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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1997/2024

ATAS/755/2024 du 03.10.2024 ( AI ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1997/2024 ATAS/755/2024

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 3 octobre 2024

Chambre 5

 

En la cause

A______

représentée par APAS-Assoc. permanence défense des patients et assurés

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’assurée), née en ______ 1986, a déposé, en date du 14 décembre 2009, auprès de l’office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI) une demande de prestations, en raison d’une dysplasie post-traumatique de la hanche gauche suite à un accident survenu au Kosovo en 1996, traitée chirurgicalement sur place avec reprise chirurgicale en 2004 en Suisse.

b. En se fondant, notamment, sur un rapport d’expertise du 14 juillet 2015, l’OAI a rendu une décision, datée du 23 mars 2016, par laquelle elle octroyait à l’assurée une rente extraordinaire entière du 1er mars au 31 décembre 2010 et une demi-rente extraordinaire dès le 1er janvier 2011.

c. Le 27 janvier 2021, l’assurée a sollicité la révision de la rente qui lui était versée, en raison d’une aggravation progressive depuis 2017.

d. Se fondant sur un rapport d’expertise du 22 juin 2022, l’OAI a considéré, par décision du 13 septembre 2022, que l’état de santé de l’assurée ne s’était pas modifié de manière significative, raison pour laquelle il a rejeté la demande de révision de la rente, confirmant par-là le maintien d’une demi-rente d’invalidité extraordinaire.

e. Par acte de son mandataire, daté du 14 octobre 2022, l’assurée a interjeté recours auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans).

f. Par arrêt du 19 octobre 2023 (ATAS/794/2023), la chambre de céans a estimé qu’en l’absence d’éléments portants sur les activités effectivement exercées par la recourante et au vu des lacunes dans l’anamnèse, les conclusions de l’expertise psychiatrique n’étaient pas convaincantes et que la chambre de céans ne pouvait s’y fier pour apprécier la validité de la décision de refus de l’OAI concernant l’augmentation de la rente sollicitée par la recourante.

Partant, le recours était partiellement admis et la cause renvoyée à l’OAI pour instruction complémentaire sur l’existence d’activités adaptées aux limitations fonctionnelles retenues et, le cas échéant, complément d’expertise, avant une nouvelle décision au sens des considérants.

B. a. Par acte de son mandataire, daté du 12 juin 2024, l’assurée a saisi la chambre de céans d’un recours pour déni de justice, concluant à la constatation de ce dernier, à ce qu’il soit enjoint à l’OAI de respecter les mesures d’instruction ordonnées par l’arrêt de renvoi du 19 octobre 2023, dont le tout sous suite de frais et dépens.

Elle exposait avoir été convoquée par l’OAI afin de se soumettre à une expertise prévue en date du 13 juin 2024. Or, elle considérait qu’il fallait tout d’abord que le service de réadaptation de l’OAI se détermine quant à l’éventail possible des activités qui lui étaient accessibles ou non, avant d’examiner l’opportunité de réaliser une nouvelle expertise. Par ailleurs, le choix de l’OAI de mandater le docteur B______, spécialiste FMH en psychiatrie, qui avait déjà participé à la précédente expertise ayant abouti au rapport du 22 juin 2022 était critiqué « compte tenu de l’absence de caractère probant de la première expertise ».

Par courrier du 28 mai 2024, la recourante avait informé l’OAI qu’elle ne se rendrait pas à l’expertise prévue le 13 juin 2024, avait fixé un délai d’une semaine afin qu’il confirme qu’il respecterait les mesures d’instruction ordonnées par la chambre de céans à défaut de quoi l’assurée serait contrainte de la saisir d’un recours pour déni de justice, ce qu’elle avait fait en l’absence de réponse de l’OAI dans le délai qui lui avait été fixé.

