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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1590/2012

ATA/381/2012 du 13.06.2012 sur JTAPI/692/2012 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1590/2012-MC ATA/381/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 juin 2012

en section

 

dans la cause

 

Monsieur B______
représenté par Me Garance Stackelberg, avocate

contre

OFFICIER DE POLICE

_________


 

Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 25 mai 2012 (JTAPI/692/2012)


EN FAIT

1. Monsieur B______, né le ______ 1974, originaire de Jamaïque, a été condamné le 4 avril 2012 par le Tribunal de police de Genève à une peine privative de liberté de dix-huit mois pour tentative de meurtre.

2. Par décision du 15 mai 2012, exécutoire nonobstant recours, dûment notifiée, l’office cantonal de la population a prononcé le renvoi de Suisse de M. B______. Il était en Suisse sans documents de voyage valables, sans visa ou titre de séjour valables et il présentait une menace pour l’ordre public, la sécurité intérieure ou les relations internationales de la Suisse en raison de sa condamnation pénale. La police était chargée d’exécuter cette décision sans délai.

3. Le 24 mai 2012, M. B______ a été libéré conditionnellement et remis à la police en vue de son refoulement.

4. Le même jour, l’officier de police a ordonné la mise en détention administrative de l’intéressé pour une durée de trois mois. Les démarches en vue de l’obtention d’un titre de voyage permettant le renvoi de M. B______ en Jamaïque étaient en cours et prendraient plusieurs semaines car il avait déclaré que son passeport lui avait été volé. Il faisait l’objet d’une décision de renvoi et avait été condamné pour un crime au sens de l’art. 10 al. 2 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0).

5. Le 25 mai 2012, M. B______ a été entendu par le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI), assisté d’un avocat et en présence d’un interprète en langue anglaise.

Il s’opposait à son retour en Jamaïque, où il n’avait plus de famille et ne connaissait plus personne. Il y risquait la mort.

Sa sœur résidait à Genève et son fils demeurait à New-York. Il s’opposait à sa détention, pouvant être assigné à résidence chez sa sœur.

Le représentant de l’officier de police a confirmé que les démarches en vue de l’identification de M. B______ et l’obtention d’un laissez-passer pouvaient durer plusieurs semaines.

6. Par jugement du 25 mai 2012, le TAPI a confirmé l’ordre de mise en détention de M. B______ jusqu’au 22 août 2012. Il faisait l’objet d’une décision de renvoi exécutoire, avait été condamné pour un crime et les démarches nécessaires à son refoulement vers son pays d’origine étaient en cours. La durée de la détention était conforme au principe de la proportionnalité.

7. Le 4 juin 2012, M. B______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement susmentionné, concluant à son annulation et, subsidiairement, à son assignation à résidence chez sa sœur, reprenant son argumentation antérieure. Son droit d’être entendu avait été violé car le TAPI n’avait pas motivé le refus d’assignation à résidence. Son renvoi en Jamaïque était impossible, car il aurait des conséquences dramatiques pour son avenir, dès lors qu’il n’y connaissait plus personne et aurait peu de chance de trouver un emploi.

8. Le 6 juin 2012, le TAPI a transmis son dossier, sans observations.

9. Le 7 juin 2012, l’officier de police a conclu au rejet du recours. Les conditions de la mise en détention administrative étaient réunies. Le droit d’être entendu de l’intéressé avait été respecté. Le TAPI ayant retenu que seule cette mesure était adéquate, cela excluait toute forme d’assignation à résidence. La durée de la détention était proportionnée et le fait que la situation en Jamaïque lui offrait moins de perspective sur le plan économique et qu’il n’y ait plus d’attaches familiales ne rendaient pas son renvoi impossible. Enfin, le danger de mort qu’il alléguait n’était pas étayé.

EN DROIT

1. Interjeté le 4 juin 2012 contre le jugement du TAPI remis en mains de l’intéressé le 25 mai 2012, le recours, formé en temps utile devant la juridiction compétente, est recevable (art. 132 al. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 10 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10 ; art. 62 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Selon l’art. 10 al. 2 LaLEtr, la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours en question le 5 juin 2012 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

3. La chambre administrative est compétente pour apprécier l’opportunité des décisions portées devant elle (art. 10 al. 2 LaLEtr). Elle peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée ; cas échéant, elle ordonne la mise en liberté de l’étranger (art. 10 al. 3 LaLEtr).

