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Décisions | Chambre pénale d'appel et de révision

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P/7886/2012

AARP/487/2014 (3) du 01.10.2014 sur JTCO/154/2013 ( PENAL ) , JUGE

*** ARRET DE PRINCIPE ***
Descripteurs : ADMINISTRATION DES PREUVES; PRÉSOMPTION D'INNOCENCE; IN DUBIO PRO REO; TÉMOIN; ESCROQUERIE; TENTATIVE(DROIT PÉNAL); FAUX MATÉRIEL DANS LES TITRES; FAUX DANS LES CERTIFICATS; COMPLICITÉ; DÉCISION; RECTIFICATION(EN GÉNÉRAL)
Normes : CEDH.3; CEDH.6.2; CPP.83.1; CP.22; CP.25; CP.146; CP.179; CP.251.1; CP 252
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

P/7886/2012AARP/487/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale d'appel et de révision

Arrêt du 1er octobre 2014

 

Entre

A______, actuellement détenu à la prison de Champ-Dollon, 1241 Puplinge, comparant par Me Bernard NUZZO, avocat, rue De-Candolle 6, 1205 Genève,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6b, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565 - 1211 Genève 3,

appelants et intimés sur autre appel,

 

contre le jugement JTCO/154/2013 rendu le 14 octobre 2013 par le Tribunal correctionnel,

 

et

B______, domicilié ______, assisté de Me Habib TABET, avocat, avenue de la Gare 25, case postale 380, 1800 Vevey,

C______, domiciliée ______,

D______, domiciliée ______,

E______, domicilié ______,

F______, domicilié ______,

G______, domicilié ______,

H______, ______,

I______, ______,

J______, ______,

intimés.

 


EN FAIT :

A. a. Par courriers des 18 et 21 octobre 2013, le Ministère public, respectivement A______, ont annoncé appeler du jugement du Tribunal correctionnel du 14 octobre 2013, dont les motifs ont été notifiés le 26 novembre 2013, par lequel le tribunal de première instance a :

- acquitté A______ des infractions visées sous lettre C.a) ch. 1, 2, 4 et 5 de l'acte d'accusation [cas G______, K______, D______ et L______], l'a reconnu coupable d'escroquerie par métier, de violation de secrets privés et de faux dans les titres pour d'autres faits similaires (lettre C.a) ch. 3, 6, 7, 8, 9 et 10 [cas E______, M______, N______, O______, F______ et C______]), l'a condamné à une peine privative de liberté de trois ans et demi, sous déduction de 265 jours de détention avant jugement, comprenant 40 jours de détention à titre extraditionnel, à une amende de CHF 500.- (peine privative de liberté de sR______titution de cinq jours) et à payer à la J______ CHF 15'000.- à titre de réparation du dommage matériel, à H______ CHF 9'000.-, avec intérêts à 5 % dès le 9 décembre 2011, à titre de réparation du dommage matériel et CHF 2'150.- à titre d'indemnité de procédure, à s'acquitter des trois quarts des frais de procédure, par CHF 5'693,35, y compris un émolument de jugement de CHF 3'000.-, et l'a maintenu en détention pour des motifs de sûreté par décision séparée ;

- acquitté B______ des infractions visées sous lettre C.b) ch. 1, 2 et 4 de l'acte d'accusation [cas L______, M______ et O______], l'a reconnu coupable de complicité d’escroquerie pour d'autres faits (lettre C.b) ch. 3 [cas N______]), de tentative d’escroquerie et de faux dans les titres (lettre C.b) ch. 5 [cas F______]), l'a condamné à une peine pécuniaire de 360 jours-amende, à CHF 40.- le jour, sous déduction de sept jours-amende équivalant à sept jours de détention avant jugement, avec sursis, délai d'épreuve de trois ans, ainsi qu'à un quart des frais de procédure ;

- ordonné la confiscation de l'ensemble des pièces saisies par les autorités vaudoises, sous réserve de leur restitution à B______.

b. Par acte du 16 décembre 2013, A______ a déposé une déclaration d'appel en application de l'art. 399 al. 3 du Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (CPP ; RS 312.0), aux termes de laquelle il attaque le jugement dans son ensemble, conclut à son acquittement de toutes les infractions reprochées et à l'octroi d'une indemnité de CHF 200.- par jour de détention subie à tort, sollicitant l'audition de P______ à titre de réquisition de preuves.

c. Par déclaration expédiée le 17 décembre 2013 par messagerie sécurisée à la Chambre pénale d'appel et de révision (ci-après : CPAR), le Ministère public :

- conteste l'acquittement de A______ s'agissant des cas G______, K______ et D______ (lettre C.a) ch. 1, 2 et 4 de l'acte d'accusation) et conclut à sa condamnation pour l'ensemble des faits reprochés à une peine privative de liberté de cinq ans ;

- conteste l'acquittement de B______ de faux dans les titres étrangers et de violation des secrets privés (implicitement) dans le cas N______ (lettre C.b) ch. 3 de l'acte d'accusation), de violation des secrets privés (implicitement) dans le cas F______ (lettre C.b) 5), de tentative d'escroquerie, faux dans les titres étrangers et violation des secrets privés s'agissant du cas M______ (lettre C.b) ch. 2), d'escroquerie, faux dans les titres étrangers et violation des secrets privés concernant le cas O______ (lettre C.b) ch. 4) ainsi que le fait que B______ n'ait pas été reconnu coupable de coactivité d'escroquerie dans le cas N______ (lettre C.b) ch. 3) et, plus généralement, d'escroquerie par métier, et conclut à sa condamnation à une peine privative de liberté de 2 ans assortie du sursis partiel, la partie ferme de la peine devant être fixée à un an.

d.a Selon l'acte d'accusation du Ministère public du 25 juillet 2013, il est notamment reproché à A______ d'avoir commis, à Genève, plusieurs escroqueries entre ______2010 et ______ 2011, toutes commises suivant un modus operandi identique. Un courrier contenant des vieux journaux était livré et remis à la victime contre sa signature. Son relevé de compte bancaire était ensuite dérobé dans sa boîte aux lettres. Puis, une personne munie d'une fausse carte d'identité ______ réalisée au nom de la victime était chargée de procéder à un ou plusieurs retraits sur le compte de celle-ci, à l'instar de ce qu'ont notamment fait P______ et B______. A cette occasion, un faux chèque pouvait également être présenté à l'encaissement, ce qui permettait à son porteur d'ajuster le montant du retrait frauduleux en retirant du compte une somme inférieure à la somme figurant sur le chèque.

Il lui est ainsi reproché, pour ce qui est des infractions encore pertinentes, d'avoir agi, par coactivité avec des comparses dont B______, au détriment de :

- des époux G______ et Q______, ainsi que du I______ (ci-après : I______). Une enveloppe a été livrée le 23 novembre 2010 au domicile des époux G______, afin d'obtenir la signature de Q______. P______ s'est ensuite présentée le 1er décembre 2010 au guichet du I______ à ______ munie d'une fausse carte d'identité ______ au nom d'Q______. Elle en a imité la signature en présentant à l'encaissement un chèque volé qui n'a pas pu être crédité. Elle a retiré CHF 37'000.- du compte Q______ en imitant sa signature (C.a) ch.1 de l'acte d'accusation) ;

- K______, à laquelle un colis a été livré contre signature par B______ le 15 février 2011. P______ s'est ensuite présentée le 4 mars 2011 au guichet R______ (ci-après : R______) de ______ munie d'une fausse carte d'identité ______ au nom de K______ dont elle a imité la signature en présentant à l'encaissement un chèque volé qui n'a pas pu être crédité. Elle a tenté de retirer CHF 22'000.- du compte bancaire en s'apprêtant à imiter sa signature (C.a) ch. 2) ;

- E______ et S______, ainsi que de J______ (ci-après : J______). Un colis contre signature a été livré fin février 2011 à S______. Le 4 mars 2011, P______ s'est présentée au guichet de la J______ de ______ munie d'une fausse carte d'identité ______ au nom de S______ dont elle a imité sa signature en présentant à l'encaissement un chèque volé qui n'a pas pu être crédité. Elle a retiré CHF 15'000.- du compte de cette dernière en imitant sa signature (C.a) ch. 3) ;

- D______ et de J______. Une enveloppe a été livrée contre signature début mars 2011 à D______. P______ s'est présentée le 16 mars 2011 au guichet de J______ de ______ munie d'une fausse carte d'identité ______ au nom de D______ dont elle a imité la signature en présentant à l'encaissement un chèque volé qui n'a pas pu être crédité. Elle a retiré CHF 33'000.- du compte bancaire en imitant sa signature (C.a) ch. 4) ;

- M______, à laquelle B______ a livré un colis contre signature au début du mois de juin 2011. Le 25 juin 2011, P______ s'est présentée au guichet de R______ de ______ munie d'une fausse carte d'identité ______ au nom de M______ et a tenté de retirer le solde de son compte en imitant sa signature (C.a) ch. 6) ;

- N______, à laquelle un colis a été livré contre signature le 20 juin (recte mai) 2011. P______ s'est présentée le 3 juin 2011 au guichet de T______ de ______, munie d'une fausse carte d'identité ______ au nom N______. Elle a retiré CHF 32'000.- de son compte en imitant sa signature (C.a) ch. 7) ;

- O______ et de H______ (ci-après : H______). Fin juin - début juillet (recte fin mai - début juin) 2011, une enveloppe a été livrée à O______, contre signature, par B______. Un inconnu s'est présenté le 23 juin 2011 aux guichets de H______ d'______ et de ______ muni d'une fausse carte d'identité ______ au nom de O______. Il a retiré deux fois CHF 4'500.- du compte bancaire en imitant sa signature (C.a) ch. 8) ;

- F______, auquel une enveloppe a été livrée contre signature le 27 juin 2011. B______ s'est présenté le 8 juillet 2011 au guichet de T______ de ______ muni d'une fausse carte d'identité ______ au nom de F______. Il a tenté de retirer CHF 50'000.- de son compte en imitant sa signature (C.a) ch. 9) ;

- C______, à laquelle un colis a été livré contre signature le 19 septembre 2011. P______ s'est présentée le 30 septembre 2011 au guichet de la J______ de ______munie d'une fausse carte d'identité ______ au nom de C______ dont elle a imité la signature en présentant à l'encaissement un chèque volé qui n'a pas pu être crédité. Elle a tenté de retirer CHF 47'000.- du compte bancaire en imitant sa signature (C.a) ch. 10).

d.b Aux termes du même acte d'accusation, il est reproché à B______ d'avoir, entre mai et juillet 2011, sans qu'il ne soit fait référence à la notion de coactivité :

- livré un colis au domicile de M______ début juin 2011, obtenu de la sorte un exemplaire de sa signature, dérobé des documents bancaires lui appartenant et ainsi fait en sorte que P______ puisse se présenter au guichet de R______ de ______, le 25 juin 2011, munie d'une fausse carte d'identité ______ au nom de M______, où elle a tenté de retirer le solde de son compte (C.b) ch. 2) ;

- livré un colis au domicile d' N______, le 20 juin (recte mai) 2011, obtenu de la sorte un exemplaire de sa signature, dérobé des documents bancaires lui appartenant et ainsi fait en sorte que P______ puisse se présenter au guichet de T______ de ______, le 3 juin 2011, munie d'une fausse carte d'identité ______ au nom d' N______, où elle a retiré CHF 32'000.- de son compte (C.b) ch. 3) ;

- livré une enveloppe au cabinet de O______ fin juin - début juillet 2011 (recte en mai-juin), obtenu de la sorte un exemplaire de sa signature, dérobé des documents bancaires lui appartenant et ainsi fait en sorte qu'un inconnu puisse se présenter au guichet H______ d'______ et de ______, le 23 juin 2011, muni d'une fausse carte d'identité ______ au nom de O______, où il a retiré deux fois CHF 4'500.- de son compte (C.b) ch. 4) ;

- livré une enveloppe au domicile de F______, le 27 juin 2011, obtenu de la sorte un exemplaire de sa signature et dérobé des documents bancaires lui appartenant. Il s'est présenté au guichet de T______ de ______, le 8 juillet 2011, muni d'une fausse carte d'identité ______ au nom de F______, où il a tenté de retirer CHF 50'000.- de son compte (C.b) ch. 5).

B. Les faits encore pertinents pour l'issue du litige sont les suivants :

a. Dès le mois de ______2010, les polices genevoise et vaudoise ont enregistré plusieurs plaintes pénales pour des escroqueries ou tentatives, effectuées selon le même modus operandi que celui décrit dans l'acte d'accusation. Selon le rapport de police du 4 mars 2013, ces agissements délictueux ont cessé en ______ 2011 et depuis lors, plus aucune escroquerie de ce type n'a été à déplorer.

b. Tentative d'escroquerie au préjudice de F______ (C.a) ch. 9 et C.b) ch. 5 de l'acte d'accusation).

b.a Le 8 juillet 2011, la police vaudoise a interpellé, au guichet de T______, succursale de _____, un individu identifié comme étant B______, alors qu'il tentait de retirer CHF 50'000.- du compte d'un client nommé F______ au moyen d'une fausse pièce d'identité ______ et d'un relevé de compte d'avril 2011, au nom du titulaire de la relation bancaire.

Lors de l'interpellation, B______ était porteur d'un bout de papier portant le nom, la signature et la date de naissance de F______. Un document contenant les adresses de plusieurs banques T______ à ______, ______ et ______ a aussi été découvert dans son véhicule.

L'examen du matériel informatique saisi chez B______ a révélé que trois types de recherches avaient été effectuées : la première, sur le site internet www.youtube.com, portait sur les mots "fausse carte d'identité", la deuxième était relative aux adresses des succursales R______ en Suisse et la troisième, sur le site www.google.com, portait sur les termes "O______ + ______ + ______ + ______".

b.b Le 9 juillet 2011, F______ a déposé plainte pénale. Fin mai - début juin 2011, une personne de ______, mesurant entre ______ cm, de corpulence ______ et âgée d'une ______ d'années, s'était présentée à son domicile à ______. Elle avait remis à son épouse, contre signature, un courrier contenant un magazine. Le 27 juin 2011, cette même personne s'était à nouveau présentée à son domicile et lui avait remis une lettre contre sa signature. F______ s'était aperçu après coup qu'il n'avait jamais reçu le relevé de son compte bancaire du mois d'avril 2011 à son nom. Le plaignant n'a reconnu personne sur la planche photographique présentée sur laquelle figurait la photographie de B______. Il ne l'a pas davantage reconnu en confrontation, audience au cours de laquelle F______ a confirmé sa plainte.

b.c Lors de l'interpellation de B______, la police a notamment saisi une fausse carte d'identité au nom de F______ qui comportait la photographie du prévenu ainsi que la mention suivante : "Préfecture de police – ______, soit pour elle U______, ______".

b.d A la police vaudoise, B______ a admis avoir voulu retirer CHF 50'000.- du compte de F______. Il était un exécutant et avait agi dans ce seul cas. Le 2 juillet 2011, il avait été recruté à ______par un homme d'environ ______ ans qui avait prétendu être un ______. De corpulence ______, mesurant ______ cm, avec ______ et ______, l'individu lui avait montré un relevé bancaire au nom de F______ et lui avait expliqué qu'il pouvait aller à ______ pour faire établir une fausse carte d'identité sous ce nom mais avec sa photographie. Muni de cette pièce falsifiée, B______ devait ensuite se rendre au guichet de la banque T______ de ______ pour retirer le maximum d'argent contre une rémunération s'élevant à 10% du montant retiré. Il avait accepté et transmis des photographies format passeport à l'individu. Le 7 juillet 2011, ce dernier lui avait remis une fausse carte d'identité ______, un relevé de compte bancaire au nom de F______ ainsi qu'un document comportant la signature du titulaire de la relation bancaire pour qu'il pût s'entraîner à l'imiter.

Le document mentionnant l'adresse de plusieurs succursales de la banque T______ ne lui appartenait pas. Il lui avait été remis en même temps qu'un reçu bancaire de retrait au nom d'une tierce personne (cf. infra let. e O______) par le même interlocuteur pour lui prouver que l'escroquerie fonctionnait. Il n'avait jamais prêté son véhicule et n'était pas impliqué dans le processus préalable de vol de courriers bancaires ni dans les démarches pour obtenir les signatures et les données de la pièce d'identité à falsifier. B______ a confirmé devant le Ministère public la teneur de ses déclarations à la police, notamment le fait que la pièce d'identité lui avait été remise par un inconnu à ______.

Lors des débats de première instance, B______ a précisé la teneur de ses dires. Son beau-frère, A______, lui avait remis le relevé du compte bancaire de F______, ainsi qu'un document qui comportait la signature du titulaire du compte. Il avait transmis une photographie à son beau-frère, qui lui avait remis, une semaine plus tard, la carte d'identité, dont il s'était servi dans sa tentative d'escroquerie. Il avait agi de la sorte en raison d'une situation financière difficile.

b.e La police a procédé à l'analyse des téléphones portables utilisés par B______. Doivent être mis en évidence, s'agissant de la plainte pénale F______, des appels téléphoniques de B______ à A______ le 27 juin 2011 (un seul appel) et le 7 juillet 2011 (sept appels), tous de quelques secondes seulement.

c. Tentative d'escroquerie – cas C______ (C.a) ch. 10).

c.a Le 30 septembre 2011, la police a interpellé, à l'agence J______ de______, une personne, qui s'est avérée être P______, qui tentait de retirer CHF 47'000.-. Elle était munie d'une fausse pièce d'identité ______, d'un relevé de compte d'août 2011 et d'un chèque d'une valeur d'EUR 42'800.-, libellé au nom de C______.

c.b Le 13 octobre 2011, C______ a déposé plainte pénale. Le 19 septembre 2011, un individu de type ______, d'environ ______ ans, mesurant ______ cm, de corpulence ______et parlant français sans accent, s'était présenté à son domicile genevois. Son époux avait répondu, mais l'inconnu avait refusé de lui remettre le colis, affirmant qu'elle seule devait signer. Sortant de l'immeuble une quinzaine de minutes plus tard, elle avait été apostrophée par le même individu, qui lui avait remis un colis contenant une revue et lui avait demandé de signer un reçu en précisant sa date de naissance sur un document qu'il lui avait fourni. Elle s'était souvenue ne pas avoir reçu son relevé bancaire du mois d'août 2011.

c.c Parmi les pièces saisies lors de l'interpellation de P______ figurent notamment :

- la carte d'identité ______, au nom de C______, contenant la mention suivante : "Carte délivrée par la Préfecture de ______", avec sous l'intitulé "Signature de l'autorité" le timbre humide suivant : "Le ______ (sic), U______" muni de sa signature,

- un chèque de EUR 42'800.-, libellé "Quarente deux mille huit cent euros", émanant de la V______, dont le débiteur est un certain W______, domicilié ______. Une trace papillaire appartenant à A______ a été relevée sur ce chèque.

c.d A la police, P______ a expliqué qu'un certain X______, qu'elle avait rencontré à ______, lui avait fourni le relevé bancaire de C______ en lui expliquant la marche à suivre. Après lui avoir donné sa photo, il s'était occupé de la suite. Il lui avait payé le billet de TGV pour voyager de ______ à Genève et était venu la chercher à la gare Cornavin. A Genève, il lui avait remis une fausse carte d'identité ______ et d'autres documents, sans qu'elle ne sache comment la carte falsifiée avait été créée. Il l'avait ensuite déposée devant la banque et lui avait dit d'aller retirer l'argent. Elle avait commis ce type d'escroquerie par deux fois avant le 30 septembre 2011, en étant à chaque fois accompagnée du dénommé X______.

Devant le Ministère public, P______ a reconnu être impliquée dans la tentative de retrait au détriment de C______ mais a contesté être celle qui aurait livré un colis ou volé un relevé bancaire dans sa boîte aux lettres. Lorsqu'elle avait rencontré X______, il lui avait proposé de l'amener en Suisse et de lui donner des cartes d'identité pour retirer de l'argent dans les banques. A Genève, il lui avait désigné une banque et demandé de montrer le chèque qu'il avait préalablement rempli, P______ ne devant plus que signer. Il lui avait expliqué comment imiter la signature et elle s'était exercée plusieurs fois. Rémunérée EUR 1'500.- par voyage, elle en avait effectué six à Genève, dont celui lors duquel elle avait été arrêtée.

P______ pensait être en mesure de reconnaître X______ si on lui présentait une photographie. Sur planche photographique, elle a identifié A______ comme étant le dénommé X______, contrairement à B______ qu'elle n'a pas reconnu. X______ était originaire de ______ et âgé ______ d'années. Il mesurait entre ______ cm, il était ______, de corpulence ______ et avait un visage ______. Il avait été emprisonné à Genève ______.

d. Suite aux arrestations de B______ et de P______ ainsi qu'aux aveux de cette dernière, la police a fait le lien avec d'autres cas similaires pour lesquels des plaintes avaient été déposées. Il s'agit des tentatives d'escroquerie commises au détriment de K______ et M______ ainsi que des escroqueries dont ont été victimes O______, G______, E______, D______ et N______.

e. Escroquerie – cas O______ (C.a) ch. 8 et C.b) ch. 4).

e.a.a Le 20 juillet 2011, O______ a déposé plainte pénale. Plusieurs semaines auparavant, un homme ______, d'environ ______ans, ______, mesurant ______ cm et parlant le français sans accent, s'était présenté à son cabinet ______. Il lui avait remis, contre signature, une enveloppe contenant un magazine. Il s'était aperçu que deux retraits frauduleux d'un montant total de CHF 9'000.- avaient été effectués sur son compte bancaire le 23 juin 2011, respectivement auprès des succursales H______ d'______ et de ______. Il avait également remarqué ne pas avoir reçu son relevé de compte du mois de mai 2011. Il n'a reconnu personne sur la planche photographique contenant notamment la photographie de B______.

e.a.b Le 9 décembre 2011, la banque H______ a également déposé une plainte pénale pour les retraits frauduleux dont son client O______ avait été victime et qu'elle avait entièrement remboursé.

e.b La perquisition effectuée au domicile de B______ après son interpellation a permis de saisir un reçu établi le 23 juin 2011 par la banque H______ au nom de O______.

A la police et devant le Ministère public, B______ a contesté toute implication dans l'escroquerie commise au préjudice de O______. En audience de jugement, il a expliqué que A______ lui avait remis les deux avis de retraits reçus de la banque H______, d'un montant total de CHF 9'000.-, saisis à son domicile, pour lui montrer que l'escroquerie fonctionnait. B______ a d'abord justifié la recherche informatique effectuée au nom de O______ comme une vérification des dires de A______, puis, dans un second temps, après qu'il lui eut été fait remarquer que cette recherche était antérieure au prélèvement, il a soutenu que A______ venait souvent à son domicile pour utiliser son ordinateur.

e.c L'analyse des téléphones portables utilisés par B______ a permis de mettre en évidence, s'agissant des plaintes pénales O______ et H______, plusieurs appels croisés entre B______ et A______ entre le 19 mai et le 27 juin 2011, soit :

- deux appels du premier au second les 19 et 22 mai 2011,

- un appel de A______ le 2 juin 2011 (durée 7' 30''),

- trois appels de B______ à A______ le 4 juin 2011 auxquels il fallait ajouter un SMS adressé à A______ au sujet d'un transfert d'argent par Y______ après un prélèvement en espèces,

- deux SMS de A______ le 5 juin 2011 en remerciement du transfert précité,

- trois appels de B______ à A______ les 9, 25 et 27 juin 2011.

 

f. Escroquerie – cas G______ et Q______ (C.a) ch. 1).

 

f.a.a Le 4 décembre 2010, G______ a déposé plainte pénale. Le 23 novembre 2010, un homme ______, mesurant ______ cm et âgé de ______ ans, ______ et portant ______, s'était présenté à son domicile. Il lui avait remis une enveloppe contenant un magazine et lui avait demandé, ainsi qu'à sa femme, de signer un reçu et de préciser leur date de naissance. Le 2 décembre 2010, il avait reçu un courrier du I______ accusant réception d'un chèque d'un montant d'EUR 42'000.-. Le surlendemain, il avait constaté que CHF 37'000.- avaient été retirés le 1er décembre 2010 au guichet de la succursale ______de sa banque.

 

f.a.b Le 22 décembre 2010, I______ a également déposé une plainte pénale après que l'un de ses clients, G______, avait été victime d'un retrait frauduleux. Il l'avait remboursé, intégralement et à bien plaire.

 

f.b G______ a confirmé sa plainte devant le Ministère public. Il avait remarqué après coup qu'un extrait de compte était manquant, soit celui d'octobre ou novembre 2010.

 

f.c Parmi les documents transmis par la banque figurent notamment les photocopies du recto d'une pièce d'identité ______, établie au nom d'Q______, ainsi que d'un chèque de la Z______ de EUR 42'000.-, libellé en toutes lettres "Quarente deux mille euros", dont la débitrice est une certaine AA______, domiciliée ______.

 

f.d A la police, P______ a admis avoir effectué le retrait de CHF 37'000.- au détriment de G______, ce qu'elle a confirmé devant le Ministère public. Elle a en revanche contesté avoir livré un colis ou volé un relevé bancaire dans sa boîte aux lettres. P______ s'est référée à ses explications fournies lors de son interpellation pour décrire de quelle manière elle avait été appelée à opérer le retrait d'argent frauduleux à l'initiative de A______ (cf. supra let. B.c.d C______).

 

g. Tentative d'escroquerie – cas K______ (C.a) ch. 2).

 

g.a Le 4 mars 2011, K______ a porté plainte pénale auprès de la police. Un homme, de type ______, d'environ ______ ans, mesurant ______ cm, de corpulence normale et s'exprimant en français, s'était présenté le 15 février 2011 à son domicile. Un de ses enfants avait vu le véhicule conduit par l'individu, à savoir un ancien modèle de ______, de couleur grise, aux plaques ______, de type ______. L'inconnu lui avait remis une enveloppe contenant un vieux magazine et lui avait demandé de signer un registre. Comme la situation lui paraissait étrange, K______ avait apposé une fausse signature sur ledit registre. Le même jour, l'agence R______ l'avait informée par téléphone qu'une femme ______ s'était présentée au guichet pour effectuer un prélèvement de CHF 22'000.- après avoir présenté à l'encaissement un chèque d'une valeur de EUR 32'500.-. Cependant, au moment de signer la quittance, le caissier s'était aperçu que la signature ne correspondait pas à celle de référence figurant dans sa base de données. N'arrivant pas à reproduire la vraie signature, la femme avait alors quitté l'agence.

 

Confrontée à B______, K______ l'a reconnu comme pouvant être celui qui lui avait remis le colis sans pouvoir l'affirmer à 100%.

 

g.b La succursale ______d'R______ a transmis l'original du chèque bancaire présenté, lequel avait été émis par la BB______, sise______, d'un montant de EUR 32'500.-, dont la débitrice était CC______, domiciliée ______.

 

g.c Deux voisines de K______ ont été entendues par la police.

 

g.c.a Trois semaines auparavant, un individu de type ______ avait sonné à l'interphone DD______ pour lui faire signer un reçu pour une grande enveloppe, ce qu'elle avait refusé. La photo de B______ lui faisait très fortement penser à l'individu qui s'était rendu chez elle. Le fils de K______ a aussi fait le lien avec l'individu qui s'était présenté chez sa mère le 15 février 2011.

 

g.c.b En sortant de chez elle, EE______ avait vu un individu essayer d'entrer dans l'immeuble puis elle l'avait vu courir vers une voiture ______, immatriculée ______. En parlant avec des voisins, elle s'était rendue compte que l'inconnu était celui qui avait essayé de faire signer un reçu à DD______ le même jour. Sur la planche photographique, EE______ a formellement reconnu B______ comme étant la personne observée.

 

g.d L'analyse des téléphones portables utilisés par B______ révèle, en lien avec la plainte pénale K______, l'existence de huit appels le 15 février 2011 et de cinq autres appels le lendemain émanant tous de B______ en faveur de A______, ainsi que de deux autres appels le 17 février 2011, tous ces appels étant de courte durée (maximum de 16'').

g.e Devant le Ministère public, P______ a reconnu être impliquée dans la tentative de retrait au détriment de K______, tout en contestant avoir livré un colis ou volé un relevé bancaire dans sa boîte aux lettres. Elle s'est référée à ses explications fournies lors de son interpellation pour décrire de quelle manière elle avait été appelée à opérer la tentative de retrait d'argent frauduleux à l'initiative de A______ (cf. supra cas C______ let. B.c.d).

 

g.f A la police et devant le Ministère public, B______ a nié s'être rendu au domicile de K______ ou DD______.

 

h. Escroquerie – cas E______ et S______ (C.a) ch. 3).

 

h.a.a Le 22 mars 2011, E______ a déposé plainte pénale. Fin février 2011, un homme de type ______, de ______, ______ et parlant le français correctement, qui avait prétexté être un employé de La Poste, s'était présenté à son domicile ______, pour livrer un colis contenant un vieux magazine. Il avait fait signer à sa femme, S______, un bulletin de livraison pour la réception du colis. Par la suite, E______ avait reçu de J______ un avis d'encaissement d'un chèque de EUR 38'100.-. Selon les explications fournies par la banque, un prélèvement de CHF 15'000.- avait été effectué à l'agence de ______. Le 4 mars 2011, une femme s'était présentée au guichet avec une carte d'identité ______ au nom de S______ et elle avait remis pour encaissement un chèque au nom de la titulaire du compte. E______ a confirmé sa plainte devant le Ministère public.

 

h.a.b Le 25 mai 2011, la J______ a déposé une plainte pénale pour le retrait frauduleux dont son client avait été victime. Elle l'avait remboursé, entièrement et à bien plaire.

 

h.b Parmi les pièces présentées à la banque lors du retrait litigieux figurent la copie du chèque de FF______, d'un montant de EUR 38'100.-, dont la débitrice est GG______, ______, ainsi qu'une copie de la pièce d'identité ______, au nom de S______, prétendument délivrée par la Préfecture ______, soit pour elle, par ______, U______. Le libellé est identique à celui figurant au recto de la carte d'identité falsifiée utilisée pour le retrait C______, sous réserve des différences observables sur le timbre humide ("Police générale" est orthographiée correctement, la police d'écriture est plus grande et la signature manuscrite U______ différente).

 

h.c A la police, P______ a dit se reconnaître sur les images de la vidéosurveillance de la banque dans laquelle elle avait retiré CHF 15'000.- au préjudice de E______ et de S______. Comme pour le cas D______ (cf. infra let. i), elle était accompagnée du dénommé X______, qu'elle rejoignait à la sortie de la banque et auquel elle remettait la somme retirée. En contrepartie, elle percevait une commission dont elle ne connaissait plus le montant.

 

Elle a confirmé ce qui précède devant le Ministère public, tout en précisant qu'elle n'avait pas livré un colis ou volé un relevé bancaire dans la boîte aux lettres. P______ s'est référée à ses explications fournies lors de son interpellation pour décrire de quelle manière elle avait été appelée à opérer le retrait d'argent frauduleux à l'initiative de A______ (cf. supra let. B.c.d C______).

 

i. Escroquerie – cas D______ (C.a) ch. 4).

 

i.a.a Le 25 mars 2011, D______ a porté plainte. Au début du mois de mars 2011, un homme d'origine ______, d'environ ______ ans, mesurant ______ cm et ______, avec un accent correspondant à une personne originaire ______, s'était présenté à son domicile à ______pour livrer un pli recommandé contentant un vieux journal. Il lui avait demandé de signer une feuille comportant déjà plusieurs signatures, dont celle de son voisin. Après avoir reçu un courrier de sa banque l'informant que son compte allait être crédité d'un montant de EUR 41'800.- provenant de HH______ qu'elle ne connaissait pas, D______ s'était rendue à la J______ qui lui avait expliqué qu'un prélèvement de CHF 33'000.- avait été effectué sur son compte le 16 mars 2011. Le relevé bancaire relatif au mois de février 2011 lui avait été remis en mains propres de sorte qu'elle n'était pas en mesure de dire s'il avait été volé dans sa boîte aux lettres.

