021 adressée aux époux, une régie genevoise a déclaré accepter et enregistrer définitivement leur résiliation du contrat de bail concernant l’appartement sis I______(France) 2______

7.             Le 6 août 2021, Mme A______ a saisi l'OCPM d’une demande d’autorisation d’établissement, indiquant vivre à l’adresse de l’appartement précité. Le 1er novembre 2021, l’OCPM lui a délivré cette autorisation.

8.             Le 13 décembre 2021, Mme A______ a déposé auprès du Tribunal de première instance genevois (ci-après : TPI) une requête de mesures protectrices de l’union conjugale, assortie de conclusions prises à titre superprovisionnel.

Elle a sollicité l’autorisation de vivre séparément de son époux, la garde exclusive des trois enfants avec octroi d’un droit de visite usuel à son époux et la condamnation de ce dernier à des versements de contributions d'entretien.

9.             Le 21 décembre 2021, M. C______ a informé l’OCPM que son épouse ne voulait pas signer la déclaration de départ, quand bien même elle habitait en France, dans la mesure où elle voulait obtenir une autorisation d’établissement.

10.         Le 27 décembre 2021, M. C______ a présenté une assignation en divorce auprès du Tribunal judiciaire de J______.

11.         Par ordonnance du 27 janvier 2022, cette juridiction s’est déclarée compétente, rejetant l’exception d’incompétence soulevée par Mme A______, retenant à cet égard les éléments suivants :

Avant le 11 décembre 2021, les deux époux vivaient ensemble avec leurs enfants dans une maison située 1______ G______ sur la commune de H______. Cette maison, acquise le 8 janvier 2013, soit avant la naissance du premier enfant du couple, appartenait à une société civile immobilière constituée notamment par les deux époux. A______ qualifiait ce logement de résidence secondaire mais était dans l’incapacité de communiquer l’adresse de la prétendue résidence principale de la famille qui se situerait en Suisse. Après avoir quitté ce logement le 11 décembre 2021, elle n’avait eu d’autre choix que de solliciter un hébergement en foyer, ce qui démontrait l’absence de tout autre logement de la famille sur le territoire suisse. Le bien immobilier situé sur la commune de H______ était le logement de la famille depuis plus de six ans et il avait certainement été acquis par les deux époux en vue de leur projet parental. Les enfants étaient nés dans une maternité située dans la ville de Genève mais avaient exclusivement vécu dans ce logement. Les époux avaient conservé leurs centres d’intérêt professionnels, sociaux et amicaux sur la ville de Genève mais ils avaient choisi de s’installer dans la partie française de l’agglomération genevoise et il ne saurait être prétendu que leur présence en France serait intermittente, occasionnelle ou contrainte et qu’ils n’auraient aucun lien avec ce pays. Le fait qu’ils aient eu le projet de déménager dans la partie suisse de l’agglomération, à le supposer établi, était indifférent quant à la détermination de la résidence habituelle. Jusqu’au départ de Mme A______ les enfants avaient toujours habité avec leurs deux parents sur la commune de H______. C’était en ce lieu qu’ils s’étaient principalement établis et avaient exercé et développé leurs liens d’affection avec leurs père et mère et entre eux. C’était également en ce lieu que les trois enfants mangeaient, jouaient et dormaient de manière habituelle. Ils y fréquentaient régulièrement leurs grands-parents paternels. Les deux aînés étaient certes scolarisés dans un établissement situé en Suisse et leur suivi médical s’effectuaient auprès de professionnels de santé exerçant dans ce même pays mais la résidence habituelle des enfants ne saurait être fixée en considération du seul critère du lieu de scolarisation, ce d’autant que le dernier enfant n’était pas encore en âge d’être scolarisé. Les liens sociaux des enfants extérieurs à la famille n’étaient pas exclusivement tournés vers la Suisse puisqu’il ressortait d’une pièce du dossier que les deux aînés étaient licenciés pour la saison 2021-2022 au club de football K______. La résidence habituelle des deux époux et des trois enfants était donc située en France jusqu’au départ de Mme A______ avec tous les enfants le 11 décembre 2021. Si le TPI avait retenu sa compétence et statué sur les mesures superprovisionnelles sollicitées par Mme A______, cette décision, prise sur requête dans le cadre d’une procédure d’urgence, sans débat contradictoire et sur la base d’un examen superficiel de la compétence du TPI, ne saurait être interprétée comme déniant toute compétence aux juridictions françaises sur les questions de responsabilité parentale.

Au surplus, le Tribunal judiciaire de J______ a autorisé les époux à résider séparément, a attribué la jouissance du domicile conjugal à M. C______, a constaté que l’autorité parentale était exercée en commun par les deux parents à l’égard de leurs enfants mineurs, a fixé la résidence habituelle des enfants au domicile de M. C______ et a organisé le droit de visite de Mme A______.