b. Par réponse du 1er juillet 2024, l’OAI a conclu au rejet du recours. Il a exposé avoir demandé à la recourante, par courrier du 7 février 2024, de préciser quelles activités elle avait exercé depuis 2016, avec le nom des employeurs, des dates, des taux d’activité et la description des tâches. Sans réponse de la part de la recourante un premier rappel lui avait été adressé, sous pli du 19 mars 2024, afin qu’elle réponde aux questions posées ce qu’elle avait fait, par courrier de son mandataire daté du 28 mars 2024. Le Dr B______ avait été mandaté par l’OAI en date du 16 avril 2024 pour complément d’expertise. Suite aux objections soulevées par l’assurée quant au choix de l’expert, l’OAI avait confirmé ce choix par décision incidente du 27 juin 2024. Au vu de cette chronologie, l’OAI considérait n’avoir pas commis de déni de justice, le délai nécessaire pour statuer sur le droit aux prestations n’étant pas déraisonnable.

c. Par réplique du 15 août 2024, la recourante a « constaté » que l’OAI avait confirmé ne pas respecter l’arrêt de renvoi, sans aucune justification, raison pour laquelle le déni de justice formel devait être admis, notamment au motif que les instructions de renvoi de l’arrêt n’étaient pas conduites selon l’ordre impératif ordonné par la cour. De plus, il apparaissait également que l’OAI n’entendait pas respecter matériellement les mesures d’instruction, de par le fait qu’une nouvelle expertise, qui ne se fondrait pas sur les limitations fonctionnelles déjà constatées par la chambre de céans, aurait nécessairement une influence sur l’examen mené par le service de réadaptation. Enfin, la recourante entendait contester en temps utile, la décision du 27 juin 2024 attribuant au Dr B______ le nouveau mandat d’expertise alors même que la chambre de céans avait dénié toute valeur probante à celle confiée en premier lieu.

d. Par observations du 17 septembre 2024, l’OAI a persisté dans ses conclusions.

e. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées.

 

 

 

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             En vertu de la LPGA, un recours peut être formé lorsque l'assureur, malgré la demande de l'intéressé, ne rend pas de décision ou de décision sur opposition (art. 56 al. 2 LPGA).

Selon la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), lorsqu’une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision (art. 4 al. 4 LPA-GE). Une partie peut recourir en tout temps pour déni de justice ou retard non justifié si l’autorité concernée ne donne pas suite rapidement à la mise en demeure prévue à l’article 4 alinéa 4 (art. 62 al. 6 LPA).

En l’espèce, le recours pour déni de justice, interjeté par-devant l’autorité compétente (art. 58 al. 1 LPGA), est recevable.

3.              

3.1 Aux termes de l'art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.

Le droit de recours de l'art. 56 al. 2 LPGA sert à mettre en œuvre l'interdiction du déni de justice formel prévue par l'art. 29 al. 1 Cst. Le retard injustifié à statuer, également prohibé par l'art. 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) – qui n'offre à cet égard pas une protection plus étendue que la disposition constitutionnelle (ATF 103 V 190 consid. 2b) –, est une forme particulière du déni de justice formel (ATF 119 Ia 237 consid. 2).

3.2 Il y a retard injustifié à statuer lorsque l'autorité administrative ou judiciaire compétente ne rend pas la décision qu'il lui incombe de prendre dans le délai prévu par la loi ou dans un délai que la nature de l'affaire ainsi que toutes les autres circonstances font apparaître comme raisonnable (ATF 131 V 407 consid. 1.1 et les références). Entre autres critères sont notamment déterminants le degré de complexité de l'affaire, l'enjeu que revêt le litige pour l'intéressé ainsi que le comportement de ce dernier et celui des autorités compétentes mais aussi la difficulté à élucider les questions de fait (expertises, par exemple; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 53/01 du 30 avril 2001 consid. 2.2), mais non des circonstances sans rapport avec le litige, telle une surcharge de travail de l'autorité (ATF 130 I 312 consid. 5.2; ATF 125 V 188 consid. 2a). À cet égard, il appartient au justiciable d'entreprendre certaines démarches pour inviter l'autorité à faire diligence, notamment en incitant celle-ci à accélérer la procédure ou en recourant pour retard injustifié. Si on ne peut reprocher à l'autorité quelques « temps morts », celle-ci ne saurait en revanche invoquer une organisation déficiente ou une surcharge structurelle pour justifier la lenteur de la procédure; il appartient en effet à l'État d'organiser ses juridictions de manière à garantir aux citoyens une administration de la justice conforme aux règles (ATF 130 I 312 consid. 5.1 et 5.2 et les références). Dans le cadre d'une appréciation d'ensemble, il faut également tenir compte du fait qu'en matière d'assurances sociales le législateur accorde une importance particulière à une liquidation rapide des procès (ATF 126 V 244 consid. 4a). Peu importe le motif qui est à l’origine du refus de statuer ou du retard injustifié; ce qui est déterminant, c’est le fait que l’autorité n’ait pas agi ou qu’elle ait agi avec retard (ATF 124 V 133; 117 Ia 117 consid. 3a et 197 consid. 1c; arrêts du Tribunal fédéral des assurances I 819/02 du 23 avril 2003 consid. 2.1 et C 53/01 du 30 avril 2001 consid. 2).

