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Décisions | Tribunal administratif de première instance

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A/2217/2023

JTAPI/69/2024 du 29.01.2024 ( OCPM ) , REJETE

ATTAQUE

Descripteurs : AUTORISATION DE SÉJOUR;CAS DE RIGUEUR
Normes : LEI.30; OASA.31; LEI.58.al1
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2217/2023

JTAPI/69/2024

 

JUGEMENT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

du 29 janvier 2024

 

dans la cause

 

Monsieur B______, représenté par Me Aurore JEANNERET, avocate, avec élection de domicile

 

contre

OFFICE CANTONAL DE LA POPULATION ET DES MIGRATIONS


EN FAIT

1.             Monsieur B______, né le ______ 1984, est ressortissant du Kosovo.

2.      Par formulaire M du 18 décembre 2018, l'intéressé a déposé une demande de régularisation de ses conditions de séjour auprès de l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) dans lequel il a indiqué être arrivé en Suisse le 11 avril 2013. Il a notamment joint à cette demande :

-          un certificat de travail du 13 septembre 2018 établi par Monsieur D______ à C______, attestant qu'il l'avait engagé, en qualité d'employé agricole temporaire, pour de courtes périodes entre 2013 et 2017, soit 125 heures en 2013, 97 en 2014, 147 en 2015, 130 en 2016 et 19 en 2017 ;

-          une attestation établie par les Transports publics genevois (TPG) le 29 août 2018, indiquant qu’il avait bénéficié d’abonnements mensuels d'avril 2013 à fin décembre 2014, de mars 2015 à novembre 2016, de mars 2017 à septembre 2018 ;

-          une attestation de l'Hospice générale du 27 août 2018 indiquant qu'il n'avait pas perçu d'aide sociale ;

-          un extrait de son registre des poursuites vierge établi le 3 septembre 2018.

3.             Suite à une demande de l'OCPM, M. B______ a fourni des documents complémentaires les 27 août 2019, 28 juillet 2020, 20 avril 2021 et 30 mars 2022, dont notamment :

-          des décomptes de salaire de E______ SÀRL pour les mois de septembre à novembre en 2009, 2010, 2011 et 2012 ainsi qu'un certificat de travail daté du 2 décembre 2012 ;

-          des attestations de l'université populaire albanaise de Genève des 20 juin 2020 et 26 mars 2021 attestant d'un suivi de cours de français intensif A1+ du 24 septembre 2019 au 30 juin 2020 et d'un suivi de cours de français intensif A2 du 31 août 2020 au 25 mars 2021 ;

-          des contrats de travail temporaire avec le domaine F______, en qualité d'employé temporaire viticole, pour une activité durant quatre mois dès le 7 janvier 2020 et dès le 22 février 2021 à raison de 45 heures par semaine ainsi qu'un contrat de travail de durée indéterminée à compter du 1er janvier 2022 ;

4.             Par jugement du Tribunal de police du 6 octobre 2022, entré en force et exécutoire, l'intéressé a été condamné à une peine pécuniaire de 100 jours-amende, à CHF 50.-, avec sursis, délai d'épreuve 3 ans, pour faux dans les titres (art. 251 ch. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0)), séjour illicite et activité lucrative sans autorisation (art. 115 al. 1 let. b et c de la loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI - RS 142.20), tentative de comportement frauduleux à l'égard des autorités (art. 22 al. 1 cum 118 al. 1 LEI) et délit contre la loi fédérale sur l'assurance-maladie (art. 92 al. 1 let. a de la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMal - RS 832.10)).

Il lui était reproché d'avoir, entre le 5 octobre 2015 et le 4 mai 2022, séjourné et travaillé sans droit en Suisse, produit le 17 décembre 2018, à l'appui de sa demande d'autorisation de séjour, de fausses fiches de salaire pour les années 2009 à 2012 comportant des taux de cotisations aux assurances sociales erronées ainsi qu'un faux certificat de travail daté du 2 décembre 2012 prétendument établi par E______ SÀRL et indiqué faussement qu'il avait séjourné et travaillé durant dix ans de manière ininterrompue à Genève dès 2009.

5.             Interrogé sur ces faits le 4 mai 2022 par la police, il a déclaré être arrivé en Suisse le 2 janvier 2009, avoir effectué plusieurs voyages au Kosovo où son père, son frère et ses deux sœurs vivaient depuis lors et être fiancé depuis janvier 2022 à une femme au Kosovo. Il avait déposé seul sa demande de régularisation à l'OCPM et n'avait pas payé quelqu'un pour ce faire. Il n'était pas au courant que les taux de cotisations des fiches de salaire de E______ SÀRL étaient fausses. Il y avait bel et bien travaillé en étant payé de façon régulière.

6.             Par courrier du 18 novembre 2022, l’OCPM a fait part à M. B______ de son intention de refuser de préaviser favorablement son dossier auprès du secrétariat d'État aux migrations (ci-après : SEM) en vue de l’octroi d’une autorisation de séjour en sa faveur et de prononcer son renvoi de Suisse.

Il avait été condamné pénalement pour faux dans les titres et comportement frauduleux à l'égard des autorités, ce qui ne démontrait pas un comportement irréprochable attendu de tout étranger souhaitant obtenir une régularisation de ses conditions de séjour. Il n'avait pas démontré qu'une réintégration dans son pays d'origine aurait de graves conséquences sur sa situation personnelle indépendamment des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place. Son père, ses frères et sœurs et sa fiancée vivaient au Kosovo. Il n'avait pas créé avec la Suisse des attaches à ce point profondes et durables qu'il ne puisse envisager un retour dans son pays d'origine.

Un délai de trente jours lui était accordé pour exercer son droit d’être entendu par écrit.