12.         Par jugement du ______ 2022, le TPI a déclaré la requête de Mme A______ du 13 décembre 2021 irrecevable.

Il a retenu, dans la partie en fait, que les parties et leurs enfants vivaient depuis de nombreuses années à H______ dans un logement qualifié de résidence secondaire par Mme A______, que cette dernière avait laissé entendre qu’un appartement sis L______ 2______ à Genève, constituait leur résidence principale alors que cet appartement n’avait en réalité plus jamais été occupé par la famille depuis le départ en France. Les enfants D______ et E______ étaient scolarisés dans une école sise à N______ tandis que F______ n’était pas scolarisé ni inscrit en crèche. Mme A______ avait reconnu que, lorsqu’elle n’était pas à Genève avec F______ pour ses rendez-vous médicaux ou pour emmener et récupérer ses frères à l’école, elle s’en occupait dans le logement de H______.

Le TPI a ensuite considéré, en droit, que les parties et leurs enfants n’avaient pas encore une résidence habituelle différente lorsque la requête du 13 décembre 2021 avait été déposée. La question de sa compétence territoriale avait été gardée à juger. La résidence ne pouvait pas revêtir le qualificatif d'« habituel » lorsqu’elle avait été constituée deux jours avant le dépôt de la requête, a fortiori lorsque le nouveau lieu de vie de la personne concernée était un foyer dans lequel elle n’avait logiquement, pas l’intention de rester durablement. Il a ainsi retenu que la résidence habituelle des cinq membres de la famille était en France.

13.         Par arrêt du ______ 2022, la chambre civile de la Cour de justice a confirmé ce jugement, retenant en particulier ce qui suit.

Les époux et leurs enfants avaient, antérieurement à la séparation (intervenue en décembre 2021), leur domicile et leur résidence habituelle en France. C’était en effet dans la maison de H______ que la famille se retrouvait en fin de journée et passait les nuits de la semaine, comme celles de nombreux week-ends. A l'évidence, cette maison ne pouvait être qualifiée de simple résidence secondaire ni de « dortoir », comme le soutenait Mme A______. Celle-ci avait notamment reconnu qu'elle passait son temps dans ladite maison, et non dans l’appartement genevois du couple, lorsqu'elle n'accompagnait pas les enfants à l’école, chez le médecin ou dans leurs activités extrascolaires en Suisse. L'existence de tels liens ou attaches avec Genève ne suffisait pas à y créer ou à y maintenir un centre de vie effectif, et donc une résidence habituelle, compte tenu du mode de vie frontalier adopté par les époux et leurs enfants. Le seul fait que la famille eût pu avoir l'intention, non reconnaissable par des tiers, de (re)venir s'établir à terme dans le canton de Genève, à condition qu’elle y trouve un logement d'une taille suffisante, n’était pas davantage déterminant. Il était également sans incidence que Mme A______ et les enfants puissent être considérés comme résidant de longue date dans le canton par la police des étrangers, un tel avis pouvant s’expliquer par le fait que les époux avaient vraisemblablement omis d'annoncer leur départ pour la France après leur acquisition de la maison familiale de H______ et qu'elles avaient apparemment conservé une adresse dans le canton pour des raisons administratives, notamment grâce à leur appartement de la L______, alors qu'elles n'y résidaient plus effectivement.

La venue de Mme A______ et des enfants en Suisse le 11 décembre 2021, lorsque ceux-ci s’étaient installés dans un foyer d'urgence à Genève, n'avait ensuite pas eu pour effet de leur procurer immédiatement une résidence habituelle dans le canton. Le séjour dans un tel lieu de vie ne pouvait être que provisoire et rien ne permettait notamment d'inférer que la présence des enfants à Genève serait durable tant qu'une autorité ne se serait prononcée sur leur lieu de résidence. Il n'était d’ailleurs pas contesté que les enfants avaient quitté leur foyer d'accueil pour réintégrer leur résidence habituelle et domicile de H______. Il n'y avait ainsi pas lieu d’admettre que les enfants avaient disposé d'une résidence habituelle entre le 11 décembre 2021 et le 27 janvier 2022. Cela s'appliquait également à Mme A______, quand bien même était demeurée en Suisse après le prononcé de mesures provisoires de divorce et y était désormais plus durablement établie, voire domiciliée, au vu notamment de sa récente prise à bail d'un logement propre à M______. Lors du dépôt de sa requête de mesures protectrices et jusqu'après le prononcé de mesures provisoires de divorce, elle était hébergée en foyer d'accueil, où l’on ne pouvait s'attendre à ce qu'elle séjourne durablement. S'il était vrai qu’elle possédait alors un permis d'établissement à Genève, elle n'y exerçait pas d'activité lucrative et ne soutenait pas en avoir cherché, de sorte qu'il ne pouvait être tenu pour certain qu’elle serait en mesure, voire même désireuse, de disposer d'un logement propre à Genève et d'en faire son lieu de résidence habituelle. Il se pouvait notamment qu’elle choisisse alors de vivre en France en fonction de ses possibilités de logement et des modalités de garde des enfants fixées par le juge. La seule présence à Genève de la mère de Mme A______, qui ne l'avait pas accueillie lors de la séparation, ou de l'église qu’elle fréquentait, ne permettait pas de retenir que son séjour dans le canton fût d'emblée destiné à être durable, même si telle avait pu être son intention. Faute de résidence habituelle dans le canton avant le prononcé de mesures provisoires de divorce par le juge français, c'était donc à bon droit que le TPI s'était déclaré incompétent pour prononcer des mesures protectrices de l'union conjugale.