 

i.a.b Le 25 mai 2011, la J______ a déposé une plainte pénale suite au retrait frauduleux dont sa cliente avait été victime. Elle l'avait remboursée, entièrement et à bien plaire.

 

i.b Parmi les documents remis à la J______ lors du retrait litigieux figure notamment la copie du chèque de ______, de EUR 41'800.-, libellé "quarente un mille huite (sic) cent euros", dont la débitrice est HH______, ______.

 

i.c L'analyse des téléphones portables utilisés par B______ a permis de mettre en évidence, s'agissant des plaintes pénales D______ et J______, plusieurs appels croisés entre B______ et A______ entre les 2 et 16 mars 2011, soit :

 

- le 2 mars 2011, 3 appels du premier au second ainsi qu'un appel et un SMS de A______ à B______,

- le 3 mars 2011, un SMS de A______ et deux appels de B______,

- les 4 et 7 mars 2011, deux appels de B______ à A______, le second d'une durée de 6' 14'',

- le 9 mars 2011, deux appels de B______ à A______ (durée maximum de 3' 6''),

- le 10 mars 2011, trois appels de A______ à B______ et trois autres de ce dernier,

- le 14 mars 2011, un SMS de A______ à B______,

- le 15 mars 2011, un appel de B______ à A______,

- le 16 mars 2011, un appel de A______ à B______ (durée 1' 14'').

 

i.d A la police, P______ a dit se reconnaître sur les images de la vidéosurveillance de la banque dans laquelle elle avait retiré CHF 33'000.- au préjudice de D______. Elle avait agi avec un ______qu'elle a décrit et qui s'est présenté à elle comme se prénommant X______ (cf. supra cas E______ et S______ let. h.c). Devant le Ministère public, P______ a confirmé son implication, tout en contestant avoir livré un colis ou volé un relevé bancaire dans la boîte aux lettres de D______. P______ s'est référée à ses explications fournies lors de son interpellation pour décrire de quelle manière elle avait été appelée à opérer le retrait d'argent frauduleux à l'initiative de A______ (cf. supra cas C______ let. B.c.d).

 

j. Escroquerie – cas N______ (C.a) ch. 7 et C.b) ch. 3).

 

j.a Le 3 juin 2011, N______ a déposé plainte pénale. Elle avait constaté le même jour qu'un prélèvement de CHF 32'000.- avait été opéré sur son compte dans une agence bernoise de la banque T______. Trois semaines auparavant, un livreur s'était présenté à son domicile à ______ pour lui remettre un journal et lui avait demandé de signer un reçu. Elle avait déjà aperçu cet individu la veille en train d'observer les boîtes aux lettres de son immeuble. Elle a reconnu, parmi les 16 photographies qui lui avaient été présentées, B______, sans toutefois en être certaine. Elle a réitéré sa mise en cause devant le Ministère public, même si elle ne pouvait en être certaine à 100 %. Sa banque l'avait intégralement remboursée.

 

j.b La pièce d'identité au nom d'N______ présentée lors du retrait frauduleux a prétendument été délivrée par la ______, soit pour elle par le ______, U______.

 

j.c A son interpellation, B______ était porteur d'un papier sur lequel avait été notée l'adresse manuscrite de la succursale ______ de la banque T______ où le retrait d'argent avait été effectué.

 

j.d L'analyse des téléphones portables utilisés par B______ révèle, en lien avec la plainte pénale N______, un échange nourri de contacts téléphoniques croisés entre B______ et A______ entre le 13 mai et le 9 juin 2011, à savoir :

 

- un appel téléphonique le 13 mai 2011 (durée de 3' 29'') et un SMS le lendemain, le tout de A______ à B______ ;

- plusieurs appels de B______ à A______, respectivement les 15 mai 2011 (durée maximum 30''), 16 mai 2011 (quatre appels d'une durée maximum de 4' 38''), 17 mai 2011 (sept appels d'une durée maximum de 41''), 18 mai 2011 (un appel de 1' 4''), 19 mai 2011 (un appel d'une durée de 8'') et 22 mai 2011 (un appel d'une minute) ;

- le 2 juin 2011, un appel de A______ à B______ (durée de 7' 30'') ;

- le 4 juin 2011, trois appels de B______ (durée maximum de 42'') et un SMS du même auteur au sujet de l'argent prélevé et transféré par Y______ ;

- le 5 juin 2011, deux SMS de A______ à B______, toujours au sujet de l'argent transféré ;

- le 9 juin 2011, un appel de B______ (durée de 6'').

 

j.e Devant le Ministère public, P______ a reconnu être impliquée dans le retrait au détriment d' N______, tout en contestant avoir livré un colis ou volé un relevé bancaire dans sa boîte aux lettres. Elle s'est référée à ses explications fournies lors de son interpellation pour décrire de quelle manière elle avait été appelée à opérer le retrait d'argent frauduleux à l'initiative de A______ (cf. supra cas C______ let.B.c.d).

j.f A la police et devant le Ministère public, B______ a nié s'être rendu à ______, chez N______. Il n'a pas varié dans sa détermination en audience de jugement.

 

k. Tentative d'escroquerie - cas M______ (C.a) ch. 6 et C.b) ch. 2).

 

k.a Le 5 juillet 2011, M______ a déposé plainte pénale. Début juin 2011, elle avait reçu, à son domicile à ______, la visite d'un livreur qui lui avait remis un colis contre sa signature. Selon sa banque, une femme s'était présentée le 25 juin 2011 au guichet d'R______, succursale de ______, avec une carte d'identité ______ à son nom et fourni toutes ses coordonnées, demandant le retrait du solde du compte. La banque n'avait pas effectué l'opération souhaitée et avait gardé les images de surveillance et les documents d'identité utilisés.

 

M______ n'a pas reconnu B______ sur la planche photographique qui lui a été présentée ni en audience de confrontation. Par contre, elle a identifié, comme étant le livreur de colis, l'individu filmé par les caméras de surveillance de la banque H______, succursales d'______ et de ______, alors qu'il procédait à des prélèvements frauduleux au détriment de O______ (cf. supra let. e). M______ a confirmé sa plainte devant le Ministère public.

 

k.b La pièce d'identité au nom de M______ présentée à la banque a prétendument été délivrée par la Sous-Préfecture de ______, soit pour elle par le ______ U______. Elle comportait la mention ______.

 

k.c L'analyse des téléphones portables utilisés par B______ révèle, en lien avec la plainte pénale M______, un échange nourri de contacts téléphoniques croisés entre B______ et A______ entre le 2 et le 27 juin 2011, à savoir :

 

- un appel téléphonique de A______ à B______ (durée de 7' 30'') le 2 juin 2011 ;

- le 4 juin 2011, trois appels de B______ à A______ ainsi qu'un SMS relatif à l'argent prélevé et transféré par Y______ ;

- le 5 juin 2011, deux SMS de A______ à B______ pour le remercier de l'envoi d'argent ;

- les 9, 25 et 26 juin 2011, trois appels de B______ à A______, d'une durée respective de quelques secondes.

 

k.d Devant le Ministère public, P______ a reconnu être impliquée dans la tentative de retrait au détriment de M______, tout en contestant avoir livré un colis ou volé un relevé bancaire dans sa boîte aux lettres. Elle s'est référée à ses explications fournies lors de son interpellation pour décrire de quelle manière elle avait été appelée à opérer le retrait d'argent frauduleux à l'initiative de A______ (cf. supra cas C______ let. B.c.d).

 

l. Acceptant d'être jugée par la voie de la procédure simplifiée, P______ a, par jugement du Tribunal de police du ______ 2012, été reconnue coupable d'escroquerie, tentative d'escroquerie, vol, faux dans les titres, faux dans les certificats étrangers et violation de secrets privés (cas G______, K______, E______, D______, M______, N______ et C______) et condamnée à une peine privative de liberté de 18 mois avec sursis, sous déduction de 292 jours de détention avant jugement, délai d'épreuve de quatre ans, ainsi qu'à une amende de CHF 500.- (peine privative de liberté de substitution de cinq jours).

 

m. B______ a dans un premier temps déclaré ne pas connaître A______. Dans ses déclarations ultérieures, il a admis l'avoir rencontré une ou deux fois, avant de reconnaître que A______ était le père de son neveu et qu'il avait pour habitude de le contacter quand il venait à Genève voir son fils. Il n'avait pas tout de suite avoué connaitre A______ pour lui éviter des ennuis comme membre de sa famille. B______ a nié lui avoir envoyé de l'argent mais, en une occasion, il en avait reçu pour le compte de son neveu. Il lui prêtait également son véhicule quand il venait à Genève. Devant le Ministère public, B______ a refusé vouloir donner plus d'indications au sujet de A______, pour des questions de sécurité. Il ne savait pas de quoi il était capable et craignait notamment qu'il ne se retournât contre son propre ______. Il reconnaissait uniquement la tentative de retrait au préjudice de F______, ce qu'il a confirmé en audience de jugement.

 

n. L'analyse des téléphones portables de B______ a notamment permis la découverte d'une photographie de A______ ainsi que d'un SMS de Y______ faisant état de la confirmation de la réception d'un versement par A______. A au surplus été mis en évidence, entre les 24 janvier et 7 juillet 2011, l'existence de 104 contacts téléphoniques entre les deux ______ (95 appels de B______ et 9 de A______) et de 23 SMS, dont 18 de A______.

 

o. Le 23 décembre 2011, un mandat d'arrêt a été décerné à l'encontre de A______. Celui-ci a été interpellé en ______ le ______ 2013 avant d'être extradé en Suisse le ______ 2013.

 

o.a A la police, A______ a expliqué connaître, depuis ______au moins, P______ qu'il avait fréquentée pendant quelques temps. Après leur séparation, ils étaient restés en contact pendant six ou sept mois. Il l'avait revue en 2010 et 2011, respectivement à Genève et ______, pour lui fournir, à sa demande, trois enveloppes vides.

 

B______ était l'oncle de son fils, II______. Il lui était arrivé d'envoyer de l'argent à B______ pour le compte de son fils, sans qu'il ne puisse pour autant expliquer le SMS de Y______ reçu de B______.

 

Il avait déjà été condamné par le passé en ______ pour des escroqueries et des faux dans les titres, en se rendant à la Poste pour encaisser des chèques établis au nom d'une personne dont il avait usurpé l'identité. Il présentait au guichet des documents qui n'étaient pas à son nom sans qu'ils ne soient nécessairement faux. Il avait également été condamné pour des faits similaires en Suisse, où il avait eu un rôle d'exécutant. Dans ce dernier cas, des amis de P______ s'étaient chargés de toute l'organisation.

 

o.b Devant le Ministère public, A______ a confirmé ses précédentes déclarations et formellement contesté les faits qui lui étaient reprochés. Quand il avait appris l'arrestation de P______, il avait su qu'elle allait lui "pourrir la vie" car il l'avait abandonnée. Il avait de bons contacts avec B______.

 

Après avoir contesté tout lien avec le chèque retrouvé sur P______ lors de la tentative de retrait au détriment de C______, A______ a finalement admis qu'il lui avait vendu à ______, une fois et à sa demande, un chèque vierge et lui avait remis les trois enveloppes vides dont il avait fait mention à la police.

 

A plusieurs reprises devant le Ministère public, A______ a demandé en vain à être confronté à P______, celle-ci ayant quitté la Suisse après sa condamnation avec sursis du ______ 2012.

 

En audience de jugement, A______ a été invité à écrire en toutes lettres EUR 42'800.-, ce qu'il a fait sur un document vierge annexé au procès-verbal. On peut y lire "Quarente deux mille huit cent euros". Dûment interpellé par le Président, A______ a contesté avoir mal orthographié le mot "quarente" qu'il a épelé avec un "e".

 

C. a. Par courrier du 30 décembre 2013, A______ a informé la CPAR qu'il persistait dans les termes de son appel et n'entendait pas présenter de demande de non-entrée en matière s'agissant de l'appel du Ministère public. B______ a conclu le 8 janvier 2014 au rejet de l'appel du Ministère public en tant qu'il le concernait.

 

b. La J______ a maintenu ses prétentions civiles à concurrence de CHF 48'000.- par courrier du 9 janvier 2014.

 

c. Le 13 janvier 2014, le Ministère public s'en est rapporté à justice sur la recevabilité de l'appel de A______, dont il demande le rejet. Il s'est opposé à l'audition de P______ requise par A______.

 

d. Par ordonnance présidentielle du 13 février 2014, la CPAR a ordonné une procédure orale et cité aux débats P______ pour les motifs figurant dans l'ordonnance.

 

A______ a présenté ses prétentions en indemnisation à concurrence de CHF 93'800.-, augmentées de CHF 200.- par jour jusqu'à la date de l'arrêt. Dans un courrier subséquent reçu la veille de l'audience d'appel, il a demandé qu'une enquête soit menée sur ses conditions de détention à la prison de Champ-Dollon, se prévalant de conditions inhumaines au sens de l'art. 3 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 [CEDH ; RS 0.101]. Pour ne pas provoquer un report de l'audience, A______ a conclu à la scission des débats (art. 342 CPP en application par renvoi de l'art. 379 CPP), ce que la juridiction d'appel lui a accordé sur question préjudicielle le 6 mai 2014.

 

En prévision des débats d'appel, A______ a produit un bordereau de pièces contenant une recherche "Google" sur le mot "quarante" orthographié "quarente", l'extrait d'acte de naissance de l'enfant II______ , une attestation de bonne conduite émanant de la mère des trois autres enfants de A______ vivant à ______, la preuve de versements en sa faveur depuis son incarcération et une attestation de Champ-Dollon certifiant que A______ travaille à ______ et se comporte conformément aux dispositions réglementaires en vigueur.

 

Les débats d'appel du 6 mai 2014, auxquels P______ ne s'est pas présentée, ont porté sur la culpabilité et la peine de B______, la cause étant en état d'être jugée en ce qui concernait ce dernier contrairement à A______. Pour ce dernier, seule sa culpabilité a été abordée, l'examen de sa situation personnelle et la fixation de la peine étant reportés à une date ultérieure (cf. infra let. e.).

 

e.a Lors de l'audience, B______ a expliqué que depuis une dizaine d'années il voyait régulièrement A______, qui était un ami en plus d'être son beau-frère. Il avait connu P______ par son intermédiaire. A______ lui en voulait beaucoup car il lui faisait porter la responsabilité de son incarcération. Personnellement, B______ ne voulait et ne pouvait pas "balancer" son beau-frère.

 

A______ lui avait remis le reçu établi au nom de O______ saisi à son domicile. Il arrivait à B______ de laisser son beau-frère utiliser son ordinateur. Il savait que des recherches informatiques avaient été faites le 7 juin 2011 à partir de son ordinateur sans être à même d'affirmer, pour les raisons exposées précédemment, que A______ en fût l'auteur. B______ n'avait rien gagné avec cette escroquerie. Il avait agi par faiblesse. Il présentait ses excuses aux victimes.

 

e.b A______ a confirmé que P______ lui avait demandé le service consistant à lui procurer un chèque, contre une rémunération de EUR 150.-, en lien avec ______. C'était en août 2011, ce qui expliquait la présence de son empreinte retrouvée sur le chèque C______. Paniqué, A______ avait raconté à la police n'importe quoi jusqu'au jour où il avait pu rectifier ses dires.

 

A______ a contesté les déclarations de B______ s'agissant de son accès à l'ordinateur. Il ne s'était plus rendu au domicile de son beau-frère depuis qu'il séjournait à ______. Il avait connu P______ par l'intermédiaire de B______ en ______. En ______, ils étaient devenus intimes pendant environ six mois, soit jusqu'en ______. Entre 2006 et ______2011, ils avaient continué à entretenir des contacts en tant qu'amis. A______ a admis qu'il s'agissait en l'espèce du même mode opératoire que celui utilisé lors des faits qui avaient conduit à ses condamnations précédentes en Suisse pour lesquelles il n'avait pas dénoncé P______ et B______, qui avaient ainsi pu échapper à toute sanction.

 

B______ et P______ l'impliquaient par vengeance. En 2005, il avait été condamné sur la base d'empreintes prélevées sur les documents présentés à la banque. Il n'aurait donc pas remis autant de documents à P______ en prenant ce risque. B______ lui en avait voulu quand A______ avait rompu avec sa sœur. Les reproches s'étaient intensifiés lorsqu'il avait appris qu'il sortait avec P______.

 

La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience.

 

e.c La CPAR a rendu le 19 mai 2014 le dispositif de son arrêt, par lequel elle a rejeté l'appel de A______ et partiellement admis celui du Ministère public, avec une brève motivation orale. Selon ce dispositif :

 

- B______ a été reconnu coupable de tentative d'escroquerie [recte : escroquerie] et non de complicité dans le cas N______ ([C.b) ch. 3], cf. supra let. B.j).

 

- A______ a été reconnu coupable d'escroqueries par métier pour les cas G______ ([C.a) ch. 1], cf. supra let. B.f), K______ ([C.a) ch. 2], cf. supra let. B.g) et D______ ([C.a) ch. 4], supra let. B.i).

 

La CPAR a ordonné la détention de A______ pour des motifs de sûreté par décision séparée du même jour. Toutefois, par décision présidentielle prise ultérieurement (OARP/143/2014 du 20 juin 2014), A______ a été autorisé à exécuter de manière anticipée la peine privative de liberté à laquelle il avait été condamné en première instance.

 

f.a Donnant suite à la demande de A______, la direction de Champ-Dollon a fait parvenir à la CPAR le détail de son parcours cellulaire. Il en ressort en substance que :

 

- à son entrée à la prison et durant une dizaine de jours, A______ a été incarcéré dans une cellule individuelle (surface nette 12 m2) occupée par deux et trois détenus, respectivement pendant une et sept nuits. La surface disponible dont disposait A______ était alors de 6 m2, pour une nuit, et de 4 m2 le reste du temps ;

- dès le ______ 2013, A______ a été transféré dans une autre cellule individuelle, occupée successivement par deux (une nuit) et trois détenus (29 nuits), la surface disponible étant identique à la période précédente ;

- à partir du ______ 2013 et pour quelques mois, A______ a été incarcéré dans une cellule prévue pour trois détenus et d'une surface nette de 23 m2 (cellule 317). Cinq détenus y ont été incarcérés durant 33 nuits, laissant à A______ une surface disponible de 4,60 m2. Pendant 78 nuits, six détenus y ont pris place, avec une surface disponible réduite à 3,83 m2 ;

- le ______ 2013 et pour une quinzaine de jours, A______ a été placé dans une autre cellule à trois lits dont la surface était légèrement supérieure à celle de la cellule 317 (28,16 m2). Ils ont été cinq à y être incarcérés durant 5 jours (surface disponible pour A______ de 5,63 m2), six pendant 11 nuits (4,69 m2 par détenu) et 7 durant une nuit (4,02 m2) ;

- entre le ______ 2013 et ______2014, A______ a été détenu seul dans une cellule individuelle durant une nuit (surface disponible de 12,85 m2), à deux dans la même cellule durant plus de cinq mois (6,42 m2) et à trois durant 119 jours (4,28 m2).

 

Selon le même rapport, les cellules dites triples des unités Nord et Sud ont une surface brute de 25,5 m2 comprenant des douches et sanitaires avec séparation (2,5 m2), un frigo, un téléviseur et une penderie : ces cellules sont systématiquement équipées de six lits et disposent d'une douche dont les détenus peuvent user à leur guise. Les places de travail sont attribuées par ordre chronologique, le délai d'attente étant de l'ordre de six mois. Les visites du conseil sont garanties sans restriction, celles de la famille une fois par semaine pendant une heure. Les délais d'attente pour les consultations médicales dépendent de la gravité du cas : les consultations urgentes sont immédiatement garanties, les autres peuvent attendre jusqu'à un mois (consultations médicale somatique ou psychiatrique non urgentes). Le délai d'attente pour obtenir un entretien avec le secteur socio-éducatif est de plusieurs semaines tandis que celui pour un appel téléphonique s'élève à un mois environ. A part l'heure de promenade quotidienne à l'air libre, ce rapport mentionne une heure de sport par semaine dans la grande salle de gymnastique, sans préjudice d'une pratique du sport plus aléatoire dans la petite salle.

 

f.b Dans un courrier manuscrit adressé au président de la CPAR, A______ a contesté les calculs opérés par la direction de Champ-Dollon. Il était impossible, au regard de la surpopulation carcérale chronique de l'établissement de détention, qu'un lit fût resté inoccupé pendant 33 jours dans la cellule 317. La sixième place n'était pas restée inoccupée plus de deux ou trois jours.

 

f.c La direction de Champ-Dollon, à laquelle la contestation de A______ a été adressée, a persisté dans son décompte du taux d'occupation des cellules occupées par A______. Celui-ci avait, vérification faite, passé effectivement 33 jours dans la cellule 317 en compagnie de 5 [recte : 4] autres détenus, soit une occupation à cinq détenus durant un peu plus d'un mois.

 

La direction de Champ-Dollon a joint à son courrier les rapports d'occupation journalière de la cellule 317 durant les 33 jours considérés. 26 rapports journaliers mentionnent la présence de cinq détenus - dont A______ - dans la cellule 317 tandis qu'il ressort des sept autres fiches que six détenus occupaient la même cellule les ______ 2013.

 

g. Une seconde audience d'appel a été consacrée à la situation personnelle de A______ et aux plaidoiries, conformément à la scission des débats antérieurement décidée.

 

g.a Une pièce complémentaire a été produite, consistant en une promesse d'embauche de A______ par JJ______, ______ à ______. L'emploi dont il pourrait bénéficier en cas de libération consistait à être ______ d'une petite équipe de sept ou huit ______.

 

A______ vivait un véritable supplice. Il était primordial que sa situation familiale et personnelle soit prise en considération dans la fixation de sa peine.

 

g.b A______ conclut à l'octroi d'une indemnisation pour les 85 jours de détention constitutifs d'une violation de l'art. 3 CEDH, selon les critères retenus par le Tribunal fédéral. Sur le fond, une peine de 3 ans de privation de liberté, avec un sursis partiel et une partie ferme fixée à 18 mois, était de nature à sanctionner équitablement son activité coupable.

 

Le Ministère public persiste dans ses conclusions figurant dans sa déclaration d'appel. Il n'y avait pas lieu d'entrer en matière sur une éventuelle violation de la CEDH pour différents motifs, dont le principal était que la durée de détention dans des conditions difficiles n'atteignait pas le minimum fixé par le Tribunal fédéral. Si la CPAR devait néanmoins entrer en matière, l'indemnisation ne pourrait pas dépasser l'équivalent de 10% des jours où la violation de la CEDH serait constatée.

 

g.c Les parties ont renoncé au prononcé public de l'arrêt, A______ admettant que le dispositif lui soit notifié à bref délai par la voie postale. La cause a ainsi été gardée à juger.

 

h. Dans les jours qui ont suivi l'audience, le président de la CPAR a interpellé la direction de Champ-Dollon sur l'apparente contradiction résultant de son dernier envoi, l'occupation de la cellule 317 à cinq détenus ne totalisant au regard des fiches journalières que 26 jours durant la période considérée et non 33.

 

La direction de Champ-Dollon a confirmé l'exactitude des données fournies dans le courrier du 13 juin 2014. La confusion née de l'existence de sept fiches mentionnant six occupants dans la cellule 317 durant certains jours s'expliquait par le fait que dans les décomptes fournis un détenu qui avait quitté la cellule dans la journée était tout de même comptabilisé. Selon la direction de Champ-Dollon, les détenus quittaient en principe la cellule dans la matinée, de sorte que seuls cinq détenus occupaient en fait la cellule 317 durant les jours susmentionnés ainsi que la nuit suivante.

 

h.a La teneur des explications de la direction de Champ-Dollon a été transmise au conseil de A______ pour détermination.

 

Le président de la CPAR en profitait pour prendre acte, d'entente avec A______, d'une erreur commise par la direction de Champ-Dollon dans la lettre accompagnant les fiches journalières. Il y avait lieu de rectifier d'office les chiffres articulés en ce sens qu'il fallait lire dans le deuxième paragraphe : " (…) A______ reconnait avoir séjourné pendant 111 jours à la cellule 317 mais conteste avoir passé 33 jours en compagnie de 5 détenus [recte 4] au lieu de 6 [recte 5] (…)". De la même manière, le paragraphe suivant devait se lire :" les annexes (…) prouvent que (…) A______ a bien séjourné à la cellule 317 en compagnie de 5 [recte 4] détenus pendant 33 jours".

 

h.b Dans un courrier du 29 septembre, A______ constate que les explications de la direction de Champ-Dollon ne sont pas documentées. Il n'était pas possible de savoir à quelle heure les détenus surnuméraires avaient quitté la cellule 317, étant précisé que les libérations matinales n'étaient pas la règle. Faute de démonstration contraire, il y avait lieu de considérer que A______ avait partagé sa cellule avec cinq autres détenus les sept jours susmentionnés, ce qui portait à 85 le nombre de jours à indemniser.

 

i. La cause a été gardée à juger. Le dispositif daté du 1er octobre 2014, muni d'une lettre d'accompagnement contenant une brève motivation, a été notifié comme convenu aux parties par voie postale le 6 octobre 2014, A______ en recevant un exemplaire par télécopie le 3 au soir.

 

D. a. B______, ressortissant ______ né le ______, est l'aîné de ______ frères et sœurs. Il a grandi ______, où il a suivi la scolarité obligatoire. Par la suite, il a acquis, dans son pays, une formation de ______, qu'il a complétée, en Suisse, par des études ______ pour lesquelles il a obtenu un ______. Il s'est reconverti dans la profession de ______ qu'il exerce pour un revenu oscillant entre CHF 3'400.- et CHF 3'900.- par mois. Divorcé et père d'une fille, née ______, d'une précédente relation, il s'acquitte d'une pension alimentaire d'un montant de CHF 400.- par mois. A l'époque des faits qui lui sont reprochés, il était sans emploi et au bénéfice de l'aide de l'Hospice général. Ses dépenses mensuelles comprennent notamment un loyer de CHF 1'150.- et une prime d'assurance maladie de CHF 377.15. Il tente de diminuer sa dette qui se chiffre à CHF 30'000.-.

 

Il a été condamné le ______2007 par le Ministère public à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, à CHF 60.- l'unité, avec sursis pendant 3 ans, et à une amende de CHF 800.-, pour lésions corporelles simples, en raison, selon ses dires, d'un différend avec ______.

 

b. A______, ressortissant de ______ né le ______, est père de ______ enfants âgés de ______ ans qui vivent à ______ avec leur mère. Il est marié avec la mère de ses enfants selon ______. Il est père d'un autre enfant né ______ à ______de sa relation avec une autre femme. Il a gardé une bonne relation avec chacune d'elles qui le visite l'une et l'autre. Il correspond régulièrement avec tous ses enfants. Même incarcéré, il essaie de subvenir à leurs besoins dans la mesure de ses possibilités, étant précisé que son pécule ne dépasse pas quelques centaines de franc suisse. Son épouse vivant à ______souffre d'hypertension artérielle.

 

La mère de A______ est établie en ______. Son père est décédé. A______ fait partie d'une famille nombreuse composée de ______enfants. Il a suivi à l'âge de l'adolescence sa sœur qui s'est établie en ______. Il a travaillé dans différents domaines, comme ______. A ces différents titres, il a réalisé un salaire de l'ordre de CHF 1'500.- par mois quand il n'était pas au chômage. Son épouse a toujours travaillé.

 

Il a été condamné en Suisse à cinq reprises, principalement pour des infractions contre le patrimoine, soit notamment pour escroquerie par métier, faux dans les titres, faux dans les certificats, ainsi que pour infraction à la loi fédérale sur les étrangers, les dernières fois :

 

-                        le ______ 2005 par le juge d'instruction de Genève, à une peine d'emprisonnement de 2 mois, pour escroquerie, faux dans les titres et faux dans les certificats,

-                        le ______ 2005 par la Chambre pénale de Genève, à une peine d'emprisonnement de 12 mois, pour escroquerie par métier et faux dans les titres.

 

Il a également été condamné en ______ à dix reprises, principalement pour des infractions contre le patrimoine, soit notamment pour escroquerie, tentative d'escroquerie par usage de faux nom ou de fausse qualité, tentative d'escroquerie par emploi de manœuvres frauduleuses, contrefaçon ou falsification de chèque, usage de chèque contrefait ou falsifié, faux et usage de faux dans un document administratif, obtention frauduleuse et usage de faux document administratif constatant un droit, une identité ou une qualité, usage d'un document administratif établi sous le nom d'un tiers, usage de document administratif contrefait, falsifié, inexact ou incomplet, et recel de bien provenant d'un vol, les dernières fois :

 

-                        le ______ 2008 par le Tribunal correctionnel de ______, à une peine privative de liberté de 2 ans, pour escroquerie, tentative d'escroquerie, faux et usage de faux dans un document administratif commis de manière habituelle et recel de bien provenant d'un vol,

 

-                        le ______ 2008 par le Tribunal correctionnel de ______, à une peine privative de liberté de 8 mois, pour escroquerie, tentative d'escroquerie et usage de faux document administratif constatant un droit, une identité ou une qualité.

 

A______ n'était pas fier de ses casiers judiciaires ______. L'utilisation de divers alias en ______ lui avait joué des tours en ce sens qu'il avait pu être condamné sous un alias dont il avait jadis usé sans qu'il ne soit l'auteur de l'infraction visée.

EN DROIT :

1.             Les appels de A______ (ci-après : A______) et du Ministère public sont recevables pour avoir été interjetés et motivés selon la forme et dans les délais prescrits (art. 398 et 399 CPP).

La partie qui attaque seulement certaines parties du jugement est tenue d'indiquer dans la déclaration d'appel, de manière définitive, sur quelles parties porte l'appel, à savoir (art. 399 al. 4 CPP) : la question de la culpabilité, le cas échéant en rapport avec chacun des actes (let. a) ; la quotité de la peine (let. b) ; les mesures qui ont été ordonnées (let. c) ; les prétentions civiles ou certaines d'entre elles (let. d) ; les conséquences accessoires du jugement (let. e) ; les frais, les indemnités et la réparation du tort moral (let. f) ; les décisions judiciaires ultérieures (let. g).

La Chambre limite son examen aux violations décrites dans l'acte d'appel (art. 404 al. 1 CPP), sauf en cas de décisions illégales ou inéquitables (art. 404 al. 2 CPP).

2.             2.1 Le principe in dubio pro reo, qui découle de la présomption d'innocence, garantie par l'art. 6 ch. 2 CEDH et, sur le plan interne, par les art. 32 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. ; RS 101) et 10 al. 3 CPP, concerne tant le fardeau de la preuve que l'appréciation des preuves.

En tant que règle sur le fardeau de la preuve, ce principe signifie qu'il incombe à l'accusation d'établir la culpabilité de l'accusé, et non à ce dernier de démontrer son innocence. Il est violé lorsque le juge rend un verdict de culpabilité au seul motif que l'accusé n'a pas prouvé son innocence, mais aussi lorsqu'il résulte du jugement que, pour être parti de la fausse prémisse qu'il incombait à l'accusé de prouver son innocence, le juge l'a condamné parce qu'il n'avait pas apporté cette preuve (ATF 127 I 38 consid. 2a p. 40 et les arrêts cités).

Comme règle de l'appréciation des preuves, le principe in dubio pro reo interdit au juge de se déclarer convaincu d'un état de fait défavorable à l'accusé, lorsqu'une appréciation objective des éléments de preuve recueillis laisse subsister un doute sérieux et insurmontable quant à l'existence de cet état de fait. Des doutes abstraits ou théoriques, qui sont toujours possibles, ne suffisent certes pas à exclure une condamnation. La présomption d'innocence n'est invoquée avec succès que si le recourant démontre qu'à l'issue d'une appréciation exempte d'arbitraire de l'ensemble des preuves, le juge aurait dû éprouver des doutes sérieux et irréductibles sur sa culpabilité (ATF 120 Ia 31 consid. 2 p. 33 ss, ATF 124 IV 86 consid. 2a p. 87 ss).