3.3 La sanction du dépassement du délai raisonnable ou adéquat consiste d'abord dans la constatation de la violation du principe de célérité, qui constitue une forme de réparation pour celui qui en est la victime. Cette constatation peut également jouer un rôle sur la répartition des frais et dépens, dans l’optique d’une réparation morale (ATF 130 I 312 consid. 5.3 et 129 V 411 consid. 1.3). Pour le surplus, l'autorité saisie d'un recours pour retard injustifié ne saurait se substituer à l'autorité précédente pour statuer au fond. Elle ne peut qu'inviter l'autorité concernée à statuer à bref délai (ATF 130 V 90). L’art. 69 al. 4 LPA prévoit que si la juridiction administrative admet le recours pour déni de justice ou retard injustifié, elle renvoie l’affaire à l’autorité inférieure en lui donnant des instructions impératives.

4.         À titre d’exemple, un déni de justice a été admis par la chambre de céans ou antérieurement par le tribunal cantonal des assurances sociales dans un cas où :

- la décision de l'OAI était intervenue cinq mois après son arrêt, lequel rétablissait simplement la rente que l'OAI avait supprimée, car aucune instruction complémentaire n'était nécessaire de la part de l'administration, hormis l'envoi d'un formulaire de compensation (ATAS/859/2006 du 2 octobre 2006);

- aucune décision formelle n’avait été rendue neuf mois après la demande en ce sens de l’assurée, faute de mesures d’instruction durant six mois (ATAS/711/2015 du 23 septembre 2015);

- l’OAI, neuf mois après un jugement lui ordonnant de mettre en place une expertise, n’avait pas encore entrepris de démarches en ce sens (ATAS/430/2005 du 10 mai 2005);

- l’OAI avait attendu quatorze mois depuis l’opposition de l’assurée au projet pour mettre en œuvre une expertise multidisciplinaire à laquelle l’assuré avait conclu d’emblée (ATAS/484/2007 du 9 mai 2007);

- aucune décision n’avait été rendue dans un délai de plus quinze mois depuis la date du rapport d’expertise alors que la demande de précision faite au SMR au sujet de la divergence entre celui-ci et l’expert quant à la capacité de travail du recourant aurait pu être formée plus de six mois auparavant et que le SMR n’avait répondu qu’au bout de huit mois (ATAS/788/2018 du 10 septembre 2018);

- l’OAI avait ordonné un complément d’expertise dix-sept mois après avoir obtenu les renseignements des médecins traitants (ATAS/860/2006 du 2 octobre 2006);

- une nouvelle décision avait été rendue dix-huit mois après que la cause ait été renvoyée à l’office à la suite de l’admission partielle du recours (ATAS/62/2007 du 24 janvier 2007);

- plus d’un an et demi s’était écoulé depuis le rapport d'expertise en possession de l'OAI sans qu’aucune décision n’intervienne et ce, malgré de nombreuses relances du conseil de l’assurée, même si une évaluation du degré d’invalidité avait eu lieu, de même qu’une enquête économique sur le ménage, car on ne voyait pas quelles difficultés particulières justifiaient encore le report d’une décision une fois l’instruction terminée (ATAS/223/2018 du 8 mars 2018);

- un recourant qui était sans nouvelle de l’OAI vingt et un mois après le dépôt d’une demande de révision (ATAS/860/2006 du 2 octobre 2006).

- l’OAI n’avait rendu aucune décision plus de cinq ans après le dépôt de la demande de prestations et avait notamment tardé à instruire le cas par le biais d’une expertise pluridisciplinaire et à demander l’intégration dans la plateforme SuisseMED@P, alors même qu’il connaissait la longueur des délais pour la mise en place d’une telle expertise, le recourant ayant par ailleurs régulièrement pris contact avec l’intimé pour demander des nouvelles de son dossier (ATAS/1116/2013 du 18 novembre 2013).

En revanche, elle a nié l’existence d’un déni de justice dans un cas où :

- la caisse cantonale de compensation n’avait pas rendu de décision un peu plus de quatre mois après l’opposition de l’assuré, soit dans un délai qui ne violait pas le principe de célérité, ce d’autant plus que le cas ne pouvait pas être qualifié de simple (ATAS/1035/2018 du 7 novembre 2018);

- la caisse-maladie n’avait pas rendu de décision neuf mois après l’arrêt de renvoi du Tribunal fédéral pour instruction complémentaire afin d’établir le tarif hospitalier du canton de Bâle, dès lors que l’instruction n’était pas terminée et qu’elle n’avait cessé d’interpeller l’Hôpital universitaire de Bâle à ce sujet (ATAS/1502/2012 du 19 décembre 2012);

- l’assurance-accidents n’avait pas versé de prestations à la suite d’une rechute annoncée quinze mois auparavant étant donné que les parties avaient échangé des courriers pendant treize mois dans le but d’aboutir à une solution transactionnelle (ATAS/264/2014 du 5 mars 2014).

5. De son côté, le Tribunal fédéral a nié l’existence d'un retard injustifié notamment dans les cas où :

- l’OAI n’avait pas rendu de nouvelle décision un peu moins de onze mois après un arrêt de renvoi pour nouveau calcul du montant de la rente. Il a admis que les prétentions en compensation du service social devaient faire l'objet d'une instruction complémentaire et que se posait également une problématique de chevauchement des indemnités journalières avec le droit à la rente (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 241/04 du 15 juin 2006);

- il s'était écoulé environ quinze mois entre le moment où l'assurée avait requis la prise en charge de son reclassement professionnel et la décision de la Caisse suisse de compensation. Pendant ce laps de temps, cette autorité avait procédé à une trentaine d'interventions, qui s'étaient échelonnées à un rythme soutenu d'une à plusieurs mesures par mois (envoi de questionnaires, production de pièces, consultation du dossier de l'assurance accident, soumission du cas au médecin-conseil, examen de divers problèmes: capacité résiduelle, comparaison des revenus, éventuel droit à une rente). La cause revêtait en outre une certaine complexité en raison de la nationalité et du domicile de l'assurée ainsi que de l'application d'une convention internationale de sécurité sociale (arrêt du Tribunal fédéral 5A.8/2000 du 6 novembre 2000). Le Tribunal fédéral avait rappelé que l'exigence de célérité ne pouvait l'emporter sur la nécessité d'une instruction complète (ATF 119 Ib 311 consid. 5b). Il avait considéré que, tout au plus, on aurait pu reprocher à la Caisse de compensation d'avoir mené ses investigations de façon peu systématique. Il était ainsi étonnant qu'il ait fallu cinq mois pour constituer un dossier complet à l'intention du médecin-conseil. Une étude préalable et approfondie du cas aurait permis d'éviter les démarches ultérieures en complément d'informations et production de radiographies et, partant, de gagner un certain temps. Ces atermoiements n'avaient cependant, à ce stade, pas retardé de façon intolérable la procédure, ce d'autant plus qu'ils étaient en partie imputables à l'assurée (arrêt du Tribunal fédéral 9C_448/2014 du 4 septembre 2014 consid. 4.2);

- il y avait eu un intervalle d'environ 20 mois entre le moment où l’OAI avait été en mesure de statuer, soit dans les semaines qui avaient suivi la réception de l'avis du SMR, jusqu'au dépôt du recours. Il a considéré que l’OAI avait activement mené son instruction, ainsi que cela ressortait des rapports médicaux régulièrement versés au dossier jusqu'au dépôt du recours pour déni de justice et que les investigations mises en œuvre n'apparaissaient pas superflues au point de constituer un déni de justice (arrêt du Tribunal fédéral 9C_448/2014 du 4 septembre 2014).