14.         Le 13 juin 2022, l’OCPM a fait part à M. C______ de son intention de constater la caducité de son autorisation d’établissement et de celles de ses trois enfants et de prononcer leur renvoi de Suisse. Il lui a imparti un délai pour faire valoir d’éventuelles observations.

15.         Le 22 juin 2022, M. C______ a répondu n’avoir aucune observation à formuler.

16.         Par décision du 14 juillet 2022, l’OCPM a prononcé la caducité des autorisations d’établissement de M. C______ et des enfants et a enregistré leur départ de Suisse avec effet rétroactif, au 8 juillet 2013 pour M. C______, à savoir six mois après l’acquisition de la maison en France voisine, et aux 8 juillet 2014, 18 septembre 2016 et 12 mars 2019 pour les enfants, soit au lendemain de leurs naissances.

17.         Le recours interjeté le 14 septembre 2022 contre cette décision par Mme A______, qui agissait au nom de ses trois enfants mineurs, a été rejeté (cf. JTAPI/800/2023 du 19 juillet 2023, entré en force).

18.         Le 13 juin 2022, l’OCPM a informé Mme A______ de son intention de constater la caducité de son autorisation d’établissement et de prononcer son renvoi de Suisse. Il lui a imparti un délai pour faire valoir d’éventuelles observations.

19.         Le 6 octobre 2022, Mme A______, par le biais de son conseil, a déposé ses observations.

20.         Par décision du 26 juin 2023, l’OCPM a prononcé la caducité de l’autorisation d’établissement de Mme A______ (avec effet au 8 juillet 2013, soit six mois après l’acquisition de la maison familiale en France voisine) et son renvoi, relevant qu’elle ne remplissait par les conditions d’une autorisation de séjour pour le cas de rigueur. Il lui a imparti un délai au 26 septembre 2023 pour quitter la Suisse.

21.         Par acte du 28 août 2023, sous la plume de son conseil, Mme A______ a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif de première instance
(ci-après : le tribunal), concluant principalement à son annulation et au renouvèlement de son autorisation d’établissement. Subsidiairement, elle a conclu à ce qu’il soit constaté que sa situation constituait un cas d’extrême gravité et à l’octroi d’une autorisation de séjour sur cette base, le tout sous suite de frais et dépens.

Durant la vie conjugale, M. C______ avait déplacé « le domicile familial » en France. Le centre de vie de la famille, soit le lieu de scolarisation et de soins des enfants, le lieu de travail des parents et le lieu de loisir de la famille était néanmoins demeuré à Genève. La mère de Mme A______ résidait à Genève et s’occupait régulièrement de ses petits-enfants.

Elle respectait l'ordre juridique suisse, n'avait jamais été condamnée ou fait l'objet de poursuite pénale. Ses enfants avaient toujours été scolarisés à Genève et l’étaient encore. Elle recherchait activement un emploi. Dans l'intervalle, elle était autonome financièrement. Elle était présente en Suisse depuis 18 ans. Elle était en bonne santé.

Elle avait effectué toutes ses études universitaires en Suisse, si bien que sa position sur le marché du travail brésilien impliquerait préalablement un processus d'équivalence et de reconnaissance de ses diplômes obtenus en Suisse. Durant ce laps de temps, elle ne pourrait compter sur aucun proche. En effet, sa mère résidant à Genève, elle n'avait plus aucun contact avec des personnes résidant au Brésil, pays qu'elle n'avait plus revu depuis près de vingt ans. Elle l’avait quitté pour faire ses études et n'avait donc aucune connaissance du marché du travail brésilien et de ses us et coutumes. Y retourner signifierait être séparée de ses trois enfants en bas âge. Ayant passé en Suisse pratiquement la moitié de sa vie et toute sa vie d’adulte, elle s'était construite en tant qu'adulte à Genève. L'arrivée de ses enfants l'avait définitivement encrée en Suisse, seul lieu avec lequel elle entretient un sentiment d'appartenance. Elle exerçait, conjointement avec son époux, la garde et l'autorité parentale sur leurs trois enfants.

La décision entreprise conduisait à la séparation de la communauté familiale intacte des parents et des enfants et portait ainsi atteinte à leur droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'art. 8 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101). Cette décision ne tenait pas non plus compte de l'intérêt supérieur des trois enfants mineurs à continuer à vivre auprès de leur mère, violant ainsi l’art. 3 de la Convention relative aux droits de l'enfant (CDE - RS 0.107). Les droits parentaux étant exercés conjointement par les deux parents sur les trois enfants mineurs, on ne pouvait exiger de ces derniers qu'ils soient séparés de l'un ou l'autre de leurs parents, respectivement contraints de quitter le territoire de l'Union européenne.

Subsidiairement, si son autorisation d’établissement devait être considérée comme caduque, il conviendrait de constater que sa situation relevait d’un cas de rigueur et de lui délivrer une autorisation de séjour sur cette base.

22.         Le 2 novembre 2023, l’OCPM a transmis son dossier au tribunal, accompagné de ses observations. Il a conclu au rejet du recours, les arguments invoqués dans ce cadre n’étant pas de nature à modifier sa position.

La recourante ne contestait pas que son permis C [recte : permis B] avait pris fin en date du 8 juillet 2013.

S’agissant d'un permis de séjour pour cas individuel d'une extrême gravité, la recourante, qui avait quitté la Suisse le 8 juillet 2013, était revenue à Genève le 5 janvier 2022, après une absence de neuf ans, durant lesquelles elle avait fait usage des privilèges accordés aux personnes frontalières. Elle ne pouvait se prévaloir d'aucune intégration socio-économique réussie en Suisse. Elle n’avait en effet pas intégré le marché de l'emploi helvétique et, à ce jour, était sans emploi. Au niveau social, aucune pièce n'avait été versée au dossier démontrant un lien étroit avec la Suisse. Elle ne pouvait se prévaloir d'un bon comportement, voire un comportement irréprochable à l'égard des autorités suisses, étant donné que pendant presque dix ans elle les avait induites en erreur afin de bénéficier frauduleusement d'un droit de séjour en Suisse. Ses trois enfants étaient à ce jour dépourvus de tout permis de séjour en Suisse et vivaient en France voisine avec leur père. Dans ces conditions, elle ne pouvait donc pas se prévaloir de l’art. 8 CEDH pour séjourner en Suisse. Âgée à ce jour de 38 ans, en bonne santé et parlant la langue de son pays d'origine, elle pouvait réintégrer ce dernier sans trop de difficultés. Les requis légaux et jurisprudentiels du cas de rigueur n’étaient ainsi pas réalisés.

23.         Par réplique du 6 décembre 2023, la recourante a persisté dans les conclusions.

Le fait que ses enfants étaient dépourvus d’une autorisation de séjour en Suisse n’excluait par l’application de l’art. 8 CEDH, puisque, à teneur de la décision litigieuse, son renvoi impliquait qu’elle quitte également les territoires des États membres de l’Union européenne.

24.         Le 4 janvier 2024, l'OCPM a indiqué ne pas avoir d’observations complémentaires à formuler.

25.         Selon une attestation de l’Hospice général du 20 juin 2023, la recourante perçoit des prestations sociales depuis le 1er janvier 2022. En 2022 et 2023, elle a perçu CHF 56'538.30, respectivement CHF 5'653.20.

EN DROIT

1.             Le tribunal connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'OCPM relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

4.             Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ;
140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

5.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

6.             La LEI et ses ordonnances d’exécution, en particulier l’ordonnance relative à l’admission, au séjour et à l’exercice d’une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201), règlent l’entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n’est pas réglé par d’autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 al. 1 LEI), ce qui est le cas pour les ressortissants du Brésil.

7.             Aux termes de l’art. 34 al. 2 LEI, l’autorité compétente peut octroyer une autorisation d’établissement à un étranger aux conditions suivantes :

a)      il a séjourné en Suisse au moins dix ans au titre d’une autorisation de courte durée ou de séjour, dont les cinq dernières années de manière ininterrompue au titre d’une autorisation de séjour ;

b)      il n’existe aucun motif de révocation au sens des art. 62 ou 63, al. 2 ;

c)      l’étranger est intégré.

8.             L’autorité compétente peut révoquer une autorisation d’établissement notamment lorsque l’étranger ou son représentant légal a fait de fausses déclarations ou a dissimulé des faits essentiels durant la procédure d’autorisation (art. 63 al. 1 let. a cum art. 62 al. 1 let. a LEI).

9.             Selon l’art. 61 al. 1 let. a LEI, l’autorisation prend fin lorsque l’étranger déclare son départ de Suisse. Si un étranger quitte la Suisse sans déclarer son départ, l’autorisation de courte durée prend automatiquement fin après trois mois, l’autorisation de séjour ou d’établissement après six mois (art. 61 al. 2 LEI).

Les délais prévus à l’art. 61 al. 2 LEI, ne sont pas interrompus en cas de séjour temporaire en Suisse à des fins de visite, de tourisme ou d’affaires (art. 79 al. 1 OASA ; cf. ATF 145 II 322 consid. 2.3).

10.         L’extinction de l’autorisation de séjour au sens de l’art. 61 LEI s’opère de iure (arrêt du Tribunal administratif fédéral F-139/2016 du 11 avril 2017 consid. 5.1), quelles que soient les causes de l’éloignement et les motifs de l’intéressé ; peu importe ainsi si le séjour à l’étranger était volontaire ou non (arrêts du Tribunal fédéral 2C_42/2023 du 19 juin 2023 consid. 3.1 et les références citées ; 2C_691/2017 du 18 janvier 2018 consid. 3.1). Sous cet angle, les autorités ne jouissent pas d’un pouvoir d’appréciation dans le cadre duquel il y aurait lieu de procéder, conformément à l’art. 96 LEI, à un examen de la proportionnalité (arrêt du Tribunal fédéral 2C_19/2017 du 21 septembre 2017 consid.5).

Une autorisation ne peut subsister lorsque l’étranger passe l’essentiel de son temps hors de Suisse, voire y transfère son domicile ou le centre de ses intérêts, sans jamais toutefois y rester consécutivement plus du délai légal, revenant régulièrement en Suisse pour une période relativement brève, même s’il garde un appartement en Suisse. Dans ces conditions, il faut considérer que le délai légal n’est pas interrompu lorsque l’étranger revient en Suisse avant l’échéance de ce délai non pas durablement, mais uniquement pour des séjours d’affaires ou de visite (ATF 145 II 322 consid. 2).

Selon la jurisprudence (ATA/431/2024 du 26 mars 2024 consid. 2.5 ; ATA/1793/2019 du 10 décembre 2019 consid. 3c), un étranger titulaire d'une autorisation d'établissement perd cette dernière s'il s'établit en France voisine et y vit comme un frontalier. Cette règle s’applique a fortiori aux autorisations de séjour (ATA/325/2024 du 5 mars 2024).

Pour savoir si une personne réside à un endroit avec l’intention de s’y établir, ce n’est pas la volonté interne de cette personne qui importe, mais les circonstances reconnaissables pour des tiers, qui permettent de déduire une semblable intention (cf. ATF 133 V 309 consid. 3.1 ; 119 II 64 consid. 2b/bb ; 113 II 5 consid. 2 ; 97 II 1 consid. 3 ; ATA/904/2014 du 18 novembre 2014 consid. 2 ; ATA/535/2010 du 4 août 2010 consid. 6).

La chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) a récemment confirmé la caducité de l’autorisation d’établissement d’un recourant, qui n’avait pas annoncé son départ de Suisse et conservé l’adresse de son logement à Genève, alors qu’il avait en fait déménagé avec sa famille en France voisine où il était propriétaire d’un bien immobilier. La chambre administrative a retenu que le centre d’intérêts du recourant se trouvait, non pas à Genève, mais en France voisine où, partant, il séjournait au sens de la loi (ATA/431/2024 précité).

Dans un autre arrêt, la chambre administrative a confirmé la caducité de l’autorisation de séjour d’un recourant et de sa fille dont le centre des intérêts se trouvait, non pas à Genève, où ils louaient un studio, travaillait, respectivement étudiait, mais à N______ (France) auprès de leur épouse, respectivement mère. C'était donc en France voisine qu'ils séjournaient au sens de la loi (ATA/325/2024 précité).

11.         Selon la maxime inquisitoire, qui prévaut en particulier en droit public, l’autorité définit les faits pertinents et ne tient pour existants que ceux qui sont dûment prouvés. Elle ne dispense pas pour autant les parties de collaborer à l’établissement des faits ; il incombe à celles-ci d’étayer leurs propres thèses, de renseigner le juge sur les faits de la cause et de lui indiquer les moyens de preuves disponibles, spécialement lorsqu’il s’agit d’élucider des faits qu’elles sont le mieux à même de connaître (ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1). En matière de droit des étrangers, l’art. 90 LEI met un devoir spécifique de collaborer à la constatation des faits déterminants à la charge de l’étranger ou des tiers participants (ATF 142 II 265 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_728/2020 du 25 février 2021 consid. 4.1).

Lorsque les preuves font défaut ou s’il ne peut être raisonnablement exigé de l’autorité qu’elle les recueille pour les faits constitutifs d’un droit, le fardeau de la preuve incombe à celui qui entend se prévaloir de ce droit (cf. ATF 140 I 285 consid. 6.3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_27/2018 du 10 septembre 2018 consid. 2.2 ; ATA/99/2020 du 28 janvier 2020 consid. 5b). Il appartient ainsi à l’administré d’établir les faits qui sont de nature à lui procurer un avantage et à l’administration de démontrer l’existence de ceux qui imposent une obligation en sa faveur (ATA/471/2022 du 3 mai 2022 consid. 3d).

Par ailleurs, en procédure administrative cantonale, la constatation des faits est gouvernée par le principe de la libre appréciation des preuves (art. 20 al. 1 2ème phr. LPA ; ATF 139 II 185 consid. 9.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_668/2011 du 12 avril 2011 consid. 3.3). Le juge forme ainsi librement sa conviction en analysant la force probante des preuves administrées et ce n’est ni le genre, ni le nombre des preuves qui est déterminant, mais leur force de persuasion (ATA/590/2022 du 3 juin 2022 consid. 4a et les références cités).

12.         En l’espèce, comme il l’a fait dans la cause A/2962/2022 concernant les enfants de la recourante, le tribunal de céans fera siens tant le raisonnement que la conclusion à laquelle sont parvenus le TPI et le Tribunal judiciaire de J______. Il sera dès lors admis que la résidence habituelle de la recourante était située à H______, en France, depuis juillet 2013. Ainsi, en vertu de l’art. 61 al. 2 LEI, son autorisation de séjour (permis B) est devenue caduque de par la loi six mois après cette date.

Dès lors, lorsqu’elle a requis l’autorisation d’établissement, en août 2021, la recourante n’en remplissait manifestement pas les conditions, en particulier celle de l’art. 34 al. 2 let. a LEI (un séjour en Suisse au moins dix ans au titre d’une autorisation de courte durée ou de séjour, dont les cinq dernières années de manière ininterrompue au titre d’une autorisation de séjour), puisqu’elle ne disposait juridiquement d’aucune autorisation de séjour depuis janvier 2014, en raison du déplacement de son domicile en France, ce dont elle n’a pas informé l’OCPM. Ainsi, dès lors que ce dernier lui a délivré, en novembre 2021, une autorisation d’établissement sur la base de fausses informations, il était en droit de la révoquer, conformément à l’art. 63 al. 1 let. a LEI (cum art. 62 al. 1 let. a LEI).

Partant, sur ce point, la décision litigieuse ne peut qu’être confirmée.

13.         La recourante requiert une autorisation de séjour pour cas de rigueur.

14.         A teneur de l'art. 30 al. 1 let. b LEI, il est possible de déroger aux conditions d'admission notamment dans le but de tenir compte des cas individuels d'une extrême gravité ou d'intérêts publics majeurs.

L'art. 31 OASA énumère, à titre non exhaustif, une liste de critères qui sont à prendre en considération dans l'examen de l'art. 30 al. 1 let. b LEI, à savoir l'intégration, le respect de l'ordre juridique, la situation familiale, la situation financière et la volonté de prendre part à la vie économique et d'acquérir une formation, la durée de la présence en Suisse et l'état de santé, étant précisé qu'il convient d'opérer une appréciation globale de la situation personnelle de l'intéressé. Aussi, les critères précités peuvent jouer un rôle déterminant dans leur ensemble, même si, pris isolément, ils ne sauraient fonder en soi un cas de rigueur (cf. ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; 137 II 1 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-1734/2019 du 23 mars 2020 consid. 8.2).

Selon la jurisprudence constante relative à la reconnaissance des cas de rigueur en application de l'art. 30 al. 1 let. b LEI, il s'agit de norme dérogatoire présentant un caractère exceptionnel et les conditions auxquelles la reconnaissance d'un cas de rigueur est soumise doivent être appréciées de manière restrictive. Il est nécessaire que l'étranger concerné se trouve dans une situation de détresse personnelle. Cela signifie que ses conditions de vie et d'existence, comparées à celles applicables à la moyenne des étrangers, doivent être mises en cause de manière accrue, autrement dit qu'une décision négative prise à son endroit comporte pour lui de graves conséquences (cf. not. ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 ; 130 II 39 consid. 3 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral
F-1734/2019 du 23 mars 2020 consid. 8.4).

Lors de l'appréciation d'un cas de rigueur, il y a lieu de tenir compte de l'ensemble des circonstances du cas particulier. La reconnaissance d'un cas individuel d'une extrême gravité n'implique pas forcément que la présence de l'étranger en Suisse constitue l'unique moyen pour échapper à une situation de détresse. Par ailleurs, le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il s'y soit bien intégré (au plan professionnel et social) et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas individuel d'une extrême gravité ; encore faut-il que la relation de l'intéressé avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse exiger de lui qu'il aille vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d'origine (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral F-1734/2019 du 23 mars 2020 consid. 8.5 ; F-6775/2017 du 10 mai 2019 consid. 6.4).

Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d’une telle situation, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, la personne étrangère possédant des connaissances professionnelles si spécifiques qu’elle ne pourrait les mettre en œuvre dans son pays d’origine, une maladie grave ne pouvant être traitée qu’en Suisse et la situation de ses enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d’études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n’arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l’aide sociale ou des liens conservés avec le pays d’origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-1734/2019 du 23 mars 2020 consid. 8.5 ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8).

Selon la jurisprudence, le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse durant une assez longue période, qu'il s'y soit bien intégré et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer de tels motifs importants ; encore faut-il que la relation de l'intéressé avec la Suisse soit si étroite qu'on ne puisse exiger de lui qu'il aille vivre dans un autre pays, notamment dans son pays d'origine (arrêt du Tribunal administratif fédéral [ci-après : TAF] C-3337/2010 du 31 janvier 2012, consid. 4.3 et la jurisprudence citée ; Directives OLCP, ch. 8.2.7). L'intégration n'est pas réalisée lorsque la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et recourt à l'aide sociale pour vivre (arrêt du TAF
C-3337/2010 du 31 janvier 2012, consid. 4.3).

15.         En l’espèce, dans la mesure où elle s’est constituée un domicile en France depuis juillet 2013, la recourante ne peut se prévaloir d’une longue durée de séjour en Suisse. En outre, son intégration sociale et économique n’est pas réussie, étant donné qu’elle n’a jamais occupé un emploi en Suisse et qu’elle a requis des aides sociales. De plus, elle ne peut pas se prévaloir d’un comportement irréprochable dans la mesure où elle a donné à l’OCPM des fausses informations afin de conserver son permis B puis d’obtenir une autorisation d’établissement en 2021, alors que sa résidence se trouvait en France depuis 2013. Enfin, elle ne démontre pas qu’elle se serait investie d’une quelconque manière dans la vie associative ou culturelle genevoise.

Elle a passé non seulement toute son enfance au Brésil, mais également son adolescence et le début de sa vie d’adulte, périodes déterminantes pour le développement personnel et scolaire, et qui entraînent souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (cf. ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; ATA/203/2018 du 6 mars 2018 consid. 9a). Si elle se heurtera sans doute à des difficultés de réadaptation dans son pays d'origine, elle ne démontre pas que celles-ci seraient plus graves pour elle que pour n'importe lequel de ses concitoyens qui se trouverait dans une situation similaire. En outre, il ne faut pas perdre de vue que celui qui place l'autorité devant le fait accompli doit s'attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (cf. ATF 123 II 248 consid. 4a ; 111 Ibb 213 consid. 6b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_33/2014 du 18 septembre 2014 consid. 4.1 ; 1C_269/2013 du 10 décembre 2013 consid. 4.1 et les références citées). Ainsi, elle ne pouvait ignorer, au vu de son séjour effectif en France depuis 2013, qu'elle pourrait à tout moment être amenée à devoir renoncer, en cas de refus de la régularisation de ses conditions de séjour, à ce qu’elle avait mis en place en Suisse.

Dans ces conditions, le tribunal considère que l'autorité intimée n'a pas abusé de son pouvoir d'appréciation en estimant qu'aucun motif important ne justifiait la délivrance à la recourante d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur.

16.         La recourante prétend à une autorisation de séjour sur la base des art. 8 CEDH et 3 CDE.

17.         L'art. 8 par. 1 CEDH peut être invoqué par un ressortissant étranger pour s'opposer à une séparation d'avec sa famille et obtenir une autorisation de séjour en Suisse à la condition qu'il entretienne des relations étroites, effectives et intactes avec un membre de celle-ci disposant d'un droit de présence assuré en Suisse, ce qui suppose que celui-ci ait la nationalité suisse ou qu'il soit au bénéfice d'une autorisation d'établissement ou d'un droit certain à une autorisation de séjour (ATF 135 I 143 consid. 1.3.1 ; 130 II 281 consid. 3.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_1023/2016 du 11 avril 2017 consid. 5.1).

Le droit au respect de la vie privée et familiale garanti par l'art. 8 par. 1 CEDH n'est toutefois pas absolu. Une ingérence dans l'exercice de ce droit est possible aux conditions de l'art. 8 par. 2 CEDH. La mise en œuvre d'une politique restrictive en matière de séjour des étrangers constitue un but légitime au regard de cette disposition conventionnelle (ATF 137 I 284 consid. 2.1 ; 135 I 153 consid. 2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_492/2018 du 9 août 2018 consid. 4.2). Le refus d'octroyer une autorisation de séjour fondé sur l'art. 8 par. 2 CEDH ne se justifie que si la pesée des intérêts à effectuer dans le cas d'espèce, résolue sur la base d'une pesée de tous les intérêts publics et privés en présence, fait apparaître la mesure comme proportionnée aux circonstances (ATF 139 I 145 consid. 2.2 ;
137 I 284 consid. 2.1 ; 135 II 377 consid. 4.3 ; et les références citées ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_325/2019 du 3 février 2020 consid. 3.1 ; 2C_492/2018 du 9 août 2018 consid. 4.2). Cette condition correspond aux exigences de l'art. 96 al. 1 LEI.