7.             Dans le délai prolongé, il a exercé son droit le 15 mai 2023, sous la plume de son conseil.

Il était arrivé en Suisse en janvier 2009 et avait toujours travaillé de manière irrégulière dans le secteur du bâtiment depuis lors. Il ne savait pas que les fiches de salaires produites étaient fausses et s'il l'avait su, il ne les aurait jamais produites. Son niveau de français d'alors ne lui avait pas permis de se rendre compte que les fiches qu'on lui avait remises étaient fausses Il avait été condamné mais le juge pénal n'avait pas prononcé son expulsion judiciaire. Il avait toujours travaillé pour subvenir à ses besoins, n'avait jamais contracté la moindre dette ni bénéficié de prestation sociale et payait ses impôts. Il n'avait pas la possibilité de renter dans son pays d'origine vu la situation économique précaire. Son père et son frère étaient dépendants de lui financièrement, ce qu'ils avaient attesté sous serment devant notaire. Il lui arrivait également d'envoyer de l'argent à sa fiancée, à sa belle-sœur et ses neveux pour les aider à subvenir à leurs besoins. Il remplissait les conditions de l'opération Papyrus à l'exception de l'absence de condamnation pénale. Toutefois, il s'agissait d'une seule et unique condamnation pour une faute qui n'était pas lourde au point de nécessiter une condamnation sévère. Il fallait considérer que cette condamnation était une erreur de parcours, quelque peu indépendante de sa volonté compte tenu de son niveau de français à l'époque et de sa précarité sociale.

Il a produit huit attestations de personnes qu'il côtoyait indiquant en substance qu'il était aimable, impliqué, respectueux, de confiance, consciencieux et bienveillant et attestant de ses efforts d'intégration depuis son arrivée en Suisse en 2009.

8.             Par décision du 8 mai 2023, l’OCPM a refusé, notamment pour les motifs qui ressortaient de sa lettre d’intention du 18 novembre 2022, de préaviser favorablement le dossier de M. B______ auprès du SEM, en vue de l’octroi d’une autorisation de séjour, et a prononcé son renvoi, lui impartissant un délai au 31 août 2023 pour quitter la Suisse, ajoutant que le dossier ne faisait pas apparaître que l’exécution de cette mesure ne serait pas possible, serait illicite ou qu’elle ne pourrait pas être raisonnablement exigée.

Pour faire suite à ses observations du 15 mai 2023, il était relevé que le juge ne devait se prononcer sur une expulsion judiciaire que dans le cadre des infractions citées aux art. 66ss CP et que les témoignages fournis ne pouvaient être considérés comme des preuves d'un séjour durable en Suisse.

9.             Par acte du 3 juillet 2023, M. B______, sous la plume de son conseil, a recouru contre la décision précitée, devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le tribunal), concluant principalement à son annulation et à ce que l'OCPM soit invité à préaviser favorablement son dossier au SEM en vue d'une régularisation, subsidiairement à son annulation et à ce que l'OCPM soit invité à lui octroyer une autorisation de séjour avec activité lucrative, le tout sous suite de frais et dépens.

Son droit d'être entendu était violé car la décision querellée datait du 8 mai 2023 alors qu'un délai au 15 mai 2023 lui avait été imparti pour exercer son droit d'être entendu suite à l'intention de refus de l'intimée du 27 février 2023. Il était incontestable que l'autorité avait déjà pris sa décision avant même de recevoir ses observations, lesquelles n'avaient pas été prises en compte s'agissant de la pesée d'intérêts relative à sa condamnation pénale, de la situation du cas d'espèce ou de possibilités de réintégration dans son pays d'origine. Le dossier devait ainsi être renvoyé à l'OCPM pour qu'il instruise correctement son dossier. Au surplus, il a repris les arguments contenus dans son courrier du 15 mai 2023.

10.         Dans ses observations du 30 août 2023, l'OCPM a indiqué que la date de la décision querellée était une erreur de coquille. L'acte contesté reprenait les arguments énoncés dans ses observations du 15 mai 2023, en les invalidant. Il n'y avait donc pas de violation du droit d'être entendu et si par impossible celle-ci devait être constatée, elle pourrait être réparée devant le tribunal.

Les conditions des art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 de l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA - RS 142.201) ainsi que celles relatives à l'opération Papyrus n'étaient pas réalisées. Un séjour en Suisse continu depuis 2009 n'avait pas été démontré. Les abonnements TPG justifiaient une présence depuis 2013. Quant à l'extrait de compte individuel AVS, il faisait état de cotisations pour les années 2020, 2021 et 2022. Partant, il ne pouvait pas se prévaloir d'un séjour continu d'une durée de dix ans au moment du dépôt de sa requête. Il avait été condamné pénalement pour faux dans les titres notamment. Quand bien même il parvenait à prouver un séjour continu de dix ans, cela ne suffirait pas à admettre qu'il se trouve dans un cas d'extrême gravité. S'agissant de son intégration, il n'avait pas acquis de compétences spécifiques ne pouvant être mises à profit dans son pays d'origine. Enfin, ses liens avec la Suisse n'étaient pas si significatifs et importants que son départ vers son pays d'origine représenterait un véritable déracinement et ferait apparaître son renvoi comme totalement disproportionné en le plaçant dans une situation de détresse personnelle insurmontable.

Il a produit son dossier dont plusieurs demandes de visas de retour au Kosovo sollicitées par le recourant, soit le 28 janvier 2019 pour une durée de six semaines, le 27 mai 2019 pour un mois, le 4 décembre 2020 pour un mois, le 5 février 2021 pour un mois en vue de rendre visite à son père malade et précisant que sa mère était décédée quelques mois auparavant et le 3 janvier 2022 pour un mois pour une visite familiale.