2.2 Le juge du fait dispose d'un large pouvoir dans l'appréciation des preuves (ATF 120 Ia 31 consid. 4b p. 40). Confronté à des versions contradictoires, il forge sa conviction sur la base d'un ensemble d'éléments ou d'indices convergents. L'appréciation des preuves doit être examinée dans son ensemble et l'état de fait déduit du rapprochement de divers éléments ou indices. Un ou plusieurs arguments corroboratifs peuvent demeurer fragiles si la solution retenue peut être justifiée de façon soutenable par un ou plusieurs arguments de nature à emporter la conviction (arrêts du Tribunal fédéral 6B_623/2012 du 6 février 2013 consid. 2.1 et 6B_642/2012 du 22 janvier 2013 consid. 1.1). Qu'il n'y ait pas de témoin oculaire direct ou de preuve matérielle irréfutable d'un fait ne suffit pas à faire admettre qu'il était arbitraire de le tenir pour établi, dans la mesure où des indices suffisants viennent le corroborer (arrêt du Tribunal fédéral 1P.221/1996 du 17 juillet 1996).

Dans le cadre du principe de libre appréciation des preuves, qui gouverne notamment l'appréciation des déclarations de la victime d'une infraction (arrêts du Tribunal fédéral 6B_716/2010 du 15 novembre 2010 consid. 1.3 et 6B_360/2008 du 12 novembre 2008 consid. 4.3), rien ne s'oppose à ce que le juge ne retienne qu'une partie des déclarations d'un témoin globalement crédible (ATF 120 Ia 31 consid. 3 p. 39 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_637/2012 du 21 janvier 2013 consid. 5.4). Les déclarations successives d'un même témoin ne doivent pas nécessairement être écartées du seul fait qu'elles sont contradictoires ; il appartient au juge de retenir, sans arbitraire, la version qui lui paraît la plus convaincante et de motiver les raisons de son choix (arrêt du Tribunal fédéral 6B_429/2008 du 7 novembre 2008 consid. 4.2.2). Pour des rétractations de témoignages, comme face à des aveux, suivis de rétractation, le juge doit procéder conformément au principe de la libre appréciation des preuves. Est déterminante la force de conviction attachée à chaque moyen de preuve et non pas le genre de preuve administrée, sur la base d'une évaluation globale de l'ensemble des preuves rassemblées au dossier. Le juge doit en particulier se forger une conviction aussi bien sur les premières déclarations du prévenu, respectivement d’un témoin, que sur les nouvelles, valant rétractation, et apprécier les circonstances dans lesquelles l'intéressé a modifié ses déclarations initiales (arrêts du Tribunal fédéral 6B_157/2011 du 20 septembre 2011 consid. 1.2 et 6B_626/2008 du 11 novembre 2008 consid. 2.1 et les référence citées).

2.3 Selon l’art. 6 par. 3 let. d CEDH, tout accusé a le droit d’interroger ou de faire interroger les témoins à charge et d’obtenir la citation et l’interrogatoire des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge. Ce droit découle également des art. 29 et 32 al. 2 Cst. Les témoins à charge sont tous les auteurs de déclarations susceptibles d’être prises en considération au détriment de l’accusé, quelle que soit la qualité de ces personnes dans le procès (ATF 125 I 127 consid. 6a in fine p. 132 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_22/2012 du 25 mai 2012 consid. 3.1). Les éléments de preuve doivent en principe être produits en présence de l’accusé lors d’une audience publique, en vue d’un débat contradictoire. Il est néanmoins admissible de se référer aux dépositions recueillies avant les débats si l’accusé a disposé d’une occasion adéquate et suffisante de contester un témoignage à charge et d’en interroger ou faire interroger l’auteur (ATF 133 I 33 consid. 3.1 p. 41 ; ATF 131 I 476 consid. 2.2 p. 481). Le droit du prévenu de faire poser des questions à un témoin à charge est absolu lorsque la déposition de cette personne constitue une preuve décisive (ATF 133 I 33 consid. 3.1 p. 41 ; ATF 131 I 476 consid. 2.2 p. 481 ; ATF 129 I 151 consid. 3.1 p. 154).

Lorsqu’il n’est plus possible de faire procéder à une audition contradictoire en raison du décès, de l’absence ou d’un empêchement durable du témoin, la déposition recueillie au cours de l’enquête peut être prise en considération alors même que l’accusé n’aurait pas eu l’occasion d’en faire interroger l’auteur, à condition que la déposition soit soumise à un examen attentif, que l’accusé puisse prendre position à son sujet et que le verdict de culpabilité ne soit pas fondé sur cette seule preuve (ATF 124 I 274 consid. 5b p. 285s ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_704/2012 du 3 avril 2013 consid. 2.2). L’accusé ne peut en principe exercer qu’une seule fois le droit d’interroger ou de faire interroger les témoins à charge (ATF 125 I 127 consid. 6c/ee p. 136).

3.             3.1 L'art. 146 CP réprime le comportement de celui qui, dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, aura astucieusement induit en erreur une personne et l’aura de la sorte déterminé à des actes préjudiciables à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers. L'escroquerie consiste ainsi à tromper la dupe par des affirmations fallacieuses, par la dissimulation de faits vrais ou par un comportement qui la conforte dans son erreur. Pour qu'il y ait escroquerie, une simple tromperie ne suffit cependant pas. Il faut qu'elle soit astucieuse. Le juge pénal n'a pas à accorder sa protection à celui qui est tombé dans un piège qu'un peu d'attention et de réflexion lui aurait permis d'éviter. Selon la jurisprudence, la tromperie est astucieuse lorsque l'auteur recourt à un édifice de mensonges, à des manœuvres frauduleuses ou à une mise en scène, mais aussi lorsqu'il donne simplement de fausses informations, si leur vérification est impossible, ne l'est que difficilement ou ne peut raisonnablement être exigée, de même que si l'auteur dissuade la dupe de vérifier ou prévoit, en fonction des circonstances, qu'elle renoncera à le faire en raison d'un rapport de confiance particulier (ATF 128 IV 18 consid. 3a p. 20 ; arrêts du Tribunal fédéral 6B_564/2009 et 6B_566/2009 du 13 novembre 2009 consid. 3).

La tromperie astucieuse doit amener la dupe, dans l'erreur, à accomplir un acte préjudiciable à ses intérêts pécuniaires ou à ceux d'un tiers. La dupe doit conserver une certaine liberté de choix. L'erreur créée ou confortée par la tromperie doit motiver l'acte (ATF 119 IV 210 consid. 3d p. 214). L'escroquerie ne sera consommée que s'il y a un dommage.

Sur le plan subjectif, l'escroquerie est une infraction intentionnelle, l'intention devant porter sur tous les éléments constitutifs de l'infraction. S'agissant d'une escroquerie, il faut en particulier que l'auteur ait eu l'intention de commettre une tromperie astucieuse (cf. ATF 128 IV 18 consid. 3b p. 21). L'auteur doit en outre agir dans le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un enrichissement illégitime, soit un avantage patrimonial correspondant au désavantage patrimonial constituant le dommage (ATF 134 IV 210 consid. 5.3 p. 213 s.).

3.2 Il y a tentative d'escroquerie si l'auteur, agissant intentionnellement et dans un dessein d'enrichissement, a commencé l'exécution de cette infraction sans poursuivre son exécution jusqu'à son terme ou que le résultat dommageable ne se produit pas (art. 22 CP). Toute tromperie qui ne réussit pas n'est pas nécessairement dénuée de caractère astucieux. Abstraction faite de l'échec de la tromperie, il importe d'examiner si la tromperie prévue paraissait ou non facilement décelable compte tenu des possibilités de protection dont disposait la victime et dont l'auteur avait connaissance. Autrement dit, c'est dans le cadre d'un examen hypothétique qu'il faut déterminer si le plan élaboré par l'auteur était objectivement astucieux ou non. S'il l'était et que la tromperie échoue parce que la victime était plus attentive ou plus avisée que l'auteur ne se l'était figuré ou en raison du hasard ou d'une autre circonstance non prévisible, il y a alors lieu de retenir une tentative de tromperie astucieuse (ATF 128 IV 18 consid. 3b p. 21 ; ATF 122 IV 246 consid. 3c p. 249/250).

3.3 Selon la jurisprudence, l'auteur agit par métier lorsqu'il résulte du temps et des moyens qu'il consacre à ses agissements délictueux, de la fréquence des actes pendant une période déterminée, ainsi que des revenus envisagés ou obtenus, qu'il exerce son activité coupable à la manière d'une profession, même accessoire. Il faut que l'auteur aspire à obtenir des revenus relativement réguliers représentant un apport notable au financement de son genre de vie et qu'il se soit ainsi, d'une certaine façon, installé dans la délinquance (ATF 129 IV 253 consid. 2.1 ; 123 IV 113 consid. 2c et les arrêts cités).

L'aggravante du métier englobe les tentatives pour l'infraction considérée (ATF 123 IV 117 consid. d ; B. CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol I, 2010, n. 15 ad art. 139, n. 46 ad art. 146).

3.4.1 L’art. 251 ch. 1 CP réprime le comportement de celui qui, dans le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d’autrui, ou de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite, aura créé un titre faux, falsifié un titre, abusé de la signature ou de la marque à la main réelles d’autrui pour fabriquer un titre supposé, ou constaté ou fait constater faussement, dans un titre, un fait ayant une portée juridique, ou aura, pour tromper autrui, fait usage d’un tel titre.

Le faux dans les titres est une infraction de mise en danger abstraite. Il n’est donc pas nécessaire qu’une personne soit effectivement trompée. L’art. 251 CP protège la confiance particulière accordée dans les relations juridiques à un titre en tant que moyen de preuve (arrêt du Tribunal fédéral 6B_421/2008 du 21 août 2009 consid. 5.3.1). La tromperie n’a pas besoin d’être astucieuse (arrêt du Tribunal fédéral 6B_455/2008 du 26 décembre 2008 consid. 2.2.1.).

L'art. 251 CP vise tant le faux matériel, qui consiste dans la fabrication d'un titre faux ou la falsification d'un titre, que le faux intellectuel, qui consiste dans la constatation d'un fait inexact, en ce sens que la déclaration contenue dans le titre ne correspond pas à la réalité (arrêt du Tribunal fédéral 6B_589/2009 du 14 septembre 2009 consid. 2.1.).

Il y a faux matériel lorsqu'une personne fabrique un titre dont l'auteur réel ne coïncide pas avec l'auteur apparent. Le faussaire crée un titre qui trompe sur l'identité de celui dont il émane en réalité (ATF 128 IV 265 consid. 1.1.1 p. 268 et les références citées). Lorsqu'il y a création d'un titre faux, il est sans importance de savoir si le contenu d'un tel titre est mensonger ou non et il n'y a dès lors plus lieu d'examiner si les documents en question offrent des garanties accrues de véracité quant à leur contenu. Les documents faussement créés doivent toutefois aussi constituer des titres tels que définis par l'art. 110 ch. 4 CP.

Il y a notamment création d'un titre faux lorsque l'auteur rédige un document en faisant apparaître, à côté de sa propre signature, celle supposée d'une autre personne, comme cocontractante, alors que cette dernière n'a nullement approuvé le texte (arrêt du Tribunal fédéral 6S.37/2007 du 19 avril 2007 consid. 8.1.1 et les références citées). De même, une reconnaissance de dette signée par le débiteur sous un faux nom constitue un faux matériel dès lors que le créancier sera entravé pour faire valoir ses droits en procédure (ATF 132 IV 57 consid. 5).

Sur le plan subjectif, le faux dans les titres est une infraction intentionnelle. Le dol éventuel suffit. L'art. 251 CP exige de surcroît un dessein spécial, qui peut se présenter sous deux formes alternatives, soit le dessein de porter atteinte aux intérêts pécuniaires ou aux droits d'autrui ou le dessein de se procurer ou de procurer à un tiers un avantage illicite. L'avantage est une notion très large ; il suffit que l'auteur veuille améliorer sa situation. Son illicéité peut résulter de la loi, du but poursuivi ou du moyen utilisé ; elle peut donc être déduite du seul fait que l'auteur recourt à un faux (ATF 133 IV 303 consid. 4.4 non publié et les références citées).

3.4.2 L'art. 252 CP prévoit que celui qui, dans le dessein d'améliorer sa situation ou celle d'autrui, aura contrefait ou falsifié des pièces de légitimation, des certificats ou des attestations, ou aura fait usage, pour tromper autrui, d'un écrit de cette nature. L'art. 255 CP prévoit quant à lui que les dispositions des art. 251 à 254 CP sont aussi applicables aux titres étrangers. Lorsque l'auteur agit avec le dessein de l'art. 251 CP, celui-ci prime l'art. 252 CP (ATF 111 IV 24 consid. b ; B. CORBOZ, op. cit., n. 26 ad art. 252).

3.4.3 Selon la jurisprudence, il y a concours entre le faux dans les titres et l'escroquerie, quand bien même la première de ces infractions n'a été commise que pour perpétrer la seconde (ATF 129 IV 53 consid. 3). Il en va de même pour les infractions visées aux art. 179 al. 1 et 2 CP (B. CORBOZ, op. cit., n. 36 ad art. 179).

3.5 L'art. 179 CP réprime le comportement de celui qui, sans en avoir le droit, aura ouvert un pli ou colis fermé pour prendre connaissance de son contenu (al.1) et celui qui, ayant pris connaissance de certains faits en ouvrant un pli ou colis fermé qui ne lui était pas destiné, aura divulgué ces faits ou en aura tiré profit (al. 2).

3.6.1 Le coauteur est celui qui collabore intentionnellement et de manière déterminante avec d'autres personnes dans la décision de commettre une infraction, dans son organisation ou son exécution, au point d'apparaître comme l'un des participants principaux. La coactivité suppose une décision commune, mais qui n'est pas nécessairement expresse. Le contenu de la volonté doit permettre de distinguer le coauteur du participant accessoire : il faut que l'auteur s'associe à la décision dont est issu le délit (mais sans accomplir nécessairement des actes d'exécution) ou à la réalisation de ce dernier, dans des conditions ou dans une mesure qui le font apparaître comme un participant non pas secondaire, mais principal (ATF 120 IV 17 consid. 2d et Arrêt du Tribunal fédéral 6B_890/2008 du 6 avril 2009 consid. 3.1.).

3.6.2 Le complice est celui "qui a intentionnellement prêté assistance à l'auteur pour commettre un crime ou un délit" (art. 25 CP). La complicité est une forme de participation accessoire à l'infraction. Elle suppose que le complice apporte à l'auteur principal une contribution causale à la réalisation de l'infraction, de telle sorte que les événements ne se seraient pas déroulés de la même manière sans cette assistance (ATF 132 IV 49 consid. 1.1). Il n'est toutefois pas nécessaire que l'intervention du complice soit une condition sine qua non de la réalisation de l'infraction (ATF 129 IV 124 consid. 3.2). Contrairement au coauteur, le complice ne veut pas l'infraction pour sienne et n'est pas prêt à en assumer la responsabilité (arrêt du Tribunal fédéral 6B_687/2007 du 11 avril 2008, consid. 2.2.).

4. Conclusions du Ministère public en appel à l'encontre de l'intimé B______.

4.1.1 La question est de savoir si l'intimé B______ doit être reconnu coupable de coactivité d'escroquerie plutôt que de complicité dans le cas N______.

L'intimé a été reconnu par la victime de manière probante, sans qu'elle n'en soit certaine à 100 %. Les dénégations de l'intimé ne sont pas crédibles, la reconnaissance de son visage au milieu de 16 portraits étant d'autant plus déterminante que la confrontation n'a fait que conforter l'impression première de la victime. Selon ses souvenirs, c'est bien l'intimé qui s'était présenté à son domicile pour obtenir un specimen de sa signature ainsi que les indications utiles sur sa date de naissance. S'il avait refusé d'endosser ce rôle, l'infraction précitée n'aurait pas été possible, faute d'un échantillon de la signature de la future victime. Il doit ainsi être admis qu'il a collaboré de manière déterminante à l'organisation de l'infraction et à son exécution, comme en atteste l'intensité des contacts téléphoniques avec A______ avant et après les dates clefs des 20 mai et 3 juin 2011 ainsi que leur durée, notamment les 16 mai et 4 juin 2011, lesquelles témoignent d'une préparation et d'un suivi minutieux. Doit aussi être mise en exergue la connaissance du rôle dévolu à P______ dans l'opération au regard du document saisi sur l'intimé lors de son interpellation et des SMS échangés au sujet de l'envoi d'argent via Y______. Il s'ensuit que l'intimé B______ s'est associé à la décision commune d'escroquer la victime N______, ce qui fait de lui un coauteur et non un complice.

L'appel du Ministère public doit donc être admis sur ce point et le jugement entrepris modifié en conséquence.

4.1.2 Aux termes de l'art. 83 al. 1 CPP, l'autorité pénale qui a rendu un prononcé dont le dispositif (…) est en contradiction avec l'exposé des motifs, l'explique ou le rectifie à la demande d'une partie ou d'office.

En l'espèce, le jugement querellé contient une erreur dans la retranscription de l'acte d'accusation, dans la mesure où l'intimé B______ se voit reprocher d'avoir fait en sorte que la co-prévenue P______ se présente au guichet de la banque où "elle a tenté de retirer CHF 32'000.- du compte" d'N______. Or, ce libellé ne correspond pas à l'acte d'accusation qui retient dans le cas N______ une escroquerie réalisée, ce qui ressort des pièces produites. Cette erreur s'est répercutée dans le dispositif de la CPAR notifié le 19 mai 2014, ce qui a pour effet de faire naître une contradiction avec les considérants du présent arrêt.

Au vu de ce qui précède, le dispositif sera modifié en ce sens que l'intimé B______ sera reconnu coupable d'escroquerie (let. C.b) ch. 3), ce qui n'est pas de nature à péjorer sa situation, sa peine restant en tout état inchangée (cf. infra ch. 6.5).

4.2 Le Ministère public conteste en second lieu les acquittements, exprès ou implicites, prononcés par le Tribunal correctionnel.

4.2.1 Dans les cas N______, F______, M______ et O______, l'acte d'accusation impute un rôle précis à l'intimé B______, en ce sens que le Ministère public lui reproche d'avoir livré un colis ou une enveloppe à la victime, d'avoir obtenu de la sorte un exemplaire de sa signature (1ère phase) et d'avoir dérobé des documents bancaires dans les boîtes aux lettres des victimes (2ème phase).

La victime N______ n'a pas été en mesure de s'apercevoir qu'il lui manquait du courrier de sa banque. Elle n'a pu a fortiori fournir aucun renseignement utile sur l'auteur du prélèvement de la documentation bancaire dans sa boîte aux lettres. Les victimes F______, M______ et O______ n'ont pas reconnu l'intimé B______ comme étant celui qui leur avait livré le colis ou l'enveloppe litigieux. Dans ces circonstances, il ne peut être établi, au-delà de tout doute raisonnable, que l'intimé serait celui qui s'est emparé des relevés bancaires dans les boîtes aux lettres des victimes précitées et/ou qu'il aurait ouvert et pris connaissance des plis ainsi dérobés. Il n'aurait été possible de le retenir que si le Ministère public avait mentionné que l'intimé B______ avait aussi pu agir par coactivité avec d'autres comparses intervenus au domicile des futures victimes.

La mise en cause de l'intimé B______ résulte en revanche de son identification par K______, laquelle a été corroborée par ses deux voisines qui l'ont formellement reconnu comme étant la personne qui avait tenté de leur faire signer un recommandé. Ce cas ne saurait toutefois être retenu à charge, faute pour le Ministère public de l'avoir fait figurer dans l'acte d'accusation visant l'intimé B______.

Le Ministère public doit ainsi être débouté de son appel sur ces points visant les acquittements implicites de violation de secrets privés dans les cas F______, N______, M______ et O______ pour les motifs précités.

4.2.2 Il est également reproché à l'intimé B______ d'avoir fait en sorte que P______, voire un inconnu dans le cas O______, puisse se présenter au guichet des diverses banques, munis d'une fausse carte d'identité ______ au nom des victimes et retirent ou tentent de retirer de l'argent de leurs comptes respectifs (3ème phase de l'acte d'accusation dans les cas N______, M______ et O______), le faux dans les titres étant ainsi visé.

Dès lors qu'il n'est pas établi que l'intimé B______ a dérobé le relevé bancaire dans le cas N______, la CPAR ne peut retenir qu'il a participé à la commission de l'infraction subséquente de faux dans les titres. Il en va de même dans les cas M______ et O______, faute pour l'intimé B______ d'avoir été reconnu coupable de violation de secrets privés (cf. supra ch. 4.2.1). Le raisonnement alors suivi peut être repris mutatis mutandis car seule la description d'une activité comme coauteur de faux dans les titres aurait permis de fonder la culpabilité de l'intimé B______. C'était manifestement le cas dans le dossier F______, dès lors que l'auteur s'est présenté lui-même au guichet de la banque muni d'une carte d'identité dont il savait nécessairement qu'elle avait été falsifiée, peu importe qu'il en fût ou non l'auteur direct. Cela aurait aussi pu être le cas pour les retraits litigieux au préjudice de la victime O______. Il aurait fallu pour ce faire que le Ministère public donnât suite à l'identification de l'intimé B______ comme auteur des retraits à la H______, succursales d'______ et de ______(cf. supra let. k.a), plutôt que de mentionner la présence d'un inconnu dans l'acte d'accusation.

Le Ministère public doit ainsi être débouté de son appel sur ces points visant les acquittements implicites de faux dans les titres dans les cas N______, M______ et O______.

4.2.3 Restent les accusations d'escroquerie et de tentative d'escroquerie pour les cas M______ et O______.

La CPAR est convaincue, au vu du dossier soumis à son appréciation, que l'intimé B______ est directement impliqué dans les opérations frauduleuses susmentionnées. Il y a suffisamment d'éléments matériels à charge, tels les contacts téléphoniques avec A______ dans les moments clefs, que ce soit à fin mai-début juin pour la livraison ou les 23 et 25 juin 2011 pour les retraits au guichet de la banque. Un autre indice tient à la carte d'identité utilisée dans le cas M______, dont il est acquis au vu du cas F______ qu'elle faisait partie du même lot de cartes falsifiées. Doit aussi être mis en évidence l'indice supplémentaire constitué de la mention ______ qui permet de relier les cas M______ et O______. A ces éléments s'ajoutent les recherches effectuées sur l'ordinateur de l'intimé B______, ses explications étant dépourvues de toute force probante dès lors qu'il a cherché à adapter ses réponses au fil de l'interrogatoire, ainsi que les documents saisis à son interpellation, notamment le reçu bancaire au nom de O______ et celui contenant les adresses de plusieurs succursales de la banque T______. Enfin, le modus operandi rejoint celui d'autres cas où la culpabilité de l'intimé B______ est établie, notamment les cas F______, où il a été interpellé en flagrant délit, et N______ (cf. supra, ch. 4.1.1).

Cela dit, la formulation utilisée par le Ministère public pose problème, à l'instar de ce qui précède (cf. supra ch. 4.2.1 et 4.2.2). L'acte d'accusation emploie le terme "ainsi" pour faire le lien de cause à effet entre les deux premiers actes (livraison + vol des données bancaires) et la présentation au guichet de la banque d'une tierce personne. Aussi l'intimé B______ doit-il avoir non seulement livré le colis ou l'enveloppe litigieuse mais également dérobé les documents bancaires (conditions cumulatives) pour pouvoir être reconnu coupable des actes imputés à P______ (cas M______) et à l'inconnu qui s'est présenté au guichet de la banque H______ le 23 juin 2011 (cas O______). Or, dans la mesure où il ne peut pas être établi que l'intimé B______ a livré le colis ou l'enveloppe litigieuse – contrairement au cas N______ - ni qu'il a dérobé les relevés bancaires, il convient de confirmer son acquittement des chefs de tentative et d'escroquerie dans les cas M______ et O______. Il en aurait été autrement si la coactivité avait été retenue.

Le Ministère public doit ainsi être débouté de son appel sur ces points visant les acquittements du chef d'infractions aux art. 146 et 22/146 CP. L'acquittement est confirmé pour des motifs formels uniquement, sans que le principe in dubio pro reo soit applicable au regard des charges qui doivent être tenues pour probantes et du modus operandi semblable à d'autres opérations.

4.3 Le Ministère public fait enfin grief au Tribunal correctionnel de ne pas avoir retenu la circonstance aggravante du métier.

Dans la mesure où seules deux infractions peuvent être retenues à son encontre (cas N______ et F______), l'aggravante du métier a été écartée à juste titre. On ne peut en effet considérer que l'intimé B______ a commis l'escroquerie et la tentative qui lui sont reprochées à la manière d'une profession, même en tenant compte de l'ensemble des circonstances. Il y a lieu notamment de prendre en compte la durée limitée de la période pénale, soit un intervalle de six semaines entre le 20 mai et le 8 juillet 2011.

L'appel du Ministère public sera par conséquent rejeté sur ce point.

5.             Conclusions du Ministère public en appel à l'encontre de A______ et acquittement sollicité par ce dernier.

5.1 Il convient de relever que toutes les infractions reprochées ont été commises selon un même modus operandi, composé de quatre, voire de cinq phases successives :

1. Une personne se présente au domicile des victimes et leur remet, contre signature, un courrier ou un colis comportant des vieux journaux, obtenant de cette manière un spécimen de la signature ainsi que leur date de naissance.

2. Un relevé bancaire est dérobé dans la boîte aux lettres de la victime.

3. Une fausse carte d'identité ______ est établie au nom de la personne dupée mais avec la photographie de la personne susceptible de se présenter au guichet de la banque.

4. Un faux chèque est éventuellement constitué, comme dans les cas G______, K______, E______, D______ ou encore C______.

5. Une personne munie de la fausse carte d'identité ______ se rend au guichet de la banque de la victime et procède à un ou plusieurs retraits. A cette occasion, le faux chèque peut être préalablement présenté à l'encaissement, de manière à donner l'apparence d'un compte crédité en suffisance.

L'intimé B______ s'est rendu à la banque muni de la fausse pièce d'identité dans le cas F______, ce qui a provoqué son interpellation. Selon M______, son portrait correspondait à l'auteur des retraits frauduleux dans le cas O______, bien que le Ministère public n'ait pas retenu cette hypothèse. Enfin, dans les cas G______, K______, E______, D______, M______, N______ et C______, P______ est la personne qui s'est présentée aux guichets des banques.

La commission de neuf escroqueries ou tentatives selon un même modus operandi en l'espace de quelques mois seulement constitue un indice suffisant permettant de considérer qu'une même équipe, dont B______ et P______ faisaient partie, en est l'auteur. La fin d'une activité délictueuse de ce type, suite à l'arrestation de P______, renforce cette conclusion.

5.2 La place de A______ dans ce dispositif ressort de divers éléments, notamment liés à des indices matériels.

A titre liminaire, il convient d'observer que l'intimé B______ et P______ ne se connaissaient pas, selon leurs déclarations convergentes. L'organisation des escroqueries reprochées ne pouvait ainsi être orchestrée que par une tierce personne. Or, plusieurs éléments mènent à A______, les premiers étant liés au chèque utilisé dans le cas C______ qui présentait son empreinte. Les déclarations de A______ ont varié pour expliquer la présence d'une trace papillaire sur ce chèque. Il a argué de ses contacts avec P______ qui auraient perduré après leur rupture en 2006. De six à sept mois selon ses déclarations initiales à la police, leurs rapports se seraient prolongés jusqu'en août 2011 selon sa déposition à la CPAR. L'argument de la remise d'un chèque vierge en garantie d'un box n'emporte pas la conviction. Il n'est pas vraisemblable que P______ ait eu subitement besoin de l'aide de son ancien ami pour obtenir le chèque saisi dans le cas C______ alors qu'elle n'avait semble-t-il éprouvé aucune difficulté à se procurer d'autres chèques pour les cas G______, K______, E______ et D______. Enfin, il n'est pas davantage vraisemblable que A______ ait accepté de fournir un chèque vierge à P______ impliquée dans des escroqueries aux chèques selon un mode opératoire identique.

Plus que la localisation géographique du chèque, rattaché à ______, ville de domicile de A______, sa personne a été mise en cause par P______ sous les traits de X______ qu'elle a finalement identifié. Celle-ci ne s'est pas contentée de désigner ainsi A______ mais elle a encore longuement décrit son rôle central sous les traits de X______ qui était celui qui lui avait remis le chèque qu'il avait préalablement rempli. Or, on retrouve dans le libellé du chèque une faute ("40" orthographié "quarente") qui fait sens au regard de la même faute commise sur des chèques présentés pour d'autres retraits ou tentatives frauduleux pour lesquels l'implication de A______ est établie (cf. infra, cas G______, D______). C'est sans compter qu'il a lui-même admis devant les premiers juges orthographier "40" avec un "e".

Le même raisonnement vaut pour la carte d'identité falsifiée du cas C______, dont les caractéristiques sont similaires à d'autres documents présentés au guichet de la banque, seule la préfecture délivrant la carte étant différente nonobstant le nom du préposé toujours identique (cf. infra, cas E______, O______, M______ et N______).

La mise en cause de P______ est d'autant plus probante qu'elle n'est pas isolée mais corroborée par d'autres éléments. Dans ces circonstances, il importe peu que la confrontation souhaitée n'ait pas eu lieu en raison du fait que A______ a été interpellé après la condamnation de P______ et son éloignement de la Suisse.

Tous ces éléments constituent des indices convergents permettant de retenir que A______ s'est procuré le chèque utilisé lors de la tentative d'escroquerie au préjudice de C______, chèque qu'il a ensuite rempli avant de le remettre à P______. Ce faisant, il a remplacé au pied levé l'intimé B______ qui, après son interpellation de ______2011, avait fait savoir à son entourage qu'il n'entendait pas persévérer dans son activité délinquante.

A______ sera ainsi débouté sur ce point et le jugement du Tribunal correctionnel confirmé s'agissant de la culpabilité retenue pour le cas C______ du chef de faux dans les titres, violation des secrets privés et tentative d'escroquerie, la coactivté ayant été retenue par le Ministère public dans l'acte d'accusation contrairement à l'intimé B______, d'où des traitements différenciés pour les deux prévenus.

5.3 D'autres éléments matériels permettent de fonder la culpabilité de A______ dans les cas D______ et G______ pour lesquels il a bénéficié d'un acquittement en première instance. A cet égard, les chèques utilisés constituent des indices à charge.

Comme déjà dit (cf. supra ch. 5.2), le chèque saisi lors de la tentative d'escroquerie C______ présente une faute d'orthographe assez saisissante dans la mesure où le mot "quarente" se retrouve sur les chèques saisis dans les cas D______ et G______. Si elle était isolée, cette faute n'aurait pas une force probante, comme a essayé de le plaider A______ en appel. Sa force probante découle de l'existence d'autres indices convergents qui vont dans le sens de l'implication de A______, nonobstant ses dénégations.

La mise en cause de P______ en est un de poids, s'agissant notamment de l'identification de A______ sous les traits de X______. Doit aussi être mise en exergue l'intensité des contacts téléphoniques dans le cas D______. Pas moins de sept contacts téléphoniques croisés ont eu lieu entre l'intimé B______ et A______ début mars 2011, ce qui correspond à la période de livraison de l'enveloppe. S'ensuivent des contacts réguliers jusqu'à la date du retrait frauduleux par P______ où pas moins de onze appels croisés sont enregistrés entre les 7 et 16 mars 2011, dont la durée inhabituellement longue de certains échanges démontre la mise en place d'un plan minutieux en vue du retrait frauduleux intervenu le 16 mars 2011. Or, seul A______ était apte à tisser un lien avec P______ par l'intermédiaire de son beau-frère, de sorte qu'il ne fait guère de doute que ces contacts sont directement liés à l'escroquerie à venir.

A______ sera ainsi débouté sur ce point et le jugement du Tribunal correctionnel réformé, sa culpabilité pour escroquerie devant être retenue au titre de la coactivité dans les cas G______ et D______ sur la base des éléments précités. En sa qualité de responsable et coordinateur des opérations, en contact permanent avec les acteurs sur le terrain, A______, s'il n'a pas agi personnellement, a fait en sorte de pouvoir prendre connaissance des plis dérobés aux victimes. Il a agi de la même manière pour la confection des faux dans les titres, dans la mesure où il était celui qui a établi ou à tout le moins fait établir les pièces d'identité ______ falsifiées.

A______ aurait ainsi pu être reconnu coupable de faux dans les titres étrangers et de violation des secrets privés dans les cas G______ et D______, si une erreur formelle n'avait pas été commise dans la rédaction du dispositif notifié le 19 mai 2014 qui est muet sur ce point, sans qu'il ne soit possible de le rectifier à ce stade.

5.4 Les cartes d'identité falsifiées constituent un autre indice permettant de mettre en exergue les charges fondant la culpabilité de A______.

Lors des arrestations successives de l'intimé B______ et de P______, la police a saisi des cartes d'identité falsifiées prétendument délivrées par U______, ______, pour le compte de la Préfecture ______ (cas F______) et de la Préfecture ______ (cas C______). Ces cartes ont été respectivement remises par A______ à l'intimé B______ et à P______, comme cela ressort de leurs déclarations que rien ne permet de remettre en question, ce d'autant que l'intimé B______ a longtemps cherché à protéger son beau-frère.

Dans les autres cas reprochés, des cartes d'identités falsifiées prétendument signées par le même haut fonctionnaire U______, pour le compte des Préfectures ______ (cas E______), de l'Ain (cas N______) et de la Sous-Préfecture ______ (cas M______) ont été saisies. Dès lors que toutes ces pièces d'identité comportent la signature de U______ et qu'elles sont similaires, sous réserve de quelques menues différences, il est acquis qu'elles proviennent d'une source unique. Cette conclusion s'impose au regard de la mention "IDFRAO______" sur la carte d'identité au nom de M______, ce qui la rapproche de la carte utilisée dans les retraits frauduleux du cas O______. Ce lien est encore renforcé par la proximité temporelle des deux opérations illicites, l'une (cas M______) ayant été tentée deux jours après la réussite des retraits frauduleux opérés au préjudice de la victime O______.

Doit encore être mise en exergue la recherche sur Internet au domicile de l'intimé B______ sur le thème des fausses cartes d'identité, où l'intimé B______ a mis en cause A______ comme ayant pu être l'auteur de cette recherche spécifique.

Une autre recherche sur Internet, accessible à chacun, permet de savoir que U______ n'est pas un personnage imaginaire. Selon l'arrêté n° ______, il est ______ (cf. ______) agissant pour le compte de ______, laquelle fait partie de la préfecture de police ______. Cette information rapproche géographiquement les cartes d'identité falsifiées de A______ dont le centre de vie est à ______.

Tous ces éléments constituent des indices suffisants permettant de retenir que A______ est intervenu dans la falsification des pièces d'identité, dans les cas E______, M______, N______, F______ et C______.

5.5 D'autres éléments à charge doivent être relevés, qui concernent l'un ou l'autre des cas encore contestés.

Il faut se souvenir que l'intimé B______ a été identifié comme étant celui qui a livré le colis à N______. Quand bien même il n'est pas visé par l'acte d'accusation, la CPAR est d'avis qu'il était également le livreur dans le cas K______ dès lors qu'il a été reconnu par plusieurs personnes. Or, il apparaît que l'intimé B______ et A______ étaient en contact soutenu lors des démarches frauduleuses liées à ces deux cas. Pour K______, la police a recensé huit appels le jour de la livraison, cinq le lendemain et deux le surlendemain, tous de très courte durée. Dans le cas N______, treize appels ont été recensés aux dates litigieuses : neuf entre le 17 et le 19 mai 2011, la veille de la livraison, et quatre entre le 2 et le 4 juin 2011, dont l'un très long le jour même de la livraison aux fins de s'assurer de la réussite de l'opération. Bien plus, des SMS croisés ont été échangés entre les deux comparses les 4 et 5 juin 2011 au sujet du transfert de l'argent prélevé au guichet de la banque T______ par P______, ce qui en dit long sur l'implication de A______ et sa connaissance des affaires en cours. Dans le cas F______, l'intimé B______ a eu un contact téléphonique avec A______ le jour de la livraison de l'enveloppe et sept brefs appels ont été relevés le 7 juillet 2011, ce qui n'empêchera pas l'échec de l'opération du lendemain.

La fréquence de ces appels aux dates pertinentes dans le cadre du processus d'escroquerie est accablante. Les explications fournies selon lesquelles A______ avait l'habitude de contacter son beau-frère lorsqu'il venait voir son fils à Genève ne sont pas crédibles vu le contexte et la fréquence relevée. Ces échanges téléphoniques nourris constituent dès lors un indice supplémentaire permettant de considérer que A______ est impliqué dans les différentes escroqueries reprochées.

5.6 La mise en cause de A______ sous les traits de X______ est confortée par les propos de l'intimé B______ le décrivant comme étant l'organisateur des escroqueries, tentées ou consommées, dans les cas F______ et O______. L'implication de A______ pour le cas O______ découle au surplus des recherches opérées sur l'ordinateur de l'intimé B______. Même effectuées par ce dernier, les recherches ont pu profiter à A______ au regard de leurs contacts avérés dont le seul moteur n'était pas constitué par leurs liens familiaux, ainsi qu'en attestent leurs intenses contacts téléphoniques aux dates litigieuses.

5.7 Enfin, un lien peut être opéré entre les cas K______ et E______, P______ ayant été l'auteur de la tentative et du retrait frauduleux le même jour, tous deux dans le canton de Genève. Le rattachement du cas E______ avec le cas C______ n'est plus à faire, au regard de l'utilisation d'une carte d'identité de même provenance. La fréquence des contacts téléphoniques croisés entre A______ et l'intimé B______ avant le 4 mars 2011, date du retrait frauduleux E______, constitue un autre élément à charge pour A______, à l'instar de ce qui a pu être retenu dans d'autres cas.

5.8.1 Au vu de ce qui précède, A______ sera reconnu coupable de :

- faux dans les titres, violation des secrets privés, tentative et escroquerie dans les cas E______, M______, N______, O______, F______ et C______, eu égard à la coactivité retenue dans l'acte d'accusation le concernant. Dans cette mesure, il sera débouté de son appel et le jugement entrepris confirmé, conformément aux conclusions du Ministère public.

- d'escroqueries dans les cas G______ et D______, les autres infractions y afférentes ne pouvant être retenus à sa charge pour des motifs formels (cf. supra, ch. 5.3 in fine).

- tentative d'escroquerie dans le cas K______, les mêmes remarques que celles émises pour les cas G______ et D______ étant applicables mutatis mutandis s'agissant des infractions de faux dans les titres et de violation des secrets privés. Le jugement du Tribunal correctionnel sera réformé et les conclusions du Ministère public admises, sous cette réserve.

5.8.2 A______ a agi sans retenue et avec une intensité peu commune. Il a consacré la majeure partie de son temps à son activité délinquante, sans qu'il n'agisse pour autant à découvert. La responsabilité des opérations lui incombait, ainsi qu'en atteste l'intensité des contacts téléphoniques avec les acteurs sur le terrain. A______ a ainsi exercé son activité durant les quelques huit mois de la période pénale comme s'il s'agissait de son métier. L'aggravante sera dans cette mesure retenue à sa charge, à l'instar de la décision du Tribunal correctionnel qui doit être confirmée sur ce point.

6. Le Ministère public conteste également les peines infligées à l'intimé B______ et à A______.

6.1 Selon l’art. 47 al. 1 CP, le juge fixe la peine d’après la culpabilité de l’auteur. Il prend en considération les antécédents et la situation personnelle de ce dernier ainsi que l’effet de la peine sur son avenir. La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (al. 2).

La culpabilité de l'auteur doit être évaluée en fonction de tous les éléments objectifs pertinents, qui ont trait à l'acte lui-même, à savoir notamment la gravité de la lésion, le caractère répréhensible de l'acte et son mode d'exécution (objektive Tatkomponente). Du point de vue subjectif, sont pris en compte l'intensité de la volonté délictuelle, ainsi que les motivations et les buts de l'auteur (subjektive Tatkomponente). À ces composantes de la culpabilité, il faut ajouter les facteurs liés à l'auteur lui-même (Täterkomponente), à savoir les antécédents, la réputation, la situation personnelle (état de santé, âge, obligations familiales, situation professionnelle, risque de récidive, etc.), la vulnérabilité face à la peine, de même que le comportement après l'acte et au cours de la procédure pénale (ATF 134 IV 17 consid. 2.1 p. 19 ss ; ATF 129 IV 6 consid. 6.1 p. 20 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_198/2013 du 3 juin 2013 consid. 1.1.1).

 

Le législateur reprend, à l'art. 47 al. 1 CP, les critères des antécédents et de la situation personnelle. Il y ajoute la nécessité de prendre en considération l'effet de la peine sur l'avenir du condamné. A ce propos, le message du Conseil fédéral expose que lejuge n'est pas contraint d'infliger la peine correspondant à la culpabilité de l'auteur s'il y a lieu de prévoir qu'une peine plus clémente suffira à le détourner de commettre d'autres infractions (Message du Conseil fédéral du 21 septembre 1998 concernant la modification du code pénal suisse et du code pénal militaire ainsi qu'une loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs, FF 1999 p. 1866). La loi codifie la jurisprudence selon laquelle le juge doit éviter les sanctions qui pourraient détourner l'intéressé de l'évolution souhaitable (ATF 128 IV 73 consid. 4 p. 79 ; 127 IV 97 consid. 3 p. 101). Cet aspect de prévention spéciale ne permet toutefois que des corrections marginales, la peine devant toujours rester proportionnée à la faute (arrêts du Tribunal fédéral 6B_633/2007 du 30 novembre 2007 consid. 4.1 et 6B_673/2007 du 15 février 2008 consid. 3.1.).

 

Il est inévitable qu'une peine privative de liberté ait des répercussions sur le conjoint et les enfants du condamné. Cette conséquence ne peut cependant conduire à une réduction de la peine qu'en cas de circonstances extraordinaires (par exemple en cas d'enfant en bas âge à la charge du condamné ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_708/2008 du 22 octobre 2008 consid. 3.2 et 6B_646/2008 du 23 avril 2009 consid. 4.3.2 et les références citées).

 

6.2 D'après l'art. 49 al. 1 CP, si, en raison d'un ou de plusieurs actes, l'auteur remplit les conditions de plusieurs peines de même genre, le juge le condamne à la peine de l'infraction la plus grave et l'augmente dans une juste proportion. En revanche, lorsque la loi pénale ne prévoit pas le même genre de peine pour toutes les infractions, l'art. 49 al. 1 CP ne s'applique pas et les peines doivent être prononcées cumulativement (ATF 137 IV 57 consid. 4.3 p. 58 ss). Il y a plusieurs peines identiques lorsque le tribunal prononce dans le cas d'espèce, pour chaque norme violée, des peines du même genre (méthode concrète) ; le fait que les dispositions pénales applicables prévoient, de manière abstraite, des peines d'un même genre ne suffit pas (ATF 138 IV 120 consid. 5.2 p. 122 ss).

6.3 Dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, le juge doit respecter, en particulier, le principe d'égalité de traitement (art. 8 al. 1 Cst. féd. ; cf. au regard de l'art. 63 aCP, ATF 120 IV 136 consid. 3a p. 144 et les arrêts cités). Appelé à juger les co-auteurs d'une même infraction ou deux co-accusés ayant participé ensemble au même complexe de faits délictueux, il est tenu de veiller à ce que la différence des peines infligées aux deux intéressés soit justifiée par une différence dans les circonstances personnelles. La peine doit en effet être individualisée en fonction de celles-ci, conformément à l'art. 47 CP (ATF 121 IV 202 consid. 2b p. 244 ss ; arrêt du Tribunal fédéral 6S.199/2006 du 11 juillet 2006 consid. 4 in fine).

Si, pour des raisons formelles, seul un des coauteurs peut être jugé, le magistrat doit s'interroger sur la peine qu'il aurait prononcée s'il avait eu à juger les deux coauteurs en même temps. Dans un tel cas, il n'est pas lié par la décision rendue contre le coauteur. Toutefois, il devra s'y référer et motiver pourquoi la peine prononcée à l'encontre du coauteur ne saurait servir de moyen de comparaison. Si le juge estime que le coauteur a été condamné à une peine trop clémente, il n'y a cependant pas de droit à une "égalité de traitement dans l'illégalité" (ATF 135 IV 191 consid. 3.3 p. 194).

 

6.4.1 Le juge suspend en règle générale l'exécution d'une peine pécuniaire, d'un travail d'intérêt général ou d'une peine privative de liberté de six mois au moins et de deux ans au plus lorsqu'une peine ferme ne paraît pas nécessaire pour détourner l'auteur d'autres crimes ou délits.

 

Pour l'octroi du sursis, le juge doit poser un pronostic quant au comportement futur de l'auteur. La question de savoir si le sursis serait de nature à détourner l'accusé de commettre de nouvelles infractions doit être tranchée sur la base d'une appréciation d'ensemble, tenant compte des circonstances de l'infraction, des antécédents de l'auteur, de sa réputation et de sa situation personnelle au moment du jugement, notamment de l'état d'esprit qu'il manifeste. Le pronostic doit être posé sur la base de tous les éléments propres à éclairer l'ensemble du caractère de l'accusé et ses chances d'amendement. Il n'est pas admissible d'accorder un poids particulier à certains critères et d'en négliger d'autres qui sont pertinents.

 

Le nouveau droit pose des exigences moins élevées quant au pronostic pour l'octroi du sursis. Auparavant, il fallait que le pronostic soit favorable. Désormais, il suffit qu'il n'y ait pas de pronostic défavorable. Le sursis est désormais la règle dont on ne peut s'écarter qu'en présence d'un pronostic défavorable. Il prime en cas d'incertitude (ATF 134 IV 1 consid. 4.2.2 p. 5-6 ; SJ 2008 I p. 277 consid. 2.1. p. 280).

 

6.4.2 Lorsque la peine privative de liberté est d'une durée telle qu'elle permette le choix entre le sursis complet (art. 42 CP) et le sursis partiel (art. 43 CP), soit entre un et deux ans au plus, l'octroi du sursis au sens de l'art. 42 est la règle et le sursis partiel l'exception. Celle-ci ne peut être admise que si l'octroi du sursis à l'exécution d'au moins une partie de la peine nécessite, à des fins de prévention spéciale, que l'autre partie de la peine soit exécutée (arrêt du Tribunal fédéral 6B_664/2007 du 18 janvier 2008 consid. 3.2.3.1).

 

S'il existe des doutes très importants au sujet du comportement futur de l'auteur, notamment au vu de condamnations antérieures, le juge peut prononcer une peine assortie du sursis partiel au lieu d'un sursis total, et ceci même si les doutes mentionnés ne suffisent pas, après appréciation globale de tous les éléments pertinents, pour poser un pronostic défavorable. Le juge peut ainsi éviter le dilemme du "tout ou rien" en cas de pronostic fortement incertain (ATF 134 IV 1, consid. 5.5.2. p. 15 ; SJ 2008 I p. 277 consid. 2.2.3.2. p. 281 ; arrêt du Tribunal fédéral 6B_1044/2013 du 4 mars 2014 consid. 3.1).

 

6.5 En l'espèce, la faute de l'intimé B______ est importante. Agissant pour des motifs égoïstes, soit par pur appât du gain, il a participé à des escroqueries, consommée et tentée, commises par une équipe habituée à commettre de telles infractions, dont les agissements ont duré plusieurs mois jusqu'à ce que deux de ses membres se fassent arrêter. En se présentant au guichet muni d'une carte d'identité falsifiée, il s'est également rendu coupable de faux dans les titres, ce qui n'a pas été contesté en appel.

 

Il y a concours d'infractions, ce qui conduit à une aggravation de la peine (art. 49 al. 1 CP).

 

Sa collaboration à l'enquête a été mauvaise, dans la mesure où il n'a admis que la tentative d'escroquerie du flagrant délit alors que des éléments suffisants auraient pu suffire pour l'impliquer dans d'autres escroqueries ou tentatives. Il a, en outre, refusé de dénoncer ses comparses jusqu'à l'audience de jugement, lors de laquelle il s'est finalement résolu à impliquer A______. Il n'a collaboré que de manière parcellaire.

 

Il n'a manifesté aucun regret pour son comportement ni prise de conscience par rapport à la gravité de ses agissements.

L'intimé B______ n'a qu'un antécédent judiciaire, au demeurant non spécifique.

Ces éléments négatifs sont contrebalancés par son intégration dans la société civile après sa libération. Il travaille désormais en qualité de ______, ayant terminé sa formation dans ce domaine. Il partage la garde de sa fille, pour laquelle il paie une pension alimentaire de CHF 400.-, de sorte qu'on peut en conclure qu'il assume correctement ses obligations familiales.

Au vu de ce qui précède, la peine à laquelle il a été condamné paraît adéquate, quand bien même l'intimé B______ est désormais reconnu coupable d'escroquerie. Par ailleurs, au vu du pronostic favorable et de l'absence d'antécédents spécifiques, c'est à juste titre que la peine a été assortie du sursis total, cette mesure de confiance étant conforme à la jurisprudence. Aucun motif de prévention spéciale n'impose son retour en détention au regard des efforts entrepris à sa sortie de prison pour pouvoir légalement assumer ses diverses obligations.

Le Ministère public sera ainsi débouté de ses conclusions sur ce point.

6.6 A______ se prévaut de l'application de l'art. 3 CEDH pour ses conditions de détention à Champ-Dollon tandis que le Ministère public requiert à son encontre une peine alourdie.

6.6.1 Au niveau conventionnel, l'art. 3 CEDH prévoit que nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Sur le plan constitutionnel, l'art. 7 Cst. prescrit de son côté que la dignité humaine doit être respectée et protégée. A teneur de l'art. 10 al. 3 Cst., la torture et tout autre traitement ou peine cruels, inhumains ou dégradants sont interdits. La Constitution genevoise prévoit aussi que la torture et tout autre traitement ou peine cruels, inhumains ou dégradants sont interdits (art. 18 al. 2 Cst./GE) et que la dignité humaine est inviolable (art. 14 al. 1 Cst./GE).

Le prévenu qui estime avoir subi, dans le cadre de sa détention avant jugement, un traitement prohibé par l'art. 3 CEDH dispose d'un droit à ce que les agissements dénoncés fassent l'objet d'une enquête prompte et impartiale (art. 13 CEDH ; ATF 138 IV 86 consid. 3.1.1) pour en faire, cas échéant, constater l'existence. Si la compétence pour procéder à ce constat est généralement dévolue à l'autorité de contrôle de la détention (ATF 139 IV consid. 3.1), le principe de l'économie de la procédure, rappelé par le Tribunal fédéral dans diverses affaires où l'autorité de contrôle était saisie de conclusions constatatoires (arrêts du Tribunal fédéral 1B_56/2014 du 10 avril 2014 consid. 1.3, 1B_129/2013 du 26 juin 2013 consid. 2.2 et 2.3, 1B_351/2012 du 20 septembre 2012 consid. 2.3), conjugué au fait que de telles conclusions sont nécessairement subsidiaires à celles condamnatoires ou formatrices (arrêt du Tribunal fédéral 1B_129/2013 précité), permettent au juge du fond d'opérer un tel constat, pour autant que ce magistrat, qui sera appelé à statuer sur d'éventuelles conséquences d'une telle violation (arrêt du Tribunal fédéral 1B_369/2013 du 26 février 2014 consid. 2.1 et 1B_129/2013 précité), soit déjà saisi du litige ou en passe de l'être.

Le prévenu qui se prévaut pour la première fois devant la Cour de l'illicéité des conditions de sa détention doit se laisser opposer, si ces conditions portent sur une période antérieure au terme des débats de première instance, le fait que seule l'autorité d'appel statuera sur ses prétentions, en application du principe de la bonne foi (arrêt du Tribunal fédéral 6B_1122/2013 du 6 mai 2014 consid. 1.3) ancré à l'art. 3 al. 2 CPP.

6.6.2 Dans différents arrêts datés du 26 février 2014, le Tribunal fédéral a posé le principe de la limite au-delà de laquelle il fallait admettre que les conditions de détention de Champ-Dollon étaient indignes, et partant qu'elles ouvraient le droit à indemnisation.

elon le Tribunal fédéral, "l'occupation d'une cellule dite triple par six détenus avec une surface individuelle de 3,83 m2 - restreinte encore par le mobilier - peut constituer une violation de l'art. 3 CEDH si elle s'étend sur une longue période et si elle s'accompagne d'autres mauvaises conditions de détention (…). Il faut dès lors considérer la période pendant laquelle le recourant a été détenu dans les conditions incriminées. Une durée qui s'approche de trois mois consécutifs (délai que l'on retrouve en matière de contrôle périodique de la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté; cf. art. 227 al. 7 CPP) apparaît comme la limite au-delà de laquelle les conditions de détention susmentionnées ne peuvent plus être tolérées. (…) Ce délai ne peut cependant pas être compris comme un délai au sens strict du terme mais comme une durée indicative à prendre en compte dans le cadre de l'appréciation globale de toutes les conditions concrètes de détention" (arrêt 1B_369/2013 du 26 février 2014 consid. 3.6.3).

 

Pour le Tribunal appelé à se déterminer sur un cas précis, "l'effet cumulé de l'espace individuel inférieur à 3,83 m2, le nombre de 157 jours consécutifs passés dans ces conditions de détention difficiles et surtout le confinement en cellule 23h sur 24h ont rendu la détention subie pendant cette période comme étant incompatible avec le niveau inévitable de souffrance inhérent à toute mesure de privation de liberté. Un tel mode de détention a ainsi procuré au recourant, sur la durée, une détresse ou une épreuve qui dépasse le minimum de gravité requis, ce qui s'apparente alors à un traitement dégradant. Ces conditions de détention ne satisfont ainsi pas aux exigences de respect de la dignité humaine et de la vie privée" (ibidem).

 

Dans un autre arrêt du même jour, le Tribunal fédéral a abouti à une conclusion identique pour un détenu qui avait passé 89 jours consécutifs dans des conditions de détention dans une cellule dont la surface à disposition était également de 3,83 m2 (arrêt 1B_335/2013 du 26 février 2014 consid. 3.6.3).

 

6.6.3 La juridiction d'appel a sollicité, à la requête de l'appelant, un rapport exhaustif sur ses conditions de détention à la prison de Champ-Dollon. Ce rapport révèle que seule la période comprise entre le ______ 2013 est problématique au regard des 78 nuits passées par A______ dans un espace inférieur à 4 m2. Pour les autres périodes, la situation, certes difficile, n'a jamais atteint un stade constitutif d'une violation de l'art. 3 CEDH, ainsi que l'a admis le Tribunal fédéral : "en cas de surpopulation carcérale telle que la connaît la prison de Champ-Dollon, l'occupation d'une cellule dite individuelle par trois détenus - chacun disposant d'un espace individuel de 4 m2, restreint du mobilier - est une condition de détention difficile; elle n'est cependant pas constitutive d'une violation de l'art. 3 CEDH et ne représente pas un traitement dégradant portant atteinte à la dignité humaine des prévenus" (ibidem).

 

Selon les fiches journalières transmises par la direction de Champ-Dollon, A______ a passé en tout une cinquantaine de nuits consécutives dans la cellule 317 occupée par 6 détenus, soit 18 jours consécutifs du ______ et 4 jours consécutifs du ______. Tous les autres séjours à six détenus (11 nuits du ______, 4 nuits du ______, le ______et 10 nuits du ______ 2011) ont été entrecoupés par des périodes plus ou moins longues où l'occupation de la cellule a été inférieure à six, ce même en ne tenant pas compte des explications fournies par la direction de Champ-Dollon au sujet de l'occupation de la cellule durant les 7 jours litigieux.

 

La situation est ainsi assez loin de celle ouvrant la voie à une indemnisation selon les critères dégagés par le Tribunal fédéral, les jours consécutifs passés dans une cellule dont la surface disponible ne dépassait pas 3,83 m2 étant bien inférieurs à ceux validés par le Tribunal fédéral, les conditions de détention s'agissant du droit aux services de la prison étant par ailleurs globalement similaires aux cas tranchés par le Tribunal fédéral.

 

Au vu de ce qui précède, A______ n'est pas habilité à requérir une indemnisation pour ses conditions de détention difficiles. Il sera en conséquence débouté de ses conclusions en la matière.

 

6.7 Pour éviter d'inutiles redites liées aux critères de fixation de la peine, il sera renvoyé aux développements relatifs à l'intimé B______ (cf. supra ch. 6.1, 6.2 et 6.3) auxquels il convient d'ajouter la jurisprudence relative aux antécédents judiciaires découlant des casiers judiciaires suisse et ______ de A______.

 

Bien que la récidive ne constitue plus un motif d'aggravation obligatoire de la peine (art. 67 aCP), les antécédents continuent de jouer un rôle très important dans la fixation de celle-ci (M. NIGGLI / H. WIPRÄCHTIGER, Basler Kommentar Strafrecht I : Art. 1-110 StGB, Jugendstrafgesetz, 2e éd., Bâle 2007, n. 100 ad art. 47 CP). En général, la culpabilité de l'auteur est amplifiée du fait qu'il n'a pas tenu compte de l'avertissement constitué par la précédente condamnation, et sa rechute témoigne d'une énergie criminelle accrue (R. ROTH / L. MOREILLON (éds), Code pénal I : art. 1-100 CP, Bâle 2009, n. 55 ad art. 47 CP). Il en va de même des antécédents étrangers (ATF 105 IV 225 consid. 2 p. 226). Une série d'infractions semblables pèse plus lourd que des actes de nature différente. En outre, les condamnations passées perdent de leur importance avec l'écoulement du temps. Les antécédents judiciaires ne sauraient toutefois conduire à une augmentation massive de la peine, parce que cela reviendrait à condamner une deuxième fois pour des actes déjà jugés (ATF 120 IV 136 consid. 3b p. 145).

 

6.8 La faute de A______ est particulièrement lourde. Il a agi par appât du gain, dans une situation qui n'avait rien de désespéré. Ses antécédents ne semblent pas avoir exercé sur sa personne une action dissuasive, même s'il convient de retenir à sa décharge des préjudices limités pour les victimes directes, les établissements bancaires ayant accepté de prendre en charge le découvert résultant des actes frauduleux. Il a été l'auteur d'actes illicites requérant une mise en scène et une préparation sophistiquées sur une période d'une dizaine de mois, avec des pics de forte intensité délictueuse en ______ 2011 puis en ______ de la même année. Il a diversifié ses cibles, en faisant preuve d'une créativité peu commune. La diversité de ses actes illicites est à mettre à son passif, en plus du fait qu'elle entraîne l'application de l'art. 49 CP. Elle démontre la forte détermination de l'appelant à agir quand les occasions se présentent, l'appelant n'ayant pas hésité à changer de partenaire au fil de son activité illicite. Il s'est servi de ses comparses pour mieux pouvoir rester en arrière-plan et éviter de prendre trop de risques en ne se présentant pas personnellement aux guichets des banques ou auprès des dupes, ce qui lui a permis de ne pas se faire reconnaître et de reculer le moment de son arrestation. Son comportement particulièrement déplaisant témoigne d'un enracinement dans la délinquance assez inquiétant.

La capacité d'introspection reste limitée, tant il est apparu au cours de l'instruction sur la défensive, ne se reconnaissant pas dans la participation aux actes illicites reprochés. Ses antécédents sont mauvais et leur poids est d'autant plus important que toutes les condamnations subies, tant en Suisse que dans son pays de résidence, portent principalement sur des délits spécifiques, et ce depuis de très nombreuses années.

Il y a lieu de tenir compte du rôle hiérarchiquement supérieur de l'appelant dans les escroqueries et tentatives commises, les risques pris à titre personnel étant moindres. Dans ce sens, une peine de 4 ans et demi de privation de liberté doit être tenue pour adaptée à la gravité des actes et à l'ensemble des circonstances. La comparaison avec la peine infligée à l'intimé B______ n'autorise pas une autre conclusion, tant la culpabilité des deux condamnés diffère (pour l'intimé, période pénale plus restreinte, moins d'occurrences, rôle d'exécutant, collaboration supérieure). La comparaison avec la condamnée P______ n'est guère pertinente, s'agissant d'une prévenue qui a bénéficié d'une procédure simplifiée qui répond à des critères bien spécifiques qui lui sont propres.

7. Il n'est point besoin de statuer à nouveau sur le maintien en détention de A______, lequel a sollicité et obtenu une exécution anticipée de sa peine le 20 juin 2014.

8. A______, qui succombe, ainsi que l'intimé B______, qui n'obtient satisfaction que de manière marginale, supporteront, à raison de la moitié pour le premier et d'un sixième pour le second, les frais de la procédure envers l'État (art. 428 CPP), lesquels comprennent une indemnité de procédure de CHF 3'000.- (art. 14 al. 1 let. c du règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, E 4 10.03), le solde des frais étant laissé à la charge de l'Etat.

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

Reçoit les appels formés par A______ et le Ministère public contre le jugement JTCO/154/2013 rendu le 14 octobre 2013 par le Tribunal correctionnel dans la procédure P/7886/2012.

Rejette l'appel de A______.

Admet partiellement l'appel du Ministère public.

Annule le jugement du 14 octobre 2013 en tant qu'il reconnaît B______ coupable de complicité d'escroquerie (art. 25 et 146 al. 1 CP) en lien avec l'infraction figurant sous let. C.b, ch. 3.

Annule le jugement du 14 octobre 2013 en tant qu'il acquitte A______ des infractions visées sous lettre C.a, ch. 1, 2 et 4 et le condamne à une peine privative de liberté de 3 ans et demi, sous déduction de 264 jours de détention avant jugement, comprenant 40 jours de détention à titre extraditionnel.

Cela fait et statuant à nouveau :

Reconnaît B______ coupable de tentative d'escroquerie [recte : escroquerie] (let. C.b, ch. 3).

Confirme pour le surplus le jugement dont est appel.

Reconnaît A______ coupable d'escroqueries par métier (let. C.a, ch. 1, 2 et 4).

Condamne A______ à quatre ans et demi de peine privative de liberté, sous déduction de 617 jours de détention avant jugement.

Rejette les prétentions en indemnisation de A______.

Confirme pour le surplus le jugement dont est appel.

Condamne A______ à la moitié et B______ au 1/6ème des frais de la procédure d'appel, qui comprennent un émolument de CHF 3'000.-, le solde étant laissé à la charge de l'Etat.

Siégeant :

M. Jacques DELIEUTRAZ, président; Mme Yvette NICOLET et Mme Pauline ERARD, juges; Mme Nicole WENGER VILLETON-PACHOT, greffière-juriste.

 

La greffière :

Virginie VANDEPUTTE

 

Le président :

Jacques DELIEUTRAZ

 


Indication des voies de recours
 :

Conformément aux art. 78 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière pénale.

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.


 

P/7886/2012

ÉTAT DE FRAIS

AARP/487/2014

 

 

COUR DE JUSTICE

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais et dépens en matière pénale (E 4 10.03).

 

Total des frais de procédure du Tribunal de police :

CHF

5'693.35

Bordereau de frais de la Chambre pénale d'appel et de révision

 

 

Délivrance de copies et photocopies (let. a, b et c)

CHF

0.00

Mandats de comparution, avis d'audience et divers (let. i)

CHF

1'460.00

Procès-verbal (let. f)

CHF

170.00

État de frais

CHF

75.00

Émolument de décision

CHF

3'000.00

Total des frais de la procédure d'appel :

CHF

4'705.00

Total général (première instance + appel) :

CHF

10'398.35