En revanche, il a admis un déni de justice dans un cas où :

- il s'était écoulé un délai de 24 mois entre la fin de l'échange d'écritures devant la juridiction cantonale et le dépôt du recours pour déni de justice devant le Tribunal fédéral dans un litige qui avait uniquement pour objet le taux d'invalidité du recourant et où celui-ci avait circonscrit son argumentation à deux questions ne présentant pas de difficultés particulières (arrêt 8C_613/2009 du 22 février 2010);

- un tribunal cantonal avait laissé s'écouler 25 mois entre la fin de l'échange d'écritures et le dépôt du recours pour déni de justice devant le Tribunal fédéral, respectivement plus de trois ans depuis le dépôt du recours cantonal, dans une affaire sans difficultés excessives en matière d'assurance-accidents (arrêt du Tribunal fédéral 8C_176/2011 du 20 avril 2011);

- une cause était pendante depuis 33 mois et en état d'être jugée depuis vingt-sept mois (ATF 125 V 373).

La chambre de céans a admis que l’introduction d’un mandat dans la plateforme SuisseMED@P dans un délai de quatre mois après la notification d'un arrêt de renvoi – en dehors de toute complexité de l'affaire – constitue un retard injustifié dès lors que plusieurs dénis de justice avaient déjà été constatés sur une période de trois ans (ATAS/942/2014 du 27 août 2014).

En revanche, elle a considéré que le délai de douze semaines entre la rédaction de l'avis du SMR et l'inscription effective de l'intéressé sur la plateforme informatique SuisseMED@P peut apparaître comme long mais n’est pas excessif (ATAS/93/2018 du 6 février 2018). Le Tribunal fédéral a confirmé que dans un tel cas, il n’y a pas de déni de justice (arrêt du Tribunal fédéral 9C_230/2018 du 4 juin 2018 consid. 3.3).

La chambre de céans a également nié l’existence d’un déni de justice dans un cas où aucune décision quant au centre d’expertise désigné n’était encore intervenue dix mois après que l’OAI ait informé l’assurée de la mise en œuvre d’une expertise médicale pluridisciplinaire car l’introduction du mandat dans le système SuisseMED@P avait été effectué moins de dix jours après la communication à la recourante. Si un délai de près d’une année pour l’attribution d’un mandat par le biais de cette plateforme apparaissait excessif, ce retard n’était pas imputable à l’intimé (ATAS/237/2014 du 26 février 2014).

6.              

6.1 En l’espèce, l’arrêt de renvoi a été rendu en date du 19 octobre 2023 et est entré en force la dernière semaine du mois de novembre 2023.

Dès le 7 février 2024, l’OAI s’est adressé au Swiss Medical Center afin de demander un complément d’expertise psychiatrique, conformément à l’arrêt de la chambre de céans.

Le même jour, l’OAI a demandé à la recourante de lui communiquer les activités professionnelles (avec description des tâches, employeurs et dates) exercées depuis 2016.

Le mandataire de cette dernière a transmis à l’OAI les informations et documents demandés par courrier du 28 mars 2024, et a demandé à l’OAI de se prononcer, en premier lieu, sur l’existence ou non d’un nombre suffisant d’activités simples et répétitives, respectant les limitations fonctionnelles de la recourante et permettant à cette dernière d’exploiter une quelconque capacité résiduelle de travail.

Par courrier du 16 avril 2024, l’OAI a demandé au Dr B______ de réaliser un complément d’expertise, conformément à l’arrêt de la chambre de céans.

Par courrier de son mandataire, daté du 28 mai 2024, l’assurée a informé l’OAI qu’elle ne se rendrait pas à l’expertise prévue le 13 juin 2024 s’étonnant que l’OAI refuse « de manière inexplicable de se conformer aux mesures d’instruction ordonnées par l’arrêt de renvoi de la Cour du 19 octobre 2023 ».

Par courrier du 30 mai 2024, l’OAI a transmis au mandataire de l’assurée le CD-ROM contenant les pièces numérisées de son dossier.

En date du 12 juin 2024, le mandataire de l’assurée a déposé un recours pour déni de justice.

L’examen de la chronologie qui précède montre qu’il n’existe pas de temps mort dans la manière dont l’OAI a géré le dossier. Les retards semblent plutôt devoir être imputés à la recourante qui n’a transmis les documents demandés par l’OAI qu’après un premier rappel et qui a refusé de se rendre à l’examen d’expertise à la date qui lui avait été fixée.

Dans ces conditions, aucun retard ne peut être reproché à l’OAI.

6.2 Apparemment, la recourante semble davantage reprocher à l’intimé d’avoir mandaté un expert psychiatrique avant que l’évaluation du service de réadaptation ne soit terminée et d’avoir, de surcroît, mandaté le précédent expert psychiatrique pour un complément d’expertise.

La question de la désignation de l’expert psychiatrique est exorbitante au présent litige qui ne porte que sur l’appréciation de la recourante selon laquelle sept mois après l’arrêt de la chambre de céans l’intimé n’aurait pas mis en œuvre la première mesure d’instruction ordonnée par la chambre de céans (mémoire de recours page. 4).

Partant, la chambre de céans n’entrera pas en matière sur la désignation de l’expert, étant précisé que la décision incidente de maintien de l’expertise auprès de l’expert désigné n’a pas fait l’objet d’un recours auprès de la chambre de céans et que les conclusions figurant dans l’acte de recours du 12 juin 2024 ne sauraient être interprétées comme valant recours contre la décision incidente (postérieure) du 27 juin 2024.

À toutes fins utiles, la chambre de céans précisera qu’à teneur de son arrêt de renvoi du 19 octobre 2023 elle a constaté que, sur le plan formel, le rapport d’expertise répondait à plusieurs réquisits jurisprudentiels en matière de valeur probante (p. 16, ch. 10.1.3).

Ce n’est qu’en raison des lacunes constatées quant aux différentes activités professionnelles exercées auparavant par la recourante et à l’absence apparente d’activité compatible avec les limitations fonctionnelles, que la chambre de céans n’a pas suivi les conclusions de l’expert psychiatrique. Si un complément d’expertise devait être effectué par le même psychiatre, avec pour conséquence d’une part, de combler les lacunes constatées par la chambre de céans quant aux précédentes activités professionnelles et, d’autre part, en fonction d’activités considérées comme adaptées, de fixer clairement les limitations fonctionnelles par rapport auxdites activités, ledit complément, pour autant qu’il soit exempt de contradictions, pourrait se voir reconnaître une pleine valeur probante.

6.3 S’agissant du grief fait à l’OAI de n’avoir pas mis en œuvre la première mesure d’instruction après sept mois, il tombe à faux dès lors que par courrier du 7 février 2024, soit deux mois et demi après que l’arrêt de renvoi soit entré en force, l’OAI a demandé à l’assurée de lui fournir des informations et des pièces concernant ses précédentes activités professionnelles, ce qui entre clairement dans le cadre des mesures d’instruction utiles pour déterminer l’existence d’activités adaptées aux limitations fonctionnelles retenues.

Cela fait, et sans que cela lie l’intimé, dès lors que le présent arrêt ne porte que sur la constatation d’un éventuel déni de justice, il semblerait opportun de commencer par dresser un catalogue des activités compatibles avec les limitations fonctionnelles de l’assurée telles qu’elles sont déjà établies, avant de demander un éventuel complément d’expertise.

Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté.

Pour le surplus, il n’est pas perçu d’émoluments (art. 69 al. 1bis LAI a contrario).

 

 

 

 

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit qu’il n’est pas perçu d’émolument.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le