11.         Dans sa réplique du 31 octobre 2023, le recourant a relevé que son dossier était complet depuis le 28 juillet 2020, ce qui aurait pu conduire à une décision. Or, il s'était écoulé deux ans avant que l'OCPM se décide finalement de le traiter pour le dénoncer au Ministère public. L'OCPM avait d'ores et déjà rédigé sa décision le 8 mai 2023, laquelle consistait en une simple adaptation de son intention de refus. Une telle attitude était inacceptable. Ses explications et moyens de preuves qu'il avait fourni dans ses observations du 15 mai 2023, soit les nombreux témoignages, auraient pu et dû attirer l'attention de l'OCPM. En raison de la maxime inquisitoire, il ne pouvait pas se contenter de les écarter purement et simplement en indiquant qu'ils ne sauraient être des preuves suffisamment probantes. Il avait indiqué que chacun des témoins était prêt à venir confirmer le contenu de leurs attestations par-devant l'autorité administrative. Ainsi, le dossier devait être renvoyé à l'OCPM. Au surplus, il se référait aux explications contenues dans son recours et persistait dans ses conclusions.

12.         Par duplique du 27 novembre 2023, l'OCPM n'a pas déposé d'observations complémentaires.

EN DROIT

1.             Le Tribunal administratif de première instance connaît des recours dirigés, comme en l’espèce, contre les décisions de l'OCPM relatives au statut d'étrangers dans le canton de Genève (art. 115 al. 1 et 116 al. 1 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 3 al. 1 de la loi d'application de la loi fédérale sur les étrangers du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10).

2.             Interjeté en temps utile et dans les formes prescrites devant la juridiction compétente, le recours est recevable au sens des art. 60 et 62 à 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

3.             Selon l’art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit, y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). En revanche, les juridictions administratives n’ont pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l’espèce.

4.             Il y a en particulier abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou lorsqu'elle viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 143 III 140 consid. 4.1.3 ; 140 I 257 consid. 6.3.1 ; 137 V 71 consid. 5.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_763/2017 du 30 octobre 2018 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, n. 515 p. 179).

5.             Saisi d’un recours, le tribunal applique le droit d’office. Il ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, mais n’est lié ni par les motifs invoqués par celles-ci (art. 69 al. 1 LPA), ni par leur argumentation juridique (cf. ATA/386/2018 du 24 avril 2018 consid. 1b ; ATA/117/2016 du 9 février 2016 consid. 2 ; ATA/723/2015 du 14 juillet 2015 consid. 4a).

6.             À titre préalable, il convient de traiter la conclusion subsidiaire du recourant requérant la délivrance d’une autorisation de séjour pour activité lucrative.

7.             L'objet du litige est principalement défini par l'objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions de la recourante ou du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu'elle ou il invoque. L'objet du litige correspond objectivement à l'objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/85/2022 du 1er février 2022 consid. 3a).

8.             En vertu du principe de l’unité de la procédure, la contestation ne peut excéder l’objet de la décision attaquée, c’est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l’autorité inférieure s’est prononcée ou aurait dû se prononcer. L’objet d’une procédure administrative ne peut donc pas s’étendre ou qualitativement se modifier au fil des instances, mais peut tout au plus se réduire, dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés. Ainsi, si un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions traitées dans la procédure antérieure (ATA/85/2022 du 1er février 2022 consid. 3a ; ATA/376/ 2016 du 3 mai 2016 consid. 2b et les références citées).

9.             Tout étranger qui désire séjourner en Suisse en vue d’y exercer une activité lucrative doit être titulaire d’une autorisation, quelle que soit la durée de son séjour (art. 11 al. 1 LEI). En cas d’activité salariée, la demande doit être déposée par l’employeur auprès de l’autorité compétente du lieu de travail envisagé (art. 11 al. 1 et 3 LEI). Lorsqu’un étranger ne possède pas de droit à l’exercice d’une activité lucrative, une décision cantonale préalable concernant le marché du travail est nécessaire pour l’admettre en vue de l’exercice d’une activité lucrative (art. 40 al. 2 LEI).

10.         À Genève, en vertu de l’art. 6 du règlement d’application de la loi fédérale sur les étrangers du 9 mars 2009 (RaLEtr - F 2 10.01), dans les cas prévus par la LEI et l’ordonnance, l’OCPM requiert la décision préalable de l’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT) (al. 3) qui rend la décision préalable en matière de marché du travail, après consultation de la commission tripartite pour l’économie (al. 4), laquelle lie l’OCPM, qui peut néanmoins refuser l’autorisation si des considérations autres que celles qui ont trait à la situation de l’économie ou du marché du travail l’exigent (al. 6).

11.         En l'occurrence, l’objet du litige est circonscrit à la contestation de la décision de l'OCPM du 8 mai 2023 adressée au recourant, refusant de préaviser favorablement son dossier auprès du SEM en vue de l’octroi d’une autorisation de séjour et prononçant son renvoi de Suisse et non sur l’octroi d’une autorisation de séjour avec activité lucrative, qui ne relève pas du domaine de compétence de l'OCPM, mais de celui de l’OCIRT.

12.         Dès lors, la conclusion subsidiaire tendant à ce que l'OCPM soit invité à délivrer au recourant une autorisation de séjour avec activité lucrative sera déclarée irrecevable puisqu’elle porte sur une question qui ne fait pas l’objet du litige.

13.         Le recourant se plaint tout d'abord de la violation de son droit d’être entendu, notamment pour défaut de motivation de la décision.

14.         Le droit d'être entendu (art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst - RS 101) est une garantie de nature formelle, dont la violation entraîne, lorsque sa réparation par l'autorité de recours n'est pas possible, l'annulation de la décision attaquée sans égard aux chances de succès du recours sur le fond (ATF 137 I 195 consid. 2.2 ; 133 III 235 consid. 5.3; arrêt du Tribunal fédéral 5A_825/2012 du 17 avril 2013 consid. 3.1). Ce moyen doit dès lors être examiné en premier lieu (ATF 137 I 195 consid. 2.2).