Si l'art. 8 CEDH ouvre le droit à une autorisation de séjour, c’est à des conditions restrictives, l'étranger devant établir l'existence de liens sociaux et professionnels spécialement intenses avec la Suisse, notablement supérieurs à ceux qui résultent d'une intégration ordinaire (cf. ATF 130 II 281 consid. 3.2.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_739/2016 du 31 janvier 2017 consid. 1.1 ; 2C_647/2016 du 2 décembre 2016 consid. 1.1 et 3.1 ; 2C_891/2016 du 27 septembre 2016 consid.3.2 ; 2C_725/2014 du 23 janvier 2015 ; consid. 3.2).

18.         Il faut aussi tenir compte de l'intérêt fondamental de l'enfant (art. 3 CDE) à pouvoir grandir en jouissant d'un contact étroit avec ses deux parents (cf. ATF 143 I 21 consid. 5.5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_633/2018 du 13 février 2019 consid. 7.1 ; cf. aussi arrêt de la Cour EDH El Ghatet contre Suisse du 8 novembre 2016, requête n° 56971/10.§ 27 s. et 46 s.), étant précisé que, sous l'angle du droit des étrangers, cet élément n'est pas prépondérant par rapport aux autres et que l'art. 3 CDE ne fonde pas une prétention directe à l'octroi ou au maintien d'une autorisation (cf. ATF 144 I 91 consid. 5.2 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_303/2018 du 20 juin 2018 consid. 4.2).

19.         Le parent étranger qui n'a pas la garde d'un enfant mineur disposant d'un droit durable de résider en Suisse ne peut d'emblée entretenir une relation familiale avec celui-ci que de manière limitée, en exerçant le droit de visite dont il bénéficie. Il n'est en principe pas nécessaire que, dans l'optique de pouvoir exercer son droit de visite, il soit habilité à résider durablement dans le même pays que son enfant. Sous l'angle du droit à une vie familiale, il suffit en règle générale que le parent vivant à l'étranger exerce son droit de visite dans le cadre de séjours brefs, au besoin en aménageant ses modalités quant à la fréquence et à la durée ou par le biais de moyens de communication modernes. Le droit de visite d'un parent sur son enfant ne doit en effet pas nécessairement s'exercer à un rythme bimensuel et peut également être organisé de manière à être compatible avec des séjours dans des pays différents (ATF 144 I 91 consid. 5.1 et les références citées ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_303/2018 du 20 juin 2018 consid. 4.2).

20.         En l’espèce, la recourante vie déjà séparément de ses enfants, la résidence habituelle de ces derniers se situant au domicile de M. C______ en France. Ainsi, pour ce motif déjà, elle ne peut se prévaloir de l’art. 8 CEDH. De plus, ses enfants n’étant plus au bénéfice d’une autorisation d’établissement, l’application de cette disposition conventionnelle est exclue en l’espèce. Elle pourra entretenir des contacts étroits avec ses enfants par le biais des moyens de communication modernes et par des visites dans le cadre de brefs séjours en France ou dans d’autres pays.

21.         Le refus de lui délivrer une autorisation de séjour que lui a opposé l’OCPM ne constitue pas une ingérence inadmissible dans son droit à la protection de sa vie familiale et privée en Suisse, tel que consacré par l'art. 8 CEDH. Hormis ses liens avec ses enfants, qui ne peuvent pas à eux seuls justifier la poursuite de son séjour en Suisse, le dossier ne contient aucun élément déterminant qui ferait apparaître le refus de l’OCPM comme disproportionné ou contraire au droit conventionnel et fédéral.

22.         Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou dont l'autorisation, bien que requise, est révoquée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé.

Le renvoi constitue la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande tendant à la délivrance ou la prolongation d'une autorisation de séjour, l'autorité ne disposant à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation (ATA/1118/2020 du 10  novembre 2020 consid. 11a).

23.         En l’espèce, la recourante n'obtenant pas d'autorisation de séjour, c'est à bon droit que l'autorité intimée a prononcé son renvoi de Suisse. Il n'apparaît en outre pas que l'exécution de son renvoi ne serait pas possible, serait illicite ou qu'elle ne pourrait être raisonnablement exigée (art. 83 LEI).

24.         Infondé, le recours sera rejeté et la décision contestée confirmée.

25.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), la recourante, qui succombe, est condamnée au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée à la suite du dépôt du recours.

26.         Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

27.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             déclare recevable le recours interjeté le 28 août 2023 par Madame A______ contre la décision de l'office cantonal de la population et des migrations du 26 juin 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge de la recourante un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 30 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

Le greffier