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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/1777/2024

JTAPI/532/2024 du 31.05.2024 ( MC ) , CONFIRME

REJETE par ATA/781/2024

Descripteurs : MESURE DE CONTRAINTE(DROIT DES ÉTRANGERS);DÉTENTION AUX FINS D'EXPULSION
Normes : LEI.76.al1.letb.ch1; LEI.75.al1.letb; LEI.75.al1.letc; LEI.75.al1.leth; LEI.76.al1.letb.ch3; LEI.76.al1.letb.ch4; LEI.80.al6.leta; LEI.83.al1; LEI.83.al2; LEI.83.al3; LEI.83.al4; LEI.69.al2
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1777/2024 MC

JTAPI/532/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 31 mai 2024

 

dans la cause

 

Monsieur A______, représenté par Me Arnaud MOUTINOT, avocat

 

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

 

 

 

 

 

 

 

 

EN FAIT

1.             Monsieur A______, né le ______ 1993 et originaire d'Algérie (aussi connu sous d'autres identités, dont celle de A______, né le ______ 2003 et originaire du Maroc), est arrivé en Suisse en 2019.

2.             Il a fait l'objet d'une interdiction d'entrée en Suisse, notifiée le 13 novembre 2019 et valable jusqu'au 9 octobre 2022.

3.             Le 18 avril 2021, il a déposé une demande d'asile, sur laquelle le secrétariat d'État aux migrations (ci-après: SEM) n'est pas entré en matière et, simultanément, a prononcé son renvoi de Suisse, le 17 mai 2021. Cette décision est entrée en force le 25 mai 2021. Dans le cadre de cette procédure, l'intéressé avait été attribué au canton de Fribourg.

4.             Le 24 avril 2023, les autorités suisses ont consenti au transfert de M. A______, des Pays-Bas sur le territoire helvétique, dans le cadre des Accords Dublin. En raison de la disparition de l'intéressé, ce transfert n'a toutefois pas pu être effectué. L'intéressé est toutefois revenu en Suisse par ses propres moyens.

5.             En date du 23 février 2021, l'intéressé – qui avait prétendu être mineur - s'est vu notifier par l'office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) une décision de renvoi de Suisse.

6.             Entre le 16 mars 2021 et le 24 juillet 2023, M. A______ a été condamné neuf fois, notamment pour entrée illégale, séjour illégal, non-respect d'une assignation à un lieu de résidence ou d'une interdiction de pénétrer dans une région déterminée (pour avoir violé les mesures prises à son encontre par le commissaire de police les 3 novembre 2020 et 12 janvier 2022), délit contre la loi sur les armes, obtention illicite de prestations d'une assurance sociale ou de l'aide sociale, contravention et délit contre la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes du 3 octobre 1951 (LStup - RS 812.121), vol (art. 139 ch. 1 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0), recel (art. 160 ch. 1 al. 1 CP), utilisation frauduleuse d'un ordinateur et rupture de ban.

M. A______ est sous le coup d'une mesure d'expulsion judiciaire d'une durée de 5 ans ordonnée par le Tribunal de police du canton de Genève le 10 septembre 2021, mesure que l'autorité administrative compétente a décidé de ne pas reporter par décision notifiée le 23 mai 2022 et que l'intéressé n'a pas respectée.

7.             Il ressort du dossier que M. A______ n'a aucun lieu de résidence fixe en Suisse, ni aucun lien particulier démontré avec ce pays, ni non plus aucune source légale de revenu.

8.             Incarcéré le 30 juin 2022 et libéré le 23 mars 2023, M. A______ a été à nouveau détenu à partir du 22 septembre 2023.

9.             Par ordonnance du 4 mars 2024, le juge d'application des peines du canton de Vaud a refusé d'accorder la libération conditionnelle à M. A______. À cet égard, l'autorité précitée a, notamment, retenu ce qui suit: " […] il sied de constater que [le] casier judiciaire [de M. A______] fait état de neuf condamnations qui lui ont été infligées dans un laps de temps très court – soit entre le 16 mars 2021 et le 24 juillet 2023 – et qu'il a récidivé seulement quelques semaines après être sorti de prison en mars 2023, ce qui démontre le peu d'effet qu'a eu le droit des sanctions sur lui jusqu'à présent. Pour le surplus, son amendement confine au néant, comme en témoignent ses déclarations lors de son audition du 27 février dernier, et ses projets d'avenir ne sont absolument pas en adéquation avec sa situation administrative, dès lors qu'il a exposé qu'il irait vivre en Hollande, quand bien même il ne dispose pas d'autorisation de séjour dans ce pays. Enfin, le condamné se refuse à collaborer avec l'Office cantonal de la population et des migrations du canton de Genève en vue de son identification […] par les autorités algériennes […]".

10.         La demande de soutien à l'exécution du renvoi initiée auprès du SEM en février 2021 a abouti à l'identification de l'intéressé par les autorités algériennes en mars 2024.

11.         Durant la détention pénale de M. A______, les autorités genevoises ont sollicité du SEM l'inscription de l'intéressé à un entretien consulaire (counselling), préalable indispensable à la délivrance d'un laissez-passer. Convoqué au counselling du 15 mai 2024, M. A______ a refusé de sortir de sa cellule, de sorte que son acheminement à Berne en vue de l'entretien consulaire en question n'a pu avoir lieu. Restant devoir être présenté aux autorités de son pays d'origine, l'intéressé est désormais convoqué à l'entretien consulaire qui aura lieu le 5 juin 2024.

12.         Libéré au terme de l'exécution de ses peines, M. A______ a été acheminé de l'établissement pénitentiaire de Crêtelongue (sis à Granges) à Genève par la Brigade Migration et Retour, l'intéressé ayant refusé d'embarquer à bord du transport Jail Train Street (JTS) qui avait été réservé en sa faveur.

13.         Le 27 mai 2024, à 17h00, le commissaire de police a émis un ordre de mise en détention administrative à l'encontre de M. A______ pour une durée de quatre mois.

Au commissaire de police, M. A______ a déclaré qu'il s'opposait à son renvoi en Algérie.

Selon le procès-verbal du commissaire de police, il était « retenu pour des motifs de droit des étrangers depuis ce jour à 15h45 ».

14.         Le commissaire de police a soumis cet ordre de mise en détention au Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal) le même jour.

15.         Entendu le 30 mai 2024 par le tribunal, M. A______ a déclaré qu'il ne s'était jamais opposé à un renvoi en Algérie. Cela étant, dès lors qu'il avait fait l’objet de menaces pour sa vie dans ce pays, son renvoi là-bas était impossible.

Le conseil de l'intéressé a sollicité du tribunal qu'il visionne la vidéo figurant en pièce 7 de son chargé, laquelle était particulièrement éloquente et, avait une incidence certaine sur la question de l’exécutabilité du renvoi de M. A______.

Visionnée lors de l'audience, on y voyait deux hommes entièrement masqués munis de machettes, proférant des paroles en dialecte algérien et quelques insultes en français.

L’interprète a résumé les paroles proférées : « A_______, on sait très bien que tu es en prison en Suisse. Si tu rentres en Algérie, on va te tuer et te couper la tête ».

M. A______ a expliqué qu'il s’agissait de membres du clan élargi de son père biologique, lequel le considérait comme illégitime. Cette vidéo, et il y en avait d’autres, avait été diffusée largement sur les réseaux sociaux en Algérie. C’était sa famille d’accueil qui la lui avait transmise. Cette vidéo était une forme d’avis de recherche. Par le passé, il avait été victime d’agressions : un coup de couteau dans le dos et une balle dans la jambe.

M. A______ a confirmé avoir initié des démarches en Hollande en vue d'obtenir une autorisation de séjour provisoire d’une durée d’une année dans le but de se marier. Ces démarches n'avaient pas pu avancer en raison de sa détention. Il devait en effet se trouver sur place, pour la suite de ces démarches. Sa fiancée était de nationalité hollandaise et algérienne. Il avait entrepris cette démarche avec sa fiancée auprès de la mairie de la ville de B______ (Pays-Bas).

Concernant son futur, il souhaitait quitter la Suisse et s’établir en Hollande auprès de sa compagne et de son enfant et obtenir une autorisation de séjour dans ce pays.

Comme le stipulait le formulaire qu'il avait versé à la procédure, il devait se présenter en personne à la mairie en Hollande, notamment pour faire une photographie biométrique ce qu’il ne lui avait pas été possible de faire vu qu'il était en prison.

Le 23 juin 2023, il avait été interpellé par les autorités allemandes et incarcéré pendant une quarantaine de jours avant d’être transféré en Suisse, à Soleure.

La représentante du commissaire de police a relevé que l’extrait du casier judiciaire de M. A______ qui figurait au dossier indiquait que celui-ci se trouvait en Suisse, à tout le moins les 26 mai, 27 juin et 23 juillet 2023, soit aux dates des infractions reprochées.

Les autorités genevoises avaient transmis le 28 mai 2024, une demande de réadmission concernant l’intéressé au SEM, destinée aux autorités néerlandaises et étaient dans l’attente d’une réponse de ces dernières.

Compte tenu de l’incertitude de la réponse des autorités néerlandaises, les démarches en vue de la délivrance d’un laissez-passer par l’Algérie se poursuivaient.

Elle a ajouté à ce sujet que des counsellings avec les autorités algériennes avaient lieu environ une fois par mois et qu’à chacun de ces entretiens deux ou trois candidats, pour le canton de Genève, étaient entendus. Concernant M. A______, une date d’entretien était d’ores et déjà fixée au 5 juin 2024.

Elle a précisé, à l’attention du conseil de M. A______, que depuis l'identification de ce dernier par les autorités de son pays, il n’y avait pas d’autres démarches à effectuer que sa présentation pour un counselling étant relevé qu’en l’occurrence, au vu du nombre de candidats concernés, les autorités avaient déjà fait preuve d’une grande célérité. Elle a rappelé que le 15 mai 2024, M. A______ avait refusé de se rendre à ce counselling.

Elle a souligné que cet entretien était obligatoire en vue de la délivrance d’un laissez-passer par les autorités algériennes pour les ressortissants qui n'étaient pas volontaires à leur renvoi. Le refus de M. A______ de se rendre à cet entretien aurait eu pour effet de retarder son refoulement.

Pour le surplus, elle a conclu à la confirmation de l’ordre de mise en détention administrative du 27 mai 2024 pour une durée de quatre mois.

Le conseil de l'intéressé a conclu principalement, à l’annulation de l’ordre de mise en détention administrative et à la mise en liberté immédiate de son client ; subsidiairement, à la réduction de la durée de la détention à six semaines.

EN DROIT

1.            Le Tribunal administratif de première instance est compétent pour examiner d'office la légalité et l’adéquation de la détention administrative en vue de renvoi ou d’expulsion (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 7 al. 4 let. d de loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

Il doit y procéder dans les nonante-six heures qui suivent l'ordre de mise en détention (art. 80 al. 2 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration du 16 décembre 2005 - LEI - RS 142.20 ; anciennement dénommée loi fédérale sur les étrangers - LEtr ; 9 al. 3 LaLEtr).

2.            En l'espèce, le tribunal a été valablement saisi et respecte le délai précité en statuant ce jour, la détention administrative ayant débuté le 27 mai 2024 à 15h45.

3.            Le tribunal peut confirmer, réformer ou annuler la décision du commissaire de police ; le cas échéant, il ordonne la mise en liberté de l’étranger (art. 9 al. 3 LaLEtr).

4.            Si l'étranger a la possibilité de se rendre légalement dans plusieurs États, l'autorité compétente peut le renvoyer ou l'expulser dans le pays de son choix (art. 69 al. 2 LEI). La possibilité de choisir le pays de destination présuppose toutefois que l'étranger ait la possibilité de se rendre de manière effective et admissible dans chacun des pays concernés par son choix. Cela implique qu'il se trouve en possession des titres de voyage nécessaires et que le transport soit garanti (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_285/2013 du 23 avril 2013 consid. 7 ; 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 6 ; ATA/324/2013 du 24 mai 2013 ; ATA/157/2013 du 7 mars 2013 ; ATA/58/2013 du 31 janvier 2013). Le renvoi ou l'expulsion dans un pays tiers du choix de l'étranger constitue par ailleurs seulement une faculté («peut») de l'autorité compétente (arrêt du Tribunal fédéral 2C_285/2013 du 23 avril 2013 consid. 7 ; cf. également arrêts 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 6 ; 2C_393/2009 du 6 juillet 2009 consid. 3.4). Le renvoi ou l'expulsion dans le pays souhaité par la personne concernée doit être non seulement légalement possible, mais encore concrètement réalisable en temps utile. S'il est déjà possible de renvoyer ou d'expulser l'intéressé vers un État déterminé, il n'y a pas lieu d'attendre de l'autorité qu'elle procède à des démarches supplémentaires relatives à une autre destination (cf. Danièle REVEY in Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE [éd.], Code annoté de droit des migrations - vol. II : LEtr, 2017, n. 11 p. 698).

5.            En l'espèce, il convient d'observer que M. A______ ne démontre, à ce stade, pas être légitimé, d'une façon ou d'une autre, en particulier par la possession d'un titre de séjour, à se rendre valablement ailleurs que dans son pays d'origine, en particulier en Hollande. Il est pris note qu'une demande de réadmission a néanmoins été formulée à l'intention des autorités néerlandaises, dont la réponse est encore attendue. Cela étant la poursuite de la préparation de l'exécution de son refoulement de Suisse à destination de l'Algérie, seul pays dans lequel il est en l'état légalement autorisé à se rendre, ne prête pas le flanc à la critique.

Au demeurant, le tribunal, qui, dans le cadre de la présente procédure, doit seulement se prononcer sur la légalité et l'adéquation de la détention en cause, n'est pas compétent pour décider et/ou apprécier les modalités de mise en œuvre de l'exécution de l'expulsion, confiée à la police, de sorte qu'il ne lui appartient pas de discuter le choix opéré quant au pays de destination.

6.            La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l’art. 5 par. 1 let. f de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; 135 II 105 consid. 2.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_237/2013 du 27 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_413/2012 du 22 mai 2012 consid. 3.1) et de l’art. 31 de la Constitution fédérale suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu’elle repose sur une base légale (arrêts du Tribunal fédéral 2C_584/2012 du 29 juin 2012 consid. 5.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1). Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne peut être prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (ATF 140 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_256/2013 du 10 avril 2013 consid. 4.1 ; 2C_237/2013 du 27 mars 2013 consid. 5.1 ; 2C_478/2012 du 14 juin 2012 consid. 2.1).

7.            L'art. 76 al. 1 let. b ch. 1, LEI, renvoyant à l'art 75 al. 1 let. b, c et h de cette même loi, dispose qu'une mesure de détention administrative peut être ordonnée si une décision de première instance de renvoi ou d'expulsion a été notifiée à l'intéressé et que celui-ci quitte la région qui lui est assignée ou pénètre dans une zone qui lui est interdite en vertu de l'art. 74 LEI (let. b), ou qu'il franchit la frontière malgré une interdiction d'entrée en Suisse et ne peut pas être renvoyé immédiatement (let. c), ou qu'il a été condamné pour crime (let. h), par quoi il faut entendre une infraction passible d'une peine privative de liberté de plus de trois ans (cf. art. 10 al. 2 CP ; ATA/220/2018 du 8 mars 2018 consid. 4a ; ATA/997/2016 du 23 novembre 2016 consid. 4a ; ATA/295/2011 du 12 mai 2011 consid. 4).

8.            Une mise en détention est aussi possible si des éléments concrets font craindre que la personne concernée entende se soustraire au renvoi ou à l'expulsion, en particulier parce qu'elle ne se soumet pas à son obligation de collaborer (art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEI) ou si son comportement permet de conclure qu'elle se refuse à obtempérer aux instructions des autorités (art. 76 al. 1 let. b ch. 4 LEI).

9.            Ces deux dispositions décrivent toutes deux des comportements permettant de conclure à l'existence d'un risque de fuite ou de disparition, de sorte que les deux éléments doivent être envisagés ensemble (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_128/2009 du 30 mars 2009 consid. 3.1 ; ATA/740/2015 du 16 juillet 2015 ; ATA/943/2014 du 28 novembre 2014 ; ATA/616/2014 du 7 août 2014).

Selon la jurisprudence, un risque de fuite - c'est-à-dire la réalisation de l'un des deux motifs précités - existe notamment lorsque l'étranger a déjà disparu une première fois dans la clandestinité, qu'il tente d'entraver les démarches en vue de l'exécution du renvoi en donnant des indications manifestement inexactes ou contradictoires ou encore s'il laisse clairement apparaître, par ses déclarations ou son comportement, qu'il n'est pas disposé à retourner dans son pays d'origine. Comme le prévoit expressément l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 LEtr, il faut qu'il existe des éléments concrets en ce sens (ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.2 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.2 ; 2C_658/2014 du 7 août 2014 consid. 1.2).

Lorsqu'il existe un risque de fuite, le juge de la détention administrative doit établir un pronostic en déterminant s'il existe des garanties que l'étranger prêtera son concours à l'exécution du refoulement, soit qu'il se conformera aux instructions de l'autorité et regagnera son pays d'origine le moment venu, c'est-à-dire lorsque les conditions seront réunies ; dans ce cadre, il dispose d'une certaine marge d'appréciation (arrêts du Tribunal fédéral 2C_935/2011 du 7 décembre 2011 consid. 3.3 ; 2C_806/2010 du 21 octobre 2010 consid. 2.1 ; 2C_400/2009 du 16 juillet 2009 consid. 3.1 ; ATA/740/2015 du 16 juillet 2015 ; ATA/739/2015 du 16 juillet 2015 ; ATA/682/2015 du 25 juin 2015 ; ATA/261/2013 du 25 avril 2013 ; ATA/40/2011 du 25 janvier 2011).

10.        Selon l'art. 79 al. 1 LEI, la détention ne peut excéder six mois au total. Cette durée maximale peut néanmoins, avec l’accord de l’autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus, lorsque la personne concernée ne coopère pas avec l’autorité compétente (art. 79 al. 2 let. a LEI) ou lorsque l’obtention des documents nécessaires au départ auprès d’un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (art. 79 al. 2 let. b LEI).

11.        Comme toute mesure étatique, la détention administrative en matière de droit des étrangers doit respecter le principe de la proportionnalité (cf. art. 5 al. 2 et 36 Cst. et art. 80 et 96 LEI ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées). Elle doit non seulement apparaître proportionnée dans sa durée, envisagée dans son ensemble (ATF 145 II 313 consid. 3.5 ; 140 II 409 consid. 2.1 ; 135 II 105 consid. 2.2.1), mais il convient également d'examiner, en fonction de l'ensemble des circonstances concrètes, si elle constitue une mesure appropriée et nécessaire en vue d'assurer l'exécution d'un renvoi ou d'une expulsion (cf. art. 5 par. 1 let. f CEDH ; ATF 143 I 147 consid. 3.1 ; 142 I 135 consid. 4.1 ; 134 I 92 consid. 2.3 ; 133 II 1 consid. 5.1 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_672/2019 du 22 août 2019 consid. 5.4 ; 2C_263/2019 du 27 juin 2019 consid. 4.1 ; 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3) et ne viole pas la règle de la proportionnalité au sens étroit, qui requiert l'existence d'un rapport adéquat et raisonnable entre la mesure choisie et le but poursuivi, à savoir l'exécution du renvoi ou de l'expulsion de la personne concernée (cf. arrêts du Tribunal fédéral 2C_765/2015 du 18 septembre 2015 consid. 5.3 ; 2C_334/2015 du 19 mai 2015 consid. 2.2 ; 2C_218/2013 du 26 mars 2013 consid. 5.1 et les références citées ; cf. aussi ATF 130 II 425 consid. 5.2).

12.        Les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder (art. 76 al. 4 LEI ; « principe de célérité ou de diligence »). Il s'agit d'une condition à laquelle la détention est subordonnée (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2A.581/2006 du 18 octobre 2006 ; ATA/611/2021 du 8 juin 2021 consid. 5a ; ATA/1367/2020 du 24 décembre 2020 consid. 7 et les références citées).

13.        La détention administrative doit en particulier être levée lorsque son motif n'existe plus ou si, selon l'art. 80 al. 6 let. a LEI, l'exécution du renvoi s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles ou qu'elle ne peut être raisonnablement exigée, cette dernière disposition légale renvoyant à l'art. 83 al. 1 à 4 LEI.

14.        Selon ces dispositions, l'exécution n'est pas possible lorsque l'étranger ne peut pas quitter la Suisse pour son État d'origine, son État de provenance ou un État tiers, ni être renvoyé dans l'un de ces États (al. 2), n'est pas licite lorsque le renvoi de l'étranger dans son État d'origine, dans son État de provenance ou dans un État tiers est contraire aux engagements de la Suisse relevant du droit international (al. 3) et ne peut ne pas être raisonnablement exigée si le renvoi ou l'expulsion de l'étranger dans son pays d'origine ou de provenance le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile, de violence généralisée ou de nécessité médicale (al. 4).

15.        L'impossibilité peut être juridique (refus de l'État d'origine de reprendre la personne ; ATF 125 II 217 consid. 2 = RDAF 2000 I 811) ou matérielle (état de santé grave et durable ne permettant pas de transporter la personne). La jurisprudence fédérale exige qu'un pronostic soit établi dans chaque cas. Si l'exécution dans un délai prévisible paraît impossible ou très improbable, la détention doit être levée (ATF 127 II 168 consid. 2c = RDAF 2002 I 390 ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.312/2003 du 17 juillet 2003 ; ATA/92/2017du 3 février 2017 consid. 5b).

16.        L'impossibilité suppose en tout état de cause notamment que l'étranger ne puisse pas, sur une base volontaire, quitter la Suisse et rejoindre son État d'origine, de provenance ou un État tiers (ATA/43/2020 du 17 janvier 2020 consid. 8b ; ATA/1143/2019 du 19 juillet 2019 consid. 10 ; ATA/776/2019 du 16 avril 2019 consid. 7 et les références citées), étant rappelé que tant que l'impossibilité du renvoi dépend de la volonté de l'étranger de collaborer avec les autorités, celui-ci ne peut s'en prévaloir (cf. arrêt du Tribunal fédéral 2C_639/2011 du 16 septembre 2011 ; ATA/221/2018 du 9 mars 2018 ; ATA/381/2012 du 13 juin 2012 ; ATA/283/2012 du 8 mai 2012 ; ATA/257/2012 du 2 mai 2012).

17.        En l'espèce, M. A______ fait l'objet d'une décision de renvoi prononcée par l'OCPM le 23 février 2021 et d'une mesure d'expulsion judiciaire ordonnée par le Tribunal de police genevois, le 10 septembre 2021 pour une durée de cinq ans, lesquelles n'apparaissent nullement arbitraires. Il a également été condamné entre 2021 et 2023 à neuf reprises pour des infractions à la LEI, à la LStup et au CP, notamment pour rupture de ban, pour vol et recel, ces deux dernières infractions constituant un crime au sens de l’art. 10 al. 2 CP. Sa détention se justifie donc déjà en application de l'art. 76 al. 1 let. b ch. 1 LEI, en lien avec l'art. 75 al. 1 let. b, c et h LEI.

Il n'a par ailleurs manifesté aucune intention crédible de se conformer à la décision de renvoi et à l'expulsion prononcées à son encontre. Il a fourni de fausses indications sur son identité aux autorités suisses les contraignant à de longues démarches en vue de l'identifier. Il a refusé de sortir de sa cellule pour être conduit à Berne en vue du counselling prévu le 15 mai dernier. Il a confirmé ce jour encore s’opposer à son renvoi en Algérie de même qu'à sa présentation auprès du Consul de son pays. Son comportement laisse ainsi clairement apparaitre qu’il n’est pas disposé à retourner dans son pays d’origine et qu’il refuse d’obtempérer aux instructions des autorités. Il existe ainsi des éléments concrets faisant craindre qu’il se soustraie à son renvoi et disparaisse dans la clandestinité s’il était laissé en liberté, situation visée par le motif de détention prévu par l'art. 76 al. 1 let. b ch. 3 et 4 LEI (cf. ATF 140 II 1 consid. 5.3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_381/2016 du 23 mai 2016 consid. 4.1 ; 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 5.2 ; 2C_951/2015 du 17 novembre 2015 consid. 2.2 ; 2C_658/2014 du 7 août 2014 consid. 1.2).

Le principe de la légalité est donc respecté.

L'assurance de l'exécution de son refoulement répond à un intérêt public certain et s'inscrit dans le cadre des obligations internationales de la Suisse (cf. not. art. 3 ch. 3 de la directive 2008/115/CE du parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, reprise par la Suisse dans le cadre du développement de l'acquis de Schengen - Directive sur le retour - RO 2010 5925) et toute autre mesure moins incisive que la détention administrative serait vaine pour assurer sa présence au moment où il devra être refoulé, étant rappelé que les autorités doivent s'assurer du fait qu'il quittera effectivement le territoire à destination de son pays (cf. not. art. 8 par. 6 de la Directive sur le retour et 15f de l'ordonnance sur l'exécution du renvoi et de l'expulsion d'étrangers du 11 août 1999 - OERE - RS 142.281). À cet égard, il doit également être relevé que faute d’avoir démontré disposer des documents nécessaires lui permettant de séjourner en Hollande, l’intéressé ne saurait être expulsé dans ce pays sans l'accord de celui-ci et encore moins être autorisé à s’y rendre par ses propres moyens.

Rien au dossier ne permet pour le surplus de retenir que les autorités ne continuent pas d’agir avec diligence et célérité, la représentante du commissaire de police ayant à cet égard confirmé, en audience, qu’un nouvel entretien consulaire, en vue de la délivrance d'un laissez-passer est prévu le 5 juin 2024, préalable à toutes autres démarches en vue de l'exécution de son renvoi et que parallèlement une demande de réadmission a été formulée auprès des autorités hollandaises.

S’agissant enfin de la durée de sa détention, elle respecte le cadre légal fixé par l'art. 79 LEI. La durée de quatre mois requise apparait en outre proportionnée et adéquate au vu des explications fournies ce jour en audience par la représentante du commissaire de police quant aux démarches qu'il reste à entreprendre, étant relevé par ailleurs que l'opposition de l'intéressé à son renvoi laisse présager des démarches plus longues et compliquées en vue d'exécuter ce dernier. Il sera enfin rappelé à M. A______, qu'il reste libre de contacter lui-même le Consul d'Algérie en vue d’un départ volontaire, lequel pourrait alors être finalisé dans un délai très bref.

Par ailleurs, rien n'indique que l'exécution du renvoi de M. A______ vers son pays d'origine, qui s'impose en application d'une décision entrée en force manifestement non arbitraire et non nulle (cf. not. ATF 129 I 139 consid. 4.3.2 ; 125 II 217 consid. 2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_47/2017 du 9 février 2017 consid. 5.2 ; 2C_1178/2016 du 3 janvier 2017 consid. 4.2 ; 2C_105/2016 du 8 mars 2016 consid. 7), pourrait s'avérer impossible, illicite ou non raisonnablement exigible (cf. art. 83 al. 2 à 4 LEI).

Il convient à cet égard de rappeler que, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, la détention d'une personne de nationalité algérienne sur la base de l'art. 76 LEI est compatible avec l'actuelle impossibilité d'organiser des vols spéciaux à destination de l'Algérie, conformément à ce que prévoit l'art. 4 al. 3 et 4 de l'Accord entre le Conseil fédéral de la Confédération suisse et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire sur la circulation des personnes, conclu le 3 juin 2006, approuvé par l'Assemblée fédérale le 22 juin 2007 et entré en vigueur par échange de notes le 26 novembre 2007 (RS 0.142.111.279), puisque, réalisés par l'intermédiaire de vols de ligne, les refoulements sous la contrainte à destination de ce pays sont possibles (cf. arrêts 2C_47/2017 du 9 février 2017 consid. 5.4 ; 6B_106/2016 du 7 décembre 2016 consid. 1.4.1 ; 2C_18/2016 du 2 février 2016 consid. 5.2 ; 2C_1072/2015 du 21 décembre 2015 consid. 3.3 ; 2C_597/2011 du 13 septembre 2011).

En outre, dans les situations où l'exécution du renvoi ou de l'expulsion suppose la collaboration de l'intéressé, le fait que celui-ci déclare par avance qu'il n'entendra pas rentrer dans son pays ni monter dans l'avion ne suffit pas à considérer d'emblée cette possibilité comme exclue. Ainsi, en présence d'un projet concret de renvoi ou d'expulsion organisé par les autorités et qui a été mis en place à la suite de diverses démarches (discussion avec l'ambassade du pays concerné, obtention d'un laissez-passer, préparation et réservation d'un vol), le juge de la détention ne peut en anticiper l'issue et libérer l'intéressé avant le vol au motif que l'exécution de la mesure est impossible au sens de l'art. 80 al. 6 let. a LEI (arrêt du Tribunal fédéral 2C_700/2015 du 8 décembre 2015 consid. 4.3.3).

Dans ces circonstances, l'opposition répétée de l'intéressé à se rendre auprès du consulat d'Algérie en vue de la délivrance du laissez-passer ne saurait entraîner sa mise en liberté.

Enfin, s'agissant des menaces de mort dont il prétend faire l'objet. La vidéo visionnée lors de l'audience n'emporte pas à conviction, étant en particulier relevé que rien ne permet d'en vérifier l'authenticité et partant d'exclure qu'elle n'aurait pas été produite pour les besoins de la cause. Ces menaces qui selon M. A______ émaneraient de membres de sa famille éloignée, lesquels selon ses allégations viendraient également le pourchasser en Suisse, ne permettent en tout état pas de considérer que l'exécution de son expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles (art. 80 al. 6 let. a LEI renvoyant à l'art. 83 al. 1 à 4 LEI).

18.        Au vu de ce qui précède, il y a lieu de confirmer l'ordre de mise en détention administrative de M. A______ pour une durée de quatre mois.

19.        Conformément à l'art. 9 al. 6 LaLEtr, le présent jugement sera communiqué à M. A______, à son avocat et au commissaire de police. En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), il sera en outre communiqué au secrétariat d'État aux migrations.


 

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.             confirme l’ordre de mise en détention administrative pris par le commissaire de police le 27 mai 2024 à 17h25 à l’encontre de Monsieur A______ pour une durée de quatre mois, soit jusqu'au 26 septembre 2024 inclus ;

2.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 10 al. 1 LaLEtr et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les 10 jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

Au nom du Tribunal :

La présidente

Caroline DEL GAUDIO-SIEGRIST

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée à Monsieur A______, à son avocat, au commissaire de police et au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

Le greffier