15.         Il comprend notamment le droit, pour l'intéressé, de s'exprimer sur les éléments pertinents avant qu'une décision ne soit prise touchant sa situation juridique, d'avoir accès au dossier, de produire des preuves pertinentes, d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, de participer à l'administration des preuves essentielles ou, à tout le moins, de s'exprimer sur son résultat, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 142 II 218 consid. 2.3 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités). Toutefois, ce droit ne peut être exercé que sur les éléments qui sont déterminants pour décider de l'issue du litige. Il est ainsi possible de renoncer à l'administration de certaines preuves offertes, lorsque le fait dont les parties veulent rapporter l'authenticité n'est pas important pour la solution du cas, lorsque les preuves résultent déjà de constatations versées au dossier ou lorsque le juge parvient à la conclusion qu'elles ne sont pas décisives pour la solution du litige ou qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1 et les arrêts cités ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_576/2021 du 1er avril 2021 consid. 3.1).

16.         Il implique notamment, pour l’autorité, l’obligation de motiver sa décision (ATF 143 III 65 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_478/2017 du 8 mai 2018 consid. 2.1). L’art. 46 al. 1 LPA fait de plus obligation aux autorités administratives de rendre des décisions motivées.

17.         Selon une jurisprudence constante, l’obligation de motiver n’impose pas à l’autorité d’exposer et de discuter tous les faits, moyens de preuves et griefs invoqués par les parties (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_298/2017 du 30 avril 2018 consid. 2.1). Il suffit, au regard de ce droit, qu’elle mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l’ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que les intéressés puissent se rendre compte de la portée de celle-ci et la déférer à l’instance supérieure en connaissance de cause (ATF 143 III 65 consid. 5.2). La portée de l’obligation de motiver dépend des circonstances concrètes, telles que la nature de la procédure, la complexité des questions de fait ou de droit, ainsi que la gravité de l’atteinte portée à la situation juridique des parties. Dès lors que l’on peut discerner les motifs qui ont guidé la décision de l’autorité, le droit à une décision motivée est respecté, même si la motivation présentée est erronée. En outre, la motivation peut être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 IV consid. 3.2.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_415/2019 du 27 mars 2020 consid. 2.1). Il n’y a ainsi violation du droit d’être entendu que si l’autorité ne satisfait pas à son devoir minimum d’examiner les problèmes pertinents (ATF 134 I 83 consid. 4.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_56/2015 du 13 mai 2015 consid. 2.1).

18.         Il ressort toutefois de la jurisprudence du Tribunal fédéral que la violation du droit d’être entendu peut être réparée dans le cadre de la procédure de recours lorsque l’autorité de recours exerce le même pouvoir d’examen que l’autorité de décision (ATF 129 II 129 c. 2.2.3 p. 135, JdT 2005 IV 300; ATF 126 I 68 c. 2 p. 72, RDAF 2001 I 586; ATF 124 II 132 c. 2d p. 138; Albertini, op. cit., p. 461). La réparation du vice doit toutefois demeurer exceptionnelle, en particulier lorsqu’il s’agit d’une violation grave, surtout parce que l’exercice différé du droit d’être entendu ne constitue le plus souvent qu’un succédané imparfait de l’audition préalable qui a été omise (ATE 116 V 182 c. 3c p. 187; ATE 105 la 193 c. 2b/cc p. 197). En outre, elle n’entre en considération que si la personne touchée ne subit aucun préjudice dans l’exercice différé du droit d’être entendu et dans la réparation du vice. Il ne serait en aucun cas admissible que l’autorité parvienne, par le biais d’une violation du droit d’être entendu, à un résultat qu’elle n’aurait jamais obtenu en procédant de manière correcte (ATF 129 I 129 c. 2.2.3 p. 135, JdT 2005 IV 300).

19.         En l'espèce, l'OCPM a indiqué que la date de la décision attaquée relevait de l'erreur de plume. Dont acte. Quand bien même il aurait rédigé un projet de décision à cette date, il n'en demeure pas moins qu'il s'est appuyé sur les déterminations du recourant du 15 mai 2023 pour rendre la décision querellée. On en veut pour preuve qu'il a pris en compte ses arguments s'agissant de l'expulsion pénale dont il n'a pas fait l'objet et des témoignages recueillis. Au surplus, la décision litigieuse indique distinctement la position de l'OCPM, soit qu'il ne lui est pas possible de rendre une décision favorable, les conditions du cas de rigueur et de l'opération Papyrus n'étant pas réalisées. Les arguments présentés par le recourant ont été discutés pour être infirmés. Par conséquent, le tribunal constate que la décision attaquée, qui mentionne les bases légales topiques applicables ainsi que les motifs de refus, est claire. Le recourant a ainsi été en mesure de comprendre le sens et la portée de cette décision. Il a d’ailleurs exposé en détail dans son recours les raisons qui commandaient, à son sens, l'octroi d'une autorisation de séjour. En tout état, les échanges auxquels les parties ont pu procéder dans la présente procédure ont largement permis à chacune d'elles d’exprimer clairement sa position, de sorte qu'une éventuelle violation du droit d'être entendu pour les motifs évoqués plus haut serait en tout état réparée.

20.         Ce grief d'ordre formel doit donc être écarté.

21.         Sur le fond, le recourant soutient qu'il remplit les conditions du cas de rigueur, y compris sous l'angle de l'opération Papyrus.

22.         La loi LEI et ses ordonnances d'exécution, en particulier l'OASA, règlent l'entrée, le séjour et la sortie des étrangers dont le statut juridique n'est pas réglé par d'autres dispositions du droit fédéral ou par des traités internationaux conclus par la Suisse (art. 1 et 2 LEI), ce qui est le cas en l'espèce.