4. Un étranger faisant l’objet d’une décision de renvoi peut être placé en détention administrative en vue de l’exécution de celle-ci s’il a été condamné pour crime (art. 76 al. 1 let. b et 75 al. 1 let. h de loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 - LEtr - RS 142.20).

En l’espèce, le recourant a été condamné pour tentative de meurtre, au sens des art. 22 et 111 CP, soit un crime (art. 10 al. 2 CP). La mesure est ainsi fondée dans son principe.

5. L’autorité administrative doit entreprendre rapidement les démarches permettant l’exécution de la décision de renvoi (art. 76 al. 4 LEtr). La détention administrative doit respecter le principe de la proportionnalité, garanti par l’art. 36 al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101).

Tel est bien le cas en l’espèce. Les autorités ont entrepris les démarches nécessaires à l’obtention des documents de voyage et le recourant n’a pas contredit qu’elles puissent prendre plusieurs semaines. Il a par ailleurs manifesté formellement son opposition à un retour en Jamaïque, seul pays où il peut être renvoyé. Quant à l’assignation à résidence, même s’il avait démontré que sa sœur aurait eu la volonté et la possibilité de l’accueillir et de l’entretenir, cette mesure n’est pas apte à assurer l’exécution du renvoi de l’intéressé qui ne veut pas retourner dans son pays. Le TAPI ayant expliqué pour quels motifs il retenait que la détention administrative était seule adéquate, cela suffit à comprendre pourquoi il n’est pas entré en matière sur l’assignation. Il n’y a pas lieu d’être plus exigeant à cet égard compte tenu du court délai dont il dispose pour statuer.

6. Selon l’art. 80 al 4 LEtr, l’autorité judiciaire qui examine la décision de détention administrative tient compte de la situation familiale de la personne détenue et des conditions d’exécution de la détention. Celle-là doit en particulier être levée lorsque son motif n’existe plus ou si, selon l’art. 80 al. 6 let. a LEtr, l’exécution du renvoi ou de l’expulsion s’avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles, ou qu’elle ne peut être raisonnablement exigée, cette dernière disposition légale renvoyant à l’art. 83 al. 1 à 4 LEtr.

Selon le Tribunal fédéral, tant que l’impossibilité du renvoi dépend de la volonté de l’étranger de collaborer avec les autorités, celui-ci ne peut se prévaloir de l’impossibilité de son renvoi (Arrêt du Tribunal fédéral 2C_639/2011 du 16 septembre 2011). Cette jurisprudence, rendue dans le cadre d’une détention pour insoumission, en rapport avec l’obligation de collaborer de l’art. 78 al. 6 LEtr, est a fortiori valable dans un cas de détention en vue du renvoi, phase à laquelle s’applique l’obligation de collaborer de l’art. 90 al. 1 let. c LEtr (ATA/257/2012 du 2 mai 2012).

De même, le renvoi ne peut être raisonnablement exigé si l’expulsion de l’étranger dans son pays d’origine le met concrètement en danger, par exemple en cas de guerre, de guerre civile ou de violence généralisée, ou de nécessité médicale (art. 83 al. 4 LEtr).

Le recourant prétend être exposé à un risque de mort en cas de retour en Jamaïque. Il n’apporte pas le moindre élément probant à cet égard et le dossier ne révèle aucun indice que tel pourrait être le cas. Il ne démontre pas davantage en quoi son retour dans son pays d’origine aurait des conséquences dramatiques parce qu’il n’y connaît plus personne et aurait peu de chance de trouver un emploi.

7. Le recours sera rejeté. La procédure étant gratuite, aucun émolument ne sera perçu (art. 12 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée au recourant (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 4 juin 2012 par Monsieur B______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 25 mai 2012 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Garance Stackelberg, avocate du recourant, au Tribunal administratif de première instance ainsi qu'à officier de police, à l'office cantonal de la population, à l'office fédéral des migrations, ainsi qu'au centre Frambois LMC, pour information.

Siégeants : M. Thélin président, Mmes Hurni et Junod, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière de juridiction :

 

 

M. Tonossi

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :