Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public
ATA/1004/2025 du 09.09.2025 sur JTAPI/523/2025 ( ICCIFD ) , REJETE
En droit
| RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE | ||||
| POUVOIR JUDICIAIRE A/2527/2024-ICCIFD ATA/1004/2025 COUR DE JUSTICE Chambre administrative Arrêt du 9 septembre 2025 4ème section |
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dans la cause
A______ et B______ recourants
contre
ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE
ADMINISTRATION FÉDÉRALE DES CONTRIBUTIONS intimées
_________
Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 mai 2025 (JTAPI/523/2025)
A. a. Par courrier du 8 mai 2017, l’administration fiscale cantonale (ci-après : AFC‑GE) a informé les époux A______ et B______ de l’ouverture d’une procédure en rappel d’impôt et soustraction pour l’impôt cantonal et communal (ci‑après : ICC) et l’impôt fédéral direct (ci-après : IFD) 2007 à 2013, ainsi que d’une procédure en tentative de soustraction pour l’ICC et l’IFD 2014 et 2015.
b. Le 13 décembre 2018, l’AFC-GE leur a notifié des bordereaux de rappel d’impôt pour l’ICC et l’IFD des périodes fiscales 2007 à 2013 ainsi que des bordereaux d’amende pour soustraction fiscale pour l’ICC et l’IFD 2008 à 2013, dont la quotité était fixée à une fois le montant de l’impôt soustrait, chacun des époux étant sanctionné pour la moitié de la soustraction commise.
c. Par décision du 21 mai 2019, l’AFC-GE a rejeté la réclamation.
d. Le 23 mai 2019, elle a émis des bordereaux rectificatifs pour l’ICC et l’IFD 2014. Elle leur a également fait parvenir des bordereaux d’amendes pour tentative de soustraction pour l’ICC et l’IFD 2014 d’une quotité des deux tiers des impôts soustraits, réparties par moitié entre les époux.
e. Par jugement du 12 octobre 2020, le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) a partiellement admis le recours contre les décisions et bordereaux précités.
Les rappels d’impôt étaient confirmés dans leur principe et leur quotité, mais les reprises dans la fortune imposable entre 2009 et 2014 devaient être modifiées pour tenir compte de l’échéance, au 23 mars 2009, d’un placement à terme de EUR 50'000.-. Les reprises devant être annulées s’élevaient à CHF 62'522.50 en 2009, CHF 60'695.- en 2010, CHF 60'340.- en 2011, CHF 61'275.- en 2012, CHF 60'115.- en 2013 et CHF 54'370.- en 2014 (consid. 22).
L’AFC-GE devait également procéder aux calculs conformes à la jurisprudence du Tribunal fédéral des intérêts sur les rappels d’impôt et émettre ainsi des bordereaux rectificatifs pour toutes les périodes qui faisaient l’objet de la procédure (consid. 25).
Le dossier était ainsi renvoyé à l’AFC-GE pour qu’elle émette de nouveaux bordereaux ICC 2009 à 2014 tenant compte de la fortune corrigée dans le sens des considérants, ainsi que des bordereaux ICC/IFD 2003 (sic) à 2014 admettant la déduction des intérêts sur les créances nouvelles issues des rappels d’impôt dans la détermination du revenu net imposable. L’AFC-GE devait également recalculer les bordereaux d’amendes en tenant compte des nouveaux montants des rappels d’impôt.
f. Par arrêt du 22 décembre 2020 (6B_815/2020), le Tribunal fédéral a confirmé la condamnation de B______ à une peine privative de liberté de deux ans avec sursis pour gestion déloyale, ainsi qu’au paiement d’une somme importante aux Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG), à titre de réparation du dommage matériel. Il a été constaté que le précité n'avait tiré aucun enrichissement des actes pour lesquels il avait été condamné.
g. Le 11 février 2021, les époux A______ et B______ ont sollicité auprès de l’AFC-GE la reconsidération/révision de leurs taxations pour plusieurs périodes fiscales, notamment celles de 2012 à 2014. La somme, avec intérêts à 5 % l’an dès le 1er novembre 2012, que B______ avait été condamné à payer aux HUG, était un fait nouveau. Cette dette et les intérêts y relatifs, qui n’avaient jamais été déclarés auparavant, devaient être pris en compte dès l’exercice fiscal 2012.
Ils sollicitaient l’accord de l’autorité fiscale à la suspension de la procédure judiciaire concernant les exercices 2007 à 2014 qui était alors pendante devant la chambre administrative de la Cour de justice.
h. Le 22 février 2021, l’AFC-GE s’est opposée à la suspension, compte tenu du risque de prescription, et a invité les contribuables à faire valoir leurs prétentions directement devant la chambre administrative dans le cadre du recours qu’ils avaient formé à l’encontre du jugement du 12 octobre 2020.
i. Dans leur réplique du 31 mars 2021, les contribuables ont par conséquent demandé qu’il soit tenu compte de l’arrêt pénal susmentionné, justifiant la déduction de la dette en résultant, avec intérêts à 5 % l’an dès le 1er novembre 2012 et des intérêts passifs impayés entre le 1er novembre 2012 et le 31 décembre 2014.
j. Par arrêt du 29 juin 2021, la chambre administrative a partiellement admis le recours contre le jugement du 12 octobre 2020.
L’un des comptes bancaires déclarés par le couple avait été exclusivement alimenté, entre octobre 2008 et décembre 2010, par les versements de salaire de l’employeur du contribuable, si bien que la somme de CHF 164'000.- (CHF 25'000.- en 2008, CHF 50'000.- en 2009, CHF 40'000.- en 2010 et CHF 49'000.- en 2011) qui avait été transférée de ce compte vers un autre compte non déclaré avait déjà fait l’objet d’une imposition sur le revenu. Elle ne pouvait donc pas être taxée une seconde fois à titre de revenu imposable mais devait l’être à titre de fortune. Le jugement était annulé en ce sens et le dossier renvoyé à l’AFC-GE pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
En revanche, la demande des époux de tenir compte de la dette et des intérêts passifs de 5 % l’an y afférents dès le 1er novembre 2012 découlant de la procédure pénale susmentionnée, devait être déclarée irrecevable. La dette et les intérêts y relatifs n’avaient aucun lien avec la procédure en rappel d’impôt. Admettre la prise en compte de ces éléments reviendrait à autoriser une extension de l’objet de la contestation à de nouvelles déductions, ce qui n’était autorisé par aucune des règles applicables en l’espèce.
k. Par arrêt du 27 avril 2022 (2C_674/2021), le Tribunal fédéral a rejeté le recours des contribuables. Il a en particulier considéré que, bien qu’il renvoyait la cause à l’AFC-GE, l’arrêt attaqué constituait une décision finale au sens de l’art. 90 LTF, dans la mesure où il ne laissait aucune latitude de jugement à ladite autorité (consid. 2).
l. À la suite de cet arrêt, l’AFC-GE a notifié aux époux, le 20 mai 2022, des bordereaux rectificatifs de rappel d’impôt et d’amende ICC/IFD pour les années 2008 à 2014 qui tenaient compte des modifications ordonnées par le TAPI et la chambre administrative.
Ces bordereaux et amendes ont été contestés.
m. Par jugement du 21 août 2023, le TAPI a partiellement admis le recours et renvoyé le dossier à l’AFC-GE pour nouveaux bordereaux rectificatifs de rappel d’impôt et d’amende ICC 2012 dans le sens des considérants.
Les bordereaux rectificatifs litigieux constituaient des décisions d’exécution. Ils n’étaient dès lors susceptibles de recours que dans la mesure où ils n’exécutaient pas correctement les décisions de base sur lesquelles ils se fondaient. Les parties s’accordaient sur le fait qu’ils comportaient des rectifications divergentes de celles ordonnées par le TAPI. Le recours était dès lors recevable en tant qu’il visait ces rectifications.
La conclusion tendant à ce que le TAPI ordonne à l’AFC-GE de traiter la demande de révision du 11 février 2021 afin de procéder à la modification des taxations 2012 à 2014 qui faisaient l’objet du présent litige était en revanche irrecevable. Cette question ne pouvait être examinée dans le cadre de l’exécution de décisions de justice qui n’en tenaient pas compte.
Sur le fond, il s’avérait que la déduction de CHF 60'340.- admise par l’AFC-GE pour l’année fiscale 2012 était moins favorable aux contribuables que celle en CHF 61'275.- fixée définitivement par le jugement du 12 octobre 2020. Il incombait dès lors à l’autorité fiscale de reprendre les montants entrés en force, qu’elle n’avait pas contestés devant la chambre administrative. Le dossier devait lui être renvoyé à cette fin.
Le grief relatif aux intérêts sur rappel d’impôt devait en revanche être écarté. En effet, dans son jugement du 12 octobre 2020, le TAPI avait ordonné à l’AFC-GE « de procéder aux calculs conformes à la jurisprudence du Tribunal fédéral des intérêts sur les rappels d’impôt et d’émettre ainsi des bordereaux rectificatifs pour toutes les périodes qui font l’objet de la présente procédure » (consid. 25). L’AFC‑GE était ainsi tenue, au moment de l’émission des bordereaux rectificatifs du 20 mai 2022, d’appliquer la jurisprudence du Tribunal fédéral en la matière qui confirmait la règle suivie par le canton de Genève consistant à déduire les intérêts moratoires sur rappel d’impôt de l’année « n » dès l’année « n+1 ». C’était donc à bon droit que l’AFC-GE n’avait établi aucun bordereau rectificatif de rappel d’impôt ICC/IFD 2007 étant donné que les intérêts y relatifs n’étaient déductibles qu’en 2008.
n. Dans son arrêt du 5 décembre 2023, la chambre administrative a partiellement admis le recours formé par les contribuables, annulé le jugement du 21 août 2023 en tant qu’il refusait la déduction des intérêts sur les rappels d’impôts pour les périodes fiscales 2007 à 2014 et confirmé ledit jugement pour le surplus.
Elle a rappelé que dans son jugement du 12 octobre 2020, le TAPI avait ordonné à l’AFC-GE de « procéder aux calculs conformes à la jurisprudence du Tribunal fédéral des intérêts sur les rappels d’impôt et d’émettre ainsi des bordereaux rectificatifs pour toutes les périodes qui font l’objet de la présente procédure » (consid. 25). Or, dans ce jugement, il avait fait référence à l’ATF 144 II 359, lequel préconisait une déduction des intérêts relatifs aux rappels d’impôt dans chacune des années fiscales sur lesquelles portaient les rappels d’impôt. Certes, dans des arrêts ultérieurs à cette jurisprudence fédérale, la chambre avait retenu qu’au vu de la marge de manœuvre des autorités fiscales dans ce domaine, l’AFC-GE était en droit de déduire les intérêts relatifs au rappel d’impôt de l’année « n » sur l’année de taxation « n+1 ». Pour des motifs de sécurité du droit, cette nouvelle jurisprudence ne pouvait toutefois être appliquée rétroactivement à des décisions entrées en force. Ainsi, après l’arrêt du Tribunal fédéral 2C 674/2021 du 27 avril 2022 qui avait fait acquérir autorité de chose jugée au jugement du TAPI, l’AFC-GE ne disposait plus d’aucune marge de manœuvre quant à la méthode à appliquer pour les calculs des intérêts sur les rappels d’impôt (consid. 4.2 et 4.5).
Le grief devait donc être admis et le dossier renvoyé à l’AFC-GE afin qu’elle procède à la déduction des intérêts sur les rappels d’impôts dans chacune des années fiscales sur lesquelles ceux-ci portaient, à savoir les périodes 2007 à 2014 (consid. 4.5).
La chambre administrative a pour le surplus rejeté la conclusion tendant à ce que l’AFC-GE procède à la rectification des bordereaux 2012 à 2014 pour tenir compte de la demande de révision du 11 février 2021. La problématique de la déduction de la dette du contribuable et des intérêts passifs en découlant issus de la condamnation pénale était pendante auprès de l’AFC-GE. Comme cela avait déjà été retenu dans l’arrêt du 29 juin 2021, les contribuables ne pouvaient dès lors pas faire valoir ce nouveau poste dans le cadre de la procédure devant la chambre administrative, dans la mesure où cela conduirait à une extension de l’objet de la contestation à de nouvelles déductions. Par ailleurs, il ne ressortait pas du dossier que les époux avaient mis en demeure l’AFC-GE de statuer sur cette demande de révision. Ils ne pouvaient ainsi pas invoquer de déni de justice devant la chambre administrative.
o. Cet arrêt n’a pas fait l’objet d’un recours devant le Tribunal fédéral.
p. Parallèlement à la procédure de recours susmentionnée, les contribuables ont mis l’AFC-GE en demeure, par courrier du 17 mars 2023, de statuer sur leur demande de révision du 11 février 2021.
q. L'AFC-GE leur a indiqué qu’une réponse leur serait apportée lorsque le litige alors pendant devant le TAPI aurait été tranché de manière définitive.
r. Les contribuables ont réitéré cette mise en demeure le 12 janvier 2024, en sommant l’AFC-GE de statuer dans un délai de 30 jours sur ladite demande.
s. Par pli du 23 janvier 2024, l’AFC-GE les a informés que leur mise en demeure avait été transmise au service compétent pour y répondre.
t. Le 19 mars 2024, l’AFC-GE a adressé aux contribuables des bordereaux rectificatifs de rappel d’impôt pour les périodes 2007 à 2014 et d’amende pour les périodes 2008 à 2014, lesquels faisaient suite à l’arrêt de la chambre administrative du 5 décembre 2023.
u. Dans leur réclamation, les époux se sont prévalus de la prescription absolue de quinze ans à l’encontre des bordereaux de rappels d’impôt et d’amende 2007 et 2008.
Ces bordereaux devant être annulés, les dettes chirographaires sur rappel d’impôt déduites de la fortune dans le cadre de l’ICC 2009 à 2014 devaient être rectifiées en conséquence. Il en allait de même des intérêts moratoires sur rappel d’impôt déduits du revenu dans le cadre de l’ICC/IFD 2009 à 2014.
Ils ont également fait grief à l’AFC-GE de n’avoir toujours pas statué, malgré les mises en demeure des 17 mars 2023 et 12 janvier 2024, sur leur demande de révision du 11 février 2021 par laquelle ils sollicitaient la prise en compte des dommages-intérêts que le contribuable avait été condamné à verser aux HUG. Ils sollicitaient la rectification de leurs bordereaux de taxation ICC/IFD 2012 à 2014 conformément à ladite demande. Il en allait de même des bordereaux de taxation ICC/IFD 2015 à 2019.
v. L’AFC-GE a rejeté la réclamation par décision du 1er juillet 2024. La procédure de rappel d’impôt concernant les années 2007 et 2008 s’était terminée avec l’arrêt du Tribunal fédéral du 27 avril 2022 et le délai de prescription de cinq ans qui courait à compter de cet arrêt n’était pas échu. La condamnation pénale du contribuable ne pouvait par ailleurs pas être prise en compte, comme l’avait spécifié la chambre administrative dans son arrêt du 29 juin 2021. Une décision sur ce point serait rendue par le service de taxation dès l’entrée en force des bordereaux.
w. Par courrier du 12 juillet 2024, l’AFC-GE a relevé que la demande de révision du 11 février 2021 portait sur les périodes fiscales 2012 à 2019, qui se trouvaient à des stades de procédure différents. Concernant les périodes fiscales 2012 à 2014, elle ne pouvait pas statuer avant que les bordereaux rectificatifs soient entrés en force. La question du début du délai pour déposer une demande de révision avait par ailleurs été soulevée dans un dossier présentant une problématique similaire à celle des contribuables. Or, l’arrêt rendu par la chambre administrative dans cette affaire (ATA/1367/2023) faisait l’objet d’un recours devant le Tribunal fédéral. Il paraissait dès lors indiqué d’attendre les considérants de cet arrêt. Dans l’hypothèse où les contribuables refuseraient une telle suspension, elle entendait se fonder sur la jurisprudence issue de l’ATA/762/2023 du 11 juillet 2023, dont il découlait que le délai de révision avait, en l’espèce, commencé à courir le jour de l’audience devant le Ministère public genevois à l’issue de laquelle le contribuable avait été informé de son prochain renvoi en jugement.
B. a. Par acte du 31 juillet 2024, les époux A______ et B______ ont recouru au TAPI contre la décision sur réclamation du 1er juillet 2024, en sollicitant son annulation. Ils ont conclu à ce que le TAPI constate que la prescription absolue de quinze ans était atteinte pour les périodes fiscales 2007 et 2008, annule les bordereaux de taxation ICC/IFD ainsi que les bordereaux d’amende correspondants, modifie les bordereaux de taxation et d’amendes 2009 à 2014 afin que ceux-ci ne prennent plus en compte les éléments reportés des années 2007 et 2008, et réattribue les reports d’impôts trop perçus en 2007 et 2008 aux périodes 2009 et suivantes. Ils ont également conclu à la constatation d’un déni de justice de la part de l’AFC-GE du fait de l’absence de décision sur leur demande de révision du 11 février 2021.
La prescription absolue de quinze ans pour les périodes fiscales 2007 et 2008 devait être considérée comme atteinte dès lors que l’arrêt de la chambre administrative du 5 décembre 2023 n’avait pas mis un terme à la procédure de taxation. Contrairement au cas jugé par le Tribunal fédéral dans son arrêt du 13 novembre 2023 (9C_624/2023), les corrections à opérer selon l’arrêt de la chambre ne se résumaient pas à de simples calculs modifiant une période fiscale particulière. Elles impliquaient de redéfinir l’assiette d’imposition des périodes 2007 à 2014, plus précisément d’attribuer les éléments de revenus (à savoir les intérêts passifs) et les éléments de fortune (à savoir les dettes fiscales) aux bonnes périodes. Partant, l’AFC-GE n’avait pas procédé à la taxation de l’ensemble des éléments de revenus et de fortune dans les périodes concernées avant l’échéance du délai de prescription.
Ils avaient sollicité, le 11 février 2021, la reconsidération/révision de leurs taxations pour plusieurs périodes fiscales, notamment celles de 2012 à 2014. Ils avaient formellement mis l’AFC-GE en demeure de statuer sur cette demande par courrier du 17 mars 2023 et avaient réitéré cette mise en demeure le 12 janvier 2024. Dans la décision entreprise, l’AFC-GE avait allégué qu’elle ne pouvait intégrer cette demande à la procédure en cours et qu’elle la traiterait une fois celle-ci terminée. Or, cette autorité les avait précédemment invités à faire valoir leurs prétentions relatives à la dette issue de la procédure pénale et aux intérêts y afférents directement devant la chambre administrative, dans le cadre de la procédure qui était alors pendante. Ces revirements étaient constitutifs d’un déni de justice. L’AFC-GE mettait en outre gravement en péril leur situation financière, dès lors qu’elle ne s’attachait à traiter que les éléments à charge tout en repoussant le traitement des éléments à décharge. Pareil comportement était abusif.
b. L’AFC-GE a conclu au rejet du recours.
L’arrêt du Tribunal fédéral du 27 avril 2022 avait mis un terme à la procédure de taxation concernant les périodes fiscales 2007 à 2014 avant que le droit de procéder aux rappels d’impôt pour les périodes 2007 à 2013 ainsi que la poursuite pénale de la soustraction d’impôt consommée pour les années 2008 à 2014 ne soient prescrits. À la suite de cet arrêt, elle avait notifié aux contribuables des bordereaux rectificatifs de rappel d’impôt et d’amende pour les années 2008 à 2014 qui intégraient les modifications ordonnées par les décisions judiciaires successives.
Dans les premiers bordereaux d’exécution notifiés le 20 mai 2022, elle avait toutefois déduit les intérêts sur rappel d’impôt en année « n+l » et non en année « n » comme le préconisait l’ATF 144 II 359. La chambre administrative avait ainsi partiellement admis le recours dans son arrêt du 5 décembre 2023 et lui avait renvoyé le dossier pour nouvelle décision au sens des considérants, non sans préciser qu’après l’arrêt du Tribunal fédéral du 27 avril 2022, elle ne disposait plus d’aucune marge de manœuvre quant à la méthode à appliquer pour les calculs des intérêts sur les rappels d’impôt.
Les bordereaux rectificatifs ICC/IFD 2007 à 2014 du 20 mars 2024 comportaient bien cette seule et unique rectification, à savoir le calcul des intérêts sur rappel d’impôt en année « n » au lieu de l’année « n+l ». Ils ne faisaient qu’exécuter une décision de base et ne pouvaient avoir pour effet de remettre en cause une décision administrative entrée en force. Les contribuables ne pouvaient plus qu’invoquer la prescription du droit de percevoir l’impôt au sens des art. 121 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - RS 642.11) et 42 de la loi relative à la perception et aux garanties des impôts des personnes physiques et des personnes morales du 26 juin 2008 (LPGIP - D 3 18). Celle-ci n’était toutefois pas atteinte, tant sous l’angle relatif qu’absolu. Leur conclusion en annulation des bordereaux 2007 et 2008 ainsi que celles portant sur les reports à opérer sur les périodes fiscales suivantes étaient donc infondées.
Il en allait de même de la conclusion tendant à la constatation d’un déni de justice. Dans son courrier du 12 juillet 2024, elle avait indiqué qu’elle se prononcerait sur la demande de révision des contribuables lorsque la décision sur réclamation serait entrée en force. Elle avait également indiqué qu’un recours était pendant devant le Tribunal fédéral dans un dossier présentant une problématique similaire à celle du cas d’espèce. Il convenait dès lors d’attendre les considérants du Tribunal fédéral dans cette cause.
c. Les contribuables ont répliqué en relevant que, contrairement à ce que prétendait l’AFC-GE, le Tribunal fédéral n’avait pas mentionné, dans son arrêt du 27 avril 2022, que celui-ci mettait un terme à la prescription absolue de quinze ans en ce qui concernait les périodes fiscales litigieuses. Ce point n’était pas soumis à son examen. Un tel effet pourrait éventuellement résulter de l’arrêt de la chambre administrative du 5 décembre 2023. Celui-ci n’était toutefois entré en force qu’en janvier 2024, soit après l’expiration du délai de prescription absolue pour les périodes fiscales 2007 et 2008.
Les arguments de l’AFC-GE relatifs à la prétendue absence de déni de justice étaient contradictoires. Cette autorité ne pouvait refuser de traiter la demande de révision formulée le 11 février 2021 dans le cadre de la présente procédure au motif qu’il s’agissait d’un dossier indépendant et conditionner en parallèle l’examen de cette demande à la fin définitive de la présente procédure.
d. Par jugement du 19 mai 2025, le TAPI a rejeté le recours.
Ni le droit de procéder à la taxation ni celui de percevoir l’ICC l’IFD n’étaient prescrits. Il en allait de même du droit de procéder à la poursuite pénale.
Certes, à deux reprises, dans ses arrêts du 29 juin 2021et du 5 décembre 2023, la chambre avait écarté la demande des contribuables qu’il soit statué sur la prise en compte de leur dette résultant de la procédure pénale, la première fois en indiquant que cette question ne faisait pas l’objet du litige qui lui était soumis, et la seconde fois en précisant que cette problématique était pendante auprès du service de taxation de l’AFC-GE. Pour autant, ces arrêts n’excluaient pas qu’il faille examiner cette question, le cas échéant postérieurement aux procédures judiciaires susmentionnées, ce qui ressortait en particulier de la motivation du second.
On pouvait se demander si, à la suite de l’arrêt du 5 décembre 2023, l’AFC-GE n’aurait pas été en mesure à ce moment-là, dans le cadre des nouveaux bordereaux rectificatifs, de statuer sur la prise en compte de la dette susmentionnée. Quand bien même l’on répondrait à cette question par l’affirmative, de sorte que le grief de déni de justice dont se plaignent les recourants serait théoriquement fondé, force serait toutefois de constater que les précités avaient eux-mêmes rendu cette question sans objet au moment même de leur réclamation contre les nouveaux bordereaux rectificatifs du 19 mars 2024. En effet, en invoquant à cette occasion la prescription des périodes fiscales 2007 et 2008, question également soumise au TAPI dans le cadre de la présente procédure, ils avaient conclu qu’en raison d’une telle prescription, les dettes chirographaires sur rappels d’impôts déduites de la fortune dans le cadre de l’ICC 2009 à 2014 devaient être rectifiées en conséquence. Il en allait de même, selon eux, des intérêts moratoires sur rappel d’impôt déduits du revenu dans le cadre de l’ICC/IFD 2009 à 2014. Dans ces conditions, dès le moment de la réclamation, l’AFC-GE n’était plus en mesure de statuer sur leur demande de révision : en effet, par définition, cette demande de révision ne pouvait pas être examinée aussi longtemps que les contribuables remettaient en question les bordereaux fiscaux établis pour les périodes fiscales 2007 à 2014. Le fait qu’il aient obtenu partiellement gain de cause dans les précédentes procédures judiciaires n’y changeait rien.
Le chef de conclusions tendant à la constatation d’un déni de justice était ainsi rejeté.
Compte tenu de l’issue du recours sur ce point, la question de savoir si l’AFC-GE aurait dû notifier une décision de suspension susceptible de recours conformément à l’art. 14 LPA, était sans objet.
C. a. Par acte expédié le 18 juin 2025 à la chambre administrative, A______ et B______ ont recouru contre ce jugement, dont ils ont demandé l’annulation. Il convenait de constater la prescription des années fiscales 2007 et 2008, annuler les bordereaux de taxation et d’amendes y relatifs, modifier les bordereaux de taxation et d’amende 2009 à 2014 en y intégrant les éléments reportés des années 2007 et 2008, réattribuer les reports d’impôts trop perçus aux périodes 2009 et suivantes, constater un déni de justice en l’absence de décision relative à leur demande de révision/reconsidération du 11 février 2021, constater que l’AFC-GE n’avait pas traité une partie de leurs demandes formulées le 17 avril 2024, porter en déduction de la fortune le montant dû à titre de dommages et intérêts aux HUG à compter de la taxation 20212 et en déduction du revenu, dès 2012, les intérêts annuellement dus aux HUG
Lorsque le Tribunal fédéral avait statué, le 13 novembre 2023, la prescription absolue de quinze ans n’était pas encore acquise. En revanche, lorsque la chambre administrative avait rendu son arrêt, le 5 décembre 2023, ladite prescription était acquise pour les années 2007 et 2008. Cela entraînait la modification de l’assiette fiscale pour les périodes 2007 à 2014. Les éléments de fortune et de revenus n’avaient pas encore été pris en compte par l’AFC-GE. Il ne s’agissait donc pas de refaire des calculs de taxation, mais d’attribuer des revenus et fortune aux périodes concernées.
Ils avaient mis l’AFC-GE en demeure de traiter leur demande en reconsidération/révision. En ce qui concernait les années fiscales 2012 à 2014, rien n’empêchait l’AFC-GE de traiter leur demande. Il y avait donc déni de justice.
L’objet de la présente procédure étaient les bordereaux d’impôts émis le 9 mars 2024. De nouveaux bordereaux ayant été émis, l’AFC-GE se devait d’examiner la demande de reconsidération/révision dans le cadre de la réclamation formée contre les bordereaux précités. Or, l’autorité fiscale n’avait pas traité la prise en compte, dès l’année fiscale 2012 du montant au paiement duquel il avait été condamné et aux intérêts y relatifs.
b. L’AFC-GE a conclu au rejet du recours.
c. Dans leur réplique, les recourants ont fait valoir que l’intimée ne se prononçait pas sur leurs griefs, se contentant de reprendre le raisonnement du TAPI, qui avait fait sien celui de l’AFC-GE. La réclamation relative à la prise en compte dès 2012 des éléments résultant de la condamnation pénale du recourant portait sur des bordereaux qui n’étaient pas encore entrés en force. Il convenait donc d’examiner les éléments soulevés dans leur demande en reconsidération/révision contenus dans leur réclamation.
d. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.
1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ ‑ E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 ‑ LPA ‑ E 5 10).
2. Le litige porte sur les bordereaux de rappels d’impôts 2007 à 2014 et d’amendes 2008 à 2014.
2.1 Selon l’art. 59 let. b LPA, législation applicable par renvoi de l'art. 2 al. 2 de la loi de procédure fiscale du 4 octobre 2001 (LPFisc - D 3 17), le recours n’est pas recevable contre les mesures d’exécution des décisions. L’interdiction d’attaquer les mesures d’exécution vise à soustraire au contrôle juridictionnel les actes qui, sans les modifier ni contenir d’éléments nouveaux, ne servent qu’à assurer la mise en œuvre de décisions exécutoires au sens de l’art. 53 al. 1 let. a LPA. Le contrôle incident de ces dernières s’avère par conséquent exclu. La notion de « mesures » à laquelle se réfère le texte légal s’interprète largement et ne comprend pas seulement les actes matériels destinés à assurer l’application de décisions, mais également toutes les décisions mettant ces dernières en œuvre (ATA/1033/2023 du 19 septembre 2023 consid. 5.1 et les arrêts cités).
Une décision de base ne peut en principe pas être remise en cause, à l’occasion d’une nouvelle décision qui exécute l’acte de base (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2e éd., 2018, p. 398 et 399 n. 1150). Le contrôle des décisions administratives en force est aussi en principe exclu, que ce soit par un tribunal ou par une autorité administrative, notamment à l’occasion d’une nouvelle décision qui exécute la décision de base (Thierry TANQUEREL, op. cit., p. 231 n. 640). Si un recours n’est pas formé contre une décision de principe, le requérant est forclos pour se prévaloir de sa non-validité au moment où il voudra mettre en cause les décisions prises en conséquence de cette première décision. La décision de principe ne peut donc pas être revue incidemment à l’occasion d’un recours contre des décisions d’exécution (ATA/1438/2017 du 31 octobre 2017 consid. 5b).
2.2 Un arrêt de renvoi constitue en principe une décision incidente contre laquelle aucun recours n’est ouvert, sauf lorsque l’autorité à laquelle l’affaire est renvoyée n’a aucune marge de manœuvre, notamment lorsqu’il ne lui reste plus qu’à calculer le montant de l’impôt, en appliquant les règles définies dans la décision de renvoi ; un tel arrêt est en effet considéré comme final (ATF 144 II 359 consid. 2.2.1 ; 138 I 143 consid. 1.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_1085/2018 du 12 décembre 2018 consid. 4.3).
Lorsqu’une autorité motive le renvoi d’une affaire, ses considérants de droit lient l’autorité inférieure ainsi que les parties, en ce sens que ces dernières ne peuvent plus faire valoir dans un recours contre la nouvelle décision de première instance des moyens qui ont été rejetés dans l’arrêt de renvoi. En raison de l’autorité de la chose jugée, de tels moyens sont irrecevables (ATF 133 III 201 consid. 4 ; 120 V 233 consid. 1a). En revanche, la nouvelle décision de l’autorité inférieure peut faire l’objet d’un recours au motif qu’elle n’est pas conforme aux considérants de l’arrêt de renvoi (arrêts du Tribunal fédéral 2C_422/2017 du 22 mai 2017 consid. 4.1 ; 2C_381/2012 du 6 mai 2012).
2.3 L'autorité de la chose jugée (ou force de chose jugée au sens matériel) interdit de remettre en cause, dans une nouvelle procédure, entre les mêmes parties, une prétention identique qui a été définitivement jugée (ATF 144 I 208 consid. 3.1 ; 142 III 210 consid. 2.1). Il y a identité de l'objet du litige quand, dans l'un et l'autre procès, les parties soumettent au juge la même prétention, en reprenant les mêmes conclusions et en se basant sur le même complexe de faits. L'identité de l'objet du litige s'entend au sens matériel ; il n'est pas nécessaire, ni même déterminant que les conclusions soient formulées de manière identique (arrêt du Tribunal fédéral 8C_816/2015 du 12 septembre 2016 consid. 3.1 et les références citées).
2.4 À teneur des art. 147 al. 1 LIFD et 55 al. 1 LPFisc, qui institue un cas de reconsidération obligatoire, une décision entrée en force peut être révisée (par quoi il faut entendre reconsidérée, le terme révision étant en effet destiné au réexamen des décisions judiciaires ; Thierry TANQUEREL, op. cit., p. 494 s. n. 1433 ss) en faveur du contribuable, à sa demande ou d'office, lorsque des faits importants ou des preuves concluantes sont découverts (let. a), lorsque l'autorité qui a statué n'a pas tenu compte de faits importants ou de preuves concluantes qu'elle connaissait ou devait connaître, ou qu'elle a violé de quelque autre manière l'une des règles essentielles de la procédure (let. b) ou lorsqu'un crime ou un délit a influé sur la décision ou le prononcé (let. c).
2.5 En l’espèce, les bordereaux litigieux ont été rendus en exécution des arrêts de la chambre administrative du 29 juin 2021 et du Tribunal fédéral du 27 avril 2022. Ceux-ci sont entrés en force. L’objet de la contestation est donc limité à la bonne exécution des arrêts de renvoi. Or, les recourants ne font pas valoir que l’autorité intimée n’aurait pas respecté ces arrêts de renvoi. En tant qu’ils estiment qu’ayant formé réclamation contre les bordereaux rectificatifs du mois de mars 2024, il aurait appartenu à l’autorité fiscale de réexaminer leurs griefs matériels, ils ne peuvent être suivis. Seule l’exécution correcte des arrêts de renvoi peut être critiquée dans le cadre de la contestation d’une décision d’exécution. C’est ainsi à juste titre que l’AFC-GE n’est pas entrée en matière sur la demande de déduction de la somme et des intérêts y relatifs au paiement desquels le recourant a été condamné.
Le grief sera ainsi écarté.
3. Les recourants se prévalent de la prescription absolue du droit de taxer.
3.1 La prescription et la péremption sont des questions de droit matériel examinées d'office lorsqu'elles jouent en faveur du contribuable (ATF 138 II 169 consid. 3.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 9C_598/2023 du 22 novembre 2023 consid. 6.1 ; ATA/976/2021 du 21 septembre 2021 consid. 2a) tant pour l'IFD que les ICC, lorsque celles-ci se fondent sur le droit fédéral (ATF 138 II 169 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_41/2020 du 24 juin 2020 consid. 4).
3.2 En matière fiscale, lorsque le dossier est renvoyé à l’administration fiscale cantonale afin que celle-ci émette de nouveaux bordereaux tenant compte d’une déduction admise en cours de procédure ou d’une nouvelle valorisation de titres, un tel renvoi ne porte que sur le calcul, sans aucune marge de manœuvre pour l’autorité cantonale (arrêts du Tribunal fédéral 9C_624/2023 du 18 décembre 2023 consid. 4.1 et 2C_700/2022 du 25 novembre 2022 consid. 16.2). À supposer que les nouveaux bordereaux émis par l’administration en application d’une taxation entrée en force soient contestés et doivent éventuellement être corrigés, cela ne remet pas en cause l’entrée en force de cette taxation. Le problème se limite au respect du délai fixé par l’art. 121 LIFD pour percevoir l’impôt (arrêt du Tribunal fédéral 2C_138/2020 du 3 décembre 2020 consid. 8).
3.3 Selon l’art. 21 LIFD, les créances d’impôt se prescrivent par cinq ans à compter de l’entrée en force de la taxation (al. 1). La prescription est acquise dans tous les cas dix ans à compter de la fin de l’année au cours de laquelle la taxation est entrée en force (al. 3).
3.4 Les créances d’impôt se prescrivent par cinq ans à compter de l’entrée en force de la taxation; en cas de suspension ou d’interruption de la prescription, celle-ci est acquise dans tous les cas dix ans après la fin de l’année au cours de laquelle la taxation est entrée en force (art. 47 al. 2 loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 - LHID - RS 642.14).
3.5 Le droit cantonal a une teneur similaire, à savoir que les créances relatives aux impôts, rappels d'impôt, amendes, intérêts et frais, de l'Etat et des communes, se prescrivent par cinq ans à compter de l'entrée en force de la décision, du prononcé ou du jugement et que la prescription est acquise dans tous les cas dix ans à compter de la fin de l'année au cours de laquelle la décision, le prononcé ou le jugement sont entrés en force (art. 42 al. 1 et 3 LPGIP).
3.6 En l’espèce, il convient, en premier lieu, de relever que seule peut être examinée la question de savoir si les créances d’impôts litigieuses sont prescrites. La question de savoir si le droit de procéder aux taxations ayant donné lieu aux arrêts de la chambre administrative du 29 juin 2021 et du Tribunal fédéral du 27 avril 2022, est prescrit ne peut plus être examinée. La question de l’éventuelle prescription de ce droit pouvait et devait être analysée dans le cadre des décisions de taxation. Celles‑ci étant entrées en force, il ne peut qu’être examiné si les créances fiscales entrées en force sont atteintes de prescription.
Tel n’est pas le cas. En effet, que l’on prenne comme date de début du délai de prescription de la créance fiscale l’arrêt du Tribunal fédéral du 27 avril 2022 ou celle, comme le souhaitent les recourants, de l’arrêt de la chambre administrative du 5 décembre 2023, le délai de prescription de cinq ans des créances fiscales en cause n’est pas atteint.
Le grief est donc également infondé.
4. Reste encore à examiner si l’AFC-GE doit se voir reprocher un déni de justice du fait qu’elle n’a, en l’état, pas statué sur la demande de reconsidération/révision formée le 21 février 2021 par les recourants.
4.1 Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable (art. 29 al. 1 de la Constitution fédérale du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101).
4.2 Lorsqu’une autorité mise en demeure refuse sans droit de statuer ou tarde à se prononcer, son silence est assimilé à une décision (art. 4 al. 4 LPA, applicable par renvoi de l’art. 2 al. 2 LPFisc). Dans un tel cas, une partie peut recourir en tout temps pour déni de justice ou retard non justifié si l’autorité concernée ne donne pas suite rapidement à la mise en demeure prévue à l’art. 4 al. 4 LPA (art. 63 al. 6 LPA). Lorsque l’autorité compétente refuse expressément de rendre une décision, les règles de la bonne foi (art. 5 al. 3 Cst.) imposent que le recours soit interjeté dans le délai légal, sous réserve éventuelle d’une fausse indication quant audit délai (ATA/939/2021 du 14 septembre 2021 consid. 3a ; ATA/1722/2019 du 26 novembre 2019 consid. 2b et les références citées).
4.3 Une autorité qui n’applique pas ou applique d’une façon incorrecte une règle de procédure, de sorte qu’elle ferme l’accès à la justice au particulier qui, normalement, y aurait droit, commet un déni de justice formel. Il en va de même pour l’autorité qui refuse expressément de statuer, alors qu’elle en a l’obligation. Un tel déni constitue une violation de l’art. 29 al. 1 Cst. (ATF 135 I 6 consid. 2.1 ; 134 I 6 consid. 2.3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2D_59/2013 du 4 juillet 2014 consid. 2.1).
4.4 En cas de recours contre la seule absence de décision, les conclusions ne peuvent tendre qu’à contraindre l’autorité à statuer (ATA/595/2017 du 23 mai 2017 consid. 6c). En effet, conformément à l’art. 69 al. 4 LPA, si la juridiction administrative admet le recours pour déni de justice ou retard injustifié, elle renvoie l’affaire à l’autorité inférieure en lui donnant des instructions impératives (ATA/373/2020 du 16 avril 2020 consid. 6a).
4.5 Selon l'art. 147 al. 1 LIFD, une décision ou un prononcé entré en force peut être révisé en faveur du contribuable, à sa demande ou d'office : lorsque des faits importants ou des preuves concluantes sont découverts (let. a) ; lorsque l'autorité qui a statué n'a pas tenu compte de faits importants ou de preuves concluantes qu'elle connaissait ou devait connaître ou qu'elle a violé de quelque autre manière l'une des règles essentielles de la procédure (let. b) ; lorsqu’un crime ou un délit a influé sur la décision ou le prononcé (let. c).
4.6 Conformément à l'art. 51 al. 1 LHID et à l'art. 55 al. 1 LPFisc, dont la teneur est identique, une décision ou un prononcé entré en force peut être révisé en faveur du contribuable, à sa demande ou d'office, lorsque des faits importants ou des preuves concluantes sont découverts (let. a), lorsque l'autorité qui a statué n'a pas tenu compte de faits importants ou de preuves concluantes qu'elle connaissait ou devait connaître ou qu'elle a violé de quelque autre manière l'une des règles essentielles de la procédure (let. b), lorsqu'un crime ou un délit a influé sur la décision ou le prononcé (let. c).
4.7 Lorsque le sort d’une procédure administrative dépend de la solution d’une question de nature civile, pénale ou administrative relevant de la compétence d’une autre autorité et faisant l’objet d’une procédure pendante devant ladite autorité, la suspension de la procédure administrative peut, le cas échéant, être prononcée jusqu’à droit connu sur ces questions (art. 14 al. 1 LPA). L'art. 14 LPA est une norme potestative et son texte clair ne prévoit pas la suspension systématique de la procédure chaque fois qu'une autorité civile, pénale ou administrative est parallèlement saisie (ATA/1493/2019 du 8 octobre 2019 consid. 3b et l'arrêt cité). La suspension de la procédure ne peut pas être ordonnée chaque fois que la connaissance du jugement ou de la décision d'une autre autorité serait utile à l'autorité saisie, mais seulement lorsque cette connaissance est nécessaire parce que le sort de la procédure en dépend (ATA/630/2008 du 16 décembre 2008 consid. 5).
4.8 Dans sa décision sur réclamation du 20 juin 2024 relative aux nouveaux bordereaux rectifiés de mars 2024, l’AFC-GE a expliqué que, conformément à l’arrêt de la chambre administrative du 29 juin 2021 indiquant que les éléments issus de la condamnation pénale du recourant n’avaient aucun rapport avec la procédure en rappel d’impôts et d’amende, elle rendrait une décision une fois les décisions de rappels d’impôts et d’amende entrées en force.
Par courrier du 12 juillet 2024, l’AFC-GE a fait suite à la mise en demeure des recourants de statuer sur leur demande en reconsidération/révision concernant les taxations 2012 à 2019. Elle y expliquait que les taxations concernant les années en cause se trouvaient à des stades différents. Celles relatives aux années 2012 à 2014 avaient fait l’objet de bordereaux rectificatifs, qui n’étaient pas encore entrés en force. Elle se prononcerait une fois ces bordereaux devenus définitifs. Elle relevait pour le surplus que, dans un dossier similaire à celui des recourants (ATA/1367/2023), la question de savoir quand le délai pour demander la révision avait commencé à courir n’était pas encore tranchée par le Tribunal fédéral. Elle proposait d’attendre les considérants du Tribunal fédéral sur cette question et de suspendre la cause jusqu’à ce que ceux-ci soient connus. Si les recourants refusaient la suspension, l’administration n’aurait d’autre choix que de se fonder sur les considérants de l’ATA/762/2023 du 11 juillet 2023, auquel elle renvoyait, qui avait retenu que le délai de révision avait commencé à courir le 8 décembre 2017.
Pour les taxations 2015, l’AFC-GE allait rendre une décision sur réclamation, qui tiendrait compte des éléments avancés dans la demande de révision, dès lors que cette taxation n’était pas encore entrée en force. Les taxations 2016 à 2018 n’avaient pas été contestées et étaient entrées en force. L’autorité intimée préconisait d’attendre également les considérants du Tribunal fédéral et précisait qu’en cas de refus de suspension, elle appliquerait la solution retenue dans l’ATA/762/2023 fixant le début du délai de révision au 8 décembre 2017.
Enfin, la taxation de 2019 avait fait l’objet d’une réclamation, dans le cadre de laquelle les éléments plaidés dans la demande en révision seraient traités.
Il convient, en premier lieu, de rappeler que la présente procédure se rapporte aux bordereaux rectificatifs des années 2007 à 2014 et que la demande en révision vise la prise en compte, dès 2012, du montant et des intérêts y relatifs au paiement desquels le recourant a été condamné. Ainsi, le traitement de ladite demande en ce qu’elle se rapporte aux autres années fiscales est exorbitante au présent litige.
En ce qui concerne les années fiscales 2012 à 2014, il faut déduire du recours formé par les recourants devant le TAPI et la chambre de céans que, bien qu’il ne ressorte pas du dossier qu’ils aient répondu au courrier de l’AFC-GE du 12 juillet 2024, ils s’opposaient à la suspension de la procédure de révision et sollicitaient que l’autorité traite leur demande en révision sans attendre l’entrée en force des bordereaux de taxation relatifs aux années précitées.
Il n’est plus contesté que – contrairement à ce qu’avait retenu la chambre administrative dans son arrêt du 5 décembre 2023 – les recourants ont mis l’administration en demeure, notamment le 17 mars 2023, de rendre une décision à ce sujet. La chambre administrative a, tant dans la procédure relative aux décisions de taxation qu’à celle se rapportant à l’exécution de celles-ci, considéré qu’il n’y avait pas lieu de traiter la demande en révision dans le cadre de ces procédures. En effet, dans son arrêt du 29 juin 2021, elle a déclaré irrecevables les conclusions relatives à la prise en compte de nouvelles déductions en lien avec la condamnation pénale. Ce point n’a pas été critiqué dans la procédure devant Tribunal fédéral ayant abouti à l’arrêt de celui-ci du 27 avril 2022. Dans son arrêt du 5 décembre 2023, la chambre administrative a considéré que ces déductions ne pouvaient être examinées dans la procédure alors pendante devant elle, sous peine d’étendre la contestation à de nouvelles déductions qui ne faisaient pas l’objet de celle-ci.
Ce faisant, la chambre administrative a déjà répondu au souhait des recourants d’inclure dans la présente procédure leur demande en révision ayant pour but d’admettre des nouvelles déductions. Il n’y a pas lieu de s’écarter du raisonnement précédemment tenu.
Partant, le grief de déni de justice en tant qu’il porte sur l’absence de traitement de la demande en révision des recourants dans le cadre de l’établissement des bordereaux rectificatifs émis en mars 2024 est infondé.
Il est encore précisé que, s’il fallait considérer que l’AFC-GE avait, de fait, suspendu la demande en révision, une telle décision demeurerait compatible avec le pouvoir d’appréciation de l’autorité intimée, au vu du caractère potestatif de l’art. 14 LPA et de l’intérêt à une certaine cohérence avec la procédure suivie jusqu’alors.
Au vu de ce qui précède, le recours, mal fondé, sera rejeté.
5. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge des recourants, qui ne peuvent se voir allouer une indemnité de procédure (art. 87 LPA).
* * * * *
PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE
à la forme :
déclare recevable le recours interjeté le 18 juin 2025 par A______ et B______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 19 mai 2025 ;
au fond :
le rejette ;
met un émolument de CHF 1'000.- à la charge solidaire de A______ et B______ ;
dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;
dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession des recourants, invoquées comme moyens de preuve, doivent être jointes à l'envoi ;
communique le présent arrêt à A______ et B______, à l'administration fiscale cantonale, à l'administration fédérale des contributions ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.
Siégeant : Florence KRAUSKOPF, présidente, Jean-Marc VERNIORY, Claudio MASCOTTO, juges.
Au nom de la chambre administrative :
| la greffière-juriste :
D. WERFFELI BASTIANELLI
|
| la présidente siégeant :
F. KRAUSKOPF |
Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.
| Genève, le |
| la greffière : |