23.         Selon l'art. 30 al. 1 let. b LEI, il est possible de déroger aux conditions d'admission d'un étranger en Suisse pour tenir compte d'un cas individuel d'extrême gravité.

24.         L'art. 31 al. 1 OASA prévoit que pour apprécier l'existence d'une telle situation, il convient de tenir compte, notamment, de l'intégration du requérant sur la base des critères d'intégration définis à l'art. 58a al. 1 LEI (let. a), de la situation familiale, particulièrement de la période de scolarisation et de la durée de la scolarité des enfants (let. c), de la situation financière (let. d), de la durée de la présence en Suisse (let. e), de l'état de santé (let. f), ainsi que des possibilités de réintégration dans l'État de provenance (let. g).

25.         Ces critères, qui doivent impérativement être respectés, ne sont toutefois pas exhaustifs (cf. ATF 137 II 345 consid. 3.2.3 ; 137 II 1 consid. 1 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3986/2015 du 22 mai 2017 consid. 9.3 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017), d'autres éléments pouvant également entrer en considération, comme les circonstances concrètes ayant amené un étranger à séjourner illégalement en Suisse (cf. ATA/1669/2019 du 12 novembre 2019 consid. 7b).

26.         Les dispositions dérogatoires des art. 30 LEI et 31 OASA présentent un caractère exceptionnel, de sorte que les conditions pour la reconnaissance de la situation qu'ils visent doivent être appréciées de manière restrictive et ne confèrent pas un droit à l'obtention d'une autorisation de séjour (ATF 138 II 393 consid. 3.1 ; 137 II 345 consid. 3.2.1 ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 7c ; ATA/895/2018 du 4  septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1020/2017 du 27 juin 2017 consid. 5b ; cf. aussi arrêts du Tribunal fédéral 2C_602/2019 du 25 juin 2019 consid. 3.3 ; 2C_222/2017 du 29 novembre 2017 consid. 1.1). L'autorité doit néanmoins procéder à l'examen de l'ensemble des circonstances du cas d'espèce pour déterminer l'existence d'un cas de rigueur (cf. ATF 128 II 200 consid. 4 ; 124 II 110 consid. 2 ; ATA/121/2021 du 2 février 2021 consid. 7c ; ATA/38/2019 du 15 janvier 2019 consid. 4c).

27.         Selon l'art. 58a al. 1 LEI, les critères d'intégration sont le respect de la sécurité et de l'ordre publics (let. a), le respect des valeurs de la Constitution (let. b), les compétences linguistiques (let. c), ainsi que la participation à la vie économique ou l'acquisition d'une formation (let. d).

28.         L'art. 30 al. 1 let. b LEI n'a pas pour but de soustraire le requérant aux conditions de vie de son pays d'origine, mais implique qu'il se trouve personnellement dans une situation si grave qu'on ne peut exiger de sa part qu'il tente de se réadapter à son existence passée. Des circonstances générales affectant l'ensemble de la population restée sur place, en lien avec la situation économique, sociale, sanitaire ou scolaire du pays en question, et auxquelles le requérant serait également exposé à son retour ne sauraient davantage être prises en considération, tout comme des données à caractère structurel et général, telles que les difficultés d'une femme seule dans une société donnée (ATF 123 II 125 consid. 5b/dd ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.245/2004 du 13 juillet 2004 consid. 4.2.1). Au contraire, dans la procédure d'exemption des mesures de limitation, seules des raisons exclusivement humanitaires sont déterminantes, ce qui n'exclut toutefois pas de prendre en compte les difficultés rencontrées par le requérant à son retour dans son pays d'un point de vue personnel, familial et économique (ATF 123 II 125 consid. 3 ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1131/2017 du 2 août 2017 consid. 5e).

29.         La reconnaissance de l'existence d'un cas individuel d'extrême gravité implique que les conditions de vie et d'existence de l'étranger doivent être mises en cause de manière accrue en comparaison avec celles applicables à la moyenne des étrangers. En d'autres termes, le refus de le soustraire à la réglementation ordinaire en matière d'admission doit comporter à son endroit de graves conséquences. Le fait que l'étranger ait séjourné en Suisse pendant une assez longue période, qu'il y soit bien intégré, tant socialement et professionnellement, et que son comportement n'ait pas fait l'objet de plaintes ne suffit pas, à lui seul, à constituer un cas d'extrême gravité. Encore faut-il que sa relation avec la Suisse soit si étroite que l'on ne puisse exiger qu'il vive dans un autre pays, notamment celui dont il est originaire. À cet égard, les relations de travail, d'amitié ou de voisinage qu'il a pu nouer pendant son séjour ne constituent normalement pas des liens si étroits avec la Suisse qu'ils justifieraient une exception (ATF 130 II 39 consid. 3 ; 124 II 110 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C 754/2018 du 28 janvier 2019 consid. 7.2 ; 2A 718/2006 du 21 mars 2007 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral C-6956/2014 du 17 juillet 2015 consid. 6.1 ; C_5414/2013 du 30 juin 2015 consid. 5.1.3 ; C_6726/2013 du 24 juillet 2014 consid. 5.3 ; ATA/181/2019 du 26 février 2019 consid. 13d ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8).

30.         Parmi les éléments déterminants pour la reconnaissance d'une telle situation, il convient en particulier de citer la très longue durée du séjour en Suisse, une intégration sociale particulièrement poussée, une réussite professionnelle remarquable, une maladie grave ne pouvant être traitée qu'en Suisse et la situation des enfants, notamment une bonne intégration scolaire aboutissant après plusieurs années à une fin d'études couronnée de succès. Constituent en revanche des facteurs allant dans un sens opposé le fait que la personne concernée n'arrive pas à subsister de manière indépendante et doive recourir aux prestations de l'aide sociale ou des liens conservés avec le pays d'origine, par exemple sur le plan familial, susceptibles de faciliter sa réintégration (arrêt du Tribunal fédéral 2A.543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-2584/2019 du 11 décembre 2019 consid. 5.3 ; F-6510/2017 du 6 juin 2019 consid. 5.6 ; F-736/2017 du 18 février 2019 consid. 5.6 et les références citées ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1130/2017 du 2 août 2017 consid. 5b).

31.         La question est ainsi de savoir si, en cas de retour dans le pays d’origine, les conditions de la réintégration sociale, au regard de la situation personnelle, professionnelle et familiale de l’intéressé, seraient gravement compromises (arrêt du Tribunal fédéral 2C_621/2015 du 11 décembre 2015 consid. 5.2.1 ; ATA/577/2021 du 1er juin 2021 consid. 2c).

32.         Bien que la durée du séjour en Suisse constitue un critère important lors de l'examen d'un cas d'extrême gravité, elle doit être examinée à la lumière de l'ensemble des circonstances et être relativisée lorsque l'étranger a séjourné en Suisse de manière illégale, sous peine de récompenser l'obstination à violer la loi (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal fédéral 2D_13/2016 du 11 mars 2016 consid. 3.2 ; 2A.166/2001 du 21 juin 2001 consid. 2b/bb ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-912/2015 du 23 novembre 2015 consid. 4.3.2 ; ATA/895/2018 du 4 septembre 2018 consid. 8 ; ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; ATA/465/2017 du 25 avril 2017 ; ATA/287/2016 du 5 avril 2016). La durée du séjour (légal ou non) est ainsi un critère nécessaire, mais pas suffisant, à lui seul, pour la reconnaissance d'un cas de rigueur. La jurisprudence requiert, de manière générale, une très longue durée (ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, Code annoté de droit des migrations, vol. II : LEtr, 2017, p. 269 et les références citées). A été considérée comme une durée assez brève la présence de deux ans et demi, entre 2006 et 2008, puis de trois ans, entre mai 2009 et mai 2012 (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5048/2010 du 7 mai 2012 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269). Par durée assez longue, la jurisprudence entend une période de sept à huit ans (arrêt du Tribunal administratif fédéral C-7330/2010 du 19 mars 2012 ; ATA/667/2021 du 29 juin 2021 consid. 6c ; ATA/1306/2020 du 15 décembre 2020 consid. 5b ; ATA/1538/2017 du 28  novembre 2017 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269). Le caractère continu ou non du séjour peut avoir une influence (ATA/847/2021 du 24  août 2021 consid. 7f ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-5048/2010 du 7 mai 2012 ; Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 269). Le Tribunal fédéral a considéré que l'on ne saurait inclure dans la notion de séjour légal les périodes où la présence de l'intéressé est seulement tolérée en Suisse et qu'après la révocation de l'autorisation de séjour, la procédure de recours engagée n'emporte pas non plus une telle conséquence sur le séjour (cf. arrêt 2C_926/2010 du 21 juillet 2011 ; cf. aussi ATA/1538/2017 du 28 novembre 2017 ; cf. Minh Son NGUYEN/Cesla AMARELLE, op. cit., p. 270).

33.         Ainsi, le simple fait, pour un étranger, de séjourner en Suisse pendant de longues années, y compris à titre légal, ne permet pas d'admettre un cas personnel d'extrême gravité sans que n'existent d'autres circonstances tout à fait exceptionnelles (cf.  ATAF 2007/16 consid. 7 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral E-643/2016 du 24 juillet 2017 consid. 5.1 et les références citées ; cf. ég., sous l'ancien droit, ATF 124 II 110 consid. 3 ; arrêt du Tribunal fédéral 2A.540/2005 du 11 novembre 2005 consid. 3.2.1).

34.         Enfin, en règle générale, la durée du séjour illégal en Suisse ne peut être prise en considération dans l'examen d'un cas d'extrême gravité, car, si tel était le cas, l'obstination à violer la législation serait en quelque sorte récompensée (ATAF C-6051/2008 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral C-6098/2008 du 9 juillet 2010 consid. 6.4 ; ATA/188/2016 du 1er mars 2016 consid. 10 ; ATA/80/2016 du 26  janvier 2016 consid. 5g et les références citées).

35.         L'intégration professionnelle de l'intéressé doit revêtir un caractère exceptionnel au point de justifier, à elle seule, l'octroi d'une autorisation de séjour en dérogation aux conditions d'admission. Le requérant doit posséder des connaissances professionnelles si spécifiques qu'il ne pourrait les utiliser dans son pays d'origine ou doit avoir réalisé une ascension professionnelle remarquable, circonstances susceptibles de justifier à certaines conditions l'octroi d'un permis humanitaire (arrêt du Tribunal fédéral 2A543/2001 du 25 avril 2002 consid. 5.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.4 et les références citées ; ATA/775/2018 du 24 juillet 2018 consid. 4d ; ATA/882/2014 du 11  novembre 2014 consid. 6d et les arrêts cités). À titre d'exemple, le Tribunal fédéral a notamment retenu en faveur d'un étranger installé depuis plus de onze ans en Suisse qu'il y avait développé des liens particulièrement intenses dans les domaines professionnel (création d'une société à responsabilité limitée, emploi à la délégation permanente de l'Union africaine auprès de l'ONU) et social (cumul de diverses charges auprès de l'Eglise catholique) (arrêt 2C_457/2014 du 3 juin 2014 consid. 4 et les références citées).

36.         Il est parfaitement normal qu'une personne, ayant effectué un séjour prolongé dans un pays tiers, s'y soit créé des attaches, se soit familiarisée avec le mode de vie de ce pays et maîtrise au moins l'une des langues nationales. Aussi, les relations d'amitié ou de voisinage, de même que les relations de travail que l'étranger a nouées durant son séjour sur le territoire helvétique, si elles sont certes prises en considération, ne sauraient constituer des éléments déterminants pour la reconnaissance d'une situation d'extrême gravité (ATF 130 II 39 consid. 3 ; arrêts du Tribunal administratif fédéral F-3298/2017 du 12 mars 2019 consid. 7.3 ; F-1714/2016 du 24 février 2017 consid. 5.3 ; C-7467/2014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine).

37.         L'intégration socio-culturelle n'est donc en principe pas susceptible de justifier à elle seule l'octroi d'une autorisation de séjour pour cas de rigueur. Néanmoins, cet aspect peut revêtir une importance dans la pesée générale des intérêts (cf. not. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-541/2015 du 5 octobre 2015 consid. 7.3 et 7.6 ; C-384/2013 du 15 juillet 2015 consid. 6.2 et 7 ; Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10), les lettres de soutien, la participation à des associations locales ou l'engagement bénévole pouvant représenter des éléments en faveur d'une intégration réussie, voire remarquable (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral C-74672014 du 19 février 2016 consid. 6.2.3 in fine ; C-2379/2013 du 14 décembre 2015 consid. 9.2 ; C-5235/2013 du 10 décembre 2015 consid. 8.3 in fine ; cf. aussi Actualité du droit des étrangers, 2016, vol. I, p. 10).

38.         L'opération « Papyrus » développée par le canton de Genève a visé à régulariser la situation des personnes non ressortissantes de l’UE/AELE bien intégrées et répondant à différents critères, à savoir, selon le livret intitulé « Régulariser mon statut de séjour dans le cadre de Papyrus » disponible sous https://www.ge.ch/regulariser-mon-statut-sejour-cadre-papyrus/criteres-respecter), avoir un emploi ; être indépendant financièrement ; ne pas avoir de dettes ; avoir séjourné à Genève de manière continue sans papiers pendant cinq ans minimum (pour les familles avec enfants scolarisés) ou dix ans minimum pour les autres catégories, à savoir les couples sans enfants et les célibataires ; faire preuve d'une intégration réussie ; absence de condamnation pénale (autre que séjour illégal).

39.         L'opération « Papyrus » a pris fin le 31 décembre 2018.

40.         Au vu des spécificités de l'opération « Papyrus », qui était limitée dans le temps, il se justifie d'en restreindre l'application aux personnes étrangères qui en remplissaient la condition temporelle au moment où ce programme était encore en cours (arrêts F-4206/2021 du 24 novembre 2022 consid. 6.3 ; F-2114/2020, F-2118/2020 du 5 juillet 2021 consid. 8.5 et 8.6).

41.         Il convient de préciser que les critères appliqués dans le cadre de l’opération « Papyrus » étaient les critères prévus dans les dispositions légales en matière de régularisation des cas de rigueur (ATA/847/2021 du 24 août 2021 consid. 10b).

42.         En l’espèce, au vu de tous les éléments au dossier, force est de constater que l'OCPM n'a pas mésusé de son pouvoir d'appréciation en considérant que le recourant ne satisfaisait pas aux conditions strictes requises par les art. 30 al. 1 let. b LEI et 31 OASA pour la reconnaissance d'un cas de rigueur, y compris sous l'angle particulier de l'opération « Papyrus ».

43.         Sur la base des pièces que le recourant a produites, l’on ne peut admettre qu’il séjourne en Suisse de manière continue que depuis février 2013 (cf. attestation TPG), sa présence lors des années antérieures n’étant établie que pour quelques mois par année. Entre octobre 2018 et le 24 septembre 2019 (cf. attestation TPG et de suivi de cours de français), le recourant n'a pas apporté la preuve de son séjour en Suisse. Il a toutefois déposé deux demandes de visa de retour durant cette période. Les témoignages produits ne permettent pas de retenir un séjour ininterrompu avant février 2013. Ils attestent uniquement de la présence épisodique du recourant à Genève, ces personnes ne pouvant témoigner qu'il s'y trouvait que lorsqu'ils le rencontraient. Dès lors, et sous l'angle de l'opération « Papyrus », le recourant ne remplissait pas la condition de dix ans de séjour continu à Genève lorsqu'il a déposé sa demande de régularisation le 18 décembre 2018.

44.         Dans l'hypothèse qui lui est la plus favorable et sans tenir compte de la période d'octobre 2018 au 24 septembre 2019 pour laquelle il ne dispose pas de preuve de son séjour en Suisse, il se trouve en Suisse depuis dix ans, ce qui constitue une longue durée au sens de la jurisprudence précitée. Cela étant, le seul fait de séjourner en Suisse pendant plusieurs années - même à titre légal - n'est pas suffisant sans que n'existent d'autres circonstances tout à fait exceptionnelles, lesquelles font ici manifestement défaut.

45.         En effet, le recourant ne peut pas se prévaloir d’une intégration socio-professionnelle exceptionnelle. L’emploi qu’il exerce ne témoigne pas d’une ascension professionnelle remarquable et il n’a pas acquis des qualifications spécifiques susceptibles de justifier l'admission d'un cas de rigueur au sens de l'art. 30 al. 1 let. b LEI. Il convient en outre de rappeler que le fait de travailler pour ne pas dépendre de l'aide sociale, ne pas avoir contracté de dettes, payer ses impôts et s'efforcer d'apprendre au moins la langue nationale parlée au lieu du domicile constitue un comportement ordinaire qui peut être attendu de tout étranger souhaitant obtenir la régularisation de ses conditions de séjour. Il ne s'agit pas de circonstances exceptionnelles permettant à elles seules de retenir l'existence d'une intégration particulièrement marquée susceptible de justifier la reconnaissance d'un cas de rigueur. Il ne peut pas non plus se prévaloir d’un comportement irréprochable, compte tenu de sa condamnation pénale dont il n'y a pas lieu de s'écarter.

46.         Sur le plan social, il ne ressort pas du dossier qu’il aurait noué des liens forts avec la Suisse. Il a passé non seulement toute son enfance au Kosovo, mais également son adolescence et le début de sa vie d’adulte, périodes déterminantes pour le développement personnel et scolaire, et qui entraînent souvent une intégration accrue dans un milieu déterminé (cf. ATF 123 II 125 consid. 4b ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_75/2011 du 6 avril 2011 consid. 3.4 ; ATA/203/2018 du 6 mars 2018 consid. 9a). Il y a d'ailleurs conservé des fortes attaches familiales, notamment sa fiancée, son père, ses trois frères et sœurs et ses neveux qu'il visite régulièrement.

47.         S'il se heurtera sans doute à des difficultés de réadaptation dans son pays d'origine, il ne démontre pas que celles-ci seraient plus graves pour lui que pour n'importe lequel de ses concitoyens qui se trouverait dans une situation similaire. En outre, il ne faut pas perdre de vue que celui qui place l'autorité devant le fait accompli doit s'attendre à ce que celle-ci se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit que d'éviter les inconvénients qui en découlent pour lui (cf. ATF 123 II 248 consid. 4a ; 111 Ibb 213 consid. 6b ; arrêts du Tribunal fédéral 1C_33/2014 du 18 septembre 2014 consid. 4.1 ; 1C_269/2013 du 10 décembre 2013 consid. 4.1 et les références citées). Ainsi, il ne pouvait ignorer, au vu de son statut illicite en Suisse, qu'il pourrait à tout moment être amené à devoir renoncer, en cas de refus de la régularisation de ses conditions de séjour, à tout ce qu’il avait mis en place en Suisse, y compris à son activité professionnelle.

48.         Pour le surplus, les difficultés d'ordre général qu'il pourrait rencontrer au Kosovo, afin notamment de retrouver un emploi, ne sauraient constituer une situation rigoureuse au sens de la jurisprudence précitée. À cet égard, rien n'indique d'ailleurs que l'expérience professionnelle qu'il a acquise en Suisse ne pourrait pas constituer un atout susceptible de favoriser sa réintégration sur le marché de l'emploi dans son pays d'origine. Le fait qu'il entretienne son père et son frère restés au Kosovo et expédie de l'argent à ses neveux et sa fiancée ne peut pas être pris en compte dans l'examen du cas de rigueur. Seule la situation du recourant lui-même doit être évaluée.

49.         Partant, ni l'âge du recourant, ni la durée de son séjour sur le territoire, ni son comportement, ni encore les inconvénients d'ordre socio-professionnel auxquels il pourrait éventuellement être confrontés dans son pays ne constituent des circonstances si singulières qu'il faudrait considérer qu'il se trouve dans une situation de détresse personnelle devant justifier l'octroi d'une exception aux mesures de limitation. Une telle exception n'a pas pour but de soustraire des étrangers aux conditions de vie de leur pays d'origine, mais implique que ceux-ci se trouvent personnellement dans une situation si rigoureuse qu'on ne saurait exiger d'eux qu'ils tentent de se réadapter à leur existence passée, ce que le recourant n'a pas établi.

50.         Il ressort de ce qui précède que l'OCPM n'a violé ni le droit conventionnel, ni le droit fédéral, ni encore excédé ou abusé de son pouvoir d'appréciation (art. 96 LEI) en refusant de délivrer l'autorisation de séjour sollicitée.

51.         Selon l'art. 64 al. 1 let. c LEI, les autorités compétentes rendent une décision de renvoi ordinaire à l'encontre d'un étranger auquel une autorisation est refusée ou dont l'autorisation, bien que requise, est révoquée ou n'est pas prolongée après un séjour autorisé.

52.         Le renvoi constitue la conséquence logique et inéluctable du rejet d'une demande tendant à la délivrance ou la prolongation d'une autorisation de séjour, l'autorité ne disposant à ce titre d'aucun pouvoir d'appréciation (ATA/1118/2020 du 10  novembre 2020 consid. 11a).

53.         Le recourant n'obtenant pas d'autorisation de séjour, c'est à bon droit que l'autorité intimée a prononcé son renvoi de Suisse. Il n'apparaît en outre pas que l'exécution de son renvoi ne serait pas possible, serait illicite ou qu'elle ne pourrait être raisonnablement exigée (art. 83 LEI).

54.         Infondé, le recours sera rejeté et la décision contestée confirmée.

55.         En application des art. 87 al. 1 LPA et 1 et 2 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 (RFPA - E 5 10.03), le recourant qui succombe est condamné au paiement d’un émolument s'élevant à CHF 500.- ; il est couvert par l’avance de frais versée.

56.         Vu l’issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

57.         En vertu des art. 89 al. 2 et 111 al. 2 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent jugement sera communiqué au SEM.


PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE PREMIÈRE INSTANCE

1.      déclare recevable le recours interjeté le 3 juillet 2023 par Monsieur B______ contre la décision de l’office cantonal de la population et des migrations du 8 mai 2023 ;

2.             le rejette ;

3.             met à la charge du recourant, un émolument de CHF 500.-, lequel est couvert par l'avance de frais ;

4.             dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

5.             dit que, conformément aux art. 132 LOJ, 62 al. 1 let. a et 65 LPA, le présent jugement est susceptible de faire l'objet d'un recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (10 rue de Saint-Léger, case postale 1956, 1211 Genève 1) dans les trente jours à compter de sa notification. L'acte de recours doit être dûment motivé et contenir, sous peine d'irrecevabilité, la désignation du jugement attaqué et les conclusions du recourant. Il doit être accompagné du présent jugement et des autres pièces dont dispose le recourant.

 

Au nom du Tribunal :

La présidente

Gwénaëlle GATTONI

 

Copie conforme de ce jugement est communiquée aux parties, ainsi qu’au secrétariat d'État aux migrations.

Genève, le

 

